Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.
M. Max Brisson. En complément de ce que vient de dire le président de la délégation sénatoriale aux entreprises, je souhaite ajouter quelques éléments, bien que mon amendement soit identique.
Je mesure bien que, au moment où l’on évoque un couvre-feu, sans que l’on sache vraiment de quoi il retourne, et alors que nous sommes suspendus à la parole présidentielle à venir, la demande formulée au travers de cet amendement puisse sembler en décalage par rapport au discours ambiant.
Néanmoins, M. Babary l’a dit, je suis convaincu qu’il nous faut apprendre à vivre avec cette situation sanitaire, donc trouver des solutions pour ne pas détruire des entreprises en danger, pour leur permettre de s’adapter. La fermeture administrative, depuis le 14 mars dernier, donc depuis sept mois, des ERP de type P – discothèques, établissements de nuit – a entraîné pour ces établissements de graves difficultés.
Ces entreprises ont proposé, de longue date, un protocole sanitaire contraignant, mais celui-ci n’a jamais été examiné. A contrario, les activités qu’ils proposent habituellement, en leurs murs, avec professionnalisme, s’exercent – on l’a bien vu, en particulier cet été – de manière sauvage, dans la nature, en dehors de tout encadrement professionnel, ce qui participe pleinement à la propagation du virus.
Ces amendements visent donc à proposer que les ERP fermés en raison de leur catégorie, parce que leur activité ne pourrait « garantir la mise en œuvre des mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus » sans protocole sanitaire strict, puissent proposer d’autres types d’activités exercées par des catégories d’ERP proches, dont les garanties semblent suffisamment solides. Cette réouverture ne modifierait pas leur classement initial.
Tel est le sens de cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Paccaud, Daubresse et Le Gleut, Mmes Puissat et Gatel, MM. Laugier et Wattebled, Mme N. Delattre, MM. Regnard, Levi, Brisson et D. Laurent, Mme Joseph, M. Vogel, Mmes Lassarade et de Cidrac, MM. Rietmann, Perrin et Bazin, Mmes Dumont, Lavarde, L. Darcos et M. Mercier, M. Canevet, Mmes Gruny, Berthet, Dumas et Paoli-Gagin, MM. Lefèvre, Sido et Gremillet, Mme Di Folco, M. Détraigne, Mmes F. Gerbaud et Billon et MM. Husson, B. Fournier, Bouchet, Chasseing, C. Vial, Sautarel, Duplomb, Longeot et Guerriau, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° du I de l’article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les établissements recevant du public fermés en application du présent 2° peuvent demander au représentant de l’État dans le département de rouvrir après examen de leur protocole sanitaire, notamment pour l’accueil d’activités physiques pour les personnes munies d’une prescription médicale. »
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Je vous propose, au travers de cet amendement, que le préfet puisse autoriser, après examen du protocole sanitaire, la réouverture d’établissements actuellement fermés pour les activités physiques des personnes munies d’une prescription médicale de sport.
En effet, il paraît important que les salles de sport et les équipements sportifs puissent, dans certains cas, rouvrir. Les exploitants de ces salles ont énormément travaillé sur des protocoles sanitaires drastiques, validés par le ministère de la santé, mais il leur est désormais interdit d’ouvrir, sans même que leur situation soit considérée.
Tout le monde s’est félicité, durant le confinement, de l’attrait des activités sportives ; et le Gouvernement a encouragé ces dernières dans ses discours. Or, aujourd’hui, tout un pan de notre vie sociale est mis à l’arrêt.
Par ailleurs, force est de constater que, sur certains territoires, nous arrivons à des situations ubuesques. Par exemple, les salles de sport et autres équipements sportifs de plusieurs métropoles sont fermés, mais de semblables structures, situées à moins de trois kilomètres de ces métropoles, sont ouvertes, ce qui crée un important appel d’air et cause potentiellement le déplacement du virus.
Enfin, des personnes disposant de prescriptions médicales de sport ne sont plus en mesure d’accéder à leurs soins. Cela peut avoir d’importantes répercussions sur la santé de ces patients.
Plusieurs associations se sont élevées contre cette situation. Par conséquent, soumettre une possible réouverture à l’examen approfondi des protocoles sanitaires envisagés me paraît tout à fait souhaitable pour ce public.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Ce bouquet d’amendements exhale un parfum envoûtant (Sourires.), et il aura fallu beaucoup de courage à la commission pour émettre à leur sujet un avis défavorable (M. Laurent Duplomb s’exclame.), car nous comprenons évidemment ce qui les motive.
M. Serge Babary. Bien sûr !
M. Philippe Bas, rapporteur. L’amendement n° 23, de Mme de La Gontrie et de certains de ses collègues, vise à supprimer complètement la possibilité, pour les autorités sanitaires, de procéder à la fermeture de certaines catégories d’établissements. Il est vrai que, au mois de juillet dernier, nous nous étions opposés à cette disposition, qui figurait dans la loi que nous n’avions pas adoptée.
M. Philippe Bas, rapporteur. Oui, mais nous étions, à cette époque, dans une période où l’épidémie paraissait jugulée ; il nous paraissait donc excessif de vouloir procéder par interdiction. La situation est aujourd’hui tout autre, il faut le reconnaître. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à cet amendement n° 23.
Les dispositions de l’amendement n° 5 rectifié quater de notre collègue Serge Babary, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, montrent la proximité de celui-ci avec le monde économique.
Néanmoins, il nous semble véritablement que, avec soixante-quatorze départements classés en zone orange, il y aurait tout de même un certain risque à adopter les mesures que vous proposez, cher collègue, et cela pour une raison très simple : les restaurants doivent respecter un certain nombre de réglementations – la sécurité incendie, le renouvellement de l’air, etc. Par conséquent, ne devient pas restaurant, même temporairement, qui veut. Cela présente également des risques. Exercer, parce que l’on a une salle de danse, une activité de restaurateur, dans un contexte où cette activité est d’ailleurs fortement contrainte, n’est pas si simple.
Nous n’avons donc pas souhaité, là encore, vous suivre, et je vous demande de le comprendre. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, ainsi que sur l’amendement identique n° 7 de M. Brisson.
Enfin, je comprends aussi votre préoccupation pour les salles de sport, cher collègue Michel Savin, mais je ne suis pas certain que votre amendement soit de nature à résoudre les problèmes de ces établissements. En revanche, je crains qu’il ne tende à recréer des situations de promiscuité pouvant présenter un risque sanitaire.
Il faut savoir ce que nous préférons ! Le traitement de toutes les difficultés économiques provoquées par les mesures qui restreignent l’exercice de la liberté du commerce et de l’industrie doit se faire au travers des mesures de prêt gratuit ou de suppressions de charges, qui sont absolument indispensables pour passer ce cap. Dans une situation d’aggravation de la crise sanitaire, nous devons être raisonnables.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur ces quatre amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je ne puis imaginer que le rapporteur n’ait pas lu avec attention les amendements de nos collègues !
Il s’agit de demander au représentant de l’État dans le département de permettre la réouverture provisoire d’un certain nombre de lieux. Il ne s’agit donc absolument pas de l’hypothèse dans laquelle tout pourrait rouvrir et rien ne pourrait être fermé. Cette nuance est importante.
Aussi, pour sa part, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera ces amendements. Nous pensons que nous devons faire confiance aux préfets, qui sauront distinguer les modalités selon lesquelles ces lieux peuvent être ouverts.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. J’entends bien les propos de notre rapporteur, mais je veux préciser quelques points.
Tout d’abord, la situation n’est pas la même sur l’ensemble du territoire.
M. Laurent Duplomb. Tout à fait !
M. Michel Savin. Il est donc bon que l’on puisse traiter les situations au cas par cas.
En outre, c’est vrai, au travers de notre amendement, nous demandons au préfet de prendre les dispositions pour contrôler la situation.
Or, je puis vous l’affirmer, les professionnels qui tiennent ces salles de sport et les collectivités qui ont la responsabilité des équipements sportifs, gymnases et piscines ont pris toutes les dispositions nécessaires pour accueillir correctement le public.
Encore une fois, ce n’est pas qu’un problème économique ; c’est aussi un problème de santé publique. Les Français sont encouragés à pratiquer les activités physiques et sportives pour avoir une bonne santé ; on l’a prôné pendant toute la période du confinement.
Or, aujourd’hui, lorsque l’on rencontre des associations proposant de l’activité physique aux patients qui ont été opérés d’un cancer, du cœur ou encore de l’obésité, ces structures nous disent ne plus pouvoir accéder aux équipements et ne pas avoir vu leurs patients depuis trois semaines. La seule réponse que l’on peut leur apporter consiste à dire que tout est fermé, y compris pour ces quelques patients.
Encore une fois, faisons confiance tant aux collectivités qu’aux préfets, qui représentent l’État, mais aussi aux professionnels, qui font les choses très correctement et qui prennent toutes les dispositions nécessaires ; responsabilisons-les un peu. On voit d’ailleurs des lieux qui brassent bien plus de personnes que les salles de sport. (M. Laurent Duplomb applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je souhaite réagir aux propos de notre rapporteur.
Il s’agit de sauver des entreprises qui sont indispensables dans les grandes métropoles, mais aussi dans les stations balnéaires et les communes touristiques, avec des professionnels qui encadrent le monde de la nuit.
Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, la proximité de M. Serge Babary avec les entreprises, mais vous pourriez parler de ma proximité avec le monde de la nuit… (Sourires.)
M. Philippe Bas, rapporteur. J’allais le faire ! (Nouveaux sourires.)
M. Max Brisson. Cela dit, il s’agit de professionnels dont nous avons besoin pour encadrer des jeunes qui ont envie de faire la fête. Or ces entreprises vont disparaître, et les effets de cette disparition pour la vie sociale et l’ordre public se produiront dans la durée.
Par ailleurs, cela a été dit, tant l’amendement de M. Babary que le mien tendent à prévoir une étude au cas par cas. J’en suis désolé, cher monsieur le rapporteur, certaines discothèques et certains établissements de nuit ont parfaitement les capacités et les moyens d’être transformés en restaurants. Seul leur classement les empêche, aujourd’hui, d’exercer une activité qui existe à côté. Par conséquent, comprenez leur incompréhension de voir des concentrations de jeunes dans des restaurants et de ne pas pouvoir faire la même chose.
Aussi, ce qui est demandé ici, c’est que, au cas par cas, le préfet puisse autoriser des activités comparables à d’autres activités de proximité qui semblent pouvoir être tolérées.
Je l’ai bien compris, nous ne sommes pas dans la situation du mois de juillet. Mais un certain nombre de rassemblements qui se sont produits sans être encadrés par des professionnels peuvent aussi contribuer à expliquer la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui…
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Boyer. Je soutiens tout à fait les présents amendements, monsieur le ministre, parce que l’ouverture tant des discothèques que des salles de sport me paraît indispensable. En effet, lorsque l’on voit, d’un côté, la population massée dans le métro le matin,…
M. Michel Savin. Absolument !
M. Jean-Marc Boyer. … et, de l’autre, les salles de sport et les discothèques qui sont fermées, on se dit qu’il y a tout de même un problème de logique dans la stratégie demandée à l’ensemble de la population française.
J’ignore si vous le savez, mais freiner le contact entre les individus, leur interdire de se serrer la main et de s’embrasser pose problème, car ces relations contribuent à la production d’une hormone, la sérotonine. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Lorsque l’on bloque ce fonctionnement, cela entraîne la frustration des individus et fait naître des situations anxiogènes. De là nécessairement des comportements d’agressivité, qui sont tout à fait négatifs et perturbateurs pour le fonctionnement de la société.
Si l’on ne permet pas le développement et l’extériorisation de ces sentiments, on se dirigera vers des situations bien plus anxiogènes encore, et le remède sera pire que le mal.
Par conséquent, nous devons essayer, je pense, de trouver une solution encadrée par des règles sanitaires, tant dans les discothèques que dans les salles de sport, afin d’éviter aux jeunes de se réunir dans des cercles ou des appartements privés, où il se fait n’importe quoi.
Mes chers collègues, il est important de soutenir ces amendements déposés pour le bien-être de tous.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. C’est avec beaucoup d’amitié que je veux vous lire cette citation, monsieur le rapporteur : « Cet État se veut si bienveillant envers ses citoyens qu’il entend se substituer à eux dans l’organisation de leur propre vie. Ira-t-il jusqu’à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d’eux-mêmes ? Le plus grand soin d’un bon gouvernement devrait être d’habituer peu à peu les peuples à se passer lui. » Cette citation n’est pas de moi, elle est de Tocqueville.
M. Philippe Bas, rapporteur. Ah !
M. Laurent Duplomb. Or j’ai véritablement l’impression qu’elle s’applique aujourd’hui comme en 1838.
Ainsi, ces amendements, qui sont pragmatiques et de bon sens, tendent à laisser la possibilité aux préfets, comme l’a dit Mme de La Gontrie, d’avoir une action de terrain au vu de ce qui se passe.
Considérons le territoire dont je suis élu, la Haute-Loire, où il n’y a jamais eu plus de trois cas simultanés de coronavirus en réanimation, dans tous les hôpitaux du département. Est-ce que, dans les départements de ce type, on ne peut pas lâcher la bride, plutôt que de vouloir appliquer, d’une façon totalement technocratique, toutes les mesures partout de la même façon, de manière totalement irréfléchie ?
Comme l’a dit Michel Savin, cela mènera à des privations de liberté qui, à un moment ou à un autre, auront des conséquences.
Par conséquent, revenez sur cet avis, monsieur le rapporteur. Laissez-nous adopter ces amendements ; je pense que le Sénat en sortira grandi. (M. Jean Bacci applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Babary, pour explication de vote.
M. Serge Babary. On ne peut pas répondre sèchement et définitivement par la négative à des chefs d’entreprise qui veulent simplement exister !
Si l’on ne fait rien, la plupart de ces établissements devront fermer dans les prochains mois. Par conséquent, leur proposer un changement de catégorie d’ERP, les faire migrer de leur activité, qui subit une fermeture administrative, vers une activité qui fonctionne, sur le fondement d’une décision préfectorale, ne devrait pas poser de problème particulier, puisqu’ils resteraient dans le cadre de la réglementation qui s’applique aux autres ERP.
Tel est le sens de mon amendement, auquel il faut répondre plus favorablement qu’en claquant la porte à ces personnes, qui cherchent désespérément à sauver leur entreprise.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er, et les amendements identiques nos 5 rectifié quater et 7 rectifié ainsi que l’amendement n° 17 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre plus avant l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’observation ?…
Il en est ainsi décidé.
L’amendement n° 20 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute prorogation ultérieure du régime transitoire institué à la sortie de l’état d’urgence sanitaire est subordonnée à la présentation par le Gouvernement d’un rapport au Parlement établissant l’impérieuse nécessité d’une telle mesure. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Depuis le début de l’épidémie, en mars dernier, nous n’avons eu de cesse que de dénoncer l’attitude du Gouvernement à l’égard du Parlement.
Légiférant systématiquement selon la procédure accélérée, par décrets et par ordonnances, l’exécutif ne laisse que peu de place au législateur dans la gestion de la crise sanitaire. Souhaitant agir avec célérité, il balaie toute velléité de concertation parlementaire, faisant du débat démocratique une variable d’ajustement. Combien de temps encore écartera-t-on les élus des territoires des décisions prises afin d’endiguer la circulation du virus ?
Alors que les foyers épidémiques apparaissent localement, il est primordial que les représentants de la Nation et des territoires, députés comme sénateurs, soient davantage informés des évolutions de la pandémie et des moyens financiers, juridiques et sociaux mis en œuvre pour la contrer.
Le présent amendement, qui vise à permettre une information accrue du Parlement, tend à demander au Gouvernement de lui présenter un rapport justifiant toute prorogation ultérieure de ce régime d’exception. Une démocratie digne de ce nom commence par un Parlement informé. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Un rapport préalable à un projet de loi s’appelle une étude d’impact et il est prévu pour tout projet de loi… Un tel rapport n’est donc pas nécessaire.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Le Gouvernement a également émis un avis défavorable sur cet amendement.
Par ailleurs, le Gouvernement prend acte du vote du Sénat qui, s’il était confirmé à l’issue de la navette parlementaire, impliquerait une mesure assez radicale : la réouverture de l’ensemble des ERP, qui ne pourraient plus être fermés que sur décision individuelle du préfet, à la suite de manquements constatés !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pas du tout !
M. Olivier Véran, ministre. Mais si ! Vous êtes tout à fait souverains dans vos votes, je ne le conteste pas, mais je prends acte que, si cette mesure allait au bout du processus, après promulgation de la loi, les discothèques pourraient rouvrir à Paris, à Lille, à Saint-Étienne, à Grenoble, à Marseille, à Aix-en-Provence et dans l’ensemble des zones d’alerte maximale de notre territoire, jusqu’à ce qu’il soit démontré, individuellement, ERP par ERP, discothèque par discothèque, que des foyers identifiés dans ces établissements justifient leur fermeture pour raisons sanitaires.
J’indique cela, mesdames, messieurs les sénateurs, parce que j’entends souvent que le Gouvernement est irresponsable, qu’il n’est pas « à la hauteur », pas bon dans sa gestion de la lutte virale. Je veux juste signaler que, avec ce vote, s’il était confirmé, je ne suis pas sûr que nous soyons à même de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la protection des Français.
Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié ter, présenté par MM. Savin, Piednoir, Kern, Paccaud, Daubresse et Le Gleut, Mmes Puissat et Gatel, MM. Laugier et Wattebled, Mme N. Delattre, MM. Regnard, Levi, Brisson et D. Laurent, Mme Joseph, M. Vogel, Mmes Lassarade et de Cidrac, MM. Rietmann, Perrin et Bazin, Mmes Dumont, Lavarde, L. Darcos et M. Mercier, M. Canevet, Mmes Gruny, Berthet, Dumas et Paoli-Gagin, MM. Lefèvre, Sido et Gremillet, Mme Di Folco, M. Détraigne, Mmes F. Gerbaud et Billon, MM. Husson, B. Fournier, Bouchet et Saury, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Chasseing, C. Vial, Sautarel, Duplomb, Longeot et Guerriau, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du III de l’article 1er de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les mesures prises en application du 2° et 3° du I du présent article sont strictement adaptées à la situation sanitaire locale et prennent en compte les caractéristiques des établissements recevant du public, notamment la capacité d’accueil. »
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Monsieur le ministre, je veux évoquer la situation que l’on rencontre aujourd’hui dans les stades.
Aujourd’hui, la réglementation permet de limiter le public assistant à certaines compétitions à 1 000 personnes, souvent parquées dans une tribune, le reste du stade restant vide. Il ne me paraîtrait pas incompréhensible que ces équipements puissent être remplis à au moins 20 % ou 30 % de leur capacité. Cela permettrait de répondre à une demande forte des milieux sportifs.
En outre, il convient d’organiser les entrées et les sorties des spectateurs dans chaque équipement.
On a l’impression que le sport est une fois de plus stigmatisé dans les décisions adoptées et qu’il paie aujourd’hui le prix fort aujourd’hui de la pandémie.
L’amendement que je défends avait été adopté par les députés en commission, avant que le Gouvernement ne les invite à faire marche arrière. Soyons ambitieux quant à son devenir !
Là encore, faisons confiance aux acteurs des territoires, aux préfets, représentants de l’État, aux clubs, aux acteurs locaux et aux dirigeants pour organiser la présence des spectateurs dans les stades.
Il y a aussi un enjeu économique pour certains sports qui, contrairement au football, ne bénéficient pas des droits de télévision. De nombreux sports vivent uniquement des recettes. La limitation à 1 000 personnes pose aujourd’hui de véritables problèmes économiques pour ces sports.
Nos stades comptant entre 5 000 et 20 000 places, on peut envisager une jauge à 20 % ou 30 %, en faisant évidemment respecter les règles de sécurité, le port du masque et la distanciation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je pense qu’il ne faut pas examiner cet amendement de manière trop rapide et trop radicale, compte tenu notamment de ce qu’a dit M. le ministre tout à l’heure.
Je rappelle que le Sénat a voté, voilà quelques instants, la possibilité, pour les représentants de l’État dans les départements, d’organiser et de limiter l’accès à un certain nombre de lieux.
Que ces contraintes prennent en compte les caractéristiques des établissements tombe sous le sens. L’argument que cela donnera trop de travail au préfet ne nous paraît vraiment pas acceptable !
Nous savons très bien que les établissements n’ont pas tous la même jauge. Mon cher collègue, cela ne vaut pas que pour les lieux de pratique sportive ! Toute mesure doit être prise en tenant compte de la jauge.
À notre grand étonnement, nous avons vu que des manifestations culturelles de grande qualité ont été autorisées parce que la jauge semblait rendre l’application des règles sanitaires possible. Cela doit donc être possible pour tous, y compris pour les lieux qui sont moins emblématiques ou moins connus, mais qui sont tout aussi importants pour l’épanouissement personnel et l’activité économique.
J’indiquerai, pour terminer, que la période que nous vivons va durer de longs mois. Nous devons pouvoir continuer à vivre, même dans les conditions sanitaires les plus strictes possible. Tel est l’objet de cet amendement, à l’instar des précédents.
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je pense que nous sommes là au cœur de notre débat. Certains souhaitent que l’approche soit la plus fine, la plus territoriale, la plus adaptée aux réalités possible, et qu’elle s’appuie, en conséquence, sur le représentant de l’État dans le département pour juger des situations.
Monsieur le ministre, je suis quelque peu surpris de votre réaction, qui était un peu facile, d’autant que, au moment de donner votre avis sur nos amendements, vous n’avez fait que dire que vous suiviez l’avis du rapporteur. Si vos explications avaient précédé notre vote, elles auraient permis d’éclairer la représentation nationale. Au lieu de cela, vous nous faites la leçon a posteriori, en vous appuyant sur les exemples les plus dramatiques.
Il est évident que, dans les lieux où le risque est extrêmement grave, les préfets ne rendront pas d’autorisation. Faisons confiance aux territoires, que le Premier ministre cite si souvent. Or, aujourd’hui, on voit bien que, dans la pratique, vous voulez uniformiser, au risque de rendre un certain nombre de mesures inacceptables pour la population. Comme l’a expliqué Laurent Duplomb, les gens ne comprennent pas qu’elles soient appliquées en Haute-Loire…
Ma grand-mère disait qu’il ne faut pas hurler avec le loup inutilement. C’est un peu ce que vous faites ici ! Nous vous demandons simplement de permettre que les mesures soient appliquées avec discernement, territoire par territoire, en laissant faire le préfet, plutôt que de manière par trop uniforme.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez voté une disposition qui interdit d’office et d’emblée la fermeture d’un ensemble d’établissements recevant du public par catégorie !
Si elle devait être appliquée, cette disposition empêcherait à tout moment de fermer une catégorie d’établissements, quelles que soient les conditions sanitaires, y compris dans les zones d’alerte maximale. Ne resterait alors que la possibilité pour un préfet de constater qu’un établissement en particulier pose des difficultés au regard de la sécurité sanitaire et donc de le fermer a posteriori.
Je le répète, parce que c’est important et parce que nous sommes ici pour partager nos analyses : tout à l’heure, vous avez, de fait, voté la réouverture des bars et des discothèques dans toutes les villes de France.