Mme la présidente. La parole est à M. Didier Mandelli, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Didier Mandelli. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je pourrais limiter mon intervention à une exclamation : enfin !
Comme mes collègues vendéens, j’ai été alerté voilà quelques années par le maire de L’Île-d’Yeu, qui rencontrait des difficultés à obtenir l’autorisation pour un projet de parc photovoltaïque sur le site d’un ancien centre d’enfouissement technique. Ce projet est censé occuper une surface de 1,5 hectare sur les 5 hectares du site et permettre, grâce à l’ensoleillement dont bénéficie l’île, et la Vendée en général, de gagner en autonomie énergétique, pour arriver à 35 % des besoins.
Le projet se heurte à des obstacles juridiques relatifs à la loi Littoral, qui encadre les conditions d’aménagement et d’occupation des sols dans les quelque 1 200 communes littorales françaises.
Selon la loi, à laquelle nous sommes tous très attachés, les installations photovoltaïques doivent être considérées comme une « extension de l’urbanisation ». L’implantation de parcs photovoltaïques n’est donc permise sur le territoire des communes littorales qu’en continuité des constructions existantes.
J’avais alerté, dès 2017, le Gouvernement sur cette situation, qui m’a immédiatement semblé être à contre-courant des objectifs que nous nous fixons en matière de réduction de nos émissions de CO2 et de notre dépendance aux énergies fossiles.
Cela fait plus de dix ans que le maire de L’Île-d’Yeu, Bruno Noury, ne parvient pas à concrétiser ce projet, à l’instar d’autres élus du littoral qui aspirent à développer une énergie décarbonée sur leur territoire. Aujourd’hui, vingt sites potentiels ont été identifiés par nos collègues des nombreux départements concernés. Mme la secrétaire d’État vient de nous le confirmer à l’instant, reprenant une étude du Cerema.
Ce texte est donc le fruit d’un long cheminement, comme je l’ai rappelé en commission. Le sujet a déjà été abordé dans la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte, dans la loi pour l’économie bleue, dans la proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux de notre ancien collègue Michel Vaspart, et enfin, plus récemment, dans la loi Climat et résilience.
Il aura fallu attendre cette dernière pour que nous puissions nous accorder sur cette mesure essentielle pour nos élus du littoral. Le Conseil constitutionnel a pourtant jugé que cette mesure représentait un cavalier législatif dans la loi Climat. Ainsi, selon lui, on ne pouvait pas faire de lien a priori entre l’installation de panneaux photovoltaïques et l’objectif de ce texte. Vous me permettrez à ce stade de vous faire part de mon incompréhension face à cette décision.
Je me réjouis que nous puissions examiner aujourd’hui cette proposition de loi, juste avant la suspension de séance imposée par les échéances électorales, et je remercie le rapporteur, Jean-Claude Anglars, autant de la qualité de son travail que d’être venu en Vendée.
Je le redis une fois de plus, ce texte ne remet pas en question la loi Littoral, à laquelle, j’y insiste, nous sommes tous attachés. Il se contente de l’ajuster à nos objectifs environnementaux et ne concerne que des friches sur sites dits « dégradés ».
La proposition de loi a fait l’objet d’une mesure d’examen particulière en commission, laquelle l’a votée à l’unanimité, ce dont je me félicite, puisque cela confirme qu’il s’agit bel et bien d’une mesure de bon sens.
Je remercie également le Gouvernement d’avoir donné un avis favorable à cette proposition, par la voix d’Emmanuelle Wargon en commission, et par la vôtre, madame la secrétaire d’État, aujourd’hui en séance publique. Soyez-en remerciée !
Nos élus, dans beaucoup de territoires, attendent cette mesure avec impatience. Aussi, je forme le vœu que ce texte soit largement adopté dans notre hémicycle, puis inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Ronan Dantec. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, lors de l’examen de la loi Climat et résilience, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires (GEST) avait soutenu le dispositif que nous examinons aujourd’hui, tout en étant très attentif à la dérogation portée à la loi Littoral, toute dérogation à celle-ci nécessitant d’être scrupuleusement pesée et évaluée. Vous connaissez notre vigilance sur le sujet.
À l’époque, le travail en commission mixte paritaire avait permis de strictement limiter la dérogation à la loi Littoral, en introduisant une série de garanties, en prévoyant que les autorisations d’implantation soient accordées à titre exceptionnel, après avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, et avec une étude d’incidence pour s’assurer que les enjeux de protection de l’environnement soient bien pris en compte.
Enfin, la dérogation à la loi Littoral n’était possible que si le projet d’implantation de panneaux photovoltaïques s’avérait plus bénéfique qu’une opération de renaturation, comme l’a rappelé Mme la secrétaire d’État.
Le dispositif a donc été censuré par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif. La proposition de loi que nous nous apprêtons à voter grâce à Didier Mandelli – nous l’en remercions – permet de rediscuter aujourd’hui de cette disposition, enrichie d’un ensemble de garanties satisfaisantes.
Ce texte va dans le bon sens et nous accueillons favorablement sa nouvelle rédaction issue de la commission, dont nous saluons le travail. Le GEST avait lui-même proposé un amendement de précision pour que l’étude d’incidence démontre bien que le projet d’implantation de panneaux photovoltaïques sur les friches n’est pas de nature à porter atteinte à la biodiversité, qui peut être importante sur ces territoires. Je crois que cela répond, madame la secrétaire d’État, à la préoccupation que vous venez d’exprimer.
Un second garde-fou a été utilement ajouté : la consultation préalable du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres sur le décret fixant la liste des friches éligibles au dispositif.
Ce texte permettra donc aux collectivités littorales porteuses de projets d’implantation de panneaux photovoltaïques de sortir de l’impasse juridique, avec un encadrement qui nous semble suffisamment protecteur. Cette proposition de loi mise clairement sur le photovoltaïque pour augmenter la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité française, mais son impact sera néanmoins limité, il faut le dire, car seulement une vingtaine de sites seraient concernés par le dispositif.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que nous accusons un énorme retard dans le développement des énergies renouvelables en France. Un récent classement de l’institut de statistiques européen Eurostat révèle que la France est le seul pays européen à avoir manqué son objectif de 23 % d’utilisation du renouvelable dans sa consommation finale d’énergie en 2020. Alors que tous les autres pays européens ont, eux, dépassé leurs objectifs, nous atteignons péniblement 19 % de consommation de renouvelable, malgré un potentiel très fort dans notre pays, qui bénéficie d’un littoral étendu – une mention spéciale pour les régions méditerranéennes, bien ensoleillées –, ainsi que de nombreuses forêts pour la biomasse. Si nous voulons atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, tenir les objectifs européens du Fit for 55, c’est-à-dire les moins 55 % en 2030 – nous en reparlerons avec la résolution sur la stratégie européenne dont nous débattrons dès jeudi en commission –, et respecter les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie, la PPE, la feuille de route officielle de la France, qui prévoit de doubler la capacité installée des énergies renouvelables électriques en 2028 par rapport à 2027, rend nécessaire une accélération du déploiement des énergies renouvelables.
M. le rapporteur a appelé voilà quelques instants à faire preuve de volontarisme dans ce domaine, et pas seulement en réinscrivant rapidement à l’ordre du jour parlementaire cette nécessaire proposition de loi. Je le rejoins évidemment, mais je me permets néanmoins de rappeler que c’est d’abord l’éolien terrestre, peu onéreux et facile à installer, qui est la principale solution technologique à notre portée, y compris financièrement : c’est de loin le retour sur investissement le plus rapide.
Je vous cite encore, monsieur le rapporteur – j’ai pris beaucoup de notes (Sourires.) – : il faut « mettre les actes en cohérence avec nos ambitions ». Aussi, je souhaite que cet assouplissement maîtrisé, dont nous nous félicitons aujourd’hui collectivement, soit aussi la règle pour l’éolien, qui est aujourd’hui la réponse la plus rationnelle, probablement la seule pour que la France renforce son indépendance énergétique. Il s’agit d’un enjeu central, qui relève de la responsabilité politique de la représentation nationale, tout particulièrement dans cette période de grande tension internationale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous revenons avec cette proposition de loi sur un sujet que nous avions déjà abordé dans la loi Climat et résilience. Il s’agit de la question très spécifique de l’implantation de panneaux photovoltaïques sur des sites jugés dégradés en zone littorale. La disposition alors adoptée avait été censurée par le Conseil constitutionnel.
Tout d’abord, reconnaissons que la problématique de l’adaptation de la loi Littoral à la réalité des territoires pour asseoir leur développement est récurrente au sein de cet hémicycle. Ce débat est donc légitime et il doit être sérieusement mené.
Pour autant, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste (CRCE) se tient dans une attitude extrêmement prudente sur les possibilités de dérogation à cette loi. Nous sommes en effet particulièrement attachés à l’acquis qu’elle représente pour la préservation de l’environnement et des paysages.
Trop souvent, la loi Littoral a été remise en cause pour de mauvaises raisons. Aujourd’hui, il est question d’autoriser l’implantation de panneaux photovoltaïques dans les friches, y compris si celles-ci ne se trouvent pas en situation de continuité urbaine. Cette dérogation ne serait pas laissée à la main des élus locaux : elle serait autorisée par le préfet, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, et encadrée par une étude d’incidence permettant de démontrer que le projet répond bien à plusieurs exigences.
Par ailleurs, la liste des friches dans lesquelles ces autorisations pourraient être délivrées serait fixée par décret. Selon le ministère de la transition écologique, ce dispositif concernerait une vingtaine de sites.
En commission, le texte a connu des évolutions que nous jugeons favorables. Ainsi, le champ de l’étude d’incidence est étendu aux atteintes à la biodiversité, et n’est plus limité aux seules atteintes environnementales. La liste des friches concernées devra par ailleurs être établie après consultation du Conservatoire du littoral. Ces consultations nous semblent utiles, mais nous regrettons cependant que l’avis des maires et des EPCI concernés ne soit pas prévu. Il s’agit clairement d’une lacune.
Sur l’intérêt de cette dérogation à la loi Littoral, nous considérons que l’enjeu de développement de l’énergie solaire dans notre mix énergétique doit être défendu, en cohérence avec les objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Actuellement, ces installations sont interdites dans la bande littorale de 100 mètres, puisqu’elles ne constituent pas des installations liées à un service public ou à une activité économique qui exige la proximité immédiate de l’eau.
Dans les autres parties du territoire communal, les parcs photovoltaïques sont soumis au principe de continuité avec les agglomérations et les villages existants posé par l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. Comme l’ont rappelé les travaux de la commission, la jurisprudence est à ce propos d’une grande constance. La cour administrative d’appel de Marseille vient encore de la confirmer en annulant le permis de construire délivré par le préfet de l’Aude pour le parc photovoltaïque de la société Soleil participatif du Narbonnais, le 9 mars 2021.
Une évolution de la loi Littoral sur ce point, de manière très encadrée, comme c’est le cas avec cette proposition de loi est donc la bienvenue pour permettre, par exemple, l’implantation de parcs photovoltaïques au sol sur des sites impropres à l’activité agricole, comme des anciennes carrières ou décharges.
Pour nous, la notion de friches utilisée est trop large. Il conviendrait de préciser de quelle sorte de friche il s’agit, à savoir des terrains pollués ou d’anciens sites industriels.
Il faut également faire en sorte que le développement de tels parcs respecte plusieurs critères. Il s’agit de favoriser leur installation en priorité sur des bâtiments, et, en dernier ressort seulement, dans les espaces anthropisés des zones naturelles, tels que les anciennes installations classées, les carrières, les gravières ou les centres de stockage des déchets inertes. Cette règle de priorité doit absolument être respectée et l’implantation en zone littorale doit ainsi conserver un caractère purement exceptionnel.
Par ailleurs, il faudrait associer mieux encore les élus locaux. Le développement du parc photovoltaïque doit intégrer les documents locaux d’urbanisme. Ainsi, le schéma de cohérence territoriale (SCoT) et le plan local d’urbanisme (PLU), élaborés dans le respect des objectifs du développement durable, peuvent être des outils puissants de « réduction des émissions de gaz à effet de serre, de maîtrise de l’énergie par la production énergétique à partir de sources renouvelables », conformément aux textes réglementaires.
Enfin, il importe, même si tel n’est pas le sujet de cette proposition de loi, de réfléchir au développement des énergies renouvelables afin de les placer sous entière maîtrise publique – aujourd’hui, il s’agit d’un secteur très morcelé –, et d’obtenir un véritable plan national de développement et d’aménagement du territoire.
Sous réserve de ces observations, nous voterons en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui répond à une demande de longue date des communes littorales. La loi du 3 janvier 1986, dite loi Littoral, encadre strictement les conditions d’aménagement et d’occupation des sols dans nos 1 200 communes littorales françaises.
Si cette loi répond à un objectif louable, celui de concilier développement de l’urbanisme et préservation de l’environnement, elle entrave cependant le développement de l’énergie solaire, puisqu’aucune dérogation n’est effectivement prévue pour les panneaux photovoltaïques.
Ce texte, dont je salue les auteurs, vise donc à permettre l’implantation de ces panneaux sur des sites jugés dégradés, et plus particulièrement des friches. C’est aussi un élément du grand puzzle mondial de la lutte contre le réchauffement climatique. La France entamera bientôt son troisième mois à la présidence du Conseil de l’Union européenne, et il est crucial de montrer l’exemple à cet égard en accordant un soutien sans faille à toutes les énergies renouvelables.
Nos territoires étant les premiers à le demander, donnons donc à l’échelon local les moyens d’être vecteur d’une transition énergétique nationale et internationale. Je pense notamment à nos collectivités insulaires, dépendantes elles aussi des énergies fossiles.
Est-il encore nécessaire de rappeler ici que la consommation d’énergies fossiles est la principale cause des dérèglements climatiques, sans compter les conséquences de certains désastres écologiques conjoncturels comme les marées noires, les fuites des installations offshore ou parfois même leur explosion ? Je pense ici à l’explosion en 2010 de la plateforme Deepwater Horizon dans le Golfe du Mexique – une plateforme au nom prédestiné, puisqu’elle a fini à 1 500 mètres de fond –, qui a fait onze morts et souillé 2 000 kilomètres de côtes américaines avec 678 000 tonnes de brut libérées dans la nature.
Le chiffre astronomique, mais probablement insuffisant, du dédommagement, à hauteur de 21 milliards de dollars, démontre, s’il en était encore besoin, la soif d’énergie à tout prix des pays développés.
Une soif d’or noir qui ne diminue pas et qui est aujourd’hui boostée par la demande des pays émergents.
Cette compétition pour les ressources fossiles est aussi une source de tensions internationales et, potentiellement, de conflits.
Bref, nous avons tout à gagner à soutenir les énergies renouvelables ou plutôt, devrais-je dire, nous avons tout à perdre à ne pas le faire.
Cette proposition de loi est donc une évidence et certains, dont je suis, auraient d’ailleurs aimé aller encore plus loin.
J’aurais par exemple souhaité pouvoir ajouter à ce texte une mesure permettant l’installation de panneaux photovoltaïques le long des routes et le long des autoroutes. De la même manière, ma collègue Denise Saint-Pé aurait voulu faciliter l’installation de panneaux dans les territoires de montagne. Ma collègue Évelyne Perrot milite, elle, en faveur de cette possibilité pour de petits aménagements touristiques en bord d’eau, de lacs ou de réservoirs.
Je termine ici la liste de mes frustrations, car nous avons compris que ce véhicule législatif n’était pas le bon. Positivons cependant en considérant que cette proposition de loi est un premier pas vers plus de souplesse, à terme, sur tous nos territoires, pour une meilleure intégration des énergies renouvelables dans notre mix énergétique.
Notre collègue Annick Billon se réjouit de l’initiative des parlementaires, et de Didier Mandelli, en particulier, car elle ouvre une nouvelle perspective à un projet, qu’elle a défendu au ministère de l’écologie avec le maire de L’Île-d’Yeu, de création d’une centrale photovoltaïque sur un ancien centre d’enfouissement, un projet bloqué depuis plusieurs années du fait, notamment, de la loi Littoral.
Mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera cette proposition de loi, qui reprend une mesure de la loi Climat du 22 août 2021, une mesure adoptée par les deux assemblées avant d’être censurée par le Conseil constitutionnel.
Rappelons que les débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle à propos de l’hydrogène, de l’éolien, de la biomasse ou encore du nucléaire ont souvent donné lieu à d’importants désaccords. Néanmoins, nous avançons à petits pas, conscients qu’il y a non pas une solution miracle, mais plutôt, comme nous le disions avec Jean-Louis Borloo lors du Grenelle de l’environnement, un bouquet de solutions pour remplacer à terme l’énergie fossile. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
4
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
Mme la présidente. Mes chers collègues, je suis particulièrement heureuse de saluer en votre nom la présence dans la tribune d’honneur d’une délégation parlementaire du Grand Khoural de Mongolie, conduite par le président du groupe d’amitié Mongolie-France, M. Chinburen Jigjidsuren. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité, se lèvent.)
La délégation est accompagnée par notre collègue Philippe Mouiller, qui préside le groupe d’amitié France-Mongolie.
Cette visite s’inscrit dans le prolongement du récent déplacement d’une délégation du groupe d’amitié en Mongolie, en septembre dernier, auquel j’ai eu l’honneur de participer.
Nous avions reçu un accueil chaleureux de M. Chinburen et du général Sergelen Tsedev, qui l’accompagne aujourd’hui.
Cette visite est l’occasion de renforcer encore nos liens, d’identifier de nouveaux champs de coopération interparlementaire. Elle permettra aussi de nouer des contacts économiques avec des entreprises françaises, en particulier dans les domaines de la sécurité civile et des transports.
Un déplacement axé sur la coopération médicale est prévu à Lyon et en Savoie, avec la visite du centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard.
Mes chers collègues, en votre nom à tous, permettez-moi de souhaiter à la délégation du Grand Khoural la plus cordiale bienvenue et un fructueux séjour.
Je me permets enfin de saluer la présence de l’ambassadrice de Mongolie en France, Mme Niamkhuu Ulambayar. (Applaudissements.)
5
Implantation de panneaux photovoltaïques sur des sites dégradés
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous reprenons les explications de vote sur la proposition de loi visant à permettre l’implantation de panneaux photovoltaïques sur des sites dégradés.
Vote sur l’ensemble (suite)
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Henri Cabanel. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si la loi Littoral du 3 janvier 1986, adoptée par le Parlement à l’unanimité, a fait l’objet de vifs débats par la suite, son bilan reste très positif. Plus de trente ans après son adoption, nous ne pouvons que constater ses bienfaits et son efficacité sur la protection des paysages et de la biodiversité. Elle a permis notamment de freiner la bétonisation des espaces proches du rivage et la dispersion des constructions dans les communes littorales. C’est la raison pour laquelle toute modification de ses équilibres doit être scrupuleusement pensée en amont.
L’application rigoureuse par la jurisprudence du principe selon lequel toute nouvelle construction doit être réalisée en continuité des agglomérations et des villages existants a conduit le législateur à accorder progressivement des concessions, au fur et à mesure que l’on s’apercevait que le foncier de certains territoires se trouvait entièrement gelé, entravant ainsi toute possibilité de développement.
Cela a justifié quelques entorses pour l’adapter aux réalités locales, notamment en ce qui concerne les installations de production d’énergies renouvelables, ces dernières nécessitant de la superficie.
Nous avions évoqué le sujet dans cet hémicycle en janvier dernier, lors de l’examen de la proposition de résolution tendant au développement de l’agrivoltaïsme. À mon sens, les centrales au sol ne devraient être autorisées qu’exceptionnellement. Les panneaux photovoltaïques peuvent en effet être installés sur les toits des bâtiments ou en ombrières pilotables avec faible emprise au sol. Ces superficies, en particulier celles qui pourraient se situer en zone agricole, doivent être mises à l’abri de la convoitise d’éventuels promoteurs ou porteurs de projets peu soucieux de la vocation naturelle agricole des sols.
Une position équilibrée, à la fois protectrice du littoral et des sols, ainsi que du droit pour tout territoire de participer à la transition énergétique doit être trouvée.
Ce texte se limite à reprendre une disposition de la loi Climat et résilience censurée par le Conseil constitutionnel en vertu de l’article 45 de la Constitution. Que des panneaux photovoltaïques puissent être installés sur des sites dégradés ne soulève pas de difficultés. Je pense d’ailleurs que cette notion était préférable à celle de friches, celles-ci n’étant pas toujours dégradées. J’estime pour ma part que les terres agricoles ne devraient en aucun cas être considérées comme des friches, la priorité devant être d’accueillir les installations de production d’énergies renouvelables dans les zones artificialisées.
Faut-il installer des centrales solaires à distance des agglomérations et des villages existants dans les communes littorales, comme le permettra la proposition de loi si elle est adoptée ? Rien n’est moins sûr, mais si cela peut accroître l’acceptabilité des projets photovoltaïques, soit !
Le recours à la procédure normale d’examen de la proposition de loi nous aurait permis d’avoir plus de recul. Dans le cadre de la procédure de législation en commission, nous sommes contraints d’accepter cette modification. Pourtant, rien ne servait de courir, alors qu’il est évident qu’à ce stade du calendrier parlementaire la proposition de loi ne sera pas inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale avant la suspension des travaux.
Nous nous contenterons donc des garde-fous qui ont été instaurés dès le départ et qui permettent de prévenir tout conflit d’usage : régime d’autorisation ; avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ; obligation de réaliser une étude d’incidence prouvant que la renaturalisation du site n’est pas plus pertinente que le projet proposé ; définition de la liste des friches envisagée après concertation avec le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres.
L’existence d’une nouvelle dérogation peut tout à fait s’entendre. Celle-ci apparaît cohérente dans la mesure où les éoliennes, dont l’impact paysager est plus important que les centrales photovoltaïques, et qui sont moins compatibles avec le voisinage des zones habitées, bénéficient d’ores et déjà d’une telle souplesse.
D’une manière générale, nous considérons comme vertueux le recours aux friches disponibles sur notre territoire pour tout projet d’intérêt général. Seuls 8 % des sites propices à l’accueil des centrales photovoltaïques, identifiés par l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) dans un rapport de 2019, se situeraient dans les communes littorales. Néanmoins, si cette mesure permet à certaines collectivités locales, comme L’Île-d’Yeu, de s’inscrire dans un projet de renforcement de leur autosuffisance en matière énergétique, nous ne pouvons que soutenir cette démarche.
Bien que ces dispositions, limitées à quelques zones identifiées, ne changent pas la donne quant à la diversification de notre mix énergétique, le groupe RDSE votera pour la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Bigot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Joël Bigot. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi Climat et résilience prévoyait le dispositif qui nous est aujourd’hui proposé, mais il a été censuré par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif.
Passé à peu près inaperçu lors de l’examen du texte, cet ex-article 102 visait à permettre l’implantation de centrales solaires sur des friches situées en milieu littoral, des sites impropres à l’activité agricole, comme d’anciennes carrières ou décharges. En d’autres termes, il s’agit aujourd’hui d’entériner une nouvelle dérogation à la grande loi Littoral en se saisissant d’un foncier dégradé pour développer l’énergie voltaïque, sur le modèle de ce qui existe pour l’éolien.
Sur le principe, nous partageons l’objectif de la proposition de loi, qui s’inscrit dans le principe de reconversion des friches, bien identifié par la commission d’enquête sur la pollution des sols, portée par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER).
Parallèlement, nous souhaitons demeurer vigilants quant à la préservation des espaces littoraux. C’est la raison pour laquelle je me félicite de l’adoption de notre amendement visant à ce que le Conservatoire du littoral prenne une part décisive dans l’élaboration du décret listant les zones pouvant être concernées par un futur réaménagement photovoltaïque. Cette concertation obligatoire me paraît être un garde-fou bien plus efficace que l’étude d’incidence, qui, réalisée par le maître d’ouvrage, n’aura que très peu d’objectivité.
En revanche, je ne peux que regretter le rejet de notre amendement visant à ce que la validation de l’implantation fasse intervenir la démocratie locale. Au regard de l’importance de l’implication des collectivités locales dans la transition écologique et énergétique, il me semble que la droite sénatoriale et le Gouvernement commettent ici une erreur d’appréciation. Même si l’accord du maire, via une autorisation d’urbanisme, reste nécessaire, il me semble qu’un vote des élus de la commune ou de l’EPCI concerné garantirait la transparence démocratique et favoriserait l’adhésion de la population au projet envisagé.
Nous souffrons suffisamment de ce manque d’acceptabilité sociale des éoliennes pour risquer des réticences inutiles, faute de contrôle démocratique.
À l’heure où la démocratie représentative pâtit d’une désaffection bien réelle, il m’apparaissait de bon droit d’impliquer en amont nos élus locaux dans ce type de décision, si importante pour notre avenir énergétique.
Cette nouvelle exception – si j’ose dire – déroge enfin au parallélisme des formes, puisque l’article L. 121-2 du code de l’urbanisme prévoit justement cette association des élus pour les éoliennes, celle-là même qui, dans le cas présent, fait défaut.
Ne l’oublions pas, mes chers collègues, certains projets de centrale solaire seront bien acceptés, tandis que d’autres feront débat. C’est inévitable et je regrette que vous n’ayez pas entendu raison sur ce point.
Nonobstant cette remarque de bon sens qui pourrait inspirer nos futurs députés, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera ce texte, car il adapte notre droit pour répondre à des attentes dans bon nombre de territoires, notamment insulaires, comme l’a souligné notre collègue Didier Mandelli.
La jurisprudence administrative est constante sur ce sujet et interprète strictement la notion de continuité d’une agglomération ou d’un village existant. Plusieurs autorisations de construire ont ainsi été annulées pour ce motif. Cette dérogation permettra donc d’éviter ce genre d’écueil auquel sont confrontés les élus et que j’ai bien connu à l’époque où j’étais maire des Ponts-de-Cé. J’ai en effet moi-même fait construire sur une ancienne décharge une centrale solaire, qui est la plus grande unité photovoltaïque de la région des Pays de la Loire : elle produit aujourd’hui 11 000 mégawatts par an, soit la consommation électrique de 4 000 foyers. Six ans, il aura fallu six ans pour obtenir les autorisations nécessaires de la CRE, alors que le site n’était même pas situé sur un littoral !
La France est en retard sur les énergies renouvelables et il s’agirait pour le Gouvernement de regarder en face ce triste bilan plutôt que de se gargariser d’une inaction climatique maintes fois dénoncée dans cette enceinte.
Nous ne disposons malheureusement pas d’étude d’impact ad hoc pour ce texte. Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer le nombre exact de sites potentiellement retenus ? Vous avez avancé celui de 874, alors que je pensais que cela concernerait une vingtaine de sites. Par ailleurs, pouvez-vous nous préciser leur localisation : Atlantique, Méditerranée, Manche ? Les élus ont besoin de ces informations.
En conclusion, ce texte représente l’un des leviers utiles que nous pouvons actionner pour intensifier la production électrique d’origine solaire dont notre pays a besoin. Ne boudons pas notre unanimisme pour adopter cette proposition de loi, même si, je le répète, la voix de la démocratie représentative doit figurer dans cette nouvelle dérogation à la loi Littoral pour emmener le plus grand nombre dans la transition écologique. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)