M. Jean-Claude Requier. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 55 rectifié est retiré.
L’amendement n° 56 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Requier, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Roux, Cabanel et Guérini et Mmes Pantel et Guillotin, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
du rivage de la mer et des rives des estuaires
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. La rédaction actuelle de l’article 44 du code des douanes précise que, pour les frontières maritimes de la zone terrestre du rayon des douanes, le champ d’action s’étend entre le littoral « et une ligne tracée à 20 kilomètres en deçà du rivage de la mer et des rives des fleuves, rivières et canaux affluant à la mer jusqu’au dernier bureau de douane situé en amont, ainsi que dans un rayon de 20 kilomètres autour dudit bureau ».
La nouvelle rédaction indique quant à elle que la zone terrestre est comprise « entre le littoral et une ligne tracée à 40 kilomètres en deçà », sans plus de précision. Ainsi, rien ne garantit que les rives des estuaires des fleuves soient incluses dans le rayon d’action des douanes.
Par cet amendement, nous voulons nous assurer que le champ d’action terrestre des douanes inclut bien ces dernières. Vous l’avez deviné : Mme Delattre, qui a déposé cet amendement, pense notamment à l’estuaire de la Gironde, dans le département dont elle est élue.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Mon cher collègue, en droit domanial, l’estuaire est une zone maritime. Il relève en conséquence de la partie maritime de la zone douanière et commence à la limite de salinité.
Les 40 kilomètres en retrait peuvent se compter à partir de tout point d’une côte : tout le territoire autour de la Gironde entre donc bien dans le rayon des douanes. Aussi, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement, car il est pleinement satisfait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Requier, l’amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 56 rectifié est retiré.
L’amendement n° 9, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
Le 4 de l’article 44,
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Ces dispositions suivent le même esprit que celles des deux amendements précédents.
Monsieur le ministre, nous vous avons demandé d’étendre le rayon des douanes à 60 kilomètres, au moins temporairement, dans les zones qui le nécessiteraient.
Bien sûr, j’entends les arguments que l’on nous oppose. Mais il faut aussi que vous entendiez ce qu’a dit mon ami et camarade Éric Bocquet : ce n’est pas un hasard si ce sont des sénateurs qui vous posent la question du périmètre.
Actuellement, huit départements sont privés de toute présence douanière et près de 50 % des préfectures et sous-préfectures sont désormais sans douanier : le périmètre n’est pas un petit sujet !
De plus, vous l’avez dit vous-même, nous y reviendrons à l’article 7, la réserve opérationnelle a vocation à faire face aux pics de charge. Mais ces derniers justifient précisément l’accroissement du nombre de contrôles. À ce titre, l’action des douaniers doit connaître le moins d’entraves possible et pouvoir se déployer dans un rayon plus vaste.
Voilà pourquoi nous persistons à penser que le rayon des douanes doit pouvoir être porté à 60 kilomètres.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. M. Savoldelli a parfaitement résumé le débat.
Le rayon des douanes est une zone d’intervention privilégiée, où les services douaniers n’ont pas à démontrer un risque de fraude ou une suspicion de trafic avant d’intervenir. Toutefois, pour des raisons de sécurité juridique et de conformité au droit européen, cette zone d’intervention généralisée doit être limitée.
J’y insiste, dès lors qu’elles peuvent démontrer un risque de fraude ou une suspicion de trafic, ou encore lorsqu’elles ont saisi le procureur de leur intention d’opérer un contrôle sous la forme d’une visite douanière, les douanes peuvent intervenir partout.
Le ministre l’a bien expliqué : nos 17 000 douaniers doivent faire face à des trafics multiformes, certains dans l’espace physique, d’autres dans l’espace numérique. Pour garantir la bonne distribution de cette ressource humaine rare et très qualifiée, mieux vaut ne pas multiplier les délimitations territoriales. L’enjeu est de préserver une souplesse d’utilisation : c’est tout le sens de l’article 60 du code des douanes, que nous allons examiner dans quelques instants.
J’émets, en conséquence, un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
I. – L’article 60 du code des douanes est remplacé par des articles 60 à 60-10 ainsi rédigés :
« Art. 60. – Les dispositions des articles 60-1 à 60-10 sont applicables pour la mise en œuvre :
« 1° De la législation douanière et la recherche de la fraude ;
« 2° Du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union et de ses règlements d’application ;
« 3° Du règlement (UE) n° 2018/1672 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union et abrogeant le règlement (CE) n° 1889/2005 ;
« 4° Des dispositions du chapitre II du titre V du livre Ier du code monétaire et financier.
« Art. 60-1. – Les agents des douanes peuvent procéder, à toute heure, à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes se trouvant ou circulant dans les zones et lieux suivants :
« 1° La zone terrestre du rayon des douanes définie à l’article 44 ;
« 2° Les bureaux de douane désignés en application de l’article 47 ;
« 3° Dans un rayon maximal de dix kilomètres autour des ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international, désignés par arrêté du ministre chargé des douanes ;
« 4° Les sections autoroutières commençant dans la zone mentionnée au 1° du présent article et allant jusqu’au premier péage se situant au-delà de la limite de cette zone ainsi que le lieu de ce péage et les aires de stationnement attenantes et celles situées sur ces sections autoroutières ;
« 5° Les trains effectuant une liaison internationale, sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà de la limite de la zone mentionnée au même 1°. Toutefois, sur celles des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte, la visite peut également être opérée entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des cinquante kilomètres suivants. Ces lignes ferroviaires internationales et les arrêts sont désignés par arrêté conjoint des ministres chargés des douanes et des transports.
« Art. 60-2. – En cas de raisons plausibles de soupçonner la commission d’une infraction mentionnée à la section 1 du chapitre VI du titre XII, au chapitre IV du titre XIV du présent code et au chapitre II du titre V du livre Ier du code monétaire et financier, les agents des douanes peuvent également procéder, à toute heure, à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes se trouvant ou circulant sur la voie publique et les lieux attenants directement accessibles au public ainsi que dans les ports, aéroports, gares ferroviaires ou routières et les trains autres que ceux mentionnés à l’article 60-1 du présent code.
« Art. 60-3. – En dehors des cas prévus à l’article 60-2, les agents des douanes peuvent procéder à toute heure à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes se trouvant ou circulant dans les lieux mentionnés au même article 60-2, pour la recherche des infractions douanières se rapportant aux marchandises mentionnées aux articles 215 à 215 ter et au 6° de l’article 427, ainsi qu’à celles expédiées sous un régime suspensif.
« Ils peuvent effectuer les mêmes actes de visite pour la recherche des délits prévus à l’article 415 lorsque les opérations financières recherchées portent sur des fonds provenant des infractions mentionnées au premier alinéa du présent article ou des atteintes à la législation sur les substances vénéneuses classées comme stupéfiants, ainsi que pour la recherche des infractions mentionnées au chapitre II du titre V du livre Ier du code monétaire et financier.
« Les opérations de visites prévues aux premier et deuxième alinéas du présent article ne peuvent être engagées qu’après information du procureur de la République, lequel peut s’y opposer.
« Si la personne concernée le demande, et dans le cas où la visite se déroule en son absence, un procès-verbal relatant le déroulement des opérations de contrôle est établi. Copie en est remise à la personne concernée et transmise au procureur de la République.
« Art. 60-4. – Aux fins de procéder à la visite des marchandises placées sous surveillance douanière en application de l’article 134 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union, les agents des douanes ont accès aux locaux et aux lieux où elles sont susceptibles d’être détenues entre six heures et vingt et une heure ou, en dehors de ces heures, lorsque l’accès au public est autorisé ou lorsque sont en cours des activités de production, de fabrication, de conditionnement, de transport, de manutention, d’entreposage ou de commercialisation. Cet accès ne s’applique pas à la partie des locaux affectée à un usage privé ou d’habitation.
« Art. 60-5. – À l’exception de ceux réalisés dans les bureaux de douane, les droits de visite ne peuvent être mis en œuvre dans un même lieu ou une même zone que pour une durée n’excédant pas, pour l’ensemble des opérations, douze heures consécutives et ne peuvent consister qu’en un contrôle des personnes dont le comportement les signale à l’attention des agents ou d’une fraction limitée du public présent ou circulant dans les lieux mentionnés aux articles 60-1 à 60-4.
« Art. 60-6. – La visite des personnes peut consister en la palpation ou la fouille de leurs vêtements, de leurs bagages ainsi que de tous autres effets personnels, à l’exclusion de toute fouille intégrale.
« Elle peut également consister, sur consentement écrit de la personne, en la réalisation d’épreuves de dépistage de substances ou plantes classées comme stupéfiants.
« Ces opérations s’exécutent dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Elles sont pratiquées à l’abri du regard du public sauf impossibilité liée aux circonstances.
« Art. 60-7. – Les agents des douanes ne peuvent immobiliser les moyens de transport et les marchandises ou maintenir à leur disposition les personnes que le temps strictement nécessaire à la réalisation des opérations matérielles de visite qui comprennent le contrôle de la marchandise, du moyen de transport ou de la personne, la consignation dans un procès-verbal des constatations faites et renseignements recueillis, ainsi que, le cas échéant, les saisies et la rédaction du procès-verbal afférent.
« Les agents des douanes peuvent prendre les mesures nécessaires et adaptées en vue d’assurer la préservation des marchandises et des moyens de transport, ainsi que la sécurité des personnes.
« Lorsque la visite s’est trouvée matériellement impossible ou que des investigations approfondies qui ne peuvent être effectuées sur place doivent être diligentées, les agents des douanes peuvent ordonner le transfert des marchandises, des moyens de transport et des personnes vers un lieu approprié.
« Au-delà d’une durée de quatre heures depuis le début des opérations de la visite, le procureur de la République en est informé par tout moyen.
« Art. 60-8. – Chaque intervention dans des locaux et lieux mentionnés aux articles 60-1, 60-2 et 60-4 se déroule en présence de la personne concernée ou de son représentant ou, à défaut, d’une personne requise à cet effet par les agents des douanes et qui ne relève pas de leur autorité administrative.
« La visite des moyens de transport a lieu en présence de leur conducteur, de leur propriétaire ou, à défaut, d’une personne requise à cet effet par les agents des douanes et qui ne relève pas de leur autorité administrative. La présence d’une personne extérieure n’est toutefois pas requise si la visite comporte un risque grave pour la sécurité des personnes et des biens. Lorsque la visite des moyens de transport a lieu en l’absence de leur conducteur ou de leur propriétaire, un procès-verbal relatant le déroulement de la visite est établi et signé, le cas échéant, par la personne requise.
« La visite des moyens de transport spécialement aménagés à usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence au moment du contrôle ne peut être faite que conformément à l’article 64.
« La visite des bagages a lieu en présence de leurs détenteurs ou, à défaut, d’une personne requise à cet effet par les agents des douanes et qui ne relève pas de leur autorité administrative.
« L’examen des marchandises et les prélèvements d’échantillons réalisés en application de l’article 189 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union s’effectuent dans les conditions prévues aux paragraphes 2 et 3 du même article 189.
« Art. 60-9. – Les agents des douanes ne peuvent recueillir des déclarations qu’en vue de la reconnaissance des objets découverts lors de la visite.
« Lorsqu’une personne concernée par la visite et suspectée d’avoir commis une infraction douanière fait l’objet d’une mesure de contrainte sur sa personne, elle ne peut être entendue selon les modalités prévues à l’article 67 F.
« Art. 60-10. – Le fait que les opérations de visite révèlent des infractions autres que celles mentionnées aux articles 60-1 à 60-4 ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. »
II. – Au II de l’article L. 251-18, au B de l’article L. 251-18-1, au premier alinéa de l’article L. 936-6 et au II de l’article L. 951-18 du code rural et de la pêche maritime, après la référence : « 60 », sont insérés les mots : « à 60-10 ».
III. – À l’article L. 112-24 du code du patrimoine, après la référence : « 60 », sont insérés les mots : « à 60-10 ».
IV. – Au premier alinéa de l’article L. 80 J du livre des procédures fiscales, après la référence : « 60 », sont insérés les mots : « à 60-10 ».
V. – À l’article 65 B et au premier alinéa du I de l’article 67 bis du code des douanes, après la référence : « 60 », sont insérés les mots : « à 60-10 ».
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tenais à intervenir sur cet article, car, élu d’un département frontalier de la Belgique – les Ardennes –, je connais assez bien l’administration des douanes. Je la connais presque depuis toujours : à Givet, la maison de mes parents était adossée à la caserne de douane ! (Sourires.)
À l’époque, il y avait beaucoup de douaniers dans cette ville, qui comptait 7 000 habitants, comme dans tout le département. Les douanes intervenaient en tout lieu et en toutes circonstances, sur les axes routiers comme ferroviaires. Elles opéraient aussi des contrôles fluviaux, puisqu’elles étaient présentes sur la Meuse.
Les douanes font partie de notre histoire et notre devoir de mémoire s’étend bien sûr à elles. Je relève d’ailleurs, à l’instar de M. le ministre et d’un certain nombre d’orateurs, qu’elles n’avaient pas fait l’objet d’un texte législatif depuis soixante ans.
L’article 2, qui assure la mise en conformité du droit de visite douanière, remplace l’article 60 du code des douanes par onze articles.
Le dispositif retenu préserve les spécificités opérationnelles de la douane et sa capacité de lutte contre les fraudes et trafics, dont le trafic de stupéfiants, que ce soit sur le territoire national ou en dehors de nos frontières. Elles s’attaquent aussi bien à la contrebande de tabac qu’à la fraude financière et aux contrefaçons. Ce sont là autant de missions de grande importance.
Soumis à l’examen de notre commission des lois, cet article garantit, enfin, le lien entre les douanes et nos autres forces de sécurité intérieure : police, gendarmerie et services de secours. Ces dispositions sont elles aussi essentielles.
Je voterai cet article.
M. André Reichardt. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° 23, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Art. 60. – Les agents des douanes peuvent procéder à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes dans les conditions prévues par le présent article et par les articles 60-1 à 60-10. Les dispositions des articles 60-1 à 60-10 sont applicables pour la mise en œuvre :
« 1° Du présent code et en vue de la recherche de la fraude ;
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Il s’agit d’un amendement essentiellement rédactionnel, déposé à la suite des modifications apportées en commission.
Selon nous, les finalités du droit de visite sont moins bien identifiées dans la version actuelle : il nous semble important de les clarifier d’entrée de jeu en précisant que, dans ce cadre, « les agents des douanes peuvent procéder à la visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes ».
Ce faisant, nous assurerons l’encadrement de ces dispositions : il s’agit d’un véritable enjeu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Ce débat d’ordre légistique n’a pas une énorme importance.
Nous reconnaissons que le Gouvernement a très bien fait de remplacer l’article 60 du code des douanes, qui était confus, par une série d’articles énumérant les étapes de l’opération de visite. Nous proposons d’ailleurs de procéder de même pour l’article 64, qui a pour objet la visite domiciliaire.
Cela étant, les objectifs du droit de visite et l’application des différentes législations sont déjà précisés à l’article 60-1 et, selon nous, c’est bien là qu’ils doivent figurer.
La commission émet un avis défavorable, mais – je le répète – cette différence d’appréciation est bien d’ordre rédactionnel : elle ne porte pas sur le fond.
Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
1° Remplacer les mots :
Dans un rayon maximal de dix kilomètres autour des
par le mot :
Les
2° Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi qu’aux abords de ces lieux
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cet amendement tend lui aussi à revenir sur une modification apportée en commission.
La notion d’« abord » des ports, aéroports et gares ferroviaires a été remplacée par un rayon de 10 kilomètres au motif que ce critère était plus clair – certains l’ont affirmé au cours de la discussion générale.
Toutefois, un tel rayon d’action a des implications très variables selon le degré d’urbanisation des territoires. Ainsi, un rayon de 10 kilomètres autour d’une gare parisienne accueillant des trains internationaux couvrirait une très grande partie de l’agglomération parisienne : les douanes y disposeraient d’un droit de visite extrêmement étendu et moins « encadré » que dans le droit commun.
Au cours de cette même discussion générale, une oratrice a estimé que le terme « abord » était flou ; or il figure déjà dans notre droit : le code des douanes et le code de procédure pénale mentionnent « l’abord des lieux ».
Cette notion me semble préférable à la règle des 10 kilomètres.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, la commission tient à sa rédaction, au nom de la clarté du droit.
Naturellement, les services douaniers ne sont pas tenus d’appliquer un rayon d’action de 10 kilomètres. Et cette notion, plus objective que celle de l’abord, est mieux à même de parer les risques contentieux.
Certes, d’autres textes emploient la notion d’abord. Toutefois, sur ce sujet, il faut observer un parallélisme avec les contrôles d’identité qu’il est possible d’opérer à proximité des ports et aéroports. Or, en la matière, c’est précisément cette limite géographique qui est prévue : elle a prouvé sa solidité.
Bien entendu, si nous ne vous convainquons pas, la discussion pourra se poursuivre au cours de la navette. Pour notre part, nous préférons retenir la base objective d’une distance kilométrique.
M. André Reichardt. Êtes-vous convaincu, monsieur le ministre ? (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur le rapporteur pour avis, j’entends vos observations. Toutefois, si j’en crois les analyses communiquées par mes services, ces dispositions posent un vrai risque de constitutionnalité.
L’adoption de cet amendement entraînerait la création d’un droit de visite extrêmement élargi, à 10 kilomètres des gares et aéroports, donc dans des zones qui ne peuvent être considérées comme frontalières. On ne peut pas dire que le centre de Paris soit aux frontières de notre pays ! La manière dont le Conseil constitutionnel pourrait considérer un tel critère nous inspire, de ce fait, de réelles inquiétudes.
La notion d’abord, qui – je le répète – figure déjà dans le code de procédure pénale et dans le code des douanes, renvoie pour sa part aux rues adjacentes des gares et aéroports.
Pour la clarté de nos débats, je tenais à apporter ces précisions avant que le Sénat ne se prononce. Le cas échéant, nous continuerons de travailler au cours de la navette parlementaire pour assurer la conformité, espérée, de ce texte à la Constitution.
Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer les mots :
, désignés par arrêté du ministre chargé des douanes
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Nous proposons de rendre systématique le rayon des douanes de 10 kilomètres autour des ports, aéroports et gares internationaux ; ce sont là autant de points d’entrée ou de transit de personnes et de marchandises. Cette extension ne serait donc plus décidée sur arrêté du ministre des finances.
Mes chers collègues, pour information, depuis une décision prise en 2017 par le ministre de l’intérieur, notre pays dénombre soixante-quatorze points de passage frontalier aérien.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des lois ?
M. Alain Richard, rapporteur pour avis. Nous avons déjà débattu de ce point : les douanes peuvent intervenir partout, dans les conditions prévues par la loi, et la zone douanière est une zone d’intervention généralisée qui n’a pas lieu d’être étendue à l’ensemble du pays.
Pour ce qui concerne les ports, l’intervention ponctuelle des douanes est possible dans le cadre d’une visite douanière. En revanche, pour concentrer les moyens dont il dispose, il est logique que le Gouvernement choisisse les ports où le trafic de marchandises est le plus intense. Il y va encore et toujours du bon emploi des effectifs de douaniers.
C’est pourquoi nous préférons laisser au ministre le soin de désigner les ports relevant du rayon douanier.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les axes secondaires ou tertiaires constituant une alternative aux axes autoroutiers dont la liste des portions est déterminée par arrêté conjoint des ministres chargés des douanes et des transports ;
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Par cet amendement, les élus de notre groupe plaident pour que les routes nationales et départementales entrent, à titre facultatif, dans le rayon des douanes. Les tronçons concernés seraient déterminés par les ministres chargés des douanes et des transports.
Sur la base d’entretiens que nous ont accordés plusieurs agents des douanes, nous dressons le constat suivant : la réduction du nombre de brigades de surveillance intérieure et le redéploiement de ces effectifs aux frontières est un phénomène structurel qui connaît une accélération préoccupante.
Le « tout frontière » revient à réduire le champ géographique d’intervention des services des douanes en restreignant leur rayon d’action.
Mes chers collègues, peut-être le raisonnement suivant est-il un peu simpliste, mais mettez-vous dans la peau d’un contrevenant : dès que vous passez les 40 kilomètres du rayon des douanes, que vous quittez l’autoroute pour rejoindre les axes secondaires ou les départementales, vous êtes presque certain de ne pas croiser un agent des douanes. Il s’agit là d’un signal grave. Une grande partie du territoire risque d’être délaissée.
En outre, entre les procédures de dédouanement simplifié ou à domicile, en suspension de droits et taxes, le travail des agents devient impossible.
Tout opérateur peut être autorisé à dédouaner à domicile, à l’importation : il faut simplement que les douanes aient agréé les locaux. Si l’opérateur recourt à une installation de stockage temporaire jusqu’à quatre-vingt-dix jours, il peut même transférer son lieu de stockage avec l’autorisation des douanes. C’est dire si la circulation des marchandises fait l’objet de nombreuses modalités dérogatoires, qui garantissent une impunité quasi totale.
L’autorisation d’opérateur économique agréé (OEA) permet ainsi aux opérateurs qui auraient prouvé leur fiabilité de « moduler le taux de contrôles physiques et documentaires » – en d’autres termes, cela signifie moins de contrôles, voire plus aucun. Elle leur assure également une priorité dans les laboratoires de contrôle, une priorité de traitement de dédouanement et la réduction des données à fournir.
Pour ces raisons, prenons garde à ne pas délaisser les routes nationales et départementales.