M. le président. L’amendement n° 23 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet et Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Après la référence :

II

insérer les mots :

ou qui agissent de facto sous le contrôle d’un État étranger

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement vise à prendre en compte le cas des acteurs qui agissent de facto sous le contrôle d’un État étranger.

Je sais que la commission n’est pas emballée par cette proposition, qui s’inspire directement du chapitre 3 du rapport de l’OCDE, lequel précise que le mandat peut être verbal ou écrit, mais que les personnes peuvent aussi agir « de facto sous le contrôle d’un État étranger ». Il me paraît donc intéressant de le préciser dans le texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Si la source de notre collègue est le rapport de l’OCDE, il n’en reste pas moins que cet amendement tend à introduire une notion assez floue et très peu juridique, à savoir la locution de facto.

Au surplus, cet amendement est satisfait par la rédaction actuelle puisque l’élément intentionnel qui justifie l’inscription dans le registre vise toute personne « agissant sur l’ordre, la demande, ou sous la direction ou le contrôle d’un mandant étranger ».

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

Mme Nathalie Goulet. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 23 rectifié est retiré.

L’amendement n° 5, présenté par M. Durain, Mmes G. Jourda et de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme Carlotti, M. Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Harribey, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Ros, M. Vallet, Vayssouze-Faure, Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Supprimer les mots :

et aux fins de promouvoir les intérêts de ce dernier

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Ce premier amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à clarifier les critères permettant de déterminer qui est agent d’influence pour le compte d’une puissance étrangère et qui ne l’est pas.

Le texte retient aujourd’hui deux critères : un agent d’influence est soit une personne qui agit sur ordre, sur demande ou sous le contrôle d’un mandant étranger ; soit une personne qui agit dans le but de promouvoir les intérêts de ce mandant.

Au travers de cet amendement, il s’agit de supprimer ce second critère, qui nous paraît redondant avec le premier. Un individu qui exerce son activité d’influence sur ordre, sur demande ou sous le contrôle d’un mandant étranger le fait nécessairement dans le but de promouvoir les intérêts de ce mandant. On n’agit pas sous l’ordre d’une personne pour contrarier ses intérêts, cela semble assez évident.

Si nous proposons de supprimer la mention de « promotion des intérêts du mandant », c’est non pas simplement pour des raisons d’esthétique juridique, mais par souci de clarté et d’efficacité juridique. En conservant cette mention, on prendrait le risque qu’une personne agissant sur ordre d’un mandant étranger argue du fait qu’elle agit non pas pour les intérêts de son mandant, mais pour ceux d’un tiers. Le danger, on le comprend bien, est ici de contourner le dispositif dont nous sommes en train de discuter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nos collègues souhaitent assouplir les conditions déclenchant les obligations d’inscription dans le répertoire en supprimant la mention « aux fins de promouvoir ses intérêts ». Or l’ensemble des critères fixés sont cumulatifs et permettent d’éviter d’ouvrir trop largement cette obligation déclarative, ce qui risquerait de rendre le répertoire beaucoup moins opérationnel et utile.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 8, présenté par M. Durain, Mmes G. Jourda et de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme Carlotti, M. Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Harribey, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Ros, M. Vallet, Vayssouze-Faure, Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Le Président de la République ;

La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Cet amendement, comme les deux suivants, est important pour la portée du texte que nous sommes en train d’examiner.

Le dispositif en faveur de la transparence sur les activités d’influence est intéressant, mais il est incomplet puisque plusieurs personnes publiques de haut rang ou catégories de personnes publiques ne sont pas incluses dans la liste des cibles des agents d’influence. C’est le cas du Président de la République, qui est l’objet de ce premier amendement.

Le texte, tel qu’il a été modifié par Mme la rapporteure, ne prend en compte que les actes d’influence exercés à l’égard d’anciens Présidents de la République et non ceux exercés à l’égard du Président de la République en exercice.

On nous oppose – nous connaissons cet argument – qu’une telle disposition serait contraire à la Constitution. En effet, le statut du Président de la République relève de la seule Constitution. Or cet amendement ne tend nullement à modifier son statut. S’il était adopté, le Président de la République ne serait pas soumis à des obligations déclaratives nouvelles ou supplémentaires.

Notre amendement ne vise à créer des obligations que pour les agents d’influence agissant pour le compte d’un mandant étranger. Il tend à leur imposer de s’enregistrer auprès de la HATVP, de déclarer les actions qu’ils ont entreprises à l’égard du Président de la République et surtout d’indiquer au nom de qui ils agissent.

Nous parlons ici non pas de relations diplomatiques d’État à État ou de chef d’État à chef d’État, mais de tentatives par des organisations étrangères d’influencer la conduite des politiques publiques. Il s’agit non pas de trahir des secrets d’État, mais de prévenir les plus hauts responsables publics de notre pays et de les protéger contre les influences étrangères.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise à élargir la liste des cibles de l’influence étrangère au Président de la République alors même que son statut et son immunité sont constitutionnellement garantis. J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. En complément de ce que vient d’indiquer Mme la rapporteure, je précise que, dans son avis sur la loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (Sapin 2), le Conseil d’État avait indiqué que le statut du Président de la République relevant de la seule Constitution, il n’était pas possible au législateur de l’inclure dans la liste des cibles des représentants d’intérêts.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 8.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 9, présenté par M. Durain, Mmes G. Jourda et de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme Carlotti, M. Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Harribey, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Ros, M. Vallet, Vayssouze-Faure, Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Un membre du Conseil constitutionnel ;

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Cet amendement s’inscrit dans le prolongement du précédent. Il vise à protéger les membres du Conseil constitutionnel contre les activités d’influence qui les cibleraient pour tenter d’influer sur la vie publique.

Les décisions du Conseil constitutionnel peuvent avoir un effet significatif sur la conduite des politiques publiques, comme en témoigne sa décision sur la funeste loi Immigration. Dès lors, comment peut-on croire que les membres du Conseil constitutionnel ne puissent pas être la cible d’agents d’influence agissant sur ordre de mandants étrangers ?

On nous répondra sans doute que cet amendement n’est pas conforme à la Constitution au motif que l’organisation et le fonctionnement du Conseil constitutionnel relèvent de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel.

Mais, là encore, inscrire les membres du Conseil constitutionnel dans la liste des cibles d’activités d’influence ne modifierait en rien ni l’organisation ni le fonctionnement du Conseil constitutionnel en tant qu’institution. Quant à ses membres, ils ne seraient pas non plus soumis à de nouvelles obligations déclaratives.

S’il était adopté, cet amendement aurait pour seule conséquence juridique d’obliger les agents d’influence à déclarer leurs activités lorsqu’elles concernent un membre du Conseil constitutionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le raisonnement est le même que pour le Président de la République. Nos collègues souhaitent étendre la liste des cibles de l’influence étrangère aux membres du Conseil constitutionnel. Cela touche donc bien à leur statut, constitutionnellement garanti dans une loi organique.

J’émets donc également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 7, présenté par M. Durain, Mmes G. Jourda et de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme Carlotti, M. Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Harribey, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Ros, M. Vallet, Vayssouze-Faure, Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Remplacer les mots :

ou sénatoriales

par les mots :

,sénatoriales ou européennes

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Sur l’initiative de Mme la rapporteure, la commission des lois a souhaité étendre la liste des cibles de l’influence étrangère et aller plus loin que les règles fixées en matière de représentation d’intérêts dans la loi Sapin 2 en y ajoutant les candidats déclarés à une élection nationale – autrement dit législative ou présidentielle – à compter de la publication officielle des listes des candidats déclarés.

Nous avons approuvé cet élargissement, mais nous regrettons fortement qu’il ne concerne que les élections nationales et que les candidats aux élections européennes ne soient pas pris en compte.

Autant il est logique de ne pas prendre en compte les parlementaires européens, dont le régime relève du droit de l’Union européenne, autant rien ne fait obstacle à ce que les candidats soient pris en compte dans ce texte.

La qualité de candidat aux élections européennes relève de la loi du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen, donc du droit national. Dans la période qui court de la publication officielle de la liste des candidats à l’élection elle-même, c’est bien le droit national qui prévaut puisque chaque pays organise le scrutin européen selon ses propres règles.

En conséquence, la prise en compte des candidats aux élections européennes est tout à fait possible d’un point de vue juridique. Elle est surtout politiquement indispensable.

Les actions d’influence étrangères à destination des élus européens ont été parfaitement documentées, notamment par la commission spéciale sur l’ingérence étrangère du Parlement européen, présidée par Raphaël Glucksmann.

Ces stratégies d’influence sont engagées avant même les scrutins, quand les intéressés ne sont encore que candidats. Ce serait donc une erreur de ne pas les prendre en compte, erreur ou oubli que nous proposons ici de corriger.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission des lois et la commission des affaires étrangères ont débattu de l’élargissement des cibles de l’influence aux députés européens. Nous avons considéré qu’ils étaient protégés par les réglementations applicables au Parlement européen, mais la question des candidats aux élections européennes se pose effectivement.

Le Gouvernement pourra utilement nous préciser si l’Union européenne assure déjà un tel type de contrôle pour ces candidats, qui peuvent eux aussi être soumis à des opérations d’influence dans le cadre de leur campagne électorale. Je m’en remets donc à son avis !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Il est souhaitable que la liste des cibles des activités d’influence puisse être étendue aux candidats aux élections européennes. Cette liste couvre déjà les candidats déclarés aux élections présidentielles, législatives ou sénatoriales.

Les candidats aux élections européennes peuvent être directement exposés aux activités d’influence et aux tentatives d’ingérence étrangère, et ce alors même qu’ils participent à l’édiction de normes directement applicables au territoire national. Il est donc pertinent de les inclure dans le dispositif instauré par la proposition de loi.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet et Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Organisant des voyages à destination des élus ou des socioprofessionnels.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. En déposant cet amendement de précision, j’avais clairement en tête l’exemple d’un organisme qui organise des voyages à destination des parlementaires, des élus et des socioprofessionnels sans être inscrit sur la liste de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Il m’a semblé intéressant de mentionner cette activité dans la liste prévue à l’article 1er.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Votre amendement est déjà satisfait, ma chère collègue.

En effet, le fait d’organiser des voyages à destination des élus ou des socioprofessionnels équivaut à entrer en communication avec eux. Cette activité est donc déjà couverte par le dispositif voté en commission.

Par conséquent, je sollicite le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° 1 rectifié est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 6 est présenté par M. Durain, Mmes G. Jourda et de La Gontrie, MM. Temal et Bourgi, Mme Carlotti, M. Chaillou, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Harribey, MM. P. Joly et Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Marie, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Ros, M. Vallet, Vayssouze-Faure, Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 53 est présenté par M. Savoldelli, Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Alinéa 22

Supprimer les mots :

, à l’exclusion des États membres de l’Union européenne

II. - Alinéa 24

Supprimer les mots :

, à l’exclusion de ceux issus des États membres de l’Union européenne

La parole est à M. Jérôme Durain, pour présenter l’amendement n° 6.

M. Jérôme Durain. Cet amendement porte sur un sujet complexe : les activités d’influence menées pour le compte d’États membres de l’Union européenne. Cette question comporte deux volets : un volet politique et un volet juridique.

Sur le plan politique, personne ne peut sérieusement défendre l’idée selon laquelle les États membres de l’Union européenne, par nature, n’exerceraient pas des activités d’influence à l’égard de leurs partenaires, y compris la France.

Les États membres de l’Union européenne sont des partenaires, mais il n’est pas illégitime entre partenaires d’exiger la plus grande transparence et de requérir de ceux qui exercent des activités d’influence auprès de nos responsables publics au nom de ces États membres qu’ils déclarent leurs activités !

L’assujettissement à ce répertoire, y compris pour ceux qui agissent pour le compte d’un État européen, n’est ni une sanction ni une mesure de défiance ; c’est une simple mesure de transparence. Ce n’est pas illégitime, je le répète, y compris entre partenaires. Sur cet aspect des choses, je pense que nous pouvons être globalement d’accord.

Le principal argument opposé à cet amendement est juridique, en ce qu’il serait contraire au droit européen. Nous sommes prêts à étudier cette question pour peu que l’on nous explique concrètement en quoi l’intégration des États européens au dispositif contreviendrait au droit de l’Union européenne.

M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 53.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Notre amendement vise à supprimer l’exception pour les ingérences des États membres de l’Union européenne.

Lors des débats sur la loi de programmation militaire, nous avons à maintes reprises fait part de notre inquiétude face à la montée alarmante de l’extrême droite dans plusieurs pays de l’Union européenne, tels que le Danemark, la Suède, l’Italie ou encore la Hongrie. Cette montée en puissance constitue une menace tangible pour notre sécurité nationale et pour nos valeurs démocratiques.

L’argument en faveur de l’exclusion des États membres de l’Union européenne repose sur l’idée que nous partageons des valeurs communes, mais la réalité politique actuelle démontre une divergence inquiétante de valeurs et de principes.

L’essor de l’extrême droite, qui défend des positions nationalistes, xénophobes et autoritaires, va à l’encontre des idéaux de solidarité, de tolérance et de respect des droits humains fondamentaux qui forment le socle de notre démocratie.

La présence croissante de ces mouvements au sein de certains gouvernements européens crée un terrain fertile pour les ingérences étrangères. Ces gouvernements peuvent être tentés de nouer des alliances ou d’accepter des soutiens extérieurs.

Présumer que nous sommes immunisés contre les ingérences étrangères serait une grave erreur et témoignerait d’une grande naïveté. La montée de l’extrême droite exige une vigilance accrue.

Mes chers collègues, je vous invite à voter cet amendement afin d’envoyer un signal fort : la France est résolue à préserver l’intégrité de sa démocratie. Affirmons que la vigilance ne connaît pas de frontières et que la justice ne souffre aucune exception !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous comprenons l’objectif des auteurs de ces amendements.

Néanmoins, le risque d’inconventionnalité est élevé. En effet, dans une décision relative à la Hongrie, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que de telles restrictions se heurtaient aux obligations qui incombent aux États membres au titre de la liberté de circulation des capitaux énoncée à l’article 63 du traité fondateur de l’Union européenne et qu’elles étaient contraires aux articles 7, 8 et 12 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 et 53.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par Mmes N. Goulet et Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Après le mot :

étrangers

insérer les mots :

y compris les partis et mouvements en exil et/ou bénéficiant de l’asile politique

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Victoire de l’optimisme sur l’expérience : je vous propose de compléter l’alinéa 24 de l’article pour préciser que les partis et mouvements politiques en exil ou bénéficiant du statut de réfugié sont tenus de respecter les mêmes règles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cette mention apparaît superfétatoire, puisque, qu’ils soient à l’étranger ou en France, les partis et groupements politiques étrangers sont déjà couverts par les dispositions.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 51, présenté par M. Savoldelli, Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 25

Rédiger ainsi cet alinéa :

« III. – Ne sont pas des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandant étranger, au sens de la présente section : les membres du personnel diplomatique et consulaire en poste en France dûment habilités, les membres et les agents d’un État étranger, les journalistes, au sens de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, les organes de presse, au sens de l’article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme juridique de la presse, ainsi que les services de communication audiovisuelle, au sens de l’article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les avocats, lorsqu’ils réalisent des prestations de conseil juridique ou d’assistance des parties devant les juridictions, les organismes juridictionnels, disciplinaires ou autorités administratives. »

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Notre amendement tend à ajouter dans le champ des personnes exclues de la catégorie des représentants d’intérêts agissant pour le compte d’un mandat étranger les journalistes et les organes de presse, notamment.

Croire que l’on peut lutter contre la propagande de guerre par la censure constitue une faute lourde. Le combat pour un journalisme libre passe nécessairement par celui contre toute forme d’ingérence des détenteurs de pouvoir, quels qu’ils soient. Ce n’est pas évident en temps de paix ; ce l’est encore moins en cas de conflit armé.

À cet égard, la censure gouvernementale des chaînes d’État russes Russia Today (RT) et Sputnik sur le territoire de l’Union européenne après l’invasion de l’Ukraine aurait dû choquer les démocrates que nous sommes.

Dans une démocratie, la liberté d’expression, fût-elle propagandiste, est protégée, et pas seulement pour ce qui fait consensus. La Cour européenne des droits de l’homme rappelle souvent que cette liberté vaut aussi pour les propos et idées « qui heurtent, choquent ou inquiètent ».

Cela n’a pas empêché le Conseil européen d’adopter, en mars 2022, un règlement établissant la censure sur tout le territoire de l’Union européenne et sur tout support de six chaînes russes. Pour la première fois depuis des dizaines d’années, des gouvernements se sont attribué le pouvoir de fermer des médias, en contradiction totale avec les standards juridiques européens.

Par ailleurs, mes chers collègues, face à la désinformation, la censure est inefficace : RT et Sputnik sont toujours accessibles via des plateformes de vidéo en ligne ! Elle est contre-productive et nourrit le complotisme. Surtout, elle porte atteinte aux libertés fondamentales.

Le véritable antidote à la désinformation est non pas l’interdiction des médias, mais un audiovisuel public fort. Or la réforme envisagée en France risque de l’affaiblir davantage.

Si la vérité est la première victime de la guerre, c’est aussi parce que les belligérants, quel que soit leur camp, y trouvent leur intérêt, au mépris des citoyens et de l’information, même biaisée.

Cet amendement a pour objet de protéger le droit fondamental qu’est la liberté d’expression.

M. le président. Les amendements nos 2 rectifié et 27 sont identiques.

L’amendement n° 2 rectifié est présenté par M. Favreau, Mme Aeschlimann, M. Belin, Mme Belrhiti, M. Panunzi, Mme M. Mercier, M. Khalifé, Mme Micouleau, MM. Pellevat, Saury, D. Laurent, Naturel, Reynaud, Genet et Sido et Mme Berthet.

L’amendement n° 27 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 25

Compléter cet alinéa par les mots :

et les avocats, lorsqu’ils réalisent des prestations de conseil juridique ou d’assistance des parties devant les juridictions, les organismes juridictionnels, disciplinaires ou autorités administratives

L’amendement n° 2 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 27.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à dispenser les avocats de l’obligation d’inscription au répertoire afin de garantir le bon fonctionnement de la justice et de préserver les relations de confiance entre clients et avocats.

Les fonctions de conseil et de défense de l’avocat sont et doivent demeurer indissociables.

Rappelons que les avocats sont soumis à une déontologie stricte. Ces règles leur interdisent, par exemple, d’accepter un mandat lorsque leur indépendance ne peut être garantie.

Trois mécanismes de contrôle existent. D’abord, les bâtonniers du barreau veillent au respect des règles déontologiques dans leur ensemble. Ensuite, les avocats qui acceptent des activités de représentation d’intérêts doivent déclarer ces activités à l’ordre des avocats. Enfin, les avocats sont déjà soumis au registre créé par la loi Sapin 2.

C’est dans ce contexte qu’il faut analyser cette proposition de loi, qui crée un mécanisme de déclaration et de sanctions parallèle, à savoir, potentiellement, une quatrième obligation.

Cet amendement est issu d’une recommandation du Conseil national des barreaux.