M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement est naturellement favorable à l’amendement de M. Blanc, puisque j’ai moi-même proposé précédemment, comme vous l’avez peut-être remarqué, de supprimer les mêmes dispositions.
En effet, la rédaction de la commission remet en cause les équilibres de compétences en vigueur, sur lesquels tout le monde s’est accordé, entre régions, départements et bloc communal.
Je tiens à préciser que cette rédaction n’est pas du tout le fruit d’une demande unanime des associations d’élus. Les régions n’y sont certes pas favorables, mais les intercommunalités non plus, car elles peuvent déjà jouer un rôle de proximité et venir en aide à un boulanger, pour reprendre l’exemple de la rapporteure.
Étant favorable à la clarté des compétences, le Gouvernement est très favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. La clarté, c’est bien sur le papier, mais dans la réalité, madame la ministre, cela ne se passe pas ainsi. Si les plus grandes entreprises se tournent naturellement vers la région, nous constatons qu’en cas de difficulté, c’est au président du conseil départemental que les petites entreprises s’adressent.
Tout était plus simple lorsque les régions étaient plus petites : le préfet était bien souvent logé dans les départements et, pour peu que le département soit celui du chef-lieu de région, l’hôtel de région était à quelques centaines de mètres. On pouvait donc régler les problèmes facilement. Désormais, cela nécessite toute une organisation, et l’on voit bien les difficultés que cela pose. Si l’on se contente de déplorer l’existence d’un millefeuille territorial, on ne fera rien de pratique !
Je comprends donc la position du rapporteur, qui me paraît être la bonne : elle consiste à permettre, en accord avec le président de région, de décentraliser un certain nombre d’aides et de financements.
Madame la ministre, vous souhaitiez que nous construisions tous ensemble des collèges et des lycées ; il s’agit du même exercice, qui requiert de la souplesse.
Si certains territoires ne le souhaitent pas, qu’ils ne le fassent pas. En revanche, laissons la possibilité d’une telle délégation lorsque celle-ci peut être pratique.
Pour toutes ces raisons, je soutiens la position de la commission.
Les départements reposent sur la solidarité des hommes au travers de l’action sociale et de la solidarité des territoires. À ce titre, ils sont pleinement concernés par le développement économique.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 943 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 3
M. le président. L’amendement n° 1358 rectifié bis, présenté par MM. Dantec, Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1111 -9-…ainsi rédigé :
« Art L. 1111 -9-…. – I. Dans chaque département, la conférence territoriale des exécutifs est chargée de favoriser un exercice concerté des compétences des établissements publics à fiscalité propre.
« La conférence territoriale des exécutifs peut débattre et rendre des avis sur tous les sujets relatifs à l’exercice de compétences et à la conduite de politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre les groupements et les collectivités territoriales membres.
« II. – Sont membres de la conférence départementale des exécutifs :
« 1° Le président du conseil départemental ou par délégation, son représentant ;
« 2° Les présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ayant leur siège sur le territoire du département ou leurs représentants ;
« 3° Dans la région d’Île-de-France, les présidents des établissements publics territoriaux mentionnés à l’article L. 5219-2.
« III. – La conférence départementale des exécutifs est présidée par le président du conseil départemental et le président d’un établissement public de coopération intercommunale.
« Elle organise librement ses travaux, au travers de commissions thématiques, et leur publicité dans le cadre de son règlement intérieur.
« Elle est convoquée par ses présidents, qui fixent l’ordre du jour de ses réunions. Chaque membre peut proposer l’inscription à l’ordre du jour de questions complémentaires relevant des compétences exercées par la personne publique ou la catégorie de personnes publiques qu’il représente ou pour lesquelles cette personne publique est chargée d’organiser les modalités de l’action commune des collectivités territoriales.
« La conférence départementale des exécutifs peut associer à ses travaux tout élu ou organisme non représenté. Elle peut solliciter l’avis de toute personne ou de tout organisme. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Je l’ai dit, je le répète : l’esprit même de la loi NOTRe a été déstabilisé par cette idée un peu folle et saugrenue qu’a eu Manuel Valls de créer, dans la foulée, des méga-régions, sans même mener un travail permettant d’associer des populations. Souvenons-nous, mes chers collègues, que ce n’était pas à l’ordre du jour lorsque nous avions travaillé sur la loi NOTRe.
Nous avons donc des méga-régions, lesquelles, comme l’a rappelé Mme la rapporteure, sont éloignées de certains territoires.
Par ailleurs, nous avons confié aux EPCI les compétences économiques, mais aussi, souvent, les compétences d’urbanisme, au travers du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi).
Nous avons, en outre, conservé un certain nombre de leviers d’action territoriale et de développement économique dans les départements, lesquels détiennent toujours des sociétés d’économie mixte dévolues au développement économique et sont acteurs des agences foncières.
Dans ce millefeuille inabouti, il nous faut absolument un lieu de travail en commun entre les EPCI, le département et la région. Je vous parle d’expérience : en Loire-Atlantique, il existe aujourd’hui une forme de conférence des intercommunalités avec le département. Pour autant, en raison de divergences politiques ou de différences d’histoire, cela ne se fait pas toujours naturellement.
C’est pourquoi nous proposons qu’une conférence départementale rassemblant l’ensemble des EPCI autour de leurs compétences de développement économique et d’urbanisme soit instituée par la loi. Si nous voulons un développement équilibré du territoire, nous devons mettre en place ce dialogue, notamment entre les métropoles et les autres territoires.
Pour conclure, nous n’avons pas eu cette idée seuls, celle-ci est issue d’une proposition du rapport sénatorial d’information n° 471, signé par M. Krattinger et Mme Gourault, dont j’attends donc l’avis avec intérêt !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Monsieur Dantec, si la Loire-Atlantique était en Bretagne, la CTAP de ce département fonctionnerait bien ! (Sourires.)
Cela dit, mon cher collègue, nous avons déjà répondu à cette proposition de création d’une conférence départementale de l’action publique (CDAP) et notre avis n’a pas changé : il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous ne voterons pas cet amendement, dans la logique des arguments que nous avons exposés précédemment.
Monsieur Dantec, lorsque nous avons débattu de la loi NOTRe, la fusion des régions n’était effectivement pas du tout à l’ordre du jour. En revanche, sauf si ma mémoire me trahit, je n’ai pas souvenir que vous vous soyez opposé au projet de fusion des régions.
Quand on vote pour des régions plus fortes et plus compétitives, il faut en assumer les conséquences inévitables en matière d’affaiblissement du rôle des départements.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Madame Gatel, il ne s’agit pas de créer une CDAP, mais une instance réunissant les EPCI, et au sein de laquelle le débat serait centré sur leurs compétences en matière de développement économique et d’urbanisme, à laquelle seraient associés départements et région.
Aujourd’hui, nous observons des déséquilibres entre les différents EPCI pour ce qui concerne l’aménagement du territoire, les logements et l’emploi. Ces difficultés imposent que les EPCI travaillent ensemble, or cela ne se fait pas spontanément. Tel est le sens de cet amendement, nourri de l’expérience de ce que nous nous efforçons d’instaurer en Loire-Atlantique.
Mme Gourault, je regrette votre réponse quelque peu sibylline sur une proposition qui me semblait correspondre à votre propre réflexion, en un autre temps.
S’agissant enfin de la question de la fusion des régions, sur laquelle je viens d’être interpellé, je fais partie de ceux qui se sont battus pour tenter d’éviter une fusion simple, technocratique et sans débat, et d’obtenir que l’on fasse dans la dentelle. Je pourrais rappeler les différentes initiatives que j’avais prises à l’époque, notamment en Bretagne.
Nous aborderons le débat sur la nécessité de réintroduire de la souplesse dans les découpages administratifs nés de cette fusion à marche forcée des régions plus tard dans la soirée, j’espère que nous recevrons alors le soutien de beaucoup de groupes ; je dois avouer que je suis très déçu que mes contraintes d’agenda m’empêchent d’y participer. Quoi qu’il en soit, je souhaite qu’il soit productif.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1358 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 3.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 49 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Decool, A. Marc, Menonville, Wattebled et Médevielle, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Capus, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Henno, Mme Sollogoub, M. Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Laménie, Détraigne et Longeot, Mmes Jacques, Dumas et Guidez, M. Hingray, Mme Saint-Pé et MM. Nougein et Moga.
L’amendement n° 1057 rectifié ter est présenté par M. P. Joly, Mmes Préville et Monier, MM. Tissot, Cozic et Cardon, Mme G. Jourda, MM. Jeansannetas et Jomier, Mme Espagnac et MM. Pla, Mérillou et Bouad.
L’amendement n° 1065 rectifié est présenté par MM. Guiol, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts, peut déléguer à une collectivité territoriale, à un syndicat de communes ou à un syndicat mixte, tout ou partie d’une compétence qui lui a été transférée. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « de l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « des alinéas précédents » ;
b) Sont ajoutés les mots : « ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre délégant ».
La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 49 rectifié bis.
M. Franck Menonville. Le présent amendement, déposé par notre collègue Daniel Chasseing, tend à permettre aux EPCI à fiscalité propre de déléguer l’exercice d’une compétence dont ils sont attributaires. Il vise ainsi à rendre possible une délégation descendante, notamment des EPCI vers les communes ou vers des syndicats mixtes.
La délégation de compétence permet de confier l’exercice d’une compétence d’attribution à une collectivité ou un EPCI qui dispose de l’expérience, des moyens, mais également de la volonté de l’exercer par simple voie contractuelle. Ce mode d’exercice de la compétence est plus pérenne et sécurisé que les simples conventions de gestion ou de prestations de services.
L’élargissement du champ d’application de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales permettrait de revenir à une intercommunalité librement consentie et, surtout, d’apporter de la souplesse et une forme d’adaptation territoriale.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour présenter l’amendement n° 1057 rectifié ter.
M. Patrice Joly. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 1065 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement a été déposé par mon collègue André Guiol.
Comme l’indique son exposé des motifs, il est indispensable d’assouplir davantage la possibilité, pour un EPCI, de déléguer certaines de ses compétences.
Surtout, au-delà de cet amendement, en retenant une telle position, nous saisissons l’occasion d’envoyer un signal fort à nos territoires. Nous voulons rappeler que les échelons de notre administration locale sont et demeureront des maillons essentiels de notre nation.
C’est aussi l’occasion de rappeler que la construction intercommunale doit reposer sur la volonté et le respect de nos communes.
M. le président. L’amendement n° 303 rectifié, présenté par Mmes Cukierman, Assassi, Brulin, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peut déléguer tout ou partie d’une de ses compétences à une ou plusieurs de ses communes membres. »
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Dans la même logique que les amendements précédents, le présent amendement vise à permettre à l’EPCI qui le souhaite de déléguer une compétence – et non la transférer, sinon cet amendement aurait été déclaré irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution – à une commune membre. L’objectif est de permettre une meilleure sécurisation que celle que permettent les conventions existantes.
Il doit être permis à un EPCI de déléguer à une commune membre la compétence qui lui a été attribuée, et parfois même imposée par la loi NOTRe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Dans le droit-fil des amendements votés précédemment, cas amendements visent à permettre des délégations de compétences, y compris ascendantes. Ils sont donc totalement satisfaits.
La commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ces amendements me paraissent également satisfaits par les amendements adoptés précédemment.
Ayant émis un avis défavorable sur les précédents amendements, j’émets le même avis défavorable sur ceux-là.
M. le président. Monsieur Menonville, l’amendement n° 49 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Franck Menonville. Non, je le retire, monsieur le président car, comme l’a indiqué le rapporteur, l’amendement n° 531 rectifié bis de notre collègue Kerrouche ayant été adopté, il est satisfait.
M. le président. L’amendement n° 49 rectifié bis est retiré.
Monsieur Joly, l’amendement n° 1057 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Patrice Joly. Non, je le retire, monsieur le président.
J’ajouterai que cet amendement est également satisfait par l’adoption de l’amendement n° 317 rectifié quater de notre collègue Delcros.
M. le président. L’amendement n° 1057 rectifié ter est retiré.
Madame Delattre, l’amendement n° 1065 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nathalie Delattre. Non, je le retire, monsieur le président, pour les mêmes raisons.
M. le président. L’amendement n° 1065 rectifié est retiré.
Madame Cukierman, l’amendement n° 303 rectifié est-il maintenu ?
Mme Cécile Cukierman. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Il me semble en effet, de mémoire, que les amendements précédents ne visaient pas la délégation de compétences des EPCI vers les communes. Mon amendement n’est donc pas tout à fait satisfait.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Je tiens à préciser que, bien sûr, nous voterons contre cet amendement, car les EPCI ne sont pas des syndicats « à la carte ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 202 rectifié bis est présenté par M. Genet, Mme M. Mercier, MM. Rojouan, Brisson, Milon et de Nicolaÿ, Mmes Drexler et Raimond-Pavero, M. Klinger, Mmes Schalck et Joseph, M. Le Gleut, Mmes Garriaud-Maylam et Deromedi, MM. Bouchet et Sido, Mmes Canayer et Deroche, M. Burgoa, Mme Goy-Chavent, M. Piednoir, Mme Dumont et MM. Sautarel et Tabarot.
L’amendement n° 516 est présenté par M. Michau.
L’amendement n° 1581 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canévet, P. Martin, Détraigne et Hingray, Mmes Jacquemet et Herzog et MM. Le Nay et Kern.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 1111-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1111-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-…. – Le chef de file désigné en application de l’article L. 1111-9 réunit périodiquement les autorités en charge de l’exercice de la compétence concernée afin d’organiser les modalités de leur action commune, soit au sein de la conférence territoriale de l’action publique, soit au sein d’une instance ad hoc.
« Le chef de file associe les autorités en charge de l’exercice de la compétence à l’élaboration des documents stratégiques et de planification qu’il adopte. Lorsque le chef de file élabore un document de planification, si au moins trois cinquièmes des autorités organisatrices concernées représentant au moins 60 % de la population, ont émis un avis défavorable au projet de document, le représentant de l’État peut demander au chef de file d’arrêter un nouveau projet dans un délai de trois mois, en tenant compte des observations formulées. »
La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 202 rectifié bis.
M. Fabien Genet. Le présent amendement vise à préciser le rôle de chef de file dans l’organisation de l’action publique locale.
Plusieurs chefs de filât ont été octroyés à des collectivités territoriales depuis la révision constitutionnelle de 2003. Toutefois, les contours du rôle d’un chef de file sont encore difficilement identifiables.
Le texte constitutionnel indique seulement qu’un chef de file dispose, dans un champ de compétences donné, d’une fonction de coordination de l’action de plusieurs collectivités locales habilitées à agir.
Dans les faits, le rôle du chef de file mériterait d’être précisé afin de définir les limites de son action.
Cet amendement vise donc à instaurer l’obligation de dialoguer régulièrement avec les autorités organisatrices de façon spécifique, soit au sein d’une instance de concertation thématique organisée par la CTAP – à laquelle nous sommes tous très attachés –, soit au sein d’un comité ad hoc.
Il tend également à imposer au chef de file de soumettre pour avis tout document de planification portant sur une compétence mise en œuvre par des autorités organisatrices qu’il aurait établi à ces dernières. Si au moins trois cinquièmes des autorités organisatrices concernées représentant au moins 60 % de la population ont émis un avis défavorable, ce document ne pourra être adopté qu’après avoir pris en compte leurs observations.
M. le président. Les amendements nos 516 et 1581 rectifié bis ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Le chef de filât a été créé pour répondre à la nécessité de coordonner des politiques impliquant plusieurs intervenants. On ne peut donc en avoir une définition stricte sur le modèle d’un tableau Excel.
Cher collègue, vous exprimez un souci de concertation tout à fait légitime. Permettez-moi toutefois de rappeler que, dans chacun des cas évoqués, il existe des procédures de concertation permettant d’assurer que le chef de file coordonne, sans pouvoir exclure. Je pense notamment aux conventions territoriales d’exercice concerté, ainsi qu’aux obligations de concertation des différents échelons pour l’adoption d’un document de planification.
La procédure d’adoption des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), dont le conseil régional est le chef de file, prévoit par exemple de très nombreuses consultations.
Les dispositions que vous proposez ne prévoient pas l’articulation de l’ensemble de ces procédures. Leur adoption créerait donc d’éventuelles contradictions au sein de la loi, voire une insécurité juridique qui serait assez redoutable pour l’établissement d’un document de planification tel que le Sraddet.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Tout d’abord, comme la rapporteure l’a indiqué, l’adoption de cet amendement n’emporterait aucune plus-value normative.
Ensuite, aucune articulation des dispositions proposées avec l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriale (CGCT) relatif aux conventions territoriales d’exercice concerté n’est prévue.
Il est enfin proposé par cet amendement de donner la possibilité au préfet de demander au chef de file de revoir un document de planification dès lors que les autorités organisatrices concernées réunissent des conditions de majorité définies pour émettre un avis défavorable sur ledit document.
Pour toutes ces raisons, je suis extrêmement réservée quant à cet amendement. Le Gouvernement en demande le retrait ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Genet, l’amendement n° 202 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Fabien Genet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 202 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 203 rectifié bis est présenté par M. Genet, Mme M. Mercier, MM. Rojouan, Brisson, Milon et de Nicolaÿ, Mme Raimond-Pavero, M. Klinger, Mmes Schalck et Joseph, M. Le Gleut, Mmes Garriaud-Maylam et Deromedi, MM. Bouchet et Sido, Mmes Canayer et Deroche, M. Burgoa, Mme Goy-Chavent, M. Piednoir, Mme Dumont et MM. Sautarel, Rapin et Tabarot.
L’amendement n° 1582 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canévet, P. Martin, Détraigne et Hingray, Mmes Jacquemet et Herzog et MM. Le Nay et Kern.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 1111-3 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1111-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-…. – Une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales exerce une responsabilité d’autorité organisatrice lorsqu’elle est en charge d’un service public déterminé, assorti d’obligations fixées par la loi, dont elle a la responsabilité exclusive, ou lorsqu’elle dispose d’une responsabilité de planification fixée par le législateur.
« Toute réglementation nationale ou tout document de planification ayant pour effet d’encadrer les responsabilités d’une autorité organisatrice, voire de lui imposer des obligations et charges supplémentaires, font l’objet d’une concertation appropriée, déterminée par la loi, avec leurs représentants. »
La parole est à M. Fabien Genet, pour présenter l’amendement n° 203 rectifié bis.
M. Fabien Genet. Le présent amendement vise à définir dans la loi la notion d’autorité organisatrice afin d’étendre le champ des politiques publiques auxquelles ce statut est applicable.
Cette notion doit reposer sur deux piliers.
D’une part, une collectivité ou un groupement exerce une responsabilité d’autorité organisatrice lorsqu’elle est en charge d’un service public déterminé, dont elle a la responsabilité exclusive, ou lorsqu’elle dispose d’une responsabilité de planification fixée par le législateur.
D’autre part, toute réglementation nationale ou tout document de planification régional ayant pour effet d’encadrer les responsabilités d’une autorité organisatrice, voire de lui imposer des obligations et charges supplémentaires, fait l’objet d’une concertation approfondie, encadrée par la loi, avec leurs représentants.
M. le président. L’amendement n° 1582 rectifié bis n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Il s’agit, pour les autorités organisatrices, de la même question qui a été posée pour le chef de filât. La réponse est donc passablement similaire.
La loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM) a créé l’autorité organisatrice des mobilités afin d’assurer l’articulation de plusieurs champs d’intervention selon un principe de subsidiarité.
Votre proposition posant les mêmes difficultés que votre amendement précédent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.