Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Une telle clarification nous semble bienvenue. Les assistants spécialisés ont un rôle d’assistance et de conseil à l’égard des procureurs de la République, et la levée du secret professionnel à leur égard permettra de faciliter le traitement des dossiers complexes de fraude fiscale.
Évidemment, eu égard à la sensibilité des informations communiquées, la levée du secret ne pourra intervenir que sur autorisation du procureur.
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 ter.
L’amendement n° I-1715 rectifié, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 10 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa du I de l’article 28-2 du code de procédure pénale est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Ces agents ont compétence pour rechercher et constater, sur l’ensemble du territoire national :
« 1° Les infractions prévues par les articles 1741 et 1743 du code général des impôts et le blanchiment de ces infractions lorsqu’il existe des présomptions caractérisées que les infractions prévues par ces articles résultent d’un des cas prévus aux 1° à 5° du II de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales, ainsi que les infractions qui leur sont connexes ;
« 2° Les infractions prévues par les articles 313-1 à 313-3 du code pénal lorsqu’elles concernent la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que les infractions qui leur sont connexes. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Toujours dans le droit fil du rapport de la commission, le présent amendement vise à étendre le champ de compétences des officiers fiscaux judiciaires du service d’enquête judiciaire des finances (SEJF).
Lors de leurs travaux, les membres de la mission d’information ont entendu nombre d’avis positifs sur l’efficacité du SEJF dans les dossiers de fraude fiscale, dissipant les craintes de « guerre des services » qui avaient été soulevées par la commission des finances lors de la création de ce service. Ils ont aussi pu constater le manque de moyens du SEJF.
La commission des finances proposera donc, par un amendement qui sera examiné dans quelques instants, de renforcer de quarante le nombre d’officiers fiscaux judiciaires sur cinq ans, par redéploiement de crédits.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 ter.
Article 10 quater (nouveau)
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le second alinéa du VIII des articles 231 ter et 1599 quater C est supprimé ;
2° Le 2 de l’article 1920 est abrogé. – (Adopté.)
Article 10 quinquies (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 5 du III de l’article 256 C, la date : « 31 janvier » est remplacée par la date : « 10 janvier » ;
2° L’article 277 A est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa du 1° du III, les mots : « être autorisés, sur leur demande, à » sont supprimés ;
b) Le V est ainsi modifié :
– l’avant-dernier alinéa est supprimé ;
– après la référence : « 2° », la fin du dernier alinéa est supprimée ;
3° Le II de l’article 286 ter A est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Des importations de biens ne donnant lieu à aucun paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, déterminées par décret. » ;
4° Le A du IV de l’article 289 B est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« IV. – A. – Les états récapitulatifs mentionnés aux II et III du présent article sont transmis par voie électronique. » ;
b) Au second alinéa, la référence : « II » est remplacée par la référence : « III ».
II. – Le 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2024.
Mme le président. L’amendement n° I-219 rectifié bis, présenté par Mmes Estrosi Sassone et L. Darcos, MM. Burgoa, D. Laurent, Frassa, Bacci et Bonnus, Mme Demas, MM. Mouiller, Cambon, Daubresse, Longuet, Tabarot, Savin et J.P. Vogel, Mme Dumont, M. Calvet, Mmes M. Mercier, Canayer et Lassarade, M. Chatillon, Mmes Bellurot, Chauvin, Malet, Puissat, Goy-Chavent, Drexler, Belrhiti et Di Folco, MM. Gremillet et Belin, Mme Imbert, MM. Rapin, B. Fournier, Cadec, Charon et Pellevat, Mmes Dumas et Berthet, M. Klinger, Mme Renaud-Garabedian, MM. Bansard, Le Gleut et Genet, Mmes Schalck et Deroche, M. Mandelli et Mme Raimond-Pavero, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le deuxième alinéa de l’article 1594 F quinquies est complété par les mots : « , ou lorsqu’elles interviennent entre deux membres d’un même assujetti unique au sens de l’article 256 C, ou lorsqu’elles bénéficient de la dispense de TVA prévue à l’article 257 bis »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. Il est défendu, madame la présidente.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je sollicite l’avis du Gouvernement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Même avis défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-219 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 10 quinquies.
(L’article 10 quinquies est adopté.)
Article 10 sexies (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le A quater du I de la section VII du chapitre Ier du titre II de la première partie du livre Ier est complété par un article 286 sexies ainsi rédigé :
« Art. 286 sexies. – I. – A. – Les prestataires de services de paiement mentionnés au I de l’article L. 521-1 du code monétaire et financier, à l’exception des prestataires de services d’information sur les comptes, et les offices de chèques postaux tiennent un registre détaillé des bénéficiaires et des paiements correspondant aux services de paiement définis aux 3° à 6° du II de l’article L. 314-1 du même code qu’ils fournissent.
« Ce registre est tenu sous format électronique et conservé pendant une période de trois années civiles à compter de la fin de l’année civile de la date de paiement.
« Sont soumis à l’obligation prévue au premier alinéa du présent A les prestataires de paiement :
« 1° Dont le siège social est situé en France ou qui, n’ayant pas de siège social conformément à leur droit national, y ont leur administration centrale ;
« 2° Ou qui ont en France un agent, y détiennent une succursale ou y fournissent des services de paiement.
« Les prestataires de services de paiement sont soumis à l’obligation prévue au même premier alinéa lorsque, au cours d’un trimestre civil, ils fournissent des services de paiement correspondant à plus de vingt-cinq paiements transfrontaliers destinés au même bénéficiaire.
« Pour les besoins de l’avant-dernier alinéa du présent A, le nombre de paiements transfrontaliers est calculé sur la base des services de paiement fournis par le prestataire de services de paiement par État membre de l’Union européenne et par identifiant mentionné aux 5° et 6° du B du présent I. Lorsque le prestataire de services de paiement dispose d’informations indiquant que le bénéficiaire dispose de plusieurs identifiants, le calcul est effectué par bénéficiaire. Ce calcul inclut également les paiements pour lesquels le prestataire de services de paiement a été dispensé de tenir un registre en application du II.
« B. – Pour l’application du présent article :
« 1° Constitue un paiement l’opération définie au I de l’article L. 133-3 du code monétaire et financier.
« Constitue également un paiement la transmission de fonds, définie comme le service pour lequel les fonds sont reçus de la part d’un payeur, sans création d’un compte de paiement au sens du I de l’article L. 314-1 du même code au nom du payeur ou du bénéficiaire, à la seule fin de transférer un montant correspondant vers un bénéficiaire ou un autre prestataire de services de paiement agissant pour le compte du bénéficiaire, et pour lequel ou pour lequel de tels fonds sont reçus pour le compte du bénéficiaire et mis à la disposition de celui-ci ;
« 2° Constitue un paiement transfrontalier un paiement pour lequel le payeur se trouve dans un État membre de l’Union européenne et le bénéficiaire se situe dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un État ou territoire tiers ;
« 3° Un payeur est une personne physique ou morale, titulaire d’un compte de paiement, qui autorise un ordre de paiement à partir de ce compte ou, en l’absence de compte de paiement, la personne physique ou morale donnant un ordre de paiement ;
« 4° Un bénéficiaire est une personne physique ou morale qui est le destinataire prévu de fonds ayant fait l’objet d’une opération de paiement ;
« 5° Le payeur est réputé se trouver dans l’État membre de l’Union européenne correspondant :
« a) Au numéro de compte bancaire international de son compte de paiement ou à tout autre identifiant qui l’identifie et donne le lieu où il se trouve ;
« b) À défaut de tels identifiants, au code d’identification des banques ou à tout autre code d’identification d’entreprise qui identifie le prestataire de services de paiement agissant en son nom et donne le lieu où il se trouve ;
« 6° Le bénéficiaire est réputé se trouver dans l’État membre de l’Union européenne, l’État ou le territoire tiers correspondant :
« a) Au numéro de compte bancaire international de son compte de paiement ou à tout autre identifiant qui l’identifie et donne le lieu où il se trouve ;
« b) À défaut de tels identifiants, au code d’identification des banques ou à tout autre code d’identification d’entreprise qui identifie son prestataire de services de paiement et donne le lieu où il se trouve ;
« 7° Les références aux territoires des États membres de l’Union européenne s’entendent, s’agissant de la France, du territoire métropolitain, de La Réunion et du territoire de la Guadeloupe et de la Martinique.
« II. – Lorsque, pour un paiement donné, au moins l’un des prestataires de services de paiement du bénéficiaire ayant fourni le service de paiement se trouve dans un État membre de l’Union européenne, l’obligation mentionnée au A du I ne s’applique pas au prestataire de services de paiement du payeur.
« Pour les besoins du premier alinéa du présent II, le prestataire de services de paiement du bénéficiaire est réputé se trouver dans l’État ou le territoire déterminé par son code d’identification des banques ou par tout autre code d’identification d’entreprise qui identifie sans équivoque le prestataire de services de paiement et le lieu où il se situe.
« Pour savoir s’il tient un registre des paiements transfrontaliers à destination des États et territoires tiers, le prestataire de services de paiement du payeur inclut dans le calcul du seuil des vingt-cinq paiements transfrontaliers chacun de ces paiements destinés au même bénéficiaire.
« III. – Les prestataires de services de paiement soumis à l’obligation prévue au I transmettent à l’administration, au plus tard à la fin du mois suivant le trimestre civil auquel les données de paiement se rapportent, les informations figurant au registre mentionné au même I.
« IV. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret. » ;
2° L’article 1736 est complété par un XI ainsi rédigé :
« XI. – Le défaut de transmission dans les délais prescrits des informations mentionnés au III de l’article 286 sexies ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans le registre prévu au A du I du même article 286 sexies entraînent l’application d’une amende de 15 euros par paiement non déclaré ou déclaré tardivement ou par inexactitude, dans la limite de 500 000 euros par prestataire de services de paiement et par trimestre civil auquel l’information se rattache. L’amende n’est pas applicable en cas de première infraction commise au cours de l’année civile en cours et des trois années précédentes, lorsque les intéressés ont réparé leur omission soit spontanément, soit à la première demande de l’administration avant la fin de la période de transmission des registres. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2024. Il s’applique aux paiements réalisés à compter de cette date.
Mme le président. L’amendement n° I-129, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 26
Après le mot :
administration
insérer le mot :
fiscale
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. L’amendement n° I-130, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Rédiger ainsi cet alinéa :
« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Ce décret détermine notamment les informations qui doivent figurer sur le registre détaillé des bénéficiaires et des paiements ainsi que leurs modalités de transmission à l’administration fiscale. » ;
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le présent amendement vise à renvoyer les modalités d’application du dispositif prévu à l’article 10 sexies à un décret en Conseil d’État, ce qui permettrait de recueillir sur ce sujet l’avis des meilleurs spécialistes du droit.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 10 sexies, modifié.
(L’article 10 sexies est adopté.)
Article 10 septies (nouveau)
Au V de l’article 1737 du code général des impôts, le mot : « aux » est remplacé par les mots : « au 3 du I et aux II, ».
Mme le président. L’amendement n° I-131, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous proposons de supprimer l’article 10 septies, dont les dispositions ont été reprises à l’identique, par voie d’amendement, à l’article 5 sexies.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. En conséquence, l’article 10 septies est supprimé.
Article 10 octies (nouveau)
I. – L’article L. 10 BA du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Le IV est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° L’obligation de représentation par un assujetti établi en France accrédité auprès des services des impôts, en application des I ou II de l’article 289 A du code général des impôts, a cessé d’être respectée. » ;
2° Sont ajoutés des V à VII ainsi rédigés :
« V. – Lorsqu’il existe des indices concordants indiquant que ce numéro est utilisé par un opérateur identifié qui savait ou ne pouvait ignorer être impliqué dans une fraude visant à ne pas reverser la taxe due en France ou dans l’Union européenne, il peut être invalidé dans la base de données des assujettis établis dans les États membres par l’administration :
« 1° Si aucune réponse n’est apportée, dans un délai de trente jours, à la demande de régularisation :
« a) D’une défaillance déclarative en matière de taxe sur la valeur ajoutée à l’échéance de l’obligation, nonobstant la réalisation d’acquisitions intracommunautaires ou d’importations ;
« b) Ou du défaut de dépôt de l’état récapitulatif des clients relatif à des livraisons intracommunautaires dans les conditions prévues à l’article 289 B du code général des impôts ;
« 2° Au terme d’un délai de quinze jours à compter de la notification des manquements constatés, lorsqu’il est établi que l’opérateur identifié a porté de façon répétée des informations inexactes dans l’état récapitulatif des clients mentionné au b du 1° du présent V, dans les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ou dans tout document commercial et qu’il en est résulté une minoration de la taxe due à raison de ces opérations ou des opérations de revente subséquentes, nonobstant la réalisation d’importations, d’acquisitions ou de livraisons intracommunautaires.
« En cas de signalement au sein du réseau de coopération européenne encadré par le règlement (UE) 904/2010 du Conseil du 7 octobre 2010 concernant la coopération administrative et la lutte contre la fraude dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée ou en provenance d’une autorité ou d’un service de renseignement chargé de la lutte contre la fraude fiscale, l’invalidation du numéro prévue aux 1° et 2° du présent V peut être prononcée sans délai.
« VI. – Lorsqu’il existe des indices concordants indiquant que le numéro individuel d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée intracommunautaire est utilisé par un opérateur identifié qui savait ou ne pouvait ignorer être impliqué dans une fraude visant à ne pas reverser la taxe due en France ou dans l’Union européenne et que l’opérateur a fait obstacle au déroulement des opérations de contrôle fiscal, au sens de l’article L. 74, ou à l’exercice du droit d’enquête prévu à l’article L. 80 F, nonobstant la réalisation d’importations, d’acquisitions ou de livraisons intracommunautaires, il peut être invalidé immédiatement.
« VII. – Dans tous les cas, la décision d’invalidation du numéro individuel d’identification à la taxe sur la valeur ajoutée intracommunautaire, motivée, est notifiée à l’opérateur identifié, qui peut faire valoir ses observations.
« Le numéro est rétabli sans délai lorsque :
« 1° L’opérateur identifié a mis fin aux manquements aux obligations prévues au IV et au 1° du V ;
« 2° L’opérateur identifié a régularisé la situation résultant des manquements mentionnés au 2° du V ;
« 3° L’opérateur identifié a levé l’obstacle au déroulement des opérations mentionnées au VI ;
« 4° Les observations transmises par l’opérateur identifié sont de nature à justifier ce rétablissement. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2023.
Mme le président. L’amendement n° I-132 rectifié, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 11
Après le mot :
indices
insérer les mots :
sérieux et
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à sécuriser le dispositif d’extension du champ d’application de la procédure d’invalidation par l’administration fiscale du numéro individuel d’identification à la TVA intracommunautaire, introduit à l’Assemblée nationale.
Cette extension, qui rejoint les préconisations de la mission d’information de la commission des finances sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, permettra à l’administration fiscale de mieux lutter contre la fraude à la TVA, dite « fraude carrousel ».
D’après la Cour de justice de l’Union européenne, l’objectif essentiel de l’identification des assujettis est d’assurer le bon fonctionnement du système de la TVA : les États membres ne peuvent refuser cette identification « sans motif légitime », et l’administration fiscale doit fonder sa décision sur « des indices sérieux permettant objectivement de considérer qu’il est probable que le numéro d’identification à la TVA attribué à cet assujetti sera utilisé de manière frauduleuse ».
Nous voulons donc renforcer la sécurité du dispositif au regard du cadre posé par la CJUE, en prévoyant explicitement que l’administration fiscale devra se fonder, pour recourir à cette procédure, sur des indices non seulement concordants, mais aussi sérieux et permettant d’identifier la fraude. Mes chers collègues, chaque terme de cet amendement est pesé !
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. J’ai avec M. le rapporteur général une divergence d’analyse juridique.
Parallèlement au grand chantier que représente la facturation électronique, ce dispositif très important contenu dans l’article 10 octies nous permettra de lutter contre des chaînons complexes de fraude à la TVA, notamment les « carrousels de TVA ». Je rappelle que l’Insee évalue le montant de la fraude à la TVA à environ 20 milliards d’euros par an.
Le Conseil d’État a intégralement validé le dispositif proposé à l’article 10 octies, jugeant qu’il était respectueux des libertés publiques et du droit de l’Union européenne. Il ne semble dès lors pas nécessaire de le modifier.
En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. L’objet de l’amendement indique que les États ne peuvent refuser l’identification sans motif légitime.
Toutefois, compte tenu de la règle de l’unanimité au sein de l’Union européenne sur les sujets fiscaux, peut-on véritablement imposer à un État – je pense à Malte ou à Chypre, où sont basées des plateformes quelque peu étranges – de transmettre les données permettant l’identification des sociétés concernées ? L’obligation s’impose-t-elle à l’ensemble des États de l’Union européenne ?
Mme le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Pour répondre à M. Bocquet, la coordination avec les autres États européens n’est en cause ici. L’article 10 octies n’a qu’une visée : nous permettre de retirer le numéro de TVA d’une entreprise, lorsqu’il est manifeste qu’elle a réalisé un chaînon de fraude à la TVA.
Selon l’Insee, cette fraude massive représente 20 milliards d’euros par an. En la matière, nous attendons beaucoup du chantier de facturation électronique, qui est en cours de mise en œuvre et qui nous permettra de lutter contre les chaînons de fraude à la TVA.
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Au-delà de la divergence d’interprétation, le plus important est de bien sécuriser les dispositifs que nous mettons en place.
J’ignore ce qu’en pense M. le ministre – nous n’avons pas consulté le Conseil d’État –, mais le Sénat travaille bien lui aussi ! Je maintiens donc notre proposition.
Mme le président. Je mets aux voix l’article 10 octies, modifié.
(L’article 10 octies est adopté.)
Après l’article 10 octies
Mme le président. L’amendement n° I-24 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 10 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 119 bis A du code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Le 1 est ainsi modifié :
1°Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Les mots : « , dans la limite du montant correspondant à la distribution de produits de parts ou d’actions mentionnée au b, » sont supprimés ;
2°Les a et b sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« a) Le versement est conditionné, directement ou indirectement, à la distribution de produits d’actions, de parts sociales ou de revenus assimilés mentionnés aux articles 108 à 117 bis, ou son montant est établi en tenant compte de ladite distribution ;
« b) Le versement est lié, directement ou indirectement :
« - à une cession temporaire desdites parts ou actions d’une durée inférieure à une durée fixée par décret réalisée par la personne qui n’est pas établie ou n’a pas sa résidence en France au profit, directement ou indirectement, de la personne qui est établie ou a sa résidence en France ;
« - ou à une opération donnant le droit ou faisant obligation à la personne qui est établie ou a sa résidence en France de revendre ou de restituer, directement ou indirectement, lesdites parts ou actions à la personne qui n’est pas établie ou n’a pas sa résidence en France ;
« - ou à un accord ou instrument financier ayant, directement ou indirectement, pour la personne qui n’est pas établie ou n’a pas sa résidence en France, un effet économique similaire à la possession desdites parts ou actions.
« Le présent 1 n’est pas applicable aux dividendes distribués à une personne morale dans les conditions prévues à l’article 119 ter. »
B. – Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Lorsque les produits des actions et parts sociales et les produits assimilés mentionnés aux articles 108 à 117 bis sont versés à une personne qui est établie ou a sa résidence dans un État ou territoire ayant signé avec la France une convention d’élimination des doubles impositions qui ne prévoit pas ou exonère de retenue à la source ces produits, l’établissement payeur des produits applique, lors de la mise en paiement, la retenue à la source prévue au 2 de l’article 119 bis.
« Le premier alinéa du présent II n’est pas applicable aux dividendes distribués à une personne morale dans les conditions prévues à l’article 119 ter.
« Le bénéficiaire des produits mentionnés au premier alinéa du présent II peut obtenir le remboursement de la retenue à la source s’il apporte la preuve qu’il en est le bénéficiaire effectif et que la distribution de ces produits dans cet État ou territoire a principalement un objet ou un effet autres que d’éviter l’application d’une retenue à la source ou d’obtenir l’octroi d’un avantage fiscal.
« L’établissement payeur des produits mentionnés au même premier alinéa adresse chaque année à l’administration fiscale, par voie électronique et au plus tard le 31 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle les versements ont été effectués, une déclaration mentionnant le montant, la date, l’émetteur et le destinataire de chacun des versements. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2023.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.