M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, parfois la loi anticipe, parfois elle s’adapte. Dans le domaine du numérique, pour de multiples raisons notamment liées à la protection de la liberté d’expression et à la mondialisation, force est de constater que la législation a un retard considérable sur l’innovation.
YouTube a été créé en 2005, a atteint le milliard d’abonnés en 2010 et compte plus de 2 milliards d’utilisateurs en 2020. Chaque minute, plus de 300 heures de vidéos sont mises en ligne. Chaque mois, plus de 1 milliard d’utilisateurs uniques se connectent à YouTube et visionnent près de 6 milliards d’heures de vidéo.
Parmi les chaînes YouTube ayant produit le plus de revenus en 2019, on compte celles de deux enfants de moins de 8 ans. À eux deux, ils auraient perçu près de 44 millions de dollars en un an. Que ce succès soit le fruit d’un buzz accidentel, d’une opportunité exploitée ou d’un business plan élaboré, la diffusion de vidéos constitue désormais une activité professionnelle à part entière pour ces deux enfants.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui constitue donc une avancée indispensable en la matière, en ce qu’elle vise à encadrer l’exploitation commerciale de l’image des mineurs. Je remercie mon collègue Jean-Raymond Hugonet pour son travail et son implication en tant que rapporteur, ainsi que l’ensemble de la commission, très mobilisée sur ces sujets.
L’article 1er crée, pour les mineurs de moins de 16 ans, le cadre légal d’exercice de la profession d’« influenceur » sur l’ensemble des plateformes en ligne. Il s’agit d’une avancée considérable pour la reconnaissance de la professionnalisation de cette activité, mais aussi et surtout en matière de lutte contre le travail dissimulé des mineurs.
Les dispositions relatives à l’information des parents sur les droits de l’enfant, les modalités de réalisation des vidéos et les conséquences de l’exposition de son image sont également essentielles et leur effectivité sera, je l’espère, appuyée par la nouvelle mission attribuée au CSA par l’article 4.
L’article 3 constitue également une avancée importante, puisqu’il pose les bases législatives permettant de dissocier l’usage récréatif de l’usage professionnel des plateformes en ligne pour les mineurs de moins de 16 ans, tout en garantissant la protection de leurs revenus.
L’article 5 vient compléter le droit à l’oubli en précisant son application stricte, sans condition de consentement des titulaires de l’autorité parentale, pour les mineurs. Par là même, il répond à une problématique de plus en plus récurrente dans le monde entier.
Ce texte est un excellent premier pas, mais il faudra se poser, à terme, la question beaucoup plus large de la protection de la vie privée des mineurs dans un monde toujours plus connecté et numérisé.
Pour ma part, dès 2017, avec le concours de notre collègue Philippe Bas, président de la commission des lois, j’avais déposé une proposition de loi prévoyant la création d’un cadre légal définissant la notion de vie privée des mineurs. La création d’un cadre pénal fixant les sanctions d’un délit d’atteinte reposant sur la présomption de consentement me semble indispensable à l’avenir. Ce mécanisme imposerait de rendre les parents pénalement responsables de la protection de la vie privée de leurs enfants mineurs. Comme dans tous les domaines relatifs à la protection de l’enfance, il est nécessaire de s’interroger sur le rôle du responsable légal et sur ses devoirs à l’égard du mineur.
Dans quelle mesure les parents sont-ils responsables en cas d’atteinte à la vie privée de leur enfant, mais également en cas d’atteinte à la vie privée d’un autre mineur commise par leur enfant ? La réponse me semble comprise dans la question.
Alors que la dictature de l’image devient omniprésente dans la vie des enfants, et ce dès leur plus jeune âge, que nous assistons à une progression fulgurante de troubles mentaux et comportementaux liés à l’anxiété qui en découle – je pense au phénomène du cyberharcèlement – et que les réseaux sociaux font désormais partie intégrante de tous les aspects de leur existence, cette problématique me paraît fondamentale. J’appelle de mes vœux une évolution en ce sens de la législation relative à la protection de l’enfance. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, les « chaînes » mettant en scène des enfants se multiplient sur les plateformes de partage de vidéos en ligne. Elles sont souvent réalisées et diffusées par des membres de la famille. Ces nouvelles pratiques rencontrent un succès croissant en France comme à l’étranger.
De nombreuses questions se posent en termes d’éthique quant au contenu des vidéos, aux heures de tournage ou aux revenus produits.
La proposition de loi de notre collègue député Bruno Studer, que je salue, vise à combler le vide juridique existant, en mettant en place un cadre légal protecteur, pour les enfants de moins de 16 ans acteurs de vidéos diffusées sur des plateformes en ligne, de l’exploitation de leur image sur internet.
Je tiens à remercier et à féliciter notre collègue rapporteur Jean-Raymond Hugonet, dont le rapport pose bien les enjeux sur ce sujet essentiel.
Cette proposition de loi offre des garanties en matière de durée du travail des enfants et de protection de leurs revenus ; c’est l’objet de l’article 1er.
L’article 2 oblige les plateformes de partage de vidéos à coopérer avec les autorités publiques.
Le texte crée, à l’article 3, un cadre juridique protecteur pour les enfants de moins de 16 ans qui participent à des vidéos partagées sur des plateformes, mais qui ne relèvent pas des procédures d’autorisation ou d’agrément prévues par le code du travail.
L’article 5 autorise les mineurs à exercer eux-mêmes le droit à l’effacement des données institué par le règlement général sur la protection des données (RGPD) lorsque leur image est diffusée par un service de plateforme de partage de vidéos, y compris dans le cas où leurs représentants légaux s’y opposeraient. C’est une avancée salutaire.
Je concentrerai mon propos sur l’article 4, qui introduit l’obligation, pour les services de plateforme de partage de vidéos, d’adopter des chartes ayant notamment pour objet de favoriser le signalement, par leurs utilisateurs, de contenus qui porteraient atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale ou physique des enfants et d’améliorer, en lien avec des associations de protection de l’enfance, la détection de situations qui porteraient atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale ou physique des mineurs.
En 2019, dans le cadre de la mission commune d’information sur les politiques publiques de prévention, de détection, d’organisation des signalements et de répression des infractions sexuelles susceptibles d’être commises par des personnes en contact avec des mineurs dans le cadre de l’exercice de leur métier ou de leurs fonctions, nous avions préconisé de nombreuses mesures, dont la création d’un observatoire des violences sexuelles et le lancement de campagnes de communication sur les risques et sur les canaux de signalement.
Diffuser sur internet l’image d’un enfant, que l’on en soit ou non le parent, engage la responsabilité et peut s’avérer dangereux. De sordides affaires ont fait l’actualité ces dernières années dans le monde entier, comme la découverte de sites hébergeant des millions de photos d’enfants, récupérées sur les réseaux sociaux puis classées dans des catégories ne laissant guère de doutes sur le caractère pédophile de la plateforme et son activité criminelle. Ne négligeons pas le traumatisme que subira un jour l’enfant en découvrant sur internet ses propres photos. On sait quel rôle jouent les réseaux sociaux dans le drame du suicide des jeunes !
Comme le précise Interpol, en matière de lutte contre la pédocriminalité, le meilleur moyen de protéger nos enfants est d’entretenir un dialogue franc et ouvert avec eux sur l’utilisation des médias sociaux, des applications, des jeux vidéo et d’internet. Il faut les sensibiliser aux dangers d’internet dès que possible, idéalement dès qu’ils commencent à le fréquenter. La protection des enfants est de la responsabilité des plateformes, des entreprises de placement de produits, mais aussi des parents.
Ce texte a fait l’objet d’évolutions lors de son examen à l’Assemblée nationale et a été largement amélioré par notre commission de la culture. Il va dans le bon sens en servant les intérêts des enfants, et c’est bien volontiers que le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne
Article 1er
Le livre Ier de la septième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° À l’intitulé, après le mot : « professionnels », il est inséré le signe : « , » et, après le mot : « spectacle », sont insérés les mots : « , de l’audiovisuel » ;
2° À l’intitulé du titre II, après le mot : « spectacle », sont insérés les mots : « , de l’audiovisuel » ;
3° À l’intitulé du chapitre IV du même titre II, après le mot : « ambulantes », sont insérés les mots : « , l’audiovisuel » ;
4° L’article L. 7124-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « télévision », la fin du 2° est ainsi rédigée : « , d’enregistrements sonores ou d’enregistrements audiovisuels, quels que soient leurs modes de communication au public ; »
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« 5° Par un employeur dont l’activité consiste à réaliser des enregistrements audiovisuels dont le sujet principal est un enfant de moins de seize ans, en vue d’une diffusion à titre lucratif sur un service de plateforme de partage de vidéos.
« En cas d’obtention de l’autorisation mentionnée au 5° du présent article, l’autorité administrative délivre aux représentants légaux une information relative à la protection des droits de l’enfant dans le cadre de la réalisation de ces vidéos, qui porte notamment sur les conséquences, sur la vie privée de l’enfant, de la diffusion de son image sur une plateforme de partage de vidéos. Cette information porte également sur les obligations financières qui leur incombent, en application de l’article L. 7124-25 du code du travail. » ;
5° La section 2 du chapitre IV du titre II est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé, les mots : « agences de mannequins » sont remplacés par le mot : « personnes » ;
b) Après l’article L. 7124-4, il est inséré un article L. 7124-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 7124-4-1. – Lorsque l’enfant est engagé, en application du 5° de l’article L. 7124-1, l’autorisation individuelle prend la forme d’un agrément. » ;
6° L’article L. 7124-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 7124-5. – Les agréments prévus aux articles L. 7124-4 et L. 7124-4-1 pour l’engagement des enfants de moins de seize ans sont accordés par l’autorité administrative pour une durée déterminée renouvelable.
« Ils peuvent être retirés à tout moment.
« En cas d’urgence, ils peuvent être suspendus pour une durée limitée. » ;
6° bis (nouveau) L’article 7124-9 est ainsi modifié :
a) Au second alinéa, après les mots : « jusqu’à la majorité de l’enfant », sont insérés les mots : « ou son émancipation » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
7° Le premier alinéa de l’article L. 7124-10 est ainsi modifié :
a) La référence : « de l’article L. 7124-4 » est remplacée par les références : « des articles L. 7124-4 et L. 7124-4-1 » ;
b) À la fin, les mots : « de l’agence de mannequin qui emploie l’enfant » sont remplacés par les mots : « prévue à l’article L. 7124-5 » ;
8° (nouveau) Au second alinéa du même article L. 7124-10, les mots : « deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « second alinéa » ;
9° (nouveau) L’article L. 7124-25 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « articles L. 7124-1 et L. 7124-2 » sont remplacées par les références : « aux 1° à 4° de l’article L. 7124-1 et à l’article L. 7124-2 » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une même amende s’applique si les représentants légaux des enfants mentionnés au 5° de l’article L. 7124-1 ne remplissent pas les obligations mentionnées à l’article L. 7124-9. »
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Est puni de la même peine le fait pour toute personne employant des enfants mentionnés au 5° de l’article L. 7124-1 de ne pas respecter l’obligation mentionnée au second alinéa de l’article L. 7124-9. »
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Cet amendement rédactionnel vise à préciser que la sanction prévue s’applique à toute personne, employant des enfants de moins de 16 ans pour la réalisation de vidéos diffusées en ligne à titre lucratif, qui ne respecterait pas l’obligation de versement des fonds récoltés à la Caisse des dépôts et consignations, qu’il s’agisse ou non des représentants légaux de l’enfant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui vise à préciser le volet répressif du texte.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
Après l’article 6-1 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, il est inséré un article 6-2 ainsi rédigé :
« Art. 6-2. – Lorsque l’autorité administrative compétente mentionnée à l’article L. 7124-1 du code du travail constate qu’un contenu audiovisuel est mis à la disposition du public sur une plateforme mentionnée au 5° du même article L. 7124-1 en méconnaissance de l’obligation d’agrément préalable prévu au titre du même 5° de l’article L. 7124-1 ou de l’obligation déclarative prévue à l’article 3 de la loi n° … du … visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfant de moins de seize ans sur les plateformes en ligne, elle peut saisir l’autorité judiciaire selon les modalités et dans les conditions prévues par voie réglementaire afin que cette dernière ordonne toute mesure propre à prévenir un dommage imminent ou à faire cesser un trouble manifestement illicite. » – (Adopté.)
Article 3
I. – Hors des cas mentionnés à l’article L. 7124-1 du code du travail, la diffusion de l’image d’un enfant de moins de seize ans sur un service de plateforme de partage de vidéos, lorsque l’enfant en est le sujet principal, est soumise à une déclaration auprès de l’autorité compétente par les représentants légaux :
1° Lorsque la durée cumulée ou le nombre de ces contenus excède, sur une période de temps donnée, un seuil fixé par décret en Conseil d’État ;
2° Ou lorsque la diffusion de ces contenus occasionne, au profit de la personne responsable de la réalisation, de la production ou de la diffusion de ceux-ci, des revenus directs ou indirects supérieurs à un seuil fixé par décret en Conseil d’État.
II. – L’autorité mentionnée au premier alinéa du I du présent article formule des recommandations aux représentants légaux de l’enfant relatives :
1° Aux horaires, à la durée, à l’hygiène et à la sécurité des conditions de réalisation des vidéos ;
2° Aux risques, notamment psychologiques, associés à la diffusion de celles-ci ;
3° Aux dispositions visant à permettre une fréquentation scolaire normale ;
4° Aux obligations financières qui leur incombent en application du III du présent article.
III. – (Non modifié) La part des revenus directs et indirects tirés de la diffusion des contenus mentionnés au I qui excède le seuil fixé par décret en Conseil d’État en application du 2° du même I est versée à la Caisse des dépôts et consignations et gérée par cette caisse jusqu’à la majorité de l’enfant ou, le cas échéant, jusqu’à la date de son émancipation. Des prélèvements peuvent être autorisés en cas d’urgence et à titre exceptionnel. Une part des revenus, déterminée par l’autorité compétente, peut être laissée à la disposition des représentants légaux de l’enfant.
IV. – (Non modifié) Est puni de 75 000 € d’amende le fait de remettre sciemment des fonds, en contrepartie du placement d’un produit à des fins publicitaires, à un enfant mentionné au I ou à ses représentants légaux au-delà de la part fixée en application de la dernière phrase du III.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
1° Remplacer les mots :
La part des
par les mots :
Lorsque les
2° Remplacer les mots :
qui excède
par les mots :
excèdent, sur une période de temps donnée,
3° Remplacer les mots :
est versée
par les mots :
, les revenus perçus à compter de la date à laquelle ce seuil est dépassé sont versés sans délai
4° Remplacer les mots :
gérée
par le mot :
gérés
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Cet amendement vise à préciser que, au-delà du seuil prévu, les revenus directs et indirects tirés sur une période donnée de la diffusion des vidéos doivent être versés à la Caisse des dépôts et consignations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement tend à récrire partiellement l’article 3, en prévoyant surtout le versement sans délai des revenus perçus au-delà du seuil à la Caisse des dépôts et consignations. La commission émet un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. – Tout annonceur qui effectue un placement de produit dans un programme audiovisuel diffusé sur une plateforme de partage de vidéos dont le sujet principal est un enfant de moins de seize ans est tenu de vérifier auprès de la personne responsable de la diffusion si celle-ci déclare être soumise à l’obligation mentionnée au III du présent article. En pareil cas, l’annonceur verse la somme due en contrepartie du placement de produit, minorée, le cas échéant, de la part déterminée en application de la troisième phrase du même III, à la Caisse des dépôts et consignations, qui est chargée de la gérer jusqu’à la majorité de l’enfant ou, le cas échéant, jusqu’à la date de son émancipation. Les dispositions de la deuxième phrase dudit III sont applicables. Le non-respect de l’obligation fixée à la deuxième phrase du présent IV est puni de 3 750 euros d’amende.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Cet amendement de simplification vise à améliorer le dispositif en renforçant la sécurité juridique des parties concernées. Il s’agit de s’aligner sur le régime de droit commun prévu par le code du travail. L’amendement prévoit ainsi que les annonceurs devront vérifier auprès des parents si l’obligation de consignation des revenus s’applique. Sur la base de cette déclaration, le cas échéant, ils verseront les fonds à la Caisse des dépôts et consignations. Enfin, le montant de l’amende est aligné sur le régime de droit commun prévu par le code du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Comme vient de le dire M. le ministre, il s’agit de « coller » au code du travail, ce qui est une excellente chose. Par ailleurs, les annonceurs seront clairement responsabilisés. L’avis est favorable.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Cet amendement sécurise en partie les différents acteurs, mais le fait qu’il concerne seulement les plateformes de vidéos nous inquiète quelque peu. Les plateformes diffusant des photos mériteraient d’être soumises aux mêmes règles.
En outre, le montant de l’amende, initialement fixé à 75 000 euros, est ramené à 3 750 euros. J’entends qu’il s’agit de s’aligner sur le code du travail, mais nous parlons, en l’occurrence, des droits des enfants : la pertinence d’un tel alignement ne nous paraît pas évidente. Nous manquons là, à mon avis, une occasion de mieux cadrer les choses.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Madame la sénatrice, ce texte concerne la diffusion de vidéos. Il me semble que le dispositif, tel qu’il a été prévu par Bruno Studer et voté par l’Assemblée nationale, couvre néanmoins un grand nombre des problématiques qui ont été évoquées. Je propose que nous continuions à travailler ensemble sur d’autres sujets, par exemple la diffusion de photos.
M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Les services de plateforme de partage de vidéos adoptent des chartes qui ont notamment pour objet :
1° De favoriser l’information des utilisateurs sur les dispositions de nature législative ou règlementaire applicables en matière de diffusion de l’image d’enfants de moins de seize ans par le biais de leurs services et sur les risques, notamment psychologiques, associés à la diffusion de cette image ;
2° De favoriser le signalement, par leurs utilisateurs, de contenus audiovisuels mettant en scène des enfants de moins de seize ans qui porteraient atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale ou physique de ceux-ci ;
3° (nouveau) De prendre toute mesure utile pour empêcher le traitement à des fins commerciales, telles que le démarchage, le profilage et la publicité basée sur le ciblage comportemental, des données à caractère personnel de mineurs qui seraient collectées par leurs services à l’occasion de la mise en ligne par un utilisateur d’un contenu audiovisuel où figure un mineur ;
4° D’améliorer, en lien avec des associations de protection de l’enfance, la détection des situations dans lesquelles la réalisation ou la diffusion de tels contenus porteraient atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale ou physique des mineurs de moins de seize ans qu’ils font figurer ;
5° (nouveau) De faciliter la mise en œuvre, par les mineurs, du droit à l’effacement des données à caractère personnel prévu à l’article 51 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés et d’informer ceux-ci, en des termes clairs et précis, aisément compréhensibles par eux, des modalités de mise en œuvre de ce droit.
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° De favoriser l’information et la sensibilisation, en lien avec des associations de protection de l’enfance, des mineurs de moins de seize ans sur les conséquences de la diffusion de leur image sur une plateforme de partage de vidéos, sur leur vie privée et en termes de risques psychologiques et juridiques et sur les moyens dont ils disposent pour protéger leurs droits, leur dignité et leur intégrité morale et physique ;
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Un angle mort demeure : l’information et la sensibilisation des mineurs eux-mêmes sur les conséquences de la diffusion de leur image, singulièrement en matière de vie privée et de risques psychologiques. C’est pourquoi nous proposons que les chartes éditées par les plateformes en ligne abordent cette problématique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur. Les auteurs de cet amendement, qui va dans le bon sens, ont tenu compte de nos échanges en commission. Le dispositif a une dimension pédagogique. Il ne faudrait pas, en effet, que les enfants croient que tourner des vidéos pour les diffuser sur YouTube ou TikTok représente une voie d’avenir ou un quelconque nirvana professionnel. La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Franck Riester, ministre. Je suis totalement en phase avec le rapporteur. Cet amendement, qui est tout à fait dans l’esprit du texte de Bruno Studer, vise à compléter utilement le dispositif : il est important de sensibiliser les mineurs aux conséquences de la diffusion de leur image. L’avis du Gouvernement est également favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(L’article 4 est adopté.)
Article 4 bis (nouveau)
Après l’article 15 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel promeut l’adoption par les services de plateforme de partage de vidéos des chartes prévues à l’article 4 de la loi n° … du … visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne.
« Il publie un bilan périodique de l’application et de l’effectivité de ces chartes. À cette fin, il recueille auprès de ces services, dans les conditions fixées à l’article 19 de la présente loi, toutes les informations nécessaires à l’élaboration de ce bilan. » – (Adopté.)
Article 5
Le consentement des titulaires de l’autorité parentale n’est pas requis pour la mise en œuvre, par une personne mineure, du droit à l’effacement des données à caractère personnel prévu à l’article 51 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. – (Adopté.)
Article 6
(Suppression maintenue)
Article 7
(Non modifié)
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, un rapport évaluant le renforcement de la protection des données des mineurs depuis la mise en place du règlement n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données). – (Adopté.)
Article 8
(Non modifié)
La présente loi entre en vigueur six mois après sa publication. – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble