M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, sur l’article.
Mme Isabelle Briquet. L’article 13, présenté comme portant simplification de la taxation de l’électricité, procède à une harmonisation des taux pratiqués par les collectivités. En créant un taux unique, il conduira à augmenter ceux des communes qui avaient choisi d’appliquer un taux nul ou faible.
Cet article remet donc en cause l’autonomie fiscale des collectivités territoriales ; les communes ne pouvant plus délibérer sur le montant du produit à percevoir, elles seront soumises à l’État.
Madame la ministre, vous entendez que les communes soient gérées non par des élus, mais uniquement par des agents d’exécution, et vous poursuivez une logique de centralisation qui est dénoncée de toutes parts sur le terrain.
Pourtant, vous vantez régulièrement la décentralisation et vous louez la gestion fiscale des maires. C’est très bien, mais, comme souvent, votre discours ne correspond pas aux mesures que vous portez – cet article 13 en apporte la preuve.
Le Sénat est profondément attaché à la libre administration et à l’autonomie des collectivités ; aussi, je vous demande au moins, madame la ministre, de laisser aux communes le peu de latitude qui leur reste !
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, sur l’article.
M. Victorin Lurel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on peut comprendre le souci de simplification et de regroupement de la gestion dans un guichet unique, mais cet article suscite de vraies inquiétudes – ne nous le cachons pas ! –, en ce qu’il pose le problème de l’autonomie fiscale des collectivités.
Le 6 octobre dernier, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) n’a pas hésité à décrire ainsi cette mesure : à la réforme de la taxe d’habitation « s’ajoute la nationalisation de 2,3 milliards d’euros de taxe sur la consommation finale d’électricité, dont 906 millions d’euros pour le bloc communal. D’ici à 2023, les collectivités ne pourront plus délibérer sur le montant du produit à percevoir. En outre, quel sera l’impact pour les ménages d’une tarification locale de l’électricité portée au maximum ? »
On le sait aujourd’hui, cet impact atteindrait 100 millions d’euros de plus pour les collectivités qui ne pratiquent pas le taux maximum de 8 %, soit, tout de même, près de 1 800 communes, dont les habitants devront payer bien davantage : la traduction individuelle de cette mesure sera une hausse de cinquante-cinq euros au maximum pour les Français résidant dans ces communes !
Cela entre quelque peu en contradiction avec l’engagement pris par le Gouvernement de ne pas augmenter les impôts : ici, on les augmente et l’on réduit d’autant l’autonomie des collectivités.
Telles sont les inquiétudes que nous souhaitions porter à votre connaissance.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.
Mme Patricia Schillinger. L’article 13 qui vise à clarifier et à simplifier le système de taxation de l’électricité ne manque pas de soulever des inquiétudes auprès des collectivités qui perçoivent cette taxe.
Cet article prévoit, d’une part, la fusion des trois systèmes actuels de taxation, communal, départemental et national, d’autre part, le transfert de la gestion du recouvrement de cette taxe unifiée à la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Si l’on ne peut que souscrire à la volonté de simplification à laquelle répond cet article, je me dois de relayer les craintes que suscitent les dispositifs proposés. En uniformisant le système de taxes pour ne retenir, d’ici à 2023, qu’un seul taux, l’article 13 porte une atteinte à la liberté, dont jouissaient jusqu’ici les collectivités, et en définitive à leur autonomie.
N’est-il pas possible de permettre aux collectivités de conserver leur liberté de fixation de taux pour cette taxe, tout en laissant la gestion du recouvrement à la DGFiP, comme pour la taxe d’habitation ?
Par ailleurs, cette uniformisation impliquant un alignement sur le taux maximal, on peut craindre ses répercussions sur la facture d’électricité des consommateurs, particulièrement dans les communes où le taux est actuellement faible ou nul.
Enfin, le système proposé substitue au versement de la taxe aux collectivités le versement d’une part communale ; or les collectivités souhaiteraient avoir l’assurance que ces reversements seront effectués de manière régulière et qu’ils tiendront compte des évolutions locales. Il s’agit, pour elles, d’obtenir la garantie que les montants de taxe reversés à partir de 2023 correspondront bien aux quantités d’électricité délivrées sur leur territoire.
Le Sénat représente les collectivités au plus près. C’est pourquoi je présenterai des amendements visant à apaiser ces craintes.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quelques mots sur cet article 13 qui porte une simplification en matière de tarification.
La taxation de la consommation finale d’électricité est basée sur une composante dite nationale et sur deux taxes locales qui se partagent entre les collectivités du bloc communal et les départements, conformément à la loi de décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, dite loi Nome.
Globalement, le rendement annuel de cette taxe s’élève à 10 milliards d’euros, dont 7,7 milliards pour la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité et 2,3 milliards de taxes communales et départementales.
S’agissant de la taxe communale, la compétence est essentiellement allouée à des groupements de communes et je tiens à mentionner l’importance du rôle de proximité des syndicats intercommunaux et des fédérations de l’énergie qui, au fil des années, ont réalisé beaucoup de travaux sur l’ensemble du territoire national, tels que des extensions de réseau ou des enfouissements. Ces travaux de qualité sont utiles aussi bien aux particuliers qu’aux entreprises.
Cette réforme, qui prévoit d’une certaine façon un guichet unique, suscite de nombreuses inquiétudes, notamment parce qu’elle met en difficulté l’autonomie financière des collectivités locales. Ce sujet est abordé régulièrement, puisque, article après article, on constate que les pouvoirs locaux sont de plus en plus mis de côté.
Cet article entraînera donc un recul du pouvoir fiscal des collectivités territoriales. Il est, certes, fait référence au droit européen, mais il faut être particulièrement vigilant sur ces sujets qui sont importants pour nos collectivités.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° I-244 est présenté par MM. Féraud, Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly, Lurel et Antiste, Mme Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Conconne, MM. Durain, Fichet et Gillé, Mme Harribey, M. Jacquin, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lubin, MM. Marie, Mérillou et Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° I-531 est présenté par M. Delcros, Mme Vermeillet et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° I-658 est présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° I-723 rectifié bis est présenté par Mme Schillinger, MM. Haye, Théophile, Mohamed Soilihi, Hassani, Yung, Rohfritsch, Dennemont et Iacovelli, Mme Duranton et M. Patient.
L’amendement n° I-917 rectifié est présenté par M. Salmon, Mme Taillé-Polian, MM. Parigi et Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Labbé et Mme Poncet Monge.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour présenter l’amendement n° I–244.
Mme Isabelle Briquet. Avec le présent article, le Gouvernement souhaite unifier au niveau national les tarifs de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE), un prélèvement réalisé par les fournisseurs d’électricité sur les factures, dont le produit est ensuite reversé aux communes au titre de l’exercice de la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité.
Les communes peuvent actuellement choisir entre six taux pour cette taxe. Cet article prévoit d’unifier ces taux, d’ici à 2013, pour ne conserver que le taux maximum.
En d’autres termes, cette réforme se traduira par une augmentation de la facture d’électricité pour les habitants des communes qui n’appliquent pas le taux maximum – elle aura donc inévitablement un impact sur les ménages. En outre, les communes ne pourront plus délibérer sur le montant du produit à percevoir.
Le Gouvernement avait indiqué qu’il n’y aurait pas d’augmentation d’impôt, mais l’article 13 porte une hausse de l’imposition pour les habitants des communes qui appliquaient jusqu’ici un taux zéro. Il aura des conséquences négatives sur le pouvoir d’achat des Français, tout en affaiblissant une nouvelle fois le pouvoir des collectivités et de leurs groupements de voter les taux d’imposition.
Le présent amendement vise donc à supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° I-531.
M. Bernard Delcros. Les précédents intervenants ont largement développé le sujet ; je serai donc bref.
La taxe sur la consommation finale d’électricité est aujourd’hui perçue par l’État, les départements et les communes ; cet article prévoit que l’État percevra la totalité de la taxe avant de la reverser. Nous en proposons la suppression afin que les départements et les communes continuent à percevoir leurs taxes et à voter les taux.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-658.
M. Éric Bocquet. Nous sommes revenus au débat que nous avions samedi dernier sur l’article 3 à propos de l’autonomie fiscale des collectivités et du respect du principe constitutionnel de leur libre administration. Nous demandons nous aussi la suppression de cet article.
De nouveau – nous l’avons déjà évoqué ce matin –, le Gouvernement propose, au nom de la conformité avec des directives européennes, de faire perdre aux taxes locales sur la consommation finale d’électricité leur caractère local. Ces taxes seraient englobées dans une taxe nationale unique, réservée par quote-part aux bénéficiaires locaux.
S’il est, comme toujours, présenté sous couvert de simplification et d’harmonisation, ce dispositif aboutirait, si l’on y regarde bien, à un nouvel affaiblissement de l’autonomie fiscale des collectivités, ici les communes et les départements.
La situation liée à la crise perturbe déjà fortement les budgets locaux et ils n’ont pas besoin d’un nouveau coup de rabot sur leurs ressources financières, particulièrement lorsqu’il s’agit de taxes pour lesquelles les collectivités disposent encore d’un pouvoir de taux, ce qui est de plus en plus rare.
Cette taxe sur la consommation finale d’électricité est importante : elle représente 2,3 milliards d’euros, dont 906 millions d’euros pour le seul bloc communal. Rappelons, en outre, que cette petite marge de manœuvre laissée aux collectivités, même très encadrée, leur permettait d’agir pour la transition écologique en dehors des politiques centralisées.
Le Gouvernement parle à tout va de territorialisation des politiques, mais introduit de telles mesures qui reviennent à imposer une recentralisation très forte.
Au-delà des questions relatives à l’autonomie fiscale locale, cet article conduirait à une augmentation du prix de l’électricité pour les ménages, car l’harmonisation tarifaire de taux aujourd’hui fixés par les élus locaux se ferait au plan national.
La Gazette des communes a d’ailleurs qualifié cette mesure d’arme de recentralisation massive !
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° I-723 rectifié bis.
Mme Patricia Schillinger. À défaut de la garantie pour les collectivités de la préservation de leur autonomie fiscale par la liberté de fixer le taux de cette taxe, ainsi que de celle d’une juste redistribution de son produit, et compte tenu des craintes que suscitent les conséquences de cet article sur le revenu des ménages, j’en demande la suppression.
Alors que la crise sanitaire obère déjà les revenus de nombreux ménages, je m’interroge sur l’opportunité de cette mesure qui, même si elle n’en affecte qu’un nombre limité, risque d’emporter des conséquences non négligeables pour certains, notamment dans les communes rurales dans lesquelles les taux sont faibles. Au final, l’augmentation risque de ne pas être anodine.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° I-917 rectifié.
M. Daniel Salmon. Je suis en accord avec tout ce qu’ont dit mes collègues et nous demandons également la suppression de cet article, car il participe à l’affaiblissement de l’autonomie des collectivités territoriales, et donc de la démocratie locale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous débattons d’un sujet difficile sur lequel, malheureusement, l’intégration européenne et ses contraintes juridiques ne nous laissent que peu de marges de manœuvre.
Avec la suppression des parts locales de la taxe sur la consommation finale d’électricité, les collectivités locales sont appelées à percevoir une part de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE). Cette dernière ne sera diminuée d’aucuns frais de gestion au profit des fournisseurs, ce qui entraînera, à l’horizon 2023, un gain de 30 millions d’euros pour les collectivités territoriales.
Ces dernières devraient donc voir leurs recettes augmenter, mais la suppression progressive des coefficients multiplicateurs les plus faibles pose néanmoins des difficultés, en ce qu’elle implique un ressaut d’imposition pour les contribuables dont les collectivités territoriales de rattachement avaient jusqu’alors délibéré pour un coefficient multiplicateur nul ou faible. Les projections que nous avons faites pour l’année 2023 indiquent que l’augmentation de la facture annuelle d’électricité pourrait atteindre entre 80 centimes et 3,20 euros dans 10 % des communes, entre 4 euros et 30 euros dans 6,6 % des communes et entre 10 euros et 55 euros dans 5,2 % des communes.
Ainsi, l’intégration des deux taxes locales au sein de l’actuelle TICFE entraînera un recul du pouvoir fiscal des collectivités territoriales et une hausse de la pression fiscale résultant de l’alignement progressif des coefficients multiplicateurs – cette hausse ne doit pas être négligée.
Tout cela ne procède aucunement du choix des collectivités locales ; les exécutifs qui avaient décidé de se passer de taxe locale sur l’électricité – je pense davantage aux communes qu’aux départements – vont se trouver pénalisés.
Je regrette évidemment cette situation, comme vous tous, me semble-t-il, mais la vérité m’oblige à indiquer que le droit européen, qui prévoit un taux unique de taxe sur l’énergie, s’impose à nous.
L’avis de la commission est donc, malheureusement, défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. M. le rapporteur général a éclairé le débat de manière utile et je forme le vœu qu’il soit entendu.
Il n’est pas question ici d’un coup de rabot sur le budget des collectivités territoriales. Comme certains l’ont bien précisé, le dispositif retenu reste une fiscalité locale et ne prévoit pas de système de compensation, comme c’est le cas pour d’autres sujets qui animent cet hémicycle.
Il s’agit d’une harmonisation de taux, qui va supprimer un degré de liberté pour les blocs communal et départemental, dans un objectif de lisibilité qui me semble louable. Cette harmonisation est nécessaire, si l’on veut une meilleure intégration européenne.
En outre, cette mesure emporte une économie de frais de gestion qui va bénéficier très directement aux budgets des communes et des départements, respectivement à hauteur de 20 millions d’euros et de 10 millions. Les collectivités auront d’ailleurs la possibilité de répercuter ces économies sur les personnes qui auraient à subir cette hausse de fiscalité.
En réalité, ces personnes seront en nombre très limité, puisque 80 % des communes sont au taux maximal et 10 % au taux immédiatement inférieur. Par conséquent, très peu de communes ont effectivement utilisé cette liberté et elles auront la possibilité d’utiliser le budget supplémentaire, dont elles disposeront, au service de la transition écologique ou d’une baisse d’autres impôts.
Il n’est pas pertinent, comme je l’ai entendu, de mener à ce sujet un combat sur le thème des libertés locales, parce que ce n’est pas cela qui vous est proposé. Il me paraît important d’avancer sur ce point, tout en offrant des degrés de liberté.
En tout état de cause, l’État prendra sa part, mais le bloc départemental et le bloc communal resteront bien le bloc départemental et le bloc communal. Il est important de le rappeler.
J’entends parler d’augmentation des prix. Je précise que, dans les communes qui sont au taux immédiatement inférieur au maximum, il s’agit d’augmentations qui ne dépasseront pas trois euros par an.
Si vous avez raison de soulever ce problème, il s’agit ici d’harmonisation européenne et de lisibilité, et – ce n’est, certes, pas entièrement satisfaisant – le bénéfice des économies de frais de gestion reviendra directement aux communes et aux départements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaite apporter quelques éléments complémentaires.
Tout d’abord, des contentieux sont actuellement ouverts au niveau européen sur ce sujet et de nombreux observateurs disent qu’ils sont perdus d’avance.
Ensuite, il me semble, madame la ministre, qu’il est nécessaire de diffuser une information collective particulièrement claire sur ce sujet, et pas seulement de la part du Gouvernement, afin d’éviter que les uns se défaussent sur les autres, l’Europe sur la France, l’État sur les collectivités, etc. Au final, c’est bien l’usager, consommateur d’électricité et contribuable, qui est en bout de ligne.
Enfin, madame la ministre, vous nous indiquez que les augmentations n’atteindront que quelques euros. Je me méfie toujours de cet argument.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai toujours envie de répondre que, si cela ne coûte pas grand-chose, pourquoi s’embêter à demander davantage ? C’est la preuve que les petites économies finissent par représenter beaucoup pour les contribuables, alors que leurs poches ne sont pas trop pleines aujourd’hui…
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Cet article n’est pas l’affaire du siècle, c’est vrai, mais il participe d’un mouvement général de suppression de liberté et d’autonomie fiscale pour les collectivités territoriales.
Même s’il ne met pas en jeu de gros montants et ne concerne pas énormément de communes, il s’ajoute à tout ce que l’on a vu auparavant et qui va malheureusement dans le même sens.
Par ailleurs, je m’interroge un peu sur l’argument de l’harmonisation européenne. L’Europe a toujours bon dos, alors qu’il existe un principe de subsidiarité qui devrait nous garantir un peu d’autonomie. Beaucoup d’autres sujets pourraient d’ailleurs bénéficier d’une harmonisation en matière fiscale et il ne me semble pas que le point dont nous débattons soit le plus important en la matière…
Le groupe UC votera donc ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. M. le rapporteur général et Mme la ministre ont bien exposé le problème auquel nous sommes confrontés. Malheureusement, ce problème n’est pas récent : la directive en cause date de 2003 et la France a déjà essayé de la transposer à plusieurs reprises et d’avancer sur le problème particulier des taxes locales sans parvenir à le résoudre complètement.
Aujourd’hui, comme l’a justement rappelé le rapporteur général, nous nous trouvons donc face à un mur, avec des contentieux.
C’est la raison pour laquelle personne, dans notre groupe, n’a déposé d’amendement de suppression, alors même que nous nous retrouvons dans certains propos qui ont été tenus. Comme tout le monde ici, nous sommes attachés à l’autonomie fiscale des collectivités locales.
Certains ont mis en avant le coût de cette évolution pour certains ménages, mais il me semble qu’en la matière la balle est dans le camp du Gouvernement, lequel dispose d’un mécanisme d’accompagnement des ménages les plus précaires, le chèque énergie, dont le taux de recours est encore très en deçà de 100 %. J’ai bien noté à cet égard que des avancées seraient mises en œuvre dans les mois à venir, mais il me semble urgent d’accélérer afin que l’augmentation qui se produira à certains endroits ne soit pas pénalisante pour les ménages les moins favorisés.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Notre collègue Éric Bocquet a raison : il s’agit évidemment d’un nouveau coup porté aux collectivités, même si vous nous dites qu’il ne s’agit pas d’un coup de rabot.
Cette mesure a également un coût pour les usagers. Quatre taxes pèsent sur la facture d’électricité : les taxes sur la consommation finale d’électricité dont nous débattons ; la contribution tarifaire d’acheminement (CTA) ; la contribution au service public de l’électricité (CSPE), qui devait servir aux énergies renouvelables, ce qui n’a jamais été le cas ou si peu, alors même qu’elle pèse lourd sur les factures ; enfin, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Au final, 35 % à 40 % de la facture d’électricité correspondent à des taxes que payent les consommateurs.
Dans près de 20 % des communes, cette taxe n’est pas portée au maximum. Or vous allez harmoniser par le haut ; 20 % des usagers verront donc leur facture d’électricité augmenter, alors même que vous avez réalisé l’exploit, à travers la commission de régulation de l’énergie qui est placée sous l’autorité du Gouvernement, d’augmenter les tarifs réglementés de l’électricité de 11 % en moins d’un an, faisant ainsi basculer 300 000 personnes dans la précarité énergétique.
Beaucoup d’associations et de syndicats nous confient que, avant la trêve hivernale, de nombreuses coupures d’électricité ou réductions de puissance ont été mises en œuvre, parce que beaucoup de ménages ne parviennent pas à payer leurs factures.
Nous vous alertons donc sur le fait que ce coup porté aux collectivités territoriales touche également 20 % des usagers. C’est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.
En outre, l’augmentation du chèque énergie a déjà eu lieu, elle a atteint 50 euros, mais je suis désolé de dire que, si l’on écoute l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), on est très loin du niveau qui permettrait de sortir les ménages concernés de la précarité énergétique : pour cela, le chèque énergie devrait être porté, en moyenne, à 700 euros, contre 250 aujourd’hui. Nous en sommes donc bien loin ! Et je n’évoquerai même pas la question des salaires qui, s’ils étaient à un niveau correct, permettraient de payer dignement les factures.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Je m’interroge sur la périodicité – par trimestre, tous les deux mois ?– des versements aux communes et aux intercommunalités de la taxe prélevée par les fournisseurs d’électricité et sur le coût de l’opération. L’État va-t-il faire cela gratuitement ?
En matière d’électricité, un tonitruant ministre des finances qui cherchait de l’argent avait assujetti la taxe à la TVA – c’était en 1992. On lui avait opposé que c’était impossible, mais il l’a fait. L’État manquait déjà de fonds et il a vu un moyen d’en récupérer.
J’ai été président du syndicat d’électricité du Lot ; j’entends ici que certaines communes ont la chance d’avoir un taux fixé à zéro, mais nous, nous sommes tous au taux maximum ! Nous ne sommes pas riches, donc nous levons beaucoup d’impôts. Peut-être faudrait-il également mener une réflexion sur la péréquation et l’inégalité fiscale ? Cela dépasse cependant le cadre de cette taxe…
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. On ne peut pas dire à la fois que cette mesure fait baisser les recettes des collectivités locales et qu’elle augmente la charge d’impôts pour les particuliers. Cela ne fonctionne pas ainsi, et vous le savez très bien.
Cette mesure sécurise les recettes des collectivités locales et augmente la charge d’impôt d’un certain nombre de redevables, c’est exact, mais, dans le pire des cas, moins que l’augmentation du chèque énergie.
Ensuite, je ne sais pas d’où vous avez sorti ce chiffre de 20 % de redevables, mais il est parfaitement faux.
M. Fabien Gay. C’est vous qui l’avez mentionné !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. J’ai parlé de 20 % des communes et, jusqu’à preuve du contraire, cela ne fait pas 20 % des habitants ! Je ne vais pas vous expliquer la différence entre une commune de 100 habitants et une commune de 2 millions d’habitants, vous la connaissez mieux que moi. Il ne s’agit évidemment pas de la même chose.
Enfin, vous savez que nous avons pris des mesures contre la précarité énergétique.
M. Fabien Gay. Ah bon ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Certes, cela n’épuise pas le sujet, mais faire le lien entre cette disposition et la précarité énergétique relève de la mauvaise foi.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-244, I-531, I-658, I-723 rectifié bis et I-917 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)