Mme Audrey Linkenheld. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Barros, pour explication de vote.
M. Pierre Barros. Sur la question de l’imposition, en France, nous sommes, en effet, a priori, les champions du monde de la fiscalité, mais nous sommes aussi les champions du monde pour trouver les moyens de ne pas payer d’impôt.
En effet, lorsque l’on peut payer des avocats fiscalistes, on acquitte bien moins d’impôt. C’est une réalité, les services fiscaux le disent tous les jours.
Si nous disposons de recettes très importantes, c’est parce que nous avons un taux d’imposition lui-même très important. Toutefois, en matière d’imposition, il existe des taux, mais aussi des bases. Or le travail d’évaluation des bases n’est pas fait par l’État – nous le percevons sur des secteurs à forte valeur ajoutée en région d’Île-de-France – et, ainsi, on « s’assoit » sur des centaines de millions d’euros tous les ans.
Clairement, les entreprises ne s’acquittent pas des impôts qu’elles devraient normalement payer.
Ainsi, même si les taux sont très hauts, les bases de calcul sont si ridicules et si irréalistes au regard de la surface ou de la valeur ajoutée que le rendement de l’impôt est bien plus faible que ce qu’on pourrait en attendre.
La cause de ce manque à gagner, c’est le non-accomplissement par les services de l’État de son travail, en raison de réductions de postes ou encore du caractère pointu des sujets, qui nécessitent des vérifications.
Ce travail est, en revanche, régulièrement réalisé par les collectivités, qui ont mis le doigt sur ce problème. Cela les conduit à engager des contentieux avec les services fiscaux et l’État, seul moyen pour elles de percevoir ce qui leur est dû. Ce n’est pas normal.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je vous remercie d’avoir posé le débat en ces termes, car le niveau des prélèvements obligatoires est le cœur du mal dont souffre notre pays. (M. Bernard Jomier le conteste.)
La comparaison avec celui de nos voisins, et plus largement avec celui des autres États, suffit à montrer que notre pays prélève trop.
La question est donc non pas de prélever plus, mais de dépenser moins. S’il faut choisir, il me semble que nous devons aller dans cette direction.
Je souscris aussi à l’idée d’étudier le sujet des transferts. En effet, même si nous prélevons beaucoup, nous ne disposons pas toujours de suffisamment d’argent pour les services publics, ce qui crée un malaise dans notre pays.
Enfin, sur la question des économies à réaliser, nous sommes en quelque sorte à la croisée des chemins. Je le dis avec gravité : nous devons réorganiser notre dépense publique. Toutefois, nous ne pouvons le faire – monsieur le ministre, j’ai entendu votre réponse sur ce sujet – sans réformes structurelles. Sans cela, ce ne seront que des coups de rabot, ce qui a des limites, car on finit par gérer les pénuries, tout en continuant à dépenser beaucoup. C’est un peu ce que nous faisons avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je répondrai donc à M. le ministre : oui aux économies, mais réalisées dans le cadre de réformes structurelles. (Mme Chantal Deseyne applaudit.)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Exactement !
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, vous indiquez que le niveau des prélèvements est plus élevé en France qu’ailleurs, ce qui n’est pas faux.
Cela résulte notamment du choix fait par la France, en 1945, de se doter d’un certain modèle social, choix qui, à l’époque, rassemblait notamment les communistes et les gaullistes – je ne suis pas sûre qu’il en soit encore ainsi aujourd’hui… (Mme Béatrice Gosselin le conteste.)
Nous avons choisi d’avoir une protection sociale et des services publics de haut niveau, ainsi que de les financer par les prélèvements sociaux ou l’impôt.
Monsieur le ministre, vous ne répondez pas tout à fait au débat que nous voulons lancer ici. Nous avons démontré – à plusieurs voix – que le capital est aujourd’hui moins taxé que le travail, alors que les revenus du capital progressent plus vite que les salaires.
En conservant un niveau de prélèvements constant, nous pourrions mettre en chantier une nouvelle répartition de ces prélèvements. Or ce n’est pas ce que vous proposez, puisque vous indiquez vouloir uniquement étudier les dépenses pour essayer de les réduire.
Le maître-mot de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, décliné sur tous les tons par Mme et MM. les ministres hier lors de la discussion générale, c’est la soutenabilité. Pensez-vous que la soutenabilité doit nous conduire, aujourd’hui, à poursuivre dans une telle voie, où les revenus du capital progressent tant et plus, alors que la plupart de nos concitoyens, y compris des salariés et parfois même des couples de salariés, n’arrivent plus à vivre de leurs revenus ?
À mon sens, ce modèle n’est plus soutenable. Par conséquent, nous vous proposons de dégager des pistes afin de répartir différemment les richesses dans notre pays.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Monsieur le ministre, sans revenir sur les propos de ma collègue, auxquels je souscris totalement, je veux dire qu’il me paraît nécessaire de trouver des pistes de financement.
En effet, je vous félicite pour les économies réalisées à l’occasion de la réforme du chômage et de la réforme des retraites. Toutefois, vous avez oublié un élément : nombre de familles ont basculé dans le revenu de solidarité active (RSA), dont les départements ont la charge. Nous retrouverons donc cette question à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, c’est certain.
Ensuite, certains pays ont trouvé d’autres solutions. Je prendrai l’exemple de la Belgique, puisque je suis l’élue d’un département frontalier. En Belgique, les salaires augmentent au même rythme que l’inflation. Par conséquent, il en est de même pour les cotisations ! Voilà une piste qui pourrait être explorée.
Une autre piste serait aussi de supprimer les exonérations sur les bas salaires constamment accordées aux entreprises, ce qui encourage ces dernières à embaucher des salariés à de faibles niveaux de rémunération.
En fin de compte, monsieur le ministre, nous vous soumettons plein d’idées.
Tout cela pour vous dire que vos économies sont peut-être de fausses économies.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Notre groupe est celui qui a demandé la plus forte hausse du taux de la CSG appliqué aux revenus du capital ; aussi pourrions-nous retirer notre amendement au profit des autres si le Gouvernement faisait preuve d’ouverture en la matière.
Monsieur le ministre, j’ai écouté votre réponse, qui me semble de nature davantage idéologique que technique. (Mme la rapporteure générale sourit.) J’ai d’ailleurs pu, à cette occasion, découvrir et apprécier la qualité de vos arguments, à la fois politiques et techniques.
Mais ne nous faites pas le coup de l’équilibre !
Vous indiquiez tout à l’heure qu’il est impossible d’accéder à notre demande, car nous devons avant tout réaliser des économies.
Cependant, quand on a 3 000 milliards d’euros de dette - je le dis de manière apaisée, monsieur le ministre –, forcément, c’est que le budget est déficitaire. Par conséquent, ne nous faites pas le coup de l’équilibre pour réfuter ces amendements.
Ensuite, il me semble qu’il y a encore un loup dans ce débat. (M. le ministre délégué proteste.) Cela n’est pas grave, c’est le jeu du débat sur un projet de société.
En effet, ce qui vous bloque dans cette discussion a trait au rapport capital-travail : vous souhaitez encourager la rente.
Rappelons-nous, à propos des retraites, que le projet initial, qui n’est pas abandonné, était celui de la retraite par capitalisation. (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRCE-K.)
Il faut mettre des mots sur les choix de société qui sont faits !
Lorsque nous indiquons qu’il faut privilégier l’activité, donc l’économie, donc l’emploi, donc nos entreprises, donc les salaires, et non pas la rente – c’est une très grande différence –, la sagesse serait de nous entendre au regard de la situation dans laquelle se trouve notre pays – et peu importe que nous ne soyons pas du même bord politique. Sinon, le désordre continuera de s’accroître sur un fond d’injustice sociale.
M. Alexandre Ouizille. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Les sujets évoqués par les différents orateurs irriguent nos politiques publiques et sont au cœur de nos équilibres financiers.
Tout d’abord, deux ou trois d’entre vous ont soutenu que je défendais une position idéologique.
Mme Audrey Linkenheld. Oui !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Or je considère, pour ma part, que l’économie, ce n’est pas de l’idéologie. (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Si vous me laissez vous répondre, je pourrai vous expliquer pourquoi !
L’économie est davantage une science qu’un art. Vous accordez, me semble-t-il, une dimension artistique à l’économie, alors qu’il s’agit, au fond, d’une approche scientifique. (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Alexandre Ouizille. Incroyable !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Laissez-moi vous répondre !
En la matière, je suis agnostique et je me demande simplement si notre stratégie, conduite avec constance depuis 2017, est la bonne. C’est la seule question à se poser.
Honnêtement, chassez l’idéologie !
A-t-on réussi à faire passer le taux de chômage de 12 % à 7 % ? A-t-on créé deux millions d’emplois ? Oui ou non ? (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Pour ma part, j’évalue notre stratégie fiscale à l’aune de ses résultats.
Quel serait notre intérêt d’augmenter les impôts au risque de détruire des emplois et de casser le moteur économique ?
Ne vous en déplaise, si nous tenons un taux de croissance de 1 % en 2023, alors que nos partenaires européens sont entrés en récession, c’est grâce à la force de notre politique économique.
Si notre territoire est le plus attractif de l’Union européenne et attire les investisseurs, c’est aussi grâce à la force de notre politique économique.
Pourquoi, diable, changer de politique ? (Mmes Cathy Apourceau-Poly et Silvana Silvani s’exclament.)
Pour retrouver un taux de chômage de 11 % ou de 12 % ou pour détruire massivement des emplois ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Arrêtez un peu !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Laissez-moi vous répondre.
Il a beaucoup été question des économies à réaliser – je suis heureux que ce sujet fasse partie du débat –, mais il existe de meilleurs moyens de redresser nos finances publiques et nos finances sociales : ce sont la croissance, l’activité et l’emploi. Ils permettent de faire rentrer des recettes et des cotisations. (Mme Michelle Gréaume s’exclame.)
Ensuite, la fiscalité n’est pas une question idéologique – nous aurons peut-être l’occasion de l’évoquer la semaine prochaine – ; preuve en est la traduction, pour la première fois dans un texte national – le projet de loi de finances –, de l’accord international sur le taux minimum d’impôt sur les sociétés.
Cet accord, défendu par la France et l’Allemagne et conclu dans le cadre de l’OCDE, a fait l’objet d’une directive européenne.
En effet, certaines multinationales échappent à l’impôt et nous avons voulu résoudre ce problème. Notre approche est bien plus pragmatique sur ces questions. Ce n’est pas de l’idéologie.
Mme Corinne Féret. Si, c’est de l’idéologie !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Enfin, monsieur le sénateur Barros, vous évoquiez la perte des bases pour les collectivités territoriales et la révision des valeurs locatives, notamment des locaux professionnels et commerciaux.
Je suis en train de discuter avec les associations d’élus, que j’ai encore rencontrées lundi dernier. Une réforme est prête, mais je ne prendrai aucune décision sur ce sujet sans qu’elle soit soutenue unanimement par celles-ci. En effet, les élus locaux sont les premiers concernés. N’attendez pas que nous menions cette réforme contre leur avis. J’attends leur retour pour avancer - ou pas - sur cette réforme.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Beaucoup de choses ont été dites. Pour ma part, je reviendrai tout d’abord sur une fausse corrélation.
En effet, monsieur le ministre, vous soulignez que la baisse de la fiscalité sur les dividendes a rapporté davantage de recettes, ce qui serait donc la preuve que c’est une bonne chose.
Non, c’est uniquement la preuve d’un effet volume.
Les dividendes battent des records. Ils n’ont jamais été aussi hauts et la France est un des pays où ils explosent. Ainsi, si vous leur appliquiez un taux encore plus bas, ils pourraient encore produire davantage de recettes, en raison de cet effet volume.
Cela résulte donc non pas d’un effet prix ou de dissuasion, mais de la distribution de dividendes, à un niveau qui n’est pas soutenable, si je puis dire, au détriment d’ailleurs des investissements et, auparavant, des salaires.
En réalité, comme cela a été dit, vous avez favorisé les profits par le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), les subventions et les exonérations. C’est pourquoi, même en réduisant le taux, l’effet volume vous rapporte beaucoup.
Pour autant, il ne faut pas y voir une corrélation ; il faut plutôt y voir relation de causalité.
Ensuite, il faut tout de même arrêter avec les dépenses.
Si nous voulons réduire les dépenses, alors prenons l’engagement, ce soir, de ne plus vieillir ! En effet, s’agissant de la cinquième branche et de la CNSA, je ne vois pas comment nous allons pouvoir réduire les dépenses.
Il s’agit d’un problème non pas tant de dépenses – qui peut être décliné pour toutes les branches –, mais d’affectation de ressources – c’est encore plus évident pour la cinquième branche.
Si vous ne voulez pas taxer davantage, ne vieillissez plus !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. L’économie, ce n’est pas de l’idéologie. Il faut tout de même dire les choses.
M. Daniel Chasseing. Vous évoquez les dividendes. Toutefois, nombre de petites et moyennes entreprises (PME) ou de très petites entreprises (TPE) ne versent pas de dividendes et n’ont vraiment pas besoin d’être taxées davantage si elles veulent survivre.
Mme Silvana Silvani. Il ne s’agit pas de cela !
M. Daniel Chasseing. En 2000, en France, la part de l’industrie dans le produit intérieur brut était de 18 %, comme en Allemagne, contre 13 % aujourd’hui et 23 % en Allemagne. Pourquoi ? Pendant que nous détruisions des entreprises, l’Allemagne les favorisait. En effet, les entreprises, c’est de la richesse et c’est de l’emploi.
Le CICE, qui a été précédemment évoqué, a été créé par François Hollande. Le Président de la République, Emmanuel Macron, et le Gouvernement ont poursuivi dans cette voie en réduisant les charges. Or, entre 2012 et 2017, le solde entre créations et disparitions d’entreprises était négatif de 300 ; depuis 2018, il est positif de 300. Cela signifie qu’on a favorisé l’emploi et, partant, accru le nombre de cotisants au profit des caisses de retraite, de protection sociale et de celles de l’État.
C’est par l’entreprise qu’on créera des richesses et de l’emploi.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 722 rectifié bis et 891 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 550 rectifié, présenté par MM. Durox, Szczurek et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 2° du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « et à 11 % pour les personnes dont les revenus définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts perçus l’avant-dernière année excèdent 60 000 euros par foyer fiscal ».
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Nous le savons tous, et certains l’affirment haut et fort sur ces travées : depuis six ans, la politique du Président Macron a toujours consisté à taxer les Français qui travaillent et à alléger la pression fiscale sur les hauts revenus et sur le capital.
Cette injustice, propre à son statut de « Président des riches », voire des très riches, doit cesser.
C’est pourquoi les signataires de cet amendement proposent un mécanisme simple qui vise à réduire une situation rendue anormale depuis la mise en place du prélèvement forfaitaire unique, qui a donc soulagé les plus gros patrimoines et, par la même occasion, diminué les ressources de l’État.
Ainsi, nous estimons qu’un foyer fiscal, dont les revenus fiscaux du capital s’élèvent à 60 000 euros par an, doit voir son taux de contribution fixé à 11 %. Cette mesure de justice sera, sans aucun doute, soutenue sur ces travées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 1207 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane, Ouizille et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mme Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant le rendement de la contribution sociale généralisée et de la contribution du remboursement de la dette sociale payées par les Français établis hors de France.
Ce rapport évalue le rendement de la contribution sociale généralisée et de la contribution du remboursement de la dette sociale au budget de la sécurité sociale et précise le montant perçu par type d’imposition.
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Tout à l’heure, nous avons eu un long débat sur la CSG-CRDS payée par les Français qui ne sont pas établis au sein de l’Union européenne.
Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement, précisément afin d’évaluer le rendement exact de cette CSG-CRDS payée par les Français qui sont établis hors de France.
Cela nous paraît important pour la transparence du débat public et s’inscrit dans nos propositions relatives à la recherche de financement pour la Caisse des Français de l’étranger, puisqu’il s’agit de cotisations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission est généralement défavorable aux demandes de rapport, et c’est le cas encore aujourd’hui. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 525 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Aux quatrième, cinquième et neuvième alinéas, le montant : « 24 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € » ;
2° Aux cinquième et neuvième alinéas, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 35 % ».
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Les retraites chapeaux, dont les contributions spécifiques sont définies à l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, sont un dispositif de retraite supplémentaire que certaines entreprises accordent aux salariés occupant en leur sein les plus hauts postes.
Le montant, fixé à l’avance, de la retraite chapeau est en général déterminé en fonction de l’ancienneté et du traitement de son bénéficiaire. J’y insiste : seuls les salariés les plus haut placés, à commencer par les PDG, sont éligibles à un tel dispositif.
Mes chers collègues, souvenez-vous des fameux parachutes dorés : ce scandale a profondément choqué les Français après la crise de 2008.
Un dispositif de participation financière au système de retraite avait certes été voté pour les retraites chapeaux, mais la situation économique actuelle, marquée par la dégradation générale des niveaux de vie, appelle un nouvel effort en ce sens.
Face au déséquilibre structurel de la branche retraite, que la réforme injuste du Gouvernement n’a en rien réglé, nous pensons que les personnes les plus favorisées doivent participer à la juste hauteur au financement de notre système de retraite.
Cet amendement vise donc à redéfinir les plafonds et taux de la contribution applicable aux retraites chapeaux. Nous souhaitons plus précisément limiter l’actuel taux de 14 % à la part de ces rentes inférieure ou égale à 10 000 euros par mois et porter de 21 % à 35 % le taux applicable au-delà de ce seuil.
Mme la présidente. L’amendement n° 892 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux quatrième, cinquième, huitième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 24 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € ».
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le ministre, je crois que ces dispositions vont vous plaire. (Sourires sur les travées du groupe CRCE-K.) Elles sont en effet de nature à vous procurer beaucoup de recettes supplémentaires, si bien que vous n’aurez plus à puiser dans les ressources de l’Unédic ou de l’Agirc-Arrco.
Cet amendement a pour objet le régime de retraite supplémentaire dit « de l’article 39 », autrement dit les retraites chapeaux des patrons des grands groupes.
Nous avons longuement parlé des retraites au printemps dernier ; mais, étrangement, les retraites dorées des dirigeants du CAC 40 n’ont été que très peu évoquées.
Ces derniers mois, plusieurs grands patrons du CAC 40 ont pris leur retraite ; ou, pour être plus précis, ils ont cédé la direction opérationnelle de leur groupe tout en restant, au moins provisoirement, actionnaires principaux ou membres du conseil d’administration.
Selon le site de l’Observatoire des multinationales, ces néoretraités ont largement de quoi couler des jours paisibles.
Le dispositif des retraites chapeaux devait disparaître sous sa forme traditionnelle en 2019. Les patrons en fonction continuent toutefois d’en bénéficier.
En outre, des journalistes de L’Humanité ont passé en revue les documents d’enregistrement universel de tous les grands groupes du CAC 40 : ils ont pu constater que, derrière les mesures d’affichage, la pratique des retraites chapeaux perdurait dans les faits.
Avec l’envol des dividendes et des rémunérations, les retraites des dirigeants des très grandes entreprises continuent de planer dans la stratosphère.
M. Jean-Paul Agon, ex-PDG de L’Oréal, pourrait ainsi prétendre à une retraite chapeau de 1,6 million d’euros par an, soit quatre-vingt-huit fois la pension moyenne d’un Français ou d’une Française. M. Benoît Potier, ancien PDG d’Air Liquide, touche quant à lui plus de 1,6 million d’euros de revenus annuels ; M. Denis Duverne, qui vient de quitter la présidence du conseil d’administration d’Axa,…
Mme la présidente. Veuillez conclure, chère collègue !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … a fait valoir son droit à une retraite chapeau de 750 000 euros annuels.
Voilà, monsieur le ministre, de quoi nourrir des recettes supplémentaires !
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 801 rectifié bis est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 1202 rectifié est présenté par MM. Ouizille et Jomier, Mmes Poumirol, Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début des cinquième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 801 rectifié bis.
Mme Raymonde Poncet Monge. À l’heure actuelle, le taux de la contribution due par les bénéficiaires de telles rentes sur la part supérieure à 24 000 euros par mois – entre parenthèses, ce montant représente neuf fois le salaire médian et sept fois le salaire moyen dans notre pays – est de 21 %.
Monsieur le ministre, par cet amendement, nous proposons de porter ce taux à 30 %. Vous ne l’estimerez sans doute pas confiscatoire, le taux de prélèvements obligatoires s’établissant en France, selon vos propres dires, à 45 %.
Un taux de 30 % permettrait non seulement de faire enfin contribuer les plus aisés selon leurs moyens, mais aussi de rendre moins attractif le recours à ce dispositif pour les rentes très élevées.
Nous souhaitons rendre le financement de la sécurité sociale plus juste à l’heure où le Gouvernement propose, pour sa part, un PLFSS insuffisant face aux besoins qui se font jour.
Prenant au mot le Conseil d’orientation des retraites (COR), les élus du groupe écologiste avaient déjà présenté cet amendement lors de l’examen de la réforme des retraites, au printemps dernier.
Le COR – je le rappelle – soulignait que le déficit du système de retraite était principalement dû non à la dynamique des dépenses, mais à un manque de recettes. Il préconisait ainsi la recherche de nouveaux modes de financement. Mal lui en a pris : votre gouvernement a veillé, par une prompte nomination, à ce qu’une telle marque d’indépendance ne se reproduise pas.
Ces nouveaux modes de financement sont d’autant plus indispensables que le report de l’âge légal n’aura, in fine, que des effets limités sur le déficit de la branche vieillesse ; la Cour des comptes l’a souligné dans son rapport de cette année sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale.
Loin de moi l’idée de vouloir provoquer un choc fiscal à Bernard Arnault… (Sourires sur les travées du groupe GEST.) Nous proposons simplement de taxer ces retraites extrêmement élevées à hauteur de 30 %. Une rente de 24 000 euros mensuels, et non annuels, passerait ainsi à 16 800 euros, ce qui n’a vraiment rien de confiscatoire.