compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Marie-Pierre Richer,
M. Mickaël Vallet.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Hommages à Claude Huriet et à Jean-François Picheral, anciens sénateurs
M. le président. C’est avec beaucoup de tristesse que nous avons appris lundi dernier le décès de notre ancien collègue Claude Huriet, sénateur de Meurthe-et-Moselle de 1983 à 2001, qui siégea au sein du groupe de l’Union centriste des démocrates de progrès, puis de l’Union Centriste, et qui fut questeur du Sénat.
Ce médecin de formation, professeur agrégé à la faculté de médecine de Nancy, était un grand humaniste. Pionnier, il s’impliqua dans des sujets qui demeurent d’actualité : la lutte contre le cancer, les greffes ou encore les questions de bioéthique.
Il créa ainsi le centre d’hémodialyse de Nancy, où il réalisa les premières transplantations rénales. Il présida l’Institut Curie jusqu’en 2013 et siégea notamment au Comité international de bioéthique de l’Unesco entre 2002 et 2006.
Au Sénat, il s’investit tout naturellement dans les questions de santé et de bioéthique au sein de la commission des affaires sociales, dont il fut le vice-président.
Nous nous souvenons bien sûr de la loi du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales – une loi qui porte son nom, ainsi que celui de notre ancien collègue Franck Sérusclat.
Il fut également rapporteur de la loi du 28 mai 1996 portant diverses mesures d’ordre sanitaire, social et statutaire, qui a notamment défini les thérapies géniques et cellulaires, ou encore de la loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme.
Au nom du Sénat tout entier, je veux assurer sa famille et ses proches, ainsi que le président et les membres du groupe Union Centriste, de notre sympathie.
C’est aussi avec une grande tristesse que nous avons appris le 12 octobre dernier le décès de notre ancien collègue Jean-François Picheral, qui fut sénateur des Bouches-du-Rhône jusqu’en 2008.
Médecin radiologue de profession, il siégea au conseil général des Bouches-du-Rhône et fut élu maire d’Aix-en-Provence en 1989.
Durant ses deux mandats de maire, Jean-François Picheral a contribué au lancement de projets structurants pour sa ville, comme la requalification du cours Mirabeau ou encore l’implantation de la gare TGV sur le plateau de l’Arbois.
Élu sénateur en 1998, Jean-François Picheral fut secrétaire de la commission des affaires culturelles et vice-président de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé.
Il fut à l’origine de la proposition de loi dite Français par le sang versé, qui devint la loi du 29 décembre 1999 modifiant les conditions d’acquisition de la nationalité française par les militaires étrangers servant dans l’armée française. Ce texte permet à tout étranger engagé dans les armées françaises ou blessé au combat, notamment aux légionnaires, de devenir français de plein droit, s’il le souhaite, sur proposition du ministre de la défense.
Il voyait dans le service sous nos drapeaux une preuve incontestable de l’attachement porté à notre pays et aux valeurs démocratiques qui fondent la société française. Son action, je dois le dire, a contribué à tisser ce lien si particulier qui existe entre le Sénat et la Légion étrangère, lien que nous ressentons notamment, chaque 13 juillet, dans le jardin du Luxembourg.
Au nom du Sénat, je salue la mémoire d’un homme engagé pour son territoire et ses habitants, et j’adresse mes condoléances les plus sincères à sa famille et à ses proches.
En ces semaines de commémoration, je tenais à rendre hommage à ces deux anciens collègues, qui ont beaucoup apporté à notre assemblée.
3
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
J’excuse l’absence de M. le Premier ministre, qui ne peut être présent parmi nous aujourd’hui. Au nom de notre assemblée tout entière, je lui exprime notre sympathie et lui adresse tous nos vœux.
Lors de notre échange téléphonique, il m’a confirmé qu’il participerait, le jeudi 7 novembre, à dix heures trente, à la séance de commémoration du quatre-vingtième anniversaire de la réunion de l’Assemblée consultative provisoire organisée ici même, au Palais du Luxembourg.
Mes chers collègues, je compte sur votre présence pour nous souvenir de ce moment qui, après l’épisode de l’assemblée d’Alger, à la Libération, a marqué le renouveau de notre vie parlementaire.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun sera attentif, au cours de nos échanges, au respect des uns et des autres et à celui du temps de parole.
accord commercial avec le mercosur
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. C’est sans doute une première dans l’histoire du Sénat, mais l’actualité et la menace sans précédent qui pèse sur les agriculteurs français la justifient : cette question s’adresse non pas au Gouvernement, mais au Président de la République. (Exclamations.)
Je m’adresse donc aujourd’hui directement à Emmanuel Macron. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Rachid Temal. Il n’est pas là pour vous répondre…
M. Laurent Duplomb. En effet, au début de cette année, au beau milieu des manifestations agricoles et avant les élections européennes, c’est lui qui assurait que les négociations avec le Mercosur étaient suspendues.
C’est encore lui qui s’engageait à ce que cet accord ne soit pas conclu sans clauses miroirs, ces dispositions dont on parle tant, mais qui n’existent toujours pas. (M. Rachid Temal s’exclame.) Elles n’existent pas plus dans cet accord, d’ailleurs, que dans le Ceta (accord économique et commercial global) que nous avons rejeté sur ces travées pour cette même raison, mais aussi parce qu’il ouvrait la voie à la validation de l’accord avec le Mercosur, comme nous le dénoncions déjà.
C’est enfin lui qui détient aujourd’hui le pouvoir de bloquer l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur.
En effet, malgré une large désinformation sur ce sujet, la France détient encore à ce jour un droit de veto pour faire tomber cet accord. Comme l’a confirmé dans la presse Mme la ministre Primas le 22 octobre dernier, les textes sont clairs : les accords d’association comme celui qui a été négocié avec le Mercosur sont des accords mixtes, qui nécessitent une approbation à l’unanimité des États membres au Conseil de l’Union européenne.
M. Fabien Gay. Et au Parlement !
M. Laurent Duplomb. Si nous savons bien que la Commission européenne entend contourner ce veto en scindant l’accord pour isoler son volet commercial, aucune décision officielle n’a été prise à ce jour. La France est donc parfaitement légitime pour s’opposer à une telle manœuvre, faire valoir ses droits et conserver sa capacité de blocage.
Pourquoi donc, monsieur le Président de la République (Exclamations.), ne réagissez-vous pas face à l’attitude méprisante de la Commission européenne envers les agriculteurs, mais aussi envers la France ?
Pourquoi n’exercez-vous pas le veto qui vous revient de plein droit ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Laurent Duplomb. Enfin, combien de temps encore allez-vous nous contraindre, nous, représentants élus du peuple français, à regarder périr nos agriculteurs et nos entreprises, en acceptant que cette Commission européenne outrepasse ses droits et piétine la démocratie ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, GEST et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l’étranger.
Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée du commerce extérieur et des Français de l’étranger. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, cher Laurent Duplomb, comme vous le voyez, je ne suis pas le Président de la République, en tout cas pas encore ! (Rires.)
Je vous remercie de cette question : elle m’offre l’occasion de vous dire à quel point le Premier ministre et le Gouvernement tout entier sont mobilisés pour démentir les bruits qui courent sur un accord potentiel avec le Mercosur.
Depuis 2019, les négociations entre l’Union européenne et les pays du Mercosur n’ont pas beaucoup évolué. Nous nous opposons à cet accord.
Tout d’abord, nous tenons à ce que l’accord de Paris en constitue un élément essentiel. Cela signifie que, en cas de violation de l’accord de Paris, l’accord pourrait être suspendu, et cela par chacune des deux parties, de chaque côté de l’Atlantique.
Ensuite, nous souhaitons que cet accord d’association soit pleinement aligné avec les compétences des États membres. Il ne doit pas être scindé en deux et les Parlements doivent être consultés à son sujet.
Enfin, nous souhaitons que cet accord soit en phase avec la nouvelle politique de l’Union européenne, qui concilie commerce et développement durable. À cet égard, les normes vétérinaires et phytosanitaires devront être alignées.
Nous connaissons les raisons de la colère des agriculteurs, et cet accord avec le Mercosur en est probablement l’étendard. C’est la raison pour laquelle nous n’accepterons pas, en l’état, sa conclusion.
J’en appelle d’ailleurs, comme je viens de le faire à l’Assemblée nationale, à la mobilisation de tous : nous avons besoin de chacun d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour convaincre nos collègues députés européens, les associations environnementales (M. Yannick Jadot s’exclame.) et les agriculteurs des pays concernés qu’un autre accord est possible avec le Mercosur.
Je vous remercie par avance de votre soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)
blackout énergétique en guadeloupe le 25 octobre 2024
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Dominique Théophile. Ma question s’adresse à M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer.
Monsieur le ministre, la Guadeloupe a été récemment plongée dans une crise d’une gravité sans précédent. Un blackout total de près de quarante-huit heures, provoqué par l’arrêt brutal des moteurs de la centrale EDF PEI de la Pointe Jarry, a laissé 230 000 foyers et leurs habitants sans électricité ni lumière, livrés à eux-mêmes dans une nuit interminable.
Dans cet instant suspendu, nos concitoyens ont vécu la peur, l’angoisse et l’insécurité. Des pillages, des saccages et des actes de vandalisme se sont multipliés dans les rues de Pointe-à-Pitre, malgré le couvre-feu décrété par le préfet de Guadeloupe. Certains sont allés, impunément, jusqu’à utiliser une pelle mécanique pour détruire une bijouterie en plein centre-ville.
Imaginez, monsieur le ministre, des familles, des enfants terrifiés, des malades en détresse dans des hôpitaux fonctionnant grâce à des générateurs d’urgence à l’autonomie incertaine.
Cette situation chaotique a cruellement exposé des failles dans la sécurisation de nos sites stratégiques et la vulnérabilité de nos territoires face aux tensions sociales et aux crises énergétiques.
Ce drame interroge : comment, en 2024, des citoyens peuvent-ils être ainsi abandonnés, sans défense, dans le noir et l’impuissance ?
Je condamne sans concession ces actes de sabotage. Aucune revendication ne saurait légitimer de telles actions, quels que soient les griefs des parties. Il est impératif de retrouver le chemin du dialogue et d’entamer des négociations respectueuses de l’intérêt général.
Aussi, monsieur le ministre, ma question est simple : quelles mesures seront prises pour garantir que de telles structures d’intérêt public ne soient plus jamais menacées et que de tels événements ne puissent plus se reproduire ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – Mme Anne-Sophie Patru applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des outre-mer.
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer. Monsieur le sénateur Théophile, je m’associe à vos propos sur les moments extrêmement difficiles qu’ont vécus nos compatriotes guadeloupéens. Au-delà des effets de la disparition de la lumière, ces violences sont proprement inadmissibles.
Dans une moindre proportion, il faut savoir que nos compatriotes de Martinique et de La Réunion ont connu, pour des raisons différentes, des situations similaires.
Je voudrais rappeler les conditions dans lesquelles EDF a été mise en difficulté à Jarry. Un accord social était sur le point d’aboutir entre les salariés et la direction. Malheureusement, des salariés qui se trouvaient à l’intérieur de l’entreprise – il n’y a jamais eu d’intrusion forcée, je tiens à le dire – ont procédé à l’arrêt des moteurs.
Vous avez raison : les conséquences de cet acte ont été terribles. J’irai même plus loin : certaines personnes ont pu être mises en grand danger du fait de l’absence d’électricité. Les auteurs d’actions collectives de cette nature devraient d’ailleurs y réfléchir et mesurer, au-delà de l’action elle-même, quelles conséquences celle-ci peut entraîner.
Nous avons œuvré tout au long du week-end dernier pour que des discussions s’ouvrent entre les salariés et la direction d’EDF. Nous y sommes parvenus.
Je rappelle que le préfet a immédiatement réquisitionné le personnel pour rétablir l’électricité et que, par ailleurs, le procureur de la République a engagé des poursuites. Une plainte a été déposée par EDF et une information judiciaire devrait être engagée.
La réalité des faits est que les dégâts ont été causés depuis l’intérieur de l’entreprise. Il faut tout de même faire très attention à ce que l’on fait !
Nous veillons désormais à ce que le calme revienne et à ce que les discussions entre les opérateurs privés aient lieu dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
stratégie de désenclavement du département de la loire
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le ministre, toute la France le sait : Lyon ne peut pas se passer de Saint-Étienne ! (Sourires.)
La proximité de ces deux aires urbaines donne lieu à des échanges considérables : 20 000 personnes voyagent chaque jour sur la ligne ferroviaire Saint-Étienne-Lyon, et les échanges économiques entre les deux villes sont importants, quand ils ne sont pas englués en raison d’une autoroute A47 malheureusement régulièrement saturée.
Il s’agit d’un sujet non pas local, mais bien national, qui concerne deux métropoles françaises ayant un lien fort et fragile à la fois.
Depuis les récentes inondations, notre département est au ralenti. La vie des Ligériens est perturbée et notre économie affectée.
Après l’abandon du projet d’autoroute A45, le remède miracle n’a pas été trouvé, et les mesures compensatoires n’ont pas permis de relever le défi de la mobilité entre Saint-Étienne et Lyon.
Monsieur le ministre, j’en appelle à votre sollicitude – vous connaissez parfaitement le sujet – pour réunir autour de la table les opérateurs et les collectivités locales et proposer aux Ligériens un nouveau schéma de mobilité, autour de nouveaux itinéraires et de nouveaux modes de transports.
Vous avez parfaitement su le faire dans votre département de l’Essonne, où vos cars express sont une franche réussite. L’enjeu est important pour les Foréziens. Toute la Loire vous écoute. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. François Durovray, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour les habitants des départements du Rhône et de la Loire qui ont été exposés aux intempéries voilà une quinzaine de jours et qui continuent d’en subir les conséquences.
J’exprime également ma reconnaissance envers les agents du service public, de l’État et de la SNCF, qui sont encore à pied d’œuvre pour restaurer le plus rapidement possible les circulations routières et ferroviaires.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur la question de la régénération des infrastructures ferroviaires et routières, mais aussi de leur adaptation au changement climatique.
À la demande du Premier ministre et de la ministre Catherine Vautrin, j’organiserai, au début de l’année prochaine, une conférence sur le financement des mobilités. Celle-ci permettra, je l’espère, de mettre davantage en adéquation les moyens avec les besoins, dont nous savons combien ils vont croissant.
Au-delà, il faut évoquer les autres possibilités de mobilité, non seulement en cas de situation exceptionnelle comme celle que nous avons vécue, mais aussi de façon permanente.
Nous devons réfléchir à la façon dont nous pouvons massifier l’usage de la route, en mettant plus de personnes dans moins de véhicules.
C’est tout l’enjeu du plan Cars express, que j’ai l’intention de présenter au début de l’année 2025 et qui doit mobiliser l’ensemble des collectivités locales aux côtés de l’État.
J’espère que les débats qui se dérouleront dans les assemblées à l’automne déboucheront sur des solutions juridiques et financières permettant de créer des lignes de cette nature.
Il s’agit d’une solution rapide à mettre en œuvre, peu coûteuse et écologique. Les lignes de cars express pourraient relier des métropoles au destin commun, comme Saint-Étienne et Lyon,…
Mme Cécile Cukierman. C’est la ligne la plus fréquentée de France !
M. François Durovray, ministre délégué. … mais aussi des villes de moindre importance à travers le pays. (M. Bernard Jomier manifeste son ironie.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour la réplique.
M. Pierre Jean Rochette. Je vous remercie, monsieur le ministre. Nous aurons l’occasion d’en reparler, car nous devons aborder ces questions de façon plus approfondie et matérialiser ces projets.
Au nom des habitants et des élus de la vallée du Gier et du Pilat, je veux remercier les membres du Gouvernement qui se sont déplacés rapidement sur les lieux des inondations : le Premier ministre Michel Barnier, les ministres Agnès Pannier-Runacher et Nicolas Daragon, ainsi que vous-même, monsieur le ministre des transports. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
À elle seule, la solidarité nationale ne résout pas tous les problèmes, mais quand elle s’exprime de cette façon, elle met du baume au cœur, et nous en avons besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
plan marseille en grand
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Mireille Jouve. Madame la ministre, le plan Marseille en grand, estimé à 5 milliards d’euros et lancé en septembre 2021 par le Président de la République, apportait une réponse forte de l’État à des carences anciennes, ainsi qu’à des retards importants dans le développement des services structurants pour la population de l’agglomération marseillaise : écoles, transports, logement ou encore sécurité.
Le 21 octobre dernier, la Cour des comptes et la chambre régionale des comptes ont rendu public un rapport de 180 pages sans concession, qui a mis le feu aux poudres – je ne vous apprends rien.
Je ne céderai ni à la critique facile, ni à la petite phrase tendant à railler les uns et les autres, ni même à la tentation de compter les points – à quoi bon ?
J’alerte simplement sur les défis que pose un tel plan. Marseille, ville que l’on aime ou que l’on déteste, est une porte d’entrée de l’Europe depuis la Méditerranée. Ce positionnement stratégique nous impose une obligation de résultat dans l’exécution d’un plan dont la Cour des comptes elle-même souligne le caractère indispensable.
Ne gâchons donc pas notre chance de voir la deuxième ville de France se redresser. La renaissance de cette cité profitera à tous et rejaillira sur l’ensemble des communes du département, sur la région et sur la France.
Aussi, madame la ministre, ma question est simple : suivrez-vous la préconisation judicieuse de la Cour des comptes relative à la création d’une superstructure de gouvernance pour accompagner, malgré les temps difficiles, le versement des 5 milliards d’euros promis par le Président de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.
Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation. Madame la sénatrice Mireille Jouve, vous avez raison : au travers du plan Marseille en grand, le Président de la République entend apporter des réponses aux besoins de la deuxième ville de France. Ceux-ci sont criants dans de nombreux domaines, comme le transport, le logement et l’école.
Bien qu’il ait été publié le 21 octobre dernier, le rapport que vous mentionnez a été réalisé au second semestre de l’année 2023. Il offre donc une photographie de l’année 2023. J’y insiste, car, dix mois plus tard, de nombreuses actions ont heureusement été menées.
Je tiens notamment à saluer l’engagement des services de l’État autour du préfet Mirmand, mais également celui d’un certain nombre d’élus, qui ont permis de débloquer 90 % des crédits.
Six premières écoles ont ainsi été livrées à la dernière rentrée scolaire et quatre le seront avant la fin de cette année. En matière de transport, les premiers engagements se concrétisent. J’en discutais, pas plus tard que ce matin, avec ma collègue Valérie Létard : au total, plus de 600 millions d’euros sont mobilisés dans le secteur du logement à Marseille. Et je sais combien, dans cette ville plus qu’ailleurs, il y a des réponses à apporter dans ce domaine.
Madame la sénatrice, une coordination se met en place, sous la conduite du Premier ministre, avec l’ensemble des services de l’État et des élus, qu’il s’agisse de la région, du département, de la métropole ou de la ville de Marseille.
M. Mickaël Vallet. Tout de même !
Mme Catherine Vautrin, ministre. Nous allons tous dans le même sens, et c’est ainsi que nous apporterons des réponses aux difficultés quotidiennes des Marseillais. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, pour la réplique.
Mme Mireille Jouve. Madame la ministre, la sacralisation des financements et une superstructure de gouvernance : voilà ce qu’attendent les communes des Bouches-du-Rhône, qui n’ont pas les reins assez solides pour soutenir solidairement la ville-centre du département. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
avenir de la fonction publique
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Grégory Blanc applaudit également.)
Mme Laurence Rossignol. Monsieur Guillaume Kasbarian, vous êtes ministre de la fonction publique et de l’action publique.
On pourrait donc imaginer que votre priorité soit le service public, son efficacité, son excellence et son déploiement dans tous les territoires.
M. François Patriat. C’est le cas !
Mme Laurence Rossignol. On pourrait imaginer que votre objectif soit de faire en sorte qu’il y ait un enseignant devant chaque classe – croyez-moi, dans le Val-de-Marne, le département dont je suis l’élue, nous sommes très loin du compte ! (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
On pourrait imaginer que votre mission soit de recruter des soignants pour les hôpitaux, des professeurs pour les collèges, des AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) pour les écoles, des cadres territoriaux pour les collectivités.
On pourrait imaginer que votre souci soit que les policiers ne se suicident plus et que les magistrats ne meurent pas d’épuisement en pleine audience.
On pourrait imaginer que votre ambition soit de redonner aux Français le goût d’entrer dans la fonction publique.
On pourrait imaginer que votre exigence soit d’assurer aux fonctionnaires l’estime et le respect des usagers, ce qui leur assurerait la sécurité au travail.
Or, depuis votre prise de fonction, vous n’avez que le mépris à la bouche ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Comme si notre société n’était déjà pas assez divisée ! À coups de fake news sur les arrêts maladie et les prétendus privilèges, à coups de comparaisons mensongères entre les salariés du privé et ceux du public, vous essayez de faire porter sur les fonctionnaires la responsabilité de la dégradation des services publics que vous avez consciencieusement organisée depuis 2017, vous et les gouvernements successifs que vous avez soutenus. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Aussi, ma question est simple, monsieur le ministre : êtes-vous là pour détruire la fonction publique (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), l’offrir au privé et éteindre derrière vous les lumières de la République ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique.
M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique. Madame la sénatrice Rossignol, je n’ai jamais eu le moindre mépris pour les fonctionnaires de notre pays.
Je vous remercie d’ailleurs de votre question, qui me permet de saluer leur travail et de remercier les 5,7 millions d’agents qui s’engagent au service des Français. Leur travail est admirable au quotidien. (Marques d’ironie sur les travées du groupe SER. – Mme Céline Brulin s’exclame.)
Je partage évidemment tous les objectifs que vous avez cités : renforcer l’attractivité des métiers de la fonction publique, offrir un service public de qualité (M. Mickaël Vallet s’exclame.) ou encore améliorer les relations entre l’administration et l’usager.
Il est vrai que, parmi les différents sujets que ce large portefeuille m’amène à traiter, il y a également celui de l’absentéisme.
Les données dont nous disposons sont préoccupantes : le nombre de jours d’absence dans la fonction publique est passé de 43 millions voilà quelques années à 77 millions aujourd’hui, soit une hausse de 80 %.