M. le président. Il faudrait s’acheminer vers votre conclusion, madame le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur le ministre, j’observe d’ailleurs que vous ne remettez pas en cause cet apport de la commission.
Nous avons conservé un délai de vingt et un jours entre le moment où le demandeur d’asile introduit sa demande dans le nouveau pôle « France asile » et celui où il est entendu par l’Ofpra pour développer son récit.
M. le président. Merci, madame le rapporteur !
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur le président, le rapporteur a droit à une petite minute de plus…
M. le président. Ce n’est pas dans le règlement…
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je viens de le décréter ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 326 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéa 5, au début
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le demandeur est informé que l’ensemble des démarches prévues par le présent 3° n’a pas à être effectué dès l’enregistrement de la demande d’asile, et qu’il peut contacter une association pour l’aider et l’accompagner dans ce processus.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Le délai entre la demande d’asile et l’entretien avec un officier de protection de l’Ofpra est bel et bien crucial pour le demandeur. C’est au cours de cette période qu’il peut préparer sa demande. L’Ofpra lui-même souligne que cet entretien doit se fonder sur les éléments les plus nombreux et les plus précis possible.
Or les associations qui accompagnent les demandeurs d’asile dans la constitution de leurs dossiers craignent, à juste titre, que le désir d’accélération de l’enregistrement ne se révèle tout à fait délétère. Contrairement à ce qu’avance M. le ministre, cette accélération risque fort de ne pas se faire à l’avantage des demandeurs d’asile ; à vrai dire, après leur parcours de migration, vingt et un jours de plus ou de moins importent peu : le véritable enjeu, c’est bien sûr le traitement de leur demande d’asile.
Bien accompagnées et mieux préparées, ces personnes ont de plus grandes chances d’obtenir l’asile qui leur est dû, tout simplement parce qu’elles peuvent s’expliquer plus clairement et mieux développer les raisons justifiant leur demande.
J’y insiste : réunir en un même lieu et faire déposer en même temps les demandes soumises à la préfecture et à l’Ofpra, c’est en définitive infliger une perte de chance qu’aucun gain de temps pour nos administrations ne saurait justifier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur le président, la commission émet un avis défavorable, pour des raisons très largement développées grâce au temps de parole supplémentaire que vous avez bien voulu m’accorder. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 600, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Après le mot :
mené
insérer les mots :
par un moyen de communication audiovisuelle dans les conditions prévues à l’article L. 531-21 ou
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 531-21 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :
« Art. L. 531-21. – Les modalités d’organisation de l’entretien sont définies par le directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.
« Les modalités de transcription de l’entretien personnel, les cas dans lesquels il fait l’objet d’un enregistrement sonore ou est suivi d’un recueil de commentaires, ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se dérouler par un moyen de communication audiovisuelle pour des raisons tenant à l’éloignement géographique ou à la situation particulière du demandeur, ou dans les cas prévus aux 1° et 2° de l’article L. 531-32 sont fixés par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. C’est à la suite du terrible attentat d’Annecy, perpétré contre des enfants, même contre des bébés, que ces dispositions ont été conçues.
L’auteur des faits était un demandeur d’asile qui avait déjà obtenu l’asile dans un autre pays de l’Union européenne.
Il s’agit là d’un cas de figure assez improbable – cette seconde demande d’asile n’est pas nécessaire – et d’un abus sans doute peu fréquent. Mais, à l’évidence, nous sommes face à une faille de notre droit, que l’attentat d’Annecy a mise au jour.
Nos engagements européens et internationaux nous interdisent de refuser l’asile à quelqu’un au motif qu’il l’a déjà obtenu dans un autre État d’Europe : en effet, l’asile n’est pas défini exactement dans les mêmes termes dans l’ensemble de l’Union européenne.
Cela étant, nous pouvons examiner de tels dossiers selon une procédure très accélérée. Les dispositions de cet amendement nous permettraient de le faire en visioconférence. Nous gagnerions ainsi énormément de temps.
Évidemment, la personne sera entendue. Si un doute subsiste – cette hypothèse ne nous paraît pas évidente –, s’il apparaît, par exemple, qu’elle serait mieux protégée en France qu’en Suède, l’Ofpra fera son travail.
Quoi qu’il en soit, nous devons réduire les délais de cette procédure. Celui qui a obtenu l’asile dans un autre pays européen et vient demander l’asile en France ne peut pas être renvoyé en vertu des accords de Dublin, la demande d’asile étant de nature suspensive. À l’heure actuelle, il faut cinq mois pour la traiter, au terme desquels son auteur peut encore saisir la CNDA. Une telle situation est proprement incompréhensible. (M. Roger Karoutchi acquiesce.)
Ces dispositions, respectueuses du droit d’asile, me semblent frappées au coin du bon sens. Je le répète, il s’agit d’examiner de manière accélérée la demande d’asile formulée par une personne disposant déjà du statut de réfugié dans un autre pays européen.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Un tel dispositif sort très largement du champ de l’expérimentation consentie : la commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Je m’étonne de cet avis défavorable : il s’agit là d’un enjeu important et d’un abus de droit assez classique.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Madame le rapporteur, je vous prie de bien vouloir développer votre argumentaire : pour délibérer dans de bonnes conditions, nous devons disposer d’un éclairage complet. En ce sens, nous devons comprendre l’avis défavorable émis par la commission.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il existe déjà des cas dans lesquels la visioconférence est permise, notamment pour remédier à un trop grand éloignement : c’est surtout le cas pour les demandeurs d’asile outre-mer, que l’on ne va pas faire venir à l’Ofpra en métropole.
Hormis ces cas particuliers, la position de la commission est constante sur ce sujet : l’entretien d’un demandeur d’asile avec un officier de protection de l’Ofpra est un moment particulier, qui revêt une certaine délicatesse. C’est pourquoi il est nécessaire de maintenir un entretien en tête-à-tête plutôt que de systématiser le recours à la visioconférence, d’autant que les conditions techniques qui ont été décrites sont loin d’être satisfaisantes. Nous avons tous eu recours à la visioconférence, mes chers collègues, nous connaissons les qualités de cette technologie, mais aussi ses défauts.
Par son avis défavorable sur cet amendement, la commission a donc choisi de maintenir sa position constante sur la protection que représente l’entretien en tête-à-tête.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. D’abord, le dispositif proposé est conforme à la directive européenne du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, dite directive Accueil.
Ensuite, la visioconférence ne concernera que les personnes qui, ayant déjà obtenu l’asile dans un pays de l’Union européenne, déposeraient une nouvelle demande d’asile en France. Il ne s’agit pas d’étendre la visioconférence à l’ensemble des demandes d’asile.
M. Bruno Retailleau. On a compris, le message est passé !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Décidément, la matinée est exceptionnelle : voilà deux fois que je suis en désaccord avec l’avis de la commission.
Je le dis régulièrement à mes interlocuteurs de l’Ofii et de l’Ofpra, je suis un très ferme défenseur de l’entretien individuel et de sa qualité quand il est question d’une première demande d’asile.
Néanmoins, dans ce cas précis, on parle de gens qui ont déjà obtenu le droit d’asile dans un autre pays de l’Union européenne ; nous ne pouvons pas démultiplier les procédures.
Il me semble que, dans le dispositif proposé par le Gouvernement, les garanties sont maintenues. L’entretien par visioconférence peut être parfaitement légitime. S’il y a doute, l’Ofpra décidera qu’un entretien physique individuel s’impose.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois. Pourquoi pas ?
M. Roger Karoutchi. Quoi qu’il en soit, essayons de simplifier la procédure quand il s’agit de quelqu’un qui a déjà obtenu le droit d’asile dans un autre pays de l’Union européenne.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Il s’agit bel et bien d’une journée exceptionnelle, monsieur Karoutchi, puisque, pour une fois c’est moi qui suis d’accord avec Mme la rapporteure ! (Sourires.)
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Incroyable !
M. Guy Benarroche. Je siège à la commission des lois, je vois la qualité du travail effectué.
En l’occurrence, je ne puis que partager l’avis de Mme la rapporteure sur la question de la visioconférence.
Monsieur Karoutchi, je ne sais pas si vous avez déjà assisté à des entretiens par visioconférence ; peut-être ne se pratiquaient-ils pas encore à l’époque où vous y étiez à l’Ofpra…
M. Roger Karoutchi. J’y suis encore !
M. Guy Benarroche. J’ignore depuis quand cette technologie y est employée. Pour ma part, j’ai pu assister à bien des tentatives d’entretiens par visioconférence. Toutes n’étaient pas fructueuses ; quelquefois, des incidents techniques dans les tribunaux administratifs, à l’Ofpra ou à la CNDA ont empêché leur tenue. Dans de nombreux autres cas, les traducteurs étaient non pas aux côtés des demandeurs d’asile, mais au bout d’une autre ligne téléphonique ; la qualité de la retranscription des propos était si mauvaise que l’entretien s’avérait impossible !
Cet entretien est un moment suffisamment important de la demande d’asile, suffisamment crucial pour l’exercice effectif du droit d’asile, me semble-t-il, pour que l’on évite d’utiliser un outil aussi peu fiable.
Par ailleurs, je veux apporter une précision. Aux termes de cet amendement, on pourrait avoir recours à la visioconférence non pas uniquement dans le cas que vous nous avez exposé, à savoir celui d’un demandeur auquel l’asile a déjà été accordé dans un autre pays, mais encore dans deux autres cas. Je pense notamment à celui qui est prévu au 3° de l’article L. 531-32 du Ceseda : « En cas de demande de réexamen lorsque, à l’issue d’un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l’article L. 531-42, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article. »
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je suis également membre de la commission des lois et j’ai, de manière générale, un profond respect pour les avis de nos rapporteurs, mais je ne comprends pas cet avis-ci.
Nous sommes unanimes pour dire que tout est compliqué, notamment dans les relations entre les pays ; or, par cet amendement, il nous est proposé de simplifier les choses.
Par souci d’efficacité et de simplification, je voterai donc cet amendement, des deux mains !
M. le président. L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj et Roux, Mmes Girardin et Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au sein de ces pôles territoriaux un référent “Vulnérabilités” est désigné. Cet agent est chargé de coordonner la formation de l’ensemble des membres du pôle et de mettre en place des outils destinés à garantir un accueil adapté au public fragilisé, notamment en raison de leur origine, de leur état de santé, de leur perte d’autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de leur âge. Ce public est repéré dans le cadre d’un plan Vulnérabilité.
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. L’article 19 du projet de loi a pour objet la création de pôles territoriaux « France asile », dont la finalité est d’offrir aux demandeurs d’asile un parcours administratif simplifié entre les différentes administrations compétentes, telles que les préfectures, l’Ofii et l’Ofpra.
Nous sommes, bien sûr, favorables à ce dispositif. Simplement, par cet amendement, nous proposons que soit désigné, au sein de ces futures structures, un référent « vulnérabilités », afin de pouvoir tenir compte des publics particulièrement fragiles. En effet, il paraît nécessaire de prévoir une prise en charge adaptée des migrants et notamment de ceux qui sont susceptibles de subir des discriminations dans leur parcours d’intégration.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’Ofpra accueille en permanence des publics particulièrement fragiles ; ses agents sont donc précisément formés à ces particularités.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 199, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Lors de l’enregistrement de sa demande d’asile, l’étranger est informé des langues dans lesquelles il peut être entendu à compter de l’entretien personnel mené par l’Office français de l’immigration et de l’intégration destiné à évaluer sa vulnérabilité et le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d’accueil. »
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le ministre, voici un amendement qui, peut-être, recueillera votre soutien.
Il a déjà beaucoup été question de la langue au fil de l’examen de ce projet de loi ; nous y revenons avec cet amendement, qui a pour objet de déterminer la langue dans laquelle se déroulera la procédure de demande d’asile. Il s’agit d’un sujet essentiel, car il y va du bon déroulement de la procédure de demande d’asile et du respect des droits du demandeur.
Le problème de l’article 19 est qu’il se contente d’indiquer, sans autre précision, que la langue sera déterminée après l’enregistrement de la demande et dans les meilleurs délais, sans que l’on connaisse très exactement l’ampleur de ces délais.
Nous souhaitons que la loi soit précise sur ce point et que nous n’en restions pas à l’ambiguïté de la rédaction actuelle de l’article 19. Nous proposons donc de maintenir le droit en vigueur, qui prévoit que la langue de la procédure est déterminée au moment de l’enregistrement de la demande d’asile ; cette rédaction est claire et simple.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Certes, une petite latitude demeure dans le texte de la commission quant à la détermination de la langue. Pour autant, d’un point de vue pratique, je ne vois pas quel est l’intérêt de la demande de nos collègues, qui m’apparaît de nature plutôt sémantique.
Mais je puis me tromper ; c’est pourquoi je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. Je ne saurais émettre un avis favorable sur cet amendement, madame Monier, car nous prévoyons de changer de mode de fonctionnement.
Actuellement, la personne dépose sa demande d’asile à la préfecture, des agents l’enregistrent, puis la transfèrent à l’Ofpra – à Paris ou à Fontenay-sous-Bois –, où les officiers de protection l’instruisent pour préparer l’entretien et en déterminer la langue ; au stade du dépôt en préfecture, les agents ne savent donc pas ce qui sera décidé par l’Ofpra. Évidemment, vous avez raison, madame la sénatrice, il faut dans ce cas garantir la langue dans laquelle la personne développera son récit.
En revanche, dans la procédure que nous prévoyons de mettre en place – cela a été démontré –, les agents de l’Ofpra seront présents dès le dépôt de la demande d’asile ; ainsi, le droit est très largement amélioré en faveur du demandeur d’asile. Il n’est donc guère besoin de prévoir une telle mesure, puisque l’une des missions de ces agents est justement de déterminer en quelle langue aura lieu l’entretien avec le demandeur d’asile.
Cette demande m’apparaît donc superfétatoire : elle sera totalement satisfaite, car, j’y insiste, la détermination de la langue sera faite par l’agent de l’Ofpra, en direct – si je puis dire –, alors que jusqu’aujourd’hui elle se faisait de manière décalée, après l’enregistrement de la demande en préfecture.
Notre avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est en conséquence l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Au vu de celui du Gouvernement, il est défavorable.
M. le président. L’amendement n° 156, présenté par M. Bourgi, Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lors de l’enregistrement de sa demande, l’étranger est informé de la possibilité d’être accompagné soit d’un avocat, soit d’un représentant d’une association de défense des droits de l’homme, d’une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile, d’une association de défense des droits des femmes ou des enfants ou d’une association de lutte contre les persécutions fondées sur l’identité de genre ou l’orientation sexuelle lors de l’entretien personnel prévu au même article L. 531-12. »
La parole est à Mme Karine Daniel.
Mme Karine Daniel. Le Ceseda offre à un demandeur d’asile la possibilité d’être accompagné d’un avocat ou d’un représentant d’association lors de son entretien avec un officier de l’Ofpra.
Pourtant, aucune disposition légale ne prévoit d’informer l’étranger de cette possibilité lors de l’enregistrement de sa demande.
Aussi, nous proposons que les demandeurs d’asile en soient informés, pour qu’ils puissent s’appuyer de manière formelle sur des avocats ou des associations.
C’est un amendement de bon sens, qui vise à garantir le respect du droit et de chacun.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agit d’une demande d’information, sur laquelle la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. L’amendement est satisfait, car c’est déjà le cas en pratique. Aussi, je suis plutôt d’avis d’en demander le retrait… (Murmures sur les travées du groupe SER.)
M. Patrick Kanner. Qui peut le plus peut le moins !
M. Gérald Darmanin, ministre. Pour vous être agréable, j’émets un avis favorable ! (Sourires et exclamations de satisfaction sur les travées du groupe SER.)
Mme Colombe Brossel. Bravo !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 156.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° 413 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après l’article L. 521-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 521-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 521-6-…. – Toute personne majeure dont la mention relative à son sexe à l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente peut enregistrer sa demande avec le sexe revendiqué et, le cas échéant, les prénoms correspondants au sexe revendiqué. Le cas échéant, toute personne majeure peut déclarer dans les vingt et un jours qui suivent l’introduction de sa demande d’asile auprès de l’autorité administrative compétente son identité de genre et, le cas échéant, les prénoms correspondants au sexe revendiqué pour obtenir sa modification. »
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement, déposé sur l’initiative de ma collègue Mélanie Vogel, vise à permettre l’autodétermination de genre des personnes trans dès l’enregistrement de leur demande de protection internationale auprès de l’Ofpra.
En effet, la transidentité de ces personnes n’est actuellement pas reconnue quand elles déposent une demande d’asile en France, puisque cette demande est enregistrée avec la mention de l’état civil figurant sur leur document d’identité. En d’autres termes, tous les documents établis lors de l’enregistrement portent la mention d’un sexe et, souvent, d’un prénom qui ne correspondent pas à l’identité de genre de la personne.
Cela a des conséquences sur leur affectation en hébergement et les oblige à expliquer leur situation à chaque contact avec les autorités, y compris lors de leur entretien.
Tout se passe, aux yeux des autorités et dans la lettre de la loi, comme si les demandeurs et demandeuses d’asile transgenres ou intersexes avaient pu demander la modification de leur mention de sexe à l’état civil dans leur pays d’origine, alors que ces personnes viennent justement en France parce qu’elles ont été persécutées dans leur pays d’origine.
Pour une réelle reconnaissance de l’identité de genre dès l’enregistrement de la demande d’asile, il faut permettre que la mention du sexe inscrite dans le dossier dès cette étape corresponde à l’identité de genre du demandeur ou de la demandeuse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’avis de la commission sera défavorable. En effet, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, l’un des rôles de l’Ofpra est d’établir l’état civil. C’est une mission extrêmement importante pour l’Ofpra comme pour le demandeur d’asile.
Dès lors, si nous introduisons, dès l’enregistrement de la demande, une distorsion entre l’état civil de naissance et celui qui sera inscrit dans le dossier, il me semble que nous compliquerons infiniment les choses pour le demandeur d’asile lui-même.
Mme Valérie Boyer. Bien sûr !
Mme Muriel Jourda, rapporteur. S’il veut par la suite se lancer dans une procédure de modification de l’état civil, il pourra le faire, mais il faut s’efforcer de garantir un état civil sécurisé dès le début de la procédure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 416 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
….– L’article L. 522-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par les mots : « , y compris sur la traite des êtres humains ».
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. L’année dernière, plus de 143 000 victimes de traite des êtres humains, qui se trouvaient dans une situation extrêmement délicate, ont été accompagnées par des associations, qui ont pu les protéger des organisateurs de réseaux de traite, notamment en leur proposant des solutions d’hébergement temporaire.
Le travail indispensable de ces associations mérite d’être mieux reconnu. Toutefois, elles se heurtent parfois au manque de réactivité de la part des autorités et de la justice.
Malgré deux plans d’action du Gouvernement pour lutter contre la traite des êtres humains, la réponse n’est malheureusement toujours pas à la hauteur de l’urgence.
Par exemple, les signalements, adressés au procureur de la République, de soupçons avérés de traite des êtres humains à Calais sont restés sans réponse, alors même que, peu de temps auparavant, l’État avait financé un programme de l’association France terre d’asile qui visait justement à mieux identifier les victimes de la traite.
Je pense également au manque d’attention accordé aux victimes de traite des êtres humains qui demandent l’asile. L’Ofii procède, pour chaque demandeur d’asile, à une évaluation de la vulnérabilité de la demandeuse ou du demandeur. À cette occasion, les agents sont également tenus d’identifier d’éventuelles victimes de traite des êtres humains. En raison de la nature même du crime, ces victimes sont intimidées et ont peur. C’est la raison pour laquelle un grand nombre d’entre elles n’affirment pas alors, de manière explicite et claire, qu’elles ont été victimes de la traite, ce qui rend cette identification particulièrement difficile pour les agents, et ce d’autant plus que les agents ne reçoivent pas de formation spécifique sur l’identification des victimes.
C’est bien pourquoi ma collègue Mélanie Vogel a déposé cet amendement, qui vise à faire en sorte que les agents chargés de l’évaluation de la vulnérabilité bénéficient d’une formation spécifique sur la traite des êtres humains.