M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. L’amendement du Gouvernement ne vise pas à rendre la visite médicale à 6 ans obligatoire : il est précisé qu’elle concernera uniquement certains élèves. Or, monsieur le ministre, vous avez vous-même reconnu que, à cet âge, une visite médicale est nécessaire. À nos yeux, tous les enfants devraient en bénéficier.
Par ailleurs, les difficultés que connaissent la médecine et la santé scolaires touchent tout autant les services de la PMI. À la démographie déclinante des professions de santé s’ajoute la très faible valorisation, dans notre pays, de l’exercice salarié : médecins et infirmières préfèrent exercer dans le secteur libéral. Peut-être des efforts doivent-ils être consentis en matière salariale.
Le concept de santé scolaire ne se résume pas à l’absence de maladie. Ainsi, nous avons débattu cet après-midi de la nécessité de développer l’éducation physique et sportive. L’un des enjeux, pour la communauté éducative dans son ensemble, au-delà des seuls personnels de santé, est de travailler de façon partenariale pour promouvoir la santé scolaire. Pour cela, il faut du personnel en nombre suffisant et formé. Une part de la réussite des enfants à l’école passe par leur épanouissement et leur santé au sens large du mot !
M. le président. En conséquence, l’article 2 ter est ainsi rédigé, et les amendements nos 329 rectifié, 367 rectifié, 449 rectifié, 94, 120 rectifié, 60 rectifié ter, 369 rectifié bis et 241 rectifié n’ont plus d’objet.
Article additionnel après l’article 2 ter
M. le président. L’amendement n° 274 rectifié, présenté par Mmes Blondin, Monier et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Six mois au plus tard après la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport précisant les modalités et les dates d’organisation des différentes visites médicales scolaires ainsi que celles des autres actions de promotion de la santé scolaire. Il indique notamment les personnes qui sont chargées d’effectuer ces visites ainsi que les différentes séances de vaccination.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Au travers de cet amendement, monsieur le ministre, nous demandons au Gouvernement d’indiquer dans un rapport ses intentions en matière de politique de santé scolaire. En particulier, quels seront les personnels chargés des différents contrôles ?
Je connais le goût de notre rapporteur pour les demandes de rapport, mais, en commission, il nous avait invités à lancer le débat. Comme vient de le souligner Céline Brulin, la PMI aussi est en grande difficulté. J’ai contacté mon conseil départemental : il est en train d’examiner comment il pourrait éventuellement accompagner l’éducation nationale, mais il incombe à l’État de prendre à sa charge la visite médicale à 3 ans.
Par ailleurs, il est parfois très difficile de trouver des pédiatres, compte tenu des déserts médicaux qui existent malheureusement dans notre pays.
Si l’intention gouvernementale est bonne, elle se heurte donc à la réalité. J’ajoute que la médecine scolaire manque d’attractivité. En particulier, les rémunérations ne sont pas à la hauteur du travail demandé. Peut-être notre commission pourrait-elle proposer l’élaboration d’un rapport sur la santé à l’école ?
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame Blondin, vous connaissez mon engagement : quand des membres de notre commission souhaitent réaliser des travaux de contrôle, le bureau de la commission et moi-même sommes toujours prêts à appuyer leur démarche. Au reste, je préfère que nous produisions nos propres rapports : ainsi, nous pouvons fixer nous-mêmes le calendrier. Je souscris donc à votre demande, ma chère collègue !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. J’émets un avis défavorable sur la demande de rapport, la position de la commission étant constante en la matière. Le débat sur la médecine scolaire a été largement entamé, et Mme la présidente de la commission vient de s’engager sur la réalisation d’un travail en vue de disposer d’un véritable état des lieux. Je suis sûr que, une fois de plus, notre rapport inspirera M. le ministre et l’aidera à prendre des décisions !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Nous ne minimisons pas les sommets qu’il nous reste à gravir pour atteindre l’objectif ambitieux que nous nous sommes fixé. La décision n’a pas été soudaine : nous avons suscité la production d’un rapport parlementaire. Mme Rist, députée, a mené un travail dont les conclusions seront rendues publiques après les élections européennes, à la fin du mois de mai ou au début du mois de juin. Ce rapport nous servira de base pour réfléchir aux moyens humains que nous pouvons mobiliser pour assurer les visites médicales. Je suis optimiste sur notre capacité à avancer, même s’il faudra du volontarisme.
S’agissant de l’amendement, je pense, comme la commission, qu’il faut éviter de multiplier les rapports. Reste qu’il est important de dresser un état des lieux régulier de la santé scolaire. J’émets donc un avis de sagesse.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 274 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Après le premier alinéa de l’article L. 111-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Tout enfant doit pouvoir être accueilli, dès l’âge de l’instruction obligatoire, dans une école ou un établissement d’enseignement secondaire le plus près possible de son domicile. » ;
1° Les deux premiers alinéas de l’article L. 113-1 sont supprimés ;
1° bis Le même article L. 113-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Afin d’acquérir une expertise et une culture communes et dans le cadre de l’accomplissement de leurs fonctions, les professionnels intervenant auprès d’enfants de moins de six ans bénéficient de modules de formation continue communs dans les conditions définies aux articles L. 6111-1 et L. 6311-1 du code du travail. L’expérience acquise par les personnels non enseignants travaillant dans les écoles maternelles peut être validée dans les conditions définies aux articles L. 6411-1 et L. 6422-1 du même code, en vue de l’obtention d’un diplôme national ou d’un titre professionnel enregistré et classé au niveau 5 ou au niveau 4 du répertoire national des certifications professionnelles. Le contenu de ces modules et les modalités de cette validation sont fixés par décret. La mise en place de ces modules peut donner lieu à la conclusion d’une convention entre l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation, l’agence régionale de santé, le département et les communes. » ;
2° Au troisième alinéa de l’article L. 131-5, le mot : « six » est remplacé par le mot : « trois » ;
2° bis (nouveau) L’article L. 131-8 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour la première année d’école maternelle, un aménagement temporaire de l’assiduité de l’enfant peut être décidé par le directeur d’école, sur proposition de la famille et dans le cadre d’un dialogue avec l’équipe éducative. » ;
3° L’article L. 132-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 132-1. – L’enseignement public dispensé dans les écoles maternelles et élémentaires est gratuit. » ;
4° Après l’article L. 212-2, il est inséré un article L. 212-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 212-2-1. – L’établissement des écoles maternelles publiques intervient dans les conditions prévues à l’article L. 212-2. Toutefois, la scolarisation des enfants de moins de six ans peut être assurée dans des classes maternelles ouvertes dans une école élémentaire ou dans des classes réunissant des enfants relevant de l’enseignement préélémentaire et élémentaire. » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 212-5, le mot : « élémentaires » est supprimé ;
5° bis À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 212-8, les mots : « , les classes enfantines » sont supprimés ;
5° ter Après le mot : « maternelles », la fin de l’article L. 312-5 est supprimée ;
6° Au premier alinéa de l’article L. 312-9-2, les mots : « le début de sa scolarité obligatoire » sont remplacés par les mots : « la première année de l’école élémentaire » ;
6° bis À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 321-2, les mots : « les classes enfantines et » sont supprimés ;
7° L’article L. 442-3 est ainsi modifié :
a) Les mots : « d’écoles élémentaires privées qui ne sont pas liées » sont remplacés par les mots : « des établissements d’enseignement privés qui ne sont pas liés » ;
b) Les mots : « et des livres » sont remplacés par les mots : « , des livres et des autres supports pédagogiques » ;
c) À la fin, les mots : « les articles L. 131-1-1 et L. 131-10 » sont remplacés par les mots : « l’article L. 131-1-1 et de permettre aux élèves concernés l’acquisition progressive du socle commun défini à l’article L. 122-1-1 » ;
8° L’article L. 442-5-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « élémentaire » est supprimé ;
b) À la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « élémentaires publiques » sont remplacés par les mots : « correspondantes de l’enseignement public » ;
9° À l’article L. 442-5-2, après le mot : « classes », sont insérés les mots : « maternelles et » et les mots : « privés du premier degré » sont remplacés par les mots : « d’enseignement privés » ;
10° Au 4° de l’article L. 452-2, les mots : « élémentaire, secondaire ou » sont remplacés par les mots : « dans les classes maternelles et élémentaires, dans le second degré et dans le ».
II. – L’article 58 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique est abrogé.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux, sur l’article.
M. Jean-Yves Roux. Cet article, tel qu’adopté en commission, réintroduit la notion de proximité, qui avait disparu du projet de loi initial.
L’article L. 113-1 du code de l’éducation posait le principe qu’un enfant scolarisé en classe maternelle ou en classe enfantine pouvait, à la demande de ses parents, être scolarisé dans l’école la plus proche de son domicile. C’est là du bon sens, me dira-t-on, mais le bon sens est parfois galvaudé…
Cet article rappelait à juste titre que le bien-être d’un enfant, a fortiori quand il a moins de 6 ans, passe aussi par sa scolarisation dans une école située à proximité du domicile, permettant de préserver son temps de sommeil. Or, avec la disparition prévue des classes enfantines, l’exigence de proximité doit être réaffirmée dans la loi.
La proximité est essentielle, d’abord, pour le bien-être des enfants et de leur famille : se rendre à l’école doit être rapide et simple. À cet égard, il convient de prendre en compte la situation de fratries séparées parfois de manière incongrue, ce qui oblige à accomplir des trajets très chronophages. Elle l’est aussi parce que les temps de déplacement sont un facteur majeur d’inégalité territoriale. Le colloque « Territoires et décrochages scolaires », organisé en juin dernier par le Conseil national d’évaluation du système scolaire, a montré que le temps d’accès routier est très hétérogène à la commune la plus proche équipée d’un collège : parfois de moins de dix minutes, il est parfois supérieur à trente minutes, surtout dans les zones de montagne.
Quand un enfant de onze ans qui entre en sixième passe plus d’une heure et demie par jour dans un car, comme cela peut être le cas dans nos territoires ruraux, il n’est pas placé dans les mêmes conditions d’apprentissage qu’un jeune urbain, habitant beaucoup plus près de son collège. Ces inégalités se retrouvent en fin de cycle d’apprentissage : 24,4 % des jeunes de 18 à 24 ans des zones rurales ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation, contre 20 % de leurs homologues urbains.
Enfin, il paraît impératif de préserver le maillage actuel des écoles, collèges et lycées professionnels, pour un aménagement du territoire cohérent et la concrétisation de nos engagements environnementaux issus de la COP21. La sobriété des déplacements doit être une préoccupation de tous les instants dans l’élaboration d’une carte scolaire : moins de déplacements, c’est aussi une facture d’essence et une facture énergétique bien moindres.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, sur l’article.
Mme Françoise Férat. Comme le précise l’exposé des motifs de votre projet de loi, monsieur le ministre, « les principes généraux du système éducatif font de l’éducation un droit, de l’instruction une obligation et de l’enseignement un service public gratuit et laïque. Ces principes sont au fondement de notre contrat social et à ce titre sont rappelés dans le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958. »
Former les élèves, les futurs citoyens, nécessite des enseignants et, comme le présuppose cet article, des enseignants formés. Or l’annonce faite par le Président de la République d’un plafonnement à 24 élèves de l’effectif des classes de la grande section au CE1 et le dédoublement de classes impliquent le déploiement d’enseignants. Le ministère de l’éducation nationale compte déjà plus de 1 million de fonctionnaires. Comme l’indiquent la Cour des comptes et des instituts indépendants, entre 180 000 et 210 000 enseignants, sur un total de 790 000 environ, seraient affectés à d’autres tâches que l’enseignement. Ces 200 000 enseignants « sans classe » seraient des remplaçants, des pédagogues ou des personnels affectés à un autre ministère ou à une organisation syndicale. Si l’on y ajoute les 335 000 personnels non enseignants, ce sont près de la moitié des agents qui ne sont pas devant une classe ; nous sommes à cet égard au premier rang des pays de l’OCDE.
Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de manager cette équipe et de réformer l’administration, afin de placer un plus grand nombre d’adultes face aux élèves ? S’agit-il de redéployer ces fonctionnaires sur le terrain, devant les élèves ? Est-il possible de mener une telle opération, avant de réformer le code de l’éducation ?
M. le président. L’amendement n° 366, présenté par M. Karam, Mme Cartron, M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
M. Antoine Karam. L’article 3 adapte certaines dispositions du code de l’éducation à l’obligation d’instruction dès l’âge de 3 ans instaurée par l’article 2. Il crée en outre un continuum pour les six premières années de la vie de l’enfant.
Une disposition adoptée en commission prévoit que tout enfant doit pouvoir être accueilli dès l’âge de l’instruction obligatoire dans une école ou un établissement d’enseignement secondaire situé le plus près possible de son domicile.
Ce principe pourrait s’avérer très contraignant pour nos collectivités territoriales, qui devront établir une sectorisation scolaire. Par ailleurs, il pourrait remettre en cause des dispositifs visant à renforcer la mixité sociale au sein des établissements scolaires.
Enfin, s’agissant notamment de l’enseignement secondaire, l’établissement le plus proche du domicile d’un élève ne proposera pas nécessairement les enseignements correspondant aux choix d’orientation de celui-ci.
Pour ces raisons, nous proposons de supprimer les alinéas 2 et 3 de l’article 3.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer une disposition, insérée en commission, dont la portée est essentiellement déclarative. Ses auteurs soulignent à raison que cette disposition pourrait être de nature à gêner les décisions des collectivités territoriales en matière d’élaboration de la carte scolaire. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. L’argumentation du sénateur Karam est très convaincante. Autant on peut comprendre la motivation de la disposition introduite par la commission, autant on peut en prévoir les effets pervers, potentiellement considérables. Je suis donc favorable à l’amendement : évitons une rigidification qui se retournerait contre tous les acteurs, y compris les élèves eux-mêmes. Sur le terrain, les choses ne sont pas toujours aussi simples qu’il y paraît.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. Des effets pervers, monsieur le ministre, nous en subissons aujourd’hui, parce qu’il n’est encore écrit nulle part que les enfants doivent être scolarisés au plus près de leur lieu d’habitation.
Par suite de restructurations scolaires et de fermetures de classes, voire d’écoles ou de collèges, nombreuses ces derniers temps, par exemple en Puisaye, dans mon département, des enfants font parfois plus d’une heure de car pour se rendre à leur collège. Inscrire dans la loi la notion de proximité me paraît plutôt bienvenu, surtout quand on prétend défendre la ruralité et l’école rurale.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Madame la sénatrice, je ne pense pas que l’adoption de l’amendement porterait remède au problème que vous soulevez.
Samedi et dimanche derniers, j’étais dans le Lot-et-Garonne et en Dordogne, où l’on m’a parlé de cette question de la proximité entre école et domicile. Je m’étais précédemment rendu dans des zones de montagne, pour lesquelles l’éducation nationale a su édicter des règles spécifiques afin de prendre en compte les difficultés que vous mentionnez. Cela relève d’une gestion au quotidien de l’éducation nationale.
Je suis tout à fait disposé à ce que nous édictions des principes de ce type département par département. C’est d’ailleurs ce que nous faisons au travers des conventions de ruralité. Si l’on ne peut que partager l’objectif, l’adoption de cet amendement risquerait d’introduire de la rigidité dans le processus d’affectation. Or il arrive qu’il faille, pour de très bonnes raisons, affecter un élève dans une école qui n’est pas la plus proche de son domicile. Créer une rigidité juridique serait donc contre-productif, non seulement pour l’éducation nationale, mais aussi pour les communes et même pour les familles.
M. le président. L’amendement n° 255 rectifié, présenté par MM. Luche, Canevet et Capo-Canellas, Mmes Férat et C. Fournier, MM. Henno, A. Marc et Moga, Mmes Perrot et Saint-Pé, M. Vanlerenberghe et Mme Vérien, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le premier alinéa de l’article L. 131-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’instruction obligatoire dans un établissement public d’enseignement doit être possible dans un temps de trajet inférieur à trente minutes entre le domicile de l’enfant et l’établissement public d’enseignement. » ;
La parole est à M. Jean-Claude Luche.
M. Jean-Claude Luche. Cet amendement porte précisément sur la question du transport scolaire, particulièrement en milieu rural.
Afin de prévenir les temps de trajet excessifs pour les enfants, dont l’instruction sera désormais obligatoire dès l’âge de 3 ans, et de garantir le maintien des écoles dans les zones les plus isolées, l’amendement a pour objet de limiter le temps de trajet à trente minutes entre le domicile et l’école, soit une heure par jour aller et retour. Comment accepter que des enfants de 3 ans passent plus d’une demi-heure, matin et soir, dans un car ou un véhicule adapté ? Si l’on ajoute le temps de trajet à la journée scolaire, déjà bien remplie, l’amplitude horaire journalière des enfants dépasse parfois celle des adultes.
Il y va aussi de l’égalité des chances dans l’acquisition des apprentissages. En effet, des temps de transport excessifs ne peuvent que nuire à la concentration en classe. Il est nécessaire que le service public de l’enseignement soit présent même dans les zones les plus isolées, afin que tous les enfants aient les mêmes chances de réussite !
L’adoption de cet amendement favorisera la présence de l’école de la République dans tous les territoires et répondra aux attentes de nos concitoyens en matière de services publics de proximité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Max Brisson, rapporteur. Je comprends parfaitement l’intention de M. Luche. L’instruction obligatoire commence à 3 ans, mais va jusqu’à 16 ans. L’adoption de cet amendement, tel qu’il est rédigé, serait source de contraintes y compris pour les établissements du second degré. S’agissant de ces derniers, une telle rigidité nuirait à leur efficacité, voire empêcherait leur fonctionnement. Votre proposition, monsieur Luche, si j’en comprends la philosophie, me paraît donc peu réaliste. Je vous demande de retirer cet amendement ; s’il est maintenu, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Luche, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Luche. Le texte de l’amendement ne mentionne nullement l’âge des élèves, non plus que le degré de l’enseignement. Permettez-moi de vous en donner lecture : « L’instruction obligatoire dans un établissement public d’enseignement doit être possible dans un temps de trajet inférieur à trente minutes entre le domicile de l’enfant et l’établissement public d’enseignement. » Cela concerne tous nos jeunes en âge d’être scolarisés, c’est-à-dire âgés de 3 à 16 ans.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Max Brisson, rapporteur. À 16 ans, on est au collège ou au lycée, et prévoir que l’établissement fréquenté devra obligatoirement être situé à moins de trente minutes du domicile n’est pas réaliste.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. Il faudrait sous-amender cet amendement pour que son dispositif s’applique seulement aux élèves du primaire.
Le temps de trajet est un des principaux facteurs d’inégalité entre les élèves, quel que soit leur âge. Dans les territoires ruraux, des collégiens ont un temps de trajet d’une heure, voire un peu plus. Quant aux lycéens, ils doivent assez souvent loger sur place, sans quoi les temps de trajet nuisent considérablement à leur travail scolaire. Il faut vraiment travailler sur cette question.
L’Assemblée des maires ruraux de France estime que le temps de trajet ne doit pas dépasser trente minutes pour les élèves du primaire. Il faut aussi se poser la question pour les collégiens et les lycéens. Elle devrait être prise en compte en priorité chaque fois que l’on projette de fermer un établissement scolaire, primaire ou secondaire, au même titre que les considérations de regroupement et de mutualisation des moyens humains.
Aujourd’hui, certains enfants se trouvent placés dans une situation extrêmement défavorable par rapport à leurs camarades qui vivent en ville pour acquérir le socle de connaissances et grandir sereinement dans le cadre de l’école de la République !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Étant donné que ce sont les collectivités territoriales, communes, départements et régions, qui construisent et entretiennent les bâtiments scolaires, il me semble qu’il faudrait pour le moins les consulter. Je ne sais pas, monsieur Luche, dans quelle mesure vous avez pu prendre l’attache des représentants des associations d’élus locaux.
Par ailleurs, les élus nous disent être submergés de normes, de réglementations. Sur ce sujet, ne faut-il pas leur laisser un peu de liberté et faire confiance à leur bon sens ?
Quoi qu’il en soit, nous sommes tous d’accord sur le fait que de trop longs trajets entre école et domicile pénalisent les jeunes. Les élus locaux en sont eux aussi conscients : les collectivités territoriales, qui organisent les transports, ont intérêt à ce que les élèves soient scolarisés au plus près possible de leur domicile. J’insiste sur la nécessité d’engager un dialogue avec les élus.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Il faut faire une distinction entre les élèves des écoles primaires, d’une part, et les collégiens et lycéens, d’autre part. La proximité est bien sûr une notion importante, mais, pour les collèges et les lycées, la question de l’offre pédagogique se pose également.
Mme Sonia de la Provôté. Les deux sont importants !
Mme Françoise Cartron. La proximité ne saurait s’accompagner nécessairement d’une offre pédagogique suffisamment riche et variée.
Lorsque j’étais chargée des lycées au conseil régional d’Aquitaine, nous avions accédé à la demande de créer un lycée dans une zone très défavorisée et un peu isolée. Bien sûr, cet établissement ne proposait pas toutes les options : quelle n’a pas été notre déception de constater que des parents ont préféré inscrire leurs enfants dans des établissements plus éloignés de leur domicile afin qu’ils puissent accéder à d’autres offres pédagogiques !