M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 9 bis
Après le 18° de l’article L. 6143-7 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le directeur estime se trouver dans une situation de conflit d’intérêts au sens de l’article 25 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il en informe le conseil de surveillance. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 9 bis
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 8 rectifié ter, présenté par MM. Menonville et Chasseing, Mme Mélot, MM. Moga, Janssens et Wattebled, Mme F. Gerbaud, M. Burgoa, Mmes Joseph et N. Delattre, MM. Decool et Malhuret, Mme Vermeillet, MM. A. Marc, Guerriau et Bazin, Mme Herzog, MM. Longuet et Maurey, Mme M. Carrère, MM. Chauvet, Verzelen, Lagourgue, Lefèvre et Laménie, Mmes Billon et Garriaud-Maylam, MM. Levi et Détraigne, Mme Guillotin, MM. Gold, J.M. Arnaud et Fialaire et Mme Paoli-Gagin, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le 1° de l’article L. 6143-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les programmes d’investissement relatifs aux travaux et équipements matériels lourds ; »
2° L’article L. 6143-5 est ainsi modifié :
a) Au 1°, après les mots : « conseil exécutif ou son représentant », sont insérés les mots : « , le président du conseil régional ou son représentant » ;
b) Au sixième alinéa, les mots : « et au 3° » sont supprimés.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement vise à renforcer l’implication des élus locaux au sein du conseil de surveillance des établissements publics de santé et à accroître le rôle de ce conseil.
Nous proposons ainsi d’élargir le champ d’intervention du conseil de surveillance, en prévoyant que celui-ci délibère aussi sur le programme d’investissement de l’établissement.
Nous prônons également la participation du président du conseil régional ou de son représentant au conseil de surveillance. En effet, le développement des compétences sanitaires des régions constitue une attente forte des élus locaux. Les régions interviennent dans l’organisation du parcours de soins à travers la définition du schéma régional de santé. Elles sont également compétentes en matière de formation initiale des personnels sociaux, médico-sociaux et paramédicaux. Et elles contribuent au financement de l’investissement.
Enfin, nous souhaitons que le président du conseil de surveillance soit désigné exclusivement parmi les représentants des collectivités territoriales, alors qu’aujourd’hui il est élu soit parmi les représentants des collectivités, soit parmi les personnalités qualifiées.
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié quater, présenté par MM. Menonville, Chasseing et Malhuret, Mme Mélot, MM. Lefèvre et Mizzon, Mme Billon, MM. Louault, Daubresse, Burgoa, Guérini, B. Fournier, Verzelen et Laménie, Mme Garriaud-Maylam, M. Levi, Mme Guillotin, MM. Gold, Fialaire, Longeot, Wattebled, Duplomb et J.M. Arnaud, Mme Paoli-Gagin et MM. Capus et Decool, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6143-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au 1°, après les mots : « conseil exécutif ou son représentant », sont insérés les mots : « , le président du conseil régional ou son représentant » ;
2° Au sixième alinéa, les mots : « et au 3° » sont supprimés.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Il s’agit d’un amendement de repli ; je considère qu’il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 9 rectifié ter, présenté par MM. Menonville et Chasseing, Mme Mélot, MM. Moga, Janssens, Wattebled et Lefèvre, Mme F. Gerbaud, MM. Courtial et Burgoa, Mmes Joseph et N. Delattre, MM. Decool et Malhuret, Mme Vermeillet, MM. A. Marc, Guerriau et Bazin, Mme Herzog, MM. Longuet et Maurey, Mme M. Carrère, MM. Chauvet, Verzelen, Lagourgue et Laménie, Mmes Billon et Garriaud-Maylam, M. Levi, Mme Gruny, M. Détraigne, Mme Guillotin, MM. Gold, J.M. Arnaud et Fialaire et Mme Paoli-Gagin, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 1° de l’article L. 6143-5 du code de la santé publique, après les mots : « conseil exécutif ou son représentant », sont insérés les mots : « , le président du conseil régional ou son représentant ».
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Là encore, c’est un amendement de repli. Il s’agit de renforcer l’implication des élus locaux au sein du conseil de surveillance des établissements publics de santé, en prévoyant la participation du président du conseil régional ou de son représentant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 8 rectifié ter et 9 rectifié ter, au profit d’un avis favorable sur l’amendement n° 13 rectifié quater, dont la rédaction nous semble meilleure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Ils prévoient d’imposer que l’élection du président de conseil de surveillance s’effectue seulement parmi les élus. Nous y sommes défavorables, car la présence et la représentation des usagers nous semblent également très utiles. Nous ne souhaitons pas supprimer la possibilité de choisir le président du conseil de surveillance parmi eux.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. J’ai besoin d’une précision. L’amendement n° 13 rectifié quater ne me semble pas exclure la possibilité qui vient d’être évoquée. Sommes-nous bien d’accord, monsieur le rapporteur ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, je retire les amendements nos 8 rectifié ter et 9 rectifié ter, au profit de l’amendement n° 13 rectifié quater.
M. le président. Les amendements nos 8 rectifié ter et 9 rectifié ter sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 13 rectifié quater.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 9 bis.
Article 9 ter (nouveau)
Après le 8° de l’article L. 6143-1 du code de la santé publique, il est inséré un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les orientations stratégiques et financières pluriannuelles et leurs modifications. » – (Adopté.)
Article 10
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 6146-3 du code de la santé publique est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Si ce montant, qui figure explicitement à l’état mentionné à l’article L. 6145-1, excède ledit plafond, le directeur général de l’agence régionale de santé renvoie l’état au directeur de l’établissement. Si le compte financier mentionné au second alinéa de l’article L. 6145-2 fait apparaître un dépassement du plafond, le directeur général de l’agence régionale de santé défère au tribunal administratif tous actes, qui lui sont communiqués à sa demande par le comptable public de l’établissement, par lesquels l’établissement a eu recours au travail temporaire, après en avoir avisé sans délai le conseil de surveillance de l’établissement. Le recours est de plein contentieux. »
II. – Le I entre en vigueur six mois après la publication de la présente loi.
M. le président. L’amendement n° 138, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous le savons, l’intérim médical est un véritable problème.
Avec les membres de mon groupe, lors de notre tour de France des hôpitaux et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) publics, nous avons rencontré toutes les catégories de personnels, notamment les directeurs et les directrices d’hôpitaux. Ces derniers passent des heures à essayer de régler le problème du manque de personnel, notamment de médecins. Ils s’arrachent souvent les cheveux, si vous me permettez l’expression, face aux demandes de gens qui réclament des rémunérations extrêmement importantes pour assurer un intérim.
Nous devons trouver une solution au problème de l’intérim médical, ce qui implique d’en identifier les causes.
Certes, des mesures ont été adoptées pour essayer d’encadrer les choses – nous en avons discuté ici même –, mais elles sont largement insuffisantes.
Sanctionner les directeurs et les directrices d’hôpitaux, qui se débattent dans des situations extrêmement compliquées, en faisant peser sur eux la responsabilité, risque d’aggraver encore les difficultés des établissements publics de santé et la pénurie en personnel. C’est le sens de notre amendement.
Nous pensons qu’il faut s’attaquer aux sources du problème. Il y a effectivement un besoin d’embauches dans les hôpitaux ; l’ensemble des personnels, toutes catégories confondues, le dit. Il faut aussi revaloriser les professions et les rémunérations. Les accords du Ségur de la santé ont constitué un tout petit pas, d’ailleurs assez inégalitaire, mais il faut aller beaucoup plus loin. Vous le savez, alors que les personnels demandaient le rattrapage du gel du point d’indice à hauteur de 300 euros nets, l’augmentation a été de 183 euros. En d’autres termes, les agents du secteur public ont perdu 120 euros de pouvoir d’achat en dix ans !
Nous souhaitons que les hôpitaux ne subissent pas une double peine et que l’on trouve une solution permettant de régler ces difficultés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à supprimer un article qu’elle a intégralement réécrit.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je comprends que l’on puisse être défavorable à nos amendements. C’est le jeu du Parlement ; chacun a ses positions.
Cela étant, sur la question que nous soulevons, les constats sont partagés : les hôpitaux sont dans une situation grave, la pénurie de personnel est une réalité et l’intérim constitue un véritable problème.
Si mes collègues ici présents ont visité des hôpitaux, ce que je crois, ils ont pu entendre leurs directions appeler au secours.
Se déclarer défavorable à un amendement sans apporter de solution, c’est, me semble-t-il, un peu court ! Celui que nous avons déposé n’est peut-être pas parfait, mais il a au moins le mérite d’ouvrir le débat. Et j’aimerais que ce débat puisse être nourri… D’ailleurs, je me réjouis que, lorsque M. le ministre des solidarités et de la santé était présent, nous ayons pu débattre sur un certain nombre de sujets de manière enrichissante. Nous n’étions pas forcément d’accord avec lui, mais, au moins, nous avions la possibilité de savoir pourquoi il adoptait telle ou telle position.
Tout à l’heure déjà, lorsque ma collègue Cathy Apourceau-Poly a soulevé le problème du pouvoir des ARS d’infliger des sanctions financières, vous avez balayé notre amendement d’un revers de main. Dont acte ! Mais que proposez-vous concrètement ?
Je n’incrimine pas M. le rapporteur, avec lequel j’ai des accords et, parfois, des désaccords – chacun pourra évaluer lesquels sont les plus fréquents… La commission a effectué un important travail de réécriture d’un certain nombre d’articles, dans un sens que les membres de mon groupe et moi-même avons tantôt approuvé, tantôt désapprouvé.
Le problème que nous soulevons avec cet amendement intéresse, me semble-t-il, l’ensemble des parlementaires et, plus généralement, le monde de la santé.
Je souhaiterais donc tout de même que le débat soit un peu nourri, même si nous sommes pressés. C’est le rôle du Parlement !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je ne voterai pas cet amendement, mais le problème soulevé est une réalité.
Dans les hôpitaux, certains médecins, notamment urgentistes, veulent être recrutés à temps partiel, à 60 % ou 70 % seulement, car ils font de l’intérim sur le reste du temps, ce qui ne serait pas le cas s’ils étaient mieux payés.
Il y a aussi beaucoup de carences en infirmières dans le secteur médico-social. On arrive à en trouver en intérim, parce qu’elles sont beaucoup mieux payées.
À mon sens, l’un des moyens pour limiter l’intérim est d’augmenter la rémunération des personnels médicaux qui font des gardes, comme les urgentistes ou les anesthésistes.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’avais abordé ce sujet lors de la discussion générale.
L’article 10 donne une injonction paradoxale. La maltraitance, dit-on, c’est de ne laisser le choix qu’entre deux mauvaises solutions ; en l’occurrence, c’est le cas. On demande aux chefs d’établissement d’assurer la continuité des services – maternité, chirurgie, etc. –, tout en bloquant, certes à juste titre, les surfacturations des « mercenaires » et des sociétés d’intérim.
Il faudrait tout de même que les ARS contrôlent l’application effective des règles sur l’ensemble du territoire. Si tout le monde les appliquait dans la sphère publique – pour ce qui est de la sphère privée, ne rêvons pas ! –, cela assècherait l’offre de mercenaires.
A minima, devant la contradiction entre continuité du service et entorse à la discipline budgétaire – de toute manière, les deux sont source de contentieux pour le directeur –, l’ARS doit prendre ses responsabilités, et pas en se contentant, comme Laurence Cohen y a fait référence, de fermer des services – maternités ou sites de proximité.
Cela suppose notamment de résoudre le problème de la valorisation des gardes, mais ce n’est pas la seule réponse. En effet, ainsi que je l’ai souligné lors de la discussion générale, certains soignants choisissent l’intérim pour maîtriser leur temps de travail et l’articulation avec leur vie sociale et familiale, alors qu’à l’hôpital ils sont constamment obligés de faire des heures supplémentaires. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) En d’autres termes, il n’y a pas que le volet rémunérations ; il y a aussi le volet conditions de travail.
Je demande au Gouvernement de régler ce problème.
M. le président. L’amendement n° 51, présenté par Mme Préville, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 6146-3 du code de la santé publique est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Dans un délai maximal de six mois après la publication de la loi n° … du … visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, les agences régionales de santé établissent, chacune en ce qui les concerne, un état des lieux du respect des conditions fixées par la réglementation concernant les rémunérations des praticiens réalisant des vacations ou facturées par les entreprises de travail temporaire. Cet état des lieux comprend une analyse des impacts d’une mise en conformité des rémunérations avec les conditions fixées par la réglementation.
« Au vu de cet état des lieux, les agences régionales de santé élaborent, chacune en ce qui les concerne et avec le concours, notamment, des groupements hospitaliers de territoire concernés, un plan territorial de continuité des soins visant à prévoir l’ensemble des dispositions garantissant la réponse aux besoins de santé des territoires et éviter toute carence des services des soins à compter de la mise en conformité systématique des rémunérations avec les conditions fixées par la réglementation.
« L’élaboration de l’état des lieux et du plan territorial de continuité des soins associe les élus, les professionnels des établissements concernés et les représentants des usagers.
« Dans un délai de six mois, quand le comptable public constate que le montant de rémunération excède les plafonds prévus par la réglementation, le comptable public est autorisé à procéder à l’ajustement de la rémunération conformément aux conditions prévues par la réglementation. Sans délai, il en informe le praticien ou l’entreprise de travail temporaire concerné, ainsi que le directeur de l’établissement public de santé. Le directeur de l’établissement public de santé en informe sans délai le directeur de l’agence régionale de santé concernée qui met en œuvre, le cas échéant, le plan territorial de continuité des soins. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement a été travaillé avec des directeurs d’hôpitaux, notamment ceux de mon territoire rural, dont celui de l’hôpital de Figeac, dans le Lot. Il existe une crainte très forte qu’en l’état l’article 10 ait rapidement des conséquences particulièrement délétères, en particulier la fermeture de services dans des contextes très conflictuels.
Pour certains praticiens, notamment urbains, les territoires ruraux sont peu attractifs ; ils n’acceptent d’y venir que si la rémunération est importante. Avec un tel dispositif, ils cesseraient brutalement de venir et c’est ce qui va se passer dans les faits.
Nous proposons de passer non pas par une judiciarisation, mais par un ajustement des rémunérations, ajustement qui pourrait s’opérer par le comptable public. Nous préconisons de permettre aux ARS – quelque part, c’est un peu leur rôle – d’établir un état des lieux du respect de la réglementation en matière de rémunération liée à des vacations ou facturée par des entreprises de travail temporaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement tend à revenir sur la réécriture de l’article 10 réalisée par la commission. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Notre collègue Angèle Préville soulève un véritable problème, en montrant quelles seraient les conséquences de l’adoption de l’article 10 en l’état.
Monsieur le rapporteur, avec tout le respect que j’ai pour vous, rejeter un amendement au seul motif que ce n’est pas comme cela que la commission a rédigé le texte, c’est un peu léger. Le débat mériterait d’être plus fouillé.
Au demeurant, nous avons de la mémoire. Voilà peu de temps, Mme Buzyn avait fait de la lutte contre l’intérim médical, qu’elle qualifiait de « mercenariat », une priorité. Elle nous avait fait adopter des dispositions censées cadrer les choses. Dix-huit mois plus tard, nous nous rendons compte que ces mesures sont inopérantes. Je ne lui en fais pas reproche, mais nous pourrions tout de même accepter de débattre des difficultés dans lesquelles les hôpitaux se trouvent.
La double injonction à laquelle Mme Poncet Monge a fait référence serait extrêmement dure pour nombre d’établissements.
Certaines personnes profitent de la pénurie pour faire des affaires – c’est la loi de l’offre et de la demande –, mais vous ne réglerez pas le problème, en interdisant simplement à ces personnes de travailler ! Si ce principe fonctionnait, les débats économiques prendraient dans cet hémicycle une tonalité singulièrement différente…
Pour éviter que des personnes ne réalisent des profits indus dans le domaine de la santé, il faut faire un effort de cadrage.
Les rédactions proposées pour l’article 10, tant par le Gouvernement que par la commission, ne nous conviennent pas, car elles risquent d’entraîner l’interruption d’activités sans prévoir de solutions alternatives. Nous ne les voterons donc pas.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je m’abstiendrai sur cet amendement. Dans certains petits établissements, les personnels de garde aux urgences touchent 220 à 230 euros la nuit et ils préfèrent ne pas être embauchés à temps plein pour pouvoir faire des gardes à 1 500 euros dans d’autres hôpitaux. Il faut peut-être des sanctions, mais il faut aussi que les ARS permettent aux petits hôpitaux de survivre.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je veux répondre à Bernard Jomier. Trois amendements tendent à réécrire l’article 10, dont un amendement du Gouvernement qui reprend la version adoptée par l’Assemblée nationale. Pour ne pas faire trois réponses identiques, j’ai décidé de réserver ma réponse au Gouvernement. (Sourires.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 129, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
I. – L’article L. 6146-3 du code de santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le directeur général de l’agence régionale de santé, lorsqu’il est informé par le comptable public de l’irrégularité d’actes juridiques conclus par un établissement public de santé avec une entreprise de travail temporaire, en application du présent article, ou avec un praticien pour la réalisation de vacations, en application du 2° de l’article L. 6152-1, défère ces actes au tribunal administratif compétent. Il en avise alors sans délai le directeur de l’établissement concerné ainsi que le comptable public.
« Lorsque le comptable public constate, lors du contrôle qu’il exerce sur la rémunération du praticien ou sur la rémunération facturée par l’entreprise de travail temporaire, que ce montant excède les plafonds réglementaires, il procède au rejet du paiement de la rémunération irrégulière. Dans ce cas, il en informe le directeur de l’établissement public de santé qui procède à la régularisation de cette dernière conformément aux conditions fixées par la réglementation. »
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Je vais prendre quelques minutes pour développer ce point clé du texte et je ne désespère pas de vous convaincre, mesdames, messieurs les sénateurs, de revenir à la rédaction initiale de cet article 10.
En 2012, j’avais commis un rapport comme parlementaire sur un sujet qui n’avait pas encore réellement émergé, les dérives de l’intérim médical dans les établissements de santé. Certains hôpitaux, pour éviter la fermeture en catastrophe d’un bloc opératoire le week-end, continuer de pouvoir endormir les malades ou éviter la fermeture d’un service d’urgence, avaient pris l’habitude, faute de pouvoir recruter des médecins sur des postes stables, de passer par des agences d’intérim ou des contrats de gré à gré, extrêmement onéreux, afin de recruter des praticiens aux velléités de rémunération hors normes.
Ces pratiques ont entraîné une lassitude des équipes, qui voyaient des praticiens hospitaliers quitter leurs postes et conclure avec le même hôpital un contrat de gré à gré pour gagner en une semaine ce qu’ils gagnaient auparavant en un mois.
Elles ont aussi eu pour conséquence le recrutement massif dans les hôpitaux de médecins étrangers via des sociétés luxembourgeoises – ces praticiens débarquaient du jour au lendemain sans connaître ni le système d’information ni les équipes. Si ces médecins étaient parfois expérimentés et de très grande qualité, il arrivait aussi que ce ne soit pas le cas, ce que je dénonçais déjà dans mon rapport.
À l’époque, j’estimais que ce système concernait près de cinq mille médecins, pour un surcoût de 500 millions d’euros par an. L’effet d’entraînement était massif dans certaines disciplines.
Je préconisais plusieurs mesures qui n’ont pas été prises par le gouvernement précédent, ce que je fus le premier à regretter en tant que membre de la majorité de l’époque. Par exemple, je proposais non pas d’interdire le recours à l’intérim, mais de plafonner le niveau de rémunération pour que les hôpitaux ne déboursent plus des sommes totalement irresponsables.
Quand ma prédécesseure est arrivée en 2017, elle a pris, au terme d’un long combat, un décret visant à plafonner progressivement les rémunérations. On parle quand même de 1 200 euros, soit environ un SMIC, pour vingt-quatre heures de garde à l’hôpital, ce qui n’est pas franchement une rémunération au lance-pierres !
Entre 2012 et aujourd’hui, le phénomène de l’intérim s’est profondément accentué dans notre pays. Il touche davantage de disciplines et, désormais, concerne aussi des CHU. C’est un véritable problème.
Sur la boîte mail de l’hôpital où j’exerçais auparavant comme neurologue, j’ai reçu, il n’y a pas si longtemps, une offre pour une mission de vingt-quatre heures rémunérée 2 000 euros nets, assortie d’une prime de précarité de 20 % et d’avantages en nature pour l’alimentation et les transports. La neurologie n’est pourtant pas la discipline la plus recherchée pour ce genre de mission !
Les nombreux directeurs d’hôpitaux que je rencontre me disent qu’ils sont pris à la gorge. Ils savent que ces rémunérations sont irrégulières, mais, s’ils ne payent pas, ils n’ont pas de médecins et doivent fermer leur bloc. Les chambres régionales des comptes effectuent des contrôles a posteriori, mais elles renoncent le plus souvent à engager une procédure devant le tribunal administratif, car elles savent que les directeurs n’ont pas le choix. Certains directeurs ont toutefois été condamnés, certes à titre symbolique.
Parfois, le médecin qui doit venir le samedi appelle l’hôpital la veille pour lui annoncer qu’un autre établissement lui a proposé plus d’argent… Je ne dis pas que c’est la règle, et certaines missions de courte durée restent évidemment indispensables, notamment pour remplacer des congés, mais les pratiques tarifaires sont devenues totalement déraisonnables. Les gardes de vingt-quatre heures qui étaient rémunérées 1 300 euros en moyenne au moment de mon rapport atteignent fréquemment 2 500 euros aujourd’hui, voire 3 000 euros. Ces dérives doivent cesser !
Les mesures prises en 2017 étaient importantes, mais insuffisantes. Certains hôpitaux ont pleinement joué le jeu du plafond de rémunération avec contrôle a posteriori, mais d’autres ont continué de payer en violation du plafond réglementaire de 1 200 euros. Il faut dire qu’un syndicat « sans visage » a appelé au boycott des hôpitaux qui respectaient la réglementation… Bonjour l’éthique !
Nous proposons donc l’arme ultime pour que personne ne puisse plus se prêter à cette surenchère. Il faut une règle identique pour tous et impossible à contourner. Si vous interdisez aux établissements de santé de payer au-delà du tarif réglementaire un médecin pour une mission de courte durée, le mouvement expansionniste de l’intérim va se tarir.
Le seul moyen d’empêcher que la règle ne soit contournée en catastrophe par un directeur qui n’aura pas le choix – je ne veux pas l’incriminer –, c’est qu’il puisse dire au médecin qu’il va recruter : je veux bien vous promettre 3 000 euros, mais je serai dans l’incapacité de vous les verser, tout simplement parce que le chèque ne pourra pas partir !
Avec le contrôle a priori que nous proposons, vous retirez l’épée de Damoclès, dont la menace pèse sur les épaules d’un directeur d’hôpital : même s’il est tenté de contrevenir à la règle, il ne pourra pas le faire et aucun de ses collègues ne le pourra non plus.
Voilà près de dix ans que je travaille sur ce sujet avec la Fédération hospitalière de France (FHF), les directeurs d’hôpitaux, les médecins et les syndicats. L’enjeu est fondamental et, je vous l’assure, il n’y a pas d’autre moyen de tarir cette expansion de l’intérim dont les méfaits sur le système hospitalier sont patents. Nous devons vraiment prendre cette mesure pour aider l’hôpital.
Certains médecins retrouveront peut-être un poste de praticien hospitalier, d’autres continueront de faire des missions de gré à gré, mais elles coûteront moins cher.
Il n’est pas irrémédiable que certains hôpitaux affichent des déficits annuels équivalents aux surdépenses liées à l’intérim médical. Je peux vous donner une liste d’hôpitaux dont l’incapacité à innover, à mieux payer leurs soignants et à se moderniser est uniquement liée à ces surdépenses. Cela doit cesser !
La rédaction proposée par la commission des affaires sociales du Sénat est intéressante, mais elle ne va pas assez loin. On reste dans la logique actuelle qui n’a pas pleinement fonctionné.
Vous proposez que les dépenses d’intérim soient intégrées dans l’état prévisionnel des recettes et des dépenses (EPRD) et que des contrôles a posteriori et des recours devant le tribunal administratif soient exercés. Mais c’est déjà le cas aujourd’hui !
De surcroît, il est facile pour une direction d’hôpital de noyer les surdépenses d’intérim dans un titre ou un autre de sa comptabilité, et vous ne pourrez pas démontrer qu’un médecin a été payé 3 000 euros pour une garde.
Si vous voulez vraiment lutter avec efficacité contre l’intérim, j’espère vous convaincre de la nécessité d’un contrôle a priori. Si vous pensez qu’un tel contrôle n’est pas adapté, vous reconnaissez alors qu’il faut conserver la possibilité pour un directeur de surpayer les missions d’intérim. Je vous assure que, dans ce cas, ils continueront à le faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)