M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 78 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l’adoption | 240 |
Contre | 91 |
Le Sénat a adopté.
J’appelle en discussion les articles 47 à 49, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Travail et emploi ».
Travail et emploi
Article 47
Le titre III de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I de l’article 78, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 » ;
2° Au début du premier alinéa du I de l’article 79, les mots : « Pour une durée de quatre ans, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2022 » sont remplacés par les mots : « À compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2023 ». – (Adopté.)
Article 48 (nouveau)
I. – L’article L. 5122-1 du code du travail est complété par des V et VI ainsi rédigés :
« V. – Les employeurs mentionnés à l’article L. 5424-1 peuvent placer en position d’activité partielle, dans les conditions prévues au présent chapitre, leurs salariés de droit privé pour lesquels ils ont adhéré au régime d’assurance chômage en application de l’article L. 5424-2, dès lors qu’ils exercent à titre principal une activité industrielle et commerciale dont le produit constitue la part majoritaire de leurs ressources.
« Ces employeurs bénéficient d’une allocation d’activité partielle selon les modalités prévues au présent chapitre.
« VI. – Les salariés mentionnés à l’article L. 243-1-2 du code de la sécurité sociale qui sont employés par une entreprise ne comportant pas d’établissement en France peuvent être placés en position d’activité partielle lorsque l’employeur est soumis, pour ces salariés, aux contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle et aux obligations d’assurance contre le risque de privation d’emploi au titre de la législation française.
« Ces employeurs bénéficient d’une allocation d’activité partielle selon les modalités prévues au présent chapitre. »
II. – Le I s’applique aux demandes d’autorisation adressées par les employeurs mentionnés au même I à l’autorité administrative à compter du 1er janvier 2023 et au titre des heures chômées à compter de la même date. – (Adopté.)
Article 49 (nouveau)
L’article L. 6323-4 du code du travail est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – La mobilisation du compte personnel de formation par son titulaire pour le financement d’une action de formation fait l’objet d’un mécanisme de régulation dont les modalités sont définies par décret en Conseil d’État. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-678, présenté par Mme Lavarde, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« IV. – La mobilisation des droits inscrits sur le compte personnel de formation prend en charge le coût de la formation dans la limite d’un plafond et en addition d’une participation financière du bénéficiaire. Les modalités de ce plafond et de cette participation financière sont définies par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que les amendements identiques déposés par M. le rapporteur spécial et Mme le rapporteur pour avis, mais va plus loin. En effet, les amendements identiques visent à rendre possible une modulation de prix pour certaines formations, alors que l’amendement que je présente a pour objet un plafonnement pour toutes les formations et l’introduction d’un ticket modérateur.
À mon sens, ce qui est gratuit n’a pas de valeur. Par conséquent, si l’on veut pleinement engager les gens dans un processus de formation autrement qu’à la suite d’un coup de fil où on leur rappelle qu’ils ont un compte personnel de formation et où on les invite à ne pas oublier d’utiliser les crédits afférents, il faut les faire participer un peu et avoir ainsi la garantie qu’ils seront véritablement acteurs de leur formation.
Évidemment, l’idée n’est pas de faire payer le ticket modérateur à tout le monde. Quand la formation s’inscrit dans une procédure de retour à l’emploi ou de réorientation professionnelle, cela n’a pas lieu d’être, parce qu’il s’agit véritablement d’un accompagnement vers le marché du travail. En revanche, pour toutes les autres formations qui, parfois, sans être des formations de confort, supposent un engagement moindre, introduire ce plafonnement et ce ticket modérateur me paraît utile.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-28 est présenté par M. Capus, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-376 est présenté par Mme Puissat, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« IV. – La prise en charge du coût de la formation mentionnée au I par la mobilisation des droits inscrits sur le compte personnel de formation peut être plafonnée selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. Ce décret détermine les formations concernées et, pour ces mêmes formations, les cas dans lesquels ce plafonnement n’est pas applicable. »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-28 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° II-678.
M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Cet amendement de la commission des finances, élaboré en collaboration avec la commission des affaires sociales, a un même objectif de régulation, mais est plus raisonnable et plus limité. En quelque sorte, il est moins budgétaire.
Mme Christine Lavarde. Ah, voilà !
M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Je rappelle que l’augmentation forte et non maîtrisée des dépenses induites par l’utilisation du compte personnel de formation justifie la mise en place de mécanismes régulateurs, ainsi que le prévoit l’article 49, introduit à l’Assemblée nationale par le Gouvernement.
Nous souhaitons élargir ce mécanisme de régulation en prévoyant qu’un plafonnement soit possible. Nous n’allons donc pas aussi loin que Mme Lavarde : il ne s’agit pas de mettre en place un ticket modérateur obligatoire, ce que laisse supposer la rédaction de son amendement.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission demandera le retrait de l’amendement n° II-678 au profit des amendements identiques de la commission des finances et de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-376.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur pour avis. Je rappelle que, parmi les propositions du rapport d’information que Corinne Féret, Martin Lévrier et moi-même avons produit, figurait l’instauration d’un reste à charge, dans l’objectif de recentrer le compte personnel de formation sur l’employabilité des utilisateurs et sur le développement des compétences à finalité professionnelle.
En ce sens, nous rejoignons tout à fait les objectifs de Christine Lavarde, qui a une vision budgétaire des missions confiées à France Compétences et dont je comprends tout à fait la position.
En effet, régulièrement, à l’occasion de l’examen des projets de loi de finances rectificative, 2 milliards d’euros sont prévus pour France Compétences, ce qui nous conduit à nous interroger sur notre capacité à équilibrer le budget de cet organisme.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée. L’enjeu est d’accompagner le compte personnel de formation de sorte qu’il atteigne aujourd’hui sa maturité.
Le compte personnel de formation rencontre un vif succès, avec 5,5 millions d’ouvertures de comptes de formation qui donnent accès aux droits à formation.
Néanmoins, nous partageons avec vous la conviction que mettre en place un mécanisme de régulation est nécessaire pour que ces fonds soient mobilisés à des fins d’employabilité et de maintien dans l’emploi, comme d’accompagnement des compétences sur des projets professionnels.
L’amendement de Mme la sénatrice Lavarde tend à généraliser la mise en place d’un ticket modérateur. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
Sur les modalités d’usage du compte personnel de formation, le dialogue social est en cours. Le Gouvernement l’accompagne et attend qu’il se prononce sur les modalités d’orientation vers un projet professionnel solide.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur les amendements identiques nos °II-28 et II-376.
M. le président. Madame Lavarde, l’amendement n° II-678 est-il maintenu ?
Mme Christine Lavarde. Oui, je le maintiens, monsieur le président, quand bien même j’ai peut-être une lecture trop budgétaire !
Monsieur le rapporteur spécial, j’ai indiqué dans cet amendement que les modalités du plafond et de la participation financière seraient définies par décret. Par conséquent, cela ne signifie pas que ce sera obligatoire pour tout le monde.
Mme la ministre se déclare prête à faire des réformes, mais n’allons surtout pas trop vite ! À chaque fois que nous examinons un texte budgétaire, nous abondons le budget de France Compétences de 2 milliards d’euros supplémentaires. Je veux bien que les milliards pleuvent, mais il faut vraiment engager la réflexion sur ce sujet. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
C’est ce que je propose de faire. Ensuite, un décret fixera les critères permettant la non-application du plafond et du ticket modérateur.
Si l’on ne fait rien, on continuera à être harcelé au téléphone et l’on acceptera des formations seulement parce que l’on aura acquis assez de droits et l’on y renoncera parce que, au moment voulu, l’argent manquera !
Je le répète : il faut engager la réflexion sur le sujet !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Dussopt, ministre. La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale, qui sera prochainement en discussion au Sénat, interdira purement et simplement le démarchage téléphonique, ce qui est une bonne chose, et traitera le sujet par d’autres moyens.
Si votre amendement était adopté, madame la sénatrice, le décret ne pourrait plus permettre une exonération totale du ticket modérateur. Ce serait problématique pour des demandeurs d’emploi de très longue durée qui, confrontés à des difficultés financières, ne pourraient plus accéder à une formation. Cette rédaction pose vraiment problème.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement préfère les amendements nos II-28 et II-376, sur lesquels il a émis un avis de sagesse.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-28 et II-376.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme Christine Lavarde. C’est un moindre mal ! (Sourires.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi ».
3
Organisation des travaux
M. le président. Mes chers collègues, au regard du nombre d’amendements à examiner et dans la mesure où l’organisation de la journée de demain le permet, en accord avec la commission des finances, nous pourrions porter, à titre exceptionnel, la durée maximale prévisionnelle de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » de deux heures trente à trois heures trente.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures quinze, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
4
Loi de finances pour 2023
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » (et articles 41 et 41 bis).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » continuent leur inexorable baisse, malheureusement liée à la démographie.
L’année 2023 se caractérise par une réduction particulièrement marquée de 161 millions d’euros, les crédits tombant à 1,9 milliard d’euros. Celle-ci est due à la diminution du nombre des bénéficiaires de pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant, combinée à une revalorisation limitée de ces pensions. Si l’année 2023 se démarque par une revalorisation de droit commun qui doit s’élever à 4 %, cette revalorisation reste inférieure à l’inflation de 2022 qu’elle a pour objet de compenser.
Cependant, cette approche globale cache un certain nombre d’éléments, qu’il faut également souligner.
L’année 2022 a vu un renforcement particulièrement important de l’effort de la Nation envers les harkis et autres rapatriés, ce qui est un témoignage de respect et de reconnaissance. Les crédits qui leur sont dédiés ont été multipliés par quatre entre l’exécution 2021 et la prévision 2023.
Les actions qui ne sont pas liées aux rentes versées aux anciens combattants sont globalement en hausse. C’est notamment le cas des crédits dédiés à la politique de la pierre, soit l’entretien des tombes de morts pour la France, les nécropoles nationales et les hauts lieux de la mémoire nationale, du fait de la forte dimension immobilière de ces actions.
De plus, l’année 2023 ne prévoit plus de prélèvement sur la trésorerie, dont le niveau est désormais faible, de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), opérateur principal de la mission sur lequel j’ai réalisé cette année un contrôle budgétaire. À ce titre, je remercie les membres et les fonctionnaires de la commission des finances, ainsi que les services du ministère des armées de leur coopération et collaboration. À ce moment de mon propos, je veux également mentionner l’Institution nationale des Invalides, qui est également un opérateur majeur.
Enfin, le gain pour les finances publiques lié aux baisses de crédits de la mission est largement symbolique. L’article 3 quinquies, qui étend le bénéfice de la demi-part fiscale des veuves d’anciens combattants, représentait un coût de 130 millions d’euros lorsqu’il abaissait la condition d’âge de décès de l’époux à 60 ans. Or, en votant des amendements identiques du Gouvernement, de la commission des affaires sociales et de plusieurs de nos collègues, nous avons fait le choix de supprimer totalement la condition d’âge de décès de l’époux ancien combattant. Quel est le chiffrage du dispositif qui résulte de l’adoption de ces amendements, madame la secrétaire d’État ?
La baisse de 160 millions d’euros en crédits sera donc compensée par le renforcement des dépenses fiscales sur la mission. Là encore, il s’agit d’exprimer notre respect et notre reconnaissance à l’égard de valeurs hautement symboliques pour l’ensemble du monde combattant.
Ainsi, s’il est possible de regretter la revalorisation toujours inférieure à l’inflation des rentes viagères, la baisse globale des crédits ne doit pas non plus cacher les efforts budgétaires consentis pour les harkis et autres rapatriés, ainsi que ceux qui sont consentis pour les veuves d’anciens combattants.
En tant qu’élus, nous sommes tous dévoués et impliqués dans nos territoires pour œuvrer en faveur du devoir de mémoire, ce qui passe par une coopération avec l’éducation nationale. Jocelyne Guidez préside le groupe d’études Monde combattant et mémoire. Là encore, c’est une marque de reconnaissance et de respect pour l’ensemble des associations de mémoire, véritables porte-drapeaux qui s’engagent fortement pour la mémoire, en cherchant notamment à impliquer les jeunes.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré la baisse de 7,4 % des crédits de la mission, en raison d’une diminution des bénéficiaires des prestations servies aux anciens combattants, le budget prévu pour 2023 permettra de revaloriser de 3,5 % les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant.
Après une revalorisation exceptionnelle de 7 % en 2022, je salue la décision du Gouvernement de répercuter dès 2023 la hausse de la rémunération des fonctionnaires sur le point de pension militaire d’invalidité (PMI), alors que les règles de calcul auraient conduit à n’en tenir compte qu’en 2024. Compte tenu de l’inflation, cette revalorisation, qui représentera un coût de 41 millions d’euros, demeure toutefois insuffisante pour soutenir les pensionnés. Nous devrons donc être attentifs à ce que les pensions servies aux anciens combattants ne subissent pas le même décrochage que celui qui a été constaté entre 2005 et 2021. Sur ce point, je vous fais confiance, madame la secrétaire d’État.
Je salue l’adoption, en première partie du projet de loi de finances, de l’amendement de la commission des affaires sociales tendant à accorder une demi-part fiscale aux conjoints survivants de plus de 74 ans, quel que soit l’âge du décès de l’ancien combattant. Cette mesure de justice renforcera le soutien de la Nation aux familles d’anciens combattants. Je sais aussi que cela a été votre combat, madame la secrétaire d’État.
Je m’interroge toutefois sur l’âge à partir duquel le conjoint survivant d’un ancien combattant peut bénéficier de cette demi-part. Le fait qu’il doive attendre l’âge de 74 ans ne me paraît pas justifié, cet âge ne correspondant à aucune autre ouverture de droit. Il pourrait être envisagé d’accorder cette demi-part dès 67 ans, soit l’âge du taux plein pour la retraite. Je sais que cela a un coût, mais il faudra y revenir. Je n’ai pas déposé d’amendement, car je pense qu’une décision préalable s’impose. Nous devrons donc poursuivre nos travaux sur ce dispositif, afin d’en évaluer les effets et de le rendre, à terme, plus juste pour l’ensemble des familles de combattants.
Soulignons que l’augmentation de 3,8 millions d’euros de la subvention versée à l’ONACVG permettra de financer la pérennisation des maisons Athos, qui offrent un accompagnement très utile aux blessés psychiques et à leurs familles. Sur ce point, je tiens à remercier le Gouvernement, puisqu’une maison supplémentaire va être construite.
Le maintien à 25 millions d’euros de la dotation d’action sociale de l’ONACVG, malgré la baisse du nombre d’anciens combattants, permettra à l’Office de soutenir ses ressortissants en difficulté et d’accompagner les pupilles de la Nation et les victimes du terrorisme.
Les moyens consacrés aux liens entre les armées et la jeunesse et à la mémoire progresseront pour assurer le financement des journées de défense et de citoyenneté, l’entretien de sépultures de guerre et de hauts lieux de la mémoire nationale, ainsi que de commémorations liées au quatre-vingtième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale.
Toutefois, les moyens alloués à la jeunesse et à la mémoire devraient progresser bien plus significativement.
Il me paraît nécessaire que le budget consacré au monde combattant soit à terme sanctuarisé et que les actions en faveur du lien entre les armées et la Nation et en faveur de la mémoire combattante soient renforcées.
Les nouvelles générations de combattants, dont les besoins évoluent, devront être accompagnées par l’ONACVG. En outre, l’Office pourrait renforcer les liens entre les armées et la Nation, en valorisant l’engagement citoyen en faveur du monde combattant et en soutenant davantage la transmission de la mémoire. Notre cohésion nationale en dépend, alors que les témoins des grands conflits qui ont marqué notre pays disparaissent progressivement.
Au nom de la commission des affaires sociales, je vous invite à adopter les crédits de la mission. Je salue mon collègue de la commission des finances Marc Laménie, avec lequel je travaille en bonne intelligence sur ces sujets. Madame la secrétaire d’État, je salue également nos discussions et échanges. C’est ensemble que nous irons beaucoup plus loin. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et SER.)
Mme la présidente. Dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’heure d’examiner le budget relatif à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » et, plus encore, à l’heure où la guerre est aux portes de l’Europe, je veux rendre hommage à ces femmes et ces hommes qui se sont battus pour que nous soyons libres.
Si les derniers résultats électoraux inquiètent, le groupe CRCE fait le vœu de construire une société progressiste et humaniste.
Mes chers collègues, alors que les anciens combattants étaient de nouveau dotés d’une ministre déléguée, le Gouvernement a décidé de redonner la prérogative des anciens combattants à un secrétariat d’État. Si cela peut apparaître comme un détail, nous sommes convaincus qu’un ministère en tant que tel demeurera utile tant que les contentieux ne seront pas totalement réglés ; c’est le souhait des associations d’anciens combattants.
À la lecture du rapport budgétaire relatif à cette mission, nous constatons une nouvelle baisse du budget : elle atteint 154 millions d’euros pour 2023, soit une diminution de 7,4 % par rapport à 2022. Une fois encore, cette baisse de crédits est justifiée par la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité, de la retraite du combattant.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite me faire le porte-voix des associations pour vous dire qu’il suffirait de garder un budget constant d’une année sur l’autre pour satisfaire pleinement les revendications du monde combattant.
Toutefois, je veux noter deux avancées majeures.
La première avancée concerne les harkis, avec une augmentation de 3 millions d’euros de leur dotation portant sur le droit à réparation du fait des préjudices subis en raison de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.
La seconde était certainement la plus attendue. Je veux bien entendu parler de l’octroi du bénéfice de la demi-part fiscale pour les veuves, quel que soit l’âge de décès de l’époux. Il s’agissait d’une discrimination par l’âge contraire à nos principes constitutionnels.
Nous nous félicitons donc de ces deux mesures.
En revanche, au rayon des insuffisances et manques, plusieurs constats s’imposent.
La valeur du point de PMI s’établira au 1er janvier 2023 à 15,58 euros contre 15,05 euros en 2022. En tout état de cause, cette augmentation de seulement 3,52 % est largement inférieure à l’évolution des prix à la consommation. La retraite du combattant basée sur 52 points passera donc à 807,48 euros, contre 782,60 euros, soit 25,48 euros de plus par an.
Dans ces conditions, un rattrapage du retard constaté sur la valeur du point de PMI serait une bonne mesure. Comme vous le savez, mes chers collègues, la valeur du point de PMI est indexée non sur l’inflation, mais sur l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État. Sans même revenir sur le passé et l’érosion du pouvoir d’achat des anciens combattants résultant d’une inflation et d’un gel quasi total de l’indice entre 2012 et 2018, la situation apparaît préoccupante.
Madame la secrétaire d’État, il est impératif de rattraper le retard rapidement, y compris en mettant sur pied un calendrier de rattrapage. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de saluer le travail de nos rapporteurs, Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances, et Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, dont je souligne tout particulièrement le sérieux et la qualité d’analyse.
Mes chers collègues, nous avons la lourde tâche, dans le cadre d’un projet de loi de finances, d’exprimer par des mesures fiscales et l’allocation de moyens, notre reconnaissance de l’inestimable sacrifice du sang versé au service de la patrie et à l’égard de celles et de ceux qui, victimes ou persécutés, doivent être indemnisés.
Disons-le, la trajectoire proposée par le Gouvernement et par vous-même, madame la secrétaire d’État, est acceptable, voire encourageante.
Ce que nous disent les chiffres, c’est que le nombre de bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et des prestations octroyées aux anciens combattants est en baisse du fait de l’érosion démographique, parce que la guerre, les guerres françaises, s’éloignent. Mais le devoir de mémoire n’en est que plus urgent.
Ce que nous disent les Français et les associations, c’est que le devoir de mémoire ne doit oublier personne et être le plus juste possible, y compris dans les moyens alloués.
Aussi, nous observons que la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est à un point de bascule dont nous devons avoir conscience.
Les demandes de financement de cette mission seront étendues d’année en année, alors que, paradoxalement, les guerres s’éloignent. Cette évolution s’explique par l’élargissement du champ de la reconnaissance qu’une nation doit à ses combattants, à leurs familles et aux victimes, et des moyens que l’État doit mettre en place pour instaurer du lien entre son armée et son peuple.
De plus, l’évolution des définitions que nous déterminerons – par exemple, ce que signifie « être victime » ou être « mort pour la France » –, celle du champ d’application de ce que nous appelons la mémoire ou les mémoires ou encore celle du nombre de jours fériés auront des conséquences notables sur les budgets à venir de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».
Pour la première fois cette année, nous décidons que le parcours de soins au sein du service de santé des armées des maisons Athos prendra aussi en compte les blessures psychiques, y compris en accompagnant les familles de militaires souffrant de ces troubles : nous faisons évoluer la définition et la reconnaissance de ce qu’est une blessure.
De même, la reconnaissance des préjudices subis par les harkis, supplétifs et rapatriés témoigne du fait que l’État prend en compte ces questions de manière de plus en plus précise. Je salue d’ailleurs l’action du Gouvernement à ce sujet, car, en un an, les moyens de la politique de reconnaissance et de réparation en faveur des harkis ont presque été quadruplés. Le montant moyen attribué par bénéficiaire est de 8 784 euros. Que de chemin parcouru, madame la secrétaire d’État !
L’Office national des anciens combattants et victimes de guerre voit le montant de sa subvention pour charges de service public augmenter de 3,8 millions d’euros pour 2023. Il pourra ainsi soutenir le travail de la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, mais aussi appliquer la revalorisation du point d’indice de la fonction publique.
Il voit aussi sa dotation d’action sociale de 25 millions d’euros préservée. Celle-ci est essentielle, afin de verser des aides financières aux anciens combattants, à leurs conjoints survivants, mais aussi de soutenir les pupilles de la Nation. L’Office doit avoir les moyens d’élargir et de développer ses actions destinées à promouvoir les liens entre armée et Nation en valorisant l’engagement citoyen auprès de nos armées.
Je salue les augmentations du budget relatives au lien entre l’armée et la jeunesse, par le soutien au service militaire volontaire, le financement de la Journée défense et citoyenneté (JDC), de la promotion du lien entre armée et jeunesse, des classes de défense et des cadets de la défense. Les crédits alloués progressent de 4 % en 2023 et dépassent les 24 millions d’euros.
Les crédits de la politique mémorielle progressent de 17,2 % par rapport à 2022. Leur montant était alors de 17,85 millions d’euros, en légère hausse déjà, mais insuffisant. En ce domaine, quels crédits le Gouvernement aurait-il demandés pour 2023 s’il n’y avait pas l’inflation ?
Les crédits en faveur des anciens combattants, les pensions militaires d’invalidité et les retraites de combattants constituent l’essentiel du budget alloué à la mission.
Le nombre des bénéficiaires de la retraite du combattant, âgés de 85 ans en moyenne, devrait baisser de 7 % en 2023. Cette diminution permet notamment à l’État de financer différemment les pensions militaires d’invalidité et de revoir sa politique en matière d’octroi des demi-parts.
Nous devons reconnaître que le Gouvernement a fait deux choix essentiels. D’abord, il a répercuté la hausse de 3,5 % du point d’indice de la fonction publique en juillet 2022 sur le point PMI de janvier 2023, et non 2024. Ces 41 millions d’euros supplémentaires permettront de mieux soutenir les anciens combattants face à la hausse des prix. Ensuite, il a octroyé une demi-part supplémentaire pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Je remercie la rapporteure pour avis Jocelyne Guidez d’avoir déposé un amendement visant à faire en sorte que cette demi-part fiscale supplémentaire soit accordée aux conjoints survivants, quel que soit leur âge. Je soutiens une telle évolution.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, le groupe Union Centriste votera pour l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI, ainsi qu’au banc des commissions.)