M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, chaque année, nous constatons dans les comptes de l’année écoulée les effets de la gestion inefficace des risques sociaux que nous dénonçons lors des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

D’année en année, le financement de l’Ondam ne tient pas compte de l’évolution des besoins de santé des territoires, d’année en année la branche AT-MP apparaît excédentaire alors que l’on dénombre toujours des centaines de morts au travail ou des suites d’une maladie professionnelle.

D’année en année, nous reportons le chantier de la transition démographique, de la prévention et du virage domiciliaire pour la branche autonomie. Faute d’y consacrer les moyens de financement par la solidarité nationale, nous ouvrons dès lors le recours aux assurances privées, qui sont facteur d’inégalité et dont les coûts de gestion sont élevés.

Le désengagement solidaire de la santé accompagne la dérive des prix des mutuelles, pesant sur le pouvoir d’achat, augmentant le non-recours – ou le « mal-recours » – et les inégalités devant le risque.

Enfin, d’année en année, la Cour des comptes continue d’alerter sur la fiabilité des données comptables. De fait, de nouveau, elle n’a pas certifié les comptes de la branche famille, excédentaires, alors même que la précarité et la pauvreté ne cessent de s’élargir et de s’intensifier en France. Cette situation de précarité matérielle et sociale touche particulièrement les familles monoparentales, les familles nombreuses et les enfants.

Pour permettre à la sécurité sociale de remplir ses missions, il faut rompre non seulement avec les politiques antisociales, mais aussi avec l’accélération sans précédent des exemptions d’assiette et des exonérations sociales non compensées par l’État qui, en réduisant ses ressources, grèvent les comptes de la sécurité sociale.

L’augmentation croissante des éléments de rémunération se substituant aux salaires pour compenser la perte de pouvoir d’achat et la déflation salariale, comme la prime dite « Macron » devenue prime de « pouvoir d’achat » puis prime « partage de la valeur », non soumis à cotisations sociales et dont l’effet substitutif aux salaires a été documenté par l’Insee et le Conseil d’analyse économique (CAE), a conduit à une attrition de recettes de plus de 19 milliards d’euros en 2023 pour les comptes de la sécurité sociale alors que le déficit était de 8 milliards d’euros, selon le rapport de la Cour des comptes avant la légère rectification.

Ainsi, alors que le déficit de la sécurité sociale augmentait de 6,6 milliards entre 2018 et 2023, les pertes de recettes dues essentiellement à la désocialisation des compléments de salaire non compensés augmentaient, elles, de plus de 8 milliards. Une grande partie du déficit, c’est vous qui l’avez construite préalablement au recul des droits des salariés !

Comme pour les retraites, une partie du déficit provient d’un freinage volontaire, construit et toujours à l’œuvre de la dynamique des recettes face aux dépenses rendues nécessaires pour répondre aux besoins et assurer les risques des cinq branches.

Pour le budget de la sécurité sociale comme pour celui de l’État, vous courez derrière des déficits que vous faites semblant de découvrir alors que vous désarmez les recettes et que vous n’engagez pas les politiques qui, seules, permettraient de maîtriser les dépenses à moyen terme, notamment dans la branche santé.

Loin d’être un bon gestionnaire, le Gouvernement, depuis 2017, est le pompier pyromane des finances sociales et le responsable de l’intensification de la crise sociale.

D’autres voies existent, et le réalisme économique est du côté de ceux qui remettent en cause la politique de déflation salariale, la désocialisation d’une partie des salaires et la baisse des droits afférents.

Par le présent Placss, on nous demande d’approuver une gestion des comptes qui, en plus d’être pour partie insincère, fragilise notre modèle de protection sociale.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de 2023 fait apparaître un déficit supérieur aux prévisions initiales, en grande partie dû à des recettes qui n’ont pas évolué favorablement et à une hausse des dépenses portée par le dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, le fameux Ondam.

En 2023, les dépenses relevant du champ de l’Ondam ont atteint 247,8 milliards d’euros. Je constate que, si le dépassement de fin d’exercice est cette année limité, l’Ondam, fixé à 244,1 milliards d’euros en loi de financement de la sécurité sociale, a été une fois encore, et malgré deux révisions en cours d’année, substantiellement dépassé.

Nous avions refusé de voter l’Ondam 2023, ne l’estimant ni crédible ni sincère. Force est de constater que nous avions raison ! L’exécution est supérieure de 3,8 milliards d’euros à l’Ondam initial, dépassement principalement dû au contexte inflationniste.

En outre, l’Ondam 2023, qui devait être inférieur à l’Ondam 2022 du fait de la résorption des dépenses de crise, lui est finalement supérieur.

La branche maladie porte à elle seule la totalité du déficit : en 2023, son déficit s’élève à 11,1 milliards d’euros, pour un déficit total, y inclus le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de 10,8 milliards d’euros.

Il nous faut donc, madame la ministre, disposer de prévisions plus solides et, avec l’appui du comité d’alerte, renforcer les mécanismes de suivi infra-annuel.

Si vous me le permettez, je vais profiter de l’examen de ce projet de loi d’approbation des comptes pour revenir sur deux politiques rattachées à la branche maladie qu’a déjà évoquées la rapporteure générale. De fait, il s’agit de sujets importants.

Premièrement, le « virage de la prévention », affiché comme une priorité d’action, devait trouver à s’incarner dans les rendez-vous de prévention. Que dire de cette mesure, près de deux ans après la création de ces rendez-vous dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ? Nous ne disposons que de peu de recul sur sa mise en œuvre ; et pour cause : après une publication tardive des textes d’application réglementaire, le dispositif entre tout juste dans sa phase de généralisation.

Le Sénat a soutenu le principe de cette mesure, tout en alertant sur certains prérequis : l’importance d’associer les professionnels de santé à sa déclinaison opérationnelle, pour garantir leur adhésion au dispositif ; la nécessité de penser l’articulation des rendez-vous avec un suivi d’aval structuré ; le ciblage des personnes les plus éloignées du soin.

C’est à ces conditions que les rendez-vous de prévention pourront, à leur modeste mesure, contribuer à améliorer les résultats de la France en matière de prévention, résultats que la Cour des comptes qualifiait de « médiocres » en 2021.

Deuxièmement, le Sénat a soutenu l’allongement du troisième cycle de médecine générale par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, où se trouvait reprise une proposition de loi de Bruno Retailleau. Applicable aux étudiants intégrant le troisième cycle à compter de la rentrée universitaire 2023, l’ajout d’une quatrième année devait améliorer la formation des étudiants grâce à la réalisation d’un stage long, en ambulatoire et en autonomie supervisée, prioritairement dans les zones sous-denses.

Or, près de deux ans après la promulgation de la loi, cette réforme demeure largement incomplète. La maquette a été tardivement mise à jour – en août 2023 – et fait toujours l’objet de vifs débats. Les conditions d’appariement entre étudiants et terrains de stage ne sont toujours pas définies, non plus que le statut et les modalités de rémunération des docteurs juniors.

Il faut souligner le niveau d’incertitude dans lequel les étudiants se trouvent. Les multiples retards dans la parution des textes deviennent alarmants ! C’est pourquoi le rapport de la commission des affaires sociales sur ce Placss appelle à engager les dernières concertations nécessaires et à finaliser au plus vite ces travaux, et ce même si je connais le travail de préparation conduit sur le terrain, au sein des facultés, par les professeurs de médecine générale.

Mes chers collègues, dans un contexte où les hôpitaux publics s’attendent à enregistrer un déficit de près de 2 milliards d’euros à la fin de l’année 2023, où l’on ne cesse, de PLFSS en PLFSS, de demander des efforts au secteur du médicament et à celui des dispositifs médicaux, où la question des ruptures de stock de médicaments n’est toujours pas réglée, ces constats doivent – entre autres – orienter les choix politiques à venir et nous inciter à rester conscients des défis et de l’exigence qui nous attendent à l’aube de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

Je voterai évidemment la motion déposée par la commission des affaires sociales ; je pense, madame la ministre, mes chers collègues, que vous n’en doutiez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Khalifé Khalifé. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Khalifé Khalifé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’équilibre financier prévu à l’article 34 de la Constitution depuis sa révision en 1996 semble plus que jamais une chimère.

Je n’imaginais pas, il y a un an, que nous aurions à examiner aujourd’hui un Placss 2023 retraçant, à quelques détails près, ce qu’alors nous dénoncions déjà, ignorant les recommandations de la Cour des comptes et méprisant les nombreuses séances de travail de notre Parlement. Je ne savais pas non plus qu’il était possible d’accepter cette fatalité et de choisir de ne pas réformer un système pour lequel tous les signaux d’alerte sont au rouge.

J’ai parfois la faiblesse de penser que nous sommes otages d’un immobilisme dont les tenants sont de farouches adeptes du principe : « la santé n’a pas de prix ».

Le document qui nous est ici proposé en est la parfaite illustration. Il révèle un déficit global de la sécurité sociale dont la principale cause est la branche maladie.

Mes chers collègues, doit-on par ailleurs se satisfaire des résultats des autres branches, qui sont à l’équilibre ou légèrement excédentaires, quand on sait que la moitié seulement des personnes âgées éligibles ont recours au minimum vieillesse, que plus de 10 000 adultes handicapés sont toujours hébergés dans les instituts médico-éducatifs (IME), privant autant de jeunes d’y accéder, ou encore que la CNSA et les départements n’ont toujours pas trouvé de solution pour mieux répondre aux besoins territoriaux ?

Je n’oublie pas non plus le refus de la Cour des comptes de certifier les comptes de la branche famille, dont les préjudices financiers sont particulièrement importants.

Je veux enfin alerter sur les abus croissants liés aux arrêts de travail prescrits par télémédecine. En la matière, des solutions avaient déjà été proposées en 2023, sans être retenues.

Madame la ministre, permettez-moi de vous interroger : à quoi servent les multiples agences, de régulation ou autre ? Comment ces structures communiquent-elles entre elles ? Comment justifient-elles leur existence ?

Mes chers collègues, des réformes structurelles s’imposent, pour mieux maîtriser la financiarisation du système de santé, pour rendre plus efficiente la gouvernance de l’hôpital, pour valoriser les soignants, pour disposer d’innovations, notamment médicamenteuses. On parle beaucoup des médicaments innovants et de leur prix, mais a-t-on réalisé une étude sur le coût global du parcours du patient ?

Qu’en est-il de l’absence d’encaissement par l’État des 1,6 milliard d’euros de la clause de sauvegarde 2023, pourtant budgétée par l’industrie ? Pourquoi cette même clause ne s’applique-t-elle pas aux dispositifs médicaux, pour lesquels elle était également prévue ?

Pourquoi, malgré les annonces, ne structure-t-on pas une véritable politique de prévention, qui pourrait être portée par les conseils territoriaux de santé (CTS), au plus près des populations ?

Les soins de ville sont à consolider.

L’évaluation du rôle des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) mérite d’être revue.

Une réforme efficace des études de santé est urgente.

Enfin, je pense qu’il faut revoir les statuts juridiques, donc fiscaux, de certains montages liés à l’exercice médical.

Madame la ministre, mon propos illustre le désarroi du praticien que j’étais et la colère de l’élu que je suis devenu. La hausse des besoins nécessite une sécurité sociale plus efficiente et mieux adaptée à la modernisation.

Je vous souhaite de réussir ce chantier difficile qui s’ouvre à vous, en espérant sincèrement que vous disposerez de la durée nécessaire pour y parvenir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

M. le président. Je suis saisi, par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, d’une motion n° 1.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale pour l’année 2023 (n° 35, 2024-2025), rejeté par l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour la motion.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je voudrais d’abord vous remercier, mes chers collègues : chacune de vos interventions a été utile.

J’ai bien senti que certains ou certaines auraient souhaité débattre plus longuement. Cependant, plusieurs raisons justifient le dépôt par la commission d’une motion tendant à opposer la question préalable.

Le Placss qui nous est soumis cette année répond-il aux obligations organiques ? Il me semble que non. Nous en avons débattu et vous l’avez dit vous-mêmes dans vos diverses interventions.

Tout d’abord, si, l’année dernière, la Cour des comptes a refusé de certifier des comptes, elle se dit, cette année, « dans l’impossibilité » de le faire. Certes, nous sommes passés d’un refus à une impossibilité, mais force est de constater que les efforts réalisés restent insuffisants pour la Cour des comptes ! De fait, le taux d’erreur mesuré selon l’indicateur à neuf mois est en augmentation d’un point – pour ce qui est de l’indicateur à vingt-quatre mois, la situation semble s’améliorer par rapport à 2022. Quoi qu’il en soit, la Cour se dit dans l’impossibilité de certifier. Cela vaut toujours mieux que le refus de l’année précédente, mais ce n’est pas encore ça !

Les rapports d’évaluation des politiques de sécurité sociale (Repss) ne respectent pas davantage les obligations de la loi organique. Le Repss 2022 indiquait les résultats atteints deux années auparavant ; dans le cas du Repss 2023, l’évaluation porte sur la seule année 2022. La loi organique exige pourtant bien une évaluation des résultats atteints lors des trois dernières années ! Autrement dit, le compte n’y est pas.

La troisième obligation non respectée concerne l’évaluation des niches sociales. L’année dernière, aucune n’avait été évaluée. Cette année, il y a du mieux : 19 l’ont été. Mais ce sont 40 des 120 niches existantes qui auraient dû être examinées, la loi organique imposant l’évaluation d’un tiers des niches tous les trois ans : 19, c’est donc insuffisant.

Vous allez me dire, madame la ministre, que la situation s’améliore en volume. Je l’admets, puisque la mission Bozio-Wasmer évalue, dans son rapport, 75 % environ du volume des niches sociales et que la Cour des comptes, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, procède quant à elle à l’évaluation des niches sociales relatives aux compléments de salaire, qui correspondent à 20 % environ du montant total des niches.

Tout cela est en effet très bien. Mais ce que demande la loi organique, c’est, j’y insiste, une évaluation d’un tiers des niches sociales tous les trois ans !

On le voit, les obligations organiques ne sont pas respectées.

Par ailleurs, comme nous l’avons tous dit lors de la discussion générale, si l’amélioration des comptes est nette, c’est aussi parce que l’on a dépensé 10 milliards d’euros en moins compte tenu de l’évolution de la crise sanitaire – je n’insiste pas. En réalité, les revues de dépenses étaient déjà annoncées, et le Gouvernement ne s’est pas réellement investi en faveur de politiques publiques susceptibles de ramener nos déficits vers l’équilibre…

La situation est d’ailleurs très préoccupante, car, d’après les chiffres du PLFSS que nous allons bientôt examiner, les déficits auront atteint dès 2024 les montants qui étaient attendus seulement pour 2027 : nous sommes devant un mur.

Mes chers collègues, certains d’entre vous ont évoqué la Cades, mais comment la prolongerait-on alors que l’on n’est pas capable de présenter une trajectoire financière tendant vers l’équilibre ou, à tout le moins, amorçant un retour vers une situation plus conforme à nos exigences ?

En définitive, de nombreuses raisons ont motivé le dépôt de cette motion.

Au demeurant, il ne s’agit pas d’attribuer des responsabilités : il s’agit simplement de savoir où l’on place le curseur. Or la commission des affaires sociales a estimé, dans la perspective du débat à venir sur le PLFSS, que le curseur n’était pas placé suffisamment haut pour que le débat sur le Placss soit utile.

Du reste, les obligations organiques n’ont pas été conçues pour amuser la galerie ! Elles ont été votées par le Parlement. La construction de la loi organique s’est faite aussi à l’Assemblée nationale et au Sénat ; il faut donc la respecter, raison pour laquelle nous présentons cette motion.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?…

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je vous ai écoutée avec attention, madame la rapporteure générale, comme j’ai écouté chaque orateur, et les débats soulevés par les interventions des uns et des autres sont loin d’être inintéressants.

Vous jugez que les obligations organiques ne sont pas respectées, je l’entends.

J’ai également entendu parler d’une temporalité qui n’était pas la bonne. J’avoue que, sur ce plan, je ne peux pas faire grand-chose…

En 2022, la Cour des comptes a refusé la certification. Cette année, elle dit qu’il lui est impossible de certifier. Pour ma part, je trouve que c’est mieux ! (Mme Émilienne Poumirol ironise.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Oui !

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Certes, on peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein, mais, pour ce qui me concerne, j’ai tout de même le sentiment qu’il y a une amélioration.

M. Bernard Jomier. L’art de la nuance…

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Si vous me permettez ce trait d’humour, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bon espoir, à ce rythme, que nous obtenions la certification l’année prochaine… (Sourires.)

Bien sûr, je regrette que vous souhaitiez interrompre la discussion à ce stade, s’agissant d’une simple « photographie » de ce qui s’est passé, analogue à ce qu’est, pour nos communes, le compte administratif : ce qui s’est passé s’est passé, que l’on y souscrive ou non, et il importe qu’un document le retrace. Je trouve donc dommage que nous ne puissions pas aller au bout de l’examen du texte.

Néanmoins, j’ai de l’espoir pour les débats à venir, car vous avez évoqué de nombreux sujets qui m’intéressent au plus haut point.

Je fais le même constat que vous : nos comptes sociaux, notamment ceux de l’assurance maladie, sont en difficulté. Nous ne prenons pas suffisamment en compte l’enjeu démographique, qui est majeur, non plus que l’enjeu, majeur lui aussi, de l’évolution de la structuration de notre système de santé, laquelle se fait à bas bruit – il y a d’ailleurs beaucoup de choses qui se réalisent à bas bruit et auxquelles il faut continuer de travailler.

Sur ces questions, on ne saurait penser à court terme : c’est à moyen et long terme qu’il nous faudra structurer nos actions.

Vous avez parlé de la prévention. Si la prévention ne figure pas dans l’intitulé de mon ministère, j’y suis, bien sûr, très attachée ! Selon moi, la prévention fait partie de la santé : c’est le premier pas pour conserver la santé. Et je souhaite évidemment que chacun conserve la meilleure santé possible, ce qui, du reste, fera baisser les frais de soins.

Nous avons des choses à construire. Pour ce faire, j’aurai besoin de vous, dans la mesure où l’élaboration d’une stratégie nouvelle demandera du temps et nécessitera de faire évoluer le financement de la protection sociale. Bien entendu, quoi qu’il en soit d’une telle évolution, mon objectif est que ce financement reste solidaire comme il l’est aujourd’hui. Voilà ce que je peux dire à ce stade.

J’ai bien compris, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous seriez actifs dans l’examen du PLFSS ; je vous en remercie. Nous allons, ensemble, construire l’avenir.

Sur cette question préalable, j’émets bien sûr un avis défavorable, en regrettant que nous ne puissions pas aller plus loin dans le débat – mais c’est ainsi.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux dire pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera pour la motion présentée par la commission.

Il la votera tout d’abord parce qu’il est vrai, comme le souligne le rapport de la commission, que l’examen d’un projet de loi d’approbation des comptes en octobre, soit un mois à peine avant le PLFSS pour l’année n+2, non seulement ne respecte pas la loi organique, mais, surtout, vide complètement de son intérêt ce texte qui doit normalement être présenté au printemps de l’année n+1.

Il la votera ensuite parce que la trajectoire financière décrite dans ce Placss démontre la partielle insincérité des budgets de la sécurité sociale.

En effet, si l’exécution de l’Ondam, par exemple, est supérieure de plusieurs milliards d’euros à la prévision initiale, c’est parce que les prévisions de l’assurance maladie ont été sous-calculées, au regard, bien sûr, de l’évolution spontanée des coûts et des mesures nouvelles, et compte tenu, surtout, de l’insincérité initiale du montant des économies attendues pour les financer. Je tenais à le souligner, car une telle tendance se renouvelle de PLFSS en PLFSS.

Dans ces conditions, la loi d’approbation perd de son intérêt pour l’analyse des écarts. Telle est pourtant la vocation d’un compte administratif !

Ce Placss est la énième démonstration d’une gestion problématique.

Surtout, si la commission des comptes de la sécurité sociale admet ne disposer que de données imparfaites sur les manques à gagner dus notamment à l’explosion des dispositifs exemptés, la Cour des comptes en souligne le doublement sur la même période, les évaluant désormais à 19 milliards d’euros. Mais, sur ce point, nous manquons cruellement d’informations…

Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera pour cette motion tendant à opposer la question préalable.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 21 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 287
Contre 53

Le Sénat a adopté.

En conséquence, le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale de l’année 2023 est rejeté définitivement.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale de l'année 2023