M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 453, transmise à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Elsa Schalck. Madame la ministre, ma question porte sur la formation à destination des élus.
Nous savons à quel point la formation est importante ; elle est même essentielle pour exercer au mieux un mandat et les nombreuses et multiples responsabilités qui incombent désormais et de plus en plus aux maires et aux élus locaux.
La question du statut de l’élu revient régulièrement : l’une des composantes de ce statut est évidemment la formation. Or nous assistons à une baisse notable des demandes de formation de la part des élus, en raison notamment d’une complexification de la procédure d’inscription, qui exige depuis le mois d’octobre 2022 de passer par FranceConnect+. Il s’avère que la sécurisation de ce dispositif a rendu l’inscription particulièrement complexe, voire impossible, pour les élus locaux.
J’ai été alertée en ce sens par l’Association des maires du Bas-Rhin. En effet, des élus ont pu rencontrer de très nombreuses difficultés pour créer une nouvelle identité numérique, pour attester de leur identité, ou encore pour valider des données saisies.
Toutes ces démarches découragent davantage qu’elles n’encouragent, ce qui est profondément dommageable, notamment pour le bon exercice de la démocratie locale.
À l’heure où nous décomptons malheureusement près de 4 000 élus démissionnaires en trois ans, dont près de 1 000 maires, à l’heure où nous savons à quel point l’exercice de responsabilités locales est devenu difficile, délicat, mais ô combien précieux pour la vie de nos communes, il est nécessaire que les dispositifs soient simples, clairs, pragmatiques et utilisables.
Je rappellerai que les élus locaux cotisent à hauteur de 1 % pour financer ce droit individuel à la formation.
Ma question, madame la ministre, est donc très simple : comment comptez-vous faire pour améliorer ce dispositif et le simplifier ? C’est une attente très forte des élus locaux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Schalck, depuis janvier 2022, les élus peuvent directement mobiliser leur droit individuel à la formation via Mon compte élu, une plateforme numérique adossée à Mon compte formation dont la gestion est – vous le savez – assurée par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Face aux nombreuses fraudes sur la plateforme, le Gouvernement a mis en place des mesures de sécurité renforcée afin de préserver les droits des utilisateurs. Le niveau supérieur de sécurité de FranceConnect, intitulé FranceConnect+, est déployé depuis le 25 octobre 2022 pour l’achat d’une formation sur Mon compte formation et Mon compte élu.
Pour ne pas dissuader les personnes souhaitant s’engager dans une démarche de formation, un dispositif complet d’accompagnement a été mis en place par la CDC et par La Poste, adapté en fonction des besoins identifiés, parmi lesquels ceux des élus locaux.
Une communication large, comprenant des informations pratiques et des tutoriels, a été diffusée auprès des acteurs concernés. Cela reste difficile, j’en suis consciente.
Si, en dépit de ces outils, des usagers rencontrent des difficultés pour générer leur identité numérique, ils doivent se rendre dans les bureaux de poste et se faire accompagner par des conseillers numériques.
Enfin, une assistance téléphonique dédiée aux élus locaux a été mise en place : un numéro spécifique leur permet de contacter un interlocuteur pour répondre à leurs questions.
Le Gouvernement tiendra compte des difficultés engendrées par ces évolutions récentes et du temps nécessaire à l’appropriation par les élus de cette nouvelle procédure. Après concertation avec les associations d’élus, il a été décidé de relever de 700 à 800 euros le plafond des droits pouvant être détenus, afin de ne pas pénaliser les élus qui n’ont pas utilisé leurs droits en 2022 et qui bénéficieront ainsi, en 2023, d’un abondement de 400 euros portant le montant total de leur compte formation à 800 euros.
Cela étant, le travail se poursuit et l’amélioration doit devenir une réalité afin d’encourager la formation de nos élus, comme vous l’avez dit.
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, pour la réplique.
Mme Elsa Schalck. Madame la ministre, il était important de relever le plafond, mais il est précieux de lever les freins et les difficultés que les élus locaux nous relayent systématiquement et quotidiennement.
conséquences de la compensation de la baisse des impôts locaux par des fractions de taxe sur la valeur ajoutée
M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, auteur de la question n° 584, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
M. Pierre Louault. Madame la ministre, ma question porte sur les conséquences de la compensation, par l’État, de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de certains impôts locaux et de production par des fractions de la TVA. En effet, il semble que ce changement du mode de financement ne soit pas aussi optimal que souhaité.
Tout d’abord, la TVA a pris au fil des années une part de plus en plus importante dans les budgets des collectivités. Cela s’est fait au détriment de l’État qui, en 2021, ne percevait plus que la moitié des recettes totales.
Par ailleurs, la CVAE dépendait auparavant de l’activité des territoires. La suppression de cette cotisation, au moment où nous voulons faire revenir des entreprises industrielles sur nos territoires, y compris ruraux, n’incite pas les collectivités à investir en ce sens.
À cela s’ajoutent un contexte économique déjà difficile et une compensation à l’euro près de la CVAE qui tarde à venir.
La suppression de ces impôts locaux réduit fortement l’autonomie fiscale des collectivités. Cette réforme a donc créé une rupture entre fiscalité et territoire, ce qui a mené la Cour des comptes en octobre 2022 à évoquer une nouvelle proposition de réforme pour recentrer la fiscalité locale sur le bloc communal.
Pour respecter l’objectif d’autonomie financière des collectivités territoriales, j’aimerais connaître l’état de vos réflexions sur cette future réforme et les pistes que vous explorez actuellement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Louault, afin d’accroître le pouvoir d’achat des ménages et d’améliorer la compétitivité des entreprises, le Gouvernement a souhaité supprimer la taxe d’habitation sur les résidences principales pour l’ensemble des foyers fiscaux, ainsi que la CVAE.
Les communes ne perçoivent plus de taxe d’habitation sur les résidences principales depuis 2021, mais elles bénéficient en contrepartie du transfert de la taxe foncière des départements. Ce transfert a permis de préserver leur pouvoir de taux sur un montant identique à celui qui était perçu auparavant au titre de la taxe d’habitation.
Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et les départements ont perçu, en contrepartie de leur perte de taxe d’habitation et de taxe foncière, une fraction de TVA très dynamique. Celle-ci a progressé de plus de 9 % en 2022 et devrait augmenter de 6 % en 2023.
La part régionale de CVAE a été supprimée en 2021, et les régions ont perçu en contrepartie une fraction dynamique de la TVA, à hauteur de leur montant de CVAE perçu cette même année. Cette compensation est d’autant plus favorable aux régions que la TVA a progressé de plus de 9 % en 2022.
La suppression de la part de CVAE du bloc communal et des départements a fait l’objet d’une compensation par l’intermédiaire d’une fraction de TVA, là aussi dynamique. Pour tenir compte de la situation spécifique de chaque territoire, la fraction de TVA affectée au bloc communal abonde un fonds national dont un décret d’application fixera bientôt les critères de répartition.
Au total, plus de 50 milliards d’euros de TVA seront versés aux collectivités territoriales en 2023. Ils traduisent une compensation intégrale, pérenne et dynamique de la suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE.
Mais j’imagine que vous savez déjà tout cela, monsieur le sénateur !
M. le président. La parole est à M. Pierre Louault, pour la réplique.
M. Pierre Louault. Oui, madame la ministre, en effet, nous savons tout cela ! On lit aussi que la situation financière des collectivités territoriales s’est améliorée : c’est vrai pour les régions et les départements, mais beaucoup moins pour les communes et les petites collectivités locales.
Par ailleurs, cette réforme a conduit à faire perdre le lien avec les citoyens. Chaque service a un coût, mais aujourd’hui, finalement, il suffit de réclamer : personne ne sait d’où vient l’argent alors que, quand on touche au portefeuille de nos électeurs, il y a un relais direct entre le citoyen et les élus locaux !
réfaction de la taxe générale sur les activités polluantes
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 583, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Annick Billon. Madame la ministre, afin de bénéficier de la réfaction de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), le ministère de la transition écologique a imposé l’installation d’un compteur homologué avant le 31 décembre 2022. Si l’homologation du compteur de la marque Sick date de 2018, celle d’un second compteur, de marque Fuji, date de novembre 2022.
Vous n’ignorez pas que nombre d’opérateurs utilisent le compteur de marque Emerson, reconnu fiable et permettant de bénéficier de la réfaction de la TGAP jusqu’à ce jour. C’est notamment le cas du syndicat vendéen de traitement des déchets Trivalis.
Or, pour des raisons que nous ignorons, le compteur Emerson n’est pas homologué, et obligation est donc faite aux opérateurs d’investir dans un système homologué pour continuer à bénéficier de la réfaction. Avec la mise en concurrence, rendue possible seulement en novembre 2022, le temps des procédures administratives et la durée des travaux ne permettent pas l’installation de nouveaux compteurs avant le deuxième semestre 2023. En conséquence, les opérateurs pourraient être pénalisés.
De plus, cela semble peu pertinent d’imposer à des collectivités d’acquérir un nouvel équipement alors que la réfaction de la TGAP ne sera plus possible au 1er janvier 2025, soit dans moins de deux ans.
C’est pourquoi, dans un souci de maîtrise des investissements et compte tenu des délais contraints par les procédures administratives, je vous demande s’il peut être envisagé de maintenir les compteurs de la marque Emerson pour bénéficier de la réfaction de la TGAP.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Billon, vous interrogez le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, sur l’obligation pour les exploitants de décharges de disposer de compteurs de biogaz homologués pour bénéficier d’un tarif réduit sur la TGAP. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.
Il existe en effet un tarif réduit sur cette taxe lorsque l’installation valorise le biogaz capté. Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires est conscient des difficultés passées d’homologation. C’est pourquoi, avec le ministère chargé du budget, nous avons repoussé à plusieurs reprises l’entrée en vigueur de cette condition pour accéder au tarif réduit. Initialement prévue pour le 1er janvier 2020, celle-ci est entrée en vigueur le 1er janvier 2023.
Néanmoins, nous entendons vos arguments et les difficultés auxquelles les opérateurs font face. C’est pourquoi je tiens à vous informer que nous avons prévu de reporter de nouveau l’entrée en vigueur de cette obligation au 1er janvier 2024. Ce report sera officialisé par un arrêté que nous allons publier conjointement avec le ministère chargé du budget dans les prochaines semaines.
La valorisation du biogaz des décharges fait aujourd’hui partie des solutions pour limiter nos émissions de gaz à effet de serre et contribuer à notre souveraineté énergétique. Le tarif réduit de taxation en prend acte.
Je rappelle toutefois que cette réduction n’a pas vocation à durer. La généralisation du tri à la source des déchets alimentaires et des déchets verts à compter du 1er janvier 2024, prévue par la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi anti-gaspillage, et par le droit européen, conduira en effet à une montée en puissance de solutions de valorisation de ces déchets fermentescibles plus efficaces, comme le compostage ou la méthanisation.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Madame la ministre, un nouveau report à 2024, soit. Reste que la réfaction de la TGAP ne devrait a priori plus être possible à partir du 1er janvier 2025. Soit il faudra prévoir un nouveau report, soit il sera impossible de bénéficier de la réfaction : je me dis qu’il aurait été préférable de ne pas fixer de délai du tout ! Car on demande des investissements supplémentaires, ce qui conduit à alourdir les finances publiques. J’y insiste, j’aurais souhaité une suppression du délai.
transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 561, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Bruno Sido. Madame la ministre, le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement des communes ou communautés de communes a été acté par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite NOTRe. Le Sénat s’est opposé à cette réforme, car il était conscient des difficultés qui allaient se poser pour les communes rurales. Il a tenté d’obtenir le rétablissement du caractère facultatif de ce transfert à de nombreuses reprises, à l’occasion de l’examen de cinq textes différents – pas moins !
La proposition de loi déposée par M. Retailleau en janvier 2017 a été votée en février 2017, mais les députés ont renvoyé ce texte en commission.
La commission mixte paritaire sur la loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dite Engagement et proximité, n’a pas été conclusive sur ce point.
La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, n’a pas permis d’avancer sur cette question.
Ensuite, des assouplissements ont été obtenus avec le report au 1er janvier 2026 du transfert des compétences et le maintien des syndicats infracommunautaires après cette date.
Enfin, le 16 mars dernier, le Sénat a voté de nouveau à une large majorité une proposition de loi rendant facultatif ce transfert.
Madame la ministre, ce modeste texte sera-t-il mis à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, et quand ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Sido, je veux rappeler que la loi Engagement et proximité a offert de nombreuses souplesses aux élus en leur permettant de maintenir des modalités existantes d’exercice des compétences eau, assainissement des eaux usées et gestion des eaux pluviales urbaines.
L’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales a ainsi institué un mécanisme de délégation de ces compétences, qui peut être faite « au profit d’un syndicat mentionné à l’article L. 5212-1, existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans le périmètre de la communauté de communes ».
Il est important de rappeler ces assouplissements, même si je suis très au fait de ce qui s’est passé au Sénat il n’y a pas si longtemps puisque j’étais au banc des ministres !
Pour les territoires ayant utilisé ces possibilités, le mécanisme est perçu comme un moyen de maintenir des structures historiques dotées de moyens techniques et humains adaptés ou comme un moyen d’assurer la continuité du service, le temps que l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) soit en mesure de reprendre la compétence.
Lors de la présentation du plan Eau par le Président de la République et par Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, il a été rappelé le besoin essentiel de mutualisation pour la protection de nos ressources en eau. Cette mutualisation sera prochainement étudiée par une mission parlementaire au Sénat.
Le Président de la République ne veut pas revenir sur l’obligation de transfert, contrairement à ce que prévoit la proposition de loi votée au Sénat, mais il souhaite l’intégration d’une logique de différenciation. Le dialogue qui s’engage avec le Sénat est pour moi essentiel dans cette trajectoire vitale de préservation de la ressource en eau et pour son acceptation par l’ensemble des élus locaux.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour la réplique.
M. Bruno Sido. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Certes, il y a eu des assouplissements, mais vous savez comme moi que cela ne suffit pas du tout. Le prix unique de l’eau dans les communautés de communes subsiste. Des communes verront leurs prix augmenter alors que rien n’aura changé.
Permettez-moi de vous faire une proposition. Nous savons que nous manquerons d’eau, parce que le changement du climat posera des difficultés. Par conséquent, il faut trouver des solutions. Il existe dans certains départements des syndicats départementaux chargés de la production et du transport de l’eau. Pourquoi ne pas élaborer un projet de loi pour que les départements dépourvus d’un tel syndicat soient contraints d’en créer un, à charge pour les communes de distribuer l’eau ? Le problème serait ainsi réglé.
nécessité de prévoir une dérogation à l’interdiction des chauffages extérieurs pour les commerçants itinérants
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 350, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Cyril Pellevat. La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a interdit l’utilisation de chauffage extérieur dans l’espace public. L’interdiction est officiellement entrée en vigueur au mois de mars 2022, date de la publication du décret d’application de la mesure.
Si l’objectif principal était d’interdire les chauffages extérieurs en terrasse, la question des commerces non sédentaires semble avoir été occultée. Les commerçants itinérants ont en effet besoin de pouvoir se chauffer lorsqu’ils exercent leurs activités en extérieur durant l’hiver, par exemple sur les marchés. Les températures sont souvent négatives durant cette période. L’utilisation d’un chauffage d’appoint est donc indispensable pour qu’ils puissent exercer dans de bonnes conditions.
Or, puisqu’aucune dérogation à l’interdiction n’est prévue dans le décret pour ce cas de figure, de nombreux commerçants indiquent qu’il est désormais courant que la police municipale leur demande de couper leur chauffage ou leur inflige une contravention.
L’interdiction d’utiliser un chauffage d’appoint est dangereuse pour la santé de ces commerçants, certains faisant état d’engelures ou de problèmes de circulation sanguine. Étant moi-même fils de maraîcher et ayant fait les marchés pendant une trentaine d’années, je peux vous assurer que ce n’est pas un mythe.
Il y a également des conséquences pour les produits, notamment pour les denrées périssables, et pour l’activité des commerçants, puisque, dans ces conditions, il ne leur est pas possible d’exercer les douze mois pleins. Une telle baisse d’activité porte grandement atteinte à la vitalité de nos territoires ruraux dans lesquels les commerces itinérants sont essentiels pour l’accès à de nombreux produits et denrées. Les territoires de montagne sont les plus touchés, puisqu’ils enregistrent les températures les plus extrêmes.
Aussi, madame la ministre, je souhaite savoir si vous comptez prévoir une dérogation à cette interdiction des systèmes de chauffage dans l’espace public en faveur des commerçants non sédentaires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Pellevat, la Convention citoyenne pour le climat a proposé une action globale de réduction de la consommation d’énergie dans les espaces publics et bâtiments tertiaires concernant le chauffage, l’éclairage et la climatisation. Elle a recommandé « l’interdiction de chauffer les espaces publics extérieurs », source de gaspillage d’énergie. Le législateur a repris cette proposition à l’article 181 de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Le nouvel article L. 2122-1-1-A du code général de la propriété des personnes publiques dispose que « l’utilisation sur le domaine public de systèmes de chauffage ou de climatisation consommant de l’énergie et fonctionnant en extérieur est interdite ». Cette disposition a un champ large. Le législateur a posé une interdiction générale des espaces extérieurs chauffés ou climatisés couvrant tout le domaine public sans distinguer l’activité concernée.
Le décret du 30 mars 2022 relatif à l’interdiction de l’utilisation sur le domaine public en extérieur de systèmes de chauffage ou de climatisation, pris pour application de cette disposition législative, a uniquement exempté de l’interdiction les lieux couverts et fermés de manière étanche à l’air, ainsi que les installations mobiles couvertes et fermées nécessaires à l’animation de la vie locale, qu’il s’agisse des activités foraines ou circassiennes, ou des manifestations culturelles, sportives, festives, cultuelles ou politiques.
Par conséquent, les activités qui se déroulent sur le domaine public à l’air libre, comme l’activité de commerce ambulant, sont soumises à l’interdiction de chauffage extérieur. Nous en comprenons les effets. Cependant, précisons que le chiffre d’affaires des commerçants en extérieur ne devrait pas être trop touché, car cette interdiction ne vise pas l’énergie nécessaire à la production ou à la conservation des denrées vendues. Elle pénalise seulement les clients, qui doivent se couvrir un peu plus.
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.
M. Cyril Pellevat. Je vous remercie de ces éléments de réponse. Les intentions derrière le texte étaient évidemment louables, mais nous voyons des effets de bord. Pour l’avoir vécu pendant une trentaine d’années, je sais qu’il n’est pas possible d’installer des bancs et des bâches gelées avec des gants. Et les légumes, qui sont des denrées périssables, s’abîment.
Les conséquences sont donc globales. Il serait bien d’intégrer une mesure dérogatoire spécifique pour les domaines d’activité en question, notamment dans les marchés et les territoires de montagne comme le mien, où les températures sont négatives trois à quatre mois par an.
action de l’état face au retour des loups dans les bouches-du-rhône
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, auteur de la question n° 463, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Stéphane Le Rudulier. Le loup est dans la bergerie ou, plus précisément, aux portes de Marseille. Depuis des années, il avance pas à pas sur le territoire provençal jusqu’à élire domicile dans le massif des Calanques aux abords de l’agglomération marseillaise. Le premier mâle a été repéré voilà peu près deux ans, dans le massif de Saint-Cyr. Depuis, pas moins d’un couple, de cinq louveteaux et d’un mâle adulte ont élu domicile dans le parc des Calanques.
Les éleveurs et agriculteurs connaissent bien les dangers liés à la présence du loup autour de leurs pâturages et, surtout, de leurs élevages. L’agriculture extensive et le pastoralisme sont des traditions ancestrales et une part fondamentale du patrimoine immatériel de notre région. Ces traditions et ces pratiques sont désormais mises en péril par le retour du loup, entraînant un déséquilibre dans les espaces naturels.
Il est impératif que les pouvoirs publics puissent revoir les mesures d’accompagnement, notamment les dispositifs d’aide à la protection des troupeaux et les procédures d’indemnisation. Filets, gardiennage, chiens de protection, tirs d’effarouchement, prélèvements encadrés : des solutions existent.
Comment le Gouvernement compte-t-il défendre le pastoralisme ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Le Rudulier, l’action du Gouvernement concernant le loup vise à concilier les activités d’élevage et la préservation de l’espèce, strictement protégée par le droit national, européen et international. Le loup peut toutefois occasionner des dommages sur les troupeaux. Ainsi, pour soutenir l’élevage et lutter contre la prédation, le plan national d’actions 2018-2023 sur le loup et les activités d’élevage permet, entre autres, le financement de moyens de protection des troupeaux et l’indemnisation des éleveurs.
Le préfet des Bouches-du-Rhône a publié le 31 janvier 2023 un arrêté portant délimitation des zones d’éligibilité à la mesure de protection des troupeaux contre la prédation par le loup pour l’année 2023. Ce classement des communes en cercles 1, 2 ou 3, selon le risque ou l’intensité de prédation, permet aux éleveurs d’ovins et de caprins de répondre à l’appel à projets national visant à les accompagner financièrement à la mise en place de mesures de protection des troupeaux en compensant les surcoûts induits par les changements de pratiques.
Un travail de revalorisation des montants d’indemnisation des coûts directs des attaques est en cours, comprenant les animaux morts ou ayant nécessité une euthanasie et les animaux disparus non tenus en parc clos. Est également en cours une étude visant à recalculer le coût des pertes dites indirectes, consécutives à la perturbation du troupeau du fait, notamment, du stress, de la moindre prise de poids, des avortements ou de la baisse de lactation.
En complément de ces travaux en cours, conformément à la législation communautaire et nationale, des dérogations à la protection stricte du loup peuvent être utilisées. Elles permettent d’autoriser des tirs de loups dans la limite d’un plafond fixé chaque année de manière à respecter la viabilité de la population.