Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. La proposition des auteurs de cet amendement reste très modeste. Dans la mesure où le plafond mensuel de la sécurité sociale s'élève à 3 900 euros, en quoi une surcotisation sur les revenus supérieurs à quatre fois ce plafond pourrait-elle faire peur ?
Nous voulons organiser une solidarité équitable – et non pas égale –, au contraire de ce que vous faites quand vous prévoyez des ponctions égales, qui touchent autant les petits travailleurs que ceux dont les revenus sont importants. Encore une fois, cette surcotisation ne constituerait qu'une recette très modeste. Soit on veut trouver des ressources, soit on ne le veut pas.
Je suis désolée de vous le dire, la dynamique des dépenses n'est pas tellement en cause. Prenons l'exemple des retraites. Ceux qui défendaient un régime par points voulaient que les dépenses de retraite se maintiennent autour de 14 % du PIB. Nous y sommes et ce seuil pivot n'a pas été dépassé. Par conséquent, la dynamique des dépenses n'est pas en cause, sauf à vouloir que les gens ne vieillissent pas. En revanche, face à l'augmentation du volume des dépenses – ce qui n'est pas la même chose que leur dynamique – il faut trouver des recettes. C'est ce que nous vous proposons de faire, mais vous le refusez.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. À cet instant du débat, je voudrais revenir sur deux ou trois principes que j'ai évoqués dans la discussion générale.
Tout d'abord, nous examinons ce PLFSS dans une situation complexe puisque, depuis presque dix ans, il n'y a pas eu de réforme de fond, qui aurait pu nous conduire à porter un regard différent sur la gestion de la santé, de la dépendance et de la prévoyance. Si cela avait été le cas, nous ne nous retrouverions pas aujourd'hui à chercher des recettes ou des coups de rabot à donner. Quelle que soit l'issue des débats que nous avons dans le cadre de l'examen de ce PLFSS, si nous ne lançons pas de réformes de fond, nous aurons le même débat l'année prochaine.
Ensuite, il me semble que, d'une façon générale, nous discutons « par tuyau », puisque nous examinons les amendements les uns après les autres, mais en portant un regard global sur le débat financier pris dans son ensemble, c'est-à-dire sur le PLFSS et sur le PLF, on se rend compte que tout le monde participe à l'effort. Les entreprises le font, ceux qui ont les plus gros chiffres d'affaires le font aussi, tout comme les salariés ou les assurés. Certains considéreront que l'effort devrait peser plus lourd d'un côté que de l'autre, mais c'est un autre débat. Quoi qu'il en soit, l'effort pèse de manière collective sur l'ensemble des acteurs et il est rendu nécessaire par le manque de réformes, qui a créé la situation dans laquelle nous sommes.
Les réformes doivent permettre d'avoir des services plus pertinents pour résoudre les difficultés de l'hôpital, notamment en ce qui concerne l'accès aux soins et la dépendance. Elles doivent aussi permettre de rendre la dépense publique plus efficiente et donc de faire des économies dans ce domaine.
En ce qui concerne la recherche de recettes supplémentaires, notre logique – je l'ai dit – est de faire participer tout le monde.
Sur les sept heures de travail supplémentaires, monsieur Jomier, vous êtes suffisamment assidu dans la vie politique pour avoir fait une lecture précise du texte de notre amendement. Celui-ci est très clair : l'attribution de ces heures se fera librement, dans le cadre d'une discussion entre les partenaires sociaux, au sein des entités et des branches. C'est une liberté que nous instaurons et il est fondamental pour nous d'offrir cette souplesse. De plus, vous aurez bien lu que la contribution financière concernera les employeurs et non les salariés. Certes, les salariés donneront du temps de travail, mais ils ne subiront aucune perte de revenus. C'est ainsi qu'a été rédigé notre amendement.
En réalité, ce qui nous oppose, c'est que de notre côté nous considérons que c'est la valeur du travail qui doit apporter de la rémunération aux salariés et des recettes à nos services publics, et non la valeur fiscale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission, vous avez décidé d'ouvrir dès maintenant le débat sur les fameuses sept heures de travail.
Si je comprends bien ce que vient de nous dire le président de la commission, ce sont les entreprises qui paieront et non les salariés, même s'ils travaillent sept heures de moins ; pardonnez-moi, mais ce n'est pas cohérent.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Lisez le texte de notre amendement !
Mme Laurence Rossignol. Il est vrai que vous prenez quelques arrangements avec le vocabulaire pour faciliter votre réflexion. En effet, vous parlez de « coût du travail » comme on parle du « coût de l'énergie », alors que cela n'est pas exactement la même chose, et vous ne parlez jamais de « rémunération du travail », terme qui est le plus approprié, pour couvrir le salaire direct et le salaire indirect. C'est ainsi que vous en arrivez à dire tout en même temps que les gens travailleront sept heures pour contribuer à l'effort et que ces sept heures non rémunérées seront pour la solidarité. Il y a donc bien une baisse, non du coût du travail, mais de la rémunération du travail.
Quand vous dites que les salariés doivent participer à l'effort et se serrer les coudes, nous disons qu'ils ne doivent pas tous contribuer de la même façon à l'effort. Ils doivent y contribuer de manière progressive, en fonction de leur rémunération. C'est le principe de l'impôt que nous appliquons. L'impôt étant progressif, la participation doit l'être également.
Si votre amendement est adopté, la rémunération des salariés baissera inéluctablement, car les entreprises ne pourront pas dégager la somme qui leur sera demandée sans prendre sur les salaires. Par conséquent, ce que vous proposez dans ce PLFSS, c'est de baisser les salaires, et il faut que vous l'assumiez. Quel que soit le sens dans lequel vous tournerez le problème, cela ne peut fonctionner que comme cela. Sinon, votre affaire ne tourne pas, car d'où pourrait venir l'argent ?
Les gens travailleront sept heures de moins, les entreprises donneront de l'argent à la sécurité sociale, et il n'y aurait aucune répercussion sur les salaires ? Dans ce cas, pourquoi les salariés travailleraient-ils sept heures de moins puisque ce ne sont pas eux qui doivent cotiser ? Ce que vous racontez n'a pas de sens. Assumez donc : vous voulez baisser la rémunération du travail. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Sept heures de plus ! Lisez au moins notre amendement !
Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. On ne cesse de dire et de répéter que, compte tenu de la situation, chacun doit contribuer et participer. On évite chaque fois de terminer la phrase en précisant qu'il le fera « à la hauteur de ses possibilités », mais admettons… Et nous pourrions à la limite être d'accord avec un tel constat, mais nous sommes mardi, il est seize heures, nous avons démarré hier l'examen du PLFSS et, depuis hier, vous avez déjà refusé les contributions sur les retraites élevées, sur les retraites chapeaux, sur les superprofits réalisés par la grande distribution, et je pense que la liste risque de s'allonger. Ainsi, « chacun doit contribuer », mais la liste de ceux qui, selon vous, doivent vraiment le faire est loin d'être claire…
De plus, monsieur le président de la commission, si je suis d'accord avec ce que vous avez dit sur le manque de réformes, est-ce vraiment aux citoyens de payer pour cela et pour l'absence de perspectives des gouvernements successifs qui en a été la cause ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 232 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 646 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 955 rectifié est présenté par Mmes Brulin, Silvani, Apourceau-Poly et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.
« La détermination de l'effort de l'employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l'entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L 2312-33 du code du travail. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 646.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à relever les taux des cotisations dues au titre de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) pour les entreprises présentant une sinistralité anormalement élevée.
Cette nouvelle tarification des risques professionnels permettrait de dégager des fonds pour réparer, évaluer et, surtout, prévenir les risques professionnels. Elle contribuerait ainsi à promouvoir la santé au travail.
La mise en place d'un tel malus figure du reste parmi les propositions du rapport parlementaire « Maladies professionnelles dans l'industrie : mieux connaître, mieux reconnaître, mieux prévenir ».
Même si la branche AT-MP était à l'équilibre, voire excédentaire par le passé, ce ne devrait plus être le cas à l'avenir si l'on parvenait à une meilleure réparation des préjudices subis par les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles. Avec la rapporteure pour la branche, Marie-Pierre Richer, nous avons ainsi travaillé pour trouver le juste équilibre entre réparation et prévention.
Toutefois, pour, d'une part, garantir le financement à terme de la branche AT-MP et faire en sorte qu'elle ne contribue pas à augmenter le déficit de la sécurité sociale, et, d'autre part, agir sur la prévention et exhorter les entreprises à investir dans l'amélioration des conditions de travail, nous devons mettre en place des mécanismes incitatifs en faveur de la prévention. Tel est l'objet de cet amendement.
Je précise que le dispositif de notre amendement a fait l'objet d'une expérimentation dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et qu'il a prouvé toute son efficacité : les efforts de prévention dans ce secteur ont bel et bien payé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l'amendement n° 955 rectifié.
Mme Céline Brulin. Cet amendement, identique au précédent, vise à augmenter le taux de cotisation patronale versée au titre du financement de la branche AT-MP pour les entreprises qui enregistrent un niveau de sinistralité élevé.
Selon nous, le très mauvais classement de la France en ce qui concerne les accidents du travail, notamment les accidents mortels, n'est pas une fatalité. Il est essentiel de faire plus de prévention et de faire en sorte que les entreprises s'engagent dans cette voie ; beaucoup d'entre elles le font d'ores et déjà, mais certaines doivent être responsabilisées si l'on veut qu'elles en fassent davantage.
Notre dispositif permettrait de dégager des moyens pour renforcer le travail de prévention et mieux réparer les préjudices subis par les victimes d'accidents du travail.
Tout comme vous nous proposez de dérembourser les médicaments – pour notre part, nous n'y sommes pas favorables, vous le savez –, au motif qu'il faudrait responsabiliser les patients – sous-entendu : ils consomment peut-être un peu trop de médicaments, alors, en en augmentant le coût, ils seront incités à en consommer moins –, nous vous proposons de responsabiliser les entreprises. Vous nous parlez d'efforts partagés : avec cet amendement, nous faisons précisément en sorte que les efforts soient mieux partagés.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Tout d'abord, je veux rappeler que des amendements similaires avaient été présentés lors de l'examen des deux précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale et que, chaque fois, la commission comme le Gouvernement avaient émis un avis défavorable.
Ensuite, je tiens à vous dire, mes chers collègues, qu'il existe déjà un certain nombre de dispositifs destinés à inciter les entreprises à faire des efforts, parce que, je suis d'accord avec vous, il faut absolument évaluer la réalité des efforts de prévention mis en œuvre par chaque entreprise pour anticiper une éventuelle hausse du nombre des accidents du travail ou l'apparition d'un certain mal-être au travail.
En premier lieu, la tarification AT-MP est déjà calculée en fonction du nombre de sinistres survenus dans les entreprises ou dans leur secteur d'activité, et de leur coût moyen : ainsi, en moyenne, plus de 70 % du montant des cotisations dépend de la sinistralité des entreprises.
En second lieu, et même si vous pouvez estimer que c'est insuffisant, les caisses d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat) peuvent imposer des majorations de cotisations – une sorte de malus – aux entreprises qui présentent des risques exceptionnels, notamment lorsqu'elles ne respectent pas les règles d'hygiène et de sécurité ou n'observent pas les mesures de prévention édictées par la caisse.
Le malus supplémentaire que vous proposez de créer n'est donc pas nécessaire ; la commission émet donc un avis défavorable sur vos deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 646 et 955 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 686 rectifié est présenté par Mmes Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas et Vayssouze-Faure, Mme G. Jourda, M. M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° 819 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 3 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 242-7 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des cotisations supplémentaires sont en particulier imposées aux entreprises donneuses d'ordre lorsqu'une entreprise sous-traitante dépasse un taux de sinistralité fixé par décret. »
La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l'amendement n° 686 rectifié
Mme Marion Canalès. Avec cet amendement, nous souhaitons aborder la problématique des accidents du travail, en particulier dans le secteur de la sous-traitance.
De nos jours, 38 % des entreprises ont recours à la sous-traitance pour un montant total d'environ 372 milliards d'euros, selon l'Insee. Or l'étude menée par la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) en mars 2023 démontre une surexposition aux accidents du travail des salariés de la sous-traitance, une surexposition qui touche en particulier les salariés intérimaires et qu'un décret paru le 5 juillet dernier vise à traiter en partie en redéfinissant la répartition des coûts des accidents du travail et des maladies professionnelles entre les entreprises de travail temporaire et les entreprises donneuses d'ordre.
Nous considérons qu'il faut s'inspirer de ce décret pour renforcer la culture de la prévention dans les entreprises ayant recours à la sous-traitance.
Tel est l'objectif de cet amendement : créer un levier supplémentaire pour faire baisser le nombre encore trop élevé d'accidents du travail, notamment liés à la sous-traitance. L'enjeu consiste aussi à garantir une égalité réelle, puisque, comme le soulignait rapport sénatorial relatif à la santé des femmes au travail, le phénomène de la sous-traitance joue un rôle majeur dans les difficultés que rencontrent de nombreuses travailleuses.
Dès lors, nous proposons non pas de déresponsabiliser les entreprises de sous-traitance, mais de fournir un cadre plus strict aux entreprises qui sous-traitent, afin de renforcer le principe de prévention et de faire reculer le nombre des accidents du travail dans ce secteur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 819.
Mme Raymonde Poncet Monge. Comme vient de le rappeler ma collègue, une étude conduite par la Dares en 2023 montre que les salariés des entreprises sous-traitantes sont surexposés aux risques professionnels, tant physiques qu'organisationnels.
Selon cette étude, en effet, dans les entreprises qui ne travaillent pas pour un donneur d'ordre, le taux d'accidents du travail reconnu par la Caisse nationale de l'assurance maladie est de 2,9 % en moyenne, alors que ce taux s'élève à 5,5 % dans les entreprises dont la part du chiffre d'affaires dépendant d'un donneur d'ordres est comprise entre 10 % et 49 %.
D'après une autre étude de la Dares parue en 2023, l'étendue des risques est d'autant plus importante que près de 43 % des salariés font partie d'une chaîne de sous-traitance en France et que 27 % d'entre eux travaillent dans un établissement preneur d'ordre. D'une certaine façon, les entreprises donneuses d'ordre externalisent les risques d'accidents de travail et de maladies professionnelles.
Ces données démontrent l'importance d'une responsabilisation des entreprises donneuses d'ordre pour changer la donne, tant les entreprises ayant recours à la sous-traitance se désintéressent souvent des accidents de travail ou des maladies professionnelles survenus chez leurs sous-traitants.
Aussi, cet amendement tend à contraindre les entreprises donneuses d'ordre à mieux prévenir les accidents du travail chez leurs sous-traitants. Pour ce faire, nous prévoyons d'augmenter le montant des cotisations qu'elles versent au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, dès lors que leur sous-traitant présente un taux de sinistralité élevé, qui dépasse un seuil fixé par décret.
Nous proposons, plutôt que de taxer les sous-traitants, de taxer l'entreprise donneuse d'ordre. Il s'agit de dissuader les entreprises de recourir à la sous-traitance lorsqu'elles le font dans le seul but d'externaliser le risque d'accidents du travail ou de mieux protéger les salariés des entreprises sous-traitantes.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous notez à juste titre, mes chères collègues, que la Dares a produit une étude extrêmement intéressante sur le sujet ; j'ajouterai que d'autres articles tout aussi passionnants sont venus enrichir notre réflexion.
Vous faites également observer avec raison que le recours à la sous-traitance est très courant dans certains secteurs d'activité et qu'une part significative des accidents du travail concerne des salariés d'entreprises extérieures.
C'est du reste pourquoi le code du travail n'est pas muet sur le sujet – sans oublier les très nombreux travaux parlementaires menés autour de cette problématique : il prévoit ainsi que le responsable de l'entreprise utilisatrice doit assurer la coordination générale des mesures de prévention des risques professionnels qu'il prend et de celles que prennent l'ensemble des responsables des entreprises extérieures intervenant dans son établissement. En cas de risques spécifiques liés à la présence de salariés de différentes entreprises sur un même site, les entreprises concernées doivent aussi établir un plan de prévention.
Vous pourriez m'opposer que ces dispositions ne sont pas toujours respectées, certes, mais un certain nombre de protocoles contraignants ont tout de même déjà été mis en place.
Enfin, dans ce cadre, les Carsat peuvent, notamment en cas de risques liés aux interférences induites par la sous-traitance, enjoindre à l'entreprise utilisatrice de prendre des mesures de prévention. En cas d'inobservation des mesures prescrites, les Carsat peuvent imposer à l'entreprise utilisatrice le paiement de cotisations supplémentaires.
Compte tenu du droit en vigueur et de la surveillance propre à ce secteur, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 686 rectifié et 819.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1319 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 3 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 382-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot « diffusion », sont insérés les mots « , la représentation » ;
2° Au second alinéa, après les occurrences du mot « la diffusion » sont insérés les mots : « , de la représentation ».
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. En France, les artistes et les auteurs tirent l'essentiel de leurs revenus du droit d'auteur, qui est défini par le code de la propriété intellectuelle.
Une rémunération n'étant pas un salaire à proprement parler, une affiliation des artistes auteurs au régime général a été progressivement mise en place, sur le fondement d'une conversion du montant du droit d'auteur en nombre d'heures au Smic horaire.
Mes chers collègues, comme vous le savez, la rémunération de nos artistes auteurs est extrêmement faible. En 2017, 53 % des artistes graphiques et plastiques ont perçu moins de 8 703 euros de revenus artistiques. C'est pourquoi, en 2020, le rapport de Bruno Racine recommandait d'étendre le périmètre des activités accessoires qui leur permettraient d'atteindre plus facilement le seuil d'affiliation au régime général.
Le code de la propriété intellectuelle prévoit explicitement l'existence d'un droit de représentation, qui justifierait de rémunérer les artistes visuels lors des expositions ou les auteurs lors des salons.
Cet amendement vise donc à favoriser la rémunération du droit de représentation des artistes auteurs et à aligner son régime social sur celui du droit d'auteur sur la base du barème prévu par le ministère de la culture, même si celui-ci n'est toujours pas appliqué.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission n'a pas l'expertise nécessaire pour analyser cet amendement. Aussi demande-t-elle son avis au Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, la représentation consiste en la diffusion et l'exploitation publiques d'une œuvre artistique. Aujourd'hui, les artistes jouissent du droit de percevoir une rémunération en contrepartie de cette représentation.
Dans les faits, la représentation est cependant très peu déclarée, si bien que les artistes qui ont des œuvres diffusées se voient rarement verser la contribution que les diffuseurs leur doivent. Le rendement de l'imposition supplémentaire que vous proposez risque d'être faible, car la difficulté à laquelle nous sommes confrontés actuellement est celle d'un manque d'application du droit et d'un trop faible contrôle de cette contribution.
Le Gouvernement est donc défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Même avis.
Mme la présidente. L'amendement n° 1320 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l'article 3 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 382-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 382–… ainsi rédigé :
Article L. 382–… – Un décret en Conseil d'État prévoit les conditions particulières de prise en considération des cotisations versées au régime général d'assurance vieillesse pour les personnes mentionnées à l'article L. 382-1 pour la liquidation des prestations, en raison des graves dysfonctionnements intervenus dans la gestion de l'organisme en charge de la sécurité sociale des auteurs entre le 1er janvier 1977 et le 1er janvier 2019.
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. La mauvaise gestion de l'Agessa, l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, a placé ces derniers dans une situation de grande insécurité juridique au moment de faire valoir leurs droits à la retraite. Ainsi, pendant quarante ans, 190 000 auteurs n'auraient pas cotisé pour leur retraite, l'Agessa ne leur ayant jamais adressé d'appel à cotisations.
Ces graves dysfonctionnements ont fait l'objet de longues descriptions dans les rapports successifs des inspections générales des affaires sociales et des affaires culturelles en 2014 et en 2018, puis dans le rapport de Bruno Racine en 2020. Ils ont toutefois perduré après la fusion, en 2022, de l'Agessa et de la Maison des artistes. C'est par exemple sur ce motif que, le 20 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Paris a condamné l'État à indemniser le prix Nobel de littérature, Jean-Marie Gustave Le Clézio.
Mes chers collègues, les réponses du ministère de la culture ne sont pas à la hauteur de la détresse financière des auteurs concernés. En 2017, un dispositif de rachat des trimestres a été mis en place, mais beaucoup le considèrent comme étant hors de portée de la plupart des auteurs aux revenus très modestes.
Certes, une commission d'action sociale de la sécurité sociale des artistes auteurs aide certains de ces artistes, sous conditions de ressources, à racheter leurs trimestres et prend en charge une partie de leurs cotisations, mais son bilan est relativement dérisoire.
C'est pourquoi cet amendement vise à reconnaître la responsabilité de l'État dans ce dossier et à imposer au ministère de la culture de prendre un décret prévoyant des mesures de compensation plus favorables aux auteurs lésés.