Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.
articles 1er et 2
Mme la présidente. Sur les articles 1er et 2, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
article 3
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 1 à 3
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
I. – Après l’article 706-139 du code de procédure pénale, il est inséré un chapitre IV intitulé : « Dispositions applicables aux infractions d’atteintes à la personne résultant d’une intoxication volontaire » et comprenant l’article 706-140.
II. – Au début du chapitre IV du titre XXVIII du livre IV du même code, sont ajoutés des articles 706-139-1 et 706-139-2 ainsi rédigés :
II. – Alinéa 4
Remplacer la référence :
706-140-1
par la référence :
706-139-1
III. – Alinéa 5
Remplacer la référence :
706-140-2
par la référence :
706-139-2
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État. Si vous n’y voyez pas d’objection, madame la présidente, je présenterai en même temps les quatre amendements du Gouvernement.
Mme la présidente. Je vous en prie, madame la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État. Ce sont tous des amendements rédactionnels, de cohérence ou de précision juridique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements du Gouvernement ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Dans la mesure où ces dispositions n’affectent pas le fond du texte, l’avis de la commission est favorable sur ces quatre amendements.
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
222-18-4 et 222-18-5
par les mots :
et 222-18-4
Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission y est favorable.
Le vote est réservé.
articles 3 ter A et 3 ter B
Mme la présidente. Sur les articles 3 ter A et 3 ter B, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
article 3 quater
Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
II. – Au premier alinéa de l’article 186, à la première phrase du premier alinéa de l’article 187, au deuxième alinéa de l’article 194, à la première phrase du deuxième alinéa de l’article 207 et à la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article 570 du même code, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième ».
Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission y est favorable.
Le vote est réservé.
L’amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
parties
par les mots :
avocats des parties ou aux parties si celles-ci ne sont pas assistées d’un avocat
Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement et que la commission y est favorable.
Le vote est réservé.
articles 4 à 20
Mme la présidente. Sur les articles 4 à 20, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le pire n’est jamais certain, puisque nous sommes arrivés à cet accord ! (Sourires.)
Il eût été vraiment regrettable que nous n’y arrivions pas. Toutefois, comme l’a souligné le rapporteur, le mariage de la carpe et du lapin, dans un certain nombre de cas, peut nous amener à des issues désagréables ; ce sera peut-être le cas pour le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dit 3DS.
Sur le présent texte, nous aurions pu faire échouer la commission mixte paritaire pour un désaccord sur la responsabilité. Ce n’est pas arrivé, tant mieux !
Je reste pour ma part sur la réserve quant à la turpitude du fou, puisque la Haute Assemblée avait rejeté cette analyse. Mais, finalement, le dispositif adopté ne fait qu’entériner la jurisprudence.
L’aggravation des peines pour utilisation de stupéfiants et d’alcool rejoint les dispositifs que le Sénat avait adoptés. La judiciarisation retenue, c’est-à-dire l’ouverture de la procédure dite Dati au tribunal siégeant à huis clos est tout à fait satisfaisante et correspond parfaitement à la position que la Haute Assemblée avait adoptée.
J’ajoute que le droit des victimes sera respecté. C’est ce qu’elles attendaient : un procès. À cet égard, le débat contradictoire n’était pas satisfaisant. La mission menée par nos collègues de l’Assemblée nationale avait déjà fait quelque peu bouger les lignes. Le résultat est là ; c’est ce qui est important.
Cela dit, nous n’en avons pas terminé, madame la secrétaire d’État, avec cette question de l’irresponsabilité.
De nombreuses études ont montré les failles des dispositifs de suivi des patients dont le consentement a été aboli. Le rapport Houillon estime que les mesures de sûreté sont trop limitées et notamment ne permettent pas à la juridiction d’ordonner des soins psychiatriques sans consentement, sauf hospitalisation complète.
Il y a là une faille dans le dispositif, et nous devrons travailler à une judiciarisation des mesures d’hospitalisation et de contrôle.
J’avais interrogé le garde des sceaux dans le cadre des questions d’actualité au Gouvernement, car un certain nombre de dispositifs de retours sur le suivi des personnes irresponsables ne fonctionnent plus.
Si ma mémoire est bonne, il y a environ 15 000 décisions de non-lieu ou de classement sans suite concernant des personnes ayant été visées par une mesure d’irresponsabilité à un moment ou à un autre. Or ces 15 000 personnes ne sont pas suivies. Elles sont dans la nature, sans aucun suivi, et l’on ne peut pas complètement exclure un accident ou un problème quelconque.
En effet, ces personnes qui ont été impliquées dans un certain nombre de procédures peuvent tout de même faire courir des risques, tout simplement parce que leur équilibre psychiatrique n’est pas très assuré, même si ces procédures se sont conclues par des non-lieux ou des classements sans suite.
Puisque des États généraux de la justice sont toujours en cours, c’est le moment ou jamais d’organiser une table ronde sur ce problème particulier. Ce serait l’étape suivante du travail visant à combler un certain nombre de failles dans le dispositif.
C’est important : nous ne sommes pas à l’abri de difficultés, et il n’est pas normal que ce suivi ne soit pas assuré, ou qu’il le soit uniquement par les préfets, qui ne disposent pas toujours de l’information nécessaire, d’ailleurs.
En ce qui concerne la partie du texte qui est relative à la sécurité, notre collègue Loïc Hervé s’est parfaitement expliqué, tant il maîtrise le sujet.
Malgré ces réserves, qui, vous l’aurez compris, mes chers collègues, sont de pure forme, le groupe Union Centriste votera avec enthousiasme les conclusions de la commission mixte paritaire.
Je ne vous cache pas qu’avoir raison une fois de temps en temps, ce n’est pas une fois de trop ! (Sourires. – Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme je l’avais souligné lors du précédent examen de ce texte, derrière des objectifs pluriels, ce projet de loi cherche à concrétiser, dans des dispositifs parfois exigeants et souvent complexes, les conditions garantissant à chacun sa sûreté, sa sécurité, sa sérénité et, in fine, l’exercice paisible de sa liberté.
En premier lieu, il y a la question de l’irresponsabilité pénale, tristement mise en exergue par le meurtre de Sarah Halimi. Il faut redire que notre assemblée s’était montrée sensible très tôt aux difficultés pouvant exister dans le lien entre psychiatrie et droit pénal.
Dès avant la décision de la cour d’appel de Paris dans l’affaire Halimi, le Sénat avait ainsi constitué, dès le mois de juillet 2019, un groupe de travail commun entre sa commission des affaires sociales et sa commission des lois sur l’expertise psychiatrique et psychologique en matière pénale, sur l’initiative de nos collègues Nathalie Delattre – elle préside notre séance cette après-midi ! – et de Jean Sol, et auquel fut ensuite associé Jean-Yves Roux.
En second lieu, ce projet de loi tente de rattraper les écarts constatés par le Conseil constitutionnel dans la loi pour une sécurité globale préservant les libertés. Nous avons travaillé, notamment nos rapporteurs, afin que cela ne se reproduise pas. J’espère donc que ce nouveau texte ne butera pas une nouvelle fois sur les juridictions.
Dans tous les cas, la gravité des situations visées par ce projet de loi dit l’importance pour le Sénat et l’Assemblée nationale de parvenir à s’accorder sur un texte commun.
Hélas, certains apports du Sénat n’ont pas été retenus. Bien sûr, nous saluons l’esprit de compromis mis en avant pour ne pas mettre en échec la commission mixte paritaire. Toutefois, nous regrettons leur disparition du texte, car ils y traitaient de points particulièrement importants.
Je pense notamment aux articles 3 ter B, 4 bis et 7 bis. L’article 3 ter B, traitant des mesures pouvant être ordonnées par le juge après que l’irresponsabilité pénale ait été constatée, répondait à une attente consensuelle des praticiens. Il autorisait la juridiction à ordonner des soins psychiatriques sans hospitalisation complète. La souplesse de ce dispositif permettait au droit de mieux s’adapter à la pratique des juges et des médecins.
L’argument qui nous fut présenté par le Gouvernement lors de notre examen en séance publique fut de dire que le juge n’est pas médecin… Dont acte, mais il demeure que le code de procédure pénale lui permet d’ordonner l’admission en soins psychiatriques de la personne irresponsable, sous la forme d’une hospitalisation complète. Il est difficile d’y voir autre chose qu’une décision médicale… Dès lors, pourquoi ne pas lui laisser la possibilité d’en prendre d’autres ?
Je me permets également de revenir sur l’article 4 bis, que notre hémicycle avait adopté et qui concernait l’anonymisation des témoins d’agressions de sapeurs-pompiers. Chacun entendra l’argument selon lequel ce dispositif serait déjà satisfait, dans la mesure où il n’y aurait que peu de cas de violences exercées contre des pompiers qui soient punis de moins de trois ans d’emprisonnement.
Il demeure que le sujet est gravissime et que, dès lors, il ne faut pas craindre d’inscrire dans la loi, même symboliquement, le renforcement des dispositifs permettant l’identification et la sanction des auteurs d’agressions contre les sapeurs-pompiers.
M. Loïc Hervé, rapporteur. Très bien ! Vous avez raison.
M. Jean-Claude Requier. Je dis cela quelques jours après la Sainte-Barbe… (Sourires.) Le groupe RDSE regrette donc la disparition de ce dispositif.
Enfin, l’article 7 bis, adopté par notre assemblée, prévoyait la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport détaillant les grands axes de la politique globale de réhabilitation des cellules de gardes à vue.
Cette demande de rapport avait été adoptée malgré la jurisprudence constante de notre assemblée, qui n’aime pas les rapports. Je crois qu’elle aurait pu être maintenue afin de dresser un état des lieux sur cette question.
C’est un sujet pour lequel il faut de la transparence, à la fois pour améliorer les conditions d’accueil des individus gardés à vue et pour dire, le cas échéant, quand les cellules ne sont pas dans un état indigne.
Bien entendu, ces regrets ne nous empêcheront pas de voter ce projet de loi. (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Catherine Di Folco applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Pierre Sueur. Pour le début de l’examen de ce texte – c’était un lundi –, M. le garde des sceaux était parti à Poitiers. Il devait aller entendre un discours de M. le Président de la République, qui ouvrait, en fin de mandat, les États généraux de la justice. Et pour la clôture du débat sur ce texte, M. le garde des sceaux n’est pas là non plus…
C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je vous ai gratifiée tout à l’heure du titre de secrétaire d’État chargée de la justice et de la sécurité… Mais il est facile d’ironiser ainsi, je le reconnais. Et ne prenez pas cela personnellement, car nous sommes très heureux de vous accueillir au Sénat.
M. Loïc Hervé, rapporteur. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous pourriez tout de même dire à M. le garde des sceaux, si vous voulez bien vous faire notre interprète auprès de lui, que nous étions hier avec les magistrats et avec l’ensemble des personnels de la justice, qui ont exprimé un profond malaise.
Je ne tiens pas à faire preuve ici d’un quelconque triomphalisme politicien. Le budget de la justice n’a pas suffisamment augmenté depuis très longtemps. Il est vrai qu’il a progressé de 8 % cette année, comme l’année précédente, mais nous voyons bien que nous sommes loin du compte.
C’est pourquoi je souhaite que le prochain gouvernement, quel qu’il soit, s’engage sur une véritable loi de programmation à dix ans. Un tel texte n’existe pas en droit, mais il devrait nous permettre de retrouver la place qui devrait être la nôtre en Europe, où certains pays sont très largement en avance sur nous pour le nombre des magistrats ou des agents qui, comme les greffiers, concourent à la justice.
Il est difficile, madame la secrétaire d’État, de ne pas entendre et comprendre le malaise qui s’est exprimé et qui est venu vraiment de toute part, depuis les plus petits tribunaux jusqu’à la Cour de cassation.
Je tenais à le dire à cette tribune, bien que ce ne soit pas exactement l’objet de ce texte.
Notre groupe aurait souhaité d’autres rédactions dans la première partie de ce texte, mais il souscrit complètement à l’idée que, tout en maintenant l’article 122-1 du code pénal – c’est une question de principe – il est nécessaire de prendre en compte la situation dans laquelle une personne choisit elle-même d’organiser son absence de discernement.
Nous pensons que l’article 2 n’ajoute pas d’éléments très utiles et risque de susciter une certaine confusion, et nous aurions aimé que figurât dans la loi une définition du discernement, comme nous l’avions proposé.
S’il n’y avait eu que cette partie du texte, nous aurions voté pour, en dépit des quelques remarques que je viens de faire.
M. Loïc Hervé, rapporteur. Dommage !
M. Jean-Pierre Sueur. En revanche, pour ce qui est de la seconde partie, portant sur la sécurité, nous sommes bien sûr favorables à deux types de mesures, celles qui concernent le contrôle des armes et du trafic des armes à feu et celles qui accroissent la répression des actes de violence à l’égard des policiers.
Sur les sapeurs-pompiers, je partage entièrement ce qu’a dit notre collègue Requier. Une proposition de loi avait été déposée par notre collègue Patrick Kanner. Nous espérons que nous pourrons enfin aboutir sur cette question à la faveur d’un autre texte.
Cela dit, certaines mesures sont revenues parce que le Conseil constitutionnel les avait critiquées. Nous persistons à dire que nous sommes en désaccord avec les mesures relatives aux drones et à la vidéosurveillance et que nous doutons de leur constitutionnalité. Nous regrettons que nos amendements, qui étaient inspirés par les remarques de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), du Conseil national des barreaux et de la Cour de cassation n’aient pas pu être retenus.
Comme nous voulions voter pour la première partie et contre la seconde partie, à l’exception de deux mesures que nous soutenons, nous allons, logiquement, nous abstenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. Dany Wattebled. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la modification de la loi pénale n’est jamais chose facile. L’exercice est encore plus délicat lorsqu’il s’agit du régime de la responsabilité pénale. Les Français ont été nombreux à ne pas comprendre la décision rendue par la justice dans l’affaire Sarah Halimi.
Cette incompréhension ne doit cependant pas laisser croire que les juges ont failli. Il faut le dire ici, ils ont parfaitement appliqué la règle qui était inscrite dans notre droit. C’est bien la règle fixée qui était en cause et que beaucoup ont souhaité voir modifier.
Le texte que le Gouvernement nous a proposé était complexe, comme l’est le sujet lui-même. Nous sommes satisfaits de l’équilibre qui a été trouvé, car la solution était loin d’être évidente.
Désormais, ceux qui s’intoxiquent en vue de commettre un crime ou un délit devront répondre de cette intoxication, dès lors qu’elle aura été suivie d’une infraction. Une consommation volontaire de substances psychoactives, entraînant l’abolition du discernement, ne sera plus synonyme d’irresponsabilité pénale.
Nous soutenons ces dispositions, tout comme nous soutenons le message qu’elles envoient : l’intoxication volontaire n’est pas exonératoire de la responsabilité pénale. Nos concitoyens doivent savoir que ces consommations sont des actes répréhensibles en tant que tels, qui seront punis à ce titre.
Dans cette perspective, nous nous félicitons que ce texte inscrive dans notre droit la consommation volontaire d’alcool ou de stupéfiants comme une circonstance aggravante de l’infraction. Cette disposition est la contrepartie nécessaire de la responsabilité civile des individus : chacun doit répondre de ses actes, ainsi que de ses consommations.
Les articles concernant la responsabilité pénale sont les plus emblématiques de ce texte, mais celui-ci comporte bien d’autres avancées, portant sur la sécurité au quotidien de nos compatriotes.
Les confiscations et les destructions de véhicules ayant été utilisés pour commettre des rodéos urbains, dont on entend régulièrement parler, seront désormais facilitées. C’est une réponse de fermeté que nous soutenons et qui est attendue par les riverains.
Nous nous félicitons également de l’extension de la procédure d’amende forfaitaire aux vols de faible valeur. Cette procédure, qui a fait ses preuves, préserve les droits des victimes en imposant la restitution de l’objet ou l’indemnisation de la victime.
Ne pensons pas que la faible valeur de ces vols les rende anecdotiques : ils font partie de ces infractions du quotidien qui empoisonnent la vie de nos concitoyens. L’amende forfaitaire permettra d’apporter une réponse rapide et proportionnée à ces délits.
Le texte comporte également toute une série de dispositions visant à renforcer la protection de nos forces de l’ordre. Il est nécessaire de protéger ceux qui nous protègent, parfois au péril de leur vie.
Nous soutenons donc le renforcement des sanctions portant sur les violences commises contre les policiers, les gendarmes et les membres de leur famille. Ceux qui s’attaquent à eux doivent savoir qu’ils s’attaquent à la République et qu’ils seront punis en conséquence.
Il fallait enfin permettre aux forces de l’ordre d’utiliser les moyens vidéo modernes, pour mener leurs enquêtes, mais aussi pour protéger les gendarmes et les policiers engagés dans des opérations de terrain.
Ces dispositions permettront d’embarquer des caméras sur les véhicules, mais aussi sur des drones. Mon collègue du Nord, Jean-Pierre Decool, s’associe à moi pour saluer tout particulièrement l’article 8, qui ouvre l’utilisation de drones à la lutte contre l’immigration irrégulière, un véritable fléau dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais : ce matin encore, deux bateaux sont partis en direction de l’Angleterre depuis Wimereux, avec à leur bord de nombreux migrants.
De tels moyens sont donc importants. Mais leur utilisation ne pouvait pas se faire au détriment des libertés individuelles. Le texte reprend par conséquent plusieurs recommandations formulées par la CNIL à cet égard.
Ce projet de loi comporte des dispositions bienvenues. Le travail en commission mixte paritaire a permis de dégager un texte commun. L’équilibre trouvé nous semble satisfaisant.
L’ensemble des membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires votera donc en faveur de l’adoption de ce texte. (M. le rapporteur et M. Jean-Claude Requier applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Di Folco. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, après une commission mixte paritaire conclusive il y a quelques semaines, je salue le consensus ayant présidé à l’examen du projet de loi relatif à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure.
L’accord obtenu sur le premier volet, le plus débattu de ce texte, a permis de répondre à la vive émotion suscitée par l’arrêt rendu par la Cour de cassation, au mois d’avril dernier, prononçant l’irresponsabilité pénale de l’auteur du meurtre de Sarah Halimi.
Ce sujet d’actualité renvoie à un débat qui agite la communauté juridique en particulier, et l’opinion publique en général, depuis fort longtemps : doit-on, ou non, juger les fous ?
Le 18 novembre dernier, nos deux chambres se sont accordées sur la possibilité – inédite – de poursuivre et de condamner celui qui se serait intoxiqué et aurait commis une atteinte grave aux personnes dans un état d’abolition temporaire du discernement.
Les membres de la commission mixte paritaire ont néanmoins pris soin d’apporter plusieurs garanties indispensables à cette nouvelle procédure, que notre groupe salue, en particulier l’exigence préalable d’expertises psychiatriques contradictoires.
Nous nous félicitons également de ce que le Sénat ait obtenu gain de cause sur un point qui nous tenait particulièrement à cœur, celui de la compétence de la juridiction de jugement pour la déclaration d’irresponsabilité.
Ainsi, contrairement à ce qui était prévu dans le texte initial, la déclaration d’irresponsabilité sera prise par le tribunal correctionnel ou par la cour d’assises, au terme d’un procès.
Alors que le texte initial confiait cette compétence à la chambre de l’instruction, cette modification substantielle octroie aux victimes un cadre symbolique s’il en est leur permettant, en outre, de mieux comprendre les raisons pour lesquelles une personne mise en cause peut être déclarée irresponsable par les juges du fond.
Cette disposition nous semble de nature à éviter les incompréhensions pleinement légitimes des victimes, et parfois leur indignation, à laquelle nous nous associons.
Le volet sécuritaire de ce projet de loi comporte des avancées bien réelles. Il en est ainsi du renforcement du contrôle des armes au plan national, de l’accompagnement de la montée en puissance de la réserve civile de la police nationale ou encore du meilleur encadrement de la captation d’images par les forces de sécurité.
Nous tenons toutefois à exprimer un regret, relatif à l’abandon des dispositions de la proposition de loi du président Kanner, qu’a souligné également le président Requier.
M. Loïc Hervé, rapporteur. C’est vrai !
Mme Catherine Di Folco. Ces dispositions visaient à étendre le dispositif qui anonymise l’identité des témoins aux procédures portant sur les infractions commises sur un sapeur-pompier. Elles avaient pourtant été adoptées à l’unanimité au Sénat, il y a déjà deux ans.
Malgré cela, nous nous félicitions de l’accord obtenu, et je ne doute pas qu’une grande majorité de notre groupe se prononcera en faveur de ce texte, dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Pour finir, je tiens à saluer la qualité du travail mené par nos deux rapporteurs, Loïc Hervé et Muriel Jourda. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, au lendemain d’une grève historique des magistrats, il n’y aura pas de surprise : nous ne voterons pas plus ce texte issu de la CMP que celui qui avait élaboré en première lecture.
Ce projet de loi comprend deux axes, surfant tout à la fois sur l’idée d’un supposé laxisme judiciaire et sur un besoin accru de surveillance et d’armement.
Il reflète la remise en cause tant des principes cardinaux de notre République que des règles fondamentales de notre justice pénale, qui érigent l’élément intentionnel comme prérequis à l’attribution de responsabilité. Il témoigne aussi d’une dérive sécuritaire sans fin, sous la pression de certains syndicats de policiers, d’une vision liberticide de la sécurité, qui serait améliorée via une surveillance vidéo insuffisamment encadrée, et d’une volonté de criminaliser les mineurs.
Sa première partie est guidée par la volonté de modifier les conditions de la déclaration d’irresponsabilité pénale. Ce principe à valeur constitutionnelle est pourtant, comme le rappelle le Conseil d’État dans son avis, « l’un des fondements anciens et constants du droit pénal », car « il ne peut y avoir de responsabilité sans libre arbitre ».
Ce projet de loi s’inscrit dans la lignée des travaux de notre assemblée, qui entendaient déjà répondre à ce qui avait été compris par beaucoup comme un appel du pied de la Cour de cassation.
La loi ne distingue pas selon l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement. Mais la CMP a abouti à un texte qui permet en réalité d’écarter l’application de l’ensemble de l’article 122-1 du code pénal si l’abolition du discernement résulte d’un fait fautif antérieur, à savoir si, « dans un temps très voisin de l’action, la personne a volontairement consommé des substances psychoactives dans le dessein de commettre l’infraction ».
Je le redis : sauf à promouvoir une théorie de la folie volontaire, cette vision est trop réductrice et ne trouve pas écho auprès des professionnels du droit et de la médecine !
Certes, un comportement volontaire peut directement contribuer au déclenchement de l’abolition du discernement, mais nous devons rester prudents, à la fois sur cette détermination et sur celui qui la détermine. En effet, cette disposition repose sur un a priori : la personne qui s’est volontairement évadée de la réalité n’en serait finalement pas si déconnectée. En outre, pourquoi avoir limité le fait fautif à la prise de substances psychoactives ?
Même à considérer qu’il faille distinguer entre abolition volontaire ou non et que chacun ait une connaissance assez fine de son état de santé et des effets de chacune de ses consommations, pourquoi limiter l’exception à la prise volontaire de substances psychoactives ? Pourquoi, par exemple, ne pas prendre en compte également l’arrêt de la prise de certaines substances ? Cela n’a pas de sens !
Par ailleurs, les discussions l’ont montré : il est tout aussi difficile d’établir une volonté d’abolition du discernement que de connaître précisément les conséquences de la prise de substances psychoactives sur le discernement.
Notre groupe regrette aussi profondément que le Gouvernement refuse encore une fois de donner les moyens aux experts psychiatres de poursuivre leur mission de diagnostic et d’expertise dans des conditions plus adaptées à leurs missions.
Que dire maintenant de la deuxième partie du texte, aussi sécuritaire qu’électoraliste ?
Le projet que vous nous présentez comporte notamment de nouveaux délits autonomes visant à réprimer les violences commises sur nos forces de sécurité. Si nous condamnons encore et toujours ces violences, la qualité de « dépositaire de l’autorité publique » est déjà une circonstance aggravante qui permet l’application de peines plus lourdes.
Pour des gens qui fustigent souvent les postures victimaires ou la concurrence des douleurs, je vous trouve bien réceptifs aux revendications de certains syndicats…
Nous avions déjà relayé à ce sujet les alertes de la Défenseure des droits et du Conseil d’État, lequel voit dans cette multiplication d’infractions autonomes et dans la complexification du droit des « réponses législatives à des événements particuliers ».
Notre groupe dénonce particulièrement les dispositions du texte sur la captation d’images, mesures qui avaient été à juste titre censurées par le Conseil constitutionnel.
L’article 7 autorise un système de vidéosurveillance, y compris des mineurs. Même s’il a été toiletté afin de répondre à la censure du Conseil, il reste très problématique sur de nombreux points. La Défenseure des droits appelle à une plus grande vigilance face à un texte dont le manque de précision compromet l’effectivité de la restriction de l’application de la vidéosurveillance, et qui pourrait in fine conduire à la systématisation de cette dernière.
L’article 8 porte sur l’utilisation de caméras embarquées sur des drones ou tout autre aéronef. Là encore, des mesures censurées par le Conseil constitutionnel nous reviennent dans une version prétendument mieux cadrée.
Amnesty International rappelle qu’aucune évaluation des systèmes de vidéosurveillance fixes utilisés par les polices municipales n’a été réalisée et que la nécessité de développer encore ces systèmes n’est en rien justifiée pour l’instant, car elle n’est pas corroborée par des éléments d’analyse objectivés.
Notre groupe s’oppose à ces dispositions liberticides.
De manière générale, nous prendrons nos responsabilités face à ce que nous considérons comme une attaque caractérisée contre l’équilibre de notre société. Nous jouerons notre rôle de gardien des valeurs républicaines et constitutionnelles.
C’est pourquoi nous rejetons ce texte, sur le fond comme sur la forme, ainsi que la vision de la société qu’il sous-tend. Nous demanderons une nouvelle fois au Conseil constitutionnel d’expertiser les mesures très problématiques qu’il contient.