M. Pascal Savoldelli. Cet amendement de repli vise à appliquer aux transports publics urbains le taux de TVA applicable aux produits de première nécessité.
Je peux évoquer les couloirs du métro parisien, par lesquels transitent près de 4 millions de voyageurs, mais aussi la Régie des transports métropolitains (RTM) de Marseille, dont le réseau accueille chaque jour 421 000 usagers, ou le tramway de Bordeaux, emprunté quotidiennement par 530 000 personnes.
Le transport collectif urbain ne concerne donc pas seulement les 44 % de Franciliens qui y ont recours pour aller travailler. Et le dynamisme de ce mode de transport n’est pas contestable : entre 2005 et 2019, le nombre de voyageurs-kilomètres a augmenté de 27 % en Île-de-France et de plus de 53 % ailleurs sur le territoire national. L’évolution de ces usages devrait donc nous inciter à revenir sur le taux de 5,5 %, qui a d’ailleurs été en vigueur en 2012, avant de subir malheureusement plusieurs augmentations depuis lors.
Déjà, lors des états généraux de la mobilité durable, qu’avait organisés la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), cette proposition d’une TVA à 5,5 % avait été appuyée.
Puisqu’on compare souvent avec ce qui se fait dans les autres pays d’Europe, j’avance un autre argument : beaucoup d’entre eux imposent faiblement leurs transports publics urbains.
Il s’agit d’une demande à la fois de justice sociale – faire baisser les prix pour les usagers des transports –, et en faveur de la décarbonation, alors que vient de prendre fin la COP27.
M. le président. L’amendement n° I-959 rectifié bis, présenté par M. Capo-Canellas, Mme Vermeillet, M. Henno, Mme Létard, MM. Longeot et Lafon, Mmes Billon, Gacquerre et Saint-Pé, M. Levi, Mmes Sollogoub, Gatel et Morin-Desailly, M. Prince, Mme Dindar, MM. Cadic et Laugier, Mme de La Provôté, M. Kern, Mme Devésa, M. Burgoa, Mme Joseph et MM. Janssens, Le Nay, Bonneau et P. Martin, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le B du I de la section V du chapitre premier du titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278-0 bis est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ?. ? Les services organisés par une autorité organisatrice mentionnée aux articles L. 1231-1 et L. 1231-3 du code des transports ou par Ile-de-France Mobilités, ainsi que toute entreprise qui propose des services ferroviaires » ;
2° Le b quater de l’article 279 est complété par les mots : « à l’exclusion de ceux qui relèvent du taux prévu à l’article 278-0 bis ».
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. L’objet de cet amendement est très proche de celui que vient de défendre excellemment notre collègue Philippe Tabarot, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Néanmoins, j’y ajouterai quelques points.
Nous proposons d’appliquer un taux réduit de TVA aux services organisés par une AOM, par Île-de-France Mobilités, ainsi que par toute entreprise proposant des services ferroviaires.
Certes, cela peut ressembler à un serpent de mer. Toujours est-il que la situation des transports, dans un certain nombre de métropoles et pour beaucoup d’AOM, est très tendue, en particulier depuis la crise covid. Si l’on y ajoute le manque de personnels, les difficultés de recrutement de chauffeurs ou de conducteurs, l’usager se voit proposer une offre dégradée.
Par ailleurs, les investissements seront longs à porter leurs fruits, d’autant que l’on ne sait pas comment ils seront financés dans leur globalité.
Enfin, les prix de l’énergie ont augmenté.
Il y a donc un sujet de financement de l’investissement, et un sujet de financement du fonctionnement. On va dans le mur, et en klaxonnant !
Pour éviter d’avoir à choisir entre une baisse de l’offre, une moindre qualité de service, une augmentation des prix et une réduction de l’investissement, il faut pouvoir disposer d’une palette de solutions. C’est ce que nous proposons.
Nous savons que le Gouvernement y réfléchit. De son côté, la présidente de la région d’Île-de-France a plaidé, avec force et talent, parce que, pour 10 millions de Franciliens, les transports, c’est un vrai sujet : moins d’offre, une galère quotidienne, et des prix en passe d’augmenter.
La solution que nous proposons n’est pas exclusive d’autres. L’ancien député Gilles Carrez a récemment commis un rapport sur ces questions, qu’il connaît très bien. Ce que nous disons donc au Gouvernement, c’est qu’il faut actionner plusieurs leviers, sans écarter une baisse de la TVA.
4
Salutations à des maires polynésiens en tribune
M. le président. Mes chers collègues, je voudrais saluer, en votre nom à tous, une délégation de maires de Polynésie, invités par nos collègues sénateurs de Polynésie, qui viennent à Paris pour le congrès des maires. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
5
Loi de finances pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Après l’article 5 (suite)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ce débat est désormais traditionnel, et je ne surprendrai personne en disant que nous sommes face à deux objectifs quelque peu contradictoires.
Premier objectif : favoriser, du moins essayer, par le biais de la fiscalité, les déplacements en transports publics, tous modes confondus, en améliorant l’offre de transport, de préférence décarbonée ; les auteurs de certains amendements entendent également favoriser l’autobus. On a envie de suivre !
Se pose la question de la conformité de tels taux réduits de TVA avec le droit européen. Selon le périmètre retenu, certains amendements n’y contreviennent pas, j’en conviens.
Autre question : combien ça coûte ? Selon les propositions, la fourchette varie grosso modo entre environ 300 millions d’euros, pour le moins onéreux, et 1,5 milliard d’euros.
Second objectif : faire baisser le prix des transports. À cet égard, une baisse de la TVA serait-elle nécessairement répercutée sur le prix du billet ? Certains, ici, se sont interrogés. Commençons par le train : une baisse de la TVA annulerait la hausse des prix décidée par la SNCF, par exemple sur les billets de TGV. Est-ce vraiment cohérent ? De mon point de vue, il conviendrait peut-être de réunir une conférence nationale du transport public pour tout mettre sur la table et accorder, dans nos territoires, l’offre des grands opérateurs et celle des AOM.
Ainsi, il arrive parfois que les transports publics urbains soient gratuits. De fait, certains d’entre vous demandent donc qu’ils coûtent moins cher là où ils sont parfois gratuits ! Or, même quand c’est gratuit, c’est le contribuable qui paye. Mon sentiment est que le contribuable, à qui l’on n’a pas demandé son avis et qui paye pour un service qu’il utilise ou non – c’est le principe d’un service public –, se fait un peu rouler dans la farine ! Quand même, le jeu de la fiscalité me paraît complètement dévoyé.
Au-delà de ces propositions, nous devons avoir une question en tête. Comment améliorer l’offre de transport ?
Déjà, les entreprises participent, dans certains territoires, au financement des transports et des services de mobilité via le versement mobilité ; le cas de la région parisienne, sur lequel nous reviendrons plus tard, doit être traité à part. Or, dans certains cas, quand une entreprise est implantée en périphérie d’agglomération, celle-ci paye pour cette offre de transport, alors même que ses salariés n’utilisent pas, ou très peu les transports publics. On marche sur la tête ! Je le répète, il faut remettre à plat le système au lieu de recourir à ces baisses ciblées de TVA, qui, pour certaines, sont contraires aux règles communautaires.
Avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Le rapporteur général l’a indiqué : ces amendements coûtent beaucoup d’argent, entre 200 millions d’euros et 1,5 milliard d’euros, même si je salue les efforts faits par certains d’entre vous pour en minorer le coût en circonscrivant leur champ d’application.
Précisément, à force, certains amendements ne sont plus conformes au droit européen. Vous le savez, la directive TVA encadre très strictement les conditions dans lesquelles des taux réduits peuvent être adoptés, précisant notamment qu’ils doivent reposer sur des éléments concrets et spécifiques – là, on peut considérer que c’est le cas – et qu’il n’est pas possible de fonder une différence de taux de TVA sur un aspect tenant à la qualité du vendeur ou de l’acheteur ou à des modalités de commercialisation. L’un des amendements tend à appliquer le taux réduit de TVA aux services de transport ayant conventionné avec les pouvoirs publics. C’est malheureusement impossible au regard des règles communautaires.
En réalité, si l’on décide de s’engager dans la voie d’une baisse de la TVA sur les transports, il faudra rapidement adopter des mesures d’ordre général, très coûteuses, en particulier parce que nous serons obligés, pour ne pas fausser la concurrence, d’appliquer le même taux aux autres services de transport dont l’offre est comparable, même si elle diffère dans ses modalités.
C’est la raison pour laquelle il n’a jamais été décidé, jusqu’à présent, d’appliquer ce taux réduit.
Il faut s’interroger sur l’objectif : améliorer le pouvoir d’achat des Français en les incitant à prendre le train ou le métro plutôt qu’un autre mode de transport ou bien soutenir les AOM ?
Si l’objectif visé est le premier, je ne suis pas sûr que l’application d’un taux réduit de TVA permette de l’atteindre. À supposer – ce qui n’est pas certain, puisque c’est à l’AOM de le décider – qu’elle soit intégralement répercutée sur le prix du billet, celui-ci ne baissera que de 4,1 %, toutes taxes comprises. Vous en conviendrez, le signal prix est faible, d’autant que, généralement, la moitié de l’abonnement est prise en charge par l’employeur. Faut-il alors priver l’État de plusieurs centaines de millions d’euros, voire de 1 milliard d’euros, pour un résultat aussi incertain ?
Si l’objectif est de soutenir les autorités organisatrices, ce débat trouvera davantage sa place lors de l’examen des crédits du programme « Infrastructures et services de transports ». Dans le cadre du plan de relance, 10 milliards d’euros d’investissements dans les transports sont prévus. De fait, il faut aller plus loin, et nous attendons, pour les prochaines semaines, un rapport important du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) qui permettra de nous éclairer.
À tout le moins, j’imagine que l’examen de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », qui traduit notre engagement très fort, donnera lieu à des débats utiles à cet égard.
Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Le sujet me passionne, comme il passionne aussi beaucoup d’entre vous, dont nos collègues de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, notamment Philippe Tabarot, qui a déposé un amendement intéressant.
Tous ici, nous sommes des défenseurs des transports publics, en particulier ferroviaires, mais également urbains et interurbains. En région parisienne, où Île-de-France Mobilités est l’autorité organisatrice, beaucoup de monde fréquente les transports en commun. Les TGV, dont la fréquentation est élevée, ne sont pas dans le champ des amendements.
Certains de nos concitoyens, adeptes de la voiture, n’empruntent jamais les transports collectifs. Pour bien d’autres, c’est une question importante. Certaines régions ont pris des initiatives intéressantes pour favoriser l’offre de transport en TER : abonnements, trajets à 1 euro certains jours. On peut citer l’exemple des régions Grand Est ou Occitanie.
Au final, je me range à l’avis du rapporteur général et du ministre. On ne peut pas se soustraire aux règles européennes.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. J’écoute avec un certain intérêt ce débat. À Montpellier, d’où je viens, tout est gratuit ! De fait, on ne peut même plus baisser la TVA ! (Sourires.)
Comme le rapporteur général, et comme le ministre, je crois effectivement qu’il va falloir mettre un peu d’ordre dans la boutique ! La gratuité des transports, dont le tramway, dans le périmètre de la métropole de Montpellier coûte des dizaines de millions d’euros chaque année. Sont-ce uniquement les contribuables des communes desservies qui payent ? Ces efforts financiers, que je soutiens, ne contribuent-ils pas à réduire les aides aux autres collectivités ?
Ce débat nous renvoie directement au fonctionnement des intercommunalités et, plus encore, à celui des métropoles.
M. le président. La parole est à M. Philippe Tabarot, pour explication de vote.
M. Philippe Tabarot. Je souhaite préciser quelques points s’agissant de mon amendement, à la suite des propos de M. le rapporteur général et de M. le ministre.
Pour évaluer le coût de la mesure que nous proposons, nous nous sommes référés – je l’ai indiqué – aux travaux de Philippe Duron, qui est particulièrement compétent sur ces questions. Monsieur le rapporteur général, quand vous me parlez d’un coût de 1,5 milliard d’euros, malgré toute l’amitié que je vous porte, je n’y crois pas un instant !
Par ailleurs, nous avons prévu de limiter cette mesure dans le temps, à savoir deux années. L’urgence, pour les transports publics, c’est maintenant, à l’heure où l’on parle, au moment où toutes les AOM menacent de réduire l’offre, non pas parce qu’elles en ont la volonté, mais tout simplement parce qu’elles n’ont plus les moyens de passer commande d’autobus, de tramways, de trains, etc.
Monsieur le rapporteur général, vous avez évoqué le TGV, qui – je le précise – n’entre pas dans le champ de mon amendement, puisque celui-ci ne porte que sur les « services de transport collectif de voyageurs ferroviaires, guidés et routiers, à l’exception des services librement organisés ».
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. Je veux de nouveau insister sur un point : ces amendements, notamment celui qu’a présenté M. Tabarot, sous-tendent bien que les transports collectifs doivent être considérés comme des biens de première nécessité.
L’objectif est de réorienter nos concitoyens vers le transport collectif, de préférence au transport individuel. Cela aura des effets particulièrement significatifs sur le plan climatique.
Enfin, puisqu’il est question de mettre de l’ordre, encore faut-il savoir où l’on va. À l’heure actuelle, toutes les AOM connaissent des difficultés. Faute de mise en place d’une sorte de conférence des financeurs pour trouver les moyens de stabiliser véritablement le système, celui-ci risque de devenir de plus en plus incohérent, ce qui contrarierait l’objectif que nous sommes fixé, c’est-à-dire l’action en faveur du climat et le transfert modal.
Une question revient régulièrement. Comment se répartirait une éventuelle baisse de la TVA ? Politiquement, il faut défendre le fait qu’elle profiterait aux usagers, mais également aux AOM. Nous entrerions dans un cercle vertueux.
Face aux difficultés actuelles et à l’urgence de la situation, il faut trancher.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. M. le ministre nous a dit que l’application d’un taux réduit de TVA serait une mesure extrêmement coûteuse. Nous en avons tous conscience. Mais les déficits sont, eux aussi, coûteux, et l’impasse financière dans laquelle se trouvent un certain nombre d’AOM doit nous interpeller. Elle aura, elle aussi, un coût visible par les voyageurs. Ces derniers comprennent encore moins, par les temps qui courent, qu’on les incite plus à emprunter les transports publics. Tout cela doit donc être mis en balance.
En Île-de-France, en particulier, il faudra doubler le montant des investissements. Pour ce faire, il faudra trouver des solutions.
Vous avez raison de dire votre préférence pour une mesure de portée générale. Mon amendement répond à cette préoccupation, me semble-t-il.
Une augmentation des prix serait incompatible avec une baisse de la TVA ? Pourtant, il faudra faire les deux, les AOM étant bien contraintes d’augmenter les tarifs. Car l’objectif est aussi de leur permettre de se « refaire » financièrement pour faire face aux besoins du quotidien et pour investir.
Monsieur le rapporteur général, nous sommes d’accord sur la nécessité de remettre à plat le système. Mais, dans l’immédiat, pouvons-nous continuer à attendre, faute d’annonces claires ? Puisque nous avons encore quelques jours devant nous, en attendant, en particulier, d’aborder le versement mobilité, le Gouvernement pourrait annoncer qu’il engage un processus visant à sécuriser un certain nombre d’AOM. En tant que Francilien, je suis plutôt attentif à ce que dit la présidente de la région d’Île-de-France, qui a plaidé son dossier. Nous sommes nombreux, au sein de la représentation nationale, à attendre une réponse très claire.
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Oui, monsieur le rapporteur général : c’est là un débat traditionnel, que nous avons déjà eu dans le passé, notamment au moment de l’examen de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience. Veillons cette fois-ci à ce qu’il ne connaisse pas le sort qui lui est habituellement réservé, d’autant qu’il prend – cela a été dit – une acuité particulière dans la crise actuelle. Actionner à la baisse le levier TVA serait adapté à cette crise, en tant que mesure à la fois de soutien aux AOM et de pouvoir d’achat.
Le ministre nous dit que le prix de billets ne baisserait alors que de peu. Mais si, au moins, la hausse prévue s’en trouve absorbée, cela éviterait l’envoi d’un signal désastreux.
J’entends l’argument selon lequel il vaudrait mieux travailler à une remise à plat cohérente du système. Mais, pour l’enclencher, votons cette mesure, qui représente un signe fort.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. J’interviens à ce moment du débat en tant que rapporteur spécial des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et en soutien aux arguments invoqués à la fois par le rapporteur général et par le ministre.
Les problématiques globales auxquelles nous devons faire face sur la question des transports et des AOM, et qu’a rappelées notamment Philippe Tabarot, dépassent largement le débat sur la TVA. Sa baisse, même si, à titre personnel, je n’y crois pas, pourrait être une partie de la réponse, mais une partie seulement. Il convient donc d’envisager les choses plus globalement. Les tensions croissantes sur l’offre de transport nécessitent d’abord et avant tout un renforcement du service et des investissements dans les infrastructures.
D’autant plus, comme l’ont rappelé certains collègues, que la part du prix du billet déjà prise en charge par la puissance publique et par les AOM est de l’ordre de 75 % à 100 %. Par conséquent, une baisse de la TVA aurait un effet limité sur le pouvoir d’achat.
Si l’on veut vraiment apporter une réponse forte en matière de système ferroviaire à la fois aux opérateurs, aux AOM et aux usagers en termes d’offre et de pouvoir d’achat, il faut faire en sorte de réduire le coût des péages. En France, ils sont à peu près deux fois plus élevés que ce qu’ils sont, en moyenne, dans les autres pays européens.
M. Hervé Gillé. Comment faire ?
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Je voterai l’amendement qu’a défendu Philippe Tabarot au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Il y a eu un travail important.
Chaque fois, le reproche nous a été adressé de ne pas chiffrer le coût budgétaire de la mesure. Le rapport Duron l’estime à 280 millions d’euros. On nous a parlé de 1,5 milliard d’euros, soit cinq fois et demie plus. Pour ma part, je donne crédit à Philippe Duron.
Que veut-on ? Veut-on réellement inciter nos concitoyens et nos administrés à prendre les transports en commun ? Si oui, il faudra, à un moment donné, les accompagner.
Pour ce faire, cet amendement est important. Quand on a mis en place les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), la proposition d’accompagner celles et ceux qui seraient contraints de devoir changer de véhicule, sans en avoir les moyens n’avait pas été retenue. Et maintenant, on se dit que, finalement, ce serait bien de les aider ! Il n’est pas possible d’aller ainsi une fois en avant et une fois en arrière. Agissons !
Enfin, cet amendement fixe une échéance, non pas à vingt ans, à trente ans ou à quarante ans, mais à deux ans, à compter du 1er janvier 2023. Votons-le, car il permettra à nos concitoyens de mieux utiliser les transports en commun.
M. le président. La parole est à M. Bruno Belin, pour explication de vote.
M. Bruno Belin. Je n’interviens pas sur la question, technique, de la TVA. Puisque les spécialistes du chemin de fer se sont exprimés, je voudrais parler de l’aviation civile.
J’ai entendu qu’il fallait « dézinguer » l’avion ; j’ai même noté un projet d’augmenter la taxe sur le fret aérien. Ce serait une véritable erreur ! L’aviation civile est utile : on le voit quand il s’agit d’organiser des opérations de rapatriement de nos concitoyens. Elle représente des dizaines, voire des centaines de milliers d’emplois. C’est une filière d’excellence française depuis des années. Nous avons besoin des aéroports régionaux, qui sont autant de plateformes d’aménagement du territoire. Et je pourrais aussi parler des efforts réalisés pour développer un carburant durable.
Arrêtons de « dézinguer » l’aviation civile. Nous avons besoin de tous les modes de transport pour faire avancer ce pays. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Je ne répondrai pas sur l’avion ; nous y reviendrons tout à l’heure.
Je voterai l’amendement de M. Tabarot. Ici, nous avons tous le même objectif. Tout à l’heure, le ministre nous parlait de signal. Mais, en Île-de-France, sujet que je connais assez bien, il ne s’agit pas de baisser les prix des billets : il s’agit d’éviter leur hausse dramatique dans une période où l’offre de transport se dégrade, pour des raisons diverses.
Si le prix du passe Navigo devait augmenter de vingt euros ou de vingt-cinq euros, alors que l’offre de transport se dégrade, quel signal enverrions-nous ! Il faut donc soutenir les AOM.
Nous avons voté, je le rappelle, une prolongation du bouclier énergétique pour les automobilistes qui va coûter 550 millions d’euros à l’État. Et on échoue à trouver les mêmes montants pour permettre à des millions de personnes d’utiliser les transports du quotidien ? Voilà qui est assez incompréhensible… Si l’on est capable de trouver de tels crédits pour l’usage de véhicules personnels, il faut faire de même pour les transports collectifs. Il importe en effet d’encourager nos concitoyens à recourir à ce mode de déplacement bien plus vertueux ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je salue la prise de parole de M. Belin et m’inscris dans le droit fil de ses propos.
J’aimerais que, dans le débat public sur l’avion, on se garde de chercher à faire de notre pays le premier qui interdirait ou surtaxerait certains modes de transport aérien. Je souhaite au contraire que la France soit le pays capable d’inventer l’avion bas-carbone (Exclamations sur les travées du groupe GEST.), qui figure parmi les objectifs du plan France 2030.
M. Daniel Salmon. Dans quarante ans, peut-être !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Dois-je vous rappeler que voilà quelques mois Airbus a fait voler pendant quatre heures un A380 propulsé intégralement aux biocarburants ? C’est bien la preuve que c’est possible !
Il existe certes, s’agissant des biocarburants, des enjeux de filière et des enjeux de coûts, mais je préfère miser sur le progrès et l’innovation plutôt que de dire qu’il faut arrêter de prendre l’avion, qu’il faut que l’avion disparaisse ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Je suis toujours un peu désespéré par le signal de culpabilisation qui est envoyé aux jeunes générations.
M. Thomas Dossus. Écoutez-les !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Ce sont les jeunes générations qui inventeront l’avion bas-carbone. Loin d’elles l’idée de dire que l’avion c’est du passé et d’y renoncer !
M. Max Brisson. Très bien !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. M. Breuiller nous reproche de ne prendre aucune mesure pour les autorités organisatrices de transports alors que nous agissons pour protéger les automobilistes contre la hausse des dépenses d’énergie. Je ne suis pas du tout d’accord avec lui : les régies de transport bénéficieront également de l’amortisseur de 10 milliards d’euros sur les prix de l’énergie que nous mettons en place. Elles seront donc totalement accompagnées si le prix de l’électricité augmente : le Gouvernement aide tout le monde.
Nous considérons simplement que, pour rendre avantageuse l’utilisation des transports en commun du point de vue du pouvoir d’achat, la baisse de la TVA n’est pas la mesure la plus efficace, pour les raisons que j’ai évoquées, de même que pour soutenir les autorités organisatrices la baisse de TVA n’est pas la mesure la plus efficace. (M. Gérard Longuet applaudit.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie et M. Hervé Gillé. Dites-nous donc ce qui est le plus efficace !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-948.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et SER.)