M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je comprends votre volonté, dans cette proposition de loi, de marquer les esprits avec différents amendements. Nous aurons, je le crains, des difficultés à obtenir un vote conforme de l’Assemblée nationale.
Je le redis, l’esprit de la proposition de loi était d’être efficace, en particulier sur les problématiques de la Clairette de Die qui avaient été exprimées par différents collègues à l’origine de cette proposition de loi.
Je comprends bien votre volonté de marquer de nouveau les esprits, sauf que la proposition de loi ne sera pas votée conforme – j’en donne ma main à couper ! Elle ira donc à l’Assemblée nationale où elle sera examinée dans le cadre d’une niche. Elle reviendra ici, puis elle repartira au Palais-Bourbon, toujours dans le cadre d’une niche. Je pense que, avant le vote de la proposition de loi, ce qui était prévu sera déjà en place.
Tout en comprenant votre volonté de marquer les esprits, il me semble qu’il serait quelquefois bon de jouer l’efficacité…
M. le président. Monsieur Luche, l’amendement n° 29 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Luche. Madame la présidente Primas, j’entends vos propos. On peut les partager, mais c’est finalement un amendement qui ne coûte rien et qui peut rapporter gros ! (Sourires.) Nous verrons bien si la décision déjà prise depuis 2018 sera mise en application avant avril 2020. Je pense que nous ne prenons absolument aucun risque à voter ma proposition !
Je reviens à ce qui a été dit : nous nous devons d’imposer une véritable transparence pour le consommateur qui, aujourd’hui, est totalement perturbé.
Mme Sylvie Goy-Chavent. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 29 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 412-7. – La mention de la provenance du vin est indiquée en évidence sur l’étiquetage de manière à ne pas induire en erreur le consommateur quant au pays d’origine du produit, d’une manière quelconque, y compris en raison de la présentation générale de l’étiquette.
« Le non-respect des dispositions du premier alinéa est notamment apprécié au regard du nom et de l’imagerie utilisés sur le contenant. »
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l’article.
M. Roland Courteau. Cette prise de parole sur l’article vaut présentation de l’amendement n° 27 rectifié. Nous souhaitons en effet proposer un compromis à nos collègues qui demandent la suppression de cet article. Je vous le précise d’emblée, l’amendement que nous avons déposé sur cet article a reçu l’accord de la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d’origine contrôlées, la CNAOC.
La rédaction que nous vous proposerons traduit toujours l’objectif de la proposition de loi, à savoir la lutte contre les pratiques trompeuses visant à induire le consommateur en erreur quant à l’origine du vin.
L’article L. 413–8 du code de la consommation, que nous proposons de modifier, dispose en effet qu’il est interdit de laisser penser qu’un produit a une origine française alors que tel n’est pas le cas. Une dérogation est toutefois prévue si le pays d’origine figure sur l’étiquette de manière apparente.
Or c’est bien là que réside notre problème : dans les cas de fraude que nous observons pour le vin, la mention du pays d’origine figure bien sur la bouteille, mais de telle manière qu’elle n’est pas visible pour le consommateur. Nous pouvons ainsi relever, sur certaines bouteilles, la présence en très gros caractères de marques à consonance française, tandis qu’il n’est fait mention de la véritable origine du vin qu’en petits caractères, de façon peu lisible. Si toutes les mentions obligatoires au titre de la réglementation européenne sont donc bien présentes sur la bouteille, il n’en reste pas moins que nous nous trouvons là face à une tentative de tromperie du consommateur. Cette situation est encore plus critique lorsqu’il s’agit de bag in box.
Nous avons parfaitement conscience, monsieur le ministre, que la meilleure des réponses serait un renforcement des moyens dont dispose la DGCCRF pour lutter contre les fraudes. Les personnels de cette direction se plaignent de ne pouvoir, faute d’effectifs suffisants, atteindre leurs objectifs de contrôle ; ils ont le sentiment de trop souvent servir de variable d’ajustement.
Cela dit, compte tenu des divergences que nous avons eues, au Sénat, sur le sujet de la répression des fraudes lors de l’examen de la loi Égalim, nous avons déposé l’amendement n° 27 rectifié, qui devrait nous permettre d’obtenir un consensus au sein de notre assemblée.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert et Lassarade, MM. Bouchet, Louault et Panunzi, Mme Bruguière, M. Savary, Mmes Berthet et Deromedi, MM. Grand, Huré et Lefèvre, Mme A.M. Bertrand, M. Détraigne, Mme Troendlé, MM. Mayet et Chaize, Mme Chain-Larché, MM. Mouiller, Cuypers, Babary, Bonhomme, Morisset et Pointereau, Mmes Renaud-Garabedian et Puissat, MM. Duplomb, Genest et de Legge, Mmes Morhet-Richaud et Lamure, MM. Calvet, Laménie et Sido, Mmes M. Mercier et Noël, MM. B. Fournier, Kennel et Milon, Mme Chauvin, M. Ginesta et Mmes Garriaud-Maylam et Thomas, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Laurent.
M. Daniel Laurent. L’article 4 de la présente proposition de loi prévoit de mettre en évidence la mention de la provenance d’un vin sur l’étiquetage de manière à ne pas induire en erreur le consommateur quant au pays d’origine du produit.
Si chacun s’accorde sur la nécessité de fournir au consommateur une information loyale sur les produits qui lui sont proposés, les dispositions de cet article peuvent apparaître superfétatoires.
Je considère que notre arsenal législatif et réglementaire offre les outils nécessaires pour lutter efficacement contre des pratiques trompeuses en matière d’étiquetage de l’origine.
Monsieur le ministre, comme Roland Courteau vient de le rappeler, il convient surtout de veiller à ce que les services de l’État en charge des contrôles disposent des moyens nécessaires pour assurer leurs missions, particulièrement lorsque celles-ci ont été élargies du fait de l’adoption de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Si l’intention de défendre notre filière vitivinicole et le droit d’information des consommateurs est fort louable, nous devons veiller à ne pas surcharger notre droit de diverses dispositions, en contradiction, par ailleurs, avec notre objectif permanent de simplification. Tel est l’objet du présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Henri Cabanel, rapporteur. Les auteurs de cet amendement souhaitent la suppression de l’article 4, au motif que l’arsenal juridique nécessaire existe déjà. Je partage tout à fait ce point de vue, et j’estime, moi aussi, qu’il faut donner davantage de moyens à la DGCCRF ; cela a été rappelé tout au long de l’après-midi.
En revanche, le cadre juridique peut laisser planer des doutes. Il en va ainsi de l’article L. 413–8 du code de la consommation, que je tiens à citer : « Il est interdit, sur des produits naturels ou fabriqués, détenus ou transportés en vue de la vente, mis en vente ou vendus, d’apposer ou d’utiliser une marque de fabrique ou de commerce, un nom, un signe ou une indication quelconque de nature à faire croire, s’ils sont étrangers, qu’ils ont été fabriqués en France ou qu’ils sont d’origine française et, dans tous les cas, qu’ils ont une origine différente de leur véritable origine française ou étrangère. » Cette interdiction de tromper le consommateur est donc déjà prévue noir sur blanc.
Toutefois, l’alinéa suivant précise que « ces dispositions ne sont pas applicables lorsque le produit porte, en caractères manifestement apparents, l’indication de la véritable origine ». Or cette mention est obligatoire, et donc toujours présente, sur les produits viticoles.
Dès lors, cet article du code de la consommation semble laisser entendre qu’il est possible d’utiliser, en toute légalité, une imagerie trompeuse quant à l’origine des vins. C’est ce dont sont victimes les vins de pays d’oc et, notamment, une marque très connue et très appréciée au sein de cette IGP, Ormes de Cambras : on peut trouver dans certains rayonnages un bag in box où figurent le nom « Cambras » et un beau paysage provençal ; en très petits caractères figure la mention « vin espagnol ».
Comme l’affirmait M. le ministre, il est important que nous défendions nos agriculteurs et, en l’occurrence, ces viticulteurs.
C’est pourquoi nous considérons que l’amendement n° 27 rectifié tend à réparer cette anomalie juridique. Il vise en effet à préciser que la dérogation dont peuvent bénéficier certains produits ne s’appliquera pas aux produits viticoles. Cela mettrait simplement en œuvre le droit européen au sein du droit français, sans en rajouter une couche !
Nous sommes donc favorables à cet amendement ; par conséquent, monsieur Laurent, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 7 rectifié, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Didier Guillaume, ministre. Le Gouvernement est pour sa part favorable à l’adoption de l’amendement n° 7 rectifié, car nous estimons qu’il correspond à nos besoins. L’amendement n° 27 rectifié recevra quant à lui un avis de sagesse.
M. le président. Monsieur Daniel Laurent, l’amendement n° 7 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Laurent. Nous avons largement discuté de ce problème ce matin lors de la réunion de la commission des affaires économiques. Je comprends que l’amendement n° 27 rectifié a été rédigé dans un souci de recherche de l’unanimité et, surtout, de facilitation de la tâche des contrôleurs, notamment en Occitanie, qui pâtit, de ce point de vue, de la proximité de l’Espagne.
Je tiens à insister, monsieur le ministre, sur l’importance du rôle des services de l’État chargés de ces contrôles. On a lieu d’être inquiet à leur sujet, en dépit de vos déclarations précédentes : nombre de postes extrêmement importants risquent d’être supprimés, et il serait bon que vous preniez conscience du caractère indispensable de ces contrôles pour cette filière.
Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié est retiré.
L’amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Monier, MM. Montaugé et Courteau, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. Iacovelli et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Au deuxième alinéa de l’article L. 413-8 du code de la consommation, après le mot : « Toutefois », sont insérés les mots : « , à l’exception des vins ».
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Je l’ai défendu quand je me suis exprimé sur l’article, mais je veux préciser une chose : plus nous aurons d’outils, mieux cela vaudra – tel est notre rôle de législateur –, mais plus les effectifs de la DGCCRF seront renforcés, jusqu’à devenir suffisants, plus vite nous stopperons ces fraudes, ces tromperies et ces duperies !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Henri Cabanel, rapporteur. Il est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Didier Guillaume, ministre. Sur cet amendement, comme je l’ai annoncé, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Concernant les contrôles, il faut tout de même de la cohérence. On ne peut pas me demander, tous les trois jours, par courrier ou par téléphone, de diminuer les contrôles imposés aux exploitations agricoles et à la fois, quand c’est arrangeant, exiger de les renforcer ! Il n’y a pas de bons et de mauvais contrôles. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
C’est ce que je répète depuis le début de l’après-midi : les fraudes sont inacceptables. La DGCCRF, qui ne dépend pas du ministère de l’agriculture, mais de Bercy, fait son travail. Regardez le nombre de contrôles qu’elle accomplit : je ne sais pas si ses effectifs sont ou non suffisants, mais les contrôles sont très nombreux, et il y a des amendes à la clé ! Je veux donc quand même saluer les efforts entrepris par Bercy et la DGCCRF.
M. le président. En conséquence, l’article 4 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l’article 4
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié ter, présenté par MM. Labbé et Artano, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Gold, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall et Gontard, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-…. – À partir du 1er janvier 2023, pour les huîtres mises sur le marché sur le territoire français, doit être indiquée la mention de la provenance du naissain selon qu’il provient d’écloseries ou d’huîtres nées en mer.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Un amendement similaire avait obtenu un avis de sagesse de la commission lors de notre examen de la loi Égalim. Cette disposition avait été ensuite adoptée par l’Assemblée nationale, mais elle a été du nombre de celles qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel. Évidemment, il s’agit de produits alimentaires : nous ne sommes pas à côté du sujet !
Environ 50 % des huîtres en vente sur les étals sont des huîtres triploïdes, issues d’un croisement entre des huîtres tétraploïdes et des huîtres diploïdes. Elles sont censées être stériles, atteignent leur maturité en deux ans, au lieu de trois, et ne sont pas laiteuses l’été, ce qui permet leur consommation en cette saison. Je n’évoquerai pas les qualités gustatives de ces huîtres, mais il est indéniable que ce n’est pas le même produit que celui que fournissent les ostréiculteurs traditionnels.
C’est pourquoi ceux-ci demandent que leurs produits soient étiquetés. Il ne s’agit pas de mentionner la diploïdie ou la triploïdie de l’huître – cela ne serait pas très vendeur –, mais de distinguer sur l’étiquette entre huîtres nées en mer et huîtres nées en écloserie ; les huîtres triploïdes ne peuvent naître qu’en écloserie.
Je suis convaincu, même aujourd’hui, que l’on va avancer, parce qu’un tel étiquetage va dans le sens des attentes de nos concitoyens. Il ne dérange personne, mais il arrange tout le monde !
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Henri Cabanel, rapporteur. Nous connaissons la ténacité avec laquelle notre collègue Joël Labbé défend les huîtres !
L’étiquetage de ces produits comporte déjà de nombreuses mentions obligatoires. L’objet de cet amendement est de permettre au consommateur de différencier les huîtres triploïdes des huîtres diploïdes. Cela reprend un débat scientifique.
Le comité national de la conchyliculture a une nouvelle gouvernance ; c’est également le cas de certains comités régionaux de cette profession ; dans ma région d’origine, ce comité a élu un nouveau président. Je me suis longuement entretenu, au téléphone, avec les représentants de cette profession ; ils m’ont assuré que ce débat devait avoir lieu en leur sein, mais qu’il fallait les laisser travailler pour qu’ils nous présentent des propositions qui iraient dans votre sens, mon cher collègue. Comme de nouvelles personnes viennent de prendre leurs responsabilités, j’estime qu’il faut laisser le temps au temps !
Je veux néanmoins vous rassurer, mon cher collègue. L’information que vous proposez de rendre obligatoire peut déjà être apposée sur l’étiquetage par les producteurs qui souhaitent valoriser les productions traditionnelles en mer. Il n’est donc pas utile de l’inscrire dans la loi.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. On nous dit que la profession demande du temps, mais cela fait dix ans qu’elle présente de telles demandes ! La profession, ou du moins ses représentants majoritaires, réclame toujours plus de temps, mais on sait que derrière ces demandes, il y a le lobbying des écloseries !
Il faut envoyer un signe, puisque nous travaillons sur la qualité, la traçabilité et la transparence des produits alimentaires. On peut d’autant plus aisément adopter cet amendement que, volontairement, nous avons choisi de ne rendre cette disposition applicable qu’à partir de 2023. Ainsi, l’ensemble des professionnels auront le temps de s’y préparer. Nous avons tout creusé, nous avons véritablement discuté avec la profession, mais jusqu’à présent nous n’avons pas pu avancer. Envoyer ce signe fort permettrait au Sénat, avant même l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale, de prendre une position claire sur un sujet de transparence de l’alimentation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Notre groupe s’abstiendra sur cet amendement, mais aussi sur les amendements nos 1 rectifié, 20 rectifié, 2 rectifié, 14 rectifié et 4 rectifié. Sur le fond, nous pourrions être d’accord avec ces amendements, mais ils n’ont pas de rapport direct avec le texte initial.
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Grand, Daubresse, Milon, Buffet et Laménie, Mme Lassarade, MM. Revet et Sido, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-…. – I. – Les dénominations associées aux produits d’origine animale ne peuvent pas être utilisées pour décrire, pour promouvoir ou pour commercialiser des produits alimentaires contenant une part significative de matières d’origine végétale.
« II. – Tout manquement au I du présent article est passible d’une contravention de cinquième classe.
« III. – Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article, notamment la liste des dénominations, à l’exclusion des locutions d’usage courant, et la part significative mentionnées au I. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Cet amendement vise à interdire l’utilisation de certaines dénominations commerciales associées aux produits d’origine animale pour des produits alimentaires contenant une part significative de matières d’origine végétale.
Il est question, notamment, de l’emploi des termes « steak », « filet », « bacon » ou « saucisse » pour qualifier des produits qui ne sont pas uniquement, voire pas du tout, composés de viande, ou de la dénomination « lait » ou « fromage » pour des produits d’origine végétale.
En effet, de telles dénominations entretiennent la confusion dans l’esprit du consommateur, voire introduisent un principe d’équivalence entre ces produits en recourant paradoxalement au vocabulaire carné pour présenter certains produits végétariens ou végétaliens.
Je vous propose donc d’intégrer à ce texte un article qui participe de la bonne information du consommateur sur l’origine, animale ou végétale, des produits qu’il consomme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Henri Cabanel, rapporteur. Tout a été dit par notre collègue Jean-Pierre Grand. L’adoption de cet amendement permettrait de nous mettre en conformité avec le droit européen tout en maintenant la position que nous avions adoptée lors de nos débats sur la loi Égalim ; un article similaire avait alors été adopté. Cela clarifierait également l’étiquetage pour les consommateurs, ce qui correspond à l’objectif de cette proposition de loi.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Didier Guillaume, ministre. Sur le principe, je suis favorable à l’amendement de M. Grand, mais si une telle disposition s’appliquait seulement à la France, cela créerait une distorsion de concurrence avec les autres pays, ce qui poserait un réel problème.
La France, avec d’autres pays, défend cet encadrement au niveau européen ; nous souhaitons l’inscrire au sein de la Politique agricole commune 2020-2027.
J’estime par ailleurs que cet amendement pourrait être rectifié afin de viser, non pas l’ensemble des matières premières d’origine végétale, mais les seules protéines végétales utilisées en substitution de protéines animales.
Cela dit, au vu de la situation et de l’heure qu’il est, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Daniel Gremillet. J’ai tout de même le droit de m’exprimer !
C’est un sujet suffisamment important ; je remercie M. le ministre, dont les propos ont utilement complété l’avis de la commission, du courage dont il fait montre à cet instant. Mesurez les conséquences de notre vote ! Je remercie également M. le rapporteur.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Raison, Perrin, Mandelli et Mouiller, Mmes L. Darcos et Gatel, M. Maurey, Mme Bruguière, M. Longuet, Mmes Gruny et M. Mercier, M. Bizet, Mme de Cidrac, MM. Piednoir, Kennel et Kern, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Pellevat, Grosperrin et Vaspart, Mme Ramond, MM. Meurant, Longeot et Bonhomme, Mmes Chauvin, Lamure et Morhet-Richaud, MM. Henno, de Nicolaÿ et Louault, Mme Troendlé, M. Cuypers, Mmes Guidez et Dumas, M. Paccaud, Mmes Vermeillet et Duranton, MM. Bascher et Vogel, Mmes Férat, Vullien, Malet et Bories, MM. Chaize et Huré, Mmes Deromedi et Goy-Chavent et MM. Pierre, Babary, Laménie, Revet, L. Hervé, Saury, Émorine, Dufaut, Daubresse et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-…. – Les exploitants d’établissements titulaires d’une licence de débit de boissons, à consommer sur place ou à emporter, ou d’une licence de restaurant indiquent, de manière lisible, sur leurs cartes ou sur tout autre support, la provenance et, le cas échéant, la dénomination de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée des vins ou des spiritueux mis en vente sous forme de bouteille, de pichet ou de verre. »
La parole est à M. Michel Raison.
M. Michel Raison. Cet amendement vise à offrir une transparence accrue aux consommateurs de vins, d’alcools et de produits spiritueux. Je pense en particulier au rhum que produisent différents départements d’outre-mer. Je sais que cet amendement sera adopté ; ainsi, nous ne serons pas venus en vain à cette séance !
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Grand, Grosdidier, Daubresse, Milon, Buffet et Laménie, Mmes A.M. Bertrand et Lassarade, MM. Revet et Sido, Mme Lanfranchi Dorgal et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-…. – Les exploitants d’établissements titulaires d’une licence de débit de boissons, à consommer sur place ou à emporter, ou d’une licence de restaurant indiquent, de manière lisible, sur leurs cartes ou sur tout autre support, la provenance et, le cas échéant, la dénomination de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée des vins mis en vente sous forme de bouteille, de pichet ou de verre. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Henri Cabanel, rapporteur. Le dispositif de l’amendement n° 20 rectifié reprend les dispositions qu’avait adoptées le Sénat lors de l’examen de la loi Égalim, qui vont dans le sens que nous voulons donner à cette proposition de loi, à savoir la transparence offerte au consommateur. Ces dispositions ont trait aux établissements de débit de boissons.
Une seule différence distingue l’amendement n° 2 rectifié de l’amendement n° 20 rectifié : ce dernier vise également les spiritueux, et non pas seulement les vins. C’est pourquoi nous sommes favorables à son adoption plutôt qu’à celle de l’amendement n° 2 rectifié, qui serait alors pleinement satisfait et n’aurait plus d’objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Didier Guillaume, ministre. Je suis désolé, mesdames, messieurs les sénateurs, mais il est l’inverse de celui de votre commission.
Autant je suis totalement favorable à l’adoption de l’amendement n° 2 rectifié – ces dispositions excellentes vont dans le bon sens et répondent aux demandes de nos concitoyens –, autant les dispositions relatives aux spiritueux qui figurent à l’amendement n° 20 rectifié sont impossibles à mettre en œuvre, puisque les bouteilles ne comportent pas d’indication de l’origine de la boisson. Le restaurateur ne pourra donc pas mettre en œuvre une telle mesure.
L’amendement n° 2 rectifié, pour sa part, tend à répondre à la demande de tous nos concitoyens ; cela fait écho à la traçabilité que M. Courteau réclamait à raison pour les vins qui nous viennent d’Espagne. Il est inacceptable que des bouteilles prétendent contenir du champagne alors que le vin qui s’y trouve n’a rien à voir ! Cette disposition serait donc très positive.
En revanche, on ne voit pas comment cela se ferait pour les spiritueux, puisque l’origine de ces boissons ne figure pas sur les bouteilles. C’est donc juridiquement impossible à mettre en œuvre.
C’est pourquoi le Gouvernement est plutôt favorable à l’adoption de l’amendement n° 2 rectifié et défavorable à celle de l’amendement n° 20 rectifié.