Mme Pascale Gruny. Tout à fait !

M. Bruno Retailleau, ministre. Il leur arrive de prendre position contre l’État, voire, parfois, d’agir contre lui, alors qu’elles opèrent pour son compte et qu’elles assument une mission de service public.

Je souhaite donc agir, à l’avenir, sur plusieurs leviers. La Cour des comptes rendra son rapport dans quelques mois. Nous verrons ce qu’elle préconisera.

Quoi qu’il en soit, je souhaite sanctionner contractuellement les associations qui ne respectent pas strictement les obligations liées à leur mission de service public, notamment celle de neutralité.

Je souhaite aussi, à l’avenir, confier à l’Ofii des missions d’assistance juridique ; c’est l’une des mesures qui doivent figurer dans le projet de loi sur l’immigration que vous examinerez bientôt. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pascale Gruny. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Je donnerai, bien entendu, un avis défavorable aux deux premiers amendements en discussion. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pascale Gruny. Vous n’avez pas à le donner !

M. Guy Benarroche. J’ai été content d’apprendre, en tout cas, que les associations étaient de gauche. Je connais beaucoup de personnes engagées dans des associations, y compris d’aide aux migrants, qui ne sont pas de gauche. (M. Joshua Hochart sexclame.) Mais si elles le sont, tant mieux pour nous !

Monsieur Hochart, vous pensez que l’État économiserait de l’argent s’il prenait à sa charge toutes les tâches effectuées au quotidien par ces associations, souvent bénévoles, et toutes les missions d’aide aux migrants qu’elles assument. Vous croyez en somme qu’il gagnerait quelques millions en se substituant aux associations dans tous les domaines. Vous êtes donc très étatiste ! Vous êtes pour un État fort, centralisateur, qui supprimerait toutes les associations… Nous ne manquerons pas de le faire savoir et de diffuser les positions du Rassemblement national, cela battra en brèche certains préjugés…

Bien entendu, il faut contrôler, vérifier et suivre ce que font les associations, car certaines peuvent déraper, politiquement et financièrement. L’administration fait bien ce travail. Si on peut l’améliorer, tant mieux. Mais cela ne justifie nullement de supprimer, par principe, des subventions versées à des gens qui travaillent pour l’État, la plupart du temps pour un moindre coût, car ils n’en tirent, personnellement, pas le moindre revenu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous voterons l’amendement n° II-525 rectifié de Corinne Narassiguin, mais évidemment pas ceux du Front national.

Cela étant précisé, certains propos du ministre appellent une réponse. Je note d’ailleurs l’extrême pédagogie dont il fait preuve à l’égard de ses nouveaux compagnons de majorité d’extrême droite… (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)

On ne peut pas tout dire, monsieur le ministre ! Vous pouvez éventuellement affirmer que l’on doit faire des économies dans tous les champs de l’action publique, même si nous pouvons le regretter – vous connaissez notre position à cet égard. En revanche, vous ne pouvez pas prétendre que ces associations ne respecteraient pas les conventions qu’elles ont conclues avec l’État. Ce faisant, vous mettez en cause soit le travail de votre prédécesseur, M. Darmanin, ce que je n’ose imaginer, soit celui de vos services, puisque l’activité des associations doit être vérifiée annuellement.

Par ailleurs, vous semblez prendre le parti de ceux qui supposent à ces associations un engagement politique, ce qui discrédite leur travail, de manière à vrai dire peu rationnelle.

Les choses sont simples : soit nous considérons que les personnes présentes sur notre territoire qui ont des problèmes de santé mentale, qui sont parfois à la rue, etc., doivent, pour le bien de tous les citoyens, être prises en charge d’une manière ou d’une autre et être accompagnées ; soit ce n’est pas le cas, auquel cas, sur ce point, nous avons évidemment une vraie divergence.

Monsieur le ministre, vous devriez être plus circonspect dans votre expression lorsque vous semblez condamner ces associations.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Je souhaiterais obtenir une précision, car je n’ai pas bien compris si les associations en question étaient pointées du doigt parce qu’elles prennent des positions dans le débat public, ou en raison de la qualité de l’exercice de leur mission de service public.

Des associations qui assument des missions de service public tout en prenant position dans le débat public, il en existe de fait dans de nombreux domaines, tels que le handicap ou l’insertion, et non pas simplement dans le secteur de l’immigration.

Je voudrais donc comprendre si le débat porte sur le fait que des associations exerçant des missions de service public affichent des positions, ou cherchent à mettre en lumière des dysfonctionnements potentiels au sein de l’État, ou bien s’il porte sur la qualité et l’effectivité de leur accomplissement de la mission qui leur a été déléguée. Autrement, nous entrons dans un autre débat, et cela confinerait alors au délit de faciès… (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart, pour explication de vote.

M. Joshua Hochart. Monsieur Benarroche, vous avez extrapolé à partir de mes propos. Je n’ai pas affirmé que toutes les associations étaient de gauche – ça, c’est vous qui le dites ! J’ai dit que les associations qui utilisent l’argent public pour ne pas respecter la loi française soutiennent souvent des partis de gauche.

Vous avez évoqué les bénévoles. Je ne sais pas dans quel monde vous vivez, mais, je vous rassure, les cadres dirigeants de ces structures d’aide aux migrants s’engraissent sur le dos des bénévoles qui œuvrent sur le terrain !

Enfin, monsieur le ministre, vous avez indiqué qu’il y avait des règles du jeu. Je veux bien que l’on joue, mais l’argent public, ces millions d’euros que nous leur octroyons chaque année, sert à bafouer les lois de la République française et à intenter des procès contre l’État. C’est là que réside le problème de l’efficacité du service public que nous soulevons. Cet argent que nous leur donnons est utilisé pour nous attaquer en justice, nous et l’État !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vive le Front national !

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je trouve pour ma part que nous sommes extrêmement raisonnables, car les crédits de cette mission demeurent très importants.

J’ai longtemps siégé, en tant que membre nommé par le président du Sénat, au conseil d’administration de l’Ofii. Celui-ci regrettait qu’on ne lui confie pas davantage de tâches juridiques liées à l’insertion des migrants. Il me semble en effet plus logique de confier cette mission à l’Ofii plutôt qu’à des associations, quels que soient par ailleurs leurs engagements.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Elles ne font pas le même métier !

M. Roger Karoutchi. Nous avons créé une série de structures étatiques pour assurer l’accueil, l’insertion et l’intégration des étrangers. Curieusement, ces structures se voient doublées, voire parfois contredites, par des associations qui ont signé des conventions avec les pouvoirs publics pour exercer des missions de service public, mais qui ne s’entendent pas avec l’Ofii.

Je suis au regret de devoir faire remarquer que la politique migratoire est la politique régalienne par excellence. S’il le faut, renforçons les pouvoirs et les capacités d’action de l’Ofii, car il est plus logique que ce soit cet organisme, donc l’administration de l’État, qui agisse en la matière, plutôt que des associations.

Je ne critique pas l’ensemble des associations : certaines réalisent un excellent travail, mais force est de constater, comme on peut le lire dans la presse, qu’il existe parfois des contradictions profondes entre l’attitude et le comportement de certaines associations, d’une part, et l’action des structures de l’État, d’autre part. Ces dernières ne sont pas partisanes : il s’agit de structures administratives, à l’instar de l’Ofii, à qui je tiens à rendre hommage ce soir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Retailleau, ministre. Je veux dire à Marie-Pierre de La Gontrie, dont je connais le sens des subtilités et de la nuance politique, qu’il est un peu fort de café de nous accuser de proximité avec le Rassemblement national au moment même où ses députés viennent de décider de mêler leurs voix à celles de La France insoumise, qui, il y a quelques jours à peine, déposait une proposition de loi ne visant à rien de moins qu’à abroger le délit d’apologie du terrorisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est bien le Premier ministre qui a fait ces propositions à Mme Le Pen !

M. Bruno Retailleau, ministre. Toute relation contractuelle implique des contraintes, de part et d’autre. J’entends que le principe de neutralité soit respecté par ces associations lorsqu’elles exercent une mission de service public, quelle qu’elle soit.

Par ailleurs, j’ai apprécié les propos de Roger Karoutchi. Comme je l’ai indiqué, la politique migratoire est au cœur des missions régaliennes de l’État. Eh bien, je ne suis pas favorable à ce que l’État sous-traite ses responsabilités : je souhaite que l’État puisse exercer ses responsabilités régaliennes directement.

Souvenez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, des débats qui ont eu lieu il y a quelques années lorsqu’on a voulu donner la possibilité à l’Ofii de réaliser des examens médicaux : certains se sont drapés dans leur dignité pour dire que l’Ofii ne pouvait pas faire de contrôles médicaux dans les CRA. Or cela s’est fait, et tout se passe très bien, sans aucun problème. Je propose d’adopter la même logique pour ce qui est du conseil juridique dans les CRA.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas ce que vous avez dit tout à l’heure !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-293.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-295.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-525 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-302 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et MM. Reichardt et Canévet, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

 

 

Intégration et accès à la nationalité française

 

 200 000 000

 

 200 000 000

TOTAL

 

200 000 000

 

200 000 000

SOLDE

- 200 000 000

- 200 000 000

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, comme les précédents, porte sur les associations chargées de missions en matière d’asile et d’immigration.

Chaque année, je demande à la commission des lois de nous transmettre le document qui récapitule les aides versées à ces associations. J’ai d’ailleurs formulé cette observation lorsque la commission des finances a examiné ces crédits. Celle-ci a demandé à la Cour des comptes de réaliser un contrôle sur ce sujet. Les sommes en jeu s’élèvent à 1 milliard d’euros exactement, du moins selon le document de 2023, car je n’ai pas eu les chiffres pour cette année – je n’ai pas dû être assez gentille… (Sourires.)

Cet amendement vise donc à réduire les crédits destinés à ces associations. Je proposerai par ailleurs, en miroir, d’accroître d’un même montant les crédits en faveur de l’asile. Le droit d’asile est en effet extrêmement important et, lorsqu’on reçoit des gens en France, il faut pouvoir les accueillir.

Je voudrais aussi vous dire, monsieur le ministre, que ce débat me surprend toujours. Des articles de presse ont révélé certains dysfonctionnements. Des associations organisent des collectes en ligne pour détourner les procédures ou protéger des étrangers ayant fait l’objet d’une OQTF. Il est anormal que des associations chargées d’une mission de service public s’efforcent ainsi de contourner les lois de la République.

C’est la raison pour laquelle je propose cette diminution de crédits.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Il est défavorable.

Nous devrons nous intéresser à l’ensemble des dépenses relatives à l’asile. Le rapport de la Cour des comptes sur l’association Coallia, la plus importante d’un point de vue financier, était éloquent. Cette affaire a révélé l’absence de contrôle de l’État sur ces associations, lesquelles sont sursollicitées en raison des besoins et de l’ampleur de la pression migratoire constante. Celle-ci les met constamment sous pression. Leur action est perturbée, alors qu’elles faisaient autrefois un bon travail et qu’elles se sont toujours inscrites, historiquement, de manière très digne dans le paysage français.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre. Je fais mien l’objectif de Mme la sénatrice Nathalie Goulet. Le problème est que cet amendement vise le programme 104. Or celui-ci ne concerne pas seulement les associations : il comporte aussi les crédits de l’Ofii. Cet organisme joue un rôle essentiel, notamment pour mettre en œuvre le CIR, le programme Agir ou d’autres dispositifs encore.

Votre intention, madame la sénatrice, est positive, mais l’adoption de votre amendement aboutirait à diminuer d’autres dépenses essentielles. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je vais retirer mon amendement, dont le dispositif est sans doute mal calibré.

Mme la rapporteure a évoqué l’association Coallia. Celle-ci perçoit des aides de plus de 97 millions d’euros ; ce n’est tout de même pas rien !

Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur le fait que le blanchiment lié au trafic de migrants s’élève environ à 7 milliards d’euros en Europe. Je connais votre fort engagement contre la criminalité financière et de la grande criminalité ; le trafic de migrants est devenu un vrai business. Il importe donc de contrôler les associations. Notre commission des finances et la Cour des comptes réalisent un travail important sur ce sujet. Nous débattrons à nouveau de cette question l’année prochaine.

Cela étant dit, je retire l’amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° II-302 rectifié est retiré.

L’amendement n° II-294, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

 

 

 

 

Intégration et accès à la nationalité française

 

55 200 000

 

55 200 000

TOTAL

 

55 200 000

 

55 200 000

SOLDE

- 55 200 000

- 55 200 000

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Depuis plus d’une décennie, les opérateurs publics et associatifs ont vu leur budget croître de manière exponentielle. Entre 2012 et 2024, les dépenses de ces structures sont passées de 48 milliards à 81 milliards d’euros.

Cette explosion budgétaire reflète l’incapacité de l’État à rationaliser les missions confiées à ces organismes, malgré les promesses récurrentes de réformes, notamment sous la présidence d’Emmanuel Macron, par le biais du programme Action publique 2022. L’accueil des étrangers primo-arrivants est une mission qui nécessite une approche rigoureuse, basée sur la maîtrise des coûts et l’efficacité des dispositifs.

Bien que l’Ofii soit un opérateur public, cet organisme fonctionne selon des règles trop souples, qui favorisent les embauches et les dépenses superflues.

Cet amendement vise donc à réduire de 55,2 millions d’euros les crédits alloués à ces structures, dans la perspective de procéder à leur réinternalisation progressive au sein de l’État. Cela permettrait de rétablir un contrôle direct sur des missions essentielles et régaliennes, tout en répondant aux exigences de sobriété budgétaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-294.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° II-579, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

 

328 236 000

 

328 236 000

Intégration et accès à la nationalité française

328 236 000

 

328 236 000

 

TOTAL

328 236 000

328 236 000

328 236 000

328 236 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Précisons avant tout qu’un amendement identique a été adopté à l’Assemblée nationale.

Selon les chiffres de l’ONU et de l’Unicef, le flux de déplacés ukrainiens s’élève à plus de 9,8 millions de personnes, parmi lesquelles on compte plus de 2,5 millions d’enfants. Ces personnes ont fui majoritairement vers les pays européens frontaliers de l’Ukraine, mais aussi vers le reste du continent. En France, 65 358 réfugiés venus d’Ukraine ont ainsi été recensés à l’entrée du territoire national entre le 24 février et le 1er décembre 2022 – 98 % d’entre eux sont des ressortissants ukrainiens.

Compte tenu de l’intensification du conflit en Ukraine et de la décision prise par la Commission européenne, le 28 septembre 2023, de prolonger le bénéfice de la protection temporaire accordée aux réfugiés ukrainiens jusqu’au 4 mars 2026, il nous apparaît nécessaire d’inscrire dans ce texte les dépenses que l’on peut prévoir à ce titre, notamment en raison de leur financement par le budget opérationnel du programme 303 « Immigration et asile », puisque les bénéficiaires de la protection temporaire sont éligibles à l’ADA.

La question de l’hébergement des personnes réfugiées est à la fois essentielle et problématique. Au moment où la guerre s’intensifie en Ukraine, où les attaques russes plongent les Ukrainiens dans une situation difficile, et où l’aide des pays européens à l’Ukraine s’intensifie pour faire face à ce changement d’intensité de la guerre, le Gouvernement ne saurait revenir, nous semble-t-il, sur sa capacité d’accueil.

Les hébergements collectifs dits « SAS Ukraine » comprennent actuellement 11 000 places, afin d’héberger une partie des bénéficiaires de la protection temporaire.

Nous souhaitons inscrire dans le projet de loi de finances le montant de 328 236 000 euros au titre des dépenses inhérentes à ces structures qui doivent fournir un accueil, un accompagnement et un hébergement de qualité.

Cette inscription de crédits renforcerait la lisibilité des projets d’accompagnement consacrés aux Ukrainiens.

Cet amendement, qui a été adopté à l’Assemblée nationale, a été rédigé avec France terre d’asile et la Fédération des acteurs de la solidarité.

Le recours proposé à des transferts de crédits est uniquement formel. Nous appelons le Gouvernement à lever le gage et à prendre en compte, dans le projet de loi de finances, ce montant qui devra, de toute façon, être déboursé pour accueillir, comme cela est malheureusement prévisible, plus de réfugiés ukrainiens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. On ne peut que se réjouir du fait que la présente mission intègre bel et bien, en 2025, les crédits destinés à l’accueil des réfugiés ukrainiens.

Par ailleurs, le nombre de ces réfugiés diminue ; il ne me semble donc pas que l’augmentation proposée s’impose.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre. Comme vient de le rappeler la rapporteure spéciale, la mission intègre, dans ce PLF pour la première fois, les crédits pour les réfugiés ukrainiens, ce qui montre le souci de sincérité du Gouvernement.

Ensuite, alors que ces réfugiés étaient 96 000 à l’été 2022, ils ne devraient plus être que 35 000 en 2025 si les tendances constatées se poursuivent.

Enfin, nous voulons, après trois années de présence sur le territoire, que nos amis ukrainiens puissent sortir des dispositifs exceptionnels pour intégrer des cadres plus pérennes. Nous ne pouvons pas les enkyster, si je peux me permettre cette expression, dans un statut exceptionnel ; nous devons au contraire les intégrer complètement.

Si la guerre entre la Russie et l’Ukraine devait évoluer d’une manière qui inverse les tendances actuelles, il serait toujours possible alors pour le Gouvernement de prendre de nouvelles mesures.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-579.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-298, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

 

200 000 000

 

200 000 000

Intégration et accès à la nationalité française

 

 

 

 

TOTAL

 

200 000 000

 

200 000 000

SOLDE

- 200 000 000

- 200 000 000

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. L’explosion des coûts liés au droit d’asile est une situation alarmante. En 2025, l’action dédiée au droit d’asile représentera 80 % du budget du programme « Immigration et asile », avec des crédits dépassant le milliard d’euros.

L’allocation pour demandeur d’asile, qui coûte actuellement plus de 356 millions d’euros, est une aide qui doit être repensée pour en limiter l’effet attractif. Ce n’est pas le rôle de l’État de financer indéfiniment des dispositifs qui encouragent une immigration incontrôlée.

Le présent amendement tend donc à réduire l’enveloppe de ces aides de 200 millions d’euros ; cela passe par une rationalisation des dépenses et une priorisation des ressources vers des dispositifs mieux encadrés. Il s’agit d’un choix indispensable pour garantir la soutenabilité de nos politiques publiques.

Mme la présidente. L’amendement n° II-583, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

47 200 000

 

47 200 000

 

Intégration et accès à la nationalité française

 

47 200 000

 

47 200 000

TOTAL

47 200 000

47 200 000

47 200 000

47 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. L’allocation pour demandeur d’asile n’a pas vu son barème revalorisé depuis sa création, en 2015, et elle subit même, d’année en année, des coupes budgétaires.

Cela fait plusieurs années que, à chaque projet de loi de finances, nous nous exprimons contre cette diminution, et les arguments qui nous ont été opposés – moins d’arrivées seraient prévues, une nouvelle loi viendrait… – nous ont toujours surpris.

Cette fois, le projet annuel de performances du programme 303 « Immigration et asile » prévoit une augmentation du flux de demandes d’asile de 5 % sur l’année 2025, ce qui réduit nettement la pertinence de l’un des principaux arguments mis en avant pour baisser le montant des crédits alloués à l’ADA.

Pourtant, l’ADA est le seul moyen de survivance pour les demandeurs d’asile, puisque, contrairement à ce qui a été mis en place pour les Ukrainiens, ils ne peuvent pas signer de contrat de travail.

La trajectoire de baisse de l’ADA est donc tout simplement inique. Cette sous-budgétisation traduit le manque d’ambition de la politique d’accueil du Gouvernement, qui préfère flécher le budget vers le refoulement et la construction de centres de rétention administrative. Le ministère de l’intérieur s’inscrit ainsi dans la droite ligne d’une politique de criminalisation des étrangers, souvent poussés à travailler au noir dans des conditions plus que précaires, une politique qui tend à détruire le statut de l’asile.

Aussi, le groupe GEST demande la suppression de cette baisse de 47,2 millions d’euros. La proposition d’une réduction symétrique des crédits du programme « Intégration et accès à la nationalité française » est uniquement formelle : nous appelons le Gouvernement à lever le gage.

Mme la présidente. L’amendement n° II-527 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Immigration et asile

47 000 000

 

47 000 000

 

Intégration et accès à la nationalité française

 

47 000 000

 

47 000 000

TOTAL

47 000 000

47 000 000

47 000 000

47 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement, presque identique à celui que Guy Benarroche vient de si bien défendre, tend à maintenir l’enveloppe globale de l’allocation pour demandeur d’asile à son niveau de 2024, alors que ces crédits sont, une nouvelle fois, en baisse une fois prise en compte l’intégration des crédits destinés à protéger les réfugiés ukrainiens.

Sur ce sujet, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, nous ne voyons pas pourquoi le Gouvernement s’acharne à réduire les moyens de subsistance des demandeurs d’asile, tout en leur refusant l’accès au marché du travail le temps de l’instruction de leur demande.