M. Bruno Retailleau. Il durcit la circulaire existante !
M. Gérald Darmanin, ministre. Vous ne durcissez en rien la circulaire Valls, vous créez une autre circulaire.
Vous dites vouloir lutter contre les patrons voyous : soyez cohérents, votez le rétablissement de l’article 8, que la commission a supprimé. (Marques d’amusement sur les travées du groupe GEST.)
J’anticipe sur le débat à venir : nous proposons des sanctions financières très élevées. Malheureusement, je le constate comme vous, les tribunaux judiciaires ne condamnent pas beaucoup ces employeurs, alors que nous déclenchons de nombreuses procédures avec l’inspection du travail. C’est pourquoi il est nécessaire de rétablir l’article 8.
En attendant, je donne un avis favorable sur l’amendement de la commission, qui vise à introduire un article de régularisation, ce dont je me réjouis.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Le ministre a bien expliqué comment une partie de la majorité sénatoriale s’était fait, tout de même, un petit peu rouler…
La droite a pioché dans ses fonds de tiroir et un peu aussi dans ceux du Rassemblement national pour introduire dans le texte une galaxie de dispositions, toutes plus horribles les unes que les autres. Et puis vous êtes parvenus à ce compromis politique qui crée une nouvelle façon d’obtenir une carte de séjour.
Je m’interroge toutefois sur les dispositions relatives à la vérification du mode de vie. Quels moyens l’autorité compétente déploiera-t-elle pour vérifier la compatibilité du mode de vie avec les valeurs et principes de la République ? Comment procédera-t-elle ? Quels outils de surveillance utilisera-t-elle ? Quelles seront les preuves matérielles ? Qu’en sera-t-il du respect de la vie privée ?
En outre, comme le dispositif n’est pas opposable, il est à craindre que certains ne racontent n’importe quoi. On l’a déjà vu au plus haut niveau de l’État, quand un ministre de l’intérieur a raconté n’importe quoi sur un footballeur, sur son mode vie, l’accusant d’une prétendue proximité avec les Frères musulmans, sans preuve aucune. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le ministre s’impatiente.)
Ce sont aussi de tels exemples qui viennent d’en haut qui inspirent ce genre de texte. Et à la fin, nous avons l’arbitraire de l’État, qui pourra dire n’importe quoi, puisque rien n’est opposable. Vous mettez ainsi les étrangers qui sont en France à la merci de l’arbitraire administratif !
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. J’ai vraiment l’impression d’avoir eu cinquante nuances d’explications de cet accord politique ! C’en était presque amusant… J’ai trouvé que M. Bonnecarrère était plutôt dans l’oraison funèbre, tandis que M. Henno me semblait relativement frétillant dans la brosse à reluire (Sourires sur les travées du groupe SER.), même s’il a fait preuve d’un certain humour – il en faut quand on parle de main tremblante, alors qu’on a utilisé un marteau pour détruire quelque chose…
Mais je reviens sur le fond. L’intitulé de ce texte conjugue immigration et intégration et le projet de loi porte sur le destin des étrangers en France.
Il convient donc de rappeler les faits et une note publiée par l’Insee le 30 mars dernier nous le permet, puisqu’elle porte sur les immigrés et les descendants d’immigrés. Je veux vous en livrer la substance d’autant qu’elle contraste fortement avec ce qu’on entend souvent. (Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.) Mes chers collègues, vous savez quand même ce qu’est l’Insee ! Malheureusement, il arrive souvent que de tels travaux factuels soient contestés, mais je crois vraiment que nous devons nous garder des fantasmes de l’extrême droite.
Cette note ne dit pas qu’il n’y a pas de difficultés : la population immigrée souffre par exemple de problèmes de logement et de travail ou encore d’un taux élevé de pauvreté monétaire.
Mais il n’y a pas que cela. Ainsi, le niveau de diplôme des descendants d’immigrés et leur répartition par catégorie socioprofessionnelle sont globalement très proches de la moyenne nationale ; un tiers des enfants d’ouvriers immigrés deviennent cadres ou exercent une profession intermédiaire.
On constate une nette ascension sociale qui se double d’un brassage assez rapide : plus d’un descendant d’immigrés sur deux a un parent non immigré ; la mixité des unions augmente au fil des générations et, en matière religieuse, induit une dynamique de sécularisation ; deux tiers des descendants d’immigrés vivent avec une personne sans ascendance migratoire et 90 % des descendants adultes de la troisième génération sont d’ascendance européenne.
Nous sommes donc très loin de l’invasion ! Oui, il y a des catastrophes dans l’intégration – il faut les combattre et c’est ce que nous faisons collectivement –, mais la tendance générale est encourageante. C’est ce qu’il faut retenir. Vous ne voulez pas le voir, vous le niez à travers toutes les caricatures que vous avancez. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 659 et 670.
(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 660 et 672.
(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 661 et 675.
(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 657, modifié.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains et, l’autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle qu’il s’agit d’un amendement de la commission et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 28 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 226 |
Contre | 119 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4, et les amendements nos 389 rectifié bis, 402 rectifié bis, 404 rectifié bis, 403 rectifié bis, 170 rectifié et 461 rectifié, ainsi que les amendements identiques nos 239 rectifié, 330 rectifié bis et 370 rectifié bis n’ont plus d’objet.
Mes chers collègues, je vous propose de prolonger nos débats jusqu’à deux heures du matin.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 468 rectifié ter, présenté par M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 414-13 est ainsi rédigé :
« La liste de ces métiers est établie à l’échelle régionale après avis consultatif des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (Ceser) de manière tripartite par l’autorité administrative et les organisations syndicales représentatives d’employeurs et de salariés. »
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Depuis un moment, nous parlons des personnes sans-papiers qui travaillent. D’ailleurs, on entend souvent dire qu’il y a des travailleurs sans-papiers partout, mais il semblerait que personne ne se rende compte qu’ils n’ont pas de papiers…
Il serait donc intéressant de disposer d’un rapport sur l’octroi des titres de séjour dans les métiers en tension et sur l’application des dispositifs existants et leurs limites. Ce rapport devrait également s’attacher à mesurer l’impact des régularisations sur les secteurs économiques concernés.
Un tel rapport est vraiment important. Il nous semble essentiel de prendre la mesure de ce que ces travailleurs représentent dans notre pays et de ce qu’ils apportent à notre économie.
M. le président. L’amendement n° 222 rectifié ter, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron, Temal, Marie et Tissot, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, M. Kanner, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l’article L. 414-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Après le mot : « établie » sont insérés les mots : « chaque année » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Cette liste peut être modifiée en cours d’année, à l’initiative de l’autorité administrative ou sur demande des organisations syndicales représentatives, en cas d’évolution rapide de la situation du marché de l’emploi. »
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement a pour objet de garantir que la liste des métiers en tension soit actualisée chaque année.
Tout à l’heure, Colombe Brossel évoquait les problèmes qui se posent pour définir ces métiers – on peut quand même parler d’une hypocrisie majeure en la matière.
Quoi qu’il en soit et même si notre sous-amendement n’a pas été adopté, il faut écrire dans la loi que la liste des métiers en tension doit être actualisée chaque année sur l’initiative de l’autorité administrative ou sur demande des organisations syndicales représentatives. En effet, la situation du marché de l’emploi évolue rapidement.
La liste actuelle remonte à avril 2021 et elle n’avait pas été actualisée depuis 2008 ! En novembre 2022, M. Dussopt – qui va visiblement donner son nom à une nouvelle circulaire… – avait annoncé lancer une concertation avec les partenaires sociaux pour actualiser la liste de ces métiers au début de 2023. Nous sommes en novembre et, jusqu’à preuve du contraire, nous sommes toujours sous le régime de la liste d’avril 2021, qui est déconnectée de la réalité du marché de l’emploi. On ne peut pas faire reposer la régularisation des travailleurs sur un mécanisme défaillant.
M. le président. L’amendement n° 476 rectifié bis, présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article L. 414-13, après le mot : « établie », sont insérés les mots : « et actualisée au moins une fois par an ».
La parole est à M. Olivier Bitz.
M. Olivier Bitz. Cet amendement vise également à prévoir l’annualisation de l’actualisation de la liste des métiers en tension. Il s’agit à la fois de répondre à l’invitation du Conseil d’État de cibler le nouveau dispositif sur certains métiers et certaines zones géographiques et de prévoir une remise à jour régulière de la liste. Nous voulons ainsi concrétiser la volonté du Gouvernement de procéder à une actualisation annuelle.
M. le président. L’amendement n° 393 rectifié bis, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 414-13 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au moins tous les six mois, l’autorité administrative procède, en accord avec les partenaires sociaux, à une évaluation visant à identifier des métiers et zones géographiques caractérisés par des difficultés de recrutement qui sont, le cas échéant, ajoutées à la liste de ces métiers et zones géographiques. »
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est vrai qu’il est important d’actualiser régulièrement la liste des métiers en tension, si nous voulons que le dispositif soit opérationnel.
L’amendement n° 476 rectifié bis présenté par M. Bitz nous paraît le plus adapté pour cela. Nous y sommes donc favorables et, par conséquent, l’avis de la commission est défavorable sur les autres amendements en discussion commune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 468 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 222 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4, et l’amendement n° 393 rectifié bis n’a plus d’objet.
L’amendement n° 427 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 423-18 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 423-18-… ainsi rédigé :
« Art. 423-18-…. – L’étranger qui justifie par tout moyen être dépourvu d’une protection internationale, qui ne peut pas être renvoyé dans son pays de nationalité ou d’origine pour des raisons humanitaires et risquant la mort, la torture ou tout autre traitement inhumain ou dégradant en cas de renvoi dans son pays de nationalité ou d’origine, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” d’une durée d’un an. La condition prévue à l’article L. 412-1 n’est pas opposable. »
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement a pour objet de résoudre une situation de fait que connaît M. le ministre et dont il a conscience. D’ailleurs, l’article 3 de ce texte avait pour ambition de participer à résoudre une partie de ce problème.
En France, quelques milliers de personnes ne sont ni expulsables ni régularisables. C’est par exemple le cas d’étudiantes afghanes qui sont venues en France et qui se sont retrouvées ensuite sans titre de séjour : même avec une obligation de quitter le territoire français (OQTF), on ne peut évidemment pas les renvoyer en Afghanistan. Une telle situation peut durer très longtemps.
Cela ne représente pas beaucoup de personnes, mais elles vivent dans des limbes juridiques : on ne peut ni les régulariser ni les expulser. Et la France a une position en partie irrationnelle, puisque, en ne voulant pas les régulariser, on les maintient dans la clandestinité, alors qu’on sait très bien qu’on ne peut pas les expulser.
Je sais que Mme Jourda nous accuse d’être pragmatiques, une valeur dans laquelle je peux effectivement me reconnaître, mais il faut savoir que d’autres pays européens, par exemple l’Allemagne, ont justement décidé d’avoir une approche pragmatique, en donnant accès à ces gens au marché du travail.
L’objet de cet amendement est de créer un type de carte de séjour pour les personnes qui sont dans cette situation et j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement sur cette question. Soyons honnêtes avec ces personnes : que faisons-nous d’elles ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Madame Vogel, je ne vous reproche pas d’être pragmatique ; je dis simplement que, si l’on veut faire face à la réalité, il faut avoir des principes – je pense d’ailleurs que vous en avez, mais nous n’avons pas forcément les mêmes…
En ce qui concerne les situations que vous évoquez, il existe déjà un dispositif juridique dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : l’admission exceptionnelle au séjour.
Il ne me semble pas nécessaire d’adopter une autre mesure que celle-là : le droit permet déjà de régler le type de difficulté que vous citez et qui, je le reconnais, est tout à fait réel.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 224 rectifié est présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron, Temal, Marie et Tissot, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, M. Kanner, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 470 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’étranger sollicite l’admission exceptionnelle au séjour au titre du travail, il ne peut être requis aucune pièce justificative nécessitant le concours de son employeur. »
La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 224 rectifié.
M. Jérôme Durain. Cet amendement a pour objet de garantir que le demandeur pourra prouver qu’il remplit les conditions exigées – conditions de durée de présence en France et de durée d’activité professionnelle – par tous moyens.
L’article 3 devait permettre à l’étranger de solliciter sa régularisation sans être tributaire de son employeur, comme c’est le cas aujourd’hui. La mise à l’écart de l’employeur dans la procédure de régularisation est une avancée importante de la réforme proposée, mais, en contrepartie, elle rendra nécessairement plus complexe le rassemblement de preuves attestant de la réalité de l’emploi et de sa durée.
C’est la raison pour laquelle il est indispensable de prévoir que ces preuves pourront être établies par tous moyens. Concrètement, cela signifie que le décret en Conseil d’État qui fixera les modalités d’application de cette disposition ne pourra pas établir une liste de documents autorisés.
Il s’agit d’ailleurs d’une garantie qui est mentionnée dans l’étude d’impact qui indique que l’étranger pourra attester, par tous moyens, qu’il remplit les conditions de durée, de présence et d’activité professionnelle qui sont exigées pour la délivrance du titre de séjour « métier en tension ». Formalisons-le dans la loi !
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 470 rectifié.
Mme Michelle Gréaume. Tout à l’heure, nous parlions de la circulaire Valls. Cet amendement vise simplement à se prononcer sur la fin du lien de subordination entre l’employeur et l’employé pour une admission exceptionnelle au séjour et au travail.
En effet, la circulaire Valls oblige au dépôt par l’employeur d’un formulaire administratif Cerfa, signé à la préfecture, pour engager les démarches de régularisation.
Or certains employeurs font un chantage au Cerfa ou refusent tout simplement de les signer. Il faut quand même être bien conscient qu’il existe des employeurs voyous : cela les arrange bien d’avoir des salariés à moindre coût et ils jouent sur le fait que ce sont eux qui décident s’ils veulent ou non signer le formulaire.
Prenons le cas de l’entreprise RHTT, une entreprise d’intérim située dans le Xe arrondissement de Paris et en Seine-et-Marne. Ses salariés sont en grève depuis trois semaines pour avoir ce document qui pourrait leur permettre d’obtenir un titre de séjour.
Voilà l’absurdité de la situation dans laquelle nous sommes aujourd’hui, celle d’un système qui fait le jeu de certains patrons qui, eux, s’accommodent bien du travail non déclaré à des tarifs inférieurs au minimum légal et sans payer de cotisations sociales. Voilà la réalité du terrain !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les situations qui sont évoquées ici sont réglées – peut-être pas comme vous le souhaitez ! – par l’adoption de l’amendement n° 657 de la commission.
La commission est donc défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 224 rectifié et 470 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 262 rectifié n’est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 176 rectifié est présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 439 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre IV du code du travail est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier est complété par une section ainsi rédigée :
« Section… :
« Licenciement d’un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.
« Art. L. 2411-…. – Le licenciement d’un salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions de l’article L. 8251-1 et ayant demandé la délivrance de la carte de séjour mentionnée à l’article L. 421-4-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspection du travail.
« Le délai de protection court à compter du dépôt de la demande de carte de séjour auprès de la préfecture et jusqu’à six mois après la réponse de celle-ci. » ;
2° Le chapitre II est complété par une section ainsi rédigée :
« Section… :
« Étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.
« Art. L. 2412-…. – La rupture du contrat de travail à durée déterminée d’un salarié étranger employé en méconnaissance des dispositions de l’article L. 8251-1 et ayant demandé la délivrance de la carte de séjour mentionnée à l’article L. 421-4-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspection du travail.
« Le délai de protection court à compter du dépôt de la demande de carte de séjour auprès de la préfecture et jusqu’à six mois après la réponse de celle-ci. »
La parole est à M. Sébastien Fagnen, pour présenter l’amendement n° 176 rectifié.
M. Sébastien Fagnen. Cet amendement vise à octroyer des protections supplémentaires aux travailleurs sans titre qui engageraient une démarche de régularisation afin de les protéger des éventuelles mesures de rétorsion de leur employeur.
Il peut arriver – ce n’est pas la majorité des cas – que la relation entre un employeur et un employé soit proche de celle qui prévaudrait entre un exploiteur et un exploité et on peut imaginer qu’un employeur engage des mesures coercitives allant jusqu’au licenciement du travailleur sans titre.
Par conséquent, nous vous proposons d’octroyer le statut de salarié protégé aux travailleurs sans titre le temps de la durée de l’instruction de leur demande de régularisation.
En supprimant l’article 3, notre assemblée n’a malheureusement pas reconnu celles et ceux qui sont pourtant essentiels à la croissance économique de notre pays. Ils demeureront donc invisibles aux yeux de la République. Faisons au moins en sorte de leur octroyer cette protection élémentaire, en les préservant de toute mesure de rétorsion que pourrait engager leur employeur dès lors qu’il serait informé de leur démarche de régularisation.