M. le président. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Valérie Létard applaudit également.)
M. Max Brisson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 2019, le Sénat a débattu de plusieurs textes majeurs sur les violences conjugales. Accélération de la délivrance des ordonnances de protection, renforcement du déploiement des bracelets anti-rapprochement et du téléphone grave danger, levée du secret médical et attribution facilitée de logements d’urgence : autant de mesures désormais gravées dans la loi et dont la mise en œuvre, parfois trop frileuse, a commencé.
L’accélération de la cadence des travaux du Parlement atteste, dans tous les cas, une prise de conscience profonde de l’urgence à agir. Ces diverses mesures ont été autant de tentatives de compenser quelque peu le retard que nous avons pris sur ce sujet ô combien majeur – et quel retard quand l’on se souvient que, dans notre pays, la première étude statistique sur les violences conjugales ne date que de 2006 ! Cependant, malgré un volontarisme politique récent et des moyens supplémentaires, la croissance du nombre de violences conjugales demeure, les difficultés inhérentes à leur prise en charge persistent, les crimes violents continuent de briser des vies et des familles.
Nous devons continuer les efforts et intensifier encore la lutte contre le fléau des violences conjugales. Dans ce contexte, cette proposition de loi instaurant une aide d’urgence – avance sans intérêt ou aide aisée de mise en place –, que Valérie Létard a justement voulue universelle, est la bienvenue. Il s’agit d’une aide pour aider les femmes à quitter une personne violente et à s’en éloigner dans la durée.
Mes chers collègues, plus encore que bienvenue, cette aide sonne comme une évidence. Elle est primordiale.
Primordiale, elle l’est parce qu’elle envoie un message fort dans un moment particulièrement éprouvant pour la victime. Nous le savons, s’extraire de l’enfermement que l’on subit d’un compagnon violent est un saut dans l’inconnu. Ce moment-là, celui de la rupture, est souvent le plus dangereux. C’est là que tout peut basculer vers le drame et c’est précisément pour ces raisons que de nombreuses victimes préfèrent le statu quo, aussi insupportable soit-il. L’aide universelle d’urgence permettra donc de lever une partie de cet inconnu et de soutenir les victimes dans cet acte de courage.
Primordiale, l’aide l’est aussi parce qu’elle ne répondra pas seulement à des besoins matériels essentiels : elle donnera le signal d’un soutien de la société à la victime dans une situation de crise. Elle clamera la compréhension de leurs difficultés. Elle apportera une réponse aux questions matérielles qui retardent ou, pis encore, empêchent la victime de violences conjugales de briser l’emprise.
Dans un moment de crise, elle suscitera la confiance et fournira un appui. En quelques mots, cette aide universelle d’urgence permettra à la victime d’entrevoir un après.
Je me réjouis donc de cette avancée majeure qui nous rassemble et qui permet de faire progresser l’aide aux victimes de violences conjugales.
Je salue tout particulièrement notre collègue Valérie Létard, qui a défendu cette proposition de loi issue d’un travail de terrain collectif et qui a contribué à imaginer ce système d’avances indispensable pour que les victimes sortent de la dépendance matérielle que leur impose leur conjoint violent.
Au-delà du dispositif créé, la méthodologie suivie pour aboutir à l’instauration de cette aide est exemplaire. Elle se fonde sur l’écoute de l’ensemble des acteurs intervenant dans les domaines du médico-social, du soutien psychologique, de l’aide juridique, du logement et de l’insertion professionnelle.
La manière dont a été pensé ce dispositif nous rappelle qu’en matière de violences conjugales seule une approche multidimensionnelle, avec le concours notamment des collectivités locales, des associations, des travailleurs sociaux, des services de gendarmerie et de police, des procureurs de la République et des caisses d’allocations familiales, permet d’aboutir à des solutions pertinentes.
À l’aube du démarrage du chantier majeur qu’est celui de la création d’une juridiction spécialisée, que j’appelle de mes vœux, en particulier au regard de ce que je peux observer en Espagne, pays voisin de mon département, je souhaite que nous nous souvenions de la pertinence de cette méthode, qui vaut d’ailleurs pour tous les autres chantiers recensés fort justement par Laurence Rossignol dans son intervention.
Souvenons-nous qu’il y a urgence à agir, mais aussi que le consensus est nécessaire si l’on veut réellement intensifier la lutte menée contre les violences conjugales. Celle-ci implique en effet une meilleure coordination entre les acteurs et la suppression de ces terribles trous dans la raquette, dans lesquels s’engouffrent malheureusement encore trop souvent leurs auteurs.
Dans l’attente d’une grande loi de lutte contre les violences conjugales, madame la ministre, le groupe Les Républicains votera bien entendu cette proposition de loi attendue et utile. Encore merci, chère Valérie Létard ! (Applaudissements.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi créant une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales
Article 1er
(Non modifié)
Après le chapitre IV du titre Ier du livre II du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un chapitre IV bis ainsi rédigé :
« Chapitre IV bis
« Aide universelle d’urgence pour les personnes victimes de violences conjugales
« Art. L. 214-8 A. – Toute personne victime de violences conjugales, entendues au sens de l’article 132-80 du code pénal, peut bénéficier d’un accompagnement adapté à ses besoins.
« Art. L. 214-8. – La personne mentionnée à l’article L. 214-8 A bénéficie, à sa demande, d’une aide financière d’urgence sous réserve d’être victime de violences commises par son conjoint, son concubin ou le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité et attestées par une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales en application du titre XIV du livre Ier du code civil, par un dépôt de plainte ou par un signalement adressé au procureur de la République, notamment en application du premier alinéa de l’article 132-80 du code pénal.
« Au moment du dépôt de la plainte ou du signalement adressé au procureur de la République, après information de la victime et avec son accord, un formulaire simplifié de demande peut être transmis à l’organisme débiteur des prestations familiales compétent. Dès réception de la demande, celle-ci est transmise au président du conseil départemental par l’organisme débiteur des prestations familiales saisi, avec l’accord exprès du demandeur.
« Art. L. 214-8-1. – L’aide financière mentionnée à l’article L. 214-8 prend la forme d’un prêt sans intérêt ou d’une aide non remboursable, selon la situation financière et sociale de la personne, en tenant compte, le cas échéant, de la présence d’enfants à charge.
« Son montant peut être modulé selon l’évaluation des besoins de la personne, notamment sa situation financière et sociale ainsi que, le cas échéant, la présence d’enfants à charge, dans la limite de plafonds.
« Le versement de l’aide ou d’une partie de l’aide intervient dans un délai de trois jours ouvrés à compter de la réception de la demande. Par dérogation, ce délai peut être porté à cinq jours ouvrés si le demandeur n’est pas allocataire.
« Pendant six mois à compter du premier versement de l’aide mentionnée à l’article L. 214-8, la victime recevant l’aide financière peut bénéficier des droits et aides accessoires au revenu de solidarité active accessoires à cette allocation, y compris l’accompagnement social et professionnel mentionné à l’article L. 262-27.
« Un décret détermine les conditions d’application du présent article.
« Art. L. 214-8-2. – L’aide mentionnée à l’article L. 214-8 est attribuée, servie et contrôlée par les organismes débiteurs des prestations familiales pour le compte de l’État, contre remboursement, y compris des frais de gestion engagés par ces organismes.
« Art. L. 214-8-3. – Dans le cas où l’aide a été consentie sous la forme d’un prêt et lorsque les faits prévus au premier alinéa de l’article L. 214-8 ont donné lieu à une procédure pénale, son remboursement ne peut être demandé au bénéficiaire tant que cette procédure est en cours. Ce remboursement est demandé à l’auteur des violences lorsque celui-ci a été définitivement condamné à la peine prévue à l’article 222-44-1 du code pénal ou a fait l’objet de la mesure de composition pénale prévue au 20° de l’article 41-2 du code de procédure pénale ou de la mesure de classement sous condition de versement pécuniaire prévue au 4° de l’article 41-1 du même code. Cette demande est possible même si la créance correspondante n’est pas encore exigible auprès du bénéficiaire.
« Dans le cas où le remboursement du prêt incombe au bénéficiaire, des remises ou des réductions de créance peuvent lui être consenties en fonction de sa situation financière.
« Art. L. 214-8-4. – L’action en paiement de l’aide mentionnée à l’article L. 214-8 par le bénéficiaire et l’action en recouvrement par l’organisme en cas de versement indu se prescrivent dans les délais prévus à l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 214-9. – Tout paiement indu de l’aide mentionnée à l’article L. 214-8 est récupéré par remboursement intégral de la dette en un seul versement si l’allocataire opte pour cette solution. À défaut, sous réserve que l’allocataire ne conteste pas le caractère indu et n’opte pas pour le remboursement en un ou plusieurs versements dans un délai fixé par décret qui ne peut excéder douze mois, l’organisme payeur peut procéder à la récupération de l’indu par retenues sur les échéances à venir dues au titre des prestations familiales mentionnées à l’article L. 511-1 du code de la sécurité sociale, de la prime d’activité mentionnée à l’article L. 841-1 du même code, du revenu de solidarité active mentionné à l’article L. 262-1 du présent code ou des aides personnelles au logement mentionnées à l’article L. 821-1 du code de la construction et de l’habitation. Ces retenues sont déterminées en application des règles prévues au troisième alinéa de l’article L. 553-2 du code de la sécurité sociale.
« Lorsque l’indu notifié ne peut être récupéré sur les prestations mentionnées au premier alinéa du présent article, la récupération peut être opérée, sous les réserves indiquées au même premier alinéa, si l’allocataire n’opte pas pour le remboursement en un seul versement, par retenue sur les prestations mentionnées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 553-2 du code de la sécurité sociale, dans les conditions prévues au même avant-dernier alinéa.
« Les dix derniers alinéas de l’article L. 133-4-1 du même code sont applicables au recouvrement des indus mentionnés au présent article.
« Art. L. 214-9-1. – Toute réclamation dirigée contre une décision relative à l’aide mentionnée à l’article L. 214-8 prise par un organisme débiteur des prestations familiales fait l’objet, préalablement à l’exercice d’un recours contentieux, d’un recours préalable dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 142-4 du code de la sécurité sociale.
« Les recours contentieux relatifs aux décisions mentionnées au premier alinéa du présent article sont portés devant la juridiction administrative.
« Le bénéficiaire de l’aide est informé, par tout moyen, des modalités de réclamation et de recours décrites aux deux premiers alinéas.
« Art. L. 214-9-2. – Les dispositions relatives aux contrôles et à la lutte contre la fraude prévues aux articles L. 114-9 à L. 114-10-2, L. 114-11 à L. 114-17, L. 114-19, L. 114-20 à L. 114-22 et L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale sont applicables à l’aide mentionnée à l’article L. 214-8 du présent code.
« Art. L. 214-10. – Les modalités d’application du présent chapitre sont déterminées par décret. »
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 1er bis
(Non modifié)
I. – Au dernier alinéa de l’article L. 531-5 du code de l’action sociale et des familles, après le mot : « par », sont insérés les mots : « le chapitre IV bis du titre Ier et ».
II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai d’an an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi visant à adapter au Département de Mayotte le chapitre IV bis du titre Ier du livre II du code de l’action sociale et des familles. Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance. – (Adopté.)
Article 1er ter
(Non modifié)
I. – Avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, une loi de programmation pluriannuelle de lutte contre les violences faites aux femmes détermine la trajectoire des finances publiques en matière de prévention et d’accompagnement des femmes victimes de violence, pour trois périodes successives de cinq ans. Elle se fonde sur une évaluation des besoins des personnes victimes de violences au sein de leur couple ou de leur famille, menacées de mariage forcé ou contraintes de quitter leur logement après des menaces de violence ou des violences subies effectivement. Elle définit :
1° Les objectifs de financement public nécessaire pour assurer l’accompagnement psychologique et social ;
2° Les objectifs de financement public nécessaire à la mise à l’abri via des dispositifs d’hébergement ;
3° Aux échelons régional et départemental, les moyens destinés aux opérateurs de l’action sanitaire, sociale et médico-sociale indispensables à la réalisation de ces objectifs ;
4° Les moyens destinés à la formation des médecins, des personnels médicaux et paramédicaux, des travailleurs sociaux, des agents des services de l’état civil, des agents des services pénitentiaires, des magistrats, des personnels de l’éducation nationale, des personnels d’animation sportive, culturelle et de loisirs et des personnels de police et de gendarmerie ;
5° Les moyens destinés au « 3919 » dans l’accomplissement de ses missions.
II. – Dans le cadre de leurs publications annuelles, l’Observatoire national des violences faites aux femmes et le Haut Conseil pour l’égalité entre les femmes et les hommes remettent un avis sur la cohérence entre les objectifs fixés et les moyens financiers de cette loi de programmation. – (Adopté.)
Article 2
(Non modifié)
I. – Après l’article 222-44 du code pénal, il est inséré un article 222-44-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-44-1. – Les personnes physiques coupables des infractions prévues au 6° des articles 222-10, 222-12 et 222-13 ou à l’avant-dernier alinéa de l’article 222-14 encourent également la peine complémentaire d’obligation de remboursement du prêt versé à la victime en application de l’article L. 214-8 du code de l’action sociale et des familles, sans que ce remboursement puisse excéder 5 000 euros. Le prononcé de cette peine complémentaire est obligatoire en cas de condamnation pour l’un des crimes ou délits punis au 6° des articles 222-10 et 222-12 et à l’avant-dernier alinéa de l’article 222-14 du présent code. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spéciale et motivée lorsque la condamnation est prononcée par une juridiction correctionnelle, décider de ne pas prononcer cette peine en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
II. – Après l’article 15-3-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-2-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-3-2-1. – En cas de plainte déposée pour une infraction commise par le conjoint de la victime, par son concubin ou par le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité, l’officier ou l’agent de police judiciaire qui reçoit la plainte ou, sous son contrôle, l’assistant d’enquête informe la victime qu’elle peut, le cas échéant, bénéficier d’une aide d’urgence au titre de l’article L. 214-8 du code de l’action sociale et des familles. »
III. – La seconde phrase du 4° de l’article 41-1 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « ainsi qu’en un remboursement du prêt versé à la victime en application de l’article L. 214-8 du code de l’action sociale et des familles, sans que ce remboursement puisse excéder 5 000 euros ».
IV. – Après le 19° de l’article 41-2 du code de procédure pénale, il est inséré un 20° ainsi rédigé :
« 20° Rembourser le prêt versé à la victime en application de l’article L. 214-8 du code de l’action sociale et des familles, sans que ce remboursement puisse excéder 5 000 euros. » – (Adopté.)
Article 2 bis
(Suppression maintenue)
Article 2 ter
(Non modifié)
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant précisément le dispositif prévu à l’article 2 à travers une évaluation territorialisée du nombre de demandes d’aide d’urgence transmises par les services de police judiciaire, du nombre et de la nature des interventions des travailleurs sociaux mentionnés à l’article L. 121-1-1 du code de procédure pénale et de la recevabilité des demandes transmises dans ce cadre. – (Adopté.)
Article 2 quater
(Non modifié)
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur la possibilité pour les habitants des collectivités relevant de l’article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie de bénéficier de tout ou partie des droits prévus par la présente loi, sans préjudice des compétences dévolues à ces collectivités. – (Adopté.)
Article 2 quinquies
(Non modifié)
La présente loi entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard neuf mois après sa promulgation. – (Adopté.)
Article 3
(Suppression maintenue)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi créant une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales.
(La proposition de loi est adoptée définitivement et à l’unanimité.) – (Applaudissements.)
Mme Valérie Boyer. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Philippe Mouiller, vice-président de la commission des affaires sociales. Chère Valérie Létard, je tiens, au nom de la commission des affaires sociales, à vous remercier et à vous féliciter pour votre travail. D’une façon générale, je remercie et je félicite l’ensemble des sénatrices et des sénateurs pour leur mobilisation sur cette grande cause qui nous anime tous.
J’en profite pour vous faire passer un message, madame la ministre : l’adoption à l’unanimité de ce texte, ici, dans l’hémicycle du Sénat, montre ô combien le sujet nous importe.
Il est vraiment important et urgent que nous, sénatrices et sénateurs, ayons l’occasion de vous accompagner dans la rédaction d’un texte global sur les violences faites aux femmes. Cette volonté est à la fois celle de la commission des affaires sociales et celle, plus globale, du Sénat. Sachez que vous disposerez ici de partenaires unanimes, prêts à se mobiliser, quelles que soient les travées où ils siègent. Tel est le message que je souhaitais délivrer. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Monsieur le président, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je suis moi aussi émue par l’adoption de cette proposition de loi à l’unanimité.
Tout d’abord, je tiens à vous remercier, chère Valérie Létard, de cette proposition de loi, ainsi que de la qualité de nos échanges. Je veux également vous remercier, madame la rapporteure, chère Jocelyne Guidez, de tout le travail accompli.
Je suis heureuse que nous soyons parvenus à faire en sorte que cette aide universelle d’urgence, à laquelle nous tenons vraiment beaucoup, puisse prendre la forme d’un don.
Nous allons maintenant nous atteler à l’élaboration du décret d’application pour que, très rapidement, cette loi puisse être mise en œuvre.
Puisque l’occasion m’en a été donnée par M. le vice-président de la commission, je salue le travail constant et toujours constructif que mène la délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, notamment sa présidente – chère Annick Billon –, ainsi que votre travail constant, chère Laurence Rossignol, cher Max Brisson.
Vous savez combien cette notion de justice spécialisée est fondamentale pour moi. Je soutiendrai toujours que ces violences ne sont pas des infractions comme les autres et qu’elles nécessitent un traitement et une prise en charge spécifiques.
Un rapport élaboré en commun sur ce sujet par la sénatrice Dominique Vérien et la députée Émilie Chandler nous sera bientôt remis.
Vous pouvez compter sur moi, tout autant que je sais pouvoir compter sur vous. Nous envoyons vraiment un message unique aujourd’hui, à savoir que, face à ces violences, seule l’union fait la force ! (Applaudissements.)
4
Adaptation au droit de l’Union européenne dans divers domaines
Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture (texte de la commission n° 340, rapport n° 339).
La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 9 février dernier, est parvenue à un accord sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture,
Je salue la rapporteure pour l’Assemblée nationale de la commission mixte paritaire, ainsi que l’ensemble des rapporteurs des quatre commissions qui ont été saisies pour avis de ce texte en première lecture. Leurs travaux ont permis de compléter le projet de loi et de trouver un accord entre nos deux assemblées.
Je ne reviens pas sur l’ensemble des dispositions du texte, dont nous avons discuté en première lecture et qui, pour nombre d’entre elles, n’ont été modifiées que très marginalement par l’Assemblée nationale.
J’évoquerai les principales modifications adoptées par la commission mixte paritaire.
En matière de handicap, celle-ci a conservé l’apport du Sénat visant à ce que le renouvellement des terminaux en libre-service pour les rendre accessibles aux personnes handicapées soit effectué en s’assurant d’une répartition territoriale équilibrée. L’égalité d’accès des personnes atteintes d’un handicap aux services de la vie courante comporte une dimension territoriale qui devait être prise en compte.
Dans le domaine de la santé, la commission mixte paritaire s’est contentée d’apporter une précision sur les catégories de personnes et de services autorisés à délivrer des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales.
Dans le champ de l’économie, plusieurs modifications à l’article 5 bis, qui a trait à l’encadrement des prestataires de services sur actifs numériques, ont été apportées. A ainsi été retenu un mécanisme d’enregistrement renforcé de ces prestataires auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui exigera desdits prestataires qu’ils disposent d’un système informatique résilient et sécurisé.
Pour que tous les nouveaux entrants sur le marché disposent d’un enregistrement renforcé au 1er janvier 2024, la commission mixte paritaire a fixé au 1er juillet 2023 le délai limite pour le dépôt des dossiers des prestataires souhaitant demander un enregistrement simple.
En matière de transports, la commission mixte paritaire a encadré la possibilité donnée à l’Autorité de régulation des transports (ART) de procéder à des collectes automatisées de données publiquement accessibles sur des services numériques de mobilité.
Un avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) sera rendu sur le décret d’application du dispositif. Les collectes seront mises en œuvre de manière proportionnée et strictement nécessaire à l’accomplissement des missions de cette autorité.
Enfin, dans le domaine agricole, la commission mixte paritaire a précisé les conditions d’attribution des aides à l’installation des agriculteurs versées par les régions. Les jeunes agriculteurs et nouveaux agriculteurs pourront bénéficier de ces aides à condition de justifier de leur capacité à conduire un projet viable par la détention d’un niveau de diplôme ou d’expérience professionnelle, préalablement à leur installation.
Par dérogation à cette mesure, ce niveau pourra être atteint progressivement par le candidat au cours de l’installation.
Telles sont les principales modifications intervenues en commission mixte paritaire. Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter le texte résultant de ses travaux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Colette Mélot et M. Jacques Fernique applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis ce matin, afin que la Haute Assemblée puisse adopter les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture.
Au nom du Gouvernement, je tiens à vous remercier d’être parvenus, avec vos collègues députés, à cet accord important.
Comme vous le savez, ce projet de loi a pour objet de transposer et de mettre en œuvre un certain nombre de directives et règlements que l’Union européenne a adoptés ces trois dernières années. Il procède également à la mise en conformité de dispositions de notre droit national avec le droit de l’Union européenne, devenue nécessaire.
Le texte aborde un nombre très varié de sujets sur lesquels je ne reviens pas en détail et de manière exhaustive, puisque vous avez eu tout loisir d’en débattre.
Le projet de loi permettra, pêle-mêle, la mise en œuvre d’un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués (DLT), qui entrera en application dès le mois de mars prochain, pour une durée de trois ans.
La France s’est battue pour obtenir un régime ambitieux permettant de conduire des expérimentations à l’échelle industrielle sur les usages de la blockchain.
Le Gouvernement se réjouit ainsi de disposer d’un régime créant une zone d’expérimentation pour l’utilisation de la technologie blockchain dans le domaine des instruments financiers, ce qui est déterminant pour rester dans la course mondiale aux innovations financières.
D’ailleurs, la place de Paris pourrait aujourd’hui devenir la place financière de la mise en œuvre de ce régime pilote, ce qui lui permettrait d’en tirer un avantage comparatif substantiel.
Sur l’article 5 bis, introduit par le Sénat, qui traite de l’évolution des règles s’appliquant aux acteurs souhaitant s’enregistrer auprès de l’Autorité des marchés financiers comme prestataires de services sur actifs numériques (Psan), le Gouvernement prend acte, à regret, que l’accord trouvé entre députés et sénateurs soit plus dur, notamment en termes de calendrier, que la position du Gouvernement et des régulateurs.
Quant à l’article 8, qui prévoit de transposer la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, dite CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), en d’autres termes les rapports extrafinanciers, il a donné lieu à un vif débat ici, pour des raisons qui honorent le Parlement.
J’ai eu l’occasion il y a quelques semaines, mesdames, messieurs les sénateurs, dans le cadre d’un débat très intéressant sur la responsabilité sociétale des entreprises, de discuter longuement avec vous, dans cet hémicycle, des opportunités qu’offre cette évolution en matière de performance extrafinancière de nos entreprises.
Le Gouvernement, et moi-même en premier lieu, est satisfait que la commission mixte paritaire ait maintenu cet article et il continuera de travailler en toute transparence avec les parlementaires qui le souhaiteront sur les suites à donner à cette habilitation.
Le contenu de l’article 12 a presque intégralement évolué, puisqu’il est passé, pendant la navette parlementaire, d’une habilitation à une écriture de la transposition de la directive relative à l’accessibilité aux produits et services pour les personnes porteuses de handicap, comme le Gouvernement s’y était engagé. C’est un pas important pour nos concitoyens en situation de handicap et, de fait, pour toute la société.
Sur ce sujet, qui me tient particulièrement à cœur, nous accusons un retard collectif inacceptable. C’est pourquoi je tiens à saluer sincèrement le travail technique scrupuleux que cette transposition a exigé de vos services, comme des nôtres, mesdames, messieurs les sénateurs.
Le texte comporte par ailleurs de nombreuses dispositions ayant trait aux prérogatives des ministères sociaux. Je pense notamment à l’article 14, dans lequel figurent des mesures concernant le congé parental d’éducation, le congé de paternité, le congé de solidarité familiale et le congé de proche aidant et qui a pu évoluer dans le cadre de la navette parlementaire.
Je sais – et je vous en remercie – que vous vous êtes particulièrement investie sur cet article, madame le rapporteur, et je salue, là encore, le travail du Sénat.
L’article 23, quant à lui, autorise la ratification d’ordonnances désignant l’autorité administrative chargée de prononcer des sanctions financières dans le cadre de la surveillance du marché des dispositifs médicaux, des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, et de leurs accessoires.
Sur ce point aussi, le Sénat a ardemment travaillé pour contribuer à l’amélioration des outils de lutte contre les risques de rupture des dispositifs médicaux et à la possibilité de publier les éventuelles sanctions financières prononcées par l’autorité administrative en la matière. Le Gouvernement salue ce travail.
Enfin, le projet de loi comporte un certain nombre de dispositions relatives au secteur des transports, qui ont suscité – je l’ai noté – une mobilisation particulière de votre part, mesdames, messieurs les sénateurs, ainsi que de nécessaires mesures d’adaptation du code rural et de la pêche maritime à la mise en œuvre de la programmation 2023-2027 de la politique agricole commune (PAC), qui est un outil vital pour nos agriculteurs, comme vous le savez.
Vous l’avez compris, le Gouvernement vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, du travail accompli sur les dispositions très techniques de ce texte aussi riche que varié. Je sais que nous partageons l’ambition que ces mesures se concrétisent rapidement dans le quotidien de nos concitoyens.