Sommaire
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud, Mme Catherine Conconne.
2. Mise au point au sujet de votes
3. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la culture
M. Bernard Fialaire, rapporteur pour avis de la commission de la culture
Mme Anne Genetet, ministre de l’éducation nationale
4. Mise au point au sujet de votes
5. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Amendement n° II-18 de la commission. – Adoption par scrutin public n° 136.
Amendement n° II-477 rectifié de M. Michel Canévet. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-143 de M. Aymeric Durox. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-464 de Mme Samantha Cazebonne. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-144 de M. Aymeric Durox. – Rejet.
Amendement n° II-451 de M. Yan Chantrel. – Rejet par scrutin public n° 138.
Amendement n° II-20 de la commission. – Adoption.
Amendement n° II-145 de M. Aymeric Durox. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-450 de Mme Marie-Pierre Monier. – Adoption.
Amendement n° II-147 de M. Aymeric Durox. – Rejet.
Amendement n° II-148 de M. Aymeric Durox. – Rejet.
Amendement n° II-554 rectifié de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-567 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-439 de Mme Colombe Brossel. – Rejet.
Amendement n° II-488 rectifié de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Amendement n° II-562 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-563 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-149 de M. Aymeric Durox. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-546 rectifié de M. Bernard Pillefer. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-224 rectifié de Mme Monique de Marco. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-77 rectifié de Mme Mathilde Ollivier. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-557 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-208 rectifié de M. Ahmed Laouedj. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-431 de Mme Marie-Pierre Monier. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-223 de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Amendement n° II-556 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-558 de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Rejet.
Amendement n° II-207 rectifié ter de M. Ahmed Laouedj. – Rejet.
Amendement n° II-78 rectifié de Mme Mathilde Ollivier. – Rejet.
Amendement n° II-438 de Mme Marie-Pierre Monier. – Rejet.
Amendement n° II-575 rectifié bis de M. Cédric Vial. – Adoption.
Amendement n° II-570 rectifié de Mme Evelyne Corbière Naminzo. – Devenu sans objet.
Renvoi de la suite de la discussion.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché
6. Mises au point au sujet de votes
7. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins
Amendement n° II-481 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.
Amendement n° II-541 rectifié de Mme Ghislaine Senée. – Retrait.
Amendement n° II-423 rectifié de Mme Monique de Marco. – Rejet.
Amendement n° II-453 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° II-457 rectifié de M. Dominique Théophile. – Non soutenu.
Amendement n° II-459 rectifié de Mme Anne Souyris. – Adoption.
Amendement n° II-167 rectifié de M. Philippe Mouiller. – Retrait.
Amendement n° II-592 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° II-547 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° II-550 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° II-605 rectifié de Mme Anne Souyris. – Rejet.
Amendement n° II-503 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° II-604 de Mme Audrey Bélim. – Rejet.
Amendement n° II-472 rectifié de M. Mikaele Kulimoetoke. – Non soutenu.
Amendement n° II-571 de Mme Audrey Bélim. – Rejet.
Amendement n° II-338 rectifié de M. Stéphane Le Rudulier. – Rejet.
Amendement n° II-532 rectifié ter de M. Daniel Chasseing. – Rejet.
Amendement n° II-374 rectifié ter de M. Xavier Iacovelli. – Retrait.
Amendement n° II-379 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Vote sur les crédits de la mission
Adoption des crédits de la mission « Santé », figurant à l’état B, modifiés.
Amendement n° II-600 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Rejet.
Amendement n° II-427 de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° II-601 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Suspension et reprise de la séance
Immigration, asile et intégration
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale de la commission des finances
Mme Muriel Jourda, rapporteur pour avis de la commission des lois
M. Olivier Bitz, rapporteur pour avis de la commission des lois
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Amendement n° II-297 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-480 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.
Amendement n° II-293 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-295 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-525 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-302 rectifié de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.
Amendement n° II-294 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-579 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-298 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-583 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-527 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-587 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-584 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-299 de M. Joshua Hochart. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-521 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-522 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-580 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-528 rectifié de M. Hussein Bourgi. – Rejet.
Amendement n° II-300 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-581 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-608 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-526 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-523 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-530 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-529 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-586 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-585 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° II-296 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-540 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° II-524 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Rejet.
Amendement n° II-582 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Vote sur les crédits de la mission
Adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B, modifiés.
Amendement n° II-531 rectifié de Mme Corinne Narassiguin. – Adoption.
8. Mise au point au sujet de votes
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
9. Loi de finances pour 2025. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
M. Bruno Belin, rapporteur spécial de la commission des finances
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances
M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères
M. Jérôme Darras, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois
Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois
Demande d’examen séparé et de regroupement thématique d’amendements ; M. Claude Raynal, président de la commission des finances. – Adoption.
Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers (suite)
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur
Amendement n° II-479 rectifié de M. Michel Canévet. – Retrait.
Amendement n° II-518 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-516 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-537 de Mme Cécile Cukierman. – Retrait.
Amendement n° II-353 de M. Grégory Blanc. – Rejet par scrutin public n° 143.
Amendement n° II-517 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-319 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-321 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-360 de M. Jérôme Durain. – Rejet par scrutin public n° 144.
Amendement n° II-375 rectifié ter de M. Xavier Iacovelli. – Retrait.
Amendement n° II-357 rectifié de M. Jérôme Durain. – Rejet.
Amendement n° II-511 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-538 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° II-576 de Mme Salama Ramia. – Retrait.
Amendement n° II-591 de Mme Salama Ramia. – Retrait.
Amendement n° II-595 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° II-318 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-510 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-358 rectifié de M. Jérôme Durain. – Rejet.
Amendement n° II-320 de M. Joshua Hochart. – Rejet.
Amendement n° II-536 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° II-589 de M. Grégory Blanc. – Rejet.
Amendement n° II-588 de M. Grégory Blanc. – Retrait.
Amendement n° II-519 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-499 de Mme Nathalie Goulet. – Non soutenu.
Amendement n° II-361 de M. Jérôme Durain. – Adoption.
Vote sur les crédits de la mission
Adoption des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B, modifiés.
Amendement n° II-362 rectifié de M. Jérôme Durain. – Rejet.
Amendement n° II-514 de Mme Mélanie Vogel. – Rejet.
Amendement n° II-596 rectifié de M. Olivier Jacquin. – Retrait.
compte d’affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers
Amendement n° II-364 rectifié bis de M. Arnaud Bazin. – Retrait.
Vote sur les crédits du compte spécial
Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », figurant à l’état D, modifiés.
10. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Alain Marc
vice-président
Secrétaires :
M. Jean-Michel Arnaud,
Mme Catherine Conconne.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Lors du scrutin public n° 135, nos collègues Vincent Delahaye et Claude Kern souhaitaient voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
3
Loi de finances pour 2025
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (projet n° 143, rapport général n° 144, avis nos 145 à 150).
Nous en sommes parvenus aux dispositions de la seconde partie du projet de loi de finances.
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
M. le président. Nous allons à présent entamer l’examen des différentes missions.
Enseignement scolaire
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, la mission « Enseignement scolaire », dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur spécial, représente – heureusement – toujours la première mission du budget de l’État. Sans compter la contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions », elle devrait atteindre 64,5 milliards d’euros en 2025.
Cher Alexandre Portier, comme je l’avais dit voilà quelques jours dans cet hémicycle : « […] si Marianne exerçait un métier, elle serait probablement professeur, tant République et école sont liées depuis 1880. » Et les fameux hussards noirs de la République, chers à Charles Péguy, incarnent parfaitement cette symbiose entre République et école. Aussi, dans notre pays, chaque fois que l’on parle d’école, les débats sont passionnels.
Contrairement aux deux années précédentes, les dépenses de la mission sont stables pour 2025. Mais, depuis 2022, les crédits avaient augmenté de 17 %, soit 9,2 milliards d’euros. Cette hausse était avant tout due aux revalorisations nécessaires, et pourtant encore insuffisantes, des rémunérations des personnels enseignants, qui représentent 74 % des 1,2 million d’emplois de la mission. En 2022, les enseignants français étaient, en moyenne, moins bien payés que leurs homologues de nombreux pays européens, notamment le Luxembourg, l’Allemagne, le Royaume-Uni ou encore le Portugal. Une telle situation n’est ni acceptable ni souhaitable pour des personnels aux missions aussi indispensables.
Des efforts substantiels ont donc été faits pour revaloriser les salaires et tenter d’améliorer l’attractivité du métier, qui n’est plus très forte aujourd’hui. Les deux augmentations du point d’indice de la fonction publique, en 2022 et 2023, ainsi que la revalorisation de la rémunération-socle des enseignants, ont permis des améliorations substantielles, tout comme le pacte enseignant, même si tout le monde n’en bénéficie pas.
Au total, sans ces différentes revalorisations, les dépenses de personnel auraient été moins élevées de 4,5 milliards d’euros en 2025, ce qui montre l’effort budgétaire important de ces dernières années en faveur de la mission « Enseignement scolaire ». On peut toujours faire mieux, mais ce n’était déjà pas mal.
Au-delà de la stabilité de ces moyens, il ne vous aura pas échappé que le point le plus marquant de ce projet de budget, le récif tranchant de cette année, est la baisse du plafond d’emplois. Ainsi, 4 000 emplois de professeurs pourraient – je l’exprime au conditionnel – être supprimés, dont 3 815 dans le premier degré.
La baisse démographique, justification d’une telle proposition, est réelle et ne peut être niée : le nombre d’élèves scolarisés dans le premier degré a déjà baissé de 6 % entre 2011 et 2023. Malheureusement, cela va s’accentuer avec 350 000 élèves de moins entre 2023 et 2028. Toutefois, s’il ne faut ignorer ni la démographie ni les mathématiques, la politique ne saurait se résumer à un exercice purement comptable. L’art du politique est de rendre souhaitable ce qui est possible. Est-il souhaitable que la France soit l’un des États de l’OCDE avec l’un des pires taux d’encadrement ? Non.
D’ailleurs, les politiques volontaristes menées par votre ministère consistent toujours à baisser le taux d’encadrement, que ce soit pour les classes dédoublées ou pour les groupes de besoins. Soyons donc cohérents : 4 000 enseignants en moins, c’est aller trop loin.
Mme Marie-Pierre Monier. C’est sûr !
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Cette diminution des effectifs, qui doit tout de même tenir compte de la baisse de la démographie, ne peut être appliquée mécaniquement sur tout le territoire. Elle doit être progressive et précautionneusement ciblée. Elle présente un risque essentiellement pour les écoles rurales, qui ont déjà perdu 8,5 % de leurs effectifs entre 2015 et 2023 et qui sont donc les plus susceptibles d’être encore touchées par cette baisse du plafond d’emplois.
Il ne s’agit pas d’opposer ville et campagne, mais une fermeture de classe dans une école rurale s’accompagne de risques forts du point de vue de ce que j’appelle le « désaménagement du territoire ».
Aussi, au nom de la commission des finances, je défendrai un amendement visant à limiter la baisse du nombre d’enseignants à 2 000 postes, ce qui aboutira à une diminution beaucoup plus équilibrée. In medio stat virtus.
Comme les années précédentes, l’école inclusive représente un investissement important. Entre 2013 et 2023, 240 000 élèves en situation de handicap supplémentaires ont été scolarisés. C’est évidemment une bonne chose, avec des conséquences budgétaires essentielles : concrètement, l’école inclusive, c’est 4,5 milliards d’euros en 2025.
Si tous les problèmes ne sont pas résolus – n’est-ce pas, cher Cédric Vial –, il faut savoir reconnaître ce qui va mieux, sans nier pour autant ce qui va mal. Il y a un problème que le budget ne peut malheureusement pas traiter et qu’il ne faut pas oublier, à savoir la scolarisation des élèves hautement perturbateurs.
Je souhaite maintenant attirer l’attention de mes collègues sur l’ampleur des réformes qui ont eu lieu dans l’éducation nationale ces dernières années et sur leur nombre, de la politique du dédoublement des classes de grande section CP-CE1 à celle du choc des savoirs, récemment instauré.
Toutes ces réformes, au coût certain, ont été mises en œuvre au prix d’un réel épuisement des personnels. Elles doivent d’ailleurs pouvoir être évaluées, dans le temps long. Concrètement, point trop n’en faut : il serait utile d’abandonner les réformes de trop grande ampleur pendant quelque temps.
Enfin, je note que, comme l’an dernier et comme désormais très souvent, les crédits consacrés à la formation dans l’ensemble des programmes de la mission « Enseignement scolaire » s’élèvent à plus de 2 milliards d’euros, alors qu’en 2023 seulement la moitié desdits crédits ont été consommés. Ce sera l’objet de l’un des premiers amendements que nous examinerons. La commission des finances ne comprend pas une telle sous-consommation.
Nous formulerons aussi des propositions d’économies sur certains opérateurs de la mission.
Malgré toutes ces remarques, la commission des finances vous invitera à adopter les crédits de la mission « Enseignement scolaire », avec quelques améliorations issues des 106 amendements que nous allons étudier dans quelques instants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, je voudrais tout d’abord vous remercier. La situation est tout de même très inédite, dans l’attente de je ne sais quoi, de je ne sais qui… C’est certainement inconfortable, raison pour laquelle je tiens à saluer le travail que vous effectuez – j’espère que vous pourrez le poursuivre dans les mois à venir…
Hors enseignement agricole, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » sont en hausse de plus de 1,6 milliard d’euros. Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, une telle augmentation est à souligner.
À quelques mois du vingtième anniversaire de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, notre commission se félicite des efforts constants du ministère en faveur de l’école inclusive. Entre 2017 et 2024, le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés a progressé de 52,4 %.
En revanche, de nombreuses communes nous ont fait part de leurs difficultés dans la mise en œuvre de la loi du 27 mai 2024 visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne, dite loi Vial. Madame, monsieur les ministres, ce texte répond à un enjeu de solidarité nationale et de continuité d’apprentissage pour les élèves concernés. Aussi, j’espère que tout sera fait pour débloquer rapidement les points de crispation.
J’en viens maintenant à la démographie scolaire. Celle-ci diminue. C’est pourquoi le Gouvernement, votre gouvernement, notre gouvernement propose la suppression de 4 035 postes d’enseignants, dont plus de 3 150 dans le premier degré. Certes, ces suppressions répondent à une logique mathématique, mais n’oublions pas les territoires, ainsi que les femmes et les hommes qui y vivent. Dans certains territoires ruraux, l’école est souvent le dernier service public.
Aussi, je proposerai tout à l’heure, à l’instar de mon collègue Olivier Paccaud, un amendement – adopté à l’unanimité par la commission de la culture la semaine dernière – visant à revenir partiellement sur ces suppressions de postes.
Je tiens à souligner l’urgence de penser le maillage territorial de la prochaine décennie. Faisons des contraintes démographiques un levier pour une meilleure mise en œuvre des établissements scolaires au service de la réussite des élèves.
Je suis un fervent défenseur de ce que l’on appelle l’« école du socle commun ». Je le dis à mes collègues, l’école du socle commun ne visera pas à supprimer les écoles rurales ; elle aura plutôt pour effet de leur permettre de s’installer et de se consolider. Et nous pourrons les garder autour du collège.
Le problème démographique est crucial. Le Sénat aura, me semble-t-il, un rôle à jouer dans la nécessaire réflexion à mener sur une réorganisation des établissements scolaires, pour la France et pour nos élèves. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bernard Fialaire, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le programme 143 « Enseignement technique agricole », que je rapporte et que je soutiens, a reçu un avis favorable de la commission.
Il pourrait paraître paradoxal, dans le contexte actuel de réduction démographique des effectifs, que l’enseignement technique agricole connaisse une croissance de 1 % par an depuis cinq ans, avec un taux de réussite remarquable, une insertion professionnelle exceptionnelle, malgré des indices de position sociale (IPS) inférieurs aux filières générales.
Outre le fait que l’agriculture devra faire face à un renouvellement générationnel de 30 % d’ici à 2030, une telle réussite s’explique aussi par les faibles effectifs des classes. Cela doit sans doute permettre d’absorber la croissance de 1 % sans augmentation du nombre d’enseignants, mais il faudra rester vigilant.
L’augmentation de 35 millions d’euros est la bienvenue. Toutefois, nous sommes inquiets sur les mesures susceptibles de toucher l’aide à l’apprentissage, qui connaît dans le monde agricole une croissance de 49 % depuis 2019. Ce financement permet de faire face à l’apprentissage, mais surtout donne un équilibre financier et une rentabilité aux établissements, alors que les ateliers, les fermes et les exploitations pédagogiques sont très déficitaires, car ils doivent privilégier la pédagogie à la rentabilité.
Mme Genevard nous a annoncé un coup de rabot général sur l’ensemble de son budget, sans discernement pour l’enseignement agricole. Je crois que nous ne pouvons nous en satisfaire. Dans le monde agricole, tout le monde sait que pour pouvoir récolter, il faut avoir semé. Investir dans l’enseignement agricole, c’est permettre de faire face demain aux défis que doit relever ce milieu.
Il y a peut-être des pistes à chercher dans une meilleure gestion du pacte enseignant, qui – nous le voyons bien – n’est pas tout à fait adapté. Il y a de faibles effectifs, donc moins de remplacements. Les enseignants qui s’y engagent se trouvent parfois à ne pas consommer l’ensemble des heures sur lesquelles ils sont engagés, ce qui entraîne des problèmes de remboursement des financements. Nous pouvons donc sûrement faire des progrès, dans l’enseignement agricole comme dans l’enseignement général, pour accorder un peu plus d’autonomie de gestion aux chefs d’établissement.
En tout état de cause, notre commission se prononce en faveur de l’adoption de ces crédits, en hausse de 35 millions d’euros. (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Samantha Cazebonne applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.)
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, après des années Blanquer qui continuent de laisser des traces au sein de la communauté éducative, l’année 2024 a été marquée par une instabilité ministérielle inédite.
Madame la ministre, vous êtes la troisième ministre de l’éducation nationale en 2024 et la sixième de ce quinquennat. Une telle instabilité nuit à la relation de confiance entre les enseignants et l’exécutif. Il semble que, depuis son arrivée au pouvoir, votre formation politique n’ait pas trouvé la formule pour s’adresser à la communauté éducative et instaurer une méthode de travail sereine au sein de l’éducation nationale.
Comment l’expliquer ? Il y a d’abord une différence de constat. Les enseignants insistent sur les enquêtes de l’OCDE, qui montrent le sous-investissement structurel dans l’éducation en France, tandis que le Gouvernement se réfère aux enquêtes du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa) pour justifier des réformes destinées à lutter contre un décrochage scolaire. Il en découle des différences de priorités.
Malgré les intentions que vous affichez, la part du PIB consacrée à l’éducation nationale ne cesse de baisser depuis 1996. En moyenne, la France dépense 11 % de moins par élève que les autres pays de l’OCDE. Le taux d’encadrement des élèves en France continue d’être inférieur à la moyenne de l’OCDE, avec 14,6 élèves en moyenne par enseignant, contre 11,8 au sein de l’Union européenne.
Nous le disons avec force, la baisse démographique est une occasion historique pour améliorer notre taux d’encadrement et permettre à la France de rattraper son retard.
Nous déplorons aussi l’absence de mesures de revalorisation salariale. Le niveau des rémunérations est plus faible chez nous que chez nos voisins européens, alors même que l’éducation nationale traverse une grave crise de recrutement : cette année encore, il manquait 3 000 enseignants à la rentrée 2024. Nous ne pourrons pas répondre à cette crise sans augmenter les salaires et améliorer les conditions de travail.
Quoi qu’il en soit, notre politique en matière d’enseignement ne peut se limiter à l’amélioration des critères quantitatifs de réussite. Sur ce point, la vision de l’école que nous défendons au groupe écologiste dépasse l’obsession de la réussite des élèves au test Pisa et de leur mise en concurrence au niveau international.
Nous défendons au contraire une école publique placée au cœur du projet de société : un lieu de transmission des savoirs, de l’apprentissage, du vivre-ensemble. Nous sommes donc très attachés à ce que le développement des savoir-être, comme l’empathie, figure dans les critères d’évaluation des ministères.
Mais il y a aussi, me semble-t-il, un problème de méthode. Le ministère de l’éducation nationale est le premier ministère de l’État en termes de masse salariale. La réussite des réformes y dépend donc de l’adhésion de la communauté enseignante au projet, plus que dans tout autre ministère. Au-delà du fond de la réforme, beaucoup d’enseignants se sont opposés au choc des savoirs, du fait de la manière dont, une fois encore, une réforme leur a été imposée sans aucun débat parlementaire.
Alors qu’il a fallu sept ans à la communauté enseignante pour obtenir des moyens humains de soutien nécessaires à la mise en œuvre de l’école inclusive, votre prédécesseure a décidé seule d’inverser les principes qui définissent les conditions d’apprentissage des savoirs fondamentaux.
À ce titre, l’expression « choc des savoirs » est évocatrice. Je me félicite de la décision d’annulation du Conseil d’État, qui va vous obliger, je l’espère, à réfléchir sur cette manière de gouverner dans l’urgence et dans la brutalité, madame la ministre. Je m’inquiète toutefois de la réaction de sortie d’audience du ministère, qui déclarait en substance : « Puisque nous n’avons pas pu le faire par arrêté, faisons-le par décret ».
Il faut au contraire se demander pourquoi, après une opposition quasi unanime du Conseil supérieur de l’éducation et un passage en force, la réforme des groupes de moyens a tant de mal à se déployer sur le terrain. Depuis la rentrée, seuls 26 % des établissements l’auraient mise strictement en place. N’y a-t-il pas une contradiction à instaurer l’école inclusive jusqu’au primaire, puis à trier d’une autre façon les élèves à partir du collège ?
Pour faire face aux inégalités scolaires, un autre modèle est possible : celui de la loi de 1977, qui consiste à faire des classes hétérogènes et à offrir des cours de soutien particulier aux élèves en difficulté.
L’année 2024 a aussi été marquée par l’affaire Stanislas et par le rapport sur l’enseignement privé à l’Assemblée nationale. Ne l’oublions pas, dans cet hémicycle, certains, qui siègent désormais avec vous au Gouvernement, militent pour un renforcement de l’autonomie des établissements scolaires,…
M. Max Brisson. Absolument !
Mme Monique de Marco. … couplé à un renforcement de financement pour les parents d’élèves. Je vous mets en garde contre un tel changement du système, madame la ministre. C’est le chemin qu’ont emprunté les Suédois ; ils sont désormais prêts à faire machine arrière. Nous nous opposerons de toutes nos forces à de telles mesures. L’école que nous défendons est celle qui émancipe. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – Mme Evelyne Corbière Naminzo applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, Jules Ferry déclarait : « […], entre toutes les nécessités du temps présent, entre tous les problèmes, j’en choisirai un auquel je consacrerai tout ce que j’ai d’intelligence, tout ce que j’ai d’âme, de cœur, de puissance physique et morale, c’est le problème de l’éducation du peuple. » Il me semble que nous devrions toujours garder à l’esprit cette boussole : tout faire pour garantir une éducation de qualité à l’ensemble de nos élèves.
Le projet de budget que nous examinons aujourd’hui en est à 1 000 lieues, puisqu’il consiste, avec ses 4 000 suppressions de postes, à faire reposer sur les épaules de l’éducation nationale 90 % des coupes humaines prévues dans la fonction publique.
L’argument pour justifier ces suppressions, nous le connaissons : c’est celui de la baisse démographique. Or il n’est pas audible, pour deux raisons.
D’une part, entre 2018 et 2021, 7 500 postes ont été supprimés dans le second degré, alors que les effectifs ont enregistré une hausse de 68 000 élèves dans la même période. Ces coupes ont été faites au nom d’une priorité accordée au premier degré, qui s’est pourtant retrouvé par la suite également touché par des suppressions de postes.
D’autre part, en ce qui concerne le nombre d’élèves par classe, la France est l’une des mauvaises élèves de l’Union européenne. Dans le premier degré, on compte en moyenne 21,4 élèves par classe, contre 19 dans le reste de l’Union européenne. Plus d’un quart des classes de maternelle et d’élémentaire dépassent encore les 25 élèves. Au collège, ce sont presque 26 élèves par classe, contre 21 élèves ailleurs. Si les taux d’encadrement moyens sont meilleurs au lycée, c’est aussi dû aux spécificités des conditions d’apprentissage dans les lycées professionnels et technologiques, qu’il est essentiel de continuer de soutenir.
Je me réjouis de la possibilité que notre Haute Assemblée envoie un signal fort en adoptant les amendements des commissions des finances et de la culture visant à réduire la baisse du nombre de professeurs des écoles à 2 000 emplois. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain désire, pour sa part, aller plus loin. Nous défendrons tout à l’heure des amendements tendant à rétablir l’ensemble des postes supprimés dans le premier et le second degré.
J’anticipe la rhétorique consistant à dire que nous dépensons déjà énormément pour notre école. Je tiens à rappeler qu’au cours des dernières années, nous avons vu passer un tourbillon de réformes coûteuses, mises en œuvre dans la précipitation, au risque d’un épuisement des personnels, et sans réel bilan quant à leur efficacité. Démarche « Notre école, faisons-la ensemble ! », fonds d’innovation pédagogique, doté de quelque 500 millions d’euros, campagne d’évaluation des établissements scolaires, pacte enseignant, choc des savoirs… Il me semble qu’il y a là matière à réflexion pour être plus économe et, surtout, plus efficace.
L’ancienne professeure de mathématiques que je suis a été frappée lors des auditions préparatoires de ce budget par l’extrême lassitude exprimée par les personnels enseignants. Disons-le franchement, ils sont au bout du rouleau. Dans un contexte où des milliers de postes restent non pourvus à l’issue des concours et où les démissions explosent, il nous faut sérieusement entendre leurs préoccupations et travailler à l’attractivité de la profession.
Cela passe en premier lieu par une poursuite des efforts engagés en matière de revalorisation de leur rémunération, étendus à l’ensemble de leur carrière. Rappelons que les enseignants ont perdu en vingt ans 15 % à 20 % de leur pouvoir d’achat.
Cela passe aussi par une réelle amélioration de leurs conditions de travail, très loin de la logique du « travailler plus pour gagner plus » du pacte enseignant.
Cela suppose enfin que nous soyons à chaque fois au rendez-vous pour les protéger concrètement lorsqu’ils font l’objet de menaces ou d’attaques. Je le dis avec une émotion particulière à l’heure où le procès de l’assassinat de Samuel Paty est en cours.
Le budget que nous examinons aujourd’hui constitue également une occasion manquée en matière d’inclusion scolaire. La création de 2 000 postes d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) est à saluer, mais elle reste largement insuffisante pour accompagner l’ensemble des élèves en situation de handicap. Rien ne garantit par ailleurs que ces postes seront pourvus, au regard de la précarité institutionnalisée dans laquelle est maintenue la deuxième catégorie des personnels de l’éducation nationale.
Vingt ans après la naissance de l’école inclusive, il est temps d’avoir un projet politique global pour l’inclusion scolaire et de mettre fin au bricolage motivé par une illusoire rationalisation budgétaire.
La mise en œuvre expérimentale des pôles d’appui à la scolarité ou encore les difficultés à appliquer la loi votée sur l’initiative de notre collègue Cédric Vial pour assurer la prise en charge des AESH sur le temps méridien par l’État sont autant de signaux récents inquiétants.
Je terminerai en évoquant l’enseignement agricole. Si son budget est effectivement en hausse, l’absence de création de postes d’enseignants pose question. Pour mémoire, entre 2017 et 2022, ce sont 316 emplois qui ont été supprimés, soit l’équivalent de 10 000 dans l’éducation nationale !
Si nous souhaitons réellement que l’enseignement agricole puisse répondre aux défis du renouvellement des générations et de l’évolution des pratiques dans une perspective de transition écologique, il faut lui allouer les moyens suffisants pour ce faire. À défaut, tout projet de loi d’orientation ou objectif chiffré de hausse du nombre d’apprenants restera de l’ordre de l’incantation.
Pour toutes ces raisons, ainsi que pour d’autres, que ma collègue Colombe Brossel évoquera, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se prononcera contre l’adoption du budget alloué à l’enseignement scolaire, qui sera encore plus dégradé par l’amputation de 170 millions d’euros décidée par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, « Le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple. S’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain. » Ainsi parlait Jules Simon, ministre de l’instruction publique du gouvernement provisoire de la Défense nationale contre les Prussiens en 1870 et membre de notre Chambre haute pendant plus de vingt ans.
Si cet adage s’est révélé exact pour notre pays tout au long de la Troisième République et jusque dans les années 1960, force est de constater une dégringolade effrayante depuis, conduisant notre pays à une forme de déclassement général, dont on peut se demander si ce n’est pas le but recherché, comme peut l’écrire Jean-Claude Michéa dans son ouvrage L’enseignement de l’ignorance et ses conditions modernes.
Le budget de la mission « Enseignement scolaire », dont nous débattons aujourd’hui, incarne parfaitement ce qui caractérise l’ère Macron : le « en même temps ». Bien que le budget augmente de 2 %, il manque d’ambition et ne tire aucun enseignement du choc Pisa 2023. Il se résume à une liste de mesures sans impact systémique : cours d’empathie, Conseil national de la refondation, éducation sexuelle, groupes de besoins, etc.
Vous affirmez, comme vos prédécesseurs, que la maîtrise des fondamentaux est prioritaire, mais « en même temps » le coût moyen d’un écolier reste nettement inférieur à celui d’un lycéen, à l’inverse des pays de l’OCDE obtenant les meilleurs résultats aux évaluations internationales.
De plus, vous supprimez de nouveau des classes dans la France périphérique.
Vous poursuivez les dédoublements en réseaux d’éducation prioritaire (REP) et expérimentez le créneau horaire de huit heures à dix-huit heures, mais, « en même temps », vous n’engagez nullement l’évaluation de l’éducation prioritaire qui permettrait de faire évoluer un modèle obsolète.
À l’instar de vos trop nombreux prédécesseurs dont l’histoire a déjà oublié les noms, vous multipliez les déclarations martiales sur la défense de la laïcité, mais, « en même temps », vous vous abstenez de mesurer par un indicateur l’évolution de la menace que l’islamisme radical fait peser sur nos enseignants, nos enseignements, la laïcité et donc la République elle-même.
Pour rappel, 328 atteintes à la laïcité à l’école ont été recensées en septembre dernier et les demandes de protection fonctionnelle de professeurs ont progressé de 29 % en un an.
Cette liste d’exemples illustrant le double discours qui définit la politique éducative du macronisme pourrait encore s’allonger. Bien que le budget de l’éducation soit le premier de l’État, il est impossible d’y déceler une politique éducative à la hauteur de l’état préoccupant de notre système éducatif et des défis considérables qui attendent notre nation dans les décennies à venir.
Contrairement à ce que prétend Bercy, le ministère de l’éducation nationale n’est pas un ministère dépensier. Il est par essence le ministère de l’avenir de la Nation.
Son budget est donc un budget d’investissement. Or un investissement sans vision stratégique, sans cap ni boussole, n’est qu’un tonneau des Danaïdes.
Pourquoi est-il possible de fixer des objectifs de développement durable à l’horizon 2050, mais impossible d’envisager des objectifs qualitatifs et éducatifs pour le milieu du siècle ?
Ce budget, préparé durant la période dite de gestion des affaires courantes, est un budget de routine, un budget d’administration générale, et non le budget ambitieux devenu indispensable pour sauver notre politique éducative du naufrage.
Le Rassemblement national est le seul mouvement politique à proposer une alternative au long déclin de notre système éducatif, une autre ambition pour l’école de la République.
Nous sommes convaincus que c’est dans et par l’école que se dessinent le destin et l’avenir de la Nation.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, l’enseignement scolaire est aujourd’hui à la croisée des chemins.
Il est confronté à une diminution inquiétante du nombre d’élèves, très marquée dans le premier degré de l’enseignement public, moindre dans le second degré et dans l’enseignement privé sous contrat.
Comme chacun le sait, cette rétractation des effectifs scolaires est appelée à s’accélérer dans les prochaines années, en raison de l’évolution défavorable de la natalité dans notre pays.
Ainsi, entre 2011 et 2023, le premier degré a perdu près de 360 000 élèves et les dernières projections disponibles prévoient une diminution des effectifs de plus de 350 000 élèves entre 2023 et 2028.
Dans ces conditions, l’État, qui est toujours à la recherche d’économies budgétaires pour réduire les déficits publics, pourrait être tenté de reprendre une partie des crédits affectés à l’enseignement scolaire, selon une logique purement comptable.
Ce serait une grave erreur, mes chers collègues, tant les besoins de l’école de la République sont immenses.
Pour redresser les résultats objectivement mauvais dans les matières fondamentales – mathématiques, français –, pour satisfaire les objectifs de l’école inclusive, pour permettre à nos enseignants et à nos AESH de percevoir une rémunération décente, pour répondre au défi de la ruralité et de la fermeture des services publics et, plus largement, pour tendre vers une égalité des chances effective quel que soit le lieu de résidence des élèves, les moyens de l’éducation nationale doivent être sanctuarisés.
Notre rapporteur spécial de la commission des finances, Olivier Paccaud, a considéré à juste titre qu’il n’était pas envisageable, au regard des défis qu’il nous faut relever, de supprimer plus de 4 000 postes d’enseignants en équivalent temps plein.
Le devenir de nos écoles nous préoccupe tout particulièrement. Qui parmi nous n’a pas été sollicité par un maire d’une commune rurale ou périurbaine au sujet d’une fermeture de classe ou de la suppression d’un poste d’enseignant ?
Les conséquences de ces suppressions sur l’attractivité des territoires sont terribles, sans compter le sentiment de déclassement qu’elles peuvent susciter chez nos concitoyens.
C’est pourquoi il nous faut impérativement sortir d’une vision des moyens à court terme et engager des politiques éducatives agiles, afin d’adapter en permanence nos réponses aux enjeux.
Je veux par ailleurs évoquer la question fondamentale de l’école inclusive.
Si nous pouvons nous réjouir de l’augmentation constante du nombre d’élèves en situation de handicap en milieu ordinaire et de celui d’accompagnants d’élèves en situation de handicap, nous allons devoir faire de sérieux progrès pour mieux coordonner le monde éducatif et le monde médico-social.
Les pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial) n’ont objectivement pas constitué une réponse suffisamment pertinente et efficace pour favoriser la scolarisation des enfants handicapés.
Gageons que les pôles d’appui à la scolarité (PAS), qui sont en cours de déploiement, permettront de fluidifier les relations entre les équipes éducatives et le personnel médico-social en amont des notifications des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Les conditions de mise en œuvre de la prise en charge des enfants handicapés pendant la pause méridienne, qui incombe désormais à l’État, grâce à l’action énergique de notre collègue Cédric Vial, doivent être précisées rapidement.
La circulaire du 24 juillet 2024 s’est en effet révélée une source de complexité inouïe pour les collectivités locales. J’invite donc le Gouvernement à prendre toute la mesure des difficultés d’application sur le terrain.
Enfin, je souhaite exprimer mon inquiétude au sujet de la médecine scolaire. Le PLF pour 2025 prévoit une diminution de 30 millions d’euros des crédits consacrés à la santé scolaire, l’augmentation que nous avions votée dans le cadre du précédent budget n’étant pas reconduite.
Mes chers collègues, nous savons que la santé psychologique de nos jeunes ne cesse de se dégrader, au point que la santé mentale a été érigée en grande cause nationale en 2025. Les médecins titulaires et contractuels en activité sont trop peu nombreux. La démographie médicale a fortement décru entre 2017 et 2021 et les départs à la retraite vont s’accélérer dans les deux prochaines années.
Dans mon département, l’Essonne, où moins de quatorze postes en équivalent temps plein sur trente-six sont pourvus, la situation n’est guère reluisante. Et pourtant, le nombre d’élèves à prendre en charge ne cesse d’augmenter. J’en appelle au bon sens et à la mobilisation générale.
Pour garder les médecins titulaires à leur poste, il est urgent de réévaluer leur grille indiciaire et de redéfinir rapidement des missions et des objectifs de santé qui ont du sens et qui sont réalisables.
Mais il faudra faire plus encore : attirer de nouveaux médecins contractuels avec un salaire attractif et revaloriser un métier qui est exercé dans des conditions matérielles de plus en plus précaires, sans locaux, sans moyens pour les dépistages, sans accès partagé aux données de santé, sans véhicule pour les déplacements, sans assistance médicale.
Sans réaction urgente de l’éducation nationale, la médecine scolaire n’existera plus d’ici deux ou trois ans, en raison du départ massif des médecins les plus âgés, des demandes de détachement et de l’absence de recrutements.
Nous le voyons, les marges de progrès sont importantes dans tous les domaines de l’enseignement et de la vie scolaire.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires, que j’ai l’honneur de représenter, votera les crédits de cette mission, tout en restant vigilant sur les réponses qui seront proposées pour bâtir l’école de demain.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, en décembre 2021 déjà, la Cour des comptes dressait un constat implacable : « […] la performance globale du système éducatif français […] reste médiocre malgré l’importance des moyens mobilisés ».
Comment lui donner tort, quand plus de la moitié des élèves entrant en classe de quatrième ne maîtrisent pas les compétences élémentaires requises en français et en mathématiques, quand chaque année plus de 62 000 élèves décrochent du système scolaire ?
Comment lui donner tort, quand la mobilité sociale y est la plus faible d’Europe, quand les actes de violence et les atteintes à la laïcité – on recense près de 70 000 incidents graves par an – se multiplient ?
Comment lui donner tort, enfin, quand la crise des vocations s’amplifie – 3 200 postes n’ont pas été pourvus au concours et le taux de démissions a explosé ces dix dernières années –, quand 53 % des Français estiment que l’école fonctionne mal et que 65 % d’entre eux – la proportion atteint 79 % chez les enseignants – se disent pessimistes quant à son avenir ?
Mes chers collègues, comment en sommes-nous arrivés là, au point que 40 % des élèves de fin de primaire ne possèdent pas les compétences fondamentales en lecture et en mathématiques ?
Comment en sommes-nous arrivés au point que 7 % des enseignants seulement se sentent valorisés par la société, au point que plus de trois jeunes sur quatre déclarent avoir subi des violences à l’école et 29 % ne pas s’y sentir en sécurité, contre 10 % en moyenne dans les pays de l’OCDE ?
Pourtant, l’attachement à notre école demeure ; son redressement est espéré ; des réponses sont à apporter.
Pour la majorité des acteurs, ces réponses sont essentiellement financières. C’est ainsi que, depuis vingt ans, une réponse unanime a été apportée : il faut plus de moyens.Force est de constater que cette année n’échappe pas à la règle, pas moins de 63 milliards d’euros de crédits étant affectés à l’enseignement scolaire.
Toutefois, ne serait-il pas temps de questionner la légitimité de cette méthode consistant à dépenser toujours plus pour toujours moins de résultats ? Ne masque-t-elle pas l’impuissance à réformer un système trop vertical, trop uniforme, trop oublieux des particularités ?
Alors qu’en Europe – et pas seulement en Suède –, la tendance générale conduit à donner plus d’autonomie au système d’éducation, la verticalité, la centralisation et l’uniformisation épuisent toutes les initiatives dans notre pays et découragent les meilleures idées.
Ainsi, 10 % seulement des décisions éducatives sont prises au niveau des établissements et 2 % des décisions réelles le sont en autonomie totale. Le Conseil d’État vient d’ailleurs de le rappeler au sujet des groupes de besoins.
Pourtant, La Cour des comptes l’affirme : « […] les systèmes scolaires les plus performants sont ceux qui donnent le plus de place à chaque établissement, fédérant la communauté éducative autour d’un projet qui encourage les enseignants à être novateurs et à améliorer leur performance ».
Tout est dit : ce sont bien la liberté et l’autonomie qui font défaut. C’est donc à l’aune de ce constat que nous devons enfin ouvrir une réflexion autour de la nécessaire autonomie des établissements. Le pilotage par le haut est obsolète et inefficace.
En ce qui nous concerne, nous avons adopté en avril 2023 une proposition de loi qui posait les fondations des établissements publics autonomes d’éducation. Ces établissements seraient dotés de la capacité à contractualiser pour tout ce qui touche à l’organisation pédagogique, au dispositif d’accompagnement des élèves, à l’affectation des personnels, à l’allocation et à l’utilisation des moyens, ainsi qu’au recrutement des élèves.
Cette expérimentation s’appuierait sur les contrats de mission, remettant en cause le système très linéaire du barème et de l’ancienneté dans l’affectation des moyens. C’est ce dernier système qui conduit, par escalade, à la nomination des professeurs les moins formés, les moins chevronnés, les moins bien payés, aux postes les plus difficiles, et ce au moment où ils entament leur carrière et leur vie professionnelle. Tout cela est absurde et conduit à une véritable crise des vocations, aux démissions massives, aux nombreux cas de dépression recensés et aux places vacantes aux concours.
Certes, il existe déjà des postes à profil, mais les contrats de mission seraient, eux, limités dans la durée. Ils soigneraient la sortie de la mission et reconnaîtraient réellement à ce moment le service rendu à la République.
Parallèlement, la question de la formation des professeurs doit être posée. Il est nécessaire de dissocier celle des enseignants du premier degré de celle des enseignants du second degré, tout comme il est nécessaire de renouer avec les écoles normales du professorat pour redonner enfin la main à l’éducation nationale.
De même, il faut agir sur le prérecrutement et lier formation initiale et formation continue en régionalisant les concours du second degré.
Enfin, en ces temps de crise de l’école publique, il est indispensable de réaffirmer avec force l’attachement de notre République à la liberté d’enseignement, une liberté que ceux qui ont provoqué la crise de l’école publique veulent remettre en cause.
L’école publique ne se rénovera pas en détruisant les réseaux qui, eux, fonctionnent. Nous attendons une position claire sur ce sujet : est-il encore possible, dans notre pays, de rappeler notre attachement à la liberté de choix des parents et à la primauté des parents dans l’éducation de leurs enfants ?
À ce titre, je tiens à saluer quelques initiatives privées originales, telles que les réseaux Espérance banlieues et Excellence ruralités, qui concourent à la réussite éducative, notamment dans des territoires aux besoins éducatifs particuliers.
Regardons en face la crise dans laquelle s’enfonce inexorablement notre système éducatif. Pour y faire face, nous avons besoin d’un cap, d’une vision, et pas seulement de crédits en hausse, aussi souhaitables soient-ils, en particulier pour poursuivre la revalorisation indiciaire des professeurs.
Nous avons aussi besoin d’engagements forts, à l’instar de ceux qui ont été pris sur l’école inclusive et sur le lycée professionnel. Nous saluons ces initiatives : madame, monsieur les ministres, elles doivent être poursuivies et amplifiées.
Oui, il faut aller plus loin et, pour reprendre une expression chère au Premier ministre, relever la ligne d’horizon. Il nous faut ouvrir le chantier du redressement de notre école sur la base de la liberté et de l’autonomie.
Celle-ci passera par le recentrage de l’école sur ses missions premières, par la réaffirmation de la transmission des savoirs fondamentaux, par la différenciation des parcours, y compris par des groupes de niveaux, à rebours de l’uniformisation, un échec absolu que ses défenseurs refusent d’admettre.
L’hétérogénéité des classes n’est pas la solution. Le fait de permettre aux élèves de travailler leurs points faibles, de remédier à leurs difficultés, d’acquérir de nouveau les compétences et les connaissances qui leur manquent est une excellente chose. C’est ce qui se passe partout ailleurs dans la société. Pourquoi cela serait-il différent à l’école ? Quelle est cette vision totalement extérieure aux réalités de la société ?
Pour rénover l’école, il faut aussi, parallèlement, restaurer l’autorité des professeurs, personnaliser leur carrière, en la fondant sur la reconnaissance de leur engagement et sur une protection sans faille et sans hésitation.
Bref, il nous faut faire le contraire de ce qui a conduit notre école à tourner le dos à ce qui a fait sa force et à ce qui suscitait l’admiration que lui ont longtemps portée les Français et que nous devons retrouver.
Le groupe Les Républicains votera en responsabilité les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne.
Mme Samantha Cazebonne. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je me réjouis d’intervenir au nom du groupe RDPI sur l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Avec près de 88,9 milliards d’euros – 64,5 milliards d’euros si l’on exclut la contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions » –, la mission « Enseignement scolaire » demeure bien dans le projet de loi de finances pour 2025 le premier budget de l’État.
La hausse limitée des crédits, qui augmentent de 1,68 milliard d’euros, s’explique principalement par des facteurs mécaniques.
Dans un contexte aussi contraint que celui que nous connaissons, cette relative stabilité des crédits montre l’engagement solide et constant du Gouvernement en faveur de l’éducation, pilier de notre société.
Pour assurer cet équilibre, le Gouvernement prévoit, compte tenu de la forte baisse démographique en cours, la suppression de 4 000 postes, principalement dans le premier degré de l’enseignement public.
Selon les prévisions, l’école primaire devrait en effet accueillir près de 70 000 élèves en moins à la rentrée 2025. Quant au nombre d’élèves du second degré, il a entamé une décroissance qui devrait s’accélérer dans les prochaines années.
S’il est évident que ce budget doit s’inscrire dans une trajectoire soutenable, nous craignons que ce niveau de suppressions n’aille à l’encontre des politiques menées ces dernières années pour soutenir notre système éducatif et qu’il remette en question la poursuite de l’ensemble des chantiers engagés.
Nous accueillons donc avec intérêt les amendements des rapporteurs visant à limiter cet effort à 2 000 postes, afin de prendre en compte les besoins des territoires ruraux.
Nous demeurons sceptiques, en revanche, sur la méthode proposée, à savoir le transfert de 75 millions d’euros du pacte enseignant destiné à pallier les absences de courte durée dans les collèges et les lycées.
Alors que les crédits alloués à l’éducation nationale ont connu une progression constante depuis 2017, afin notamment de revaloriser le métier d’enseignant et de mieux accompagner les élèves en difficulté, ce budget est donc un budget de transition.
Certaines évolutions me semblent toutefois importantes.
Dans le programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré », je note ainsi la mise en œuvre d’un pilotage et d’un encadrement pédagogique qui garantissent l’efficience de l’action éducative et l’égalité de tous les élèves.
Ce budget consacre en effet plus de 1 milliard d’euros à la mise en place de cette politique par les personnels de direction et d’administration, mais aussi par ceux de l’inspection nationale.
Je souhaite également appeler votre attention, au sein du programme 230 « Vie de l’élève », sur l’action n° 02 « Santé scolaire ». Un montant de 732 millions d’euros, en hausse de près de 20 %, est consacré à la politique de santé au sein de l’institution scolaire, au travers d’actions d’éducation à la santé, à la prévention, à divers enjeux transversaux – sexuels ou alimentaires – et à la promotion de chacun.
À un moment où d’aucuns souhaiteraient revenir sur ces politiques éducatives, je tiens à rappeler leur importance. L’engagement du Gouvernement en la matière est un très bon signal, que je veux souligner.
Ce programme inclut également la lutte contre le harcèlement, un fléau contre lequel nous devons nous mobiliser, sensibiliser et alerter, dans notre réseau national, tout comme dans notre réseau d’enseignement français à l’étranger.
Nous nous réjouissons notamment que le programme de lutte contre le harcèlement à l’école (pHARe) soit renforcé.
Notre groupe défendra un amendement visant à abonder de 2 millions d’euros le dispositif 3018, numéro unique pour les jeunes victimes de harcèlement et de violences numériques.
Par ailleurs, alors que le nombre d’élèves en situation de handicap a progressé de 5,6 % en 2024 par rapport à la rentrée 2023, je me réjouis de la création de 2 000 postes d’AESH en équivalents temps plein.
Nous ne pouvons que saluer la meilleure inclusion dans notre école des élèves à besoins éducatifs particuliers. Nous avons encore des marges de progression sur ce sujet, mais nous avançons rapidement depuis quelques années. Ainsi, la loi du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des AESH et des assistants d’éducation a donné des résultats positifs : en juin 2024, 63 % des AESH bénéficiaient d’un CDI, soit trois fois plus qu’en 2022.
Pour conclure sur ce sujet, je me joins à l’appel de notre commission qui, après avoir fait adopter en janvier dernier une loi permettant l’accompagnement des élèves en situation de handicap sur le temps méridien, a constaté que son application posait quelques difficultés. Nous gardons ce point de vigilance en tête.
Le programme 214, « Soutien de la politique de l’éducation nationale », est en légère augmentation et poursuit trois objectifs : la programmation et la gestion des grands rendez-vous de l’année scolaire ; l’amélioration de la qualité et de la gestion des ressources humaines ; l’optimisation des fonctions support.
Ce programme regroupe également les financements versés aux établissements publics nationaux administratifs participant à la mise en œuvre de la politique éducative.
J’ai bien pris en compte les amendements déposés par le rapporteur spécial de la commission des finances visant à restreindre encore plus le budget de ces opérateurs. Je pense, au contraire ,qu’il est essentiel de s’appuyer sur eux. Aussi, j’ai moi-même déposé un amendement visant à soutenir le réseau Canopé, acteur incontournable de la formation continue des enseignants et des membres de la communauté éducative, qui profite notamment d’un bon maillage territorial.
En tant que sénatrice des Français de l’étranger, j’ai pu constater que l’expertise de ces opérateurs pouvait dépasser nos frontières et aider à la formation de nos enseignants même dans le réseau d’enseignement français à l’étranger.
Les crédits consacrés à la formation des enseignants sont constamment sous-consommés, mais il m’apparaît préférable de les flécher correctement plutôt que de les diminuer.
Le budget consacré à l’enseignement scolaire pour 2025 démontre manifestement une volonté d’engagement clair pour l’éducation sous toutes ses formes, malgré un contexte budgétaire extrêmement contraint.
M. le président. Il faut conclure.
Mme Samantha Cazebonne. Sous réserve de l’adoption des amendements visant à diviser par deux le nombre de postes supprimés,…
M. le président. Il faut conclure, madame !
Mme Samantha Cazebonne. … sous réserve également de l’adoption de nos amendements, le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants votera pour l’adoption des crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj.
M. Ahmed Laouedj. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, bien que le projet de loi de finances pour 2025 porte globalement la marque de l’austérité imposée par le Gouvernement, je constate avec satisfaction l’augmentation des crédits alloués à l’éducation.
Malheureusement, cette hausse s’accompagne de suppressions de postes d’enseignants, que le Gouvernement justifie en grande partie la baisse de la démographie dans certaines régions. Il est essentiel que notre système éducatif soit soutenu par des ressources humaines suffisantes afin de garantir un encadrement adéquat. La réussite de nos enfants en dépend.
J’exprime donc ma profonde inquiétude face à cette logique de suppression : elle est loin selon moi d’être la meilleure réponse à la situation actuelle. La baisse démographique dans certaines zones ne justifie pas une réduction uniforme des moyens humains dans l’éducation nationale, bien au contraire.
Il est fondamental que l’État prenne en compte la réalité territoriale et les besoins spécifiques de certains départements, notamment de ceux qui, comme la Seine-Saint-Denis, connaissent des défis particuliers.
Notre département, qui souffre d’une densité scolaire particulièrement élevée, a en effet besoin de ressources humaines supplémentaires pour répondre aux défis sociaux et éducatifs. Or la logique des suppressions de postes ne retient pas ces spécificités locales.
Loin de justifier des suppressions, la baisse du nombre d’élèves pourrait au contraire être utilisée comme un levier pour améliorer les conditions d’enseignement et la qualité du service public de l’éducation.
Nous devons mieux répartir les ressources, renforcer la qualité de l’enseignement et davantage articuler ses différents niveaux, notamment entre le primaire et le collège. Nous savons que la transition entre ces deux étapes de la scolarité est un moment clef, souvent mal vécu par les élèves. Une meilleure coordination entre enseignants du primaire et du secondaire permettrait de fluidifier cette transition, de faciliter le passage du savoir et de renforcer l’apprentissage des fondamentaux.
Nous devons ajuster les effectifs et orienter les ressources vers les territoires qui en ont le plus besoin, notamment les départements sinistrés comme la Seine-Saint-Denis. Cela permettrait d’assurer une égalité des chances entre tous les élèves, quels que soient leur territoire d’origine ou leur environnement social.
Il est impératif que le budget de l’éducation prenne en compte non seulement la réalité démographique, mais aussi les inégalités sociales et territoriales.
Je souhaite également attirer votre attention sur un point fondamental : l’inclusion des élèves en situation de handicap, dont le nombre ne cesse d’augmenter dans nos établissements scolaires.
Les AESH jouent un rôle indispensable dans leur parcours scolaire ; pourtant, nous manquons de ces personnels essentiels. Alors que nous devons absolument garantir la qualité de l’enseignement des élèves, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur cette logique de suppression.
Voilà quelques semaines, j’ai été saisi par le personnel éducatif d’un lycée de mon territoire au sujet de l’absence d’infirmier scolaire dans l’établissement. Il s’agit pourtant d’un poste clef non seulement pour gérer les soins médicaux des élèves au quotidien, mais également pour identifier les situations de grande précarité et de vulnérabilité sociale, et déclencher si nécessaire les dispositifs de soutien et d’accompagnement adaptés.
En réorganisant les ressources et en renforçant l’inclusion des élèves en situation de handicap, nous pourrons véritablement améliorer les conditions d’apprentissage et garantir à chaque élève les meilleures chances de réussite.
Permettez-moi enfin d’évoquer un sujet essentiel, qui grève directement le pouvoir d’achat des familles et menace l’égalité des chances de nos élèves : le coût des fournitures scolaires.
Nous avons constaté cette année une hausse des prix significative, notamment dans le primaire, où l’augmentation a été de 23 %. Cette inflation, qui pèse lourdement sur les finances des ménages, contribue à creuser les inégalités. C’est pourquoi je défendrai un amendement visant à instaurer la gratuité des fournitures scolaires pour tous les élèves.
Jules Ferry disait : « Il faut faire disparaître la dernière, la plus redoutable des inégalités qui viennent de la naissance, l’inégalité d’éducation. » Mes chers collègues, je ne doute pas que nos débats seront riches. Il est temps d’appréhender l’éducation, l’enseignement et l’école de manière générale non plus comme une dépense, mais comme un investissement.
Donnons à l’éducation la place qu’elle mérite. Ainsi, nous pourrons être fiers de répondre aux défis de notre temps tout en honorant l’héritage de ceux qui ont rêvé d’une école au service de tous.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Annick Billon. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le travail rigoureux des rapporteurs.
À l’instar de l’enseignement technique agricole, que j’évoquerai en seconde partie de mon propos, nous pouvons nous réjouir que le budget de l’enseignement scolaire, premier budget de l’État, doté de 88,9 milliards d’euros pour l’année 2025, demeure stable malgré un contexte inédit et grave marqué, d’une part, par une forte contrainte budgétaire, dictée par la nécessité de redresser les comptes publics, de l’autre, par une baisse démographique importante.
Nous compterons ainsi 75 000 élèves de moins à la rentrée 2025 par rapport à la rentrée dernière. Sur le papier, cette baisse semble justifier la suppression de plus de 4000 postes d’enseignants, mais sur le papier uniquement, car la réalité du terrain n’est pas arithmétique.
Ces suppressions de postes, qui se concentrent sur l’enseignement public du premier degré, risquent en effet d’accélérer les fermetures de classes, particulièrement dans les territoires ruraux déjà éprouvés en 2024. Maintenir ces postes, c’est éviter de nouvelles fermetures, c’est améliorer la qualité d’encadrement des élèves, c’est permettre aux professeurs d’enseigner dans de meilleures conditions pour de meilleurs résultats.
Je rappelle que, depuis la première édition du classement Pisa en 2000, les résultats de la France se dégradent dans tous les domaines évalués – lecture, mathématiques, sciences –, et ce malgré la volonté affichée par vos prédécesseurs, madame la ministre, de renforcer les moyens sur les savoirs fondamentaux.
À l’entrée en sixième, un tiers des élèves ont des difficultés à lire et à écrire. C’est un échec.
Ces 4 000 suppressions de postes ne sont pas acceptables et je présenterai avec mon groupe un amendement visant à abaisser à 2 000 ETP le nombre de postes supprimés.
En matière d’école inclusive, je note que le Gouvernement avance, en ouvrant 2 000 nouveaux postes d’AESH en 2025. Cette mesure est cependant à mettre en regard du nombre de postes non pourvus et de celui des notifications MDPH non respectées.
Dans son rapport L’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap de septembre 2024, la Cour des comptes dispose : « il paraît indispensable, dans le contexte budgétaire actuel, de s’interroger sur le caractère soutenable d’une telle hausse des effectifs d’AESH ».
Même si, grâce à la loi Vial, 63 % des AESH bénéficient aujourd’hui d’un CDI contre seulement 20 % en 2022, leur statut demeure précaire et le métier manque cruellement d’attractivité. Par ailleurs, les familles et les collectivités se heurtent souvent à des lourdeurs administratives. La prise en charge sur le temps méridien, par exemple, se voit compromise par la complexité des conventions tripartites. Une simplification de ces dispositifs est nécessaire pour garantir une mise en œuvre équitable.
De plus, les expérimentations, comme la transformation des pôles inclusifs d’accompagnement localisés en pôles d’appui à la scolarité (PAS), inquiètent. Le rôle ambigu de l’État, qui deviendrait à la fois prescripteur et payeur, suscite des interrogations légitimes.
En ce qui concerne la santé scolaire, le Sénat avait voté, l’an dernier, une augmentation des crédits consacrés à la médecine scolaire de 30 millions d’euros. Dans sa copie finale, le Gouvernement avait retenu un montant de 22 millions d’euros. Ces crédits ne seront pas reconduits cette année. Pourtant, je doute que la médecine scolaire ait retrouvé la santé… Je rappelle que près de 50 % des postes de médecins sont vacants et que de grandes disparités entre les départements existent à cet égard.
La question de la santé scolaire ne se réduit pas au calcul d’un budget, elle représente avant tout un enjeu de santé publique. Il en va de même pour les séances d’éducation à la sexualité. Or moins de 15 % des élèves en bénéficient, alors que la loi prévoit que trois séances annuelles doivent être dispensées de manière obligatoire dans les écoles, les collèges et les lycées.
Chaque année, nous rappelons que l’éducation à la sexualité est non pas une option, mais bien une obligation légale. Soumission chimique, non-respect du consentement, agressions sexuelles… Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les conséquences graves de la dictature de la pornographie. Il y a urgence : une génération informée est une génération protégée. (Mme Colombe Brossel applaudit.)
Autre sujet de préoccupation, la formation des enseignants demeure, elle aussi, un angle mort.
Dans notre rapport sur la formation initiale et continuée des professeurs, nous montrons avec Max Brisson que 62,5 % seulement des crédits attribués à la formation ont été consommés en 2023. C’est non pas le manque de moyens qui freine la formation, mais le fait que les crédits soient inutilisés et mal alloués et que les formations soient souvent inadaptées.
Nous avons formulé treize recommandations ; la mise en œuvre de neuf d’entre elles dépend du ministère de l’éducation nationale. Nous proposons notamment de favoriser, le plus tôt possible, une confrontation avec le métier d’enseignant, de faire de la formation continuée un temps obligatoire complémentaire de la formation initiale ou encore de rendre effective l’obligation de formation continue inscrite dans la loi depuis 2019.
Nous appelons le Gouvernement à se saisir de ces propositions et à faire preuve de détermination sur le sujet.
J’en arrive enfin à l’enseignement technique agricole.
Son budget de 1,73 milliard d’euros est stable, si nous faisons abstraction des mouvements de crédits liés à des ajustements et à des mesures techniques. Les effectifs sont en hausse constante depuis 2019. Pour la première fois, la voie scolaire accueille plus de 200 000 jeunes.
Entre 40 % et 60 % des agriculteurs partiront à la retraite d’ici à 2030. L’enjeu est donc aussi d’assurer le renouvellement générationnel.
Je tiens à attirer votre attention sur plusieurs points de vigilance et d’inquiétude.
Ce budget ne tient pas compte du coup de rabot supplémentaire annoncé par le Premier ministre. Selon les informations relayées par la ministre de l’agriculture lors de son audition au Sénat, l’éducation technique agricole serait concernée à hauteur de 18 millions d’euros. Les contours de cette baisse sont encore flous, ce qui suscite des inquiétudes.
Notons également que 30 % des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles sont en difficulté financière, alors qu’ils n’étaient que 19 % dans cette situation en 2021.
Dans le privé, 45 établissements du temps plein de l’enseignement technique agricole sur 176, ainsi qu’environ 50 maison familiale rurale (MFR) sur un total de 410, rencontrent aussi des difficultés. Il ne faut pas oublier non plus que les exploitations agricoles adossées aux établissements sont souvent dans des situations déficitaires.
Les MFR sollicitent une augmentation de 12 millions d’euros de leurs crédits ; nous aurons l’occasion d’y revenir au cours des débats.
« Peut mieux faire », telle sera mon appréciation en guise de conclusion. Qu’il s’agisse des suppressions de postes, des défis organisationnels pour les AESH ou du soutien à la santé scolaire, un suivi rigoureux sera nécessaire.
L’enseignement technique agricole, avec son excellent taux d’insertion professionnelle, ses petits effectifs et son maillage territorial, mérite d’être soutenu.
Enfin, l’ambition affichée par le projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture, qui sera examiné en janvier prochain au Sénat, ne pourra se concrétiser sans un soutien budgétaire à la hauteur des objectifs fixés.
La dégradation des comptes publics oblige à faire mieux avec moins.
Mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera ces crédits, dans un esprit de responsabilité – au Gouvernement d’en faire preuve également. L’enseignement scolaire a besoin de visibilité et de stabilité, ce qu’il est bien difficile de garantir lorsque quatre ministres différents se succèdent en une année. L’éducation nationale n’a pas besoin d’un ministre par saison ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, vous avez affirmé, madame la ministre, avoir trois priorités en tant que ministre de l’éducation nationale : « Élever le niveau, élever le niveau, élever le niveau ».
Pourtant, les grandes enquêtes internationales relatives à l’école française ne montrent aucune faiblesse singulière, le niveau scolaire se trouvant dans la moyenne de ceux des autres pays.
En revanche, ces enquêtes montrent que notre système d’éducation est le plus discriminant socialement des pays développés. Il ne parvient plus à répondre à la promesse républicaine d’égalité. La priorité à laquelle votre ministère devrait urgemment s’atteler est donc bien de mettre en œuvre une école égalitaire. Pour les académies de Mayotte et de la Guyane, cette promesse républicaine reste une belle fiction.
Le choix de votre formule, madame la ministre, permettait avant tout d’annoncer la reconduction de la politique Attal du choc des savoirs.
Cette reconduction est confirmée, dans ce projet de loi de finances, en ce qui concerne, d’une part, les « groupes de besoins » en classes de sixième et de cinquième, et, d’autre part, les classes « prépa-seconde». Ces dernières changent la nature du diplôme national du brevet, qui devient un couperet, et renforcent les inégalités sociales en matière d’orientation.
C’est dans ce contexte que je me félicite de la décision du Conseil d’État d’annuler l’arrêté instaurant les groupes de besoins au collège, donnant ainsi raison à la communauté éducative, mobilisée contre votre réforme. Il faut bien admettre que les meilleurs experts en matière de politique éducative sont les professionnels qui se trouvent sur le terrain, dans les classes et dans les établissements scolaires. Mais cela fait longtemps qu’ils ne sont plus ni écoutés ni consultés sur les évolutions de l’école.
Au-delà de sa critique purement juridique, le Conseil d’État a également pointé le risque que vos groupes de niveaux n’accentuent encore l’écart de niveau entre les élèves.
Malgré la fragilité juridique et politique de votre réforme, vous persistez dans ces politiques libérales et vous renforcez la ségrégation sociale de notre système d’éducation. Dans le même temps, vous faites porter la responsabilité d’une prétendue baisse de niveau sur les élèves eux-mêmes, leurs familles et leurs enseignants.
Cette année, près de 3 185 postes d’enseignants sont restés vacants. La hausse du nombre des démissions montre que vous ne réussissez qu’à décourager nos professeurs. Pourtant, le Conseil supérieur des programmes prévoit que près de 328 000 postes seront à pourvoir d’ici à 2030. Les observateurs – enseignants et scientifiques – sont unanimes : le risque d’apparition de déserts d’éducation en France est réel.
Votre copie, pour ce projet de loi de finances, soulève des questions sur votre définition du service public d’éducation et sur votre ambition pour notre jeunesse. Investissement insuffisant pour les lycées publics, non-affectation de professeurs et orientations contraintes : tel est le mur face auquel vous placez nos élèves.
Notre système d’éducation est au bord de l’effondrement.
Vous soulignez l’engagement et le dévouement des enseignants, mais votre considération pour eux se traduit par l’absence de médecine du travail, l’application de trois jours de carence, la diminution de l’indemnisation des jours d’arrêt maladie et le gel de leurs salaires.
Les dispositions que vous nous demandez d’adopter sont en fait une double peine : d’une part, vous imposez 5 milliards d’euros d’économie aux collectivités, alors qu’elles ont la charge du bâti et du fonctionnement des écoles, des collèges et des lycées ; de l’autre, la suppression de 4 000 postes d’enseignants annonce la recrudescence, de fait, du recrutement de contractuels. C’est bien la preuve que la pénurie d’enseignants titulaires n’est pas un accident, mais qu’elle est consciemment organisée.
Dans les académies les plus déficitaires en enseignants, un candidat novice et sans préparation peut être projeté devant des classes, après avoir passé un simple entretien d’une demi-heure. En procédant de la sorte, vous dégradez, année après année, le statut d’enseignant et vous abîmez définitivement la dimension universitaire de la formation des enseignants.
Madame la ministre, comprenez toute votre responsabilité dans la perte d’attractivité du métier d’enseignant.
Notre groupe a travaillé sur ce PLF pour corriger vos erreurs. Nous avons ainsi déposé des amendements tendant à prévoir la gratuité effective de l’école publique, une revalorisation salariale inconditionnelle des enseignants et un recrutement massif d’assistants d’éducation, d’enseignants, de professeurs d’éducation physique et sportive (EPS).
Plusieurs de ces propositions sont d’ailleurs issues du programme du Nouveau Front populaire. Je ne me fais que peu d’illusions quant à leur adoption au Sénat, puisque le Gouvernement a désormais recours à la stratégie de la seconde délibération pour écraser le débat parlementaire. Mais je sais que ces propositions sont partagées par la première coalition politique à l’Assemblée nationale et qu’elles répondent précisément aux attentes de l’écrasante majorité des personnels de l’école de la République. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Colombe Brossel. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, lorsqu’ils ont découvert les contours de ce budget, les syndicats ont déposé, en intersyndicale, une alerte sociale pour en dénoncer le contenu et ses conséquences néfastes pour le service public de l’éducation. Ce n’est pas rien ! C’est le signe d’une inquiétude profonde de la communauté éducative, dans toute sa diversité.
Ma collègue Marie-Pierre Monier a longuement évoqué cette communauté éducative du point de vue des enseignants. J’aimerais prendre à mon tour quelques instants pour vous parler, mes chers collègues, de toutes celles et de tous ceux qui font également vivre cette communauté.
Je pense aux personnels de direction dans les établissements ou aux personnels administratifs au sein des rectorats. Ces deux catégories sont particulièrement touchées. Elles font face à un enchaînement de réformes sans queue ni tête, décidées sans aucune concertation, dont elles doivent assurer la mise en œuvre, alors que leur absence de sens est criante.
Je pense également aux personnels de vie scolaire ou du secteur médico-social, aux médecins, aux infirmiers, aux assistants d’éducation. Leur contribution à la bonne qualité du climat scolaire, et donc à la réussite de tous les élèves, doit être saluée.
Pourtant, le manque de moyens entrave le bon accomplissement de leurs missions. Je ne prendrai qu’un seul exemple : le Gouvernement nous dit que la lutte contre le harcèlement scolaire est une priorité, mais alors comment comprendre le manque de moyens alloués au travail des personnels médico-sociaux – médecins, infirmiers, infirmières, assistants et assistantes sociaux ? Pour notre part, nous sommes convaincus du rôle absolument central de ces personnels dans l’accompagnement des élèves. C’est la raison pour laquelle nous vous proposerons d’adopter des amendements visant à augmenter le nombre de postes ainsi que les moyens consacrés à la plateforme 3018 contre le harcèlement.
De même, alors que la santé mentale a été érigée en grande cause nationale par le Premier ministre, les sénatrices et sénateurs socialistes estiment que l’éducation nationale doit prendre sa part dans cette action, en accompagnant mieux les élèves.
Marie-Pierre Monier évoquait voilà quelques instants l’école inclusive. Elle doit l’être dans tous ses aspects : il faut faciliter l’accueil et l’inclusion des élèves allophones au sein des unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants (UPE2A). Nous vous proposerons des amendements en ce sens.
Permettez-moi de vous dire en toute franchise, madame la ministre, que vous ajoutez l’indignité au cynisme en diminuant de 600 000 euros les crédits des fonds sociaux des établissements. Ceux-ci servent à accompagner les familles qui en ont besoin, qui se trouvent en situation de précarité pour payer les fournitures, les sorties ou les voyages scolaires. En faisant cela, vous faites les poches des plus pauvres ! Nous nous y opposerons et nous le dénoncerons.
Finalement, qu’attendons-nous de l’école ? À cette question, les uns et les autres, dans cet hémicycle, répondront en chœur : « La réussite de tous les élèves est un impératif. » Cependant, au regard du manque de moyens et d’ambition dans ce budget, nous sommes réellement en droit de douter que ce soit vraiment le cas.
Au funeste choc des savoirs s’ajoutent, une fois de plus, le chaos budgétaire et le chaos institutionnel, auxquels ma collègue a fait allusion en évoquant ce qui s’est passé dimanche, au Sénat.
Nous nous opposerons à ce budget et nous ferons des propositions, car nous, socialistes, nous aimons l’école publique et nous croyons en sa force ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Agnès Evren. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Agnès Evren. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, il y a quatre ans, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, a été décapité à la sortie du collège où il enseignait. Le procès qui vient de s’ouvrir est également, il faut le dire, celui de nos renoncements et des maux qui rongent l’éducation nationale : le malaise croissant des professeurs, qui sont parfois entravés dans leur mission de transmission, l’ensauvagement de notre société, qui n’épargne pas les établissements scolaires, les coups de boutoir de l’entrisme islamiste.
Longtemps, la France a été fière de son école. Nous avions bâti un modèle qui a inspiré le monde. Pendant plusieurs générations, l’école française a été le moyen par lequel les enfants ont pu apprendre, se cultiver, gagner en autonomie et s’élever socialement, au point d’avoir une vie meilleure que celle de leurs parents. C’est la promesse républicaine de l’émancipation individuelle et de l’ascenseur social, qui, hélas, est resté bloqué au rez-de-chaussée. J’ai moi-même bénéficié de cette promesse républicaine en tant qu’élève d’un lycée en zone d’éducation prioritaire du Val-de-Marne.
Au moment où le niveau scolaire est en chute libre et alors qu’un nombre croissant d’établissements sont victimes d’une violence endémique, l’éducation nationale perd le sens de sa mission : transmettre un savoir et des connaissances.
On reproche souvent à l’école de ne pas en faire assez, mais, en réalité, on lui demande de devenir la caisse de résonance des préoccupations sociétales et sociales du moment. Au lieu de resserrer les apprentissages, on les a décentrés. Cette perversion du système scolaire s’est accélérée.
Aujourd’hui, les élèves de CM2 font environ neuf fautes d’orthographe de plus que ceux de 1987 à la même dictée, soit une augmentation de 81,3 % en trente-cinq ans !
Je sais combien, madame la ministre, vous êtes sensible à cet enjeu, et je vous en remercie. Vous avez martelé vos trois priorités : « Élever le niveau, élever le niveau, élever le niveau. » Vous vous donnez les moyens de vos ambitions, puisque l’éducation reste le premier budget de l’État, en dépit d’un contexte budgétaire marqué par l’urgence, comme cela a été rappelé par mon collègue Jacques Grosperrin.
Toutefois, plusieurs questions demeurent.
Depuis plusieurs années, on observe une désaffection pour le métier d’enseignant, qui était pourtant considéré autrefois comme « le plus beau métier du monde », comme le disait Péguy, qui, à l’instar de Camus, a dû son destin d’écrivain à la rencontre décisive avec un maître d’école dévoué.
Nos enseignants ont besoin d’un soutien de la Nation et d’une réflexion globale sur leurs conditions d’enseignement. Outre la question de la rémunération se posent celles de la formation et des carrières, thèmes chers à mes collègues Max Brisson et Cédric Vial.
L’enjeu est aussi et surtout de restaurer l’autorité des professeurs et leur capacité à faire cours sans s’autocensurer – n’est-ce pas, Olivier Paccaud ? Il faut protéger les enseignants menacés par les élèves ou les parents, sanctionner systématiquement toutes les atteintes à la laïcité, rétablir l’ordre dans les classes et sur le chemin de l’école. Voilà autant de grands chantiers prioritaires, qui nécessitent des choix politiques et budgétaires très forts.
Parallèlement à cette réflexion indispensable, l’autre question majeure est de savoir quels projets d’ampleur mener pour améliorer de toute urgence le niveau des élèves et pour quelle ambition. Un an à peine après la présentation par Gabriel Attal de son plan ambitieux sur le choc des savoirs, plusieurs mesures phares sont aujourd’hui en suspens.
En particulier, quel sera l’avenir des groupes de besoins ? La mise en œuvre de ces groupes en mathématiques et en français, dans les classes de sixième et de cinquième, a déjà mobilisé 2 330 équivalents temps plein. Vous aviez annoncé, madame la ministre, le 12 novembre dernier, l’extension de ces groupes aux classes de quatrième et de troisième. Allez-vous vous donner les moyens juridiques et budgétaires de poursuivre votre engagement, après la décision du Conseil d’État intervenue ce jeudi 28 novembre ?
Enfin, je voudrais revenir sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur. J’ai déposé une proposition de loi visant à rendre obligatoire le dépôt des téléphones portables à l’entrée des écoles et collèges et à renforcer la prévention concernant l’abus d’écrans chez les jeunes. Il y va, madame la ministre, de la santé mentale et physique de nos jeunes. Votre collègue Alexandre Portier a annoncé, et nous nous en sommes réjouis, qu’il voulait généraliser cette interdiction dès la rentrée prochaine. Allez-vous soutenir les départements, qui doivent financer l’installation de casiers ou de pochettes anti-ondes ?
En conclusion, nous avons – faut-il le rappeler ? – tous, collectivement, une obligation de résultat. Nous devons apporter des réponses concrètes et rapides pour améliorer la situation des enseignants et relever le niveau des élèves. C’est ainsi que notre système éducatif pourra renouer avec sa promesse d’émancipation d’origine et redresser le niveau des élèves et des futures générations. Il y va de l’avenir de notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Anne Genetet, ministre de l’éducation nationale. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’abord, avant d’aborder le budget, de rappeler en premier lieu les principes qui guident mon action et celle de mon ministre délégué.
Ma priorité, comme cela a été rappelé, se résume en un seul mot : élever. Il s’agit bien évidemment d’élever le niveau de nos élèves et d’élever notre jeunesse dans la société. Il s’agit aussi d’élever notre exigence en matière de respect des valeurs de la République, en matière de respect dû à nos professeurs et en matière de laïcité.
Quelles que soient nos sensibilités, je sais que nous partageons tous ces objectifs, tout comme nous partageons ce constat : défendre l’école de la République, sa mission, ses valeurs, sa promesse, c’est aussi défendre son budget.
Avec 1,2 million de personnels dévoués à la réussite de 12 millions d’élèves, l’école est le premier des services publics et l’éducation nationale le premier employeur de France. Son budget est et restera, comme le prévoit le projet de loi de finances pour 2025, le premier de la nation.
C’est à l’école que nous pouvons briser les inégalités de destin ; c’est à l’école que nous pouvons vaincre toutes les assignations ; et c’est encore à l’école que nous pouvons, en somme, renouer avec la promesse républicaine que vous évoquiez, madame la sénatrice.
C’est pour cela que, nous avons investi, depuis 2017, plus de 14 milliards d’euros supplémentaires dans l’éducation nationale. Le budget de mon ministère s’élevait à 49 milliards d’euros en 2017 ; il s’élèvera à 63 milliards d’euros en 2025. Sous aucun autre quinquennat, ni même sous aucun autre septennat de gauche comme de droite, les moyens alloués à l’école de la République n’ont connu une telle progression.
Aujourd’hui, ces investissements sans précédent se traduisent par des progrès sociaux et éducatifs sur tout le territoire.
En cette rentrée 2024, nous achevons le dédoublement des petites classes dans les zones d’éducation prioritaire. Les résultats sont là. Les évaluations montrent que les élèves ont progressé : lorsqu’ils entrent en sixième, ils sont aujourd’hui plus nombreux à être en avance en mathématiques qu’en 2017, tandis qu’ils sont moins nombreux, heureusement, à être en retard en français, même s’il reste encore des progrès à faire.
Un autre investissement était nécessaire : depuis 2022, les professeurs ont vu leur rémunération augmenter de 258 euros net par mois en moyenne, soit une hausse de 11 %, et cela sans compter ni les dispositions du pacte enseignant ni les mesures de protection exceptionnelles prises durant les crises.
Cette année encore, les infirmières et les infirmiers scolaires, ainsi que les assistantes et les assistants de service social, ont vu leur rémunération progresser de 200 euros net par mois.
Ce bien-être de tous les acteurs de l’école est fondamental, je le dis en tant que ministre, mais aussi en tant que médecin.
Par ailleurs, sur l’année scolaire 2023-2024, grâce au pacte enseignant, 2 millions d’heures supplémentaires de remplacement ont été réalisées, ce qui a permis de pallier des absences de courte durée dans les collèges et dans nos lycées.
Le pacte enseignant s’est traduit aussi par 1,8 million d’heures de « devoirs faits », 1,2 million d’heures de stages de réussite, 1 million d’heures de soutien en primaire, 800 000 heures de plus pour la voie professionnelle, 300 000 heures de découverte des métiers. La rémunération des professeurs volontaires était attractive ; un tiers d’entre eux se sont engagés dans le pacte et ont perçu en moyenne, l’an passé, une prime de 2 500 euros.
Je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous débattrons d’amendements visant à supprimer le pacte enseignant. Permettez-moi de le dire très nettement : le supprimer reviendrait tout simplement à priver des élèves de millions d’heures d’école dont ils ont tant besoin.
Même si le budget de l’école continue d’augmenter, même si le niveau des élèves recommence à s’élever, j’entends que, pour nombre d’amoureux de l’école, tout cela n’est pas assez et que beaucoup reste à faire. C’est probablement vrai.
Toutes les feuilles de paie ne sont pas encore au niveau de l’engagement sans faille de nos personnels. Il nous reste encore tant à faire pour la reconnaissance des personnels, pour la confiance des parents et pour la réussite de nos élèves.
Là encore, je serai directe : oui, il reste encore beaucoup à faire, beaucoup de chantiers à ouvrir, beaucoup d’engagements à tenir. Mais regardons la réalité de ce PLF. Les écoles publiques compteront en moyenne vingt et un élèves par classe, soit le niveau le plus bas depuis que nous mesurons cet indicateur.
Dans les collèges et les lycées publics, le nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement par élève continuera de progresser, comme depuis 2022.
En 2025, le budget de l’école inclusive, quant à lui, aura plus que doublé depuis 2017, passant de 2,1 milliards à 4,6 milliards d’euros. Un recrutement de 2 000 accompagnants d’élèves en situation de handicap supplémentaires est prévu – ces derniers représentent désormais, en nombre, le deuxième métier du ministère.
Quant au débat que nous aurons sur le nombre de postes, je tiens à rappeler que nous compterons 100 000 élèves de moins à la rentrée prochaine. Cette baisse démographique aurait conduit mécaniquement à supprimer 5 000 postes d’enseignants.
Les rapporteurs, comme plusieurs d’entre vous, déposeront des amendements sur ce sujet. Comme je l’ai déjà indiqué, je suis ouverte à des évolutions, notamment pour tenir compte des conséquences des fermetures de classe dans les zones rurales, que le rapporteur spécial a évoquées, et aussi pour poursuivre le choc des savoirs engagé au collège.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Anne Genetet, ministre. L’école est à la croisée des chemins. Deux directions s’offrent à nous : le renoncement ou le sursaut.
Renoncer, c’est niveler par le bas notre école. C’est le projet de celles et ceux qui voudraient tirer un trait sur l’exigence et détricoter méthodiquement tout ce que nous avons bâti, depuis 2017, pour remettre l’école dans le même état que celui où elle était voilà dix ans, sans rien proposer d’autre.
Qui en paierait le prix ? Les élèves des zones d’éducation prioritaire qui apprennent aujourd’hui à lire, écrire et compter dans des classes dédoublées, de petits groupes de douze élèves. Mais aussi les élèves des zones rurales qui, au collège, bénéficient désormais de groupes de besoins pour renforcer leur maîtrise des savoirs fondamentaux, ou encore les lycéens professionnels, qui étudient désormais les mathématiques, le français, l’histoire-géographie par classe dédoublée et peuvent effectuer plus de stages pour mieux préparer leur insertion.
Une autre voie existe : celle du sursaut, de l’exigence pour notre jeunesse, de l’élévation, qui consiste à hisser chaque élève au plus haut niveau, au maximum de ses possibilités.
Elle concerne aussi la protection de nos professeurs et le respect de leur autorité. C’est un chantier que j’ouvrirai.
L’école a pour devoir d’ouvrir tous les chemins pour que chaque jeune puisse choisir le sien. Quand l’école progresse, c’est toute la République qui s’élève. Oui, nous devons prendre toutes les décisions pour relancer l’ascenseur scolaire dans notre pays.
J’ai présenté, il y a quelques semaines, l’acte II du choc des savoirs, c’est-à-dire les mesures pour la rentrée 2025. La dynamique qui a été engagée dans les classes de sixième et de cinquième sera étendue aux classes de quatrième et de troisième. Rien ne me fera dévier de cet objectif. Je respecte les désaccords politiques sur le fond. J’ai pris note aussi des argumentaires juridiques sur la forme.
Se réjouir de la suppression des groupes de besoins, c’est ne pas savoir que la décision du Conseil d’État portait sur la forme et non sur le fond, c’est remettre en question l’aide individualisée aux plus fragiles, c’est ignorer que l’urgence de la baisse du niveau scolaire commande de prendre des décisions.
M. Max Brisson. Très bien !
Mme Anne Genetet, ministre. Ces décisions, je les assumerai. Elles viseront à renforcer l’apprentissage des savoirs fondamentaux du primaire jusqu’au lycée, à donner plus d’autonomie aux chefs d’établissement et à offrir un accompagnement sur mesure, individualisé pour chaque élève. Elles permettront enfin de ramener l’ordre et la tranquillité scolaire dans certains collèges et lycées difficiles, qui en ont particulièrement besoin.
En annonçant, dès à présent, les mesures de la rentrée scolaire 2025, j’entends aussi offrir de la stabilité, de la continuité et de la visibilité aux équipes de terrain – c’est nécessaire. Je me porte garante de cette stabilité, que vous appeliez de vos vœux, mesdames, messieurs les sénateurs, et dont l’éducation nationale a tant besoin.
Déstabiliser notre école, c’est déstabiliser, en cours d’année, des milliers d’élèves en difficulté qui devront attendre pour bénéficier du soutien renforcé qui leur est si utile.
Je sais que nos débats seront vifs, car ils révéleront la vérité des choix à faire, et fervents, car nous partageons tous ici une passion pour l’école. Je formule le vœu qu’ensemble, nous sachions consolider ce budget, dans l’intérêt de nos élèves, de nos professeurs, de tous les personnels de l’éducation nationale. C’est le premier budget de la nation. Protégeons-le ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alexandre Portier, ministre délégué auprès de la ministre de l’éducation nationale, chargé de la réussite scolaire et de l’enseignement professionnel. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les présidents de commission, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget que nous vous présentons ce matin a été élaboré dans des conditions politiques et financières inédites et selon un calendrier très contraint.
Inévitablement, il est perfectible. Mais le débat budgétaire n’a-t-il pas pour objet de l’améliorer, afin de trouver le compromis le plus juste et le plus équilibré dans l’intérêt de la nation et, en l’occurrence, dans l’intérêt de nos jeunes ?
J’insisterai sur les éléments saillants du budget en matière de réussite scolaire et d’enseignement professionnel.
Je commencerai par la réussite scolaire, parce que c’est la première mission de l’école. Cette dernière doit clairement assumer de valoriser l’effort, de cultiver le mérite et de soutenir tous les élèves qui se donnent du mal. Elle doit viser la réussite pour tous, sans pour autant renoncer à l’excellence.
Le projet de loi de finances que nous présentons traduit cette ambition.
C’est le cas, tout d’abord, en matière d’école inclusive. Faire de la réussite scolaire une priorité nationale, c’est évidemment prendre à bras le corps la situation spécifique des enfants en situation de handicap : 4,6 milliards d’euros seront prévus en 2025 pour cette politique. Ce montant sans précédent démontre l’engagement de toute la nation aux côtés de ces enfants.
Ces moyens permettront de créer 2 000 postes d’AESH supplémentaires pour répondre à l’augmentation des besoins, soit l’équivalent, sur le terrain, de 3 175 accompagnants en plus dans nos établissements. De même, 500 emplois d’enseignants seront créés pour développer les unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis) et contribuer à l’inclusion des enfants présentant des troubles du neurodéveloppement (TND). De plus, le fonds de soutien à l’achat des matériels pédagogiques adaptés sera reconduit et doté d’une enveloppe de 25 millions d’euros.
Je voudrais évidemment dire un mot de la loi Vial, dont je salue l’auteur : elle est indispensable et décisive. Des précisions doivent être apportées pour qu’elle soit pleinement mise en œuvre ; c’est l’objet d’un travail fin de terrain, qui est en train d’être mené, pour préparer au mieux les textes réglementaires nécessaires à son application.
Ne laisser aucun enfant au bord du chemin, c’est aussi défendre l’égalité des chances dans notre ruralité et réaffirmer que la promesse d’égalité des chances doit être la même pour tous.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Très bien !
M. Alexandre Portier, ministre délégué. Je sais que c’est un sujet d’attention pour les sénateurs et les collectivités locales – à raison ! Comme j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler ici même, en réponse au rapporteur spécial Olivier Paccaud, il est hors de question que l’école rurale soit l’éternelle sacrifiée. S’il y a un effort à faire, il faut qu’il soit équilibré. C’est cela la solidarité nationale, et elle implique que chaque décision soit la mieux pesée possible.
Je veux toutefois rappeler que ce budget est porteur d’avancées importantes pour maintenir l’école au milieu du village.
Pour les territoires éducatifs ruraux (TER), qui visent à développer les coopérations entre les établissements et les acteurs du périscolaire dans les départements ruraux, le PLF prévoit une augmentation de près de 1 million d’euros en 2025.
Ces moyens supplémentaires permettront de poursuivre le déploiement du dispositif avec un objectif de 300 territoires engagés à terme.
Cela passe aussi par la création de 3 000 places supplémentaires dans les internats d’excellence ruraux à horizon 2026, pour un investissement de près de 40 millions d’euros.
J’insisterai enfin, et surtout, sur la voie professionnelle, qui scolarise un tiers des lycéens de notre pays. Je suis convaincu que nous partageons, sur tous les bancs de cet hémicycle, la même ambition de faire du lycée professionnel une voie d’excellence en le plaçant au cœur, et non à la périphérie, de notre système scolaire.
Il ne faut pas se raconter d’histoire : il n’y aura pas de souveraineté économique, industrielle, énergétique, alimentaire, pas de réponse forte aux enjeux du grand âge, du soin, de l’autonomie, sans un lycée professionnel fort. En l’occurrence, le lycée professionnel est à un tournant. Alors que la démographie scolaire est déclinante dans notre pays, c’est une voie qui gagne des élèves : 17 000 cette année. C’est même la seule de tout le système scolaire. En septembre 2024, nous avons donc ouvert 380 classes et recruté 580 enseignants.
Le PLF pour 2025 s’inscrit dans cette dynamique : 6,5 milliards d’euros seront consacrés à la rémunération des enseignants, soit 100 millions de plus que l’année précédente.
Les équipes des lycées professionnels ont par ailleurs été les premières bénéficiaires du pacte enseignant, avec en moyenne 3 250 euros perçus de plus par an.
Concernant les élèves, 370 millions d’euros seront consacrés aux gratifications des périodes de formation en milieu professionnel (PFMP).
Enfin, les dispositifs « Tous droits ouverts », « Ambition emploi » et « Parcours de consolidation » se poursuivront en 2025 pour continuer de lutter contre le décrochage et favoriser l’insertion professionnelle.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les priorités que permettra de financer le PLF pour 2025 au service de la réussite scolaire de tous les élèves et du succès de la voie professionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
4
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Lors du scrutin n° 135 sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2025, Mme Christine Herzog et M. Jean-Marie Mizzon se sont abstenus, alors qu’ils souhaitaient voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
5
Loi de finances pour 2025
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi de finances pour 2025.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à quatre heures. Cette durée a été augmentée cette année pour tenir compte du nombre d’amendements déposés l’année dernière.
Nous devons donc terminer l’examen de cette mission aux alentours de treize heures trente. Je vous rappelle que quatre-vingt-quinze amendements sont à examiner.
Au-delà de cet horaire, conformément à l’organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l’examen de cette mission sera reportée au samedi 7 décembre.
J’engage donc chacune et chacun à faire preuve de concision.
Enseignement scolaire (suite)
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Enseignement scolaire |
88 828 111 773 |
88 817 133 670 |
Enseignement scolaire public du premier degré |
27 490 907 364 |
27 490 907 364 |
dont titre 2 |
27 428 576 946 |
27 428 576 946 |
Enseignement scolaire public du second degré |
39 523 106 898 |
39 523 106 898 |
dont titre 2 |
39 045 257 381 |
39 045 257 381 |
Vie de l’élève |
8 143 063 307 |
8 153 063 307 |
dont titre 2 |
5 482 672 727 |
5 482 672 727 |
Enseignement privé du premier et du second degrés |
8 938 183 839 |
8 938 183 839 |
dont titre 2 |
8 015 747 441 |
8 015 747 441 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale |
2 999 997 231 |
2 980 819 128 |
dont titre 2 |
2 147 483 298 |
2 147 483 298 |
Enseignement technique agricole |
1 732 853 134 |
1 731 053 134 |
dont titre 2 |
1 176 320 275 |
1 176 320 275 |
M. le président. L’amendement n° II-18, présenté par M. Paccaud, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré |
|
515 000 000 |
|
515 000 000 |
dont titre2 |
515 000 000 |
515 000 000 |
||
Enseignement scolaire public du second degré |
|
450 000 000 |
|
450 000 000 |
dont titre2 |
450 000 000 |
450 000 000 |
||
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés |
|
35 000 000 |
|
35 000 000 |
dont titre2 |
35 000 000 |
35 000 000 |
||
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 000 000 000 |
|
1 000 000 000 |
SOLDE |
- 1 000 000 000 |
- 1 000 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Madame la ministre, nous commençons par un marronnier et j’aurais préféré ne pas avoir à déposer cet amendement… L’an dernier, M. Attal était à votre place et nous avions déjà mis sur la table le problème de la sous-consommation des crédits de la formation, tant initiale que continue.
Le montant total des crédits sous-consommés à ce titre s’élevait à 414 millions d’euros en 2020, 478 millions en 2021, 658 millions en 2022 et 1,1 milliard en 2023. Vous allez me répondre qu’il s’agit d’un sujet technique lié à la répartition des enveloppes par action, mais cela aboutit à une présentation non sincère du budget, ce qu’une commission des finances ne peut évidemment accepter.
Voilà pourquoi nous proposons de minorer les crédits de la formation de 1 milliard d’euros.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, il y a à l’évidence un quiproquo ; la faute est clairement de notre côté et nous avons bien l’intention de rectifier les choses.
Il est exact qu’un montant sous-consommé de 1 milliard d’euros apparaît sur la ligne de la formation, mais ces crédits sont consommés sur une autre ligne. Je comprends que l’on puisse croire à une sous-consommation, mais ce n’est pas le cas.
Ainsi, les 20 000 professeurs stagiaires que nous recrutons chaque année sont en stage à temps plein lorsqu’ils sortent du master enseignement ; ils sont alors rémunérés sur la même ligne que les professeurs titulaires, mais ils n’apparaissent pas sur la ligne consacrée à la formation. Il en est de même pour les contractuels.
Vous avez raison – et je vous en remercie – de pointer cette incohérence de présentation qui, comme vous le soulignez, peut donner l’impression d’un budget qui n’est pas sincère. Nous rectifierons les choses, je m’y engage.
Pour autant, nous avons besoin de ce milliard d’euros qui apparaît non consommé, mais qui l’est en réalité, pour rémunérer en 2025 nos 20 000 professeurs stagiaires et nos contractuels.
Par conséquent, monsieur Paccaud, je vous demande de bien vouloir me faire confiance et de retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je crois qu’il faut lier la question de la formation continue des enseignants à celle des contenus de cette formation et aux besoins sur le terrain, notamment en termes de pratique professionnelle.
Souvent, les formations professionnelles qui sont proposées ne correspondent pas à la réalité du terrain. Il faudrait de plus les adapter aux missions supplémentaires qui sont régulièrement assignées au corps enseignant. Demander aux enseignants d’assurer de nouvelles missions sans leur donner les formations nécessaires n’a pas de sens.
Enfin, si vous voulez que les enseignants acceptent d’aller en formation, il faut recruter des remplaçants, parce que, quand un enseignant n’est pas à son poste, il est taxé d’absentéiste.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Je veux moi aussi revenir sur l’offre qui est proposée. Nous sommes aujourd’hui dans une logique descendante : il s’agit d’assurer le service après-vente des priorités politiques du moment plutôt que d’apporter une réponse aux besoins exprimés sur le terrain. Il arrive même parfois que les contenus proposés soient identiques d’une année sur l’autre. C’est pour ces raisons que les enseignants n’ont pas envie de suivre ces formations.
Au cours des auditions, un représentant syndical nous disait d’ailleurs que l’on est aujourd’hui davantage dans l’information que dans la formation…
Pourtant, les sujets ne manquent pas. Il faut former les professeurs aux enjeux liés à l’école inclusive, à l’éducation à la vie sexuelle et affective, à la protection de l’enfance, etc. Il faut aussi assurer une montée en compétences tout au long de la carrière en lien avec les disciplines enseignées, avec les appétences exprimées par les équipes pédagogiques et avec les projets d’établissement.
Il faut aussi dire qu’avoir imposé la tenue de ces stages hors temps scolaire, ce qui fait de la profession enseignante la seule où il est demandé de se former hors du temps de travail, les a rendus moins attractifs. Nous sommes bien sûr opposés à cette logique.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Madame la ministre, je ne retire pas cet amendement.
Au-delà de cette question de sous-consommation, il y a un problème de disponibilité de certaines formations. Par exemple, j’ai reçu des enseignants qui ne comprennent pas que, à un moment où l’on parle beaucoup d’inclusion, les formations liées à l’accueil des élèves en situation de handicap ne soient pas disponibles partout sur le territoire.
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Remettons un peu les choses en perspective. Le rapporteur spécial a évoqué un montant de 471 millions d’euros non consommés cette année.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. C’est 1,1 milliard !
M. Cédric Vial. Lorsque j’ai discuté avec le ministère de l’éducation nationale de la mise en œuvre de la loi visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne, on me disait qu’il n’était pas possible de trouver 10 millions… Les ordres de grandeur ne sont pas les mêmes.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Anne Genetet, ministre. Le budget de la formation initiale et continue est d’un peu plus de 2 milliards d’euros et le contenu des formations me semble de très bon niveau. Même si les choses sont bien évidemment perfectibles et qu’il faut savoir se remettre en question, nous avons absolument besoin de ce budget.
C’est pourquoi, monsieur le rapporteur spécial, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, tout en m’engageant à modifier la présentation du budget.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-18.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 136 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 228 |
Contre | 116 |
Le Sénat a adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° II-478 rectifié est présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye et Mme N. Goulet.
L’amendement n° II-590 rectifié est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré |
|
24 330 179 |
|
24 330 179 |
dont titre2 |
22 376 193 |
22 376 193 |
||
Enseignement scolaire public du second degré |
|
59 399 308 |
|
59 399 308 |
dont titre2 |
33 117 585 |
33 117 585 |
||
Vie de l’élève |
|
36 564 240 |
|
36 564 240 |
dont titre2 |
6 124 991 |
6 124 991 |
||
Enseignement privé du premier et du second degré |
|
25 190 822 |
|
25 190 822 |
dont titre2 |
10 137 260 |
10 137 260 |
||
Soutien de la politique de l’éducation nationale |
|
5 782 029 |
|
5 782 029 |
dont titre2 |
2 002 559 |
2 002 559 |
||
Enseignement technique agricole |
|
18 115 514 |
|
18 867 079 |
dont titre2 |
3 947 942 |
3 947 942 |
||
TOTAL |
|
169 382 092 |
|
170 133 657 |
SOLDE |
- 169 382 092 |
- 170 133 657 |
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° II-478 rectifié.
M. Michel Canévet. Durant toute la semaine passée, nous avons longuement évoqué les difficultés à boucler le budget de l’État et la nécessité, à côté de la mobilisation de recettes supplémentaires, de réaliser des économies significatives.
C’est dans cet esprit que le présent amendement vise à donner un coup de rabot de 5 % sur les crédits de la mission. Il appartiendra ensuite à la ministre de choisir où faire porter ces économies. Il s’agit en tout cas de faire en sorte que cette mission participe comme les autres à l’effort de redressement de nos comptes publics.
L’amendement n° II-477 rectifié est un amendement de repli. Vous pourrez considérer, monsieur le président, qu’il aura été défendu.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° II-590 rectifié.
Mme Anne Genetet, ministre. Vous le savez, il nous faut atteindre 5 % de déficit public en 2025. Le Gouvernement a présenté des mesures transversales en ce sens et le ministère de l’éducation nationale doit contribuer à l’effort collectif.
Le présent amendement traduit cet effort pour la mission « Enseignement scolaire ». Ces annulations de crédits portent notamment sur des mesures transversales en matière de masse salariale et sur la réserve de précaution.
M. le président. L’amendement n° II-477 rectifié, présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye, Mme N. Goulet et M. Maurey, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
2 700 000 |
|
2 700 000 |
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
3 300 000 |
|
3 300 000 |
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
2 600 000 |
|
2 600 000 |
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
260 000 |
|
260 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
33 400 000 |
|
33 300 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
550 000 |
|
550 000 |
TOTAL |
|
42 810 000 |
|
42 710 000 |
SOLDE |
- 42 810 000 |
- 42 710 000 |
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. La ministre nous a indiqué que cette réduction portait notamment sur la réserve de précaution ; elle est la mieux placée pour savoir si elle en a besoin ou pas.
C’est pourquoi la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques nos II-478 rectifié et II-590 rectifié. Par conséquent, il demande le retrait de l’amendement n° II-477 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° II-477 rectifié ?
Mme Anne Genetet, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement au profit de son amendement n° II-590 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Le Gouvernement et M. Canévet proposent donc de réduire les crédits de la mission de 170 millions d’euros.
C’est une baisse de 24 millions pour l’enseignement scolaire public du premier degré, ce qui équivaut à la suppression de 600 postes. Allez-vous le faire ?
C’est une baisse de 59 millions dans l’enseignement scolaire public du second degré, ce qui équivaut à la suppression de 1 600 postes. Allez-vous le faire ?
C’est une baisse de 18 millions pour l’enseignement technique agricole.
Il n’existe pas d’argent magique qui dorme dans les tiroirs de l’éducation nationale. Toute coupe aussi drastique aura nécessairement des conséquences sur l’éducation et le bien-être de nos élèves. Cela apparaît d’autant plus irraisonné que le Gouvernement se montre complètement fermé à toute mesure visant à augmenter les recettes pour assainir les finances publiques.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. La réduction proposée par les amendements identiques nos II-478 rectifié et II-590 rectifié sur les crédits de l’enseignement technique agricole ne correspond pas à la décision de la commission de la culture.
On ne peut procéder ainsi, par un coup de rabot d’une telle ampleur sur l’ensemble des lignes budgétaires. À l’école, justement, on m’a appris à agir avec discernement. C’est tout le contraire qui est proposé ici, puisque les effectifs de l’enseignement agricole progressent. L’effort doit évidemment prendre en compte les situations particulières.
Pour ces raisons, je m’oppose à cette réduction de crédits. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-478 rectifié et II-590 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° II-477 rectifié n’a plus d’objet.
Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° II-19 est présenté par M. Paccaud, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-543 rectifié bis est présenté par Mme Billon, MM. Menonville et Lafon, Mmes Sollogoub et de La Provôté, M. Parigi, Mme Gacquerre, MM. Fargeot et S. Demilly et Mme Morin-Desailly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
12 000 000 |
|
12 000 000 |
|
TOTAL |
12 000 000 |
20 000 000 |
12 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
- 8 000 000 |
- 8 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-19.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Cet amendement vise à minorer légèrement les crédits versés au réseau Canopé et à majorer les crédits accordés aux maisons familiales rurales.
Nous avons constaté fin 2023 que le fonds de roulement du réseau Canopé était relativement confortable, puisqu’il s’élevait à environ 25 millions d’euros. C’est pourquoi nous proposons une baisse des crédits de 20 millions.
De leur côté, les maisons familiales rurales – nous sommes nombreux à reconnaître dans nos départements leur intérêt – ont vu le nombre de leurs élèves augmenter de 1 600. Or l’augmentation du budget qui leur est consacré, petite, nous est apparue comme insuffisante. C’est pourquoi nous proposons une majoration de leurs crédits de 12 millions d’euros.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° II-543 rectifié bis.
Mme Annick Billon. Lors des auditions organisées par Bernard Fialaire, rapporteur pour avis de la commission de la culture, nous avons constaté l’importance du réseau des MFR, à la fois par son maillage et pour les débouchés offerts.
Les MFR accueillent 1 600 élèves de plus, ce qui demande un financement à hauteur de 8 millions d’euros, auquel il faut ajouter 4 millions pour les postes de formateurs et les ajustements budgétaires.
Il me semble absolument nécessaire d’augmenter les crédits de ces maisons, qui sont très importantes pour les territoires ruraux.
M. le président. L’amendement n° II-143, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
17 000 000 |
|
17 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
17 000 000 |
|
17 000 000 |
SOLDE |
- 17 000 000 |
- 17 000 000 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Nous proposons de minorer les crédits de l’action n° 07 « Établissements d’appui de la politique éducative » de 17 millions d’euros.
Chacun a pu constater l’inflation du nombre des opérateurs, y compris au ministère de l’éducation nationale. Pourtant, le Président de la République avait pris des engagements pour réduire l’importance de ces agences, notamment dans le cadre du programme Action publique 2022.
Les amendements que je présenterai par la suite iront dans ce même sens.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-323 rectifié est présenté par M. Chaize, Mme Jacques, MM. Reynaud, Mandelli, D. Laurent, Genet et Allizard, Mmes Di Folco, P. Martin, Gruny et Puissat, M. Lefèvre, Mme M. Mercier, M. C. Vial, Mme Lassarade et M. Saury.
L’amendement n° II-428 rectifié est présenté par Mmes Havet et Cazebonne.
L’amendement n° II-494 est présenté par M. Lemoyne.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Micheline Jacques, pour présenter l’amendement n° II-323 rectifié.
Mme Micheline Jacques. Cet amendement de Patrick Chaize va dans le même sens que celui du rapporteur spécial, mais il tend à prévoir une augmentation des crédits de 20 millions d’euros pour les MFR au lieu de 12 millions.
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° II-428 rectifié.
Mme Nadège Havet. Cet amendement vise également à augmenter les crédits des MFR de 20 millions d’euros : 8 millions au titre de l’augmentation du nombre des élèves, 2 millions pour le coût des formateurs et 10 millions pour aligner le taux d’encadrement des élèves de quatrième et de troisième sur celui des autres familles de l’enseignement agricole.
M. le président. L’amendement n° II-494 n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-464, présenté par Mme Cazebonne, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
3 000 000 |
|
3 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
3 000 000 |
|
3 000 000 |
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Samantha Cazebonne.
Mme Samantha Cazebonne. Le réseau Canopé regroupe 1 200 agents qui travaillent dans tous les territoires, y compris auprès des Français de l’étranger. Ils forment les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem). Ils assurent en particulier des formations liées à l’inclusion.
Si les amendements qui viennent d’être présentés sont adoptés, pratiquement 300 postes de contractuels seront supprimés. Il faut le savoir, parce que ces contractuels sont dans vos communes, mes chers collègues, et les maires comptent sur eux.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Non !
Mme Samantha Cazebonne. Par exemple, le 22 novembre dernier, le maire de Verdun a inauguré l’atelier Canopé au cœur de sa commune et il compte sur ce service public pour former ses personnels, notamment les Atsem, et pour sensibiliser aux questions liées à l’inclusion.
C’est la raison pour laquelle je voterai contre les amendements qui visent à réduire les crédits consacrés à Canopé.
Au contraire, je propose d’augmenter la dotation de ce réseau, parce qu’il est particulièrement important d’améliorer la formation continue au sein de l’éducation nationale – ces 1 200 agents y contribuent. C’est encore plus important quand il s’agit de recruter des contractuels pour enseigner à nos enfants.
Je peux comprendre l’idée de redistribuer des crédits vers les MFR, mais Canopé n’est pas l’opérateur qu’il faut pénaliser.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Je demande le retrait de l’ensemble de ces amendements.
L’amendement n° II-143 et les amendements identiques nos II-323 rectifié et II-428 rectifié seront satisfaits par l’adoption de l’amendement de la commission.
Mme Cazebonne nous a dit beaucoup de bien de Canopé, ce qui est le cas de tout le monde. Pour autant, je veux préciser que les agents de Canopé ne sont pas partout : ils sont installés au siège et dans les chefs-lieux de département.
Par ailleurs, il est vrai que le réseau s’est bien adapté aux nouvelles missions qui lui ont été confiées : auparavant, il faisait surtout de l’édition ; il a désormais des missions de formation. Pour autant, la formation des enseignants est d’abord dispensée par les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inpsé).
Je ne veux pas du tout minorer la qualité du travail réalisé par Canopé, mais notre proposition correspond en fait à un prélèvement sur son fonds de roulement qui s’élevait, je le rappelle, à 25 millions d’euros à la fin de 2023.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Plusieurs amendements visent à réduire la subvention versée au réseau Canopé – un quart dans l’amendement de la commission, par exemple.
Je rappelle que cet opérateur de l’État contribue à former nos enseignants tout au long de leur carrière, en particulier sur les questions numériques. Son expertise et sa force sont complémentaires des autres organismes de formation de l’éducation nationale, notamment les Inspé pour la formation initiale, et les écoles académiques, créées en 2022, pour la formation continue.
Certes, une réflexion doit être menée pour doter notre politique de formation continue d’une organisation plus lisible et plus efficiente, mais je ne crois pas que l’on puisse initier un chantier stratégique de cette nature par un coup de rabot, a fortiori lorsque cela contraindrait l’opérateur à épuiser tout son fonds de roulement.
Un fonds de roulement de 5 millions d’euros correspond à dix jours de fonctionnement, alors qu’on estime habituellement qu’il doit plutôt correspondre à trente jours de fonctionnement. Dix jours, ce serait nettement insuffisant.
Je veux aussi rappeler que le réseau Canopé est déjà soumis à un effort dans ce projet de loi de finances, avec la suppression de vingt équivalents temps plein.
À rebours de votre souhait, monsieur le rapporteur spécial, de voir Canopé développer ses ressources propres, l’adoption de votre proposition conduirait à une perte importante de ressources commerciales et à la réduction du nombre et de la qualité des formations dispensées, qui ont été suivies – je le rappelle – par près de 140 000 enseignants l’an dernier.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme Samantha Cazebonne. Je tiens aussi à rappeler que, depuis dix ans, Canopé a vu sa subvention réduite de 10 millions d’euros. Ce n’est pas rien !
Par ailleurs, monsieur le rapporteur spécial, le réseau est bien implanté, via les ateliers Canopé, dans la ruralité, mais aussi dans les territoires ultramarins. En Guyane, leurs intervenants se rendent même en pirogue jusqu’aux collèges les plus éloignés, pour aller former nos enseignants.
Je ne pense pas que le service proposé à nos écoles puisse être considéré comme négligeable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Ce budget supprime déjà 3 millions d’euros de financement au réseau Canopé ; le priver de 20 millions d’euros, c’est énorme !
Cela a déjà été dit, mais je tiens à le répéter, ce réseau est un acteur incontournable de la formation continue des enseignants et membres de la communauté éducative. Il dispose d’un maillage territorial très développé, offrant une proximité géographique à travers les ateliers Canopé, qui viennent d’être évoqués et qui sont présents dans chaque département de la France hexagonale et d’outre-mer. C’est un réel atout pour former le personnel au plus près des établissements scolaires.
Dans un contexte de forte demande de formation de la part de ce personnel et de sous-utilisation récurrente des crédits dont nous avons précédemment parlé, le réseau Canopé doit justement pouvoir continuer de développer son offre de formation.
Nous sommes opposés à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. J’apprends quelque chose d’important ce matin : le réseau Canopé serait l’opérateur de la formation au sein de l’éducation nationale.
Voyons, Canopé est avant tout un éditeur, dont la mission est de fabriquer des produits pouvant, certes, être utilisés pour de la formation, mais pas uniquement ! Et le rapporteur spécial encourage cet éditeur à développer ses ressources propres, ce qui est nécessaire et utile.
Pardon de vous le dire, mais la formation, mes chers collègues, c’est d’abord le métier des inspecteurs de l’éducation nationale (IEN). Elle doit être menée en interne et n’a pas besoin d’être déléguée à une agence. D’ailleurs, les professeurs demandent des formations très pratiques, reposant sur des échanges entre pairs – Canopé n’a alors vraiment pas de raison d’être –, ou des formations de très haut niveau sur l’évolution de leur discipline, en lien avec l’université.
S’il vous plaît, mes chers collègues, ne donnez pas au réseau Canopé un rôle qu’il ne mérite pas.
M. Michel Canévet. C’est vrai !
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.
Mme Colombe Brossel. Si la mesure proposée au travers de ces différents amendements était aussi évidente que cela, nous n’aurions pas un tel débat. Il n’est donc pas nécessaire de s’énerver, monsieur Brisson…
J’ajouterai deux points.
D’abord, nous ne l’avons pas dit, mais nous soutenons totalement le développement des MFR et l’abondement de leur budget. Seulement, on ne peut pas prendre dans les poches de l’un parce que l’on ne sait pas comment remplir celles de l’autre. Canopé n’a pas à souffrir du choix – que nous considérons comme étant un bon choix – d’abonder les MFR.
Ensuite, notre débat me fait penser à ma grand-mère, qui disait : faire et défaire, c’est toujours travailler. Elle avait sans doute raison, mais je ne suis pas sûre qu’un débat budgétaire puisse s’appuyer sur le bon sens de ma grand-mère… Dans quelques jours, au moment d’examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », nous allons voter un abondement important – plusieurs centaines de millions d’euros – pour reconstituer la trésorerie de l’Agence du service civique, que le Gouvernement s’est évertué à mettre à sec.
Honnêtement, mes chers collègues, nous ne sommes pas là pour gérer de petits équilibres budgétaires établis n’importe comment. Le réseau Canopé doit pouvoir continuer à travailler ; donnons-lui les moyens nécessaires pour cela, et donnons-les, aussi, aux MFR.
M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, pour explication de vote.
M. Christophe Chaillou. Un grand nombre de contrevérités ont été égrenées ce matin : Canopé, c’est d’abord la formation continue des enseignants, avec une mise en œuvre concrète sur le terrain.
M. Max Brisson. Mais non !
M. Christophe Chaillou. Je vous invite à aller y regarder de près, mon cher collègue.
M. Max Brisson. Je connais !
M. Christophe Chaillou. Je peux vous citer l’exemple du département dont je suis élu, le Loiret : chaque année, 20 collèges bénéficient d’actions de formation et de sensibilisation ; dans certaines communes, comme Orléans, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) sont eux-mêmes formés pour pouvoir relever les défis, très importants, auxquels ils sont confrontés. Chaque année, ce sont 240 000 enseignants qui sont concernés à l’échelle nationale.
Au cours des dernières années, cela a déjà été signalé, d’importants efforts ont été réalisés en matière de gestion, avec, notamment, une recherche de partenariats. Ainsi, certaines collectivités locales confient au réseau Canopé, qui délivre une action de terrain, la formation d’une partie de leur personnel. S’ajoutent à cela des partenariats avec le secteur privé.
Vous parlez, monsieur le rapporteur spécial, d’un petit effort, mais il s’agit d’une réduction de 25 % de la subvention annuelle ; cela condamnera de très nombreuses actions !
Comme l’a dit Colombe Brossel, il est particulièrement funeste de vouloir opposer la nécessité de cette formation continue au soutien aux MFR. L’idée est très mauvaise. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Lors de la discussion générale, un certain nombre d’entre nous avons souligné les faiblesses de la formation continue.
Qu’est-on en train d’opposer ? Une formation continue qui ne fonctionne pas, ou qui fonctionne insuffisamment, à un réseau maillant nos territoires qui, lui, fonctionne et a besoin de cet argent. Je précise que nous avons revu la copie à la baisse, passant du montant initialement prévu de 20 millions d’euros à 12 millions d’euros. Nous l’avons fait avec l’accord des maisons familiales rurales, qui ont des besoins, mais comprennent aussi qu’au moment où la dette atteint 3 228 milliards d’euros, tout le monde doit faire un effort.
Je suis donc opposée à la suppression de ces 12 millions d’euros demandés à juste titre par les MFR et favorable à ce que l’on revoie considérablement tout le dispositif de formation de Canopé. En réalité, mes chers collègues, nous sommes très attachés à cette formation. Simplement, elle n’est pas dispensée de manière efficace ; au cours de nombreuses auditions, nous avons entendu que les enseignants ne suivaient pas les formations, parce qu’ils les jugeaient inadaptées à leurs besoins.
Ainsi, revenir sur des crédits qui sont peu ou mal utilisés et qui ne permettent pas de satisfaire les attentes des enseignants me semble tout à fait logique.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Je suis très partagée sur ces amendements.
D’un côté, le coup de rabot de 25 % me choque ; cela signifie 300 personnes seraient susceptibles de perdre leur emploi. De l’autre côté, le très important fonds de roulement de cet opérateur me laisse perplexe…
Par ailleurs, M. Brisson a indiqué que le réseau Canopé n’avait avant tout qu’un rôle d’éditeur ; ce n’est plus du tout le cas, il s’est justement recentré sur la formation. En outre, il me semble qu’il y a un paradoxe dans vos propos, monsieur le rapporteur spécial, lorsque vous affirmez que des millions d’euros de crédits de formation ne sont pas consommés et lorsque vous proposez ce coup de rabot.
Je pense qu’il faudrait remettre complètement à plat les formations, comme l’ont suggéré Mme la ministre et Annick Billon. On peut certes « faire peur » au réseau Canopé pour l’inciter à améliorer la lisibilité de son offre de formation et à renforcer son maillage territorial, mais il ne faut pas le faire en l’opposant aux MFR, ce qui nous place face à un choix cornélien.
En tout état de cause, je suis très gênée d’avoir à voter pour un coup de rabot d’une très grande ampleur, alors que les professeurs ont besoin de formation continue tout au long de leur carrière.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. Je suis, comme Laure Darcos, très mal à l’aise devant ces amendements, parce que, si je souhaite que l’on abonde le budget des MFR de 12 millions d’euros, amputer celui du réseau Canopé ne me paraît pas être un bon choix.
Notre collègue Christian Bruyen et moi-même avons mené une mission sur l’intelligence artificielle (IA) et l’éducation. Entre autres opérateurs, nous avons entendu en audition le réseau Canopé et nous comptons sur lui pour relever le défi de la formation continue des enseignants à l’heure de l’IA, défi crucial si nous voulons ne pas accentuer le retard de notre système éducatif.
Je souhaite donc que l’on trouve un autre moyen de financer – comme elles le méritent – les MFR.
M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Pour avoir été enseignante et directrice d’école, j’abonde dans le sens de mon collègue Max Brisson.
Il a été fait allusion aux outre-mer. La formation devrait selon moi s’adapter aux réalités de ces territoires. Or ce n’est pas le cas. Ne serait-ce qu’en Guyane, dont j’ai auditionné le recteur d’académie, le territoire est partagé en quatre parties, pour chacune desquelles les contenus – je ne parle même pas des documents pédagogiques – sont adaptés.
Il y a donc tout un travail de révision à mener au sein du réseau Canopé.
Par ailleurs, je retire l’amendement n° II-323 rectifié au profit des amendements identiques nos II-19 et II-543 rectifié bis.
M. le président. L’amendement n° II-323 rectifié est retiré.
La parole est à M. Aymeric Durox, pour explication de vote.
M. Aymeric Durox. Je souhaite, moi aussi, livrer mon modeste témoignage. Il y a peu encore, j’étais professeur d’histoire-géographie et je n’ai jamais demandé une formation Canopé ; je ne connais en outre aucun collègue qui l’ait fait.
Le reproche général que je pouvais adresser aux formations proposées était leur totale déconnexion des attendus du terrain. Il s’agissait souvent de réflexions ésotériques ou à la pointe de la recherche universitaire, absolument pas des formations clés en main, délivrant des éléments applicables concrètement dans le premier et le second degrés, comme le demandent en réalité les enseignants.
Le réseau Canopé, me semble-t-il, c’est le type même de ces formations déconnectées. Une baisse de 25 % de son budget sera donc indolore pour la plupart des enseignants. Elle ira en outre dans le sens de l’intérêt général. On demande partout des économies ; faisons-en là où il y a un peu de gras et il y en a, je crois, du côté du réseau Canopé.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Pour ma part, je suis vraiment gênée de constater, une fois encore, que l’on oppose secteur public et secteur privé.
Ainsi, on envisage de supprimer des crédits à un réseau public, certes perfectible, mais qui est présent sur l’ensemble du territoire national, jusque dans nos outre-mer, pour renforcer l’enseignement privé.
Il ne faut pas opposer public et privé, certes, mais, si l’on nous contraint à choisir entre l’un et l’autre, alors – nous l’avons souligné dans les interventions en discussion générale – notre attention doit aller, en responsabilité, vers une école de l’égalité des chances, qui fasse fonctionner l’ascenseur social. En finançant l’enseignement privé, on serait vraiment à côté de la plaque !
Je veux également insister sur l’intérêt de disposer d’un réseau national – donc y compris ultramarin – tel que Canopé, parce que, quand le pays est frappé par des événements graves, d’échelle nationale ou internationale, les enseignants sont du jour au lendemain – c’est peu de le dire – décrétés compétents et aptes pour intervenir devant leurs élèves, apporter une écoute et répondre aux questions. Tel a été le cas avec la crise du covid ou lors d’attentats, tels que celui du Bataclan. J’étais alors enseignante et, en un week-end, j’ai dû être en mesure de répondre aux questions d’une classe de CE1.
Certes, la formation relève des IEN, mais, malgré tout, il convient de pouvoir compter sur un réseau national tel que Canopé.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-19 et II-543 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 137 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Pour l’adoption | 193 |
Contre | 116 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos II-143, II-428 rectifié et II-464 n’ont plus d’objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-144, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
6 400 000 |
|
6 400 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
6 400 000 |
|
6 400 000 |
SOLDE |
- 6 400 000 |
- 6 400 000 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Toujours dans l’objectif de lutter contre la gabegie de l’administration et de cesser de donner aux opérateurs un rôle et une influence qu’ils n’ont pas à avoir, je propose, au travers du présent amendement, de minorer de 6,4 millions d’euros les crédits de l’action n° 07 « Établissements d’appui de la politique éducative » du programme 214 « Soutien de la politique de l’éducation nationale ». Il s’agit de permettre, à terme, la réinternalisation du Centre national d’enseignement à distance (Cned).
M. le président. L’amendement n° II-451, présenté par M. Chantrel, Mmes Monier, Brossel et Blatrix Contat, M. Kanner, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
6 000 000 |
|
6 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
6 000 000 |
|
6 000 000 |
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Yan Chantrel.
M. Yan Chantrel. Au travers de cet amendement, nous cherchons à alerter la représentation nationale et le Gouvernement sur le sujet de la prise en charge de nos compatriotes souhaitant accéder au Cned dans son format réglementé dans les pays où il n’existe pas d’autres solutions de même niveau que le réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE).
Des centaines d’élèves de nationalité française – en Algérie, au Niger, en Iran ou encore, plus récemment, en Turquie – se retrouvent sans solution de scolarisation dans un programme d’enseignement français. L’accès au programme du Cned dans son format réglementé est en effet réservé aux élèves ayant étudié l’année précédente dans une classe homologuée par l’AEFE, ce qui n’est pas possible pour ces élèves.
Ces dispositions, mises en place depuis deux ans, privent de nombreuses familles françaises résidant dans les pays mentionnés de la possibilité d’inscrire leurs enfants dans un programme permettant par la suite d’accéder directement au système d’enseignement supérieur français, en raison de ce critère d’antériorité.
Le présent amendement tend à abonder le budget de 6 millions d’euros supplémentaires, pour pouvoir remettre en place ce qui a été défait depuis deux ans et offrir à ces enfants une solution de scolarisation par l’intermédiaire du Cned.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Dans le PLF pour 2025, le Gouvernement minore la dotation du Cned d’environ 6 millions d’euros. Notre collègue Aymeric Durox propose d’y adjoindre une baisse supplémentaire de 6 millions d’euros, tandis que notre collègue Yan Chantrel, lui, propose de rehausser cette dotation pour la maintenir au niveau de 2024. Je suis défavorable aux deux amendements, le choix budgétaire du Gouvernement me semblant être le bon.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Soyons honnêtes, monsieur le sénateur Durox, l’adoption de votre amendement reviendrait à supprimer le Centre national d’enseignement à distance.
Or, je répète ce qui a été dit à plusieurs reprises sur ces travées, le Cned est vraiment un opérateur indispensable. Il accompagne 90 000 de nos élèves chaque année, notamment dans les missions absolument essentielles que le sénateur Yan Chantrel a décrites et que je connais fort bien.
En tant que médecin, je pense aussi au cas d’un enfant dont la jambe serait mise en traction pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois pour soigner un problème de hanche et qui, de ce fait, n’aurait pas accès à une école. Au travers de son investissement en faveur de la continuité pédagogique, indispensable dans l’exemple que je viens de citer – mais il y en a beaucoup d’autres –, le Cned a toute son utilité.
Il participe donc activement à cet objectif, notamment en offrant une possibilité de scolarisation de courte durée – mais pas seulement – pour le second degré, via la plateforme Program’cours.
Par ailleurs, le Cned dégage des revenus, le montant de ses ressources propres atteignant 63 millions d’euros par an. S’il venait à être supprimé, ce serait autant de ressources perdues pour le service public : je ne suis pas certaine que celui-ci ait besoin de cela en ce moment !
Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos II-144 et II-451.
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Je soutiens l’amendement n° II-451 de mon collègue Yan Chantrel et remercie Mme la ministre de ses propos sur l’importance du Cned, notamment pour un certain nombre de jeunes Français établis hors de France. De ce fait, je m’attendais plutôt à un avis favorable sur cet amendement, tendant à octroyer 6 millions d’euros de plus au Cned.
Ceux d’entre nous qui ont participé aux auditions du rapporteur pour avis de la commission de la culture, Claude Kern, sur la mission « Action extérieure de l’État » auront noté, à l’instar de Yan Chantrel, qu’en Turquie, ou encore à Bakou ou à Téhéran, de nombreux élèves se retrouvent sans solution d’enseignement du jour au lendemain. Mais cette situation peut aussi tout à fait concerner des élèves habitant au fin fond du Tyrol.
Le Cned est donc absolument essentiel pour l’enseignement à l’étranger.
M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour explication de vote.
Mme Samantha Cazebonne. Mes collègues représentants des Français de l’étranger ont bien résumé la situation.
Je souhaite néanmoins ajouter un point. Parmi les Français dont nous parlons, beaucoup partagent leur nationalité française avec une autre nationalité. Or, j’en suis sûre, nous souhaitons tous qu’à tout le moins ils parlent le français, connaissent les valeurs de la France et sachent un peu de nos programmes.
Quand un Français, sur n’importe quel territoire du monde, n’a pas d’école près de chez lui, qu’il n’est pas boursier et ne peut se payer une école française – oui, il y a des Français de l’étranger qui appartiennent aux classes moyennes et qui n’ont pas les moyens de scolariser leurs enfants dans nos écoles françaises –, que fait-on ? Les laisse-t-on sans apprentissage de la langue française ? sans éducation française ? Je vous pose la question, mes chers collègues.
Pour ce qui me concerne, je rejoins le Gouvernement sur la nécessité de ne pas amputer les moyens du Cned et je soutiendrai même l’amendement de mon collègue Chantrel. Pour nous, Français de l’étranger, c’est parfois le seul moyen que nous ayons de scolariser nos enfants et de leur transmettre nos valeurs.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-451.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 138 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 115 |
Contre | 228 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-20, présenté par M. Paccaud, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
SOLDE |
- 5 000 000 |
- 5 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Le présent amendement porte sur les crédits de l’Office national d’information sur les enseignements et les professions (Onisep).
Cet organisme existe depuis très longtemps et fait du bon travail. Toutefois, depuis 2018, il fait doublon avec la compétence octroyée aux régions en matière de formation, exemple type de doublon mis en avant, notamment, dans un rapport de la Cour des comptes.
L’Onisep disposant, lui aussi, d’un fonds de roulement d’un montant non négligeable, il serait souhaitable de minorer sa subvention, voire, à terme, de faire en sorte que les régions s’occupent seules de formation.
Très concrètement, le présent amendement tend donc à diminuer de 5 millions d’euros ses crédits, sachant que le fonds de roulement de cet organisme avoisinait 6 millions d’euros à la fin de 2023.
M. le président. L’amendement n° II-145, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
4 500 000 |
|
4 500 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
4 500 000 |
|
4 500 000 |
SOLDE |
- 4 500 000 |
- 4 500 000 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Je considère mon amendement comme défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud. Je demande le retrait de l’amendement n° II-145 au profit de celui de la commission ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alexandre Portier, ministre délégué. Je remercie les auteurs de ces amendements de me donner l’occasion de m’exprimer sur ce qui est une priorité du Gouvernement : l’orientation.
Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons annoncé notre volonté de remettre à plat la politique d’orientation, facteur déterminant dans la réussite scolaire de nos élèves. Une bonne politique d’orientation doit en effet être source de motivation ; elle doit donner à tous nos jeunes de bonnes raisons de s’engager dans une voie, de quelque formation ou filière qu’il s’agisse.
Nous avons engagé un travail de concertation avec tous les acteurs, de l’échelon local jusqu’à l’échelon national. Il serait regrettable d’amputer les moyens avant d’avoir défini des objectifs.
J’émets en conséquence un avis défavorable sur les deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. La somme de 5 millions d’euros représente tout de même un quart du budget total programmé pour cet opérateur dans le projet de loi de finances.
Je tiens en outre à rappeler le contexte dans lequel nous nous trouvons, caractérisé par la mise en place de la réforme du lycée et de Parcoursup, ainsi que par la multiplication des offres privées dans l’enseignement supérieur. Tout cela est complexe, confronte les élèves à de nouveaux enjeux et intensifie le stress lié à l’orientation, chez eux, comme chez les étudiants.
Il nous semble donc précieux de garantir la pérennité d’une structure nationale apportant des ressources facilement accessibles et dont la pertinence est largement reconnue par le monde éducatif. Ainsi, 75,4 % des établissements scolaires déclaraient, au début de l’année 2022, qu’ils s’appuyaient sur les ressources de l’Onisep pour l’orientation de leurs élèves.
Nous sommes opposés à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je comprends que l’amendement du rapporteur spécial de la commission des finances puisse poser problème, en raison de son aspect de coup de rabot.
Toutefois, il y a un moment où, dans le contexte budgétaire actuel, il faut rechercher une certaine unité. L’éparpillement actuel des acteurs ne permet de mener ni une politique d’orientation ni une politique de formation.
C’est ce que j’ai voulu dire quand, à l’occasion de l’examen de précédents amendements, j’ai expliqué que l’éducation nationale avait, au travers de ses inspecteurs, toutes les qualités et les compétences en interne pour mener une politique de formation, à condition qu’on lui en donne clairement la mission.
Il en va de même pour l’orientation. On ne peut pas continuer à empiler au fil de l’histoire des opérateurs, aussi légitimes soient-ils. M. le ministre Portier a bien raison, il est grand temps de mener une véritable réflexion sur la politique d’orientation. L’amendement du rapporteur spécial a au moins le mérite de poser le sujet, dans le cadre très contraint du budget que nous examinons.
Sur cette question majeure qu’est l’orientation – le décrochage scolaire est le résultat d’une orientation mal bâtie –, tous ces organismes cumulés ne font pas une bonne politique. Il est grand temps que la représentation nationale envoie ce message.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Comme Max Brisson, j’appelle l’attention de nos collègues sur la situation de l’orientation. Cette compétence a été confiée aux régions. Aussi, nous avons du mal à comprendre que les moyens de l’État en matière d’orientation soient augmentés.
Tout le monde a un peu de mal à savoir qui fait quoi et il est temps de mettre de l’ordre dans tout cela. Le rapporteur spécial a tout à fait raison de mettre l’accent sur cette question. Dans une organisation décentralisée comme la nôtre, l’État ne peut pas continuer à vouloir tout faire, alors qu’un certain nombre de responsabilités ont été confiées aux collectivités territoriales. Nous avons besoin de plus de cohérence et de complémentarité dans l’action.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.
M. Bernard Fialaire. Je soutiens également la philosophie de cet amendement. Il faut absolument un opérateur unique, à savoir la région, en matière d’orientation.
J’irai même plus loin. Le médico-social et la médecine scolaire ont été abordés en début de séance et, à mon sens, les départements doivent reprendre l’intégralité de ces compétences. Pour bien éduquer les enfants, il ne faut pas simplement un village, il faut toute une nation, et chacun doit remplir son rôle : les régions pour l’orientation, les départements pour le médico-social, l’État pour l’éducation nationale.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Je voterai aussi en faveur de cet amendement.
Nous voulons tous que les élèves soient orientés le mieux possible. Nous le savons, l’Onisep ne remplit plus cette mission comme il le faisait à une certaine époque, quand il proposait de nombreuses fiches. Cela fonctionnait d’ailleurs bien.
Le secteur de l’orientation a beaucoup évolué. Aujourd’hui, les élèves se voient proposer beaucoup de voies de garage à la fin du collège, notamment dans la filière STMG (sciences et technologies du management et de la gestion), avec de gros embouteillages et des enfants qui se retrouvent sans affectation. Cela montre une certaine déconnexion de l’Onisep par rapport à la réalité. Il importe donc de centrer cette compétence sur l’échelon régional.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° II-145 n’a plus d’objet.
L’amendement n° II-450, présenté par Mmes Monier, Brossel et Blatrix Contat, MM. Kanner et Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
4 000 000 |
|
4 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
4 000 000 |
4 000 000 |
||
SOLDE |
- 4 000 000 |
- 4 000 000 |
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Le Conseil d’évaluation de l’école (CEE) a été créé par la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance. Notre groupe s’était prononcé contre cette création : nous pointions un manque d’indépendance de cette instance et nous n’étions pas convaincus de la pertinence de ses missions.
Figurez-vous que j’y siège depuis 2022. J’ai donc acquis une grande visibilité sur les travaux qui sont menés en son sein, parmi lesquels figure, en premier lieu, l’organisation des campagnes d’évaluation dans les établissements des premier et second degrés. C’est un processus qui est très chronophage pour le personnel mobilisé au sein des équipes éducatives évaluées, ainsi que pour les équipes d’évaluateurs externes avec, pourtant, des résultats peu probants.
Il ressort des analyses publiées par le CEE que les évaluations réalisées dans ce cadre s’avèrent peu qualitatives et ne permettent pas aux établissements d’être en mesure de rédiger leur projet d’établissement par la suite. Le personnel éducatif s’interroge quant à lui sur le fait que les besoins spécifiques pointés par le biais de ces évaluations ne donnent pas lieu à l’octroi de moyens pour y répondre. Bref, beaucoup d’efforts pour pas grand-chose…
Au fur et à mesure de son développement, le CEE a d’ailleurs été amené à élargir le cadre de ses missions et à produire régulièrement des notes sur des thématiques annexes en lien avec le champ de l’évaluation. La direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) du ministère de l’éducation nationale fournit pourtant déjà un excellent travail, qu’il paraît peu pertinent de doublonner.
Pour toutes ces raisons, et compte tenu des contraintes budgétaires que nous connaissons, je vous propose de supprimer les crédits alloués au fonctionnement du CEE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. L’amendement de Mme Monier est tout à fait légitime. J’ai également des doutes sur la pertinence de ce Conseil d’évaluation de l’école, à vocation interne. Vous avez souligné, ma chère collègue, qu’il donnait lieu à des travaux très chronophages pour les écoles, qui sont effectivement inspectées de temps à autre, alors qu’il existe déjà par ailleurs des inspecteurs de l’éducation nationale.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat, mais, pour ma part, je pense que vous avez raison.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Madame la sénatrice, il me semble que nous avons besoin non pas de moins évaluer, mais de plus évaluer et de mieux évaluer. C’est pourquoi je suis défavorable à votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je soutiens l’amendement proposé par notre collègue Marie-Pierre Monier.
En matière d’éducation, ce n’est pas au Parlement ou au ministère de décréter que nous avons besoin de mettre en place des évaluations. Quand on est sur le terrain et que l’on travaille à éduquer et à enseigner, l’auto-évaluation fait naturellement partie des missions : on encourage les élèves à la faire et on la fait soi-même en tant que professionnel. Je suis convaincue que les équipes sur le terrain sont capables d’apporter un regard tout à fait objectif sur leurs pratiques.
Il n’est donc pas nécessaire d’engager des budgets inutiles sur une activité qui se fait d’elle-même.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Le CEE a été créé par la loi précitée, dite Blanquer. Cette création avait donné lieu à bien des débats dans cet hémicycle.
Veuillez m’en excuser, monsieur le rapporteur spécial, mais je vais plutôt soutenir la position de Mme la ministre, parce que nous avons besoin d’outils pour évaluer les établissements, nous avons besoin de dialogue.
J’ai dit précédemment que j’étais très favorable à l’autonomie des établissements. Cette autonomie passe par des temps d’évaluation et des temps de contrat. Le travail que fait la CEE avec les établissements est certes chronophage, mais on ne peut pas aller vers l’autonomie des établissements et retravailler le projet pédagogique sans poser les bases.
Je sais que nos collègues de certaines travées s’agacent de ces dispositions, qui renforcent l’« effet d’établissement », mais je pense très profondément que notre système éducatif ne se rénovera en profondeur que si cet effet est consolidé, ce qui passe par des moments où l’on prend le temps d’identifier les difficultés et les moyens d’y remédier. Telle est la mission du CEE.
Je suivrai l’avis de Mme la ministre en votant contre cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour explication de vote.
Mme Samantha Cazebonne. Je soutiens également la position du Gouvernement sur ce point.
Je suis un peu en désaccord avec mes collègues siégeant à gauche, parce qu’en tant qu’ancienne proviseure je considère que nous avons besoin de cette évaluation, laquelle doit être complétée par une véritable auto-évaluation, un passage nécessaire pour apprendre collectivement à remettre en question certaines pratiques. Il s’agit non pas de juger a priori, mais, au contraire, d’apprendre à chacun à réfléchir.
M. le président. La parole est à M. Aymeric Durox, pour explication de vote.
M. Aymeric Durox. Je crois que je suis l’un des seuls ici à avoir subi, en tant qu’enseignant, cette politique mise en œuvre par M. Blanquer. J’ai rarement vu une usine à gaz aussi complexe. Je ne connais pas un enseignant qui ait trouvé ces évaluations utiles sur le terrain. C’est une perte de temps et les enseignants s’y plient de très mauvaise grâce. Je soutiens donc la position du rapporteur spécial : à mon avis, il faut supprimer cet organisme de toute urgence.
M. le président. L’amendement n° II-147, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
1 400 000 |
|
1 400 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 400 000 |
|
1 400 000 |
SOLDE |
- 1 400 000 |
- 1 400 000 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Mes chers collègues, connaissez-vous le Cereq, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications ? C’est un énième établissement public administratif, qui comprend 120 agents et qui dispose même d’antennes à l’étranger. Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, pour reprendre une formule maintenant bien rodée, je propose une baisse de 1,4 million d’euros de l’enveloppe de ce programme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Le budget du Cereq est déjà raboté par le texte du Gouvernement. Il n’y a pas besoin d’aller plus loin.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° II-148, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
900 000 |
|
900 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
900 000 |
|
900 000 |
SOLDE |
- 900 000 |
- 900 000 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Je trouve dommage que vous réagissiez de manière aussi dogmatique, mes chers collègues ; on ne nous passera rien, même si nos propositions vont dans le bon sens. Tant pis…
Dans le même esprit, France Éducation international représente 250 agents et a des bureaux jusqu’à La Réunion. Nous proposons une réduction de ses crédits de 900 000 euros. Il faut bien trouver des économies quelque part. J’espère à tout le moins un avis de sagesse…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Je suis navré, mon cher collègue, de n’avoir à vous proposer qu’une demande de retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Durox, l’amendement n° II-148 est-il maintenu ?
M. Aymeric Durox. Je ne vois pas pourquoi je le retirerais.
M. le président. L’amendement n° II-554 rectifié, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Gratuité de la cantine scolaire en éducation prioritaire
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|||
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
820 000 000 |
|
820 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
280 000 000 |
|
280 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
Gratuité de la cantine scolaire en éducation prioritaire |
1 100 000 000 |
|
1 100 000 000 |
|
TOTAL |
1 100 000 000 |
1 100 000 000 |
1 100 000 000 |
1 100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. D’après une étude de juin 2024 de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), le coût moyen d’un repas en cantine scolaire a augmenté de 11,3 % et les prix facturés aux familles ont suivi ce rythme.
Si, dans huit communes sur dix, le tarif du repas est compris entre 1 et 5 euros, ce qui peut sembler à première vue raisonnable, 60 % des communes confient être confrontées à des problèmes d’impayés dans des proportions plus ou moins importantes. Au regard des coupes demandées par les auteurs de ce PLF dans les budgets des collectivités territoriales, il est à craindre que certaines d’entre elles soient contraintes d’augmenter les frais de cantine prochainement.
Au travers de cet amendement, je veux appeler votre attention, mes chers collègues, sur la nécessité d’aller vers un système de cantine gratuite. Par exemple, dans mon territoire, La Réunion, un enfant sur deux vit dans un foyer pauvre. Rappelez-vous, au moment de la crise du covid, nous n’avions mis en œuvre qu’un seul confinement, puisque nous avions constaté que l’école assurait quand même au moins un repas par jour à ces enfants.
Il est vraiment nécessaire de rendre la cantine gratuite, car nous assistons à la mise en place d’une société de classes au sein même de l’école : il y a les élèves qui profitent de la récréation et ceux qui font la queue devant le bureau de la gestionnaire pour payer la facture de la cantine euro après euro.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Cet amendement est très généreux, mais très coûteux : plus d’un milliard d’euros !
Il existe déjà des aides pour ces enfants, dans certains endroits. La cantine scolaire relève des collectivités territoriales. Certaines, comme la commune de Saint-Denis, ont fait le choix de la gratuité totale.
Il y a aussi eu des initiatives dans le cadre législatif : ainsi, la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Égalim) a prévu une bonification supplémentaire d’un euro pour chaque enfant en contrepartie d’un engagement pour une alimentation saine et durable. Il y a enfin des dispositifs d’aide pour certaines écoles rurales.
En outre, ce qui me gêne avec votre amendement, c’est qu’il concerne uniquement les zones d’éducation prioritaire.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Je suis sur la même ligne que M. le rapporteur spécial.
Madame la sénatrice, il me semble que votre amendement rate sa cible. Considérer qu’il n’y a que dans le réseau de l’éducation prioritaire que, hélas, le problème se pose, c’est oublier que 70 % des enfants touchés par la pauvreté sont en dehors de ce réseau. Vous oubliez par ailleurs les lycéens. Enfin, votre amendement est extrêmement coûteux. Les Français n’ont certainement pas besoin en ce moment qu’on leur fasse payer 1,1 milliard d’euros supplémentaires.
Avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Au-delà de son coût, je pense que cet amendement méconnaît les actions menées par un certain nombre de collectivités pour ajuster la réponse au plus près. Je pourrais citer les centres communaux d’action sociale (CCAS), mais il y a bien d’autres structures qui travaillent avec les collectivités.
Par ailleurs, la difficulté de payer des notes de cantine ne se limite pas, comme l’a dit M. le rapporteur spécial, aux zones d’éducation prioritaire. À mon sens, il serait préférable d’agir sur les causes de cette situation avant d’instaurer la gratuité, qui ne peut être une solution à long terme. Nous l’avons bien vu avec d’autres propositions de ce type, comme la gratuité des transports. Au bout du compte, il y a toujours quelqu’un qui paie, et les collectivités doivent supporter un effort important.
Vous l’aurez compris, nous ne pouvons pas voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. J’ai bien écouté tous vos arguments sur la portée de mon amendement, mais ils ne sont pour moi que des stratégies d’évitement.
La réalité, c’est que nous avons des collégiens et des lycéens qui sont externes uniquement parce que la cantine est trop chère pour les familles. Résultat : ces jeunes ne mangent pas, mais vous ne les voyez sur aucun de vos tableaux Excel. Madame la ministre, comment peut-on viser la réussite scolaire quand les élèves ont le ventre vide ?
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Je soutiendrai l’amendement de ma collègue.
Elle parle avec le cœur, parce qu’à La Réunion 46 % des enfants vivent dans un ménage dont le revenu est situé sous le seuil de pauvreté. Et certaines des communes de ce territoire ont fait le choix de la cantine gratuite, un choix politique courageux, parce que nous savons que nos enfants mangent bien et sainement à l’école. C’est un repas chaud qu’ils n’ont pas à la maison. Lorsque l’on veut bien réussir, il faut aussi bien manger et bien dormir. Si l’école pouvait y contribuer, ce serait une grande réussite.
M. le président. L’amendement n° II-567, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève |
559 987 200 |
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559 987 200 |
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dont titre2 |
559 987 200 |
559 987 200 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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559 987 200 |
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559 987 200 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
559 987 200 |
559 987 200 |
559 987 200 |
559 987 200 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Les assistants d’éducation (AED) constituent, à notre sens, nos meilleurs alliés pour conquérir l’école égalitaire. Or ce dispositif reste marqué par un taux d’encadrement assez bas : 1 AED pour 115 élèves. Je me permets de rappeler qu’en 2019 le secrétaire d’État Attal, placé auprès du ministre de l’éducation nationale, parlait d’un objectif de 1 pour 89 élèves. Nous en sommes vraiment loin.
Par conséquent, nous proposons un transfert de crédits de l’action n° 09 « Fonctionnement des établissements » du programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » vers l’action n° 01 « Vie scolaire et éducation à la responsabilité » du programme 230 « Vie de l’élève ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Les AED, plus communément appelés les « pions », ont en effet un rôle clé dans le climat scolaire.
Vous souhaitez en recruter 15 000, mais il faut quand même savoir que, au cours des cinq dernières années, nous sommes passés de 61 000 à 67 000 AED. Alors, on peut faire toujours mieux, ou « toujours plus » pour paraphraser François de Closets, mais nous n’en avons pas les moyens. Et j’insiste sur la hausse de ces dernières années ; on ne peut pas dire que rien n’a été fait.
Enfin, le vote de votre amendement aurait un coût de 560 millions d’euros, pris sur l’enseignement privé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. En préambule, je veux rendre hommage aux assistants d’éducation, aux surveillants. Ce sont des agents dont nous avons absolument besoin dans nos établissements. Ils encadrent nos élèves, les soutiennent. Ils sont parfois les premiers interlocuteurs quand il y a un problème, par exemple, de harcèlement ou quand il y a une difficulté scolaire ou familiale. Ils sont nécessaires à la sérénité de beaucoup de nos établissements. Je souhaite leur apporter mon soutien et dire combien ils sont importants.
C’est la raison pour laquelle, sachant très bien que le climat n’est pas toujours serein dans certains établissements scolaires, j’ai prévu le renfort de 600 AED supplémentaires à la rentrée 2025.
Enfin, je reviens sur les ratios évoqués par l’auteur de l’amendement : pour moi, 4,4 millions divisés par 50 000 égale 88, donc nous avons 1 AED pour 88 élèves. Le compte y est par rapport aux annonces de M. Attal.
Comme le disait M. le rapporteur spécial, on peut vouloir toujours plus, mais, en attendant, avec les 600 AED supplémentaires à la rentrée 2025, nous pourrons apporter à beaucoup de nos établissements la sérénité dont ils ont absolument besoin.
Pour cette raison, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Nous avons bien compris que certains de nos collègues tentaient systématiquement de prendre de l’argent à l’enseignement privé, en l’opposant à l’enseignement public. Je leur répondrai que le privé fonctionne bien et utilise bien ses crédits. Je n’en ai pas beaucoup entendu lors de la discussion générale, mais le pacte Enseignant a été bien davantage mis en œuvre dans l’enseignement privé sous contrat. Arrêtons de tirer en permanence sur lui !
M. le président. L’amendement n° II-439, présenté par Mmes Brossel, Monier et Blatrix Contat, MM. Kanner et Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève |
29 445 000 |
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29 445 000 |
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dont titre2 |
29 445 000 |
29 445 000 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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29 445 000 |
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29 445 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
29 445 000 |
29 445 000 |
29 445 000 |
29 445 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Colombe Brossel.
Mme Colombe Brossel. Gérard Lahellec vient de parler du nombre d’assistants d’éducation. Je vais me permettre de parler de leur rémunération.
Il nous paraît absolument impératif de revaloriser les salaires des AED à la rentrée 2025. Aujourd’hui, leur traitement actuel pour un temps plein se situe entre 1305 et 1487 euros net. Ceux qui effectuent un demi-service, c’est-à-dire qui travaillent à mi-temps, gagnent 720 euros net par mois. Vous conviendrez que c’est un niveau de rémunération qui ne permet ni la fidélisation ni l’installation dans un poste et dans un établissement. Si l’on veut parler d’« effet d’établissement », alors il faut l’évoquer pour l’ensemble de ceux qui font la communauté éducative.
En outre, peut-être vivons-nous encore sur un vieux fantasme selon lequel les AED ne seraient que des étudiants qui effectuent un mi-temps pendant leurs études, mais 75 % d’entre eux ne sont pas étudiants et leur âge moyen est de 30 ans. La question du temps de travail des AED, et donc de leur capacité à remplir les missions qui viennent d’être vantées par Mme la ministre, nous conduit naturellement à demander une hausse de leur rémunération. C’est, nous semble-t-il, un impératif.
C’est pourquoi nous demandons une revalorisation du traitement des AED de 150 euros supplémentaires par mois à partir de septembre 2025, en abondant l’action n° 01 « Vie scolaire et éducation à la responsabilité » du programme 230 « Vie de l’élève ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Cet amendement est très généreux, mais mon avis à son sujet sera malheureusement défavorable, pour des raisons d’économies budgétaires.
Vous avez donné les salaires moyens, mais vous oubliez de dire qu’il y a quand même eu des améliorations au cours des dernières années, à partir de 2022 notamment, avec la hausse du point d’indice et la prime de pouvoir d’achat. Je précise aussi que, lorsque les AED exercent en réseau d’éducation prioritaire (REP) et REP +, ils bénéficient de primes non négligeables.
Mieux on est payé, mieux c’est, sans doute, mais le contexte budgétaire me conduit à vous demander de rejeter cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. J’entends votre demande, mais je souhaite moi aussi rappeler un certain nombre de chiffres. Depuis 2022, la revalorisation s’est élevée à 1 070 euros net par an pour un temps complet.
Je veux aussi rappeler qu’en 2015 un gouvernement de gauche, que vous souteniez sans doute, a mis en place un système de primes destinées à certains fonctionnaires de l’éducation nationale qui exerçaient en REP et REP+. À l’époque, seuls les professeurs étaient concernés. C’est nous qui avons étendu ces primes aux assistants d’éducation, leur permettant de bénéficier d’un complément de rémunération qui s’élève à 1 106 euros en REP et à 1 263 euros en REP+, ce qui n’est pas rien.
Nous voulons poursuivre cette politique ambitieuse, notamment avec la « CDIsation » de nos assistants d’éducation, ce qui permet une fidélisation et d’avoir des AED qui sont non seulement des jeunes en début de parcours professionnel, mais également des personnes plus avancées dans leur carrière. Il est important d’avoir ce mix auprès de nos jeunes, qui ont besoin de soutien et d’écoute, afin que la sérénité revienne dans nos établissements.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° II-488 rectifié, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Réouverture d’écoles publiques dans les déserts scolaires
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève dont titre 2 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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500 000 000 |
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500 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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Réouverture d’écoles publiques dans les déserts scolaires |
500 000 000 |
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500 000 000 |
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TOTAL |
500 000 000 |
500 000 000 |
500 000 000 |
500 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Cet amendement vise à créer un fonds destiné à la réouverture d’écoles publiques dans les déserts scolaires. Depuis 2017, 2 238 écoles ont été fermées. En quarante ans, la France a perdu plus de 17 000 écoles et les territoires ruraux sont les premières victimes de cette destruction du service public éducatif. Ils subissaient les déserts médicaux ; ils subissent aujourd’hui les déserts scolaires.
Cette situation contrevient au principe d’égalité d’accès au service public et condamne de nombreux enfants à parcourir plusieurs dizaines de kilomètres par jour pour accéder à l’éducation.
Par ailleurs, dans de nombreux villages, l’école est souvent le dernier service public de proximité. Il s’agit également d’un facteur d’attractivité des communes rurales pour favoriser l’installation de nouvelles familles.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Madame de Marco, vous avez raison, il ne faut pas négliger la problématique de l’école rurale. Beaucoup de parlementaires ici présents – Jacques Grosperrin, Stéphane Sautarel et j’en passe – sont très préoccupés par l’avenir de l’école rurale et personne ne souhaite la désertification scolaire.
C’est pour cette raison que je proposerai, ultérieurement dans la discussion, des amendements visant à minorer le nombre de suppressions de postes, afin que la ruralité subisse une saignée moins importante.
Je donne donc un avis défavorable sur cet amendement, même si j’en partage l’esprit.
En conclusion, je note que vous le financez encore une fois en prenant 500 millions d’euros sur l’école privée. C’est facile de prendre toujours sur le privé, mais il rend quand même quelques services…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.
Mme Colombe Brossel. Nous soutenons cet amendement et nous remercions Monique de Marco d’avoir mis sur la table le sujet de la lutte contre la désertification scolaire dans un certain nombre de territoires, certaines familles se retrouvant dans l’impossibilité de scolariser leurs enfants dans une école publique.
Il y a souvent des débats vifs dans la Haute Assemblée sur la liberté, issue de la loi Debré, de choisir entre l’école privée et l’école publique, mais il faut bien avoir conscience que la liberté pour des parents de scolariser leurs enfants en école publique est, de fait, niée dans certains endroits, car d’école publique il n’y a point.
Au moins, les auteurs de cet amendement ont la volonté d’objectiver ce problème, pour que nous puissions ensemble, ici au Sénat, avoir un débat rationnel sur le financement de l’école privée.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je ne reviendrai pas sur le sport préféré dans les hémicycles : attaquer l’école privée sous contrat, tout en disant que c’est la contrainte budgétaire qui nous y oblige ; je n’entrerai pas dans ce débat.
Sur la question des écoles rurales, nous devons être aussi objectifs que possible.
On ne peut pas continuer de réduire le nombre d’écoles privées via des méthodes surannées et avec une carte scolaire marquée du sceau de l’obsolescence, qui nous rappelle les meilleurs temps de la Troisième République.
Chaque année, le ministère de l’éducation nationale n’est animé que par une seule logique comptable : il compte les élèves à l’unité, voire à la demi-unité dans les départements où l’on enseigne des langues régionales, et supprime un poste, parce l’établissement accueillera un élève de moins que le nombre requis, oubliant ce faisant que les maires de nos territoires établissent des plans locaux d’urbanisme qui les conduisent à voir loin et à avoir une politique planificatrice.
On ne peut plus continuer une telle politique ! Ce n’est plus possible ! Cela provoque une crise de confiance profonde entre les maires des communes rurales et l’éducation nationale. Il faut des constats objectifs. Le bureau de la commission de la culture du Sénat formulera des propositions au travers d’un rapport d’information afin d’avoir la vision la plus dépassionnée et de faire montre du plus de hauteur possible.
On ne peut pas garder le système en l’état, en faisant comme s’il n’y avait pas de baisse démographique. Pour autant, on ne peut pas continuer non plus d’appliquer une carte scolaire qui fait fi de la réalité de nos territoires et de la manière dont les maires ont envie de continuer à se développer.
Sur ce sujet, nous devons trouver des solutions permettant de dégager un consensus.
Mme Monique de Marco. Vous voterez donc cet amendement ? (Sourires sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. L’amendement n° II-562, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Revalorisation inconditionnelle des traitements des professeurs du premier degré public
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève dont titre 2 |
|
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|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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260 000 000 |
|
260 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
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|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
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Revalorisation inconditionnelle des traitements des professeurs du premier degré public |
260 000 000 |
|
260 000 000 |
|
TOTAL |
260 000 000 |
260 000 000 |
260 000 000 |
260 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Alors que la France se distingue des aux autres pays européens par des salaires moyens de ses enseignants plus bas, aucune mesure n’est prise en faveur d’une revalorisation salariale.
Madame la ministre, vos annonces de revalorisation ne couvrent ni l’inflation ni le gel du point d’indice. Le métier d’enseignant continue inexorablement de glisser vers le déclassement, même si le ministère de l’éducation nationale se targue d’une hausse de la rémunération de 13,4 % entre 2020 et 2024.
De plus, le ministère de l’éducation nationale souligne la hausse de la rémunération des enseignants en début de carrière et évoque un mieux pour ceux qui sont en milieu et en fin de carrière, avec un plus fort taux de promotion à la catégorie hors classe.
Ce que nous proposons n’a rien à voir avec une hausse de salaire. Il s’agit simplement d’une condition essentielle pour l’attractivité du métier. Les syndicats d’enseignants pointent en effet les retards accumulés face auxquels les mesures des dernières années restent largement insuffisantes.
Pour ce faire, encore une fois, le privé sera ponctionné, m’opposera-t-on, mais il ne s’agit pas pour moi d’opposer le public et le privé, mais le contexte d’efforts budgétaires nous oblige à regarder la situation en face. Dans la réalité, les conditions d’exercice dans le privé et dans le public ne sont vraiment pas les mêmes. Par conséquent, s’il faut que des efforts soient consentis, ce ne sont pas les plus fragiles qu’il faut solliciter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Malheureusement, je dirai la même chose que précédemment. Oui, il faut mieux payer nos enseignants, c’est évident. Ils sont moins bien payés que la plupart de leurs collègues européens, je l’ai dit à la tribune, lors de la discussion générale.
Des efforts ont été accomplis, notamment pour les débuts de carrière ; il faut poursuivre en ce sens. Reste que la France n’est pas le Qatar et que, dans le contexte budgétaire qui est le sien, elle n’a pas les moyens d’accompagner plus avant cette revalorisation.
Néanmoins, pour des raisons d’attractivité du métier, vous avez tout à fait raison, ma chère collègue, il faudra reprendre ces politiques de revalorisation du métier. En effet, nous manquons de plus en plus de professeurs et il est évident que cela ira en s’aggravant si ceux-ci n’y trouvent pas leur compte financièrement.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Madame la sénatrice, j’entends votre préoccupation. Tous dans cet hémicycle, nous souhaitons améliorer l’attractivité du métier d’enseignant, notamment par une meilleure rémunération.
La rémunération a été augmentée de près de 11 % depuis 2017, ce qui est même supérieur à la promesse présidentielle de 10 %.
Pour financer cette augmentation, vous proposez de supprimer le pacte Enseignant. Dès mon arrivée au ministère de l’éducation nationale, j’ai demandé un bilan de ce dispositif pour bien mesurer son utilisation au cours de l’année scolaire passée. Très concrètement, 7,6 millions d’heures de plus ont été dispensées aux élèves, qu’il s’agisse d’heures de remplacement ou d’heures d’accompagnement pédagogique. Auparavant, ces heures étaient perdues.
Le pacte Enseignant représente plus de remplacements, plus d’aides aux devoirs, plus d’écoles ouvertes pendant les vacances, plus de stages de réussite. Dans votre territoire, quelque 6 000 professeurs ont signé ce pacte, qui leur accorde une rémunération supplémentaire, s’ajoutant aux augmentations accordées l’an passé, soit une rémunération supplémentaire de 2 500 euros en moyenne par an.
C’est pourquoi je suis fermement opposée à la suppression du pacte Enseignant.
Par ailleurs, vous soulignez que ce pacte serait vecteur d’inégalité entre les femmes et les hommes. J’ai le regret de vous dire que les chiffres témoignent du contraire : 69 % des adhérents au pacte sont des femmes.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. À quoi sert de mettre un professeur devant des élèves pour qu’ils aient huit heures de plus de sport ou de mathématiques dans la semaine, s’ils perdent des heures de français ? Dans la réalité, votre pacte ne fonctionne pas.
Cet amendement vise non pas à diminuer la rémunération des enseignants, mais au contraire à la valoriser. Ce faisant, il s’agit de leur dire que leur travail est important, qu’ils font du bon travail, que la France a besoin d’eux et que nous sommes heureux de les voir au travail, auprès de nos élèves.
Oui, les enseignants se sont portés volontaires, car aujourd’hui, en France, on travaille plus pour gagner moins. Allez faire un tour dans les écoles, parlez aux enseignants, aux parents d’élèves, qui ne comprennent pas pourquoi leurs enfants ont des heures de mathématiques en moins, que l’on remplace par des heures de français ou de langues vivantes !
On est très loin de la promesse républicaine envers les familles, les enfants et les enseignants.
M. le président. L’amendement n° II-563, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Revalorisation inconditionnelle des traitements des professeurs du second degré public
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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|
Vie de l’élève dont titre 2 |
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|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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650 000 000 |
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650 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
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|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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Revalorisation inconditionnelle des traitements des professeurs du second degré public |
650 000 000 |
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650 000 000 |
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TOTAL |
650 000 000 |
650 000 000 |
650 000 000 |
650 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement de repli vise à transférer les crédits supplémentaires consacrés au pacte vers la revalorisation du salaire des enseignants du second degré. La réponse aux difficultés scolaires passe par un personnel formé, des enseignants qui ont les moyens de travailler et un temps de préparation suffisant.
Vous avez parlé du nombre d’heures passées devant les élèves, madame la ministre, mais le plus gros du travail d’un enseignant, c’est un travail de l’ombre, qui consiste à corriger des copies et à préparer ses cours. Quand on conditionne sa rémunération au nombre d’heures qu’il doit passer devant les élèves, on augmente considérablement ce temps de travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Fabien Genet. Avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. le président. Je suis saisi de seize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-149, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan d’urgence de recrutement des 4 000 postes enseignants
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
Plan d’urgence de recrutement des 4 000 postes enseignants |
200 000 000 |
|
200 000 000 |
|
TOTAL |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Au travers de cet amendement, j’entends dénoncer la suppression de 4 000 équivalents temps plein (ETP) d’enseignants, dont 3 155 rien que pour le premier degré public.
Il s’agit d’une véritable saignée du service public de l’éducation, comme il en a rarement connu. Le niveau des suppressions de postes cette année est tel que l’intersyndicale rassemblant les syndicats représentatifs du secteur a annoncé lundi 14 octobre 2024 le dépôt d’« une alerte sociale préalable au dépôt d’un préavis de grève nationale unitaire », à compter du lundi 4 novembre.
Cette saignée est d’autant plus grave qu’elle s’inscrit dans un processus de suppression de postes entamé depuis de nombreuses années. À titre d’illustration, le Syndicat national des enseignements du second degré-Fédération syndicale unitaire (Snes-FSU) souligne que 8 865 postes ont déjà été supprimés au cours des sept dernières années dans second degré.
Le ministère de l’éducation nationale tente de justifier cette coupe sur le fondement d’un argument d’ordre démographique, en mettant en avant la baisse du nombre d’élèves « qui devrait s’accélérer avec 97 000 élèves en moins à la rentrée 2025 ». Cet argument est fallacieux et ces suppressions sont d’autant plus incompréhensibles qu’à moyens constants, sinon croissants, cette baisse démographique pourrait être l’opportunité de réduire le nombre d’élèves par classe afin d’améliorer leurs conditions d’apprentissage et les conditions de travail des enseignants.
Pour toutes ces raisons, cet amendement vise à affecter les crédits nécessaires au maintien de 4 000 postes d’enseignants dans l’éducation nationale.
M. le président. L’amendement n° II-546 rectifié, présenté par M. Pillefer, Mmes Antoine, Sollogoub et Guidez, MM. Parigi et Fargeot et Mme Perrot, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré*** |
151 444 000 |
|
151 444 000 |
|
dont titre2 |
151 444 000 |
151 444 000 |
||
Enseignement scolaire public du second degré*** |
8 640 000 |
|
8 640 000 |
|
dont titre2 |
8 640 000 |
8 640 000 |
||
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés |
29 400 000 |
|
29 400 000 |
|
dont titre2 |
29 400 000 |
29 400 000 |
||
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
189 484 000 |
|
189 484 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
189 484 000 |
189 484 000 |
189 484 000 |
189 484 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Jocelyne Antoine.
Mme Jocelyne Antoine. Le Gouvernement entend supprimer 4 035 postes d’enseignants dans le projet de loi de finances pour 2025. Pour justifier ces suppressions, le ministère s’appuie sur un argument mathématique indéniable, la baisse de la démographie. Les effectifs scolaires ont diminué de 350 000 élèves entre 2017 et 2023. Entre 2024 et 2025, le nombre d’élèves du primaire devrait baisser de 75 000 élèves.
Cette baisse est une opportunité à saisir pour engager un redressement du niveau des élèves, tant dans le premier degré que dans le second. Les résultats du classement Pisa (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) montrent qu’un nombre élevé d’élèves par classe est l’un des principaux facteurs de baisse de performance scolaire.
Au nom de Bernard Pillefer, je tiens à défendre ici la ruralité. Les territoires ruraux sont particulièrement vulnérables face aux suppressions de postes d’enseignants et ne peuvent se permettre de perdre du personnel supplémentaire. Les écoles rurales sont souvent petites et les suppressions de poste peuvent entraîner des fermetures de classe, le retour des classes de niveau, une surcharge des enseignants restants et une diminution des ressources pédagogiques. Ce phénomène ne fait qu’aggraver les inégalités entre les élèves de ces zones et ceux qui sont issus des zones urbaines.
La ruralité a fait des efforts considérables ces dernières années pour maintenir des équipements scolaires et périscolaires. Elle mérite d’être regardée autrement qu’au prisme des seuls effectifs scolaires.
Il s’agit donc de maintenir les 4 035 postes d’enseignants.
M. le président. L’amendement n° II-224 rectifié, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
514 809 561 |
|
514 809 561 |
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
||
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
514 809 561 |
|
514 809 561 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
514 809 561 |
514 809 561 |
514 809 561 |
514 809 561 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. En France, les classes du premier degré sont les plus chargées, avec 22,1 élèves en moyenne par classe, contre 19,3 élèves pour la moyenne européenne.
Cet amendement vise à recruter 15 809 enseignants afin d’atteindre l’objectif de 19 élèves par classe dans l’enseignement scolaire public du premier degré.
M. le président. L’amendement n° II-77 rectifié, présenté par Mmes Ollivier et de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
151 444 000 |
|
151 444 000 |
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
151 444 000 |
|
151 444 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
151 444 000 |
151 444 000 |
151 444 000 |
151 444 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Cet amendement a pour objet de préserver les 3 155 postes destinés à être supprimés dans l’enseignement public du premier degré.
Madame la ministre, en supprimant ces postes, vous faites le choix de sous-investir dans l’école publique et de laisser les enseignants travailler dans des conditions très difficiles.
Je rappelle que l’école est quelquefois le dernier service public de la commune. Pourtant, les fermetures d’établissement vont s’enchaîner. De plus, les enseignants travaillent en moyenne 43 heures par semaine.
Pas de revalorisation salariale, mais des moyens en plus pour le pacte Enseignant : c’est un nouveau signe de mépris à destination des professeurs.
Madame la ministre, avec cette suppression sèche de 3 155 postes dans le premier degré, vous assumez de revenir sur l’objectif de réduction des effectifs par classe et vous vous cachez derrière la démographie, alors que le moment était adéquat pour permettre aux professeurs de travailler dans de meilleures conditions avec moins d’élèves par classe et plus de temps pour transmettre les savoirs fondamentaux.
Pour élever le niveau des élèves, abandonnez le choc des savoirs et préservez les 3 155 postes d’enseignants du premier degré.
M. le président. L’amendement n° II-557, présenté par Mme Corbière Naminzo et MM. Bacchi et Ouzoulias, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan pluriannuel de recrutement d’enseignants de premier degré
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
80 000 000 |
|
80 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
Plan pluriannuel de recrutement d’enseignants de premier degré |
80 000 000 |
|
80 000 000 |
|
TOTAL |
80 000 000 |
80 000 000 |
80 000 000 |
80 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Le premier degré public, maternel et primaire, paie le plus lourd tribut en matière de suppression de postes d’enseignants. Ce sont en effet près de 3 155 postes de professeurs des écoles qui seront supprimés dans ce projet de loi de finances pour 2025.
Cette orientation tourne le dos à la nécessité d’accorder à l’école les moyens dont elle a besoin. Je partage ce que mes collègues ont souligné en présentant leurs amendements. Celui-ci a pour objet de créer 5 000 postes de professeur des écoles.
J’ajoute que le taux d’encadrement qui existe actuellement nous place au-dessous de la moyenne européenne ; or votre décision de dédoubler les classes de CP et de CE1 a démontré que les élèves pouvaient mieux réussir s’ils étaient moins nombreux par classe.
Il s’agit donc d’un amendement de bon sens.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-21 est présenté par M. Paccaud, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-150 rectifié est présenté par M. Grosperrin, au nom de la commission de la culture.
L’amendement n° II-289 est présenté par Mmes Ollivier et de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
L’amendement n° II-544 rectifié bis est présenté par Mme Billon et les membres du groupe Union Centriste.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré |
74 000 000 |
|
74 000 000 |
|
dont titre2 |
74 000 000 |
74 000 000 |
||
Enseignement scolaire public du second degré |
|
74 000 000 |
|
74 000 000 |
dont titre2 |
74 000 000 |
74 000 000 |
||
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
74 000 000 |
74 000 000 |
74 000 000 |
74 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-21.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. La réduction du nombre de professeurs constitue le point saillant de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2025. Si elle se justifie par des raisons démographiques, elle entraînera nombre de problèmes pédagogiques, territoriaux et autres.
C’est pourquoi, dans une logique très sénatoriale de sagesse et de responsabilité, nous proposons de ne supprimer que 2 000 postes sur les 4 000 que le Gouvernement souhaite supprimer.
Cher ami philosophe Alexandre Portier, in medio stat virtus, la vertu se tient au milieu. Certes, la réalité démographique nous oblige à faire un effort, mais, si nous allons trop loin, cela posera d’importants problèmes dans les zones rurales.
Le maintien de 2 000 postes que je propose sera financé par une réduction du pacte Enseignant, auquel vous tenez tant, madame la ministre, de 74 millions d’euros, au moment même où son budget passera de 700 millions à 800 millions d’euros.
Le pacte Enseignant est-il une bonne chose ? Dans certains cas, il permet d’augmenter le taux de remplacement de courte durée (RCD), c’est incontestable. Toutefois, si c’est son seul intérêt, c’est bien la preuve que le problème des remplacements n’a pas été réglé et qu’il en manque toujours ! Le vivier des remplaçants a complètement fondu. De ce point de vue, le pacte n’est pas la bonne réponse, ainsi que l’a fait remarquer Evelyne Corbière Naminzo.
Rééquilibrer les effectifs des enseignants en revenant sur 2 000 suppressions, tout en votant un budget de 725 millions d’euros pour le pacte enseignant, contre 700 millions d’euros l’année dernière, ne me semble pas de nature à déséquilibrer la politique générale du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-150 rectifié.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. Le Gouvernement a une vision trop comptable de la réalité de l’enseignement scolaire. À la baisse du nombre d’élèves entre 2024 et 2025, il répond par la suppression de 3 155 postes dans l’enseignement primaire public, mesdames, messieurs les sénateurs de gauche.
Nous n’acceptons pas cette lecture comptable et nous souhaitons que seuls 1 155 postes soient supprimés, afin que 2 000 postes soient maintenus.
Lorsqu’une classe est supprimée dans une grande ville, les élèves peuvent se déplacer relativement facilement dans une école voisine, voire peuvent intégrer une autre classe dans la même école.
En milieu rural, et plus encore en zone de montagne, cela n’a pas les mêmes conséquences : l’élève doit se déplacer et son temps de trajet s’en trouve rallongé de vingt, trente, voire quarante minutes.
Madame la ministre, vous avez déclaré tout à l’heure accorder une importance toute particulière à la ruralité. Je vous en remercie. Cet amendement transpartisan, qui a été adopté à l’unanimité des membres de la commission de la culture, mérite d’être voté, parce qu’il permettra à nos enfants de rester près de leurs habitations et de continuer à travailler dans de très bonnes conditions.
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour présenter l’amendement n° II-289.
Mme Mathilde Ollivier. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° II-544 rectifié bis.
Mme Annick Billon. Le groupe Union Centriste partage l’analyse du rapporteur spécial.
Par réalisme et pragmatisme, nous souhaitons que la suppression prévue soit ramenée à 2 000 postes, avec le souci d’en limiter les effets dans les écoles des territoires ruraux. Il faut savoir que près de 40 % des écoles se trouvent dans ces territoires. Par conséquent, une suppression de 4 000 postes aurait des conséquences graves pour le maillage de nos écoles dans nos départements respectifs.
M. le président. L’amendement n° II-208 rectifié, présenté par M. Laouedj, Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Gold, Grosvalet et Masset, Mme Pantel, MM. Roux et Cabanel et Mme Briante Guillemont, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
58 000 000 |
|
58 000 000 |
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
29 000 000 |
|
29 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
29 000 000 |
|
29 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
58 000 000 |
58 000 000 |
58 000 000 |
58 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Ahmed Laouedj.
M. Ahmed Laouedj. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit la suppression des 3 155 postes d’enseignants dans le secteur public du premier degré. Cette mesure a suscité de vives inquiétudes, notamment en raison de son impact sur les zones rurales et les quartiers prioritaires de la ville.
Le rapporteur spécial a proposé un amendement visant à limiter cette suppression à 1 155 postes. Si elle est saluée par les membres du groupe du RDSE, cette solution est jugée insuffisante au regard des besoins des territoires.
Les zones rurales en particulier souffrent de fermetures de classes et d’écoles. Cette situation nourrit un sentiment de relégation et remet en question l’objectif d’un aménagement équilibré du territoire.
Cette politique a déjà montré ses effets néfastes en 2024, quand la suppression de 2 500 postes a entraîné des tensions dans les écoles rurales et les zones sensibles. Bien que le nombre d’élèves soit appelé à diminuer d’environ 500 000 entre 2022 et 2027, cette baisse démographique ne justifie pas des suppressions de postes massives. En effet, la France reste l’un des pays européens où le ratio élèves-enseignant en primaire est parmi les plus élevés.
Aussi s’agit-il de revenir sur la suppression des 3 155 postes afin de maintenir un service public d’éducation de qualité accessible et équilibrée sur l’ensemble du territoire.
M. le président. L’amendement n° II-431, présenté par Mmes Monier, Brossel et Blatrix Contat, MM. Kanner et Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
57 000 000 |
|
57 000 000 |
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
57 000 000 |
|
57 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
57 000 000 |
57 000 000 |
57 000 000 |
57 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Je partage les arguments s’appuyant sur le taux d’encadrement et le taux de remplacement, qui n’est pas assez bon en France. Notre pays a besoin de plus d’enseignants, ce n’est pas le moment de supprimer des postes.
Par ailleurs, ces suppressions de postes dans le premier degré public s’ajoutent à celles des dernières années. Au total, depuis 2017, ce sont 9 437 postes qui ont été supprimés dans l’enseignement scolaire, notamment 7 000 dans l’enseignement public.
Quels sont les effets concrets d’une telle mesure ?
Alléger les effectifs de classe et améliorer le taux d’encadrement constitue un facteur de réussite scolaire essentiel. Cela favorise un climat scolaire serein. Cela résorbe les inégalités scolaires et lutte contre les discriminations. C’est donc essentiel à la vie de l’école. Par ailleurs, nous connaissons les conséquences douloureuses dans nos territoires, en particulier ruraux, de l’application d’une telle logique comptable, qui conduit mécaniquement à la fermeture des classes.
J’ai l’occasion de le dire à chaque exercice budgétaire, appuyer les mobilisations locales qui surgiront inévitablement pour empêcher la fermeture de telle ou telle classe n’a de sens que si nous nous battons au moment où il le faut, c’est-à-dire au moment du vote du budget, pour maintenir le nombre de postes nécessaires.
Madame la ministre, vous le voyez, ces amendements visant à réduire cette suppression de postes sont issus de toutes les travées. Cela ne peut vous laisser indifférente : cela signifie que la suppression de postes d’enseignants n’est absolument pas le bon levier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. L’amendement n° II-223, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
288 679 860 |
|
288 679 860 |
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
288 679 860 |
|
288 679 860 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
288 679 860 |
288 679 860 |
288 679 860 |
288 679 860 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Cet amendement vise à revenir sur les 8 865 postes d’enseignants supprimés dans le second degré public depuis 2017.
M. le président. L’amendement n° II-556, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan pluriannuel de recrutement d’enseignants du second degré public
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
144 000 000 |
|
144 000 000 |
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
Plan pluriannuel de recrutement d’enseignants du second degré public |
144 000 000 |
|
144 000 000 |
|
TOTAL |
144 000 000 |
144 000 000 |
144 000 000 |
144 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. En vérité, nous tenons compte de la nécessité de mettre en place un plan pluriannuel de recrutement d’enseignants du second degré public, avec pour perspective le recrutement de 328 000 enseignants d’ici à 2030. Le moins que l’on puisse dire, c’est que nous en sommes loin.
Par conséquent, il faut développer une politique beaucoup plus ambitieuse que celle qui nous est proposée.
M. le président. L’amendement n° II-558, présenté par Mme Corbière Naminzo, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
8 700 000 |
|
8 700 000 |
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
8 700 000 |
|
8 700 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
8 700 000 |
8 700 000 |
8 700 000 |
8 700 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à annuler la suppression de 180 postes dans le second degré public.
En effet, le ministère de l’éducation nationale justifie ces suppressions par la baisse du nombre d’élèves à la rentrée 2025. Pourtant, au cours des sept rentrées scolaires préparées sous la présidence Macron, 8 865 emplois d’enseignants ont été supprimés dans le second degré pour 7 441 élèves en plus. Une étude du Snes-FSU nous apprend par ailleurs que le second degré public a besoin de 45 257 emplois d’enseignants en plus pour retrouver le taux d’encadrement de 2006.
Le rapport sur la revue de dépenses paru au mois d’avril 2024 de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche et de l’inspection générale des finances préconisait la suppression de milliers de postes et la fermeture de centaines de classes. Ces pistes de travail laissées à disposition du ministre de l’éducation nationale ont visiblement séduit ce dernier. Selon nous, l’école ne saurait être une simple variable d’ajustement économique et nous devrions profiter de la baisse démographique pour faire baisser les effectifs des classes, comme vous aviez voulu le faire, et améliorer les conditions de travail et d’enseignement. La France est l’un des pays où, en moyenne, les effectifs des classes sont plus élevés, les salaires sont plus bas et le temps de travail est plus important.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-214 est présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
L’amendement n° II-432 est présenté par Mmes Monier, Brossel et Blatrix Contat, MM. Kanner et Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
4 200 000 |
|
4 200 000 |
|
Vie de l’élève dont titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
|
|
|
|
Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
|
4 200 000 |
|
4 200 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
4 200 000 |
4 200 000 |
4 200 000 |
4 200 000 |
SOLDE |
0 |
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La parole est à Mme Monique de Marco, pour présenter l’amendement n° II-214.
Mme Monique de Marco. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour présenter l’amendement n° II-432.
M. Yan Chantrel. Cet amendement vise à rétablir 180 postes d’enseignement dans l’enseignement du second degré, qui seront supprimés à la rentrée de 2025.
Depuis 2017, le Président de la République a procédé à une casse de l’école publique dans le second degré : au total, 8 000 postes ont été supprimés. Compilées à celles du premier degré public et de l’enseignement privé, les suppressions atteignent 10 000 postes dans l’enseignement scolaire depuis 2017, alors qu’il n’est même pas acquis que les effectifs dans le second degré enregistrent une baisse.
La baisse d’élèves attendue serait minime depuis 2023 : 4 700 en 2023, 20 000 en 2024 et 10 000 en 2025. Cela correspond à la marge d’erreur. Avec près de 26 élèves par classe dans l’enseignement secondaire, la France compte parmi les derniers pays de l’OCDE, dont la moyenne se situe à 21 élèves par classe.
Comment veut-on assurer l’école inclusive, la lutte contre le harcèlement, les dédoublements de classes, les fameux groupes de besoins avec des suppressions de postes ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Ce florilège d’amendements a pour trait commun le nombre d’enseignants : il s’agit soit de le revoir à la hausse – 4 000, 15 000, 10 000… – soit d’en limiter la baisse.
La commission demande le retrait de l’ensemble de ces amendements au profit des amendements identiques nos II-21, II-150 rectifié, II-289 et I-544 rectifiés bis, qui ont pour objet de maintenir le plafond d’emploi à 2 000.
Du reste, monsieur le président, je demande la mise aux voix en priorité des amendements identiques nos II-21, II-150 rectifié, II-289 et I-544 rectifiés bis.
M. le président. Je suis saisi d’une demande de la commission tendant au vote par priorité des amendements identiques nos II-21, II-150 rectifié, II-289 et I-544 rectifiés bis.
Aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La priorité est ordonnée.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements en discussion commune ?
Mme Anne Genetet, ministre. La plupart de ces amendements, notamment ces quatre amendements identiques, abordent le sujet des effectifs et du schéma d’emploi proposé par le Gouvernement.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur spécial, pour l’attention que vous portez aux besoins de notre institution et de nos élèves ; il est essentiel de continuer à les soutenir.
Croyez bien que je suis, moi aussi, très sensible à cette question : en témoigne l’acte II du choc des savoirs, que j’ai annoncé il y a quelques jours. Celui-ci assurera un renforcement notable des moyens pour nos élèves de collège, notamment ceux des classes de quatrième et de troisième, sachant que ce qui a été mis en place cette année pour les classes de sixième et de cinquième ne sera pas remis en cause.
Les amendements identiques nos II-21, II-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis visent à augmenter de 2 000 emplois les effectifs du premier degré dans l’enseignement public. Je comprends l’intention qui est ici à l’œuvre, j’émets toutefois quelques réserves : pensons aussi aux effectifs du second degré, car c’est là que les inégalités se consolident le plus.
Du reste, je tiens à apporter quelques précisions aux sénatrices Ollivier et Monier, pour qui le schéma d’emploi proposé empêcherait de poursuivre la réduction du nombre d’élèves par classe.
Je suis désolée de vous le dire, mais ce nombre s’élevait à 24 élèves par classe en 2017, il a été réduit à un peu plus de 21 élèves par classe aujourd’hui et la baisse se poursuivra en 2025 : c’est mathématique !
En effet, la question du nombre d’élèves par classe est très importante ; je sais que vous y êtes sensibles et je rejoins vos propos. Selon vous, la réduction du nombre d’élèves par classe ne peut qu’améliorer les apprentissages. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi vous vous opposez aux groupes de besoins. Grâce à des effectifs plus réduits, ce dispositifs permettra justement d’assurer l’accompagnement de nos élèves les plus fragiles et vulnérables.
Pour ce qui concerne l’amendement de la commission et ceux qui lui sont identiques, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat. Sur le reste des amendements en discussion commune, il émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur pour avis. J’espère que Mme la ministre lèvera le gage sur ces amendements identiques !
Mme Anne Genetet, ministre. Il ne m’appartient pas de le faire, monsieur le rapporteur pour avis, c’est une prérogative du ministre du budget.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Bien évidemment, je soutiens ces amendements, qui visent à réduire le nombre de suppressions de postes d’enseignant annoncées par le Gouvernement.
J’en profite pour dire aux ministres présents ce matin que les gouvernements passent, mais que la méthode sur la carte scolaire ne change pas.
M. Max Brisson. Absolument !
M. Bernard Delcros. J’abonde dans le sens des propos de notre collègue Brisson : les gouvernements choisissent toujours une approche comptable et descendante, sauf que les choses ne sont pas linéaires. Vingt enfants inscrits en classe de CM2 et vingt enfants affectés dans une classe rurale où les divisions vont du CP au CM2, ce n’est pas la même chose ! Il faut donc s’adapter à la réalité des territoires.
Cette approche purement comptable et descendante a des effets dévastateurs sur les territoires, tant en matière d’offre éducative que d’attractivité, sans compter les conséquences politiques.
Il est temps de changer de méthode : partons de la concertation locale et tenons compte des remontées du terrain. Cela nous permettra de décider, ensuite, s’il y a lieu de procéder à des évolutions.
Les élus sont responsables ; ils peuvent donc très bien accepter de faire évoluer les effectifs d’enseignants lorsque le nombre d’élèves diminue. Quoi qu’il en soit, les décisions doivent être prises à l’échelle locale, après concertation, et tenir compte des réalités.
En ce qui concerne l’évolution de la carte scolaire, les élus, les acteurs éducatifs, les enseignants et les parents d’élèves ont besoin d’avoir une visibilité sur trois ans. On connaît le nombre de naissances d’enfants et leur domiciliation, ce qui facilitera les choses. Surtout, une prévision sur trois ans est inscrite noir sur blanc dans le plan France Ruralités : il suffit donc de l’appliquer !
Nous pourrons ainsi anticiper et mettre les maires et les autres élus en situation de responsabilité, ce qui est plus souhaitable lorsque l’on envisage de supprimer des postes.
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.
Mme Colombe Brossel. Vous l’aurez compris, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, la suppression de 4 000 postes d’enseignants est inacceptable. Nous nous y opposons et continuerons à le faire.
Nous réfutons les arguments tirés de la démographie : que les effectifs augmentent ou diminuent, on réduit tout de même le nombre de postes d’enseignant. Ces arguments démographiques ne sont invoqués que lorsque c’est possible, mais, en réalité, il s’agit bien de raisons budgétaires.
Je ne peux que souscrire aux propos de mes collègues sur le manque de prévisibilité et d’association des parties prenantes : communautés éducatives, parents, élus et enseignants. Pourtant, ils ne sont pas de la même sensibilité politique que moi.
Je veux expliquer devant la représentation nationale pourquoi nous voterons ces amendements identiques, comme nous l’avons fait en commission. La position commune qui a été arrêtée par l’ensemble des groupes, quelle que soit leur sensibilité, permettra de faire bouger les lignes. (Mme Marie-Pierre Monier renchérit.) Est-ce suffisant ? Bien sûr que non ! Mais nous voterons pourtant pour ces amendements, de façon responsable.
Nous sommes tous en train de danser au bord du cratère du volcan, madame la ministre. En effet, nous ne savons pas très bien de quoi l’avenir politique sera fait : en cas d’adoption d’une motion de censure à l’Assemblée nationale, les postes budgétaires pour l’éducation nationale seront-ils bien inscrits dans le texte final ? Y’aura-t-il des enseignants devant les classes à la rentrée 2025 ? Ce sont, à vrai dire, les seules questions qui préoccupent notre groupe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Notre collègue Brossel est excellente, comme toujours !
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Vous ne serez pas surpris, je partage, moi aussi, les propos de mes collègues. Je soutiendrai donc ces amendements identiques.
Je pense, à l’instar de Max Brisson, de Bernard Delcros et du rapporteur spécial, entre autres, que l’approche ne peut pas seulement être quantitative ; nous devons aussi offrir de la prévisibilité.
Mes collègues l’ont rappelé : il convient d’associer à la vision pédagogique une conception de l’aménagement du territoire, ce que prévoit d’ailleurs le plan France Ruralités. Il est temps que celui-ci soit mis en œuvre, d’autant que les pseudo-concertations menées jusqu’alors ont été organisées à la va-vite et n’apportent aucune visibilité supplémentaire.
Il faudrait à mon sens mettre en place un moratoire d’une durée de trois ans sur les fermetures de classes, notamment en milieu rural – j’avais déposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable –, faute de quoi nous ne parviendrons pas à offrir de la prévisibilité et à poursuivre le dialogue, tant avec les élus locaux qu’avec la communauté éducative. Ces derniers se montrent pourtant responsables lorsqu’il s’agit de trouver des solutions acceptables pour organiser l’offre éducative dans nos territoires.
Vous le savez, l’éducation, la santé et la sécurité sont les trois services publics prioritaires que nous devons préserver si nous voulons maintenir la population sur nos territoires ; c’est à cette condition qu’ils deviendront attractifs.
Du reste, j’ai toujours défendu un autre argument : nous comprenons qu’il faille résoudre une équation budgétaire, mais, dans ce cas, nous ne pouvons plus supprimer de façon aveugle les postes d’enseignants devant élèves sans assurer un délai minimal de prévenance. (M. le rapporteur spécial acquiesce.)
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Il existe un paradoxe entre l’évolution de la natalité dans notre pays et l’organisation de l’offre éducative. Pour rappel, nous avons enregistré 830 000 naissances en 2009, un peu moins de 700 000 l’année dernière et 326 000 au premier semestre de l’année 2024. C’est dire si la baisse démographique est considérable !
Ces amendements visent à réduire le nombre de postes d’enseignants supprimés par le Gouvernement, notamment dans l’enseignement primaire, car c’est là que tout se joue et que les besoins sont les plus forts. Bien entendu, je soutiendrai ces amendements.
Je souhaite surtout appeler l’attention du Gouvernement sur la gestion en silos des effectifs d’enseignants au sein de l’éducation nationale. Nous avons le sentiment que des professeurs remplaçants restent chez eux, faute de postes, alors que les besoins de remplacement sont considérables dans les territoires.
Dans ces conditions, il faut organiser les effectifs de l’éducation nationale d’une manière beaucoup plus souple, afin d’assurer la complémentarité des différents dispositifs. Surtout, nous ne devrions plus avoir à déplorer que des classes soient dépourvues d’enseignants, alors que les remplaçants ne sont pas sollicités.
M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj, pour explication de vote.
M. Ahmed Laouedj. Le groupe du RDSE votera également pour ces amendements identiques, car ils permettront d’atténuer un peu le nombre de suppressions de postes décidées par le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. En accumulant les prises de paroles, je sais que nous ne répondons pas à vos demandes sur la célérité des débats, monsieur le président, mais ces sujets méritent d’être discutés.
Madame la ministre, la pédagogie est l’art de la répétition. D’une discussion budgétaire à l’autre, nous ne cessons de souligner le caractère totalement obsolète de la carte scolaire telle qu’elle fonctionne dans notre pays depuis très longtemps.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Il a raison !
M. Max Brisson. On nous renvoie sans cesse à des commissions et à des études, mais, sur le terrain, on constate que rien ne change. Quand nous disons aux directeurs académiques des services de l’éducation nationale (Dasen) que le ministère est en train de s’inscrire dans un cadre pluriannuel, ils nous répondent qu’ils appliquent les instructions concernant les ouvertures et les fermetures de postes.
Bref, nous avons le sentiment que ce que l’on dit au sein de cet hémicycle n’en sort jamais.
Madame la ministre, je souhaite que votre gouvernement ne tombe pas dans le « cratère » évoqué par notre collègue Brossel. S’il vous est possible de poursuivre votre action, je souhaite vivement que, dans le courant de l’année, vous puissiez définir, en lien avec votre ministre délégué, une autre méthode, car il s’agit de garantir la réussite scolaire sur tous les territoires. Le Sénat est prêt à y participer. Ce ne sera pas simple, car il y aura des choix à faire. Je sais que notre ami Jacques Grosperrin a des idées sur le sujet : elles ne sont pas forcément consensuelles, mais elles méritent au moins d’être débattues.
Tout le monde s’accorde à le dire : on ne peut pas continuer ainsi. Il faut donc que l’on repense l’école dans les territoires ruraux, en remettant les choses à plat. Nous devons engager un vrai travail, auquel le Sénat contribuera. Madame la ministre, monsieur le ministre délégué, prenez ce chantier à bras-le-corps, car il est déterminant pour nos territoires ! (Très bien ! au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Nous voterons ces amendements identiques, comme nous l’avons fait en commission, mais cela ne nous satisfait pas.
J’ai bien lu l’exposé des motifs de ces amendements : ils visent tous à préserver l’école, surtout dans les territoires ruraux. Sur ce point, je ne reviendrai pas sur les propos des différents groupes, mais j’appelle toutefois votre attention sur les territoires ultramarins. Supprimer 2 000 postes, c’est mieux qu’en supprimer 4 000, c’est pourquoi nous voterons ces amendements, mais pensons aussi aux élèves de Guyane et de Mayotte, dont nous avons parlé lors de la Journée internationale des droits de l’enfant, le 20 novembre dernier. J’espère que les coupes budgétaires envisagées par le ministère n’affecteront pas davantage ces territoires.
Je veux aussi vous parler de La Réunion. Là-bas, les enjeux de formation sont importants et nous déplorons un fort taux de décrochage scolaire et le nombre de jeunes qui ne sont ni en emploi ni en formation augmente. Le taux d’illettrisme, d’illectronisme et d’innumérisme ne baisse pas, non plus que le taux de chômage, qui reste très supérieur à celui que l’on connaît dans l’Hexagone.
Quand on touche à l’école de la République sans faire attention aux conséquences que cela entraîne dans les territoires ultramarins, on fait beaucoup de mal aux familles et on accroît les inégalités. Nous en savons quelque chose, en outre-mer !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-21, II-150 rectifié, II-289 et II-544 rectifié bis.
Pour la clarté des débats, je précise que leur adoption ferait tomber les amendements nos II-149, II-546 rectifié, II-224 rectifié, II-77 rectifié, II-557, II-208 rectifié et II-431.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 139 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 340 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos II-149, II-546 rectifié, II-224 rectifié, II-77 rectifié, II-557, II-208 rectifié et II-431 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° II-223.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-214 et II-432.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-207 rectifié ter, présenté par M. Laouedj, Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Grosvalet et Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mmes Guillotin et Briante Guillemont, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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+ |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève dont titre 2 |
205 920 000 |
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205 920 000 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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205 920 000 |
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205 920 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
205 920 000 |
205 920 000 |
205 920 000 |
205 920 000 |
SOLDE |
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La parole est à M. Ahmed Laouedj.
M. Ahmed Laouedj. Cet amendement vise à améliorer les conditions de travail des AESH, qui jouent un rôle crucial dans l’inclusion scolaire.
Le manque d’attractivité du métier est un problème bien connu de notre assemblée. Les AESH perçoivent souvent une rémunération modeste, ils sont embauchés sur des contrats précaires et ne bénéficient pas de la prise en charge des frais annexes, comme les frais de transport. Ce contexte contribue à freiner le recrutement et la fidélisation de ces professionnels, pourtant essentiels pour garantir l’égalité des chances des élèves en situation de handicap.
En avril dernier, le Sénat a adopté la proposition de loi de notre collègue Cédric Vial visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne.
Cet amendement s’inscrit dans la même dynamique, puisqu’il tend à inciter l’État à résoudre concrètement les problèmes auxquels sont confrontés les AESH et à augmenter leur rémunération. Il s’agit de renforcer l’attractivité de cette fonction clé de l’éducation inclusive.
M. le président. L’amendement n° II-78 rectifié, présenté par Mmes Ollivier et de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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+ |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève dont titre 2 |
75 000 000 |
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75 000 000 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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75 000 000 |
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75 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
75 000 000 |
75 000 000 |
75 000 000 |
75 000 000 |
SOLDE |
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La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Le présent amendement vise à mieux rémunérer le travail des AESH. Du point de vue des effectifs, ces derniers constituent le deuxième corps de métier de l’éducation nationale.
Nous saluons le recrutement de 2 000 ETP supplémentaires au travers du présent projet de loi de finances, bien que ce chiffre reste insuffisant à nos yeux.
Il reste une vraie question, celle de la juste reconnaissance de ces travailleurs essentiels. Alors qu’il se révèle indispensable à l’accueil scolaire des enfants en situation de handicap, ce métier reste marqué par une extrême précarité. Ainsi, 96 % des AESH déclarent ne pas pouvoir vivre dignement de leur profession.
Nous ne pouvons pas regarder ailleurs : nous devons fournir les ressources financières nécessaires, pour qu’une enveloppe catégorielle autorise la revalorisation significative de l’indemnité de fonction des AESH.
M. le président. L’amendement n° II-438, présenté par Mmes Monier, Brossel et Blatrix Contat, MM. Kanner et Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Ros et Ziane, Mme Artigalas, MM. Chaillou, Pla, Redon-Sarrazy, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève |
31 240 000 |
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31 240 000 |
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dont titre2 |
31 240 000 |
31 240 000 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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31 240 000 |
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31 240 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
31 240 000 |
31 240 000 |
31 240 000 |
31 240 000 |
SOLDE |
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La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Si des efforts de revalorisation ont été accomplis au cours des dernières années, les AESH continuent de gagner entre 800 et 1 000 euros par mois, soit une rémunération inférieure au seuil de pauvreté. Cela maintient la deuxième catégorie de personnels d’éducation nationale dans une situation de précarité institutionnalisée.
Ces 142 000 chevilles ouvrières de l’école inclusive jouent un rôle essentiel pour que les enfants en situation de handicap soient accueillis dans de bonnes conditions. Nous connaissons leur engagement auprès d’eux et la force et l’énergie qu’ils déploient au quotidien. Rappelons que plus de 90 % des AESH sont des femmes.
L’augmentation de salaire que nous proposons est loin d’être suffisante, puisqu’elle s’élèverait à environ 220 euros par an pour chaque AESH. Cela constituerait tout de même un nouveau petit pas, qui pourrait être franchi après la CDIsation des professionnels au bout de trois ans, dans le sens de la sécurisation de leurs conditions d’emploi. Néanmoins, 80 % d’entre eux seraient encore en CDD, avec des conditions d’exercice et de vie extrêmement précaires.
On ne peut pas regretter la difficulté à pourvoir l’ensemble des postes d’AESH créés et à les remplacer en cas d’absence, ni déplorer le fort turnover qui caractérise la profession, si l’on ne se mobilise pas par ailleurs pour augmenter leur rémunération.
M. le président. L’amendement n° II-575 rectifié bis, présenté par MM. C. Vial, Pointereau, Perrin et Rietmann, Mme Schalck, MM. Pernot, Paul et Klinger, Mmes Demas, Aeschlimann, Noël, Muller-Bronn et Di Folco, MM. Savin et Somon, Mmes P. Martin, Ciuntu, Joseph, Belrhiti et Lassarade, MM. Allizard et Chaize, Mme Gosselin, M. D. Laurent, Mme Jacques, MM. Reynaud et Gremillet, Mme Malet, M. Genet, Mmes Richer et Ventalon, M. Sol, Mme Borchio Fontimp, M. Reichardt, Mmes Josende et Gruny et MM. J.P. Vogel et Sautarel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève |
31 000 000 |
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31 000 000 |
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dont titre 2 |
31 000 000 |
31 000 000 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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31 000 000 |
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31 000 000 |
Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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TOTAL |
31 000 000 |
31 000 000 |
31 000 000 |
31 000 000 |
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La parole est à M. Cédric Vial.
M. Cédric Vial. Cet amendement vise à garantir la bonne application de la loi en ajoutant 31 millions d’euros au programme 230 « Vie de l’élève ».
Ces crédits, dont le montant correspond à une évaluation réalisée par le ministère l’an dernier, permettront d’assurer la prise en charge des élèves en situation de handicap pendant la pause méridienne.
Nous n’avions pas réussi à dégager 10 millions d’euros en 2024 dans le cadre de l’exécution du budget. Nous vous proposons donc d’affecter ces 31 millions d’euros, afin d’être certains que l’on ne nous oppose pas l’argument budgétaire pour faire échec à l’application de loi, comme ce fut le cas l’année dernière.
Je vous le dis : aujourd’hui, l’État n’applique pas la loi et, pour ce faire, il invoque des arguments budgétaires complètement fallacieux. Or, comme notre ministre de l’intérieur le répète, quelqu’un qui n’applique pas la loi est un délinquant !
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. N’allons pas jusque-là !
M. Cédric Vial. Je n’ai pas de visibilité sur les 2 000 postes que vous proposez de réaffecter cette année à l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Tout ce que je vous demande, madame la ministre, c’est que les 20 000 à 25 000 enfants qui ont besoin d’aide sur le temps méridien puissent être effectivement pris en charge.
Mme Sonia de La Provôté. Exactement !
M. Cédric Vial. Cela coûtera 31 millions d’euros et impliquera de mobiliser 1 000 à 1 200 ETP, pas plus. Il ne s’agit pas de procéder à des recrutements supplémentaires, mais de solliciter les AESH déjà en poste, qui ne demandent qu’à faire plus d’heures. Cela permettra à certains d’entre eux de percevoir un salaire plus décent.
Environ 8 % des enfants en situation de handicap ont besoin d’être pris en charge par un AESH pendant la pause méridienne. Ainsi, il est important que l’État joue son rôle et applique enfin la loi.
Madame la ministre, monsieur le ministre délégué, je sais bien que les manquements constatés en ce domaine relèvent non pas de votre responsabilité, pas plus que de celle de l’administration en place – je pense notamment à l’actuelle direction générale de l’enseignement scolaire (Dgesco), mise en place en août dernier –, mais de celle de vos prédécesseurs, dont vous êtes les héritiers. Toutefois, si vous ne réglez pas le problème, cela deviendra votre responsabilité !
M. le président. L’amendement n° II-570 rectifié, présenté par Mmes Corbière Naminzo, Margaté et Brulin, MM. Bacchi, Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
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Enseignement scolaire public du premier degré dont titre 2 |
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Enseignement scolaire public du second degré dont titre 2 |
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Vie de l’élève |
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1 |
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dont titre 2 |
1 |
1 |
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Enseignement privé du premier et du second degrés dont titre 2 |
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Soutien de la politique de l’éducation nationale dont titre 2 |
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Enseignement technique agricole dont titre 2 |
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La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Il s’agit d’un amendement d’appel. La loi Vial, promulguée en mai dernier, impose à l’État de prendre en charge le financement des AESH pendant la pause méridienne, alors que, jusque-là, il revenait aux communes de le faire.
Or, dans certains départements, il apparaît que l’éducation nationale n’applique pas cette loi et que la charge financière continue de peser sur les communes.
Il s’agit pourtant d’une loi simple et particulièrement bienvenue pour nos maires, mais son application devient un véritable casse-tête en raison de la mauvaise volonté évidente dont font preuve certains services déconcentrés de l’État.
La situation actuelle est illégale et nous scandalise tous. Voilà pourquoi nous appelons à l’application pleine et entière de la loi Vial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Les amendements nos II- 207 rectifié ter, II-78 rectifié et II-438 visent à revaloriser la rémunération des AESH. Malheureusement, je demande qu’ils soient retirés, pour des raisons budgétaires.
De toute évidence, les AESH, qui représentent le deuxième corps de l’éducation nationale, exercent un métier difficile, qui suppose de porter une attention particulière aux enfants à inclure ; aussi, mieux ils seront payés, mieux ce sera. Cependant, des efforts ont déjà été accomplis par le passé. En particulier, une politique de déprécarisation a été menée pour transformer les CDD en CDI. En outre, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de majorer de plus de 60 millions d’euros les crédits alloués à la rémunération des AESH.
On peut critiquer beaucoup de choses dans la politique menée par le Gouvernement depuis des années en matière d’éducation (Rires sur les travées du groupe SER.),…
Mme Colombe Brossel. Ça, c’est sûr !
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. …mais, en ce qui concerne l’inclusion scolaire, vous lui faites un procès injuste. Il est prévu d’embaucher 2 000 AESH supplémentaires, ce qui porte le nombre d’effectifs à 135 000 : vu d’où nous sommes partis, ce n’est pas si mal !
En une dizaine d’années, nous avons permis l’inclusion de 240 000 enfants en situation de handicap. On peut toujours faire mieux – vraisemblablement, il y a des choses qui ne vont pas dans l’application de la loi Vial –, mais le procès que vous faites me semble tout de même assez cruel.
Sur les amendements nos II-575 rectifié bis et II-570 rectifié, qui visent à garantir la bonne application de la loi Vial, je sollicite l’avis du Gouvernement.
Cette loi, issue d’une proposition de loi adoptée ici il y a quelques mois et promulguée quasiment dans la foulée, n’est pas parfaitement appliquée partout. Toutefois, cela ne fait pas de Mme la ministre une délinquante !
Si la loi n’est pas totalement respectée, c’est parce qu’elle est compliquée à respecter. (M. Cédric Vial hoche la tête en signe de dénégation.) Dans certains cas, il s’agit moins d’une question de moyens que d’une question d’organisation en « point de croix ». Certains AESH ne souhaitent pas s’occuper des enfants pendant la pause méridienne ; pour d’autres, cela ne pose aucun problème.
Bref, il faut trouver une solution plus administrative ou technique. La ministre peut peut-être nous éclairer sur ce point.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Anne Genetet, ministre. Je vous remercie d’avoir conçu cette loi, monsieur Vial, qui a été votée par le Sénat à l’unanimité. Si elle a été très rapidement promulguée, c’était pour répondre sans attendre au besoin de nombreux enfants.
Lors de mon audition devant la commission de la culture et de l’éducation, vous m’aviez signalé les difficultés liées à l’application de votre texte. J’ai tenu à constater ce que vous signaliez et j’ai vu combien il était beaucoup plus facile de faire compliqué quand on peut faire simple.
Cette situation est infiniment regrettable. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à mes services de rédiger un décret beaucoup plus simple visant à poser clairement le régime de prise en charge et de responsabilité. Il sera publié dans les prochains jours et affranchira l’ensemble des académies et des communes de l’actuelle convention, qui, je le reconnais, n’était pas forcément très agile.
Soyez rassuré, les moyens prévus dans le budget pour 2025 permettront – je m’y engage – de couvrir l’accompagnement des élèves en situation de handicap, qui en ont besoin, pendant la pause méridienne par nos accompagnants.
J’en profite pour remercier les AESH, qui font un travail difficile et soutenu. Nous avons récemment revalorisé leur rémunération et avons modifié leurs conditions d’exercice, notamment en prolongeant leur contrat au-delà de six ans. Nous travaillons encore à valoriser leur métier et à leur proposer une véritable carrière.
Les efforts accomplis en ce sens produiront des effets visibles au cours de l’année 2025. Nous aurons les moyens financiers nécessaires pour recruter 2 000 AESH supplémentaires, comme le prévoit le budget. C’est la raison pour laquelle je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Je vous confirme toutefois la volonté politique qui est la mienne : nous continuerons à avancer, je m’y engage.
Sur les quatre autres amendements en discussion commune, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission sur les amendements nos II-575 rectifié bis et II-570 rectifié ?
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. Je le regrette, mais après avoir entendu Mme la ministre, l’avis de la commission est défavorable.
La question est non pas financière mais, à mon sens, plutôt organisationnelle. En outre, le montant de 31 millions d’euros n’est pas neutre.
M. le président. Monsieur Vial, l’amendement n° II-575 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Cédric Vial. Madame la ministre, je tiens tout d’abord à vous remercier de vos propos et de l’approche que vous adoptez.
Pour ma part, je ne suis pas persuadé de la nécessité d’un décret, dans la mesure où le système a fonctionné de la manière la plus simple du monde de 2005 à 2022, sans qu’il en fût besoin. On en vient à complexifier les choses, même lorsque l’on cherche à décomplexifier.
Néanmoins, vous avez choisi d’élaborer un décret qui permettra de simplifier la situation ; dont acte, je vous en remercie. Il est nécessaire d’avancer.
Je souhaite également répondre au rapporteur spécial Olivier Paccaud.
Il existe bien entendu des situations dans lesquelles les recrutements sont difficiles, y compris à l’heure actuelle, parce qu’il s’agit de postes entre plusieurs établissements ou en raison des horaires requis. Nous ne résoudrons pas tous les problèmes, il y en aura toujours. Des effets de bord se manifesteront également. Certes, le contrat unique donnera lieu à des contrats de trente-deux heures ou de vingt-quatre heures, ce qui sera plus simple, car les agents concernés choisiront un poste avec ou sans le temps méridien.
Pour autant, des avenants pourront s’avérer nécessaires pour les enfants déjà scolarisés, et c’est là que des difficultés sont susceptibles de survenir, même si nous trouvons généralement des solutions.
Ce sujet est très important et ce n’est pas par hasard qu’il a fait l’unanimité sur ces travées comme à l’Assemblée nationale, c’est parce qu’il est essentiel pour la prise en charge des enfants en situation de handicap. Pour les collectivités, cette question est devenue un véritable casse-tête, alors que nous avions agi pour leur simplifier la vie.
Je maintiens donc mon amendement, tout en attendant de voir ce qui se passera d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire. Nous aurons probablement l’opportunité, du moins j’en forme le vœu, non seulement de voir votre décret paraître dans les prochains jours, comme vous l’avez indiqué, mais aussi d’aller jusqu’à la commission mixte paritaire pour obtenir des garanties quant à l’avancée effective du dossier.
Restera un autre sujet sous-jacent : l’organisation de l’école inclusive elle-même. Vous l’avez souligné, nous sommes passés à 4,6 milliards d’euros. C’est la raison pour laquelle, au-delà de la petite question du jour, l’enjeu de la prise en charge et de la compensation humaine est capital, et pose problème actuellement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-207 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote, sur l’amendement n° II-575 rectifié bis.
M. Max Brisson. Je n’aime pas m’opposer au rapporteur spécial, mais il me semble que la complexification mise en place par l’administration tenait précisément à des motifs financiers. La circulaire de huit pages publiée par la Dgesco avait précisément pour but d’empêcher que la loi Vial soit mise en œuvre !
Je le fais rarement, mais je voterai contre l’avis de la commission, c’est-à-dire en faveur de cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-575 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
En conséquence, l’amendement n° II-570 rectifié n’a plus d’objet.
Mes chers collègues, nous arrivons au terme du temps imparti pour l’examen de la mission « Enseignement scolaire ». Il nous reste cinquante-cinq amendements à examiner.
Dès lors, conformément à l’organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l’examen de cette mission est reportée au samedi 7 décembre, à l’issue de l’examen des missions de la journée.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures trente-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)
PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
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Mises au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à Mme Samantha Cazebonne.
Mme Samantha Cazebonne. Lors du scrutin public n° 136 sur l’amendement n° II-18, l’ensemble du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI) souhaitait voter contre.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Lors du scrutin n° 114, mon collègue Michel Masset souhaitait voter pour.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Lors du scrutin n° 135 sur la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, mon collègue Vincent Delahaye souhaitait voter contre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Lors des scrutins publics nos 118, 121, 122, 123, 124 et 130, je souhaitais voter contre.
Mme la présidente. Acte est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles figureront dans l’analyse politique des scrutins concernés.
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Loi de finances pour 2025
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Santé
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » comprend trois programmes, dont l’aide médicale de l’État (AME), qui représente plus de 80 % de ses crédits. La pertinence de cette mission, qui se réduit de plus en plus à l’AME, suscite des interrogations, que j’ai déjà soulevées l’année dernière et que mon prédécesseur exprimait avant moi.
Ses crédits connaissent en apparence une diminution considérable de 40 % dans le projet de loi de finances pour 2025, soit une réduction de 1,1 milliard d’euros. Cette baisse résulte toutefois uniquement de l’épuisement du financement européen du programme 379 « Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet “Ségur investissement” du plan national de relance et de résilience (PNRR) », lequel, créé fin 2022, recueille les crédits européens de la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR) destinés à la France, qui soutiennent le volet investissements du Ségur de la santé.
Ce volet représente 19 milliards d’euros, dont 6 milliards d’euros proviennent de la FRR. Entre 2021 et 2024, plus de 4,8 milliards ont été versés à la mission « Santé » par ce biais, soit plus de 80 % de la somme promise.
De nombreuses actions financées par le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » ont été transférées à l’assurance maladie au fil des années. Ce programme finance un grand nombre d’actions extrêmement dispersées, pour des montants généralement faibles, qui ne disposent pas d’une masse critique suffisante pour produire un réel impact sur les objectifs de santé publique. Une réflexion sur ses financements en vue d’éviter un saupoudrage excessif est une piste à explorer.
L’AME demeure l’élément principal de la mission. Ses dépenses représenteront environ 1,320 milliard d’euros en 2025, en hausse de 9,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Cette évolution résulte notamment de l’augmentation du nombre de bénéficiaires, passé de 411 000 à la fin de l’année 2022 à plus de 459 000 à la fin du premier semestre 2024, soit une hausse de 11 %.
Ces éléments conduisent à poser de nouveau la question, plusieurs fois abordée dans notre assemblée, de l’étendue des soins pris en charge par l’AME.
Dans de nombreux pays européens, seuls les soins urgents, les soins liés à la maternité, les soins aux mineurs et les dispositifs de soins préventifs dans le cadre de programmes sanitaires publics sont pris en charge gratuitement pour les étrangers en situation irrégulière.
Par l’éventail des soins couverts, l’AME constitue une exception par rapport à nos voisins, difficilement justifiable dans un contexte d’augmentation continue et non maîtrisée de sa charge budgétaire. Le Sénat dénonce cette situation depuis de nombreuses années et vote régulièrement des mesures de réduction de l’éventail des soins pris en charge.
Le rapport sur l’aide médicale de l’État de MM. Claude Evin et Patrick Stefanini de décembre 2023, qui devait servir de base à une réforme réglementaire du précédent gouvernement, laquelle n’est jamais advenue, formule plusieurs recommandations en ce sens, notamment l’adaptation du régime de prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes.
Celles-ci ne peuvent être délivrées sans accord des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) aux assurés bénéficiant d’une AME depuis moins de neuf mois. Cette condition d’ancienneté semble étonnante : rien ne justifie que la délivrance d’une prestation soit subordonnée à une autorisation de l’assurance maladie seulement pour certains assurés.
Je vous présenterai donc un amendement visant à adapter le régime d’accord préalable en l’étendant à tous les assurés. Quelle que soit la durée de son affiliation à l’AME, un bénéficiaire pourrait ainsi accéder à une prestation incluse dans le panier de soins, définie par décret comme non urgente, sous condition d’accord des CPAM.
Je vous soumettrai également un amendement de crédits tirant les conséquences de ces dispositions pour encourager le Gouvernement à inclure plus de prestations dans le panier de soins non urgents. Le rapport Evin-Stefanini recommandait notamment d’y inclure les actes de masso-kinésithérapie, la pose de prothèses dentaires, l’hospitalisation à domicile ou encore les soins médicaux et de réadaptation.
L’addition des gains attendus de cette restriction du panier de soins aboutirait à une économie estimée à 200 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.
La commission des finances propose l’adoption des crédits de la mission assortis de ces modifications.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a exprimé ses inquiétudes et ses réserves quant aux évolutions du budget de la mission « Santé » en 2025. Le montant total des crédits diminuerait de 40 % par rapport au dernier projet de loi de finances, pour s’établir à 1,643 milliard d’euros.
Cette baisse draconienne mérite toutefois d’être nuancée : si l’on écarte le programme 379, qui constitue une passerelle budgétaire entre l’État et la sécurité sociale pour le reversement de crédits de l’Union européenne, le budget de la mission ne diminue que de 4,2 %. Néanmoins, cette baisse entraîne, pour les deux programmes concernés, des évolutions jugées préoccupantes par la commission.
En premier lieu, le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » subit une forte diminution de ses crédits, de l’ordre de 18 %. En 2025, il disposerait d’un budget de 222 millions d’euros, soit près de 50 millions d’euros de moins que l’année précédente. Une telle évolution affectera nécessairement les conditions d’exécution des actions qu’il contient. Cette trajectoire inquiète d’autant plus qu’elle semble appelée à s’inscrire dans la durée : d’ici à 2027, les crédits du programme 204 devraient diminuer de près de 10 %.
Alors que le renforcement de la prévention devrait constituer une priorité d’action et un horizon de nos politiques de santé, ces économies sapent les bases d’une évolution qui exigerait, au contraire, un investissement patient et continu.
En second lieu, au sein du programme 183 « Protection maladie », l’aide médicale de l’État connaît une hausse de ses crédits de 9,2 %, principalement soutenue par l’augmentation non maîtrisée du nombre de ses bénéficiaires. Dotée d’un budget de 1,319 milliard d’euros, elle concentrera plus de 80 % du total des crédits de la mission en 2025.
Si elle représente un dispositif sanitaire utile, qui concourt à la protection de la santé individuelle et collective, elle nécessite toutefois certaines évolutions.
Dans la continuité du rapport de MM. Claude Evin et Patrick Stefanini remis en décembre 2023, la commission a exploré plusieurs pistes avec deux objectifs : mieux maîtriser la dépense de l’AME et renforcer son acceptabilité collective.
Un recours élargi au régime de l’accord préalable pour les seuls soins non urgents programmés nous semble susceptible de répondre aux critiques récurrentes qui lui sont adressées. Sans engendrer de refus de soins ni remettre en cause notre vision de la solidarité collective, cette évolution réaffirmerait que l’AME doit demeurer un dispositif d’accès aux soins inconditionnel, mais proportionné.
Sous réserve de l’adoption des amendements visant, d’une part, à adapter le modèle de prise en charge des soins non urgents programmés et, d’autre part, à minorer en conséquence le montant des crédits de l’AME de 200 millions d’euros, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Jomier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » du projet de loi de finances soulève chaque année la même interrogation, qui n’a pas échappé aux rapporteurs : où réside sa cohérence ?
La politique de l’État en matière de santé et de prévention souffre d’un double déficit : l’absence d’une véritable ambition en matière de santé publique et le manque d’un pilotage financier cohérent, actuellement marqué par des transferts de charges de l’État vers l’assurance maladie, au détriment de responsabilités qui devraient lui incomber directement.
La politique de prévention se trouve diluée dans trente et un programmes budgétaires. Cette dispersion s’accompagne d’incohérences : le programme 204, censé regrouper la prévention, la sécurité sanitaire et l’offre de soins, ne présente qu’une vision fragmentée du sujet. Or une politique de prévention digne de ce nom exige des moyens clairs, une coordination structurée et une lisibilité pour tous les acteurs.
Pour 2025, le Gouvernement propose une réduction de 14 millions d’euros des crédits alloués au pilotage de la politique de santé publique par rapport à 2024.
L’action n° 12 « Santé des populations » subit une diminution de 8,92 % en crédits de paiement, tandis que la prévention des maladies chroniques et l’amélioration de la qualité de vie des malades voient leur budget amputé de 1 million d’euros. La prévention des risques liés à l’environnement et à l’alimentation n’est pas épargnée et subit une réduction de près de 2 %.
Ces coupes budgétaires traduisent une réalité simple : le covid n’y a rien changé, le Gouvernement a renoncé à investir dans la santé publique. Dans ce domaine, les actes valent plus que les mots.
La santé mentale, par exemple, annoncée comme une grande cause nationale par le Premier ministre, demeure absente des priorités budgétaires.
M. Patrick Kanner. Eh oui…
M. Bernard Jomier. Ni le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ni le PLF n’y consacrent les crédits nécessaires. Le Gouvernement n’hésite pourtant pas à user d’amendements pour faire évoluer ses textes budgétaires. Des mots, toujours des mots…
La mission « Santé » finance également des opérateurs essentiels comme l’Institut national du cancer (Inca) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).
En ce qui concerne cette dernière, le reversement au budget de l’État des montants de taxes perçues qui devaient couvrir ses missions paraît incompréhensible, d’autant que, dans le même temps, l’État plafonne les redevances perçues par l’agence pour ses opérations d’évaluation. Ces décisions fragilisent son équilibre financier, alors même que ses missions ne cessent de s’enrichir, à la demande de l’État.
L’essentiel du budget de la mission est constitué du programme 183, qui finance l’AME. Chaque année, ce dispositif est la cible d’attaques injustifiées. Le rapport Evin-Stefanini l’a pourtant rappelé avec force : l’AME constitue une mesure de santé publique et ne représente en rien un facteur d’attractivité pour les migrations. Il est temps de sortir de cette spirale de stigmatisation à laquelle, malheureusement, la majorité sénatoriale s’est manifestement ralliée. L’AME incarne un principe fondamental de solidarité ainsi qu’une exigence de déontologie chère aux soignants, transcendant les clivages politiques.
Allez-vous écouter l’unanimité des institutions et organisations de soignants, jusqu’à l’Académie nationale de médecine, ou allez-vous sourire encore et encore à Mme Le Pen, comme le fait M. Barnier ?
Les enfants représentent 25 % des bénéficiaires de l’AME. Allez-vous réduire les soins qui leur sont destinés ? Parmi les migrants, 100 % femmes et 80 % des hommes ont subi des violences sexuelles durant leur parcours migratoire. Allez-vous les abandonner à leurs souffrances ?
Allez-vous demander aux professionnels de santé de détecter des pathologies pour ne pas les soigner, car vous aurez supprimé leur prise en charge ou vous l’aurez rendue trop complexe ?
Allez-vous renvoyer vers nos hôpitaux ces patients, et les coûts y afférents, alors que ces établissements sont déjà fragilisés par un sous-financement ? Il manque aujourd’hui, je le rappelle, 2 milliards d’euros à l’hôpital et vous n’avez rien accordé au secteur dans le PLFSS.
Si nous entendons ouvrir un débat sérieux sur le panier de soins offert par l’AME, si nous entendons encore abaisser son taux de fraude, déjà le plus bas de toutes les prestations de l’assurance maladie, fondons-nous sur des données objectives, et non sur la volonté de faire une concession au Rassemblement national pour apaiser ses velléités. (M. Jean-Jacques Panunzi s’exclame.)
Lisez le rapport Evin-Stefanini avec vos deux yeux, et non seulement l’œil droit ! Vous soutiendrez alors l’extension de la durée de l’AME à deux ans, comme le préconisent ses auteurs, et vous aborderez sereinement la question de son intégration dans le régime général de la sécurité sociale, comme le propose l’Académie nationale de médecine. Une telle évolution permettrait de prévenir les ruptures de droits, aujourd’hui trop nombreuses et identifiées comme des freins importants à l’accès aux soins.
Pour notre part, nous défendons l’AME, car la réalité des faits et le respect de nos valeurs nous y conduisent. En la détricotant, vous portez atteinte aux valeurs des soignants et à la devise de fraternité du pays, pour un effet financier probablement négatif et avec pour seule conséquence politique de nourrir les discours du Rassemblement national et donc le renforcer. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quand il entre au service pédiatrique de la Timone, à Marseille, Léo a quatre ans et une tumeur cancéreuse lui ronge le tibia. L’opération est urgente ; pourtant, elle a été repoussée à trois reprises auparavant, en raison du manque de personnel. Imaginez l’injustice pour ce petit ange, l’angoisse et la douleur de sa famille. C’est à hurler et à pleurer de chagrin !
À l’hôpital Nord de Marseille, depuis le covid, 30 % des infirmières de bloc ont rendu leur blouse. Dans le service d’urologie de transplantation, les créneaux d’accès aux blocs ont diminué de 20 % depuis deux ans.
Si l’épidémie de covid est passée, les soignants continuent à travailler en situation de guerre : un tiers des blocs opératoires de la deuxième ville de France sont fermés. Malgré cela, ils ne baissent pas les bras et inventent des procédés d’urgence : les chefs de service se réunissent trois fois par semaine pour ce qu’ils appellent un Tetris, afin de faire entrer un maximum de patients dans un minimum de blocs.
Face à une telle situation, nous serions en droit d’attendre un budget de la santé pour 2025 qui mette l’accent sur l’investissement hospitalier, la rémunération de l’ensemble des soignants, le continuum médical, la structuration d’oasis médicales dans les déserts du même nom et le financement de l’innovation. Au lieu de cela 80 % des crédits de cette mission « Santé », soit 1,3 milliard d’euros, sont consacrés à l’aide médicale de l’État, réservée aux seuls clandestins !
Dès 2018, l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale des affaires sociales (Igas) ont reconnu, ne vous en déplaise, mon cher collègue, l’existence d’une migration pour soins, alors qu’il y avait 150 000 bénéficiaires de l’AME de moins qu’aujourd’hui. Pourtant, vous refusez obstinément de remettre en question cette pompe aspirante.
Un rapport de l’Assemblée nationale datant de 2021 précise que, depuis 2015, les étrangers ont bénéficié de 14,8 % des transplantations, alors que les étrangers résidant en France ne représentent que 7,4 % de la population.
Cela s’explique par deux facteurs : premièrement, les passeurs vendent 2 000 euros la carte de centre de dialyse et de greffe, pour une opération qui nous coûte 40 000 euros, deuxièmement, cette immigration à la carte promeut souvent des profils jeunes, qui sont prioritaires par rapport aux Français eux-mêmes.
Mme Corinne Féret. C’est faux !
M. Stéphane Ravier. Après l’emploi et le logement, c’est donc dans le domaine de la santé que la préférence étrangère s’applique désormais. Nous atteignons ici le sommet de l’ignominie…
Mme Corinne Féret. Ces propos sont scandaleux !
M. Stéphane Ravier. Je le dis solennellement à cette tribune : loin des caméras, un drame terrible est en train de se jouer, un drame national, l’effondrement de notre hôpital, l’abandon de centaines de patients de tous âges et une scandaleuse préférence étrangère, qui place notre système de santé sous une tension injustifiée.
Mme Corinne Féret. Quelle honte !
M. Stéphane Ravier. En ce moment même, des patients sont abandonnés aux urgences, d’autres dorment des jours entiers sur un brancard, des hommes et des femmes attendent leur opération ou leur dialyse. Tout cela se passe ici, en France, en 2024.
À défaut de grande ambition au sein de la Haute Assemblée, je me replierai sur un vote en faveur des amendements visant à réduire la voilure de l’AME.
La suppression de cette aide, que vous avez pourtant eu le courage de voter l’année dernière, mes chers collègues, est une urgence ; les crédits ainsi libérés doivent être affectés en priorité à la restructuration médicale et hospitalière, au bénéfice, d’abord, de nos compatriotes.
Mme Corinne Féret. Honte à vous !
Mme Laurence Rossignol. Il ment et il sait qu’il ment !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits attribués à la mission « Santé » pour 2025 s’élèvent à 1,6 milliard d’euros. Cette baisse importante s’explique par la diminution d’un milliard d’euros du programme correspondant à des fonds européens destinés à l’investissement dans le secteur hospitalier.
Si l’on écarte ce programme, les crédits de la mission diminuent de 4 %, tandis que ceux de l’aide médicale de l’État progressent de 9 %.
Le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » subit une baisse de ses crédits de 18 %. Malgré cette diminution importante, il convient de saluer le maintien de la subvention à l’Institut national du cancer, sujet régulièrement abordé dans notre commission, notamment il y a un mois, lors de l’examen de la proposition de loi visant à améliorer la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein par l’assurance maladie. Le cancer, première cause de mortalité en France, touche de plus en plus de personnes de moins de 50 ans ; l’Inca doit être en mesure de mener à bien ses missions.
Au sein du programme 183, la dotation au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) demeure stable, à 8 millions d’euros ; pour autant, compte tenu de la dégradation de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), son augmentation sera nécessaire.
Enfin, l’AME représente 80 % des crédits de la mission « Santé ». Ce dispositif figure parmi les plus généreux d’Europe, avec une couverture complète des étrangers en situation irrégulière au-delà de trois mois de résidence. Les crédits concernés s’élèvent à 1,319 milliard d’euros en 2025, dont 72 millions d’euros en complément du financement de 2024, essentiellement en raison de l’augmentation constante du nombre de bénéficiaires : plus de 20 % depuis 2022, dont un quart de mineurs.
Je partage l’analyse de Mme le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales : une baisse des crédits de l’AME sans réforme l’accompagnant pénaliserait les établissements et les professionnels de santé, qui devraient absorber cette moindre couverture.
Vu notre contexte budgétaire, je souscris à l’idée d’une meilleure maîtrise des dépenses d’AME qui permette toutefois de continuer à assurer la prise en charge des soins urgents, entendus dans le cadre d’une définition large.
Dans leur rapport, Claude Évin et Patrick Stefanini estiment que l’AME est un dispositif utile. Ils indiquent que l’augmentation de son coût est la conséquence de l’accroissement, de plus de 40 % en sept ans, du nombre de ses bénéficiaires.
Ce rapport dresse un certain nombre de constats et formule un certain nombre de préconisations.
Quelque 10 % de bénéficiaires de l’AME disent être venus en France pour ce mode d’accès aux soins. En 2022, les délivrances de soins urgents ont augmenté de plus de 100 % par rapport à 2021. Les revenus des conjoints des bénéficiaires, qu’ils soient français ou en situation irrégulière, ne sont pas pris en compte lors de la vérification des conditions d’éligibilité.
Le rapport conclut qu’un meilleur contrôle d’identité, un recours accru à l’adressage et la limitation de l’octroi du titre d’ayant droit aux seuls enfants mineurs d’un assuré seraient nécessaires.
Sur l’initiative de Mme le rapporteur pour avis, la commission des affaires sociales a adopté un amendement visant à rendre permanent le régime d’accord préalable pour la prise en charge des soins programmés non urgents, actuellement limité à neuf mois. Il sera naturellement indispensable qu’une autorité médicale se prononce sur la pertinence de la prise en charge de ces actes programmés non urgents.
En conclusion, s’il nous semble nécessaire d’améliorer la maîtrise des dépenses d’AME, dans le respect d’un juste équilibre entre humanisme, réalité sanitaire et réalité économique, tout en luttant contre les abus, comme le fait par exemple l’Allemagne, nous estimons qu’il convient de conserver ce dispositif. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en décembre 2023, après les débats passionnés qui ont présidé à l’élaboration de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, dite loi Immigration, dans une lettre adressée au président Gérard Larcher, la première ministre Élisabeth Borne s’engageait à faire évoluer l’aide médicale de l’État, reconnaissant que ce dispositif devait « régulièrement être évalué pour vérifier sa pertinence et son efficacité ».
Un an après, la réforme promise n’a pas eu lieu. Le budget consacré à l’AME atteindra 1,319 milliard d’euros en 2025, en hausse de près de 10 %. Ces chiffres reflètent une trajectoire financière inquiétante.
Une majorité de sénateurs soulignent depuis longtemps le coût et le fonctionnement de l’AME, qui sont en complet décalage avec les réalités économiques et les pratiques observées chez nos voisins européens.
Comment expliquer à nos concitoyens cette générosité sans équivalent, alors que nos finances publiques sont sous tension ? Est-il normal que les étrangers frappés de mesures d’éloignement pour motif d’ordre public bénéficient d’un accès à un panier de soins étendu et totalement gratuit ?
L’AME est une exception française, qui, dans un tel contexte, devient de plus en plus difficile à justifier. Rappelons que l’AME de droit commun est consacrée à la protection de la santé des personnes étrangères, vivant en France depuis au moins trois mois consécutifs, en situation irrégulière et non éligibles à la protection universelle maladie (PUMa).
Elle donne accès à une gamme de soins bien plus large que dans la plupart des pays européens, où elle est limitée aux soins urgents, aux soins liés à la maternité, aux soins aux mineurs et aux dispositifs de soins préventifs. Ces pays ne manquent pas d’humanité, mais ils gèrent leur système avec une rigueur qui nous fait manifestement défaut.
Ce sujet a été longtemps éludé par les pouvoirs publics. Entre 2001 et 2023, le nombre de bénéficiaires de l’AME a augmenté de 20 %. Fin 2023, on dénombrait 456 689 bénéficiaires, en hausse de 45 000 sur un an. En 2023, le rapport Évin-Stefanini soulignait la nécessité de renforcer les mesures de contrôle et de lutte contre la fraude, afin de maîtriser les coûts de l’AME, de garantir l’intégrité du dispositif et de renforcer son acceptabilité sociale.
Si cette réflexion prend tout son sens au regard du nécessaire redressement des comptes publics et sociaux de notre pays, aucun effort de maîtrise budgétaire ne figure, au sein de la mission « Santé », dans le programme 183 « Protection maladie », qui regroupe les dépenses d’AME.
L’idée d’instaurer un droit d’entrée forfaitaire pour les bénéficiaires de l’AME revient périodiquement dans le débat. Une telle contribution avait été introduite par la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, mais elle a, hélas ! été abrogée en 2012.
La situation politique actuelle ne paraît pas propice à l’émergence d’un consensus sur ce sujet, alors qu’il est urgent de réformer l’AME et de la recentrer sur les soins essentiels.
Je salue à ce titre la proposition portée par la commission des affaires sociales, visant à systématiser l’accord préalable à la prise en charge de soins programmés non urgents. Une telle disposition, qui devrait permettre de réaliser une économie de 200 millions d’euros sans dégrader la prise en charge des bénéficiaires constitue une première réponse pour juguler une dépense qui ne cesse de croître chaque année et sur laquelle les pouvoirs publics doivent reprendre la main. Elle doit préfigurer l’indispensable réforme du dispositif que le Sénat appelle de ses vœux depuis longtemps.
Au sein de la mission « Santé », si les crédits dédiés à l’AME échappent à l’effort de maîtrise budgétaire, les moyens consacrés à la prévention à la sécurité sanitaire et au pilotage de la politique de santé publique subissent à l’inverse une réduction sensible. Le programme 379 « Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet “Ségur investissement” du plan national de relance et de résilience (PNRR) », doté de 6 milliards d’euros sur la période 2021-2026, touche à sa fin.
L’essentiel de la baisse supportée par la mission « Santé » concerne le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », dont les crédits s’élèvent à 222 millions d’euros en 2025, contre 271 millions d’euros l’année dernière. Depuis 2014, l’essentiel des crédits portés par ce programme a été réorienté vers l’assurance maladie.
Pour faire face aux enjeux essentiels de prévention, le fléchage des crédits de la mission « Santé » se concentre désormais sur deux opérateurs principaux : l’Institut national du cancer et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, dont la dotation s’établit à 25 millions d’euros en 2025.
Si la subvention de l’Inca est reconduite en 2025 à hauteur de 34,5 millions d’euros, Mme la rapporteure pour avis a souligné à juste titre qu’il convient de veiller à maintenir des moyens adéquats à cet opérateur chargé de la mise en œuvre du plan Cancer et de notre politique de prévention en la matière. La direction générale de la santé (DGS) a en effet rappelé que ce financement était indispensable pour lancer l’expérimentation du dépistage du cancer du poumon, comme le prévoit la stratégie décennale de lutte contre les cancers 2021-2030.
Rappelons qu’avec 385 000 cas diagnostiqués chaque année le cancer touche un Français sur vingt au cours de sa vie, et qu’il est la première cause de décès chez l’homme et la deuxième cause de décès chez la femme. Rappelons aussi que la prise en charge de cette pathologie représente 10 % du budget de l’assurance maladie. Les moyens consacrés à la prévention sont autant de dépenses de soins évitées, madame la ministre.
Un autre point de vigilance concerne l’agence de santé du territoire des îles Wallis et Futuna, dont le déficit s’élève à 8,5 millions d’euros en 2024. Une dotation de 53,6 millions d’euros en crédits de paiement est inscrite au budget 2025, en hausse de 2,7 millions d’euros. Elle doit permettre le redressement de la situation financière de l’agence de santé et financer le chantier de reconstruction de l’hôpital de Futuna.
Dans mon rapport sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2023-285 du 19 avril 2023 portant extension et adaptation à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna de diverses dispositions législatives relatives à la santé, je soulignais la situation particulièrement critique de l’offre de soins à Wallis-et-Futuna.
Ces difficultés se sont depuis lors, hélas ! aggravées, en raison de la situation insurrectionnelle en Nouvelle-Calédonie, qui complique les évacuations sanitaires vers Nouméa, mais aussi entre les îles et vers la métropole, lorsqu’aucune solution de prise en charge n’existe sur place.
Pour conclure, j’estime que, au travers des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2025, il nous faut impérativement réaffirmer la nécessité d’une gestion rigoureuse de nos finances publiques, tout en maintenant les crédits consacrés à la prévention.
À l’heure où les défis budgétaires s’accumulent, en amorçant une réforme attendue de l’aide médicale de l’État, le Sénat montrerait sa capacité de proposer des solutions pragmatiques. Gardons en tête, mes chers collègues, que la maîtrise de la dépense publique est non pas un facteur d’amoindrissement de la solidarité, mais la condition pour que celle-ci perdure. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur spécial et Mme Véronique Guillotin applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Buval.
M. Frédéric Buval. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2025 s’inscrivent dans le cadre de la politique de santé et d’accès aux soins portée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.
La baisse en trompe-l’œil de ces crédits, de l’ordre de 40 % par rapport à 2024, s’explique par l’épuisement du financement du programme 379, affecté au soutien de l’investissement dans le secteur hospitalier dans le cadre du Ségur de la santé.
L’essentiel des crédits de la mission est ainsi alloué au programme 204, qui finance des actions en faveur de la prévention et de la sécurité sanitaire, et au programme 183, qui finance l’aide médicale de l’État. En 2025, ce dernier programme devrait représenter plus de 80 % du total des crédits de la mission ; j’y reviendrai.
Les crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » s’inscrivent en cohérence avec la future stratégie nationale de santé. Ils visent à réduire les inégalités en matière de santé et à améliorer les déterminants socio-environnementaux et comportementaux de santé.
Les crédits prévus pour 2025 s’élèvent à 222 millions d’euros, contre plus de 270 millions d’euros en 2024, en baisse de 18 %. Cette diminution des crédits, qui affecte principalement l’action n° 11 « Pilotage de la politique de santé publique » et l’action n° 16 « Veille et sécurité sanitaire », appelle naturellement à la vigilance.
J’entends que ces efforts budgétaires doivent s’accompagner de la recherche de plus d’efficacité et d’efficience, madame la ministre. Notre groupe restera toutefois attentif au suivi de ces objectifs, en particulier au déploiement d’une véritable politique de prévention dans l’ensemble du territoire, spécifiquement dans les territoires ultramarins, qui souffrent d’un véritable retard à la matière.
Nous nous félicitons en revanche que, en dépit du contexte budgétaire que nous connaissons, les crédits alloués à l’Institut national du cancer, et partant, au déploiement de la stratégie décennale de lutte contre les cancers 2021-2030, demeurent stables.
Nous nous réjouissons également de la hausse de la dotation accordée à l’agence de santé du territoire des îles Wallis et Futuna, dont la trajectoire financière a été fragilisée par l’épidémie de covid-19, et plus récemment, par la crise en Nouvelle-Calédonie.
J’en viens au programme 183 « Protection maladie », qui inclut l’aide médicale de l’État et, dans une moindre mesure, une dotation de 8 millions d’euros au fonds d’une indemnisation des victimes de l’amiante.
En 2025, les crédits de l’AME devraient s’établir à 1,319 milliard d’euros, en hausse de 9,2 % par rapport à 2024, en raison principalement de l’augmentation du nombre de bénéficiaires.
J’indique d’emblée que le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI) s’opposera avec fermeté aux amendements du rapporteur spécial et de la rapporteure pour avis visant à étendre le régime d’autorisation préalable aux prestations programmées non urgentes ou à minorer de 200 millions d’euros les crédits alloués à l’AME.
M. Bernard Jomier. Très bien !
M. Frédéric Buval. Notre groupe s’opposera également aux amendements visant à transformer l’AME en aide médicale d’urgence, comme il l’a fait dernier et comme il s’est opposé, en 2022, aux amendements visant à instaurer une aide médicale de santé publique.
Tout en ne nous leurrant pas quant à l’objectif visé, à savoir restreindre l’accès à l’AME – contre toute logique sanitaire, tant pour les potentiels bénéficiaires que pour les établissements de santé –, nous nous félicitons que la commission ait quelque peu fait évoluer sa position, en suivant notamment les conclusions du rapport de Claude Évin et de Patrick Stefanini.
En cohérence avec la position qu’il a toujours défendue, conscient de l’utilité de l’aide médicale de l’État, mais aussi de la perfectibilité de ce dispositif, le groupe RDPI votera contre les amendements portés par les rapporteurs, et il voterait contre les crédits de la présente mission si ces amendements étaient adoptés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Dommage !
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin. (Applaudissements sur les travées du groupe du RDSE. – Mmes Patricia Schillinger et Nadia Sollogoub applaudissent également.)
Mme Véronique Guillotin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chaque année, l’AME revient dans le débat public au moment de l’examen des crédits de la mission « Santé ». Et pour cause : l’AME représente 80 % de ces crédits et les seuls en augmentation, à hauteur de 9,2 %.
Si le rapport Évin-Stefanini, publié en 2023, a rappelé le caractère utile et globalement maîtrisé de ce dispositif sanitaire, que le groupe du RDSE a toujours défendu, il a également souligné l’augmentation des crédits affectés, en lien avec la forte augmentation des bénéficiaires de ce dispositif. S’accordant sur la pertinence d’une évolution du dispositif, les auteurs formulent plusieurs propositions de réforme, notamment l’extension de l’accord préalable pour les soins programmés non urgents, reprise dans un amendement des rapporteurs.
Le groupe du RDSE est profondément attaché, vous le savez, mes chers collègues, aux valeurs humanistes qui président à l’aide médicale de l’État, autant qu’il est soucieux du rôle sanitaire de ce dispositif et de sa cohérence avec l’engagement des médecins à soigner tout le monde. Nous saluons donc la position commune de nos deux rapporteurs. Nous n’aurons pas, cette année, ce débat que nous avons tant eu sur la transformation de l’aide médicale de l’État en aide médicale d’urgence, transformation à laquelle nous nous sommes opposés.
Nos rapporteurs proposent un régime d’accord préalable permanent pour les soins programmés non urgents dont ils estiment qu’il permettra d’économiser environ 200 millions d’euros. Si nous souscrivons à cette réforme, nous nous inquiétons de la charge supplémentaire qu’elle emportera pour l’assurance maladie et demeurons sceptiques quant à l’économie prévue, qui est à ce stade purement hypothétique.
Je présenterai donc un amendement visant à évaluer ce nouveau dispositif fin 2025, afin de vérifier qu’il atteint bien son objectif et n’aboutit pas une surcharge administrative ou de frais de gestion.
Pour le reste, je considère qu’il n’y a pas de tabou, et que l’efficience et l’acceptabilité sociale de l’AME doivent être prises en compte, notamment dans une période où l’on demande des efforts à tout le monde.
Reprenant une proposition de la députée Véronique Louwagie, je présenterai un amendement visant à exclure clairement de l’AME certains soins esthétiques non rattachables à un acte de chirurgie reconstructrice. Dans les faits, nous savons que peu de personnes en situation irrégulière bénéficient de tels soins. Par cette disposition, nous éviterons toutefois quelques abus. Pour citer Nicolas Boileau, « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement ».
Par ailleurs, si réforme du panier de soins il devait y avoir, nous souhaiterions que les professionnels de santé y soient étroitement associés. Ces derniers ne sauraient en effet être exclus d’une réforme qui serait non pas d’abord politique, mais de santé publique.
J’en viens aux autres crédits de la mission « Santé ». Restent un peu plus de 320 millions d’euros de crédits pour les deux autres programmes, qui passeraient à 270 millions d’euros si l’amendement n° II-577 déposé par le Gouvernement était adopté.
Madame la ministre, vous proposez de baisser de 40 millions d’euros les crédits du programme 379. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur cette ligne budgétaire ?
Quant au programme 204, vous prévoyez de l’amputer de 10 millions d’euros, alors que ses crédits étaient déjà fortement en baisse. Le budget de l’Inca est stable, mais toujours insuffisant pour couvrir ses charges de fonctionnement, alors qu’il a déjà pâti d’une annulation de crédits de 260 000 euros par décret en février dernier. Cette amputation de crédits nous inquiète, madame la ministre, car la prévention est l’une des clefs de la transformation de notre système de santé et un investissement pour l’avenir.
Nous attendons donc beaucoup du débat, et déterminerons nos votes selon le sort des différents amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe du RDSE. – Mme Patricia Schillinger applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM Bernard Fialaire et Daniel Chasseing applaudissent également.)
Mme Nadia Sollogoub. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2025 étant composée de trois programmes disparates placés sous des autorités de tutelle différentes, on peine à en voir émerger une stratégie globale lisible. En tout état de cause, il est complexe de faire la synthèse d’une telle mission.
Le projet annuel de performances (PAP) de cette mission, annexé au présent PLF pour 2025, présente pourtant l’amélioration de l’état de santé de la population et la réduction des inégalités territoriales et sociales de santé comme les objectifs principaux de celle-ci. Pour atteindre ce second objectif, le PAP retient deux indicateurs principaux : le pourcentage de la population de 16 ans et plus se déclarant en bonne et très bonne santé générale et l’espérance de vie en bonne santé, à la naissance et à 65 ans, différenciée par sexe.
Je tiens à dire d’emblée que ces indicateurs de performance ne me semblent pas à la hauteur de l’ambition affichée, madame la ministre. Dans un esprit de sincérité et d’efficacité, ces indicateurs devraient refléter les différences territoriales d’accès aux soins, qui sont réelles. Pour cibler l’action publique au plus juste, ce qui n’implique pas nécessairement de dépenser davantage, il convient en effet d’améliorer l’identification et la mesure de ces inégalités.
J’estime également qu’il serait dangereux de considérer la mission « Santé », tel un vaste « fourre-tout » à la Prévert, à la fois comme une variable d’ajustement budgétaire et comme le cache-misère de certains renoncements des politiques publiques.
Cela étant posé, je souhaite évoquer devant vous certains points saillants qui me semblent essentiels, mes chers collègues.
Le premier a trait à la prévention.
Depuis toutes les travées de cet hémicycle, les commissaires des affaires sociales ont largement insisté sur l’absence d’une réelle politique de prévention dans le projet loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. S’agissant de l’un des champs d’action prioritaires du programme 204 de la mission « Santé », il serait cohérent d’y trouver certains financements qui manquent ailleurs. Or les crédits de ce programme diminuent sensiblement cette année, selon une trajectoire qui ne se redressera pas à court terme. Les acteurs de la santé considèrent pourtant unanimement que le meilleur investissement est la prévention sous toutes ses formes, ce qui paraît de bonne logique, madame la ministre.
La prévention recouvre également la maîtrise des risques sanitaires et les outils d’anticipation et de gestion des crises. Au sortir d’une crise sanitaire majeure, on aurait pu imaginer ne pas faire d’économie sur de telles actions.
Comme pour la mission « Santé » dans son ensemble, je suis également surprise par le choix et la présentation des indicateurs de performance qui ont été retenus pour le programme 204. L’objectif premier de ce programme – je le rappelle – est « d’améliorer l’état de santé de la population et de réduire les inégalités territoriales et sociales de santé ». Or les indicateurs retenus sont le taux de couverture vaccinale contre la grippe, le taux de participation au dépistage organisé du cancer colorectal et la prévalence du tabagisme quotidien.
La réduction des inégalités territoriales et sociales de santé doit pourtant être prise en charge de façon urgente et prioritaire, ce qui suppose à mon sens d’adopter une autre grille de lecture et d’autres indicateurs de performance pour rendre lisible une réalité qui devient alarmante et qui est une immense source de colère pour nos concitoyens.
Les actions du programme 204, dans leur grande diversité, me paraissent toutes prioritaires et dignes d’être soutenues de façon pérenne. Je souhaite attirer particulièrement votre attention sur le soutien aux associations de personnes atteintes de maladies neurodégénératives et, dans le contexte démographique qui est le nôtre, aux maladies liées au vieillissement en général.
Je souhaite également faire un focus sur la prise en charge des maladies rares ou chroniques, comme la fibromyalgie, la maladie de Lyme et le covid long, qui ne doivent pas sortir des radars. Les victimes de ces pathologies, qui, pour certaines, vivent un véritable calvaire, sont un défi pour notre système de santé, tant sur le plan financier que pour l’organisation des soins. Il faut y faire face.
La lutte contre le cancer constitue un autre défi que nous devons relever. Tout en me félicitant du soutien apporté à l’Inca, je souhaite rappeler que la mise en place d’un registre général des cancers est un impératif pour la recherche, comme le rappelle du reste une récente étude de l’Académie nationale de médecine.
Le Sénat a adopté à l’unanimité la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers de notre collègue Sonia de La Provôté, qui nous permettrait de disposer non plus seulement d’une extrapolation, forcément imprécise, mais d’un recensement exhaustif des cas sur l’ensemble du territoire national.
Le programme 204, dans la diversité de ses actions, étant celui qui a subi le coup de rabot le plus sévère, il a fait l’objet de l’essentiel de mon analyse.
Mon deuxième point concerne l’AME.
Je souscris aux propos de notre rapporteure pour avis, qui estime qu’une simple augmentation du volume d’un tel dispositif sans stratégie n’aurait pas de sens et ne ferait qu’augurer un dérapage budgétaire incontrôlable.
Étant rapporteur pour avis du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », je mesure que seuls une réelle articulation des politiques publiques entre elles et un accompagnement social solide et structuré dans le temps permettent aux publics les plus fragiles de sortir par le haut de leur condition de dépendance et de se prendre en charge de manière autonome.
Tout en étant profondément attachée à l’aide médicale de l’État dans son sens le plus large et le plus universel, et considérant que les recentrages doivent être appliqués avec la plus grande prudence, je souhaite que cette aide garde sa vocation transitoire et qu’elle reste un filet de protection, sans devenir un mal chronique.
J’estime que l’amendement de notre rapporteure pour avis visant à adapter le régime de prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes dans le cadre de l’AME va dans ce sens.
Avec toutes les réserves et les points de vigilances qui ont été évoquées, le groupe Union Centriste votera les crédits de la mission « Santé », en rappelant, une fois de plus, que la prévention et la réduction des inégalités d’accès aux soins doivent rester des objectifs prioritaires et ne doivent en aucun cas devenir des variables d’ajustement budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de cette mission sont marqués par un sous-financement des actions de santé publique et par des coupes à l’aveugle, qui abîmeront des acteurs se démenant bien seuls pour faire face à l’absence de politique de prévention et d’éducation à la santé.
Ces crédits ont été l’occasion d’un énième débat autour de l’aide médicale de l’État, puisque, une nouvelle fois, l’existence et le périmètre de ce dispositif sont remis en cause, ce qui confine pour certains à l’idée fixe.
Rappelons qu’en 2019 le rapport de l’inspection générale des affaires sociales, intitulé L’aide médicale d’État : diagnostic et propositions, indiquait clairement qu’« une réduction du panier de soins de l’AME paraît peu pertinente, y compris dans une perspective de diminution de la dépense publique ».
Le rapport Évin-Stefanini a également confirmé l’utilité de l’AME et indiqué que son abandon au profit d’autres dispositifs imaginés dans cette enceinte aurait pour triple conséquence une dégradation de la santé des personnes concernées, un impact sur la santé publique et une pression accentuée sur des établissements de santé, qui n’ont pas besoin de cela.
L’AME est soumise à des conditions de ressources renforcées année après année. Elle ne couvre par ailleurs qu’un panier de prestations limité.
Seule la moitié des bénéficiaires potentiels ont aujourd’hui recours à l’AME, pour un coût total qui représente seulement 0,37 % des dépenses courantes de santé.
La réduction du périmètre du panier de soins est enfin dénoncée par l’ensemble des médecins, qui alertent sur les conséquences qu’elle pourrait emporter en matière de retard, et partant, d’alourdissement des soins comme du coût de leur prise en charge.
La réduction du panier de soins de l’AME est donc une opération de communication assez malsaine plutôt qu’une véritable option.
Comme si cela ne suffisait pas, la mission « Santé » subit de plus des coupes budgétaires. Selon l’OCDE, en consacrant seulement 1,9 % de ses dépenses de santé à la prévention, la France compte pourtant déjà parmi les pays de l’Union européenne qui y consacrent la part la plus faible de leurs dépenses de santé. Le coût des soins curatifs étant beaucoup plus lourd que celui des soins préventifs, il s’agit d’un non-sens tant sanitaire que financier.
Je souhaite enfin dénoncer la baisse de 1 million d’euros de l’enveloppe allouée aux actions d’information des personnes susceptibles d’avoir été victimes de la Dépakine, de sorte que celles-ci puissent saisir l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam).
En septembre dernier, le tribunal judiciaire de Paris a déclaré Sanofi responsable d’un défaut d’information relative aux risques neurodéveloppementaux et de malformation liés à l’usage de la Dépakine, produit que ce laboratoire a non seulement commercialisé, mais maintenu en circulation alors qu’il le savait défectueux.
Selon les estimations des autorités sanitaires, cette molécule serait responsable de malformations chez 2 150 à 4 100 enfants, et de troubles neurodéveloppementaux chez 16 000 à 30 000 enfants.
Depuis une dizaine d’années, Sanofi multiplie les recours juridiques, ce qui a conduit l’État à indemniser les victimes à sa place. Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky (CRCE-K) estime qu’il convient de maintenir les crédits alloués à l’information des victimes, car de nombreux malades n’ont pas encore accompli les démarches d’indemnisation.
Nous ne pouvons donc que regretter le détournement du débat sur les crédits de la mission « Santé » au profit d’enjeux politiciens. Ces crédits étant largement insuffisants pour répondre aux besoins de santé publique, mon groupe ne les votera pas. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Anne Souyris. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2025 est placé sous le signe de l’inédit.
Inédit institutionnel d’abord, alors que dans deux jours, l’Assemblée nationale examinera une motion de censure qui entraînera vraisemblablement, pour la deuxième fois sous la Ve République, la chute d’un gouvernement.
Inédit ensuite, car l’avenir du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 et du présent projet de loi de finances est plus que jamais incertain, suspendu au vote de cette motion de censure et aux événements qui suivront.
Inédit enfin, car répondant à l’appel du pied de l’extrême droite, la droite républicaine attaque l’aide médicale de l’État.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
Mme Anne Souyris. Ah non, au contraire !
Pour obtenir l’assentiment du Rassemblement national et sauver sa place, le Premier ministre a donc annoncé qu’il souhaitait réduire « sensiblement » le panier de soins pris en charge par l’AME. Il y a deux mois, vous aviez pourtant expliqué qu’il n’était pas question de toucher à l’AME, madame la ministre.
Je m’étonne donc de ne pas vous avoir encore entendue réagir aux propos du Premier ministre. L’année dernière, l’un de vos prédécesseurs avait été jusqu’à démissionner lorsque son gouvernement avait fait sauter ce cordon sanitaire.
M. Bernard Jomier. Il avait du courage.
Mme Anne Souyris. Et huit de vos prédécesseurs ont depuis lors appelé à ne pas affaiblir le dispositif de l’AME.
Chers collègues, combien de fois faudra-t-il le rappeler, chiffres à l’appui ? l’aide médicale de l’État ne crée aucun appel d’air. L’AME permet aux étrangers présents sur le territoire de la République d’être soignés. Et encore, cela fonctionne difficilement, car le taux de non-recours est de 40 %, ce qui est un problème. Il s’agit du pilier sanitaire de notre fraternité.
Lorsque l’Assemblée constituante de 1789 a édifié le droit au secours à l’indigent malade, elle n’a pas fait de distinction entre Français et étrangers.
M. Roger Karoutchi. Il n’y avait presque pas d’étrangers !
Mme Anne Souyris. Et depuis que l’aide médicale de l’État existe, aucune dérive n’a été constatée, loin de là. MM. Évin et Stefanini ont montré à quel point l’accès à ce droit était précieux et essentiel en matière de santé publique.
Cette année, sur fond de dérive des comptes publics, vous arguez du bien-fondé d’une diminution du panier de soins de l’AME pour les finances de notre pays. Au contraire, votre proposition fragilisera encore les comptes des hôpitaux. Dois-je vous rappeler le serment d’Hippocrate ? « Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. » Si vous réduisez l’AME, les permanences hospitalières d’accès aux soins continueront d’apporter leur secours aux sans-papiers, quitte à « désobéir » à votre idéologie, comme s’y sont engagés 3 500 médecins signataires d’un appel en ce sens, en novembre dernier.
Que se passerait-il alors pour les hôpitaux ? Leurs comptes enregistreraient un déficit supplémentaire. En 1993, 12 % de leur budget annuel était dû au séjour non financé des patients étrangers sans couverture.
Non, vous n’y pouvez rien. Les médecins continueront de soigner, avec ou sans AME, et je les en remercie. Réduire ou supprimer l’aide médicale de l’État n’aurait pour conséquence que de déshumaniser et de désorganiser encore davantage notre système de soins. Alors que vous appelez à la simplification administrative, vous proposez d’ajouter un contrôle supplémentaire pour l’accès à certaines opérations, comme celle de la cataracte, la pose de prothèses de genou et d’épaule, et d’implants auditifs, ou les interventions sur le canal carpien.
Vous voulez donc que la République restreigne aux étrangers présents sur son territoire le droit de voir, d’entendre et de bouger. C’est une interprétation bien étrange de l’accueil et du soin ; en tout cas, ce n’est certainement pas la nôtre.
Aussi, les élus du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’opposent à votre proposition visant à restreindre l’AME, car elle manque d’humanisme et n’est pas étayée. Ils défendront,…
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Anne Souyris. … le maintien des budgets des programmes de santé publique de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l’accès aux soins. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, les crédits de la mission « Santé » du PLF constituent, avec ceux du PLFSS, la traduction budgétaire de notre politique globale de santé et d’accès aux soins.
Cette politique, nous la définissons dans le cadre de notre stratégie nationale de santé par trois grands objectifs : poursuivre et amplifier nos politiques de prévention pour améliorer la santé de tous les Français ; garantir un accès aux soins de qualité dans tous les territoires et à tous nos concitoyens ; assurer la sécurité sanitaire pour protéger nos concitoyens contre les différents risques, à l’instar des menaces épidémiologiques. Depuis 2017, les gouvernements successifs ont agi en vue d’atteindre ces objectifs et nous souhaitons poursuivre dans cette voie en accentuant notre action en 2025.
Pour cela, les crédits de la mission « Santé » pour 2025 s’élèvent à 1,64 milliard d’euros. Certes, cela équivaut à une diminution de 40 % en crédits de paiement du budget de la mission par rapport à 2024, mais sans correspondre pour autant à une baisse de nos ambitions.
Cette réduction découle principalement de l’évolution des paiements réalisés au titre du programme 379 « Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet “Ségur investissement” du plan national de relance et de résilience (PNRR) ». Ce programme budgétaire, temporaire est en forte diminution pour 2025, parce que, d’abord, le PNRR et sa composante Ségur investissement sont en voie d’achèvement et que, ensuite, le dispositif transitoire de compensation pour la branche maladie de la perte de recettes engendrée par la baisse d’un point de cotisation au titre de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) n’a pas été reconduit en 2025.
Le Gouvernement s’est engagé, compte tenu de la situation de nos finances publiques, à déposer des amendements dont vous aurez à débattre dans toutes les missions, afin de diminuer de 5 milliards d’euros les crédits par rapport au PLF initial.
Dans ce cadre, les crédits du programme 379 seront diminués de 40 millions d’euros. Je tiens à préciser que cette baisse ne signifie pas que nous souhaitons arrêter de financer le Ségur investissement. Les remboursements et les paiements à la sécurité sociale au titre de ce programme seront simplement lissés par rapport à la prévision initiale. Nous avons pris cette décision en faisant preuve de responsabilité.
En ce qui concerne le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », les crédits budgétaires s’élèvent à près de 221,7 millions d’euros en crédits de paiement. Cela équivaut à une diminution de 18 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Cette évolution résulte essentiellement de la dynamique tendancielle de la dépense, liée en particulier à l’appel à projets européen RescUE, un dispositif innovant visant à constituer des stocks à l’échelon européen en cas de crise pour se prémunir et agir contre les risques. En effet, un nouvel appel à projets avait été lancé en 2024, pour lequel le besoin était de plus de 40 millions d’euros ; le projet étant dans sa deuxième année en 2025, le besoin est mécaniquement moindre.
Le Gouvernement procédera également, par voie d’amendement et dans un esprit de responsabilité, à une diminution de 10 millions d’euros des crédits du programme 204. Cela constitue le pendant de l’effort réalisé sur le programme 379. Ainsi, par ce double effort, la mission « Santé » contribuera à hauteur de 50 millions d’euros à la réduction supplémentaire de 5 milliards d’euros de la dépense publique.
Je resterai, néanmoins, particulièrement attentive à ce que cet effort ne nous conduise pas à revoir notre ambition à la baisse.
C’est pourquoi le programme 204 servira à financer une action visant à renforcer encore davantage l’efficacité et l’efficience de notre système de santé, tout en poursuivant et en amplifiant nos politiques de prévention.
La prévention est un impératif de santé publique pour répondre aux enjeux démographiques et épidémiologiques auxquels nous sommes confrontés. Aussi, dans le cadre de ce programme, nous orientons nos efforts vers quatre objectifs.
Le premier est de continuer à renforcer la prévention et le repérage à tous les échelons et avec tous les acteurs. Nous veillons à financer pour cela l’Institut national du cancer et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.
Notre deuxième objectif est de poursuivre la promotion de la recherche et la mobilisation des connaissances scientifiques. Les appels à projets de recherche en santé publique seront particulièrement ciblés sur la prévention, les services de santé de proximité et la performance des parcours de santé. Nous continuerons de travailler à une meilleure utilisation des bases de données existantes, pour élaborer des programmes et des actions de prévention plus performants. Notre volonté est de sensibiliser différemment les publics en fonction de chacun d’eux et de porter des messages adaptés afin d’améliorer les actions de prévention.
Je le répète, la prévention est un pan majeur de la politique que nous devons mettre en œuvre et j’ai bien entendu les propos que vous avez tenus sur ce sujet : les actions de prévention ne sont pas assez individualisées et, surtout, les budgets qui y sont consacrés dans le PLFSS et dans le PLF ne sont pas assez importants. Dans les mois et les années à venir, nous devrons faire de la prévention un pilier budgétaire plus lisible et, surtout, mieux construit.
Notre troisième objectif est, bien évidemment, de renforcer nos actions ciblées sur l’anticipation des risques, la prévention et la lutte contre les vecteurs de maladie pour améliorer notre gestion des crises sanitaires et des situations d’urgence. Nous adapterons, en effet, des doctrines sanitaires de préparation et d’intervention, nous renforcerons la formation des agents et nous prioriserons la réalisation d’exercices de crise. Nous accorderons aussi une attention particulière au développement des systèmes d’information de veille et de sécurité sanitaire, et à leur maintenance en conditions opérationnelles. C’est une condition majeure pour pouvoir adapter nos réponses le plus rapidement possible en cas de crise sanitaire.
Notre quatrième et dernier objectif sera de poursuivre la démarche de territorialisation de l’organisation des soins et des parcours pour moderniser notre offre de soins. Nous porterons assurément une attention particulière aux territoires d’outre-mer et à l’agence de santé de Wallis-et-Futuna, qui bénéficie des crédits issus du Ségur de la Santé.
L’ensemble des actions conduites au sein du programme 204 s’inscrit dans le prolongement et en complémentarité de celles qui ont été déclinées au sein du PLFSS.
Enfin le programme 183 « Protection maladie » permet d’assurer la protection face à la maladie dans des situations relevant de la solidarité nationale. Ses crédits, qui financent essentiellement l’AME, s’élèvent à près de 1,3 milliard d’euros en crédits de paiement. Comme je l’ai dit, et je le répète devant vous, l’AME a une utilité sanitaire réelle. Sa suppression aggraverait encore davantage la pression sur les services d’urgence et, à plus long terme, entraînerait une hausse de la dépense en soins relevant d’une détérioration de l’état de santé des patients.
L’aide médicale de l’État répond à des objectifs de santé et de salubrité publiques et permet de limiter la propagation de certaines maladies. MM. Évin et Stefanini l’ont souligné dans leur rapport : l’AME est un dispositif de santé publique qui doit continuer de vivre mais qui peut encore être adapté, comme il l’a été à plusieurs reprises. M. le Premier ministre s’y est engagé et je m’y engage également, nous continuerons de faire évoluer et d’améliorer ce dispositif, en nous appuyant sur ce rapport.
Le Premier ministre a indiqué qu’il devait y avoir une maîtrise des dépenses de l’AME, comme de toutes les autres dépenses publiques. Nous devons donc tendre vers cela et, dans un contexte qui impose un effort collectif, l’AME ne fera pas exception.
J’entends bien qu’il s’agit d’un totem politique (Mme Véronique Guillotin hoche la tête en signe d’assentiment.) plus que d’une action concrète que nous déciderions de mettre en œuvre de façon concertée et, surtout, en considérant qu’elle est utile pour l’état sanitaire de notre pays, mais, je vous en conjure, faisons preuve de bon sens, prévoyons les budgets suffisants pour répondre aux besoins sanitaires. C’est ainsi que nous serons utiles non seulement aux personnes qui bénéficient de l’AME, mais aussi à l’ensemble des Français. Je vous invite donc à faire preuve de responsabilité.
Nous continuerons, bien sûr, nos efforts en matière de contrôle lors de l’attribution des droits et aussi a posteriori, afin d’améliorer l’efficacité de notre politique de lutte contre la fraude.
Je viens de vous le démontrer, la mission « Santé » porte l’ambition de développer la prévention, de poursuivre l’action engagée en matière de sécurité sanitaire, et d’organiser une offre de soins de qualité pour tous et partout.
Je serai attentive aux débats qui interviendront dans le cadre de l’examen des amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées des groupes UC et du RDSE.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures et quarante-cinq minutes.
En conséquence, nous devrons terminer l’examen de cette mission aux alentours de dix-sept heures cinquante-cinq avant de passer à celui de la mission « Immigration, asile et intégration ».
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Santé », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Santé |
1 651 091 790 |
1 643 321 770 |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins |
229 499 664 |
221 729 644 |
dont titre 2 |
700 000 |
700 000 |
Protection maladie |
1 327 592 126 |
1 327 592 126 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
94 000 000 |
94 000 000 |
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-36 est présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-249 est présenté par Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
SOLDE |
-200 000 000 |
-200 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-36.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Nous attaquons le débat en examinant un amendement dont l’objet porte sur l’aide médicale de l’État. Nous commençons par la fin, si j’ose dire, parce que cet amendement vise à tirer les conséquences d’amendements de fond portant article additionnel qui seront examinés plus tard et dont l’objet est de prendre en considération les conclusions du rapport Évin-Stefanini.
Dans la mesure où il n’est pas question dans ce rapport de supprimer l’aide médicale de l’État, ce n’est pas non plus ce que je proposerai au travers de cet amendement. En revanche, les auteurs du rapport préconisent de revoir certaines règles, notamment l’accord préalable de l’assurance maladie pour les cas non urgents ainsi que le panier de soins non urgents.
Il est vrai que l’amendement que nous examinons, si nous le considérons indépendamment de ceux dont nous discuterons ultérieurement, pourrait passer pour un amendement de nature purement budgétaire, visant une économie de 200 millions d’euros.
Je rappelle que, dans le budget qui nous est soumis, les crédits de l’AME connaissent une hausse de 9,2 %. Or il n’y a pas de raison de ne faire aucun effort pour rationaliser ces dépenses. Elles sont certes nécessaires pour préserver la santé publique, mais elles doivent être regardées de près et nous gagnerions à mettre en œuvre les préconisations du rapport. La ministre vient d’ailleurs de rappeler que le Gouvernement s’était engagé à améliorer le dispositif de l’AME.
Tel est aussi l’objet de cet amendement de diminution des crédits de 200 millions d’euros. Si nous choisissons de ne rien changer et d’en rester à ce qui était prévu initialement, cela ne fera qu’accroître la dette de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale. Nous pouvons faire une économie de 200 millions d’euros en modifiant sur le fond un certain nombre de règles.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour présenter l’amendement n° II-249.
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. Mon collègue a parfaitement défendu cet amendement, qui vise à tirer les conséquences budgétaires de l’extension de l’obligation d’accord préalable de l’assurance maladie et de la révision du panier de soins non urgents.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, nous aurions pu être favorables à certains amendements minorant les crédits de 108 millions d’euros, ce qui aurait ramené le budget de l’AME à son niveau de 2024, mais les débats n’ont pu avoir lieu.
Encore une fois, le budget de l’AME doit participer, comme tous les autres, à l’effort national de rationalisation des dépenses. Le Premier ministre s’est engagé à améliorer le dispositif de prise en charge des bénéficiaires et le rapport Évin-Stefanini ouvre des pistes pour cela. Nous mettrons en œuvre ces propositions, le plus rapidement possible. Nous avons déjà commencé à y travailler avec le ministre de l’intérieur et les services du Premier ministre, de manière à préserver une certaine cohérence. En effet, même si nous diminuons les crédits, il faut que nous puissions tenir notre engagement. Notre travail doit être efficace sans pour autant perdre de vue les besoins sanitaires de notre pays. J’y serai, quant à moi, toujours très attentive.
Avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Je reprendrai vos propres propos, madame la ministre : vous vous êtes déclarée opposée à la suppression de l’AME et vous avez même dit qu’il s’agissait d’un totem politique. En effet, c’est le cas !
Le Premier ministre a répondu, aujourd’hui ou hier, à l’exigence du Rassemblement national et de Mme Le Pen, qui demandaient une réduction des crédits de l’AME non pas de 100 millions d’euros, mais de 200 millions d’euros. Et il a accepté cette exigence !
Madame la ministre, n’est-ce pas contradictoire avec vos propos, auxquels nous pourrions d’ailleurs tout à fait souscrire, quand vous défendez l’intérêt de l’AME et de l’accompagnement de ceux qui ont besoin de soins lorsqu’ils sont dans notre pays ? Vous refusez qu’on y touche, mais supprimez 200 millions d’euros de crédits. La diminution de la prise en charge affectera les services publics de santé, notamment les hôpitaux.
Je veux dénoncer la contradiction qui caractérise vos propos, qui évoluent d’un jour à l’autre. Je le dis solennellement : cela démontre le mépris total du Gouvernement à l’égard du Parlement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, puisqu’il y a eu un rapport, vous devez certainement savoir que depuis 2019 l’augmentation du budget de l’AME est corrélée à l’augmentation du public suivi, notamment du nombre de mineurs non accompagnés (MNA). Vous voulez geler la ligne budgétaire quand la population concernée augmente : en réalité, c’est déjà une baisse de crédits !
À l’appui de cette réduction budgétaire, vous proposez l’accord préalable de l’assurance maladie. Vous savez très bien que cela ne suffira pas ; cela ne fera qu’ajouter du travail administratif pour l’assurance maladie. En réalité, cette réduction ne sera possible que si vous diminuez de manière draconienne le panier de soins, c’est-à-dire si vous augmentez le périmètre des actes exclus du dispositif. Comme vous le ferez par décret, c’est-à-dire par voie réglementaire, nous allons voter à l’aveugle une baisse des crédits de 200 millions d’euros et la réduction du panier de soins se fera sans autre rationalité…
Vous répondez ainsi à une injonction de l’extrême droite, en vous réclamant de ce que vous appelez l’« acceptabilité sociale » et le Sénat, lui, devait répondre à une injonction du Gouvernement, qui nous demandait de geler cette action. La majorité sénatoriale, en bonne élève, accepte cette réponse de la droite à l’extrême droite et propose même d’aller au-delà ! J’espère que vous conviendrez, madame la ministre, que le Sénat est le partenaire du Gouvernement…
D’autres propositions figurent pourtant dans ce rapport mais dont vous ne tenez pas compte. Elles portaient notamment sur la mise en place d’un examen médical afin de définir, pour chaque MNA, des objectifs de santé publique.
Nous ne pouvons que nous opposer à cette baisse des crédits. D’autant que…
Mme la présidente. Il faut conclure.
Mme Raymonde Poncet Monge. … le taux de non-recours est de 40 %.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Tout d’abord, il est contre-intuitif d’examiner l’amendement qui vise à couper les crédits de l’AME avant d’examiner celui par lequel vous proposez un nouveau cadrage de la dépense.
Ensuite, pourquoi 200 millions d’euros ? Mes collègues viennent de l’expliquer : ce montant correspond à la demande du Rassemblement national. Par conséquent, le Gouvernement donne suite à la demande de Marine Le Pen. Pourtant, il y a quelques jours, le Premier ministre parlait d’une réduction « sensible » du panier de soins et le même Premier ministre avait initialement présenté un budget où les crédits de l’AME étaient maintenus. Je ne crois pas qu’il ait soudain pris conscience, en une semaine, de la nécessité de modifier le périmètre de l’AME ; en revanche, cela a suffi pour que Mme Le Pen fasse monter la pression. Nous l’avons encore vu cet après-midi, alors que le Gouvernement, dans le cadre de l’examen du PLFSS à l’Assemblée nationale, a fait une ultime concession, dans un communiqué qui ne s’adresse qu’aux élus du Rassemblement national, seul groupe politique qui est cité.
M. Jean-Jacques Panunzi. C’est le groupe majoritaire à l’Assemblée nationale !
M. Bernard Jomier. Voilà où l’on en est ! Et voilà où vous en êtes, mes chers collègues ! Mes chers collègues du groupe centriste, vous vous pliez aux demandes du Rassemblement national. (Protestations sur les travées du groupe UC.)
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas vrai !
M. Bernard Jomier. Vous nous expliquerez la cohérence de votre raisonnement en matière sanitaire. Les institutions sanitaires ne sont pas toutes infiltrées par des gauchistes, je vous rassure, mais elles disent toutes que cette mesure est un non-sens non seulement sanitaire, mais aussi économique. Le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) a même conclu dernièrement que cela finirait par nous coûter plus cher.
Mais vous balayez tous ces arguments objectifs, qu’ils soient sanitaires ou financiers, et vous ne voulez pas en tenir compte, car seule importe la posture politique. Celle-ci consiste à laisser entendre que l’AME serait un outil d’appel à l’immigration clandestine.
Mme Catherine Belrhiti. Eh oui !
M. Bernard Jomier. Mais non !
Mme Catherine Belrhiti. Mais si !
M. Bernard Jomier. Tous les rapports objectifs montrent pourtant que ce n’est pas le cas. Je regrette que l’on en vienne, dans la Haute Assemblée, à discuter non plus des faits mais des opinions. Je respecte les opinions, mais je n’ai aucun respect pour ceux qui substituent au débat d’opinions une remise en cause des faits. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Madame la ministre, je m’adresse à vous, car cela fait des années que nous avons ce débat sur la réduction des crédits de l’AME avec nos collègues du groupe Les Républicains, qui auront enfin obtenu de votre part ce que tous les gouvernements leur refusaient. Quant aux collègues macronistes, ils ne sont pas suffisamment nombreux à être présents pour que je puisse les interpeller… Vous serez donc, madame la ministre, ma seule interlocutrice.
M. Olivier Rietmann. Merci ! Nous pouvons sortir, si vous le souhaitez !
Mme Laurence Rossignol. Le sujet de l’AME n’est pas nouveau. Jusqu’à présent, tous les ministres de la santé, sans exception, se sont opposés à ce que l’on touche au dispositif. Il fallait bien qu’il y en ait une qui finisse par l’accepter ! Je ne pensais pas que ce serait vous, madame la ministre, car vous êtes médecin (M. Bernard Jomier approuve.), mais c’est ainsi.
L’enjeu est-il de santé publique ? Certainement pas. Il ne s’agit pas de la santé des personnes étrangères vivant en France et encore moins de celle des Français. C’est une affaire de phéromones, celles que votre gouvernement envoie à Marine Le Pen et à ses électeurs pour les séduire, pour les attirer, pour leur dire : « Soyez gentils avec nous, donnez-nous encore un peu de répit. ». (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Et qui fera les frais de ce répit que vous cherchez à obtenir ? Ce seront la santé publique et les étrangers qui vivent en France.
Mme Catherine Belrhiti. Seulement les étrangers en situation irrégulière !
Mme Laurence Rossignol. Vous le savez et vous l’avez même dit dans le passé : ce n’est pas sur des faits, mais sur des mensonges, des opinions et sur de l’agitation politique que repose aujourd’hui la remise en question de l’AME.
Nous, socialistes, avons fait d’autres propositions au Premier ministre, mais que nous a-t-il répondu ? Qu’il ne pourrait pas faire passer nos propositions auprès de la majorité macroniste. J’observe donc que ce qui passe mieux auprès des macronistes, ce sont les amendements de l’extrême droite. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Catherine Belrhiti. C’est mesquin !
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes plusieurs à vous dire notre sentiment de honte. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Oui, nous avons honte, mes chers collègues, de ce qui se passe ici.
M. Jean-Jacques Panunzi. Allez avec vos amis de LFI !
M. Patrick Kanner. J’ai assisté à la commission mixte paritaire sur la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration. J’ai vu les petits jeux des uns et des autres…
M. Jean-Jacques Panunzi. Parlons-en !
M. Patrick Kanner. La suppression de l’AME faisait partie du débat, vous le savez. Nous avions résisté et nous avions obtenu gain de cause, alors, mais Mme Borne avait pris l’engagement de rouvrir ce dossier, et c’est vous, madame Darrieussecq qui allez mettre en œuvre cette mesure, vous qui êtes médecin. Tout cela pour quoi ? Pour 200 millions d’euros sur un budget de la sécurité sociale de 662 milliards d’euros.
M. Stéphane Piednoir. Ce n’est rien, c’est la sécu qui paie ! C’est gratuit !
M. Patrick Kanner. C’est pour ce prix que vous céderez à l’extrême droite française dans cette négociation, pour aboutir, d’ailleurs, à une censure potentielle. Pour paraphraser Churchill, vous aurez la censure et le déshonneur. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je le regrette pour notre pays et pour un système de valeurs que nous défendons depuis longtemps. Vous mettez à bas l’héritage du Conseil national de la Résistance et de la sécurité sociale. (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Jacques Panunzi. Vous n’êtes pas à la hauteur.
M. Roger Karoutchi. L’AME n’existait pas, c’est n’importe quoi !
Mme Pascale Gruny. Le budget de l’AME reste stable !
M. Patrick Kanner. Cela vous gêne que je vous le dise, mes chers collègues de droite, mais c’est bien de cela qu’il s’agit. Vous commencez à démanteler cet héritage, que vous vous montrez pourtant si prompts à défendre, officiellement.
Ce vote est un symbole. Nous avons demandé un scrutin public pour que chacun puisse s’engager et comprendre à quelle responsabilité il fait face aujourd’hui.
M. Roger Karoutchi. Nous aussi, nous avons demandé un scrutin public.
M. Patrick Kanner. Nous serons, nous, dans l’honneur et dans la défense d’un système de sécurité sociale que nous avons toujours défendu dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Jean-Jacques Panunzi. Avec LFI !
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Buval, pour explication de vote.
M. Frédéric Buval. Il faut sortir des illusions sur le rôle de pompe aspirante que jouerait l’AME en matière d’immigration. Nous avons un bon exemple avec Mayotte : pas d’AME et pourtant c’est le territoire de la République le plus touché par l’immigration. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Très bien.
M. Frédéric Buval. Pas moins de 31 401 migrants ont été interpellés en 2023 dont 24 497 ont été reconduits à la frontière. L’absence de l’AME a pour conséquences un hôpital surchargé, au bord de la rupture, et des moyens financiers qui font défaut. Voilà un bon exemple des conséquences catastrophiques que subit un territoire en l’absence d’AME. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, GEST et SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Premièrement, est-ce que nous nous alignons sur l’extrême droite ? Je rappelle que j’ai fait voter, au Sénat, un amendement visant à réduire l’AME en aide médicale d’urgence (AMU) en 2016. À l’époque, il n’y avait ni péril d’extrême droite, ni montée de tel ou tel mouvement, ni menace de motion de censure. Ne nous faites donc pas un procès absurde. Dites simplement que nous ne sommes pas d’accord sur la gestion de l’AME, mais cela n’a rien à voir avec les équilibres politiques d’aujourd’hui.
Deuxièmement, je vous ai entendu invoquer 1789. À l’époque, sur les 28 millions d’habitants que comptait notre pays, il n’y avait que 50 000 étrangers non déclarés. Pardonnez-moi de vous le dire, mes chers collègues, mais le problème ne se posait pas dans les mêmes termes.
En définitive, je ne comprends pas ce débat. Car, en réalité, les choses sont simples : le rapport Évin-Stefanini, ainsi qu’un certain nombre d’autres rapports d’ailleurs, a recommandé non pas de supprimer l’AME, mais de revoir le panier de soins auquel elle permet d’accéder. Cela signifie que l’on ne peut pas continuer à financer une aide médicale de l’État dont les dépenses progressent de manière ininterrompue depuis des années.
En 2016, lorsque j’ai déposé mon amendement visant à la transformer en AMU, l’AME représentait un coût d’environ 700 millions d’euros. Alors membre de la commission des finances, je me souviens d’avoir dit à la ministre des affaires sociales de l’époque, Marisol Touraine : « Avec tout le respect que je vous dois, madame la ministre, le milliard d’euros sera atteint d’ici trois à quatre ans ! ». Celle-ci m’avait aussitôt répondu : « Jamais, monsieur le sénateur ! Vous vous trompez lourdement : nous allons évidemment mettre en place des mécanismes d’encadrement de la dépense ».
Mes chers collègues, le coût de l’AME s’élève aujourd’hui à plus de 1,3 milliard d’euros au total… Dans ces conditions, il me semble que l’on peut discuter calmement du sujet et proposer de revoir le panier de soins accessible aux bénéficiaires de cette aide, sans se jeter à la tête, mon cher collègue Patrick Kanner, pour qui j’ai par ailleurs de l’estime, des mots comme « déshonneur » ou « honte ».
Mme Catherine Belrhiti. Tout à fait !
M. Roger Karoutchi. Nous verrons bien si cette mesure prospérera en commission mixte paritaire, dans l’hypothèse, évidemment, où ce gouvernement est toujours en place.
En tous les cas, il faut cesser ces exclusives totalement absurdes ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme la rapporteure pour avis et M. Bernard Fialaire applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. En effet, nous devons être capables de discuter de l’AME, tout en restant pondérés et pragmatiques et en évitant les postures politiques.
Mme Laurence Rossignol. Mais c’est politique !
Mme Véronique Guillotin. Tout de même, ma chère collègue…
En tout état de cause, la situation actuelle n’est plus celle d’il y a dix ou quinze ans. Comme chacun a pu le constater durant les débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi que depuis le début de l’examen de ce projet de loi de finances, nos marges de manœuvre budgétaires sont contraintes, ce qui a obligé les uns et les autres – ce n’est pas de gaieté de cœur – à faire des concessions et à réclamer des efforts à tout le monde, y compris à ceux qui bénéficient de l’assurance sociale dans notre pays.
Je ne trouve ni immoral ni inhumain de considérer qu’il est tout à fait normal de débattre des crédits de l’AME, de la manière que nous discutons de toutes les dépenses inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ou le projet de loi de finances. Je ne saisis pas ce qu’il y aurait de déshonorant pour Mme la ministre, parce qu’elle serait médecin, à voir les choses ainsi.
À titre personnel, j’émets des doutes sur le niveau de la baisse des crédits, je ne sais pas si la mesure annoncée permettra réellement d’économiser 200 millions d’euros, mais, quoi qu’il en soit, il me semble normal, voire nécessaire, de mieux contrôler les dépenses d’AME.
D’ailleurs, le rapport Évin-Stefanini – auquel on fait dire un peu tout et son contraire cet après-midi – ne dit pas autre chose. Ce rapport n’est ni de droite ni de gauche – il est, disons, transpartisan (M. Roger Karoutchi approuve.) –, et il recommande lui aussi cette proposition. Il suggère d’ailleurs aussi d’étendre le dispositif dans d’autres directions.
Sur la forme, je regrette que la réflexion sur une réforme de l’AME n’ait pas été menée dans l’intervalle qui séparait l’examen du précédent projet de loi de finances et la discussion de celui-ci ; sur le fond, je suis favorable à ce que l’on travaille à l’extension du recours à l’accord préalable.
Pour ma part, je m’abstiendrai sur ces amendements identiques, car, je le redis, je m’interroge sur le montant de la minoration visée, sur ces 200 millions d’euros, mais, dans tous les cas, je ne vois pas la difficulté qu’il y a à échanger sereinement sur ce sujet. (M. Bernard Fialaire applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.
Mme Ghislaine Senée. Je n’ai aucun problème non plus à parler calmement de cette problématique.
Ce que vous avez oublié de dire, monsieur Karoutchi, c’est que nous vivons une séquence politique inédite : cette annonce d’une baisse des dépenses d’AME découle bel et bien du chantage de Mme Le Pen. Voilà le sujet ! (Marques d’agacement sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. Mais pas du tout !
M. Bernard Jomier. Mais si !
Mme Ghislaine Senée. En outre, on oublie aussi de dire que cela fait une semaine que l’on bataille ici, au Sénat, pour trouver de nouvelles recettes, pour faire voter des amendements de taxation de ceux qui ont le plus de moyens. Prenons pour exemple la taxe sur les transactions financières : si le Sénat avait adopté l’augmentation de 0,1 % de son taux, comme nous l’appelions de nos vœux, cela nous aurait rapporté 600 millions d’euros supplémentaires.
Ce que je trouve particulièrement choquant, c’est que l’on en soit arrivé à taper dans le budget de la santé, en visant prioritairement l’AME, parce que c’est un symbole et qu’il s’agit là d’adresser un message politique – qui, de mon point de vue est horrible –, et ce pour économiser quelque 200 millions d’euros. On sait que, par ailleurs, d’autres efforts vont peser sur le budget de la santé, alors même qu’il est question ici de la vie de nos concitoyens.
J’ai une pensée cet après-midi pour tous ceux qui, issus de vos rangs, mes chers collègues de droite, ont défendu l’AME l’an dernier lors des débats sur le projet de loi pour contrôler l’immigration. Ils doivent sûrement traverser un moment difficile, car il va leur falloir avaler un certain nombre de couleuvres.
Je ne voudrais pas non plus être à votre place, madame la ministre. Tout est affaire de symbole : céder face au Rassemblement national, comme vous le faites, est tout simplement scandaleux ! (Mme Anne Souyris et M. Jacques Fernique applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Moi non plus, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas débattre de l’AME.
Comme l’indique le rapport Évin-Stefanini, entre 2015 et 2023, le nombre des bénéficiaires de l’AME a augmenté de 40 %, soit de 125 000 personnes supplémentaires. Cette hausse a évidemment eu pour effet de faire croître les dépenses d’AME.
Le même rapport reconnaît l’utilité de cette aide, mais explore plusieurs pistes d’amélioration, comme la possibilité de revoir une nouvelle fois la composition du panier de soins.
Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’actuellement, au-delà de trois mois de séjour, tous les soins sont remboursés, à l’exception de la procréation médicalement assistée (PMA) et des cures thermales. Il existe certes un délai de carence de neuf mois, mais les frais imputables aux bénéficiaires de l’AME peuvent, dans certains cas et sur accord préalable, être également pris en charge.
Les amendements dont nous discutons ne visent pas la suppression l’AME, mais ont pour objet la mise en place d’un régime d’accord préalable permanent pour la prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes et à certains soins qu’il reste à définir.
Aussi, je ne vois pas bien pourquoi on nous taxe d’extrême droite. Parle-t-on d’une dérive d’extrême droite quand on évoque l’Allemagne, le Danemark ou encore les autres pays où des mesures de ce type ont été mises en place ? Non !
Plusieurs sénateurs sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST. Si, justement !
M. Daniel Chasseing. Nous nous fondons sur le rapport Évin-Stefanini : nous sommes favorables à l’AME, car elle est utile, mais nous plaidons également pour son évolution, car il est désormais nécessaire d’organiser un contrôle permanent des dépenses pour certaines maladies qu’il appartiendra aux autorités médicales et à l’État de déterminer. (Mme Laure Darcos applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Mes chers collègues, je fais partie, comme de nombreux collègues du groupe Union Centriste, de ceux qui ont toujours voté contre la suppression de l’AME.
Ce n’est pas parole d’évangile, mais je veux rappeler, comme je l’ai fait durant nos débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qu’il n’y a pas une indignation de droite contre la fraude sociale et une indignation de gauche contre la fraude fiscale. Vous savez très bien que je me bats sur les deux fronts, contre les deux fraudes, de la même façon ; vous avez pu le constater pas plus tard qu’hier après-midi.
J’estime que la réduction du panier de soins de l’AME est une mesure qu’il nous faut prendre pour réguler un certain nombre d’excès et pour mieux contrôler ce qui peut être considéré comme un recours anormal à cette aide. C’est tout ce que nous demandons à travers ces deux amendements identiques ; il n’est aucunement question de supprimer l’AME. Si tel était le sujet, vous me trouveriez à vos côtés pour m’y opposer.
En outre, je regrette – mais on ne peut pas refaire l’histoire – que les engagements pris par Mme Borne auprès du président Larcher et de l’ensemble des groupes de cette maison n’aient pas été tenus. (Mme Véronique Guillotin opine du chef.) En effet, lors de l’examen du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, la Première ministre de l’époque nous avait promis un projet de loi intégralement consacré à l’AME. Or le Gouvernement n’a finalement pas présenté ce texte, qui aurait pourtant permis, aux uns et aux autres, de revoir l’ensemble du dispositif avant que l’on n’aborde le calendrier contraint et, donc, stressant du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances.
Ce texte est absolument nécessaire, madame la ministre. Si le bon Dieu et Mme Le Pen vous prêtent vie jusqu’à l’année prochaine – c’est tout ce que l’on vous souhaite –,…
Mme Laurence Rossignol. Ce n’est pas le bon Dieu, mais les concessions au Rassemblement national qui prêteront vie à ce gouvernement !
Mme Nathalie Goulet. … nous vous demanderons un texte qui nous permette de débattre sereinement de l’AME, un sujet qui concerne avant tout la santé publique, mais qui porte aussi sur ce qui nous est le plus précieux, c’est-à-dire la protection des plus faibles.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Je veux apporter quelques éléments de réponse.
D’abord, monsieur Jomier, vous venez de nous dire qu’il était contre-intuitif de débattre de ces amendements tendant à diminuer les crédits de la mission avant d’avoir voté les mesures de cadrage des dépenses. C’est précisément ce que j’ai dit au début de mon propos. J’aurais préféré, comme vous, que l’on examine d’abord les amendements portant article additionnel et que l’on en tire ensuite les conséquences budgétaires. Mais c’est la procédure budgétaire qui veut cela : il nous faut commencer par la fin.
Ensuite, c’est vrai, nous sommes dans une séquence politique particulière, mais, comme l’a dit Roger Karoutchi, cela fait des années que l’on parle de l’AME !
M. Roger Karoutchi. Cela fait dix ans !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ici, au Sénat, on ne peut pas nous reprocher de ne pas en avoir débattu ! Chaque année depuis que je suis membre de la commission des finances, donc depuis 2011, on discute de sa potentielle réforme !
J’ajoute que les créateurs de l’AME ne sont sans doute pas hostiles à ce que l’on tente de revisiter le dispositif et à ce que l’on en discute la pertinence, car, évidemment, les choses changent au fil des années : les bénéficiaires de l’AME ne sont plus les mêmes qu’à l’époque, leur nombre a beaucoup augmenté, etc. Franchement, faire adopter un dispositif en se disant qu’il restera le même pour l’éternité, cela ne tient pas la route !
À un moment, il est nécessaire de tout mettre à plat : c’est ce qu’a fait le Sénat en s’interrogeant à plusieurs reprises sur ce dispositif. Il est possible de le faire de manière sereine, sérieuse, sans invective, sans parler de « déshonneur », comme l’a fait M. Kanner : il n’y a pas de déshonneur à discuter d’une aide qui coûte 1,3 milliard d’euros à nos finances publiques…
M. Michel Canévet. Tout à fait !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.… et qu’il peut sembler utile de repenser. En effet, la réforme de cette aide doit contribuer, comme d’autres secteurs, à l’effort de redressement de nos comptes publics.
C’est dans cet esprit que Mme la rapporteure pour avis et moi-même avons déposé ces deux amendements, et j’espère que la majorité du Sénat nous suivra. (Marques d’approbation sur les travées du groupe UC.)
Mme Catherine Belrhiti. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. D’abord, oui, je suis médecin et j’en suis fière. J’ai eu l’immense honneur d’exercer pendant vingt-cinq ans, à l’hôpital ou en cabinet libéral, en faisant preuve, du moins je le pense, d’honnêteté et de la plus grande éthique.
Mesdames, messieurs les sénateurs (Mme la ministre se tourne vers les travées de gauche.), je suis désolée de vous le dire, mais, oui, pour moi, ce que vous venez de faire, c’est de l’agitation politique… Aujourd’hui, la situation budgétaire, économique de notre pays est mauvaise, ce qui implique que nous demandions des efforts à tout le monde.
Ainsi, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est en baisse de 5 milliards d’euros. Cela signifie que nous devions trouver ce montant d’économies et que nous avons dû demander à une multitude d’acteurs de contribuer à cet effort.
J’ai été nommée ministre de la santé à la fin du mois de septembre dernier. Nous disposions de deux semaines pour bâtir un budget tenant compte de cet impératif. Personnellement, j’applique la même méthode à tous les budgets que j’ai à gérer. Je pense qu’on peut faire des efforts budgétaires dans tous les secteurs, y compris, donc, en matière d’AME.
Soyons factuels, je ne vois pas pourquoi le budget de cette aide ne serait pas concerné par l’effort de rationalisation budgétaire, qui est demandé à chacun.
Oui, vous avez raison, les bénéficiaires de l’AME sont effectivement des personnes malades, qui ont besoin de soins, qui viennent consulter des médecins et se faire soigner, et qui sont ensuite pris en charge par l’assurance maladie. Il va de soi que ces personnes continueront à consulter des médecins.
Ce que je souhaite, c’est parvenir à faire des économies sur ce budget. Pour autant, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : j’ai toujours affirmé que je défendrais l’AME, et je l’ai toujours défendue ; je ne suis pas du tout favorable à la mise en place d’une AMU – je le dis, ici, au Sénat – et je milite pour le maintien de l’AME, qui est, pour moi, absolument essentielle.
Ce que nous proposons depuis le début, tout simplement parce que ce dispositif manque un peu de cohérence, c’est de faire en sorte que l’accès à l’AME soit conditionné au respect de certaines règles. Quand on demande, comme le préconise le rapport Évin-Stefanini, de supprimer certaines mesures qui ne sont pas indispensables et d’appliquer un peu plus longtemps le recours à l’accord préalable pour des interventions importantes, ce n’est pas si aberrant. Je le rappelle, il n’y a pas si longtemps de cela, cette démarche était même courante pour l’ensemble des Français.
Mme Laurence Rossignol. Pourquoi l’a-t-on supprimée ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Elle reste même valable aujourd’hui pour certaines prestations.
Il faut donc avancer et faire en sorte de modérer les dépenses d’AME. Évidemment, je partage votre analyse : si le nombre de personnes en situation irrégulière continue de croître, j’ai bien peur que la dépense continue d’augmenter. Mais notre devoir, me semble-t-il, est de nous montrer responsables, de contenir les dépenses publiques, y compris celles qui sont liées à l’AME – je ne vois pas pourquoi il en serait autrement –, tout en garantissant la prise en charge des soins présentant une utilité sanitaire et permettant de protéger à la fois les personnes éligibles à l’AME et l’ensemble des Français.
Il doit être possible de continuer à faire évoluer ce dispositif. Je rappelle, de mémoire, que le panier de soins couvert par l’AME a déjà évolué au moins à quatre reprises : en 2008, en 2011, en 2015 et en 2020.
Aujourd’hui, nous disposons d’un excellent rapport – je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous appréciez les rapports, que vous aimez vous appuyer sur leurs préconisations, et que vous en faites, vous-mêmes, de très bons –, établi par deux individus, dont les personnalités sont complémentaires ; je les ai rencontrés tous les deux et ils m’ont dit tous les deux qu’il y avait encore du chemin à faire pour rationaliser ce panier de soins.
Pour toutes ces raisons, je n’ai pas à m’excuser de défendre la position dont je vous ai fait part.
Quant à dire que je vais vivre ou mourir selon le bon vouloir de Mme Le Pen, j’en doute : c’est avant tout ma santé qui le déterminera. Pour ce qui me concerne, je suis fière de vivre ainsi, en restant digne et en gardant la tête haute. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC, Les Républicains, du RDSE et INDEP. – Mme la rapporteure pour avis applaudit également.)
M. Jean-Jacques Panunzi. Bravo, madame la ministre !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-36 et II-249.
J’ai été saisie de trois demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe Les Républicains, la deuxième, du groupe Union Centriste et, la troisième, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 140 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Pour l’adoption | 201 |
Contre | 126 |
Le Sénat a adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-86 rectifié est présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye et Mme N. Goulet.
L’amendement n° II-577 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
40 000 000 |
|
40 000 000 |
TOTAL |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
SOLDE |
-50 000 000 |
-50 000 000 |
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° II-86 rectifié.
M. Michel Canévet. Nous avons passé toute la semaine dernière à évoquer la situation de nos comptes publics et la nécessité de trouver des recettes supplémentaires. Notre groupe a proposé un certain nombre de mesures très concrètes au Gouvernement, lequel ne les a, hélas ! pas toutes retenues.
La situation actuelle appelle à la mise en œuvre d’un programme d’économies d’une ampleur inédite. Cet amendement s’inscrit dans cette logique, puisqu’il vise justement à procéder à un coup de rabot sur le budget de la mission « Santé », dont il tend à abaisser de 5 % environ les crédits.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° II-577.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Il s’agit d’un amendement identique à celui qui vient d’être brillamment défendu par M. le sénateur Canévet.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission est favorable à ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. J’ai le sentiment que cet objectif de maîtrise des dépenses de santé n’est qu’un prétexte, qui permet aux auteurs de ces différents amendements de faire passer leurs mesures.
En réalité, ce n’est pas le sujet ! Des gains de 200 millions d’euros, nous vous en avons proposé de nombreuses la semaine passée, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je pense en particulier à un amendement du groupe Union Centriste, qui avait pour objet d’augmenter le taux de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les pensions supérieures à 3 Smic, et auquel le Gouvernement, comme la majorité sénatoriale, s’est opposé.
Ce qui est en jeu aujourd’hui, ce ne sont pas ces 200 millions d’euros, mais la manière dont nous traitons la question de l’immigration irrégulière. Et à ceux qui pensent que c’est en réduisant le panier de soins de l’AME que l’on parviendra à maîtriser l’immigration régulière – le vrai sujet, c’est cette sempiternelle histoire d’appel d’air ! –, je leur réponds qu’ils se trompent.
Êtes-vous conscients, mes chers collègues – je pense que oui –, de la cohérence de votre réflexion ? Quand il s’est agi, il y a un peu moins d’un an, de régulariser les travailleurs sans papiers dans les métiers en tension, vous vous y êtes opposés. Or, aujourd’hui, avec cette mesure, vous supprimez, pour ces mêmes travailleurs sans papiers, qui n’ont pas la sécurité sociale parce qu’ils n’ont pas de papiers et que vous n’avez pas voulu régulariser, l’accès à de nombreux soins.
Mme Catherine Belrhiti. Seulement l’accès aux soins non essentiels !
Mme Laurence Rossignol. Pensez-vous vraiment que c’est ainsi qu’on lutte efficacement contre l’immigration irrégulière ? Non ! Vous ne faites qu’agir pour les marchands de sommeil, pour les exploiteurs du travail au noir et pour l’immigration clandestine ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Certes, votre amendement ne porte pas sur les crédits de l’AME, mais vous procédez à un coup de rabot de 50 millions d’euros sur le budget de la mission « Santé ». Pourquoi ?
Lors de la réunion de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, un accord a été trouvé entre groupes de la majorité pour abandonner environ 3,9 milliards d’euros de recettes. Excusez du peu ! À la fin de la réunion, constatant que l’addition était tout de même un peu salée pour les finances publiques, vous avez introduit un amendement tendant à faire baisser de 600 millions d’euros les dépenses de soins de ville, sans jamais expliquer, d’ailleurs, sur qui ou sur quoi ces économies allaient peser.
Par ces amendements, vous continuez de nous dire qu’il faut faire des économies. Vous portez un coup de rabot de 50 millions d’euros, alors même que vous nous avez expliqué à cette tribune que l’Inca avait besoin de plus de moyens, davantage même que ce qui figure dans le budget de la mission… Que l’on soit bien d’accord, très concrètement, vous allez reprendre de l’argent à l’Inca avec cette mesure !
C’est totalement incohérent ! D’un côté, vous courez après quelques dizaines de millions d’euros, parce que, de l’autre, vous lâchez des sommes déraisonnables… Et si vous le faites, c’est en général parce que le Rassemblement national vous le demande… (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Mais c’est insupportable !
M. Jean-Jacques Panunzi. Et vous ? Vous soutenez les mesures de LFI !
M. Bernard Jomier. Eh oui, mes chers collègues ! Vous lâchez de l’argent, alors que la trajectoire de nos finances publiques est dégradée et que le budget de la sécurité sociale, tel qu’il est ressorti du Sénat et encore plus après la commission mixte paritaire, est encore plus déficitaire que celui qui nous avait été transmis. Et vous continuez de lâcher de l’argent alors que la trajectoire financière du projet de loi de finances s’annonce, elle aussi, inquiétante. Résultat : vous en êtes maintenant à rechercher des économies de bouts de chandelle ! Voilà la réalité !
Ce qui menace la signature de notre pays, c’est certes l’instabilité politique – je vous le concède, la situation n’est pas bonne –, mais c’est surtout l’état de nos comptes publics tel qu’il ressort des lois de finances.
L’exercice auquel vous vous livrez avec ce rabot de 50 millions d’euros ne changera rien à l’affaire, si ce n’est que, d’une manière ou d’une autre, c’est de l’argent pris à l’Inca, à l’Anses, etc.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-86 rectifié et II-577.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 141 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 310 |
Pour l’adoption | 204 |
Contre | 106 |
Le Sénat a adopté.
L’amendement n° II-481 rectifié, présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye et Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
6 300 000 |
|
6 300 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
4 700 000 |
|
4 700 000 |
TOTAL |
|
11 000 000 |
|
11 000 000 |
SOLDE |
- 11 000 000 |
- 11 000 000 |
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Il s’agissait d’un amendement de repli par rapport au précédent : je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° II-481 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-541 rectifié, présenté par Mmes Senée, Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan national Maladies Rares
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
90 000 000 |
90 000 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Plan national Maladies Rares |
90 000 000 |
90 000 000 |
||
TOTAL |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Ghislaine Senée.
Mme Ghislaine Senée. Tout au long du week-end dernier, le Téléthon a animé nos territoires au travers de différentes manifestations. Cet événement a permis de recueillir près de 80 millions d’euros de promesses de dons au profit de la recherche sur les maladies rares.
Jusqu’à présent, les pouvoirs publics n’étaient pas en reste. En effet, la France a toujours fait figure de pionnière et d’exemple en Europe, comme dans le monde entier, car elle est le premier pays à s’être doté d’une véritable politique de recherche sur les maladies rares.
Depuis 2004, trois plans nationaux Maladies rares (PNMR) se sont succédé. Le 29 février 2024, plusieurs ministres ont annoncé le lancement d’un quatrième plan. Malheureusement, la valse des gouvernements et la situation économique de la France laissent craindre l’abandon de celui-ci et, au mieux, la reconduction des mesures actuelles, sans prise en compte des nouveaux besoins.
À force d’attendre et de reporter la mise en place de ce quatrième plan national Maladies rares, madame la ministre, la France est en passe de perdre son leadership. Les maladies rares sont au nombre de 6 400 et concernent 3 millions de Français ; aujourd’hui, 40 % des malades sont victimes d’un mauvais diagnostic et bénéficient, par suite, d’un mauvais traitement.
La France joue un rôle stratégique, d’abord parce qu’elle gère la base Orphanet, un portail d’information gratuit sur les maladies rares, qui est utilisé dans le monde entier, ensuite parce qu’elle a mis en place une codification des maladies rares, désormais utilisée dans les pays européens et même bien au-delà.
Comme je l’ai déjà indiqué, c’est parce que la Haute Assemblée a refusé de voter de nouvelles recettes au cours de l’examen de la première partie du présent projet de loi que l’on nous demande aujourd’hui de raboter toutes les politiques publiques. Or c’est de la qualité de vie et de la santé de nos compatriotes qu’il s’agit ici.
Avec cet amendement, nous souhaitons obtenir l’engagement du Gouvernement de financer, pour 2025, ce quatrième plan national Maladies rares. Pour atteindre cet objectif, il faudra dégager chaque année, à partir de l’année prochaine, une enveloppe de 220 millions d’euros.
Mme la présidente. Il faut conclure.
Mme Ghislaine Senée. Pouvez-vous nous confirmer cet engagement, madame la ministre ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Il n’est effectivement pas simple de trouver les lignes budgétaires abondant le quatrième plan national Maladies rares, mais il est bel et bien financé.
Le précédent plan reposait sur une enveloppe annuelle de 155 millions d’euros financée au titre des missions d’intérêt général (MIG). Pour tenir compte des revalorisations liées au Ségur de la santé et des mesures nouvelles tirant les conséquences de la labellisation des centres de référence maladies rares et du nouveau PNMR, l’enveloppe de 2024 a été portée à 223,5 millions d’euros.
Or vous demandez une enveloppe de 220 millions d’euros seulement. Votre amendement est donc satisfait, d’autant que ce financement est pérenne.
Les 603 centres de référence maladies rares et centres de ressources et de compétence, les 23 filières de santé maladies rares et les 23 plateformes d’expertise maladies rares (PEMR) déployées dans les territoires ont fait l’objet d’une revalorisation en 2024. La hausse de financement tient compte de ce nouveau périmètre de labellisation des centres et permet de renforcer la banque nationale de données maladies rares (BNDMR), de rendre plus efficients les parcours de soin et de diagnostic, et d’améliorer l’accès aux traitements et à l’innovation.
Un financement pérenne garantit donc l’organisation des soins relevant de ce quatrième PNMR. Il repose essentiellement sur l’Ondam, et, dans une moindre mesure, sur le programme 379.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, pour explication de vote.
Mme Ghislaine Senée. Madame la ministre, mon amendement étant satisfait, je vais le retirer.
Toutefois, si le quatrième plan national Maladies rares a été annoncé le 29 février dernier, il n’a toujours pas été lancé officiellement. Les services de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et d’Orphanet attendent cette officialisation.
Cela étant dit, je vous remercie de m’avoir confirmé que ce nouveau plan était financé de manière pérenne et à hauteur de 220 millions d’euros par an ; je retire donc mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-541 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-423 rectifié, présenté par Mmes de Marco, Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mme Senée, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
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+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Protection maladie |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Cet amendement de ma collègue Monique de Marco est un coup de rabot, mais pas budgétaire : c’est un coup de rabot contre la progression du cancer ! Il vise en effet à financer la mise en place d’un dépistage systématique du cancer broncho-pulmonaire auprès des populations à risque.
L’Union européenne incite les États membres à lancer des programmes pilotes sur ce sujet ; plusieurs pays européens ont d’ores et déjà déployé ce dépistage systématique. La Haute Autorité de santé (HAS) et l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) engagent des démarches en ce sens.
Ainsi, cet amendement vise à consacrer 20 millions d’euros à ce qui représente la première cause de mortalité par cancer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Sans nier l’importance de l’enjeu, des campagnes de dépistage sont déjà conduites à l’heure actuelle. L’Institut national du cancer dispose d’un programme pilote de dépistage des cancers du poumon par un scanner thoracique à faible dose.
J’ai compris lors des auditions qu’il pourrait manquer 5 millions d’euros à l’Inca pour mener cette campagne. Toutefois, cet institut disposait toujours d’un fonds de roulement confortable de 23,7 millions d’euros à la fin de 2023. Le financement du programme de dépistage des cancers du poumon devrait donc être possible.
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Je confirme les propos du rapporteur spécial. En effet, l’Inca a publié en juillet 2024 un appel à candidatures pour sélectionner les coordonnateurs de ce programme pilote, qui va démarrer en 2025. Tout est donc calé.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-423 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-453 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Campagne nationale d’information sur l’addiction aux paris en ligne
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à créer un programme dénommé « Campagne nationale d’information sur l’addiction aux paris en ligne », doté de 10 millions d’euros, de manière à financer une telle campagne.
La commission des finances est défavorable à cet amendement. Pourtant, comment nier le fait que jouer comporte des risques d’addiction ? Selon Santé publique France, 62 % du chiffre d’affaires issu des paris sportifs provient de personnes dépendantes. Par ailleurs, 72 % des parieurs ont entre 18 et 35 ans et plus d’un tiers des 15-17 ans disent avoir déjà parié, alors que les jeunes sont six fois plus susceptibles de développer une addiction.
Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne de nos discussions sur le PLFSS 2025, au cours desquelles le Sénat a adopté, sur une proposition de la commission des affaires sociales, une réforme de la taxation des jeux de hasard. Je regrette seulement que les paris hippiques en aient été exclus.
D’autres leviers sont à notre disposition pour avancer sur la prévention des addictions. Par exemple, j’avais fait adopter l’année dernière un amendement visant à taxer les publicités de ces jeux, qui a ensuite disparu dans les limbes…
Pour poursuivre cette réflexion, je vous propose d’ores et déjà de financer une campagne d’information ; ce sera un premier pas.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Madame Senée, 10 millions d’euros pour une campagne de prévention, ce n’est pas négligeable !
Ce financement augmenterait encore le saupoudrage sur les actions de la mission « Santé », qui sont déjà trop nombreuses pour être véritablement pertinentes. L’action n° 11 « Pilotage de la politique de santé publique » du programme 204 comporte d’ailleurs déjà une mission d’information et de communication auprès du public concernant la prévention des addictions.
L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. L’avis sera défavorable, ce qui ne veut pas dire que le sujet n’est pas important. Vous avez raison, les addictions au jeu sont un vrai fléau.
Cependant, l’Autorité nationale des jeux veille à l’application du cadre réglementaire pour la prévention du jeu excessif ou pathologique et la protection des mineurs par l’ensemble des opérateurs des jeux. Elle a également été à l’initiative de campagnes de communication et de prévention ciblées sur les populations les plus vulnérables, en particulier les jeunes.
Par ailleurs, Santé publique France déploie des campagnes de marketing social à destination du grand public visant à prévenir le jeu excessif. Celles-ci, diffusées à la télévision, dans la presse et sur internet, ont déjà été financées à hauteur de plus de 3 millions d’euros par le fonds de lutte contre les addictions. Ce fonds, qui relève de l’Ondam, pourra continuer de financer ces campagnes.
Encore une fois, il est souvent difficile d’avoir une bonne visibilité sur la provenance des fonds, entre ce qui relève de l’Ondam et ce qui relève des missions budgétaires.
Cela étant dit, je confirme l’avis défavorable du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Dans le cadre de la possible ouverture de casinos en ligne, le ministre chargé du budget et des comptes publics a réuni un ensemble d’acteurs, dont certains s’occupent précisément des problèmes d’addition. Le sujet des addictions liées à cette ouverture est donc pris au sérieux.
Madame la ministre, il serait intéressant de mettre à la disposition des parlementaires un « orange budgétaire », c’est-à-dire un document de politique transversale, sur la prévention. Cela nous donnerait une vision panoramique de l’ensemble des politiques de prévention, vision dont nous ne disposons pas, techniquement, à l’heure actuelle. De tels documents existent sur la radicalisation, sur la fraude fiscale ou sur les migrations, et sont extrêmement intéressants.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-453 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-457 rectifié n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-459 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Registre national des cancers
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
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5 000 000 |
5 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
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|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
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Registre national des cancers |
5 000 000 |
5 000 000 |
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TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à budgétiser un registre national exhaustif des cancers.
En effet, les cancers constituent la première cause de décès chez l’homme et la deuxième chez la femme. Chaque année, ils causent environ 157 400 décès et 382 000 nouveaux cas sont diagnostiqués. Qui plus est, la France détient le triste record du monde du plus grand nombre de cancers du sein. Il est légitime de se demander pourquoi ; à cette question, nous n’avons pas de réponse.
La surveillance sanitaire est insuffisante à l’échelle nationale : les registres existants ne couvrent que 24 % de la population française, soit environ 14 millions de personnes. En effet, il n’existe que des registres restreints à une zone géographique ou à certaines localisations cancéreuses, comme les cancers digestifs, ainsi qu’un registre pédiatrique.
Pour analyser les données relatives aux expositions environnementales et aux pathologies associées, et ainsi renforcer la prévention, améliorer la prise en charge des patients et optimiser l’utilisation des ressources publiques, nous proposons de financer la création d’un registre national des cancers.
Au reste, le Sénat a adopté en juin dernier, à l’unanimité, une proposition de loi de notre collègue Sonia de La Provôté visant à créer un registre national des cancers. L’Académie nationale de médecine, notamment, recommande la création d’un tel registre. Vous admettrez, mes chers collègues, qu’il s’agit d’une recommandation sérieuse – puisque c’est ce que vous souhaitez – et non pas d’une idée de gauchistes !
Cet amendement vise donc à financer l’instauration d’un tel registre afin d’améliorer la prévention des cancers et, ce faisant, les finances publiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Je suis évidemment favorable à la création d’un registre national des cancers, en faveur de laquelle nous avons voté, mais je pense que la dotation proposée est exagérée : 5 millions d’euros ne me paraissent pas nécessaires.
En effet, l’Inca me semble en mesure de capitaliser sur les registres dits généraux et spécialisés dont il dispose déjà pour constituer un tel registre. La proposition de loi que nous avons adoptée prévoyait d’ailleurs une centralisation des registres existants, ce que l’Inca doit être capable d’assumer.
En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme Laurence Rossignol. Sous-amendez pour baisser le montant alors !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Si je partage votre volonté d’en savoir plus et de disposer d’un suivi cancérologique répondant à toutes les exigences de qualité, l’extension à l’échelle nationale du modèle actuel des registres engendrerait des coûts humains et financiers disproportionnés.
L’Inca a d’ores et déjà développé une plateforme de données en cancérologie très performante. Celle-ci croise plusieurs sources recueillies en routine et mutualisables, dont font partie les registres et le système national des données de santé (SNDS). Cette plateforme héberge et traite les données de cancérologie de la cohorte cancer recueillies, à partir du SNDS, depuis 2010. Elle est mise à jour chaque année par la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam).
Ainsi, cette plateforme regroupe des données pour l’ensemble des consommations de soins des Français atteints de cancer. Elle est la seule à avoir l’autorisation de recueillir des données cliniques de prévention et de dépistage des patients pour les mettre en commun.
Il s’agit d’un outil unique en Europe, reconnu pour sa qualité, sa richesse et son volume. Ainsi, il est préférable de continuer de promouvoir et de développer cette plateforme plutôt que de créer un nouveau registre qui n’ajouterait rien à notre connaissance des maladies cancéreuses.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. À titre personnel, j’abonde dans le sens d’Anne Souyris. J’étais la rapporteure de la proposition de loi de Sonia de La Provôté et je rappelle que l’Académie nationale de médecine recommande la création d’un registre national du cancer.
Je comprends que ce ne soit pas le moment d’ouvrir ces crédits, au regard du contexte budgétaire, mais nous devons conserver cet objectif. Si des outils existent déjà, à terme, rien ne vaudra un registre national du cancer. D’autres pays s’en sont dotés. À l’heure actuelle, nous extrapolons à partir de données concernant un quart de la population.
Madame Souyris, si ce n’est aujourd’hui, je vous soutiendrai le moment venu !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-167 rectifié, présenté par M. Mouiller et Mmes Imbert et Lassarade, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
3 000 000 |
|
3 000 000 |
|
Protection maladie |
|
3 000 000 |
|
3 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Il s’agit d’un amendement de Philippe Mouiller.
Malgré des avancées considérables en matière de prévention et de dépistage, le virus du Sida et les infections sexuellement transmissibles (IST) demeurent de véritables problèmes de santé publique ; en 2023, 1,3 million de personnes ont été nouvellement infectées dans le monde par le VIH, contre 3,3 millions en 1995. Pour autant, le financement de la lutte contre le VIH a diminué de 5 % entre 2022 et 2023, et de presque 8 % entre 2020 et 2023.
Il est fondamental de nous mobiliser pour lutter contre ces maladies si nous souhaitons y mettre fin d’ici à 2030, cette échéance ayant été fixée par le Programme commun des Nations unies contre le VIH/Sida (Onusida) et faite sienne par la France, conformément à la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030.
Le contrôle de l’épidémie de VIH suppose, en premier lieu, la réduction significative du nombre de personnes séropositives qui l’ignorent.
C’est pourquoi cet amendement vise à augmenter de 3 millions d’euros les crédits en faveur de la prévention du VIH et des IST. Ces crédits seraient prélevés sur l’action n° 02 « Aide médicale de l’État » du programme 183 pour abonder l’action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » du programme 204.
Mme la présidente. L’amendement n° II-592 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Prévention du virus de l’immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
3 000 000 |
3 000 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Prévention du virus de l’immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles |
3 000 000 |
3 000 000 |
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TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement, comme celui que vient de présenter Mme Lassarade, vise à consacrer 3 millions d’euros supplémentaires à la prévention du VIH et des infections sexuellement transmissibles. La seule différence, c’est que nous ne le gageons pas sur l’AME. Je le précise, car il y a une raison majeure à cela !
Sachez que cette année, en France, l’incidence du VIH augmente sur une catégorie de population : les personnes étrangères et, plus spécifiquement, celles originaires d’Afrique subsaharienne. Ce serait tout de même un comble de cesser de faire profiter ce type de population de l’AME alors qu’elles ont besoin d’être diagnostiquées et soignées ! Ce serait une décision inconsidérée.
Hier, comme chaque année, nous marchions dans les rues de la capitale, à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, à l’appel d’Act up. Nous avons fêté samedi les quarante ans de l’association Aides et célébré quarante ans de lutte. En France, vous le savez, nous n’en avons pas fini avec cette épidémie.
Il n’est pas vrai que nous en aurons fini avec le sida en 2030. Nous n’en sommes pas là ! L’usage du préservatif est en baisse, de même que la prise de la prophylaxie pré-exposition (PrEP), le traitement préventif à destination des personnes ayant de multiples partenaires ou une sexualité très active. Les diagnostics sont encore insuffisants ; il faut passer à la vitesse supérieure pour faire en sorte de vaincre définitivement cette épidémie ! D’autres pays l’ont fait, nous devrions pouvoir en faire autant !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La prévention de la transmission du VIH relève de l’assurance maladie et non de la mission « Santé ».
En effet, l’usage du préservatif est le meilleur geste pour prévenir la transmission du VIH. Or, parmi d’autres mesures liées à la prévention, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 a prévu la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans. L’action en faveur de la prévention de la transmission du VIH passe donc par d’autres vecteurs que la mission « Santé ».
La commission demande par conséquent le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Lassarade, l’amendement n° II-167 rectifié est-il maintenu ?
Mme Florence Lassarade. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° II-167 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° II-592 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-547 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Ordonnance verte
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
2 100 000 |
2 100 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
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Ordonnance verte |
2 100 000 |
2 100 000 |
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TOTAL |
2 100 000 |
2 100 000 |
2 100 000 |
2 100 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à financer l’expérimentation, dans trois départements, d’un dispositif s’inspirant de la réussite de l’ordonnance verte à Strasbourg.
Lancée en 2022 sous forme d’expérimentation par la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, et son adjoint chargé de la santé, le docteur Alexandre Feltz, l’ordonnance verte a été pérennisée en 2023. Grâce à ce dispositif, tous les ans, 800 femmes enceintes, puis 1 500 au vu du succès rencontré, se sont vu dispenser deux séances de sensibilisation aux risques liés aux perturbateurs endocriniens et distribuer gratuitement un panier de fruits et légumes issus de l’agriculture biologique, chaque semaine pendant 28 semaines.
Vous savez l’importance des mille premiers jours de l’enfant. Il s’agit d’un enjeu de prévention. La lutte contre les perturbateurs endocriniens doit être l’une de nos priorités en matière de santé-environnement, en particulier lors de cette période fondamentale durant laquelle ils seraient les plus dangereux.
Ce dispositif répond à un double enjeu de santé-environnement et de lutte contre la précarité. Le réseau français villes-santé de l’OMS a d’ailleurs fait de la lutte contre les perturbateurs endocriniens un axe prioritaire de son action.
Madame la ministre, j’appelle le Gouvernement à se saisir de ce dispositif et à lancer une expérimentation pour l’évaluer, ou, à défaut, à créer une mission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Il est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Le dispositif que vous proposez est intéressant, mais il convient avant tout de l’évaluer pour juger s’il est pertinent de le décliner dans plusieurs départements : avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-547 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-550 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Stratégie nationale de prévention sur le chemsex
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
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+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
300 000 |
300 000 |
||
Protection maladie |
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|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
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Stratégie nationale de prévention sur le chemsex |
300 000 |
300 000 |
||
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à financer le lancement d’une stratégie nationale pour la prévention et la réduction des risques et des dommages de la pratique du chemsex. Au fil des ans, ce phénomène consistant à allier sexualité et prise de produits toxiques est devenu dramatique. Le nombre de décès liés à cette pratique ne cesse d’augmenter.
À Paris, nous avons pris le problème à bras le corps, depuis plusieurs années, pour mettre en place un réseau de prévention et éviter les morts, qui, je le répète, sont de plus en plus nombreux. Il faut bien savoir que cette pratique touche de plus en plus de jeunes, y compris des femmes.
Si le phénomène concernait à l’origine exclusivement la communauté homosexuelle, il s’est depuis lors élargi. Il est donc très important d’adopter une démarche à la fois communautaire et extracommunautaire pour atteindre l’ensemble de la population.
Voilà pourquoi, comme l’année dernière, je formule cette proposition sur le chemsex. Madame la ministre, je ne vous lâcherai pas ! Les associations attendent des réponses. La ministre qui était à votre place il y a tout juste un an me répondait que le Gouvernement prenait ce sujet au sérieux. Depuis, que s’est-il passé ? Rien !
Les associations qui sont sur le terrain au quotidien attendent de vous et de nous des réponses concrètes. Le projet Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré – Chemsex (Arpa-Chemsex) a montré que les demandes formulées par les associations répondent aux besoins du terrain : prise en charge des personnes pratiquant le chemsex dans une approche interdisciplinaire globale et politiques de réduction des risques, de lutte contre les addictions et de lutte contre l’homophobie. Ces mesures de prévention impliquent une approche communautaire.
Madame la ministre, sans volonté politique, rien ne se passe. Où étiez-vous ces derniers mois ?
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mme Anne Souyris. Votre silence était assourdissant ! J’espère que nous aurons une réponse aujourd’hui.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission n’est pas favorable à la prolifération des campagnes publique de prévention. (Marques d’ironie sur des travées du groupe SER.)
Pour ma part, je considère que l’efficacité de ces campagnes est conditionnée à un investissement important des pouvoirs publics dans un petit nombre de campagnes prioritaires, afin d’éviter le saupoudrage et la dilution des informations de santé publique.
En outre, les campagnes de santé publique sont principalement financées par Santé publique France, qui relève désormais de l’assurance maladie et non de la mission « Santé ».
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. La stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030 a vocation à intégrer le chemsex dans son champ d’action. La prévention des risques liés à cette pratique figure d’ailleurs déjà dans la feuille de route 2021-2024 de déclinaison de cette stratégie.
Le PLFSS 2025 fait entrer dans le droit commun les centres de santé et de médiation en santé sexuelle,…
M. Bernard Jomier. C’est vrai !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. … ainsi que le soutien apporté par le fonds de lutte contre les addictions au projet Arpa-Chemsex. Ce dernier est en fait une expérimentation menée au titre de l’article 51 de la LFSS 2018, qui doit prendre fin l’année prochaine.
Aussi, je souhaite que l’on tire des enseignements de cette expérimentation afin de les intégrer à la prochaine feuille de route de la stratégie nationale de santé sexuelle. Cela nous permettra d’agir de manière cohérente et intelligente sur ce sujet, qui, sachez-le, fait partie de nos préoccupations.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-550 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-605 rectifié, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Surveillance toxicologique des eaux
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
200 000 |
200 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Surveillance toxicologique des eaux |
200 000 |
200 000 |
||
TOTAL |
200 000 |
200 000 |
200 000 |
200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Cet amendement vise à financer une surveillance toxicologique de l’acide trifluoroacétique (TFA) par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), qui doit le considérer comme un métabolite pertinent. À cet effet, il tend à transférer 200 000 euros vers un nouveau programme intitulé « Surveillance toxicologique des eaux ».
À l’été 2024, plusieurs rapports du réseau européen d’action contre les pesticides PAN-Europe et de l’association Générations Futures ont révélé une contamination massive et universelle des eaux européennes au TFA, un polluant éternel. Les résultats de ces enquêtes sont alarmants : 100 % des eaux de surfaces et souterraines testées sont contaminées au TFA, de même que 94 % des échantillons d’eau du robinet.
Le plus alarmant reste l’absence de surveillance toxicologique de son composé chimique, malgré l’alerte des scientifiques. À l’heure actuelle, le TFA est classé comme non pertinent par l’Anses, ce qui le place en dehors de tout cadre réglementaire contraignant. Cela est d’autant plus grave que la littérature scientifique ne permet pas, à date, d’établir la dangerosité réelle de cette substance. Pourtant, je vous fais remarquer que l’Allemagne la considère comme pertinente.
Afin de protéger la santé humaine et notre environnement, il est essentiel d’établir une réelle surveillance toxicologique de cette substance. Tel est l’objet de cet amendement, qui tend à faire financer par l’Anses une telle surveillance, au travers du nouveau programme budgétaire que j’ai mentionné.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Pour tout vous dire, madame la sénatrice, l’Anses travaille déjà sur la question : elle mène une campagne exploratoire sur les eaux brutes utilisées pour la production d’eau potable, ainsi que sur l’eau potable elle-même, et le TFA fait partie des substances étudiées. Les résultats de cette campagne sont attendus pour 2026.
L’Anses est donc déjà saisie par le ministère de la surveillance de la présence du TFA dans les eaux : le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je rappelle à ce propos que la création d’une commission d’enquête sur les pratiques des industriels de l’eau en bouteille et les responsabilités des pouvoirs publics dans les défaillances du contrôle de leurs activités et la gestion des risques associés vient d’être décidée par le Sénat, à la demande, me semble-t-il, du groupe socialiste.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-605 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-503, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly et Silvani, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Planification des investissements à l’hôpital public
I. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Planification des investissements à l’hôpital public |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à interpeller le Gouvernement – ou le suivant, celui-ci étant visiblement en sursis – sur la nécessité de relancer très sérieusement les investissements hospitaliers. En effet, l’effort d’investissement des hôpitaux a été divisé par deux en dix ans, passant de 10,2 % des recettes en 2009 à 4,8 % en 2021. Or nous avons tous à l’esprit des établissements qui auraient besoin d’investissements lourds.
De plus, on constate que, depuis 2013, la dotation aux amortissements est supérieure au taux d’investissement. Autrement dit, les équipements de l’hôpital public vieillissent et ne sont pas remplacés, renouvelés, modernisés à un rythme suffisant.
J’ai parfaitement conscience du caractère quelque peu incongru d’une telle demande à ce moment de notre débat, lequel me semble lui-même assez incongru au regard du moment politique que nous sommes en train de vivre. Toutefois, je ne pouvais pas ne pas saisir cette occasion pour rappeler combien nos hôpitaux publics ont besoin d’investissement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue, ce qui me semble incongru, c’est plutôt le montant de votre demande… Avec 50 millions d’euros, vous n’aurez aucun mal à trouver des volontaires pour élaborer la programmation des investissements de l’hôpital public !
En outre, les dépenses des hôpitaux relèvent non pas de la mission « Santé » du budget de l’État, mais du budget de la sécurité sociale. Elles sont comptabilisées au titre de l’Ondam, dans le sous-objectif « Établissements de santé publics et privés ». Dès lors, la création d’un tel programme dans le budget général contribuerait à complexifier le suivi des dépenses des hôpitaux et à en gêner la régulation.
Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° II-604, présenté par Mme Bélim, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Financement de la hausse du coefficient géographique à La Réunion
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
40 000 000 |
|
40 000 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Financement de la hausse du coefficient géographique à La Réunion |
40 000 000 |
|
40 000 000 |
|
TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. J’attire une fois de plus l’attention de notre assemblée sur la situation singulière dans laquelle se trouve le centre hospitalier universitaire (CHU) de La Réunion, établissement de référence pour tout le bassin de l’océan Indien.
Notre territoire fait face à de réels défis sanitaires. En l’espace de quelques années, le nombre d’évacuations sanitaires en provenance de Mayotte a fortement augmenté : il est passé de 400 en 2012 à 1 600 en 2023.
Notre CHU est aujourd’hui bien plus qu’un hôpital local : c’est un acteur essentiel de la solidarité nationale et internationale, accueillant un tiers de patients étrangers. Or les mécanismes de financement en vigueur ne reflètent pas cette réalité complexe.
Quelques avancées récentes méritent, il est vrai, d’être saluées. Le coefficient géographique fait l’objet d’une revalorisation progressive au titre des années 2024 et 2025. En outre, notre CHU a perçu une aide exceptionnelle de 31 millions d’euros.
Madame la ministre, je salue les engagements que vous avez pris et le soutien apporté à notre territoire. Mais un décalage significatif persiste, à l’évidence, entre les besoins réels et les moyens alloués. L’effort de rattrapage est manifeste.
La Fédération hospitalière de France (FHF) pour l’océan Indien est claire : il aurait fallu a minima huit points de coefficient géographique supplémentaires pour 2024. Pourquoi ? Parce que nos établissements subissent des surcoûts spécifiques, qui ne sont toujours pas intégralement compensés.
Cet amendement tend donc à transférer 40 millions d’euros de crédits afin d’augmenter le coefficient géographique à La Réunion. Il y va de notre égalité réelle : nous devons garantir l’accès à des soins de qualité dans tous les territoires de la République. Il y va aussi de notre honneur national et international.
Il s’agit naturellement d’un amendement d’appel : nous n’entendons nullement réduire les crédits dévolus au pilotage de la politique de santé publique. En conséquence, nous demandons au Gouvernement de lever le gage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Madame la sénatrice, j’entends cet appel, que vous avez d’ailleurs déjà lancé lors de l’examen du PLFSS.
Dans plusieurs territoires ultramarins, l’écart entre les coûts assumés par les établissements de santé et la compensation que ces derniers reçoivent tend objectivement à se creuser. C’est précisément pourquoi – vous l’avez rappelé vous-même – les coefficients géographiques ont été rehaussés dès cette année, que ce soit en Guyane, à La Réunion ou à Mayotte. Par la suite, ces coefficients seront régulièrement actualisés, car l’effort doit être poursuivi.
En outre, les dispositions que vous proposez relèvent plutôt du budget de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable, mais, je le répète, j’ai bien entendu votre appel.
Mme la présidente. L’amendement n° II-472 rectifié n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-571, présenté par Mme Bélim, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Expérimentation d’un renforcement des contrôles quant à la financiarisation de la santé
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Expérimentation d’un renforcement des contrôles quant à la financiarisation de la santé |
1 000 000 |
|
1 000 000 |
|
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. La financiarisation de la santé atteint aujourd’hui des degrés préoccupants, et les conséquences de ce phénomène sont particulièrement visibles à La Réunion. Elles méritent, à mon sens, la plus grande attention.
Dans notre île, 80 % à 90 % des centres d’imagerie médicale sont désormais financiarisés, contre seulement 10 % à 20 % dans l’Hexagone. Un tel ratio ne peut que nous alarmer. Il trahit en effet de potentiels dysfonctionnements de l’accès aux soins.
Mes chers collègues, de nombreux patients me font part des difficultés qu’ils subissent à ce titre. Je pense notamment aux nombreuses patientes m’indiquant avoir le plus grand mal à obtenir une mammographie. Pour cet acte, les délais sont bien moindres dans les rares cabinets indépendants qui subsistent que dans les structures relevant, désormais, de groupes financiarisés. Doit-on en déduire que les actes les plus rémunérateurs, comme l’IRM et le scanner, sont privilégiés au détriment de la mammographie, moins lucrative ?
Il y a quelques semaines, nombre d’entre nous portions un ruban rose au revers de notre complet ou de notre tailleur. Or les femmes, en tout cas à La Réunion, ont de plus en plus de mal à procéder à une mammographie : comment accepter une telle situation dans notre pays en 2024 ?
Ces alertes sont suffisamment nombreuses et étayées pour que l’agence régionale de santé (ARS) de La Réunion lance une enquête approfondie. À plusieurs reprises, j’ai demandé un tel travail, nécessaire pour établir de manière neutre et officielle les délais constatés dans les différents cabinets. Mais l’ARS ne m’a apporté aucune réponse.
L’excellent rapport que nos collègues Corinne Imbert, Bernard Jomier et Olivier Henno ont dédié à la financiarisation de l’offre de soins met en lumière les limites criantes de notre système de régulation.
Je rappelle que seuls 8 % des quelque 2 500 centres de santé de notre pays ont été contrôlés au cours des trois dernières années.
Afin de prévenir toute dérive spéculative dans le secteur de la santé, nous proposons donc d’expérimenter un renforcement des contrôles menés par les agences régionales de santé, pour un montant de 1 million d’euros. (Mme Colombe Brossel applaudit.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Madame la sénatrice, soyez certaine que nous sommes pleinement mobilisés face aux enjeux que vous évoquez. À preuve, nous avons diligenté une mission conjointe de l’IGF et de l’Igas. Ce travail, dont nous attendons les conclusions, doit mettre au jour d’éventuels contournements juridiques et les étudier plus en détail. Il faut identifier leurs conséquences sur l’offre de soins, puis, le cas échéant, adapter notre cadre normatif.
Je vous l’accorde volontiers, les difficultés d’accès aux soins que rencontrent certains patients sont tout à fait inacceptables.
Cela étant dit, l’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.
Mme Audrey Bélim. Madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi d’insister : à ce titre, mon territoire se trouve dans une situation extrêmement alarmante.
Nous assistons, à La Réunion, aux prémisses d’un phénomène qui gagnera bientôt l’Hexagone. Raison de plus pour se montrer un peu plus vigilant !
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-338 rectifié, présenté par M. Le Rudulier, Mmes Noël et Devésa, MM. Somon, Reynaud et P. Vidal, Mme Gosselin, MM. Chasseing et Ravier et Mme Perrot, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Carte vitale biométrique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
||||
Carte vitale biométrique |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.
M. Stéphane Le Rudulier. Nous proposons d’allouer 50 millions d’euros au déploiement de la carte Vitale biométrique.
Je rappelle que la fraude sociale pèse, selon les évaluations, 14 à 45 milliards d’euros par an. En tant que telle, l’ampleur de la fraude à la carte Vitale est certes difficile à évaluer, mais elle nous coûterait au moins 6 milliards d’euros, sachant qu’au moins 2 millions de cartes Vitale surnuméraires sont en circulation dans notre pays…
Dans un rapport de 2019, notre collègue Nathalie Goulet et notre ancienne collègue députée Carole Grandjean estimaient que 2 à 5,3 millions de cartes Vitale surnuméraires se trouvaient en circulation. En février 2020, la directrice de la sécurité sociale reconnaissait quant à elle, lors d’une audition au Parlement, un surnombre de 2,6 millions de cartes Vitale.
Il est donc urgent de mettre en œuvre la carte Vitale biométrique.
Mme la présidente. L’amendement n° II-532 rectifié ter, présenté par M. Chasseing, Mme Lermytte, M. Grand, Mme L. Darcos, MM. Brault, Wattebled, A. Marc et Laménie, Mme Paoli-Gagin, M. Chevalier, Mmes Bourcier, Aeschlimann et Belrhiti, MM. Henno et Pointereau, Mmes Jacquemet et Sollogoub, M. Bonneau, Mme Guidez, M. Fialaire, Mme Dumont, MM. Somon et Lemoyne, Mme Saint-Pé et MM. Daubresse et Rochette, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Carte vitale biométrique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Carte vitale biométrique |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Dans leur rapport sur l’aide médicale de l’État, MM. Évin et Stefanini ne demandent aucune suppression de prise en charge au titre des soins urgents. Ils préconisent, en ce sens, de conserver l’AME ; dont acte. Ils suggèrent simplement de rendre permanente l’obligation d’un accord préalable du service médical de l’assurance maladie. Dès lors, l’automaticité d’un certain nombre d’actes cesserait, même passé le délai de neuf mois en vigueur. Ils recommandent, en outre, de renforcer le contrôle d’identité des bénéficiaires de l’AME. La carte Vitale biométrique permettrait précisément d’aller dans ce sens.
Bien sûr, la mise en œuvre de ce nouveau support aura un coût. Mais, à moyen terme, elle sera gage d’économies.
Le surnombre de cartes Vitale, attesté par plusieurs rapports, est l’une des manifestations de la fraude sociale. Le montant de la fraude à la carte Vitale est difficile à évaluer, mais il serait d’au moins 6 milliards d’euros.
Selon nous, la carte Vitale biométrique a donc toute son importance. Pour assurer son déploiement, nous proposons une enveloppe de 20 millions d’euros, gagée par l’annulation de crédits équivalents au titre de l’action « Aide médicale de l’État » du programme « Protection maladie ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Lors de l’examen du PLFSS pour 2025, le Sénat a adopté un amendement de la commission des affaires sociales tendant à sécuriser la carte Vitale sous forme matérielle ou immatérielle. À cette fin, la délivrance de la carte Vitale sera soumise à la présentation d’une preuve d’identité, via le dispositif France Identité numérique du ministère de l’intérieur.
Ces dispositions ont été conservées dans le texte de la commission mixte paritaire. Je sollicite donc le retrait des amendements nos II-338 rectifié et II-532 rectifié ter. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-338 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-532 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-374 rectifié ter, présenté par M. Iacovelli, Mmes Havet, Nadille et Duranton, M. Fouassin, Mme Phinera-Horth, M. Lemoyne, Mme Billon et M. Chevalier, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Maisons des femmes
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
20 000 000 |
20 000 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Maisons des femmes |
20 000 000 |
20 000 000 |
||
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Annick Billon. Je retire l’amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° II-374 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° II-379, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Création d’un observatoire national des pratiques d’isolement et de contention.
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
1 |
|
1 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Création d’un observatoire national des pratiques d’isolement et de contention. |
1 |
|
1 |
|
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à créer un observatoire national des pratiques d’isolement et de contention, qui serait placé sous l’égide de Santé publique France, avec le soutien de la Haute Autorité de santé (HAS).
Les données des registres d’isolement et de contention tenus dans les établissements de santé devront être régulièrement communiquées à cette nouvelle instance, ainsi que les rapports établis annuellement par les mêmes établissements, afin de rendre compte des différentes pratiques.
L’observatoire national sera chargé de veiller à la régulation des pratiques d’isolement et de contention et adressera régulièrement au Parlement un rapport de synthèse analysant ces pratiques dans la perspective de les réduire.
Ces pratiques restent singulièrement hétérogènes d’un territoire à l’autre. En outre, elles ne font l’objet d’aucun recensement ni d’aucune évaluation à l’échelle nationale. L’observatoire proposé viendrait combler cette lacune. Il nous ferait bénéficier, à l’échelle nationale, d’un système d’information harmonisé, centralisant et analysant l’ensemble des données disponibles.
Les retours obtenus par ce biais permettront un certain nombre d’évolutions. On pourra, plus précisément, guider les services concernés vers l’atteinte des objectifs fixés par notre législation comme par le droit international, à commencer par la réduction des pratiques d’isolement et de contention physique.
En 2020, dans un rapport intitulé Soins sans consentement et droits fondamentaux, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté préconisait la création d’un tel observatoire, dans la droite ligne des recommandations de bonnes pratiques consacrées, par la Haute Autorité de santé, à l’isolement et à la contention en psychiatrie générale. Madame la ministre, il est grand temps d’agir en ce sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Madame la sénatrice, les mesures d’isolement et de contention sont systématiquement tracées dans le système d’information des établissements de santé. J’ajoute que ces données font l’objet d’analyses régulières, notamment par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes).
Aussi, je vous prie à mon tour de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Santé », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Santé ».
Après l’article 64
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques et d’un sous-amendement.
L’amendement n° II-37 est présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° II-250 est présenté par Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 64
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le huitième alinéa de l’article L. 251-2 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° À la première phrase les mots : « délai d’ancienneté de bénéfice de l’aide médicale d’état qui ne peut excéder neuf mois » sont remplacés par les mots : « accord préalable du service du contrôle médical mentionné à l’article L. 315-1 du code de la sécurité sociale » ;
2° La deuxième phrase est supprimée ;
3° Après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée « Le service compétent s’assure que l’absence de réalisation de ces prestations n’est pas susceptible d’avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l’état de santé de la personne. »
4° À la dernière phrase, les mots : « , le délai d’ancienneté » sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-37.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement de la commission des finances a pour objet d’adapter le régime de prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes au titre de l’aide médicale de l’État.
Actuellement, la prise en charge de ces frais est subordonnée à un délai d’ancienneté de neuf mois d’admission à l’AME, sauf lorsque le report des prestations est susceptible d’avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l’état de santé de la personne. Dans ce cas, les frais peuvent être pris en charge avant neuf mois, sur accord préalable des CPAM.
Inscrite dans le code de l’action sociale et des familles, la liste des prestations concernées relève d’un décret. Y figurent notamment les opérations de la cataracte, la pose de prothèses de genou et d’épaule, la pose d’implants cochléaires et des interventions sur le canal carpien.
Suivant l’une des recommandations du rapport Évin-Stefanini, nous proposons de substituer à ce dispositif un régime d’accord préalable permanent par les caisses primaires d’assurance maladie.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour présenter l’amendement n° II-250.
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II-673 rectifié, présenté par Mme Guillotin et MM. Cabanel, Fialaire, Gold, Masset et Roux, est ainsi libellé :
Amendement n° II-37
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Avant le 31 décembre 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre du régime d’accord préalable permanent par les caisses primaires d’assurance maladie.
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Par ce sous-amendement, nous demandons un rapport évaluant la charge administrative et financière de ces dispositions, auxquelles – je tiens à le répéter – je suis favorable à titre personnel. Un tel travail permettra, de plus, de s’assurer que les objectifs fixés sont bien tenus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° II-673 rectifié ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques et le sous-amendement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer : M. le Premier ministre s’est engagé à revoir toute l’organisation de l’AME sur la base du rapport Évin-Stefanini, au-delà du point précis de l’entente préalable.
J’observe d’ailleurs que ce seul sujet est déjà assez vaste. L’identification des prestations non urgentes suppose à l’évidence un travail spécifique. J’ai déjà abordé ce point avec M. Retailleau et, sur ce dossier, nos services collaborent dans une perspective plus globale.
En conséquence, je vous prie de bien vouloir retirer ces deux amendements identiques. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Enfin, les mesures législatives qu’induira nécessairement la refonte de l’AME exigeront une étude d’impact. Le Gouvernement est donc également défavorable au sous-amendement n° II-673 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, vous sollicitez le retrait de deux amendements identiques dont l’adoption permettrait, à en croire leurs auteurs, d’économiser 200 millions d’euros. Je n’y comprends plus rien du tout…
Nous ne sommes pas hostiles par principe à la révision du panier de soins. Un tel travail a d’ailleurs été mené à plusieurs reprises ; mais il n’est pas du ressort du Parlement.
Monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, la mesure que vous proposez sera totalement inefficace. Il fut un temps où les ententes préalables étaient systématiques : la plupart d’entre elles ont été supprimées. Pourquoi ? Parce qu’elles étaient tout à fait inutiles.
Vous pouvez toujours soumettre les opérations de la cataracte à cette procédure… Mais croyez-vous donc que la cataracte aura disparu au bout de six mois ? Ou bien estimez-vous que l’on peut, dans notre pays, priver quelqu’un d’une telle opération ?
Les crédits de l’AME correspondent essentiellement à des dépenses hospitalières.
Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. Non !
M. Bernard Jomier. Prenons les dépenses relatives, non aux séjours, mais aux séances, c’est-à-dire aux soins à la journée : elles portent à 54 % sur les dialyses et à 43 % sur les chimiothérapies et radiothérapies. On obtient ainsi la quasi-totalité de ces coûts.
Bien sûr, on peut lutter contre les filières qui amènent illégalement des personnes en France pour y être dialysées. Mais, une fois que les patients sont là, que fait-on ? On leur refuse la dialyse ? Cela revient à les laisser mourir.
Je le répète, cette dépense est presque entièrement dédiée aux dialyses et à l’oncologie. Dès lors, où prendrez-vous vos 200 millions d’euros ? Vous ciblerez les migrantes, dont je parlais tout à l’heure, quand on sait qu’elles ont toutes, sans exception, été victimes de violences sexuelles, et que les conséquences de ces sévices ne se cantonnent pas aux sphères gynécologique et psychologique.
M. Patrick Kanner. Un peu d’humanité !
M. Bernard Jomier. Si j’en crois l’objet de ces deux amendements identiques, vous souhaitez supprimer les psychothérapies : ces femmes ne devraient donc pas recevoir de soins psychologiques (M. Stéphane Ravier s’exclame.), alors même que la santé mentale a été déclarée grande cause nationale de l’année 2025.
De telles mesures sont frappées d’inconséquence. Cette question est de nature réglementaire : laissons le Gouvernement regarder le panier de soins avec les professionnels de santé. Sur ce sujet, il n’y a pas de tabou…
Mme la présidente. Merci de conclure, monsieur Jomier.
M. Bernard Jomier. En revanche, il y a beaucoup de postures et, en proposant ces dispositions, vous donnez corps, une nouvelle fois, aux exigences de Mme Le Pen. (Mme Colombe Brossel applaudit.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que nous n’avons plus que quelques minutes à consacrer à cette mission.
La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Même s’il ne nous reste que peu de temps, je tiens moi aussi à revenir sur l’AME, aux dépens de laquelle on cherche à faire 200 millions d’euros d’économies.
Au cours des interventions liminaires sur cette mission, j’ai entendu quelques chiffres étonnants, venus on ne sait d’où. La réalité est tout autre. L’immigration tient avant tout à des motifs économiques : ces derniers sont privilégiés par plus de 43 % des étrangers arrivant en France. Viennent ensuite les motifs politiques : on le conçoit sans mal. Les raisons de santé ne sont invoquées que dans 10 % des cas.
L’argument de l’eldorado médical ne tient pas. Les migrants ne se disent pas : « Allons en France pour y être soignés gratuitement, grâce aux deniers publics des Français. » D’ailleurs, seules 51 % des personnes éligibles à l’AME bénéficieraient en fait de ce dispositif.
Certains, aujourd’hui, veulent faire des économies sur le dos de celles et ceux qui ont le plus besoin d’être accompagnés. Or il faut préserver l’AME. C’est une question de santé publique. C’est une question d’éthique pour les médecins. C’est tout simplement une question d’humanité.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Au cours des débats budgétaires, nous ne cessons de mettre en regard des mesures et des chiffres. Pour ma part, je tenais à insister sur l’effort d’évaluation qui s’impose.
Cela étant, je connais le sort réservé aux demandes de rapport. Je vais donc retirer l’amendement n° II-601 rectifié et je retire dès à présent le sous-amendement n° II-673 rectifié, madame la présidente.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II-673 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-37 et II-250.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 142 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Pour l’adoption | 210 |
Contre | 127 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 64.
L’amendement n° II-600 rectifié, présenté par Mme Guillotin et MM. Cabanel, Fialaire et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 64
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du 1° de l’article L. 251-2 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : « ou lorsqu’ils ont une visée esthétique non rattachable à un acte de chirurgie reconstructrice ».
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement tend à supprimer certains actes esthétiques de la liste des prestations couvertes par l’AME.
Je suis convaincue que ces actes ne sont que très rarement pratiqués au profit des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État, voire ne le sont pas du tout. Mais il faut priver le Rassemblement national d’un argument populiste grâce auquel il fragilise l’AME en caricaturant ses potentielles dérives. (M. Stéphane Ravier s’exclame.) En ce sens, une telle clarification me semble bienvenue.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue, votre raisonnement est pertinent, mais cette disposition est d’ordre réglementaire. Aussi, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-600 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-427, présenté par MM. Jomier et Kanner, Mme Le Houerou, M. Lurel, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 64
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conditions de mise en œuvre de l’intégration du dispositif d’aide médicale d’État au sein de l’assurance maladie et sur l’accès à une complémentaire santé pour les plus précaires.
Ce rapport établit notamment un état des lieux des dysfonctionnements dans l’accès des personnes aux dispositifs de l’aide médicale d’État, de la protection universelle maladie, et des complémentaires santé (aide à la complémentaire santé, complémentaire santé solidaire). Il établit également une évaluation de l’impact de cette intégration en termes de coûts évités et/ou induits pour le système de santé et des propositions opérationnelles pour sa mise en œuvre effective, ainsi que les mesures nécessaires pour garantir un accès effectif des personnes en situation de précarité sociale à une couverture maladie.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Une intégration de l’aide médicale de l’État dans le régime général de la sécurité sociale mérite d’être étudiée sérieusement.
De nombreuses autorités recommandent cette intégration, parmi lesquelles le Défenseur des droits et l’Académie de médecine, auxquels il faut ajouter l’Igas et l’IGF, ainsi que diverses ONG.
Ce serait un moyen efficace de lutter contre le non-recours et de prévenir les ruptures de soins. À cet égard, MM. Évin et Stefanini proposent de porter d’un an à deux ans la durée d’attribution de l’AME. Mais, étrangement, personne ne reprend cette proposition pleine de bon sens.
Au-delà, ce choix faciliterait la lutte contre la fraude, sur laquelle nous insistons si souvent.
En conséquence, nous demandons que, dans les six mois suivant la promulgation du présent texte, le Gouvernement remette au Parlement un rapport relatif aux conditions de l’intégration de l’AME dans le régime général.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Jomier. Dommage !
Mme la présidente. L’amendement n° II-601 rectifié, présenté par Mme Guillotin et MM. Cabanel, Fialaire et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 64
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 31 décembre 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’opportunité de réviser le panier de soins pris en charge par l’AME.
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° II-601 rectifié est retiré.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Santé ».
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-six, est reprise à dix-sept heures cinquante-huit.)
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».
La parole est à Mme la rapporteure spéciale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et immigration » s’inscrit cette année dans un double contexte : d’une part, la pression migratoire s’est encore accentuée ; de l’autre, la volonté politique, dans ce domaine, s’est clarifiée.
Les données relatives à l’année 2023 – ce sont les plus récentes dont nous disposions – témoignent d’une aggravation de la pression migratoire. Cette dernière a même atteint un niveau record, et le constat vaut pour l’Europe dans son ensemble.
En France, le nombre de demandes d’asile a dépassé 140 000 en 2023 : c’est là un record historique. Le nombre de premiers titres de séjour délivrés était quant à lui supérieur de plus de moitié à son niveau d’il y a dix ans. Je pourrais continuer ainsi en égrenant, une à une, nos statistiques migratoires ; mais mieux vaut en venir sans plus tarder au budget pour 2025.
Dans le contexte budgétaire que nous connaissons tous, marqué par la nécessité d’une réduction des dépenses publiques, cette mission a clairement fait l’objet d’un effort d’économie. Globalement, ses crédits baissent de 2 % en autorisations d’engagement, ce qui représente 35 millions d’euros, et de 5 % en crédits de paiement, soit environ 110 millions d’euros.
Pour comparer utilement le budget prévu pour 2025 à celui de 2024, il faut néanmoins prendre en compte le fait que, pour la première fois, les dépenses afférentes à l’accueil des personnes fuyant l’Ukraine y sont cette fois intégrées. En neutralisant cette évolution, la baisse du budget est en réalité de l’ordre de 300 millions d’euros, soit environ 15 %.
Toutefois, cette réduction globale des crédits n’est pas uniforme. Elle touche quatre postes principaux : premièrement, les dépenses d’intégration des étrangers déjà autorisés à séjourner durablement en France, en baisse de 79 millions d’euros en crédits de paiement ; deuxièmement, le budget prévisionnel de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA), en réduction de 47 millions d’euros ; troisièmement, les crédits dédiés à l’hébergement de ces demandeurs, qui baissent de 71 millions d’euros ; quatrièmement, l’investissement dans les locaux et centres de rétention administrative (CRA), qui se réduit de 47 millions d’euros en crédits de paiement et de 115 millions d’euros en autorisations d’engagement.
Que penser de ces évolutions par rapport à 2024 ? Évidemment, j’aurais préféré que certains postes soient davantage préservés, y compris pour l’intégration des étrangers. Toutefois, l’état des finances publiques étant ce qu’il est, il est logique que des économies soient réalisées sur cette mission comme sur bien d’autres.
Surtout, l’analyse de ce budget doit être effectuée dans un cadre plus large. Elle ne peut pas se faire sur la seule base d’un examen ligne à ligne des crédits. Une question encore plus essentielle est de savoir quelles politiques sont mises derrière ces dépenses.
Or, si la commission des finances et le Sénat ont régulièrement rejeté les crédits de la mission ces dernières années, c’était largement parce que la politique qui y était associée était trop peu lisible. Aujourd’hui, les choses ont changé. Le gouvernement actuel met en œuvre une politique claire en matière d’immigration. Je pense en effet qu’il faut moins subir la pression migratoire, davantage éloigner les personnes en situation irrégulière et mieux intégrer ceux qui résident régulièrement sur le territoire, y compris en attendant d’eux une connaissance de leurs devoirs.
Cela étant dit, je souhaite néanmoins soulever un point de vigilance important sur le budget de la mission. Je fais référence aux crédits d’investissement dans les CRA. Certes, la baisse de ces crédits fait suite à une hausse en 2024. Néanmoins, elle a pu surprendre au regard de l’objectif de porter le nombre de places en CRA à 3 000 en 2027, contre 1 959 aujourd’hui, et du retard que nous avons pris en la matière, attesté par les chiffres.
En 2024, selon mes informations, environ 23 millions d’euros de crédits de paiement devraient être consommés pour l’investissement dans les CRA, soit 74 % de moins que ce que prévoyait la loi de finances initiale pour 2024. Or l’objectif de disposer de 3 000 places en 2027 est essentiel. Je rappelle qu’en 2023 près de 3 000 refus d’admission en CRA ont été prononcés pour motif de capacité d’hébergement insuffisante. Cela doit cesser. Si j’entends que les difficultés de déploiement du plan sont également imputables aux délais nécessaires pour valider les projets, il faudra aussi des crédits pour les mener à bien.
C’est donc avec satisfaction que nous accueillons le dépôt d’un amendement du Gouvernement tendant à rehausser les crédits d’investissement en faveur de ces locaux et centres de rétention. C’était nécessaire, et j’en remercie M. le ministre.
La commission des finances propose l’adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme Muriel Jourda, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois a émis un avis favorable sur ce projet de budget.
Cela peut sembler paradoxal, dans la mesure où, au cours des années précédentes, notre commission s’était systématiquement prononcée en défaveur de projets de budget qui, du point de vue des chiffres, étaient mieux-disants que celui-ci.
Et pourtant, la position de notre commission est on ne peut plus cohérente.
D’abord, comme cela a été souligné à maintes reprises depuis le début de l’examen du présent projet de loi de finances, notre pays est en grande difficulté financière. Chacun doit donc prendre sa part à l’effort nécessaire.
Ensuite, la restriction budgétaire qui frappe les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sera contrebalancée par un amendement du Gouvernement ayant pour objet d’établir un meilleur dosage entre la nécessité de contribuer aux efforts financiers et celle d’abonder la politique publique majeure qu’est la politique d’immigration. On parviendra ainsi peut-être, même si ce sera sans doute difficile, à construire les places en CRA qui sont réclamées et nécessaires.
Enfin – cet argument vaut, à mon sens, pour l’ensemble des missions –, un budget, ce n’est pas qu’une question d’argent ; c’est d’abord une question politique. L’essentiel, c’est la politique qui est menée. Si elle est mauvaise, cela n’a pas grand intérêt de l’abonder… Or la politique que le ministre de l’intérieur a indiqué, à plusieurs reprises, vouloir conduire correspond à celle que la commission des lois du Sénat réclame de longue date : cesser de remplir le tonneau des Danaïdes de la politique de l’immigration et commencer à avoir une réelle politique migratoire. Une gestion des flux entrants est notamment nécessaire pour nous permettre d’accueillir et d’intégrer, mais aussi, tout simplement, de faire respecter la loi lorsque des personnes se trouvent sur notre territoire sans titre de séjour.
C’est bien parce que la politique annoncée est en tout point conforme à celle que nous demandions depuis des années que la commission des lois s’est prononcée en faveur de l’adoption des crédits concernés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions. – Mme Isabelle Florennes applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Mmes Isabelle Florennes et Nathalie Goulet applaudissent.)
M. Olivier Bitz, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je prends le relais de Muriel Jourda pour continuer à vous présenter la position de la commission des lois sur le projet de budget qui nous est soumis, en centrant mon propos sur les volets asile et intégration de cette mission.
Concernant la politique de l’asile, la réduction des délais de traitement des demandes est, comme vous le savez, l’un des objectifs clés de notre politique migratoire. C’est un enjeu à la fois humain et budgétaire.
Sur ce point, nous sommes sur la bonne voie. La dynamique de réduction des délais, amorcée en 2020, a continué en 2024. Si le délai moyen de traitement est encore loin de l’objectif, fixé à six mois, il est désormais légèrement supérieur à neuf mois. Le transfert de vingt-neuf équivalents temps plein (ETP) de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) devrait permettre de renouer rapidement avec une dynamique positive, la tendance s’étant légèrement étiolée ces derniers mois.
Tout indique que la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) devrait continuer à purger ses stocks en 2024. À terme, l’expérimentation des espaces France Asile, qui n’ont pas encore été mis en service, et la territorialisation de la Cour devraient également contribuer à la réduction des délais.
Ces chiffres sont de bon augure, mais il convient de rester prudent. L’édifice est fragile, et toute augmentation abrupte de la demande d’asile pourrait interrompre la dynamique.
Un autre aspect de la politique de l’asile est celui des conditions matérielles d’accueil. Disons-le, le budget proposé pour l’ADA est ambitieux. Si l’on retranche les crédits fléchés vers les Ukrainiens, nous arrivons à une baisse de 47 millions d’euros. C’est loin d’être anecdotique ; notons cependant que la budgétisation de l’ADA est moins hasardeuse que par le passé. Nous considérons donc qu’un ajustement des crédits en gestion ne peut pas être exclu à ce stade.
Le PLF prévoit la suppression de 6 000 places d’hébergement des demandeurs d’asile et intègre de surcroît à ce programme le financement des places allouées aux Ukrainiens. Nous ne remettons pas en cause le travail des agents de l’Ofii et de l’Ofpra pour fluidifier le parc et améliorer les délais. Il me semble toutefois inévitable que ces suppressions de places aient un effet sur le taux d’hébergement. Tout l’enjeu sera donc d’en limiter les conséquences, en particulier pour les demandeurs les plus vulnérables, afin que ceux-ci ne se retrouvent pas à la rue.
J’en viens aux crédits relatifs à la politique de l’intégration. Je commencerai par un point de satisfaction : l’achèvement de la dématérialisation des procédures d’admission au séjour, c’est-à-dire de l’administration numérique pour les étrangers en France (Anef). Nous tenons à saluer la réussite de ce projet de longue haleine.
Le contrat d’intégration républicaine est, quant à lui, épargné par les baisses de crédits. Toutefois, le passage d’une obligation de moyens à une obligation de résultat, prévu par la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, aura un coût. Les pistes qui sont sur la table pour le maîtriser nous semblent intéressantes, qu’il s’agisse de la fin de l’obligation de suivi des enseignements, ou encore de leur dématérialisation.
Mes chers collègues, ce projet de budget n’est évidemment pas celui que nous appelions de nos vœux ou que nous espérions. Mais c’est celui que nous avons ce soir. Dans le contexte actuel, c’est un compromis raisonnable entre maîtrise du déficit et efficacité de la politique migratoire. Au bénéfice de l’engagement du ministre de réajuster les montants alloués à la mission, nous nous sommes donc prononcés en faveur de son adoption. (Mme Annick Billon applaudit.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à M. Dany Wattebled.
M. Dany Wattebled. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget consacré à l’immigration l’année prochaine est en baisse. Ce n’est pas acceptable !
Bien entendu, le groupe Les Indépendants – République et Territoires a conscience de l’état particulièrement dégradé de nos finances publiques. Nous plaidons pour une réduction de la dépense publique, mais pas de n’importe quelle dépense publique. Certaines missions n’incombent qu’à l’État, seul à même de les accomplir. Et le budget de ces missions régaliennes ne doit pas être réduit.
La France, tout comme ses partenaires européens, connaît cette année encore un fort afflux d’immigration. L’immigration régulière a franchi cette année un seuil jamais atteint depuis 2016. Les demandes d’asile battent un nouveau record, accroissant ainsi la pression sur l’Ofpra et augmentant le montant provisionné pour verser les allocations de demandeurs d’asile.
Par ailleurs, nous aurons toujours besoin d’intégrer correctement et efficacement les immigrés qui arrivent légalement dans notre pays. Il faut aussi continuer d’expulser ceux qui n’ont pas de droit au séjour.
Dans ces conditions, aussi contraint que soit le budget cette année, les Français ne pourront pas comprendre que les fonds alloués à la politique d’immigration soient diminués, à plus forte raison après les polémiques relatives au faible taux d’exécution des fameuses obligations de quitter le territoire français (OQTF). Des progrès ont été réalisés en la matière, et nous saluons l’effort entrepris. Mais le taux d’exécution des mesures d’éloignement ne fait qu’approcher 10 %. Il faut absolument faire mieux. Pour cela, il faut y allouer des moyens supplémentaires.
Nous voulons par ailleurs faire preuve de fermeté pour obtenir les laissez-passer consulaires nécessaires. Nous ne consacrons que 61 millions d’euros à la lutte contre l’immigration irrégulière, c’est-à-dire deux fois moins que les 118 millions d’euros alloués à l’hébergement des demandeurs d’asile et au versement de leurs allocations.
Seule l’Union européenne peut apporter une solution efficace en matière d’asile. Nous nous félicitons de l’accélération du traitement des demandes. Entre 2021 et 2023, le délai moyen de traitement a été divisé par deux, passant à 127 jours. Nous espérons que le renforcement des effectifs de l’Ofpra permettra de raccourcir encore les délais. Ce serait une excellente chose pour tout le monde : d’abord, pour les demandeurs eux-mêmes, qui seraient fixés au plus vite sur leur sort ; ensuite, pour les finances publiques, car les prestations allouées aux demandeurs le seraient seulement pour le temps strictement nécessaire ; enfin et surtout, pour nos concitoyens, car la loi est la même pour tous et elle doit être appliquée promptement.
Les crises s’enchaînent, que ce soit en Europe, en Afrique, ou au Moyen-Orient. L’élection de Donald Trump et ses prises de position sur l’immigration pourraient augmenter la pression migratoire sur l’Europe. Il y a deux sujets importants sur la table : l’accord franco-algérien de 1968 et l’accord du Touquet, qu’il faut rediscuter avec nos voisins britanniques.
Le groupe Les Indépendants sera très attentif au débat et ne soutiendra pas l’adoption des crédits consacrés à la politique d’immigration, du fait de leur diminution. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Dumont. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Françoise Dumont. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons donc l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », une mission hautement stratégique, touchant des sujets qui ont encore récemment été au cœur de l’actualité législative, mais aussi médiatique. Les indicateurs font tous état de l’acuité de cette question.
Ainsi, le volume estimé de l’immigration irrégulière continue d’augmenter. Le nombre de bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME), qui sert de baromètre, certes imparfait, sur cette question, a dépassé 441 000 en 2023, soit une progression de 10 % par rapport à l’année précédente. De même, les chiffres de l’asile sont en hausse, avec une augmentation de 10 % des demandes de protection internationale enregistrées par l’Ofpra en 2024. Le défi est donc considérable.
Par ailleurs, nous devons rester conscients du fait que ces problématiques ne peuvent pas recevoir une réponse purement budgétaire. Par exemple, l’un des sujets sur lesquels nous sommes particulièrement attentifs concerne la délivrance des laissez-passer consulaires. L’obtention de ces documents, fournis par les pays d’origine des étrangers, est indispensable à la bonne exécution des décisions d’éloignement. Or le nombre de laissez-passer consulaires délivrés reste trop faible : seulement 57,5 % des demandes aboutissent. Il faut donc agir à ce niveau si nous voulons augmenter le taux de réadmission. Dans ce domaine, un dialogue bilatéral franc et robuste de la France avec chacun des pays concernés est indispensable.
Sensible à la question, la commission des lois de notre assemblée a déjà constitué en son sein une mission d’information sur les accords internationaux conclus par la France en matière migratoire. Cela permettra, je le pense, d’apporter un surcroît de clarté.
Au-delà de la seule question de l’obtention des laissez-passer, l’aide publique au développement pourrait également mieux prendre en compte la dimension migratoire de nombreuses problématiques touchant les pays de départ, ainsi que l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière, conformément à ce que le Parlement avait voté voilà moins d’un an, sur l’initiative du Sénat. La disposition en question, qui fut censurée pour de purs motifs de procédure, pourrait utilement être rétablie à l’avenir.
Enfin, sur le volet intégration, les enjeux sont tout aussi grands, à commencer par l’accompagnement de la mise en place des mesures adoptées au mois de janvier dernier, qui devront être prises en compte dans le renouvellement, en 2025, des marchés de formation civique et linguistique.
Pour faire face à de tels chantiers, nous avons depuis peu un ministre de l’intérieur qui a amorcé de vigoureuses mesures destinées à reprendre le contrôle de la politique migratoire de la France. En contraste avec l’approche qui a prévalu durant les législatures précédentes, il a manifesté une forte volonté de contenir les flux entrants, ce qui correspond à la position historique du Sénat sur la question. Les sénateurs du groupe Les Républicains sont déterminés à le soutenir dans cette tâche majeure, tout en admettant que celle-ci est rendue particulièrement complexe par la fragilité de l’état de nos finances publiques.
Le budget initial prévoyait à ce titre une baisse de 5 % des crédits de paiement de la mission, voire d’environ 14 % si l’on prend en compte l’évolution de son périmètre. Cette baisse concerne tout particulièrement l’intégration des primo-arrivants, dont les crédits de paiement diminuent de 45,4 % par rapport à 2024, et les moyens de lutte contre l’immigration irrégulière, avec une réduction de 23,5 % des crédits de paiement sur la même période.
Ces baisses annoncées ont pu susciter certaines inquiétudes, alors même que les besoins sur le terrain demeurent importants, que le taux d’exécution des OQTF reste faibles et que nous avons récemment voté une importante loi relative à l’immigration, dont la mise en œuvre est en cours.
Nous saluons par conséquent l’amendement déposé par le ministre de l’intérieur pour opérer une réévaluation de certains crédits du programme 303 « Immigration et asile ». Cela permettra d’abonder la mission de 34 millions d’euros supplémentaires en crédits de paiement et de 56 millions d’euros en autorisations d’engagement.
Les politiques de lutte contre l’immigration illégale ne représentaient d’ores et déjà qu’une fraction congrue des dépenses de la mission. Il aurait été difficilement tenable de les fragiliser davantage.
Nous prenons en particulier acte de l’engagement du ministre de consacrer une part substantielle de cette augmentation à la concrétisation du plan « CRA 3000 ». Nous disposons actuellement de 1 959 places en centre de rétention administrative. Ce chiffre est largement insuffisant au regard des besoins. Un tel manque complique les procédures d’éloignement tout en causant une dégradation des conditions de vie des personnes retenues. L’ouverture des 1 000 places supplémentaires prévues d’ici à 2027 sera donc très opportune.
Il paraît utile de mettre en perspective les crédits affectés à l’intégration en examinant le niveau de leur exécution en 2024. La dépense s’est élevée à 370 millions d’euros l’année passée, ce qui correspond peu ou prou à la somme de 372 millions d’euros prévue dans le budget pour 2025. En outre, nous espérons que l’accompagnement de la mise en œuvre des mesures de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration offrira des occasions de rationalisation de certaines des dépenses dans le domaine de l’intégration.
Sur le volet asile, la baisse des crédits dédiés à l’ADA traduit également les gains que pourra occasionner la diminution des délais de traitement par l’Ofpra des demandes d’asile. Nous espérons aussi que la création de vingt-neuf ETP au sein de cet office en 2025 permettra de consolider les progrès importants réalisés ces dernières années.
Toujours sur le sujet de l’asile, nous saluons également l’intégration dans les crédits initiaux de la mission des dépenses liées aux bénéficiaires de la protection temporaire des personnes déplacées par le conflit en Ukraine. Leur absence était difficilement compréhensible et nuisait à l’information du Parlement. La sincérité de ce budget s’en trouve donc renforcée.
Pour conclure, il est clair que la situation d’urgence budgétaire impose une approche mesurée de l’ensemble des volets de ce projet de loi de finances. Ceux-ci devront tous participer au redressement des finances publiques. Cela ne doit toutefois pas nous conduire à méconnaître l’importance des enjeux qui se cachent derrière les lignes de chiffres.
Par conséquent, à l’instar de nos rapporteurs, dont je salue la qualité du travail, nous estimons que les crédits de la mission, tels qu’ils seront modifiés par l’amendement du Gouvernement déjà évoqué, permettront d’atteindre une forme d’équilibre entre ces impératifs.
Notre groupe suivra donc l’avis émis par la rapporteure spéciale de la commission des finances et les rapporteurs pour avis de la commission des lois et votera les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’examen de la mission « Immigration, asile et intégration », nous abordons un sujet qui figure au cœur des préoccupations des Françaises et des Français.
Les orientations prises dans cette mission traduisent la détermination du Gouvernement à poursuivre la dynamique engagée depuis le début du quinquennat pour renforcer la maîtrise des flux migratoires, améliorer les conditions d’accueil et d’intégration des étrangers en situation régulière, et garantir un accès effectif et équitable au droit d’asile.
Pour 2025, cet engagement s’inscrit dans un cadre budgétaire contraint, qui exige de notre part des ajustements financiers incontournables, dictés par l’impératif de maîtriser durablement les dépenses publiques tout en préservant les priorités essentielles de la mission.
Ces priorités, quelles sont-elles ?
Premièrement, il s’agit de préserver l’exercice du droit d’asile, avec une allocation de 1,4 milliard d’euros pour le programme « Immigration et asile ».
Le Gouvernement s’engage à améliorer les conditions d’accueil des demandeurs d’asile tout en réduisant les délais de traitement. Pour 2025, le délai moyen de traitement des demandes par l’Ofpra est maintenu à quatre mois ; c’est un résultat remarquable, le meilleur jamais atteint depuis quinze ans. Nous saluons cet effort, tout en restant vigilants sur l’objectif ambitieux de ramener ces délais à deux mois d’ici à 2027, grâce à l’échelonnement prévu et au renforcement des effectifs de l’Ofpra, avec vingt-neuf nouveaux ETP en 2025. Cette accélération est essentielle pour répondre aux attentes des demandeurs et pour limiter le coût de l’ADA, aujourd’hui en diminution.
Deuxièmement, en matière d’intégration, le contrat d’intégration républicaine doit rester un outil central.
Aussi est-il préoccupant de constater une réduction significative des moyens alloués au programme « Intégration et accès à la nationalité française », avec une baisse de 15 % des crédits par rapport à l’année dernière. Cette diminution aura notamment des répercussions sur des actions locales et nationales destinées à accompagner les primo-arrivants. Face à ces coupes budgétaires, il est impératif de préserver des initiatives qui renforcent l’intégration linguistique et civique des étrangers.
Troisièmement, si la lutte contre l’immigration irrégulière reste une priorité gouvernementale, les moyens qui lui sont alloués ont toutefois été réduits de manière significative.
En 2025, 199 millions d’euros seront consacrés à cette action, ce qui inclue le fonctionnement des centres de rétention administrative et les mesures d’éloignement. Ces crédits permettront de continuer le plan « CRA 3000 », et de renforcer les dispositifs de contrôle aux frontières, notamment dans les zones particulièrement sensibles.
Nous prenons acte des ajustements annoncés par le Gouvernement pour ce volet. Par voie d’amendement, nous veillerons à garantir que les moyens alloués permettront de poursuivre ce plan à la hauteur des ambitions de la loi du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi).
Enfin, nous saluons les avancées européennes en matière de solidarité migratoire, grâce au pacte européen sur l’asile et l’immigration, ainsi qu’à l’accord franco-britannique pour renforcer la lutte contre l’immigration clandestine à la frontière.
Mes chers collègues, ce projet de budget, bien que marqué par des contraintes financières, reflète la complexité des enjeux migratoires actuels. Il nous revient de trouver un équilibre entre la maîtrise des finances publiques et le respect des principes de solidarité, d’intégration et de sécurité.
En soutenant ce projet de budget, nous réaffirmons notre engagement pour une politique migratoire à la fois responsable et humaine, conforme aux valeurs de notre République. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. le rapporteur pour avis Olivier Bitz applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Salama Ramia applaudit également.)
Mme Sophie Briante Guillemont. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons, ce budget a été préparé dans des conditions exceptionnelles, dans un cadre financier et budgétaire plus que difficile et avec des contraintes politiques fortes.
Peu de missions cette année ne voient pas leurs crédits diminuer. Celle qui nous intéresse à présent, à savoir la mission « Immigration, asile et intégration », n’échappe pas à cette nouvelle règle, avec une diminution de 2 % de ses autorisations d’engagement et de 5 % de ses crédits de paiement.
C’est beaucoup pour une mission que l’on pourrait pourtant considérer comme l’une des priorités gouvernementales. La baisse concerne notamment, avant le vote des amendements, l’action n° 03 « Lutte contre l’immigration irrégulière », en diminution de 60 millions d’euros.
L’immigration est pourtant, si l’on en croit les sondages, une des préoccupations centrales des Français. Elle est en tout cas, sans aucun doute, celle des derniers gouvernements : près de vingt lois en vingt ans, la dernière datant – vous le savez – du mois de janvier dernier ; et peut-être en aurons-nous une nouvelle dans quelques mois… Il y a donc là une incohérence entre l’importance du sujet dans le débat public et les moyens accordés.
Mais il y a tout de même du positif dans le budget 2025. Nous saluons la création des vingt-neuf ETP à l’Ofpra, un établissement qui remplit une mission importante et sensible et qui a besoin de renforts en urgence. Le Gouvernement estime que ces recrutements permettront de réduire les délais pour atteindre l’objectif cible de 161 000 décisions par an. Cela semble toutefois compromis, sachant que les demandes d’asile ne font que s’accroître ces dernières années. Le Gouvernement lui-même estime qu’elles augmenteront de 5 % en 2025. Il faut donc des moyens supérieurs.
Pour le reste des crédits de la mission, il y a, sur bien des points, de quoi rester perplexe. Je pense en particulier aux crédits du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française », qui diminuent de 15 % par rapport à l’an dernier ; cela représente a minima, avant le vote, une baisse de 65 millions d’euros.
Cette décision paraît, là encore, incohérente, d’autant que la loi Immigration et intégration du 26 janvier 2024 a renforcé les exigences en matière linguistique. Nous demanderons bientôt un niveau A2 pour obtenir une carte de séjour pluriannuelle. Or, nous le savons, la majorité de notre population immigrée est peu qualifiée. Nombre des personnes qui viennent s’installer en France n’ont eu qu’une possibilité faible, voire nulle, d’être scolarisées dans leur pays d’origine et possèdent donc de grandes difficultés à lire et à écrire. Raboter les crédits alloués à l’intégration nous semble donc particulièrement malvenu.
J’aimerais rappeler que l’immigration régulière représente aussi un enjeu pour notre économie, surtout à l’heure où la France souffre d’un vieillissement certain de la population.
Par ailleurs, il est faux de laisser croire aux Français qu’il pourrait exister une immigration zéro. (M. Stéphane Ravier s’exclame.) Les sondages, encore une fois, indiquent qu’une proportion de plus en plus grande d’entre eux y serait favorable. Mais nous sommes en 2024, dans un monde globalisé où les flux migratoires sont une réalité. La question devrait être non pas : « Comment réduire l’immigration per se ? », mais : « Comment faire en sorte qu’elle soit favorable à notre croissance ? » (Même mouvement.)
Je représente près de 3 millions de Français vivant à l’étranger. Eux aussi, lorsqu’ils ne sont pas binationaux, sont des immigrés pour les pays qui les accueillent. Eux aussi se reposent largement sur leur communauté, la communauté française, pour réussir leur intégration locale. Or, comme nous avons eu l’occasion de le rappeler récemment, les accords migratoires reposent largement sur la réciprocité. (M. Stéphane Ravier s’exclame de nouveau.)
J’en profite donc pour rappeler que la manière dont nous traitons le sujet en France peut aussi avoir des répercussions sur la vie des Français de l’étranger dans leur pays de résidence. C’est vrai aussi de la manière dont sont traités les demandeurs de visas dans nos consulats : avec des équipes sous tension, qui manquent souvent de moyens, cela a des conséquences parfois graves, comme en Afrique, sur la façon dont notre pays est perçu, et crée du ressentiment.
Vous l’aurez compris, nous voterons contre les crédits alloués à cette mission : pour le groupe RDSE, l’intégration républicaine ne doit jamais être négligée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Florennes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Isabelle Florennes. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en période de recherche d’économie budgétaire, choisir les crédits dans lesquels il faut couper se révèle un exercice délicat et complexe. Toutefois, la maîtrise du déficit public nécessite l’effort de tous, dans un esprit de responsabilité.
C’est pourquoi, comme l’ont relevé nos collègues rapporteurs de la commission des finances et de la commission des lois, le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » connaît cette année une diminution de 5 % en crédits de paiement et de 2 % en autorisations d’engagement, pour une baisse cumulée de 144 millions d’euros.
Cette diminution devrait être relativisée par les amendements que vous nous soumettrez, monsieur le ministre, afin de mettre ce budget en cohérence avec les objectifs gouvernementaux en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et les passeurs.
Au-delà de ces deux objectifs, il est nécessaire que le programme 303 « Immigration et asile », qui a connu récemment une dynamique budgétaire en raison de l’accueil d’Ukrainiens fuyant leur pays après son invasion par les forces armées russes, puisse faire l’objet d’ajustements en cours d’exercice.
La situation internationale laisse en effet présager une nouvelle augmentation du nombre de demandes d’asile, notamment de la part de femmes afghanes qui pourraient parvenir à rejoindre la France.
En effet, depuis que le ministère de la justice taliban a annoncé, le 21 août dernier, la promulgation d’une loi visant à « prévenir le vice et promouvoir la vertu », leur existence n’est tout bonnement plus reconnue. Ce texte prônant l’effacement des femmes afghanes, qui sont déjà bannies des établissements scolaires, leur interdit désormais de sortir seules de chez elles, de faire entendre leur voix en public ou encore de chanter.
Anticipant ces mesures, la Cour nationale du droit d’asile a d’ailleurs jugé, le 11 juillet dernier, que « l’ensemble des femmes afghanes refusant de subir les mesures prises à leur encontre par les talibans peuvent désormais obtenir le statut de réfugiées du fait de leur appartenance au groupe social des femmes et des jeunes filles afghanes. »
Cette situation dramatique est heureusement considérée comme telle par l’ensemble des pays européens, à l’exception peut-être de la Hongrie. Cette précision vise à souligner que le traitement des flux migratoires est bien une question qui doit être traitée à l’échelle européenne.
Il est, du reste, toujours utile de rappeler qu’aux termes de l’article 79 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), la politique migratoire est une compétence partagée entre les États membres et l’Union.
Le pacte sur la migration et l’asile adopté par le Conseil de l’Union européenne le 14 mai 2024 aura sur notre politique migratoire des conséquences budgétaires qui pourront se faire sentir dès 2025 si, comme vous le souhaitez désormais, monsieur le ministre, son entrée en vigueur prévue en juin 2026 est avancée.
Je salue aussi votre volonté de traiter la question des migrants de Calais non plus dans le cadre d’un face-à-face entre la France et le Royaume-Uni, mais bien dans celui d’une relation entre celui-ci d’un côté et l’Union européenne de l’autre.
En matière de gestion des flux migratoires comme dans bien dans d’autres domaines, les propos de Jacques Barrot, ancien ministre et commissaire européen dont on célébrera vendredi prochain les dix ans de la disparition, resteront toujours d’actualité. « Je crois, disait-il, à l’effort persistant et continu plus qu’aux coups de collier sans lendemain. »
Nous ne pouvons pas nous contenter d’une politique fondée sur le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français, sur le nombre de dossiers de demandes d’asiles traités ou sur le chiffre effroyable de migrants morts en voulant traverser la Manche ou la Méditerranée.
Nous devons avoir une vision ambitieuse de la place des étrangers en France et, plus largement, de l’influence de la France dans le monde.
N’est-ce pas seulement un moyen de conquérir le pouvoir que d’exprimer des positions radicales contre l’immigration illégale, tout en sachant que leur application mettrait à mal des pans entiers de l’économie ?
Ainsi, la candidate Giorgia Meloni s’était engagée à réduire l’immigration. Devenue présidente du Conseil italien, elle a suscité la venue de plus de 450 000 étrangers pour répondre aux besoins de main d’œuvre en Italie.
Enfin, à l’heure où les accords de défense mis en place par la France après l’indépendance de plusieurs pays africains sont dénoncés, l’un après l’autre, par ces pays, n’est-il pas temps de mener une politique d’échanges commerciaux, culturels et universitaires proactive, permettant de sauvegarder notre zone d’influence en Afrique ?
Je m’en tiendrai là dans l’exposé de mes pistes de réflexion. Elles feront l’objet – je l’espère – de développements dans des textes à venir.
La majorité des membres du groupe Union Centriste voteront les crédits de cette mission. (M. le rapporteur pour avis de la commission des lois applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’ai pas besoin de revenir sur l’ensemble des divergences qui nous ont opposés l’an dernier à l’occasion de l’examen de la vingt-huitième loi relative à l’immigration depuis 1980.
Ces divergences étaient manifestes l’an dernier, elles le sont encore aujourd’hui, peut-être même plus encore, monsieur le ministre, depuis que vous êtes aux responsabilités.
Vos positions ont au moins le mérite de la clarté. Vous l’avez dit haut et fort : vous souhaitez réduire l’immigration – pas seulement l’immigration illégale, mais l’immigration tout court.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
M. Ian Brossat. Voilà pour l’objectif. Quant au chemin que vous proposez pour y parvenir, il consiste pour l’essentiel à dégrader les conditions d’accueil des étrangers et à faire de la France une terre moins attractive pour les candidats à l’immigration.
Au fond, votre projet est, semble-t-il, de rendre la France la plus repoussante possible pour ceux qui chercheraient à y chercher refuge.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
M. Ian Brossat. Non seulement cette politique est à nos yeux injuste, mais elle est en outre inefficace, tant il est vrai que ce qui cause les migrations n’est pas tant les conditions d’accueil que les conditions subies, dans les pays de départ, par les personnes qui choisissent de partir.
Votre stratégie trouve sa pleine illustration dans le projet de budget dont nous débattons aujourd’hui.
À cet égard, j’insisterai sur quatre points.
Le premier concerne les foyers de travailleurs migrants. Comme leur nom l’indique, ces foyers accueillent des travailleurs, mais des travailleurs qui, contrairement à ce que l’appellation pourrait laisser accroire, sont en situation régulière (M. Stéphane Ravier s’exclame.) et qui, pour la plupart, ne sont plus des migrants dans la mesure où ils sont souvent en France depuis des décennies. (Même mouvement.)
En 1997 a été décidé un vaste plan de traitement de ces foyers, un plan nécessaire au vu de la dégradation des conditions de vie dans ces bâtiments.
Or ce projet de budget prévoit une réduction de 85 % des crédits consacrés aux foyers de travailleurs migrants.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
M. Ian Brossat. Cela se traduira par une dégradation supplémentaire des conditions de vie en leur sein.
Le deuxième point qui nous alerte est la question de l’hébergement d’urgence. Vous faites le choix de réduire très nettement les crédits dédiés à l’hébergement des demandeurs d’asile.
Ce choix nous paraît dangereux et inquiétant, alors même que tous les voyants sont au rouge en la matière.
Un rapport récent de l’Unicef montre par exemple que chaque nuit, en France, septième puissance économique du monde, 2 000 enfants dorment dehors. Beaucoup d’entre eux sont issus de familles qui sont en situation de demander l’asile.
Le risque que vous prenez est de multiplier les campements de rue, donc de créer du désordre, très loin de l’objectif que vous affichez.
J’en viens au troisième point : la question du revenu des demandeurs d’asile. Il est en effet prévu de baisser de 47 % les crédits alloués à l’allocation pour demandeur d’asile.
M. Stéphane Ravier. Bravo !
Mme Raymonde Poncet Monge. Ça suffit !
M. Ian Brossat. Pour ce qui concerne notre groupe, nous souhaitions que ces mêmes demandeurs d’asile soient autorisés à travailler, précisément pour leur permettre de sortir de cette situation d’assistanat.
Il se trouve que, lors du débat sur la dernière loi Immigration, vous vous étiez opposé, monsieur le ministre, à ce qu’ils puissent travailler.
Le risque, au bout du compte, c’est davantage de précarité ; cette voie ne nous paraît donc pas la plus juste ni la plus efficace.
Le quatrième et dernier point porte sur les crédits dédiés à la rétention administrative.
Comme l’ont déjà relevé d’autres collègues, ils sont en nette diminution, alors même que vous prévoyez de retenir des personnes plus longtemps et en nombre plus important.
Une telle baisse des crédits risque de se traduire par une dégradation non seulement des conditions de vie dans les CRA, mais aussi des conditions de travail du personnel encadrant.
En conclusion, ce budget nous paraît mauvais. Il est le reflet d’une mauvaise politique, qui d’ailleurs ne réduira pas l’immigration, ne tarira pas les flux et désorganisera encore davantage les conditions d’accueil.
Vous comprendrez, par conséquent, que nous nous y opposerons. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans cet exercice difficile – il l’est aujourd’hui plus encore qu’à l’accoutumée – qu’est l’élaboration du budget, la mission « Immigration, asile et intégration » tient une place particulière, car elle fait souvent l’objet de manipulations politiciennes.
Le texte budgétaire que nous examinons a la particularité de mettre en œuvre la loi Immigration votée l’an dernier, mais aussi de projeter sur un plan financier les mesures à venir annoncées par le ministre.
Sans surprise, notre groupe ne votera pas les crédits de cette mission, qui traduisent une vision de l’immigration fondée sur des fantasmes.
Au-delà de son aspect idéologique, cette dérive se fait au détriment d’un meilleur accompagnement des nouveaux arrivants, au détriment de l’accès des étrangers à leurs droits, au détriment enfin de l’intégration, que les gouvernements successifs s’étaient pourtant engagés à renforcer.
Pour la troisième année consécutive, les crédits alloués à l’ADA connaissent une diminution. Faisant fi des discours prônant le « mieux accueillir », ces diminutions sont contradictoires avec l’incantation du « mieux intégrer ».
Nous demandons que tous les demandeurs d’asile, comme cela a été fait à juste titre pour les Ukrainiens, puissent travailler dès l’instant qu’ils en font la demande.
La baisse des crédits de l’ADA, seule ressource des demandeurs d’asile, est un déshonneur pour notre pays. Elle précarise encore des personnes déjà touchées par le manque de logement et qui, parfois, faute de ressources, doivent recourir au travail non déclaré.
Comment penser l’intégration sans l’autonomie, sans la capacité de se loger, de se déplacer, de se soigner, de se nourrir, de s’éduquer ? C’est absurde !
Nous proposerons a minima de tenir compte de l’inflation au lieu de baisser ces crédits. La farce qui justifie un budget moindre par un nombre moindre de demandeurs ne fait plus rire personne !
Tout est fait, semble-t-il, pour maintenir ces derniers dans l’illégalité et le travail au noir ; tout est fait pour déstabiliser leur statut administratif.
Parlons-en, d’ailleurs, des démarches administratives… J’ai déjà maintes fois alerté notre assemblée sur les difficultés d’accès au guichet : illectronisme, délais raccourcis, incapacité de contacter un agent de la préfecture, tout complexifie les démarches des demandeurs d’asile. Chacun d’entre nous dans cet hémicycle, quel que soit le groupe auquel il appartient, a dû intervenir pour résoudre des problèmes administratifs inextricables. (Mme la rapporteure spéciale acquiesce.)
De plus en plus de recours administratifs portent sur cette incapacité. Et comment les gouvernements successifs y répondent-ils ? En baissant les effectifs. C’est absurde, c’est inefficace et c’est inique !
Que ce soit pour l’obtention ou le renouvellement d’un titre de séjour, pour l’accès au travail et au marché de l’emploi, pour l’hébergement ou encore pour la prise en charge médicale effective, le parcours des étrangers est semé d’embûches.
Où sont les présumés « profiteurs du système » ? C’est tout le contraire ! On est loin des discours populistes sur l’attractivité de notre pays ou sur l’appel d’air dont seraient responsables les prestations sociales.
Ai-je vraiment besoin de renouveler les alertes sur les idées reçues concernant l’AME ? Nous en avons débattu tout à l’heure encore.
La majorité de cet hémicycle n’est pourtant pas dupe. Lors de la discussion du projet de loi Immigration, elle avait fait part de difficultés dans les demandes de renouvellement auprès des préfectures.
Les procédures sont « longues et complexifiées par de nombreux aléas techniques », disiez-vous. Sauf que vous usiez de cet argument pour justifier une demande dérogatoire pour les Anglais résidant en France !
Non seulement le budget de la mission est en baisse et n’est pas à la hauteur des enjeux, mais, surtout, le déséquilibre entre le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » et le programme 303 « Immigration et asile » est bien trop important. Tout comme l’an dernier, la priorité du Gouvernement reste la lutte contre l’immigration irrégulière.
Dont acte, mais cette politique repose sur une jambe : l’augmentation continue du nombre de places en centres de rétention administrative, jointe à la volonté affirmée par le ministre de voir les associations exclues de ces lieux d’enfermement.
Les dernières annonces sur des négociations qui seraient en cours pour expulser des migrants vers l’Irak, l’Égypte ou le Kazakhstan ne changeront rien à l’absurdité de cette politique.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Guy Benarroche. La multiplication des CRA pour répondre aux difficultés diplomatiques que posent les éloignements est un non-sens.
La situation demandait un budget reflétant une vision humaine et réaliste des préoccupations liées à l’asile et à l’immigration dans leur ensemble : en d’autres termes, une vision fondée sur l’accompagnement, sur l’effectivité de l’accès aux droits et sur l’intégration.
Rien de cela ne transparaît dans ce projet de budget. C’est pourquoi notre groupe ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Corinne Narassiguin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » dans un contexte politique inédit, puisque nous ne savons pas si le Gouvernement tombera dans les prochaines quarante-huit heures.
Après plusieurs hausses consécutives, ce budget est en baisse cette année, signe du fossé qui existe entre les ambitions affichées par le ministre de l’intérieur et leur traduction financière.
Pour 2024, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » étaient en hausse de 7,3 %, mais ils restaient insuffisants pour prendre en compte les besoins réels et permettre une véritable intégration des personnes migrantes dans notre pays. Aussi, une baisse de 5 % pour 2025 nous semble-t-elle grandement problématique.
Si cette baisse est sur le point d’être partiellement compensée par un amendement du Gouvernement, les crédits supplémentaires seront exclusivement fléchés vers la création de places en centres de rétention administrative.
Or les points que le groupe socialiste juge particulièrement problématiques dans ce budget sont tout autres.
Le premier concerne la baisse de 5 % des crédits destinés à financer le parc d’hébergement.
Très concrètement, cela se traduira par la fermeture de plus de 6 500 places dans toutes les catégories d’hébergement : centres d’accueil pour demandeurs d’asile, hébergement d’urgence, centres d’accueil et d’examen. L’Observatoire des inégalités estime pourtant déjà à 6 000 le nombre de personnes sans abri.
Monsieur le ministre, vous affirmez compenser ces suppressions de places d’hébergement par l’accélération des procédures auprès de l’Ofpra. Cela nous semble tout à fait aléatoire.
Alors que les dispositifs sont saturés, seulement 58 % des demandeurs d’asile bénéficient aujourd’hui d’un hébergement. Il n’est pas acceptable de laisser ces hommes, ces femmes et ces enfants dormir sur nos trottoirs.
Nous proposerons ainsi, par voie d’amendement, de maintenir a minima le parc d’hébergement existant.
Un autre point qui nous semble problématique est la diminution de 45 % en crédits de paiement de l’action n° 12 « Intégration des étrangers primo-arrivants ».
Pourtant, l’article 20 de la loi du 26 janvier 2024 dispose que les étrangers primo-arrivants qui souhaitent demander une carte de séjour pluriannuelle au bout d’un an devront avoir acquis un niveau A2 de français.
L’année dernière, nous n’avions eu aucune précision sur la ventilation des crédits d’intégration, particulièrement en ce qui concerne la formation linguistique.
Nous n’en savons pas davantage cette année, alors que cette réforme de la formation linguistique doit entrer en vigueur au 1er janvier 2026 et qu’un récent rapport de la commission des finances estime que ses conséquences financières pourraient atteindre 100 millions d’euros. Nous avons donc déposé un amendement visant à financer cette réforme.
Les crédits destinés à l’allocation pour demandeur d’asile sont en hausse, car ils prennent enfin en compte l’accueil des Ukrainiens. Toutefois, à périmètre constant, les dépenses d’ADA sont bien en baisse : elles s’établissent à 353,4 millions d’euros, soit une baisse de 47 millions d’euros.
Rappelons que le montant journalier de l’ADA est de 6,80 euros par personne, avec une majoration possible en cas d’absence d’hébergement.
Ce montant dérisoire ne permet pas aux demandeurs d’asile de vivre dignement ni même de manger à leur faim. Permettre à ces personnes de travailler légalement dès le dépôt de leur demande d’asile serait une mesure raisonnable, mais la droite sénatoriale l’a rejetée l’année dernière.
La remise en cause de la circulaire Valls permettant la régularisation des travailleurs sans-papiers, pour la restreindre aux seuls métiers en tension, est un autre recul important faisant suite à la loi du 26 janvier 2024. À cet égard, l’État ne respecte toujours pas la loi, puisque la liste des métiers en tension sur laquelle repose le dispositif n’a pas été actualisée depuis avril 2021.
Enfin, permettez-moi de m’éloigner de cette mission budgétaire pour évoquer un problème qui affecte directement les personnes issues de l’immigration. Je veux parler des délais de réponse aux demandes de rendez-vous en préfecture pour la délivrance ou le renouvellement des titres de séjour.
Ces délais inadmissibles sont parfois à l’origine de situations humaines dramatiques, comme la perte d’un emploi.
Ces situations de précarité et de vulnérabilité créent un sentiment d’impuissance et une détresse psychologique chez les personnes concernées, qui peinent à voir leurs droits respectés. En tant que sénatrice de Seine-Saint-Denis, je suis très souvent sollicitée par des habitants confrontés à cette situation.
Or le Gouvernement n’a pas prévu d’augmenter les moyens humains des services préfectoraux en 2025. Monsieur le ministre, je tenais à vous alerter sur ce point.
Mesdames, monsieur les rapporteurs, les années précédentes, vous vous opposiez constamment à des budgets en augmentation. Cette année, vous donnez votre totale approbation à un budget en baisse, tout en décrétant que l’immigration est une priorité politique.
Votre soutien semble donc dépendre davantage du titulaire du poste de ministre et des effets d’annonce que des moyens alloués pour atteindre les objectifs qui sont fixés.
Pour notre part, ce budget en baisse nous semble déconnecté des véritables enjeux. Surtout, il n’affiche aucune ambition pour l’intégration ni pour une politique digne envers les personnes migrantes. En conséquence, le groupe socialiste votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2023, la France a délivré plus de 330 000 titres de séjour et enregistré 137 000 demandes d’asile.
Ces chiffres révèlent à eux seuls l’ampleur de la pression migratoire qui pèse sur nos finances publiques. Chaque année, l’immigration coûte aux Français plus de 20 milliards d’euros, une charge nette qui grève directement notre budget.
Or rien de sérieux n’est prévu dans ce projet de loi de finances pour 2025 pour réduire cet impact. Bien au contraire, les crédits alloués à l’accueil des immigrés augmentent encore, alors que nos services publics, eux, sont à l’agonie.
Prenons l’exemple de l’aide médicale de l’État, qui coûte désormais plus de 1 milliard d’euros par an. Cette dépense continue de croître, alors même que nos hôpitaux manquent de moyens pour soigner nos compatriotes. Pendant que cet argent est détourné vers des dispositifs inefficaces et mal contrôlés, les Français peinent à trouver un médecin ou s’entassent sur des brancards aux urgences !
Ce n’est pas tout. Nos écoles sont surchargées, particulièrement dans des zones déjà fragiles, au détriment de l’apprentissage de tous. Nos forces de l’ordre, quant à elles, doivent faire face à une délinquance croissante, largement alimentée par une immigration mal intégrée, mais surtout refusant de s’intégrer.
Cette réalité, mes chers collègues, a un coût non seulement financier, mais également social et sécuritaire.
Que dire des expulsions ? Sur les dizaines de milliers d’OQTF prononcées chaque année, seulement 9 % sont exécutées. Cet échec flagrant alourdit encore la charge budgétaire et renforce l’exaspération des Français. Le message est clair : le Gouvernement refuse d’appliquer les lois qu’il prétend défendre, et c’est le contribuable qui paye !
Le projet de loi de finances pour 2025 aurait pu être l’occasion d’un sursaut. Il aurait pu refléter une volonté de reprendre le contrôle de notre politique migratoire et de soulager nos finances publiques.
Mais, une fois de plus, ce budget ignore la réalité et détourne des ressources précieuses vers des dispositifs inefficaces qui alimentent l’immigration de masse.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l’examen du PLFSS et de la première partie du PLF, vous avez fait preuve – c’est peu de le dire ! – de mépris envers les sénateurs du Rassemblement national, en refusant chacun de nos amendements, obligeant même le Premier ministre à reprendre nos mesures de bon sens à la volée, à quelques heures de sa chute annoncée.
Ne vous en déplaise, et même si cela n’est pas encore visible au sein de cet hémicycle, nous sommes la première force politique de notre pays. (Mme Pascale Gruny s’exclame.) Nous sommes le premier parti de France et nos onze millions d’électeurs attendent autre chose. Si vous ne le comprenez pas, ils vous le feront comprendre de manière encore plus dure dans les urnes !
Les Français espéraient des mesures courageuses, pertinentes et adaptées à leurs préoccupations. Qu’ont-ils reçu ? Un patchwork budgétaire mal ficelé, plus proche d’un exercice d’équilibriste que d’une véritable vision pour l’avenir.
Ils attendaient un budget qui protège leur pouvoir d’achat, renforce nos services publics et affirme nos priorités nationales. Mais, visiblement, répondre aux attentes populaires n’était pas à l’ordre du jour. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
À ce stade, faut-il encore s’étonner ? Après tout, l’habitude est bien ancrée. Ignorer les besoins réels tout en donnant des leçons de gestion, l’échec est total ! Mais il semble que certains aient développé une certaine affection pour le goût amer des demi-mesures et des promesses creuses.
La France, enfin, ne doit plus subir. Elle doit reprendre le contrôle de ses finances, de ses frontières et de son avenir. (M. Stéphane Ravier applaudit. – M. Guy Benarroche s’exclame.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur. Madame la présidente, mesdames, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais avant tout vous remercier de la tonalité générale de cette discussion.
Je me disais, en écoutant les uns et les autres, qu’ici, au Sénat, nous avons un lieu au sein du Parlement où la conversation civique est encore possible. Nous avons besoin de cette tonalité dans les heures que nous vivons, et je vous en remercie.
Voter un budget, ce n’est pas simplement un acte technique : c’est un acte profondément politique.
Bien sûr, il y a les chiffres ; j’en parlerai, assez rapidement, puisque nous y reviendrons à l’occasion de l’examen des divers amendements. Certains de ces chiffres nous ont été reprochés.
Mais avant les chiffres, il y a les choix, ceux qui guident ma politique, la politique du Gouvernement. Je voudrais m’expliquer sur ces choix devant vous et ainsi, peut-être, je pourrai justifier aussi les chiffres.
Au moment où nous sommes, aucune politique publique ne peut s’exonérer d’optimiser ses dépenses, absolument aucune !
Depuis des années, en France, on prétendait mesurer l’efficacité des politiques à l’aune de la dépense publique, sans avoir le courage de réformer ni d’assumer ses choix politiques. Pour ma part, mes choix, je les assume !
Le choix du Gouvernement consiste donc à reprendre le contrôle sur l’immigration, à la réduire et, notamment, à combattre l’immigration irrégulière. Cette politique procède aussi d’une exigence démocratique. (Marques de scepticisme sur des travées du groupe SER.)
J’observe, ici comme ailleurs, que la question de l’immigration est souvent à la source de polémiques. Toutefois, lorsque l’on prend un peu de recul et que l’on se penche sur les études d’opinion, on constate que parmi les Français, qui se divisent sur tant de sujets, on trouve une large majorité – plus de 70 % – pour considérer qu’il faut être beaucoup plus ferme en matière d’immigration. Une majorité se dégage même en ce sens, mesdames, messieurs les sénateurs de gauche, parmi les électeurs qui votent régulièrement pour votre camp : eux aussi considèrent que la fermeté en matière migratoire est une exigence démocratique.
Lorsque j’ai, pour la première fois, occupé à Bruxelles le siège de la France au conseil Justice et affaires intérieures, j’ai écouté mes vingt-six collègues ministres de l’intérieur s’exprimer. Certains étaient de gauche, appartenaient à des gouvernements sociaux-démocrates ; d’autres étaient de droite, appartenaient à des gouvernements conservateurs. Eh bien, je vous défie de trouver une véritable différence entre les positions des uns et des autres ! Le consensus qui émerge en France sur ces questions est donc aussi un consensus européen, que je tiens à rappeler.
Les choix que nous faisons, voilà ce qui fonde une politique, voilà ce qui est fondamental. Je le redis, ce sont les choix qui importent, plus que les chiffres !
Or notre choix est d’avoir, enfin, une stratégie globale, afin de maîtriser l’immigration sur trois niveaux. Faute d’une politique globale, vous aurez beau ajouter les chiffres aux chiffres, vous n’atteindrez pas vos objectifs !
Le premier niveau est le niveau international. Oui, nous multiplions les accords bilatéraux. J’ai même nommé un missus dominicus en la matière, en la personne de Patrick Stefanini.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Un gauchiste !
M. Bruno Retailleau, ministre. Il aura pour objectif de négocier, en tandem avec un ambassadeur dédié aux migrations, des accords de réadmission pour chaque grande plaque continentale. C’est à cette table de négociation que se jouent l’éloignement et l’obtention des laissez-passer consulaires nécessaires, certainement pas sur une ligne budgétaire !
Le deuxième niveau, c’est l’Europe. Nous avons obtenu que, pendant les cent premiers jours de la présidence polonaise, la Commission donne un avis et, surtout, mette une proposition sur la table pour enfin modifier la directive Retour, directive très mal nommée, car elle est en réalité l’assurance du non-retour, dans la mesure où elle confie le choix du retour aux clandestins. Nous allons pouvoir progresser, enfin, sur cette question.
Nous travaillerons également, bien entendu, sur le pacte sur la migration et l’asile, qu’Isabelle Florennes évoquait il y a un instant.
Le troisième niveau est le niveau français, avec d’abord la signature de deux circulaires, une circulaire de pilotage pour les préfets et une autre qui prendra la suite de la fameuse circulaire Valls sur les admissions exceptionnelles.
Il nous faudra aussi un texte migratoire de niveau législatif.
Nous devons faire en sorte qu’aucun dispositif français ne soit plus attractif que les dispositifs étrangers. À défaut, les filières d’immigration, contrôlées par ceux qui trafiquent et qui maltraitent les êtres humains, prendront la main sur notre souveraineté. Il n’en est pas question, nous pouvons tous en convenir au-delà des attaches partisanes.
J’ai exposé nos choix ; j’en viens maintenant aux chiffres.
Sont prévus, pour la mission que nous examinons, 1,7 milliard d’euros en autorisations d’engagement et plus de 2 milliards d’euros en crédits de paiement.
Comme l’ont indiqué plusieurs intervenants, nous entendons, par voie d’amendement, rehausser ces crédits, pour 59 millions d’euros en autorisations d’engagement et 34 millions d’euros en crédits de paiement.
Ces crédits supplémentaires viendront conforter le financement de nouvelles places dans les centres de rétention administrative qui sont déjà construits, notamment à Dunkerque et à Dijon, mais aussi dans ceux qui, à Nantes ou à Béziers par exemple, le seront en 2025. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie s’exclame.)
Ces crédits sont évidemment les bienvenus, mais ils impliquent aussi un effort d’économies que mon ministère accepte et assume parfaitement, par des optimisations de dépenses.
L’effort financier portera ainsi sur l’allocation pour demandeur d’asile. Pour porter ses fruits, il ira de pair avec un renforcement des moyens humains de l’Ofpra, à hauteur de vingt-neuf ETP, afin de réduire les délais d’instruction et ainsi de diminuer les sommes à payer au titre de l’ADA.
L’expérimentation des espaces « France asile » nous permettra quant à elle de gagner trois précieuses semaines ; or, en l’occurrence, le temps, c’est de l’argent ! La gestion des places d’hébergement sera aussi améliorée. Nous pouvons le faire !
Certains orateurs ont fait remarquer à ce propos que ce budget était particulièrement sincère, puisque l’on intègre désormais, dans le périmètre budgétaire de la mission, les crédits destinés aux Ukrainiens bénéficiant de la protection temporaire.
Nous sommes par ailleurs en train de déployer des outils numériques qui nous permettront d’être plus efficaces et économes de la dépense publique.
Je veux dire un mot du programme « Intégration et accès à la nationalité française », dont la baisse des crédits a donné lieu à de nombreuses critiques.
Je voudrais simplement rappeler quelques chiffres : en 2024, les dépenses de ce programme s’élèvent, en exécution, à 370 millions d’euros, ce qui n’est pas bien plus que le budget prévu pour 2025, de 366 millions d’euros. Ce qui importe, ce n’est pas de comparer une LFI à une autre LFI, si je puis m’exprimer ainsi – je parle bien évidemment de lois de finances initiales ! (Sourires.) –, mais de comparer ce qui a été effectivement dépensé : voilà ce qui compte, mes chers collègues, même si certains d’entre vous l’oublient !
J’en viens aux grands outils qui doivent nous permettre la mise en œuvre d’une intégration exigeante : à mes yeux, celle-ci impose certes l’assimilation de la langue et des droits, mais surtout celle des devoirs, celle des valeurs de la République ! C’est fondamental. C’est la raison pour laquelle, avec la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, avec ce texte que nous avions voté au Sénat, les exigences ont été renforcées et la logique a été inversée : d’une logique de moyens, on est passé à une logique de résultat, autour du contrat d’intégration républicaine, mais aussi des exigences linguistiques et de l’examen civique prévus à l’article 20 du texte pour les primo-accédants.
J’indique aussi que le programme d’accompagnement global et individualisé des réfugiés (Agir) sera déployé en 2025, pour la première fois, sur l’ensemble du territoire : 25 000 réfugiés bénéficieront ainsi d’un accompagnement à 360 degrés, c’est-à-dire d’un suivi individualisé – c’est inédit – en matière d’emploi, de santé ou de logement.
Il est donc faux de dire que ce texte ne comporte rien en matière d’intégration, puisque nous nous dotons d’outils en la matière. Certes, nous faisons preuve d’exigence à l’égard des personnes qui veulent venir en France : elles doivent apprendre le français et les valeurs de la République. Nous l’assumons parfaitement ! Tant qu’elles n’auront pas réussi les tests, le contrat d’intégration ne pourra pas être signé : c’est une logique de réciprocité, de donnant-donnant, sans quoi rien ne peut fonctionner – c’est cela notamment qui explique la panne de la machine à intégrer en France.
En conclusion, je dirai que ce budget est au service d’une politique dont l’objectif est de reprendre le contrôle des flux migratoires. J’ai eu l’occasion de le dire et de l’assumer. Vous me reconnaîtrez au moins, mes chers collègues, le mérite d’avoir toujours été constant : les positions que je défends au Gouvernement sont les mêmes que celles que j’exprimais lorsque je siégeais sur les travées de cet hémicycle ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.
Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures.
Nous devrons donc en terminer l’examen aux alentours de vingt heures, afin de pouvoir passer à l’examen de la mission « Sécurités ». Au total, trente-huit amendements ont été déposés. Si nous n’avions pas terminé à vingt heures, la suite de l’examen de cette mission serait reportée, conformément à l’organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents, et en accord avec la commission des finances, à la fin de l’examen des missions de la semaine, c’est-à-dire au samedi 7 décembre.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Immigration, asile et intégration |
1 730 054 850 |
2 047 753 910 |
Immigration et asile |
1 360 646 008 |
1 681 331 079 |
Intégration et accès à la nationalité française |
369 408 842 |
366 422 831 |
Mme la présidente. L’amendement n° II-297, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
80 000 000 |
|
80 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
|
80 000 000 |
|
80 000 000 |
SOLDE |
- 80 000 000 |
- 80 000 000 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. À périmètre constant, le budget de l’allocation pour demandeur d’asile baisse déjà. Je ne crois pas qu’il soit opportun d’aller encore plus loin. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Il est également défavorable.
Je rappellerai simplement un chiffre intéressant qui montre que nous maîtrisons l’ADA : alors que la dépense au titre de cette allocation s’établissait à 490 millions d’euros en 2019, elle n’est plus que de 336 millions d’euros dans le PLF 2025. Des efforts sont déjà réalisés.
Mme la présidente. L’amendement n° II-480 rectifié, présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye, Mme N. Goulet et M. Maurey, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
8 076 483 |
|
8 138 137 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
8 887 891 |
|
8 901 318 |
TOTAL |
|
16 964 374 |
|
17 039 455 |
SOLDE |
- 16 964 374 |
- 17 039 455 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Je retire cet amendement au profit des amendements identiques qui suivent.
Mme la présidente. L’amendement n° II-480 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-474 rectifié est présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye, Mme N. Goulet et M. Maurey.
L’amendement n° II-542 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
235 687 |
|
235 687 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
326 623 |
|
326 623 |
TOTAL |
|
562 310 |
|
562 310 |
SOLDE |
- 562 310 |
- 562 310 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° II-474 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Je ne doute pas que M. le ministre saura extrêmement bien le défendre.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-542.
M. Bruno Retailleau, ministre. Conformément à l’objectif du Gouvernement de réduire le déficit à 5 % du PIB, nous entendons mettre en place dans la fonction publique des mesures de maîtrise de la masse salariale, notamment en alignant les règles d’indemnisation des arrêts maladie des agents publics sur celles du secteur privé, comme l’a proposé mon collègue chargé de la fonction publique.
Cet amendement tend à en tirer les conséquences budgétaires au sein des administrations et des opérateurs qui entrent dans le périmètre de la présente mission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Il est favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-474 rectifié et II-542.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-293, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
750 000 000 |
|
750 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
|
750 000 000 |
|
750 000 000 |
SOLDE |
- 750 000 000 |
- 750 000 000 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. L’État a fait le choix, depuis des années, de déléguer une partie de sa souveraineté en matière migratoire à des associations. Ces 1 350 structures, souvent subventionnées sans contrôle rigoureux, jouent un rôle clé dans la prise en charge des demandeurs d’asile et dans l’accompagnement des étrangers primo-arrivants.
Pourtant, il est légitime de se demander si cette délégation est encore acceptable.
Alors que nos finances publiques sont au bord du gouffre, l’État continue de verser annuellement 750 millions d’euros à ces associations. Ce modèle est non seulement coûteux, mais aussi inefficace. Ces structures, souvent militantes et de gauche, privilégient une approche idéologique…
M. Guy Benarroche. Et pas vous ? Vous vous fondez sur des chiffres ?
M. Joshua Hochart. Plutôt que de contribuer au contrôle des flux migratoires, elles alimentent un véritable appel d’air. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)
L’État doit reprendre la main sur la politique migratoire. La gestion du droit d’asile et de l’intégration ne peut plus être laissée à des acteurs qui échappent à tout contrôle parlementaire. Ce recentrage est impératif pour garantir que les moyens publics sont utilisés dans l’intérêt des Français plutôt que pour financer des réseaux associatifs qui parfois, voire souvent, entravent l’application des lois, notamment en matière d’éloignement des clandestins.
Notre proposition est une réponse courageuse et nécessaire à l’urgence budgétaire et migratoire. Il s’agit non pas de nier la réalité des besoins, mais de rétablir l’autorité de l’État dans un domaine stratégique.
Mme la présidente. L’amendement n° II-295, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
410 000 000 |
|
410 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
90 000 000 |
|
90 000 000 |
TOTAL |
|
500 000 000 |
|
500 000 000 |
SOLDE |
- 500 000 000 |
- 500 000 000 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Entre 2016 et 2022, les subventions allouées aux associations d’aide aux migrants sont passées de 306 millions d’euros à plus d’1 milliard d’euros. Cette augmentation, qui aurait pu être justifiée par des résultats concrets, n’a pourtant produit qu’un affaiblissement de l’autorité de l’État.
Les associations qui prétendent œuvrer pour l’intégration des migrants se montrent souvent hostiles à l’application des lois françaises. Elles multiplient les recours juridiques et les actions militantes pour empêcher les expulsions ou retarder les procédures administratives, sapant ainsi l’efficacité des OQTF, déjà peu reluisante. Le taux d’exécution de ces décisions d’expulsion a chuté à 7 % en 2022, ce qui constitue la preuve d’une obstruction systématique.
Cette situation est intolérable ! L’État doit cesser de financer les structures qui travaillent contre ses propres intérêts.
Nous proposons donc, par cet amendement, de réduire de 500 millions d’euros les crédits consacrés à ces associations pour amorcer une réinternalisation de leurs missions au sein de l’Ofpra, de l’Ofii et des services de l’État. C’est une mesure de bon sens, qui vise à réaffirmer l’autorité régalienne de l’État.
Mme la présidente. L’amendement n° II-525 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
950 000 |
950 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
950 000 |
|
950 000 |
|
TOTAL |
950 000 |
950 000 |
950 000 |
950 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Contrairement à ce que vient d’affirmer le sénateur du Rassemblement national, le secteur associatif a absolument besoin d’être mieux soutenu.
Au travers de cet amendement, je souhaite vous alerter, monsieur le ministre, sur les coupes budgétaires subies par les associations d’accueil et de soutien aux étrangers primo-arrivants.
À titre d’exemple, le centre Primo-Levi, association spécifiquement consacrée au soin et au soutien des personnes victimes de tortures et de violence politique exilées en France, a été informé que la subvention qui lui était accordée jusqu’alors par la direction de l’asile du ministère de l’intérieur ne serait pas reconduite.
M. Joshua Hochart. Très bien !
Mme Corinne Narassiguin. Cette aide financière est pourtant déterminante pour lui permettre d’exercer son action. Alors que la prise en charge publique de ces personnes est souvent inadaptée, toutes ces associations font un travail aussi admirable que nécessaire…
Mme Pascale Gruny. Pas toutes !
Mme Corinne Narassiguin. … pour des raisons évidentes tant d’humanité que de santé publique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements.
Je veux indiquer, en réponse à Mme Narassiguin, que l’on part d’un niveau assez élevé de subventions à ces associations – il faut bien le reconnaître –, puisqu’elles se voient octroyer, dans leur ensemble, plus d’un milliard d’euros.
Il convient donc de s’intéresser de près aux conditions dans lesquelles elles exercent leurs missions. La commission des finances a d’ailleurs sollicité, auprès de la Cour des comptes, la remise d’un rapport sur le sujet. Ce rapport devrait nous être transmis avant la fin de l’année. Nous le lirons attentivement et je suis certaine que le Gouvernement y sera également très attentif. Il sera sans doute nécessaire alors de changer certaines choses.
Il ne faut pas avoir peur de regarder en face le fait que certaines associations ont un caractère militant. Si elles touchent des financements publics, il faudra s’interroger sur la suite des choses.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Parmi ces trois amendements, les deux premiers ont une visée restrictive, à l’inverse du dernier, qui tend à relever le montant des subventions aux associations. Si l’avis est défavorable sur les trois, c’est donc pour des raisons opposées.
Madame Narassiguin, il est parfaitement normal, en période de disette budgétaire, que l’effort soit réparti entre tous. L’aide aux associations est souvent octroyée au terme d’appels à projets définis dans un cadre particulier ; ainsi de celles qui interviennent dans les centres de rétention administrative. Ce n’est toutefois pas le cas pour l’association que vous avez citée. En tout cas, j’assume que chacun doit faire des efforts.
Pour ce qui concerne les amendements nos II-293 et II-295, je veux faire remarquer que le Gouvernement ne peut pas, d’un coup de baguette magique, sabrer dans les subventions versées aux associations : il doit respecter le droit existant et les règles du jeu.
Le versement d’un certain nombre de subventions aux associations a fait l’objet d’une contractualisation avec l’État. Les marchés avec les associations qui interviennent dans les CRA, par exemple, ont été passés avant mon arrivée. Quant aux structures d’hébergement, elles ont signé des conventions avec les préfets. Si nous les dénoncions, cela poserait évidemment un problème juridique.
En revanche, je constate que certaines associations manquent à leur devoir de neutralité.
Mme Pascale Gruny. Tout à fait !
M. Bruno Retailleau, ministre. Il leur arrive de prendre position contre l’État, voire, parfois, d’agir contre lui, alors qu’elles opèrent pour son compte et qu’elles assument une mission de service public.
Je souhaite donc agir, à l’avenir, sur plusieurs leviers. La Cour des comptes rendra son rapport dans quelques mois. Nous verrons ce qu’elle préconisera.
Quoi qu’il en soit, je souhaite sanctionner contractuellement les associations qui ne respectent pas strictement les obligations liées à leur mission de service public, notamment celle de neutralité.
Je souhaite aussi, à l’avenir, confier à l’Ofii des missions d’assistance juridique ; c’est l’une des mesures qui doivent figurer dans le projet de loi sur l’immigration que vous examinerez bientôt. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je donnerai, bien entendu, un avis défavorable aux deux premiers amendements en discussion. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Vous n’avez pas à le donner !
M. Guy Benarroche. J’ai été content d’apprendre, en tout cas, que les associations étaient de gauche. Je connais beaucoup de personnes engagées dans des associations, y compris d’aide aux migrants, qui ne sont pas de gauche. (M. Joshua Hochart s’exclame.) Mais si elles le sont, tant mieux pour nous !
Monsieur Hochart, vous pensez que l’État économiserait de l’argent s’il prenait à sa charge toutes les tâches effectuées au quotidien par ces associations, souvent bénévoles, et toutes les missions d’aide aux migrants qu’elles assument. Vous croyez en somme qu’il gagnerait quelques millions en se substituant aux associations dans tous les domaines. Vous êtes donc très étatiste ! Vous êtes pour un État fort, centralisateur, qui supprimerait toutes les associations… Nous ne manquerons pas de le faire savoir et de diffuser les positions du Rassemblement national, cela battra en brèche certains préjugés…
Bien entendu, il faut contrôler, vérifier et suivre ce que font les associations, car certaines peuvent déraper, politiquement et financièrement. L’administration fait bien ce travail. Si on peut l’améliorer, tant mieux. Mais cela ne justifie nullement de supprimer, par principe, des subventions versées à des gens qui travaillent pour l’État, la plupart du temps pour un moindre coût, car ils n’en tirent, personnellement, pas le moindre revenu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous voterons l’amendement n° II-525 rectifié de Corinne Narassiguin, mais évidemment pas ceux du Front national.
Cela étant précisé, certains propos du ministre appellent une réponse. Je note d’ailleurs l’extrême pédagogie dont il fait preuve à l’égard de ses nouveaux compagnons de majorité d’extrême droite… (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
On ne peut pas tout dire, monsieur le ministre ! Vous pouvez éventuellement affirmer que l’on doit faire des économies dans tous les champs de l’action publique, même si nous pouvons le regretter – vous connaissez notre position à cet égard. En revanche, vous ne pouvez pas prétendre que ces associations ne respecteraient pas les conventions qu’elles ont conclues avec l’État. Ce faisant, vous mettez en cause soit le travail de votre prédécesseur, M. Darmanin, ce que je n’ose imaginer, soit celui de vos services, puisque l’activité des associations doit être vérifiée annuellement.
Par ailleurs, vous semblez prendre le parti de ceux qui supposent à ces associations un engagement politique, ce qui discrédite leur travail, de manière à vrai dire peu rationnelle.
Les choses sont simples : soit nous considérons que les personnes présentes sur notre territoire qui ont des problèmes de santé mentale, qui sont parfois à la rue, etc., doivent, pour le bien de tous les citoyens, être prises en charge d’une manière ou d’une autre et être accompagnées ; soit ce n’est pas le cas, auquel cas, sur ce point, nous avons évidemment une vraie divergence.
Monsieur le ministre, vous devriez être plus circonspect dans votre expression lorsque vous semblez condamner ces associations.
Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je souhaiterais obtenir une précision, car je n’ai pas bien compris si les associations en question étaient pointées du doigt parce qu’elles prennent des positions dans le débat public, ou en raison de la qualité de l’exercice de leur mission de service public.
Des associations qui assument des missions de service public tout en prenant position dans le débat public, il en existe de fait dans de nombreux domaines, tels que le handicap ou l’insertion, et non pas simplement dans le secteur de l’immigration.
Je voudrais donc comprendre si le débat porte sur le fait que des associations exerçant des missions de service public affichent des positions, ou cherchent à mettre en lumière des dysfonctionnements potentiels au sein de l’État, ou bien s’il porte sur la qualité et l’effectivité de leur accomplissement de la mission qui leur a été déléguée. Autrement, nous entrons dans un autre débat, et cela confinerait alors au délit de faciès… (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart, pour explication de vote.
M. Joshua Hochart. Monsieur Benarroche, vous avez extrapolé à partir de mes propos. Je n’ai pas affirmé que toutes les associations étaient de gauche – ça, c’est vous qui le dites ! J’ai dit que les associations qui utilisent l’argent public pour ne pas respecter la loi française soutiennent souvent des partis de gauche.
Vous avez évoqué les bénévoles. Je ne sais pas dans quel monde vous vivez, mais, je vous rassure, les cadres dirigeants de ces structures d’aide aux migrants s’engraissent sur le dos des bénévoles qui œuvrent sur le terrain !
Enfin, monsieur le ministre, vous avez indiqué qu’il y avait des règles du jeu. Je veux bien que l’on joue, mais l’argent public, ces millions d’euros que nous leur octroyons chaque année, sert à bafouer les lois de la République française et à intenter des procès contre l’État. C’est là que réside le problème de l’efficacité du service public que nous soulevons. Cet argent que nous leur donnons est utilisé pour nous attaquer en justice, nous et l’État !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vive le Front national !
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je trouve pour ma part que nous sommes extrêmement raisonnables, car les crédits de cette mission demeurent très importants.
J’ai longtemps siégé, en tant que membre nommé par le président du Sénat, au conseil d’administration de l’Ofii. Celui-ci regrettait qu’on ne lui confie pas davantage de tâches juridiques liées à l’insertion des migrants. Il me semble en effet plus logique de confier cette mission à l’Ofii plutôt qu’à des associations, quels que soient par ailleurs leurs engagements.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Elles ne font pas le même métier !
M. Roger Karoutchi. Nous avons créé une série de structures étatiques pour assurer l’accueil, l’insertion et l’intégration des étrangers. Curieusement, ces structures se voient doublées, voire parfois contredites, par des associations qui ont signé des conventions avec les pouvoirs publics pour exercer des missions de service public, mais qui ne s’entendent pas avec l’Ofii.
Je suis au regret de devoir faire remarquer que la politique migratoire est la politique régalienne par excellence. S’il le faut, renforçons les pouvoirs et les capacités d’action de l’Ofii, car il est plus logique que ce soit cet organisme, donc l’administration de l’État, qui agisse en la matière, plutôt que des associations.
Je ne critique pas l’ensemble des associations : certaines réalisent un excellent travail, mais force est de constater, comme on peut le lire dans la presse, qu’il existe parfois des contradictions profondes entre l’attitude et le comportement de certaines associations, d’une part, et l’action des structures de l’État, d’autre part. Ces dernières ne sont pas partisanes : il s’agit de structures administratives, à l’instar de l’Ofii, à qui je tiens à rendre hommage ce soir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Retailleau, ministre. Je veux dire à Marie-Pierre de La Gontrie, dont je connais le sens des subtilités et de la nuance politique, qu’il est un peu fort de café de nous accuser de proximité avec le Rassemblement national au moment même où ses députés viennent de décider de mêler leurs voix à celles de La France insoumise, qui, il y a quelques jours à peine, déposait une proposition de loi ne visant à rien de moins qu’à abroger le délit d’apologie du terrorisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est bien le Premier ministre qui a fait ces propositions à Mme Le Pen !
M. Bruno Retailleau, ministre. Toute relation contractuelle implique des contraintes, de part et d’autre. J’entends que le principe de neutralité soit respecté par ces associations lorsqu’elles exercent une mission de service public, quelle qu’elle soit.
Par ailleurs, j’ai apprécié les propos de Roger Karoutchi. Comme je l’ai indiqué, la politique migratoire est au cœur des missions régaliennes de l’État. Eh bien, je ne suis pas favorable à ce que l’État sous-traite ses responsabilités : je souhaite que l’État puisse exercer ses responsabilités régaliennes directement.
Souvenez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, des débats qui ont eu lieu il y a quelques années lorsqu’on a voulu donner la possibilité à l’Ofii de réaliser des examens médicaux : certains se sont drapés dans leur dignité pour dire que l’Ofii ne pouvait pas faire de contrôles médicaux dans les CRA. Or cela s’est fait, et tout se passe très bien, sans aucun problème. Je propose d’adopter la même logique pour ce qui est du conseil juridique dans les CRA.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas ce que vous avez dit tout à l’heure !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-525 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-302 rectifié, présenté par Mme N. Goulet et MM. Reichardt et Canévet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
|
||
Intégration et accès à la nationalité française |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
TOTAL |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
SOLDE |
- 200 000 000 |
- 200 000 000 |
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, comme les précédents, porte sur les associations chargées de missions en matière d’asile et d’immigration.
Chaque année, je demande à la commission des lois de nous transmettre le document qui récapitule les aides versées à ces associations. J’ai d’ailleurs formulé cette observation lorsque la commission des finances a examiné ces crédits. Celle-ci a demandé à la Cour des comptes de réaliser un contrôle sur ce sujet. Les sommes en jeu s’élèvent à 1 milliard d’euros exactement, du moins selon le document de 2023, car je n’ai pas eu les chiffres pour cette année – je n’ai pas dû être assez gentille… (Sourires.)
Cet amendement vise donc à réduire les crédits destinés à ces associations. Je proposerai par ailleurs, en miroir, d’accroître d’un même montant les crédits en faveur de l’asile. Le droit d’asile est en effet extrêmement important et, lorsqu’on reçoit des gens en France, il faut pouvoir les accueillir.
Je voudrais aussi vous dire, monsieur le ministre, que ce débat me surprend toujours. Des articles de presse ont révélé certains dysfonctionnements. Des associations organisent des collectes en ligne pour détourner les procédures ou protéger des étrangers ayant fait l’objet d’une OQTF. Il est anormal que des associations chargées d’une mission de service public s’efforcent ainsi de contourner les lois de la République.
C’est la raison pour laquelle je propose cette diminution de crédits.
M. Jean-Jacques Panunzi. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Il est défavorable.
Nous devrons nous intéresser à l’ensemble des dépenses relatives à l’asile. Le rapport de la Cour des comptes sur l’association Coallia, la plus importante d’un point de vue financier, était éloquent. Cette affaire a révélé l’absence de contrôle de l’État sur ces associations, lesquelles sont sursollicitées en raison des besoins et de l’ampleur de la pression migratoire constante. Celle-ci les met constamment sous pression. Leur action est perturbée, alors qu’elles faisaient autrefois un bon travail et qu’elles se sont toujours inscrites, historiquement, de manière très digne dans le paysage français.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je fais mien l’objectif de Mme la sénatrice Nathalie Goulet. Le problème est que cet amendement vise le programme 104. Or celui-ci ne concerne pas seulement les associations : il comporte aussi les crédits de l’Ofii. Cet organisme joue un rôle essentiel, notamment pour mettre en œuvre le CIR, le programme Agir ou d’autres dispositifs encore.
Votre intention, madame la sénatrice, est positive, mais l’adoption de votre amendement aboutirait à diminuer d’autres dépenses essentielles. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je vais retirer mon amendement, dont le dispositif est sans doute mal calibré.
Mme la rapporteure a évoqué l’association Coallia. Celle-ci perçoit des aides de plus de 97 millions d’euros ; ce n’est tout de même pas rien !
Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur le fait que le blanchiment lié au trafic de migrants s’élève environ à 7 milliards d’euros en Europe. Je connais votre fort engagement contre la criminalité financière et de la grande criminalité ; le trafic de migrants est devenu un vrai business. Il importe donc de contrôler les associations. Notre commission des finances et la Cour des comptes réalisent un travail important sur ce sujet. Nous débattrons à nouveau de cette question l’année prochaine.
Cela étant dit, je retire l’amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° II-302 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-294, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
|
|
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
55 200 000 |
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55 200 000 |
TOTAL |
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55 200 000 |
|
55 200 000 |
SOLDE |
- 55 200 000 |
- 55 200 000 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Depuis plus d’une décennie, les opérateurs publics et associatifs ont vu leur budget croître de manière exponentielle. Entre 2012 et 2024, les dépenses de ces structures sont passées de 48 milliards à 81 milliards d’euros.
Cette explosion budgétaire reflète l’incapacité de l’État à rationaliser les missions confiées à ces organismes, malgré les promesses récurrentes de réformes, notamment sous la présidence d’Emmanuel Macron, par le biais du programme Action publique 2022. L’accueil des étrangers primo-arrivants est une mission qui nécessite une approche rigoureuse, basée sur la maîtrise des coûts et l’efficacité des dispositifs.
Bien que l’Ofii soit un opérateur public, cet organisme fonctionne selon des règles trop souples, qui favorisent les embauches et les dépenses superflues.
Cet amendement vise donc à réduire de 55,2 millions d’euros les crédits alloués à ces structures, dans la perspective de procéder à leur réinternalisation progressive au sein de l’État. Cela permettrait de rétablir un contrôle direct sur des missions essentielles et régaliennes, tout en répondant aux exigences de sobriété budgétaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° II-579, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
328 236 000 |
|
328 236 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
328 236 000 |
|
328 236 000 |
|
TOTAL |
328 236 000 |
328 236 000 |
328 236 000 |
328 236 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Précisons avant tout qu’un amendement identique a été adopté à l’Assemblée nationale.
Selon les chiffres de l’ONU et de l’Unicef, le flux de déplacés ukrainiens s’élève à plus de 9,8 millions de personnes, parmi lesquelles on compte plus de 2,5 millions d’enfants. Ces personnes ont fui majoritairement vers les pays européens frontaliers de l’Ukraine, mais aussi vers le reste du continent. En France, 65 358 réfugiés venus d’Ukraine ont ainsi été recensés à l’entrée du territoire national entre le 24 février et le 1er décembre 2022 – 98 % d’entre eux sont des ressortissants ukrainiens.
Compte tenu de l’intensification du conflit en Ukraine et de la décision prise par la Commission européenne, le 28 septembre 2023, de prolonger le bénéfice de la protection temporaire accordée aux réfugiés ukrainiens jusqu’au 4 mars 2026, il nous apparaît nécessaire d’inscrire dans ce texte les dépenses que l’on peut prévoir à ce titre, notamment en raison de leur financement par le budget opérationnel du programme 303 « Immigration et asile », puisque les bénéficiaires de la protection temporaire sont éligibles à l’ADA.
La question de l’hébergement des personnes réfugiées est à la fois essentielle et problématique. Au moment où la guerre s’intensifie en Ukraine, où les attaques russes plongent les Ukrainiens dans une situation difficile, et où l’aide des pays européens à l’Ukraine s’intensifie pour faire face à ce changement d’intensité de la guerre, le Gouvernement ne saurait revenir, nous semble-t-il, sur sa capacité d’accueil.
Les hébergements collectifs dits « SAS Ukraine » comprennent actuellement 11 000 places, afin d’héberger une partie des bénéficiaires de la protection temporaire.
Nous souhaitons inscrire dans le projet de loi de finances le montant de 328 236 000 euros au titre des dépenses inhérentes à ces structures qui doivent fournir un accueil, un accompagnement et un hébergement de qualité.
Cette inscription de crédits renforcerait la lisibilité des projets d’accompagnement consacrés aux Ukrainiens.
Cet amendement, qui a été adopté à l’Assemblée nationale, a été rédigé avec France terre d’asile et la Fédération des acteurs de la solidarité.
Le recours proposé à des transferts de crédits est uniquement formel. Nous appelons le Gouvernement à lever le gage et à prendre en compte, dans le projet de loi de finances, ce montant qui devra, de toute façon, être déboursé pour accueillir, comme cela est malheureusement prévisible, plus de réfugiés ukrainiens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. On ne peut que se réjouir du fait que la présente mission intègre bel et bien, en 2025, les crédits destinés à l’accueil des réfugiés ukrainiens.
Par ailleurs, le nombre de ces réfugiés diminue ; il ne me semble donc pas que l’augmentation proposée s’impose.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Comme vient de le rappeler la rapporteure spéciale, la mission intègre, dans ce PLF pour la première fois, les crédits pour les réfugiés ukrainiens, ce qui montre le souci de sincérité du Gouvernement.
Ensuite, alors que ces réfugiés étaient 96 000 à l’été 2022, ils ne devraient plus être que 35 000 en 2025 si les tendances constatées se poursuivent.
Enfin, nous voulons, après trois années de présence sur le territoire, que nos amis ukrainiens puissent sortir des dispositifs exceptionnels pour intégrer des cadres plus pérennes. Nous ne pouvons pas les enkyster, si je peux me permettre cette expression, dans un statut exceptionnel ; nous devons au contraire les intégrer complètement.
Si la guerre entre la Russie et l’Ukraine devait évoluer d’une manière qui inverse les tendances actuelles, il serait toujours possible alors pour le Gouvernement de prendre de nouvelles mesures.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-298, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
SOLDE |
- 200 000 000 |
- 200 000 000 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. L’explosion des coûts liés au droit d’asile est une situation alarmante. En 2025, l’action dédiée au droit d’asile représentera 80 % du budget du programme « Immigration et asile », avec des crédits dépassant le milliard d’euros.
L’allocation pour demandeur d’asile, qui coûte actuellement plus de 356 millions d’euros, est une aide qui doit être repensée pour en limiter l’effet attractif. Ce n’est pas le rôle de l’État de financer indéfiniment des dispositifs qui encouragent une immigration incontrôlée.
Le présent amendement tend donc à réduire l’enveloppe de ces aides de 200 millions d’euros ; cela passe par une rationalisation des dépenses et une priorisation des ressources vers des dispositifs mieux encadrés. Il s’agit d’un choix indispensable pour garantir la soutenabilité de nos politiques publiques.
Mme la présidente. L’amendement n° II-583, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
47 200 000 |
|
47 200 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
47 200 000 |
|
47 200 000 |
TOTAL |
47 200 000 |
47 200 000 |
47 200 000 |
47 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. L’allocation pour demandeur d’asile n’a pas vu son barème revalorisé depuis sa création, en 2015, et elle subit même, d’année en année, des coupes budgétaires.
Cela fait plusieurs années que, à chaque projet de loi de finances, nous nous exprimons contre cette diminution, et les arguments qui nous ont été opposés – moins d’arrivées seraient prévues, une nouvelle loi viendrait… – nous ont toujours surpris.
Cette fois, le projet annuel de performances du programme 303 « Immigration et asile » prévoit une augmentation du flux de demandes d’asile de 5 % sur l’année 2025, ce qui réduit nettement la pertinence de l’un des principaux arguments mis en avant pour baisser le montant des crédits alloués à l’ADA.
Pourtant, l’ADA est le seul moyen de survivance pour les demandeurs d’asile, puisque, contrairement à ce qui a été mis en place pour les Ukrainiens, ils ne peuvent pas signer de contrat de travail.
La trajectoire de baisse de l’ADA est donc tout simplement inique. Cette sous-budgétisation traduit le manque d’ambition de la politique d’accueil du Gouvernement, qui préfère flécher le budget vers le refoulement et la construction de centres de rétention administrative. Le ministère de l’intérieur s’inscrit ainsi dans la droite ligne d’une politique de criminalisation des étrangers, souvent poussés à travailler au noir dans des conditions plus que précaires, une politique qui tend à détruire le statut de l’asile.
Aussi, le groupe GEST demande la suppression de cette baisse de 47,2 millions d’euros. La proposition d’une réduction symétrique des crédits du programme « Intégration et accès à la nationalité française » est uniquement formelle : nous appelons le Gouvernement à lever le gage.
Mme la présidente. L’amendement n° II-527 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
47 000 000 |
|
47 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
47 000 000 |
|
47 000 000 |
TOTAL |
47 000 000 |
47 000 000 |
47 000 000 |
47 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement, presque identique à celui que Guy Benarroche vient de si bien défendre, tend à maintenir l’enveloppe globale de l’allocation pour demandeur d’asile à son niveau de 2024, alors que ces crédits sont, une nouvelle fois, en baisse une fois prise en compte l’intégration des crédits destinés à protéger les réfugiés ukrainiens.
Sur ce sujet, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, nous ne voyons pas pourquoi le Gouvernement s’acharne à réduire les moyens de subsistance des demandeurs d’asile, tout en leur refusant l’accès au marché du travail le temps de l’instruction de leur demande.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Ces demandes sont contradictoires : pour certains, il faut augmenter les crédits ; pour d’autres, il faut les diminuer…
En tout cas, à chaque fois que nous avons réduit les crédits de l’ADA, cela s’est révélé possible grâce au formidable travail de l’Ofpra.
En outre, cette baisse sera sans conséquence sur les demandeurs d’asile, dont les droits seront de toute façon respectés, y compris si des besoins supplémentaires se font sentir.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Même avis, madame la présidente.
Monsieur Hochart, nous prévoyons 300 millions d’euros pour 2025 ; c’était pratiquement 500 millions en 2019. La ligne du Gouvernement est donc très volontariste. Par ailleurs, je rappelle que nous ouvrons 29 ETP supplémentaires à l’Ofpra, pour augmenter le nombre de décisions – nous ciblons 10 000 décisions supplémentaires – et réduire les délais : ils sont actuellement de 4,8 mois en moyenne et nous voulons arriver à 2 mois.
Vous le voyez, ce n’est pas parce qu’on met toujours plus d’argent qu’on est plus efficace. C’est même parfois l’inverse !
Mme Nathalie Goulet. Tout à fait !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-527 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° II-520 rectifié est présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron, Uzenat, Darras et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° II-539 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
71 200 000 |
|
71 200 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
71 200 000 |
|
71 200 000 |
TOTAL |
71 200 000 |
71 200 000 |
71 200 000 |
71 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° II-520 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. Il est prévu, dans ce projet de budget pour 2025, de supprimer le financement de 6 500 places d’hébergement pour les demandeurs d’asile. Nous proposons d’annuler cette suppression pour maintenir le parc d’hébergement à son niveau de 2024.
Les besoins en matière d’hébergement sont considérables. Parmi les étrangers qui dorment à la rue ou dans des campements de fortune, il se trouve des demandeurs d’asile qui sont privés des conditions matérielles d’accueil, dont l’hébergement fait partie, et ce au mépris de la législation française et européenne.
Alors que la demande d’asile reste à un haut niveau, il nous paraît indispensable de maintenir le parc d’hébergement à son niveau actuel. Il s’agit non seulement de garantir l’exercice effectif du droit d’asile, mais également d’assurer des conditions de vie dignes aux étrangers demandeurs d’asile qui sont sur notre territoire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° II-539.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Par cet amendement, nous proposons de renforcer l’action de l’État en faveur de la création de places d’hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile et les bénéficiaires de la protection internationale.
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit en la matière une baisse des crédits par rapport à 2024. Or les conséquences de cette baisse sont simples et écrites noir sur blanc dans les documents budgétaires : le nombre de places d’hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile sera réduit de 6 500 par rapport à 2024.
Alors que le nombre de personnes à la rue ne cesse de croître, on nous demande ici de voter un budget qui prévoit de précariser encore davantage de personnes.
Rappelons-nous simplement que ces personnes qui demandent l’asile sont des hommes et des femmes, parfois accompagnés d’enfants.
Le groupe CRCE-K s’opposera toujours à la précarisation des personnes ; mes chers collègues, nous vous invitons à faire de même.
Pour justifier cette réduction, on nous avance l’argument d’une accélération des procédures de l’Ofpra. Mais nous votons ici une réduction de budget, alors qu’aucun élément chiffré ne permet de démontrer que cette accélération permettra de compenser la réduction des places d’hébergement. On prend ici des décisions vitales sur un fondement hasardeux.
C’est bien l’inverse que nous devrions voter, à savoir la construction de nouvelles places d’hébergement d’urgence afin de garantir des conditions d’accueil dignes. Il est de notre devoir de tout faire pour éviter les conséquences sanitaires et humanitaires d’une telle baisse du nombre de places d’hébergement.
Mme la présidente. L’amendement n° II-587, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
47 424 815 |
|
47 424 815 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
47 424 815 |
|
47 424 815 |
TOTAL |
47 424 815 |
47 424 815 |
47 424 815 |
47 424 815 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Monsieur le ministre, ce n’est peut-être pas parce qu’on met plus d’argent qu’on est plus efficace, mais quand on en met moins, on a beaucoup de chances de l’être moins aussi !
Nous voulons aussi attirer l’attention sur la problématique du logement. D’après les éléments transmis par l’État, seulement 65 % des demandeurs d’asile sont hébergés en 2024. Fermer des places d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile ne pourra qu’accroître le nombre de demandeurs d’asile qui ne sont pas hébergés ; cela confirme que l’État ne se donne pas les moyens d’un accueil digne de toutes les personnes en demande d’asile, en contradiction avec la directive d’accueil 2013/33 de l’Union européenne.
Pourtant, la direction générale des étrangers en France du ministère de l’intérieur a présenté en avril dernier – ce n’est pas si lointain – les axes du futur schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés, le Snadar, qui doit se déployer dès 2025. Ce schéma devait notamment exprimer l’ambition de permettre à un plus grand nombre de demandeurs d’asile d’accéder à un hébergement au titre du dispositif national d’accueil. Cela nous paraît être en contradiction avec la suppression de places dédiées.
En outre, comme le Gouvernement ne va pas pérenniser les fonds dédiés à l’Ukraine, puisque mon amendement n° II-579 a été rejeté, les demandeurs ukrainiens seront inclus dans le dispositif, ce qui diminuera d’autant le nombre de places disponibles. Où iront alors dormir les demandeurs d’asile ?
Je rappelle que le président Macron, dont vous êtes ministre, avait dit : « Je ne veux plus d’ici la fin de l’année avoir des hommes et des femmes dans les rues, dans les bois. Je veux partout des hébergements d’urgence. » C’était en 2017 et nous le rappelons à tous les gouvernements qui se sont succédé depuis. Cette promesse de mieux accueillir a même été réitérée. J’ai aussi entendu dire, à un moment donné, qu’il fallait être gentil avec les gentils…
Cet amendement a été travaillé avec la Fédération des acteurs de la solidarité et France terre d’asile, qui s’inquiètent à juste titre des risques majeurs d’augmentation du sans-abrisme et, pire encore, du déversement de toutes ces demandes de mise à l’abri sur le système de veille sociale, qui est déjà lui-même à bout de souffle.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Guy Benarroche. Nous souhaitons donc, monsieur le ministre, revenir sur cette suppression annoncée par le Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je voudrais quand même rappeler que les crédits de paiement dédiés à l’hébergement pour l’exercice prochain vont s’élever à 944,8 millions d’euros.
En outre, 17 % des places occupées dans les centres d’hébergement le sont de manière indue, c’est-à-dire par des personnes qui ne devraient pas y être, comme des déboutés du droit d’asile. D’où l’importance d’un pilotage.
Pour les Ukrainiens, je le redis, il faut leur trouver des solutions dignes et pérennes.
Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-520 rectifié et II-539.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que nous devons avoir achevé l’examen de cette mission à 20 heures. Nous n’avons presque pas de souplesse. Je vous demande donc d’être extrêmement concis pour les vingt-deux amendements restants.
L’amendement n° II-584, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
1 |
|
1 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
1 |
|
1 |
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Défendu, madame la présidente ! (Exclamations d’approbation amusée sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° II-486 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° II-606 est présenté par Mmes Schillinger et Ramia, MM. Rohfritsch, Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
59 000 000 |
|
34 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
TOTAL |
59 000 000 |
|
34 000 000 |
|
SOLDE |
+ 59 000 000 |
+ 34 000 000 |
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-486.
M. Bruno Retailleau, ministre. J’ai évoqué cet amendement tout à l’heure : il vise à augmenter de 59 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 34 millions d’euros en crédits de paiement le programme « Immigration et asile » pour assurer le financement de nouvelles places en centre de rétention administrative.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° II-606.
Mme Patricia Schillinger. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° II-299, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
100 000 000 |
|
100 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
TOTAL |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. C’est quasiment le même amendement que celui de M. le ministre, puisque nous proposons d’augmenter les crédits des centres de rétention administrative de 100 millions d’euros. Cela permettra peut-être d’éviter que neuf personnes s’évadent du CRA de Nice…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Favorable aux amendements identiques nos II-486 et II-606 ; défavorable à l’amendement n° II-299.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° II-299 ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-486 et II-606.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° II-299 n’a plus d’objet.
L’amendement n° II-521 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
3 034 000 |
|
3 034 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
3 034 000 |
|
3 034 000 |
TOTAL |
3 034 000 |
3 034 000 |
3 034 000 |
3 034 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à renforcer les moyens des personnels de santé au sein des CRA.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-521 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-522 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
500 000 |
|
500 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
500 000 |
|
500 000 |
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. L’un des rares mérites de la loi Immigration et intégration du 26 janvier 2024 est d’avoir interdit le placement en rétention des mineurs de 18 ans. Cependant, cette interdiction ne s’applique pas aux zones d’attente, dans lesquelles les mineurs étrangers peuvent toujours être retenus.
Pour faire face à ces situations inacceptables, nous proposons de garantir la prise en charge de ces mineurs dans des conditions adaptées. Il faut leur proposer des solutions d’hébergement également respectueuses de leurs droits et de leur dignité sur le territoire français et dans les zones d’attente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je serai bref, parce que je doute de pouvoir revenir samedi… (Rires.)
Le placement des mineurs en zone d’attente est conforme au droit international, y compris à la convention de Chicago, ainsi qu’au droit européen. Il est important de le dire.
Je vous rappelle aussi que les mineurs bénéficient notamment d’un examen médical et qu’un administrateur ad hoc est désigné sans délai par le procureur de la République, ainsi qu’un avocat. Il est évident qu’un mineur est protégé non seulement par le droit international et européen, mais aussi par le droit français.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-522 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-580, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
6 450 800 |
|
6 450 800 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
6 450 800 |
|
6 450 800 |
TOTAL |
6 450 800 |
6 450 800 |
6 450 800 |
6 450 800 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Le nombre de femmes qui subissent des violences après leur arrivée en France ou pendant leur parcours migratoire est énorme. À cet égard, les chiffres du rapport du Grevio, le groupe d’experts du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, sont alarmants.
Pourtant, la tarification des places destinées aux femmes victimes de violences qui demandent l’asile n’a pas été revalorisée et ne permet pas de garantir des conditions d’hébergement et d’accompagnement médico-psychosocial adaptées à leurs situations spécifiques.
C’est pourquoi nous demandons la revalorisation de cette tarification à hauteur des places financées dans le parc généraliste du programme 177. Mieux accueillir, c’est aussi prendre en compte les spécificités des personnes arrivant sur notre territoire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° II-528 rectifié, présenté par M. Bourgi, Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
936 000 |
|
936 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
936 000 |
|
936 000 |
TOTAL |
936 000 |
936 000 |
936 000 |
936 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Lors de l’examen du projet de loi Immigration et intégration, nous avions proposé d’interdire le placement en rétention des personnes en situation de handicap, y compris les personnes souffrant de troubles mentaux.
Notre amendement avait été rejeté. En guise de repli, le groupe SER propose, par cet amendement déposé par notre collègue Hussein Bourgi, de doter chaque CRA d’un professionnel de la santé mentale. Je rappelle que le Premier ministre avait annoncé que la santé mentale serait la grande cause nationale de 2025.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je rappellerai que, dès son arrivée au CRA, chaque étranger bénéficie d’un examen de vulnérabilité qui prend notamment en compte son état psychologique. En outre, une assistance médicale est prévue, régie par une convention avec un centre hospitalier.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-528 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-300, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-581, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Opérations de recherche et de sauvetage en mer
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
Opérations de recherche et de sauvetage en mer |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement vise à créer un programme consacré aux opérations de recherche et de sauvetage en mer.
Selon l’Organisation mondiale de la santé, le nombre de décès et de disparitions en mer Méditerranée est passé de 2 048 à 3 041 entre 2021 et la fin de 2023. L’Unicef rapporte que plus de 11 600 mineurs non accompagnés ont traversé la Méditerranée centrale entre janvier et septembre 2023 – une augmentation de 60 % par rapport à l’année précédente. Dans la Manche, l’année 2024 est la plus meurtrière depuis le début des traversées dans des embarcations de fortune, avec au moins 54 décès recensés.
Monsieur le ministre de l’intérieur, vous aviez déclaré, avant d’être ministre, en particulier au moment des événements à propos de l’Ocean Viking, que beaucoup d’ONG devaient être considérées comme une sorte d’auxiliaire des filières de passeurs. Vous aviez dit que les passeurs, les trafiquants d’êtres humains, les mafias gagnent des milliards – on est bien d’accord ! – avec l’appui des ONG – on n’est pas d’accord !
Quelle honte ! En effet, c’est bien du fait de la carence des États que ces associations et collectifs de la société civile assurent ces opérations de secours malgré des moyens limités et des pressions administratives, politiques et judiciaires. Nous regrettons cette vision, qui entraîne une réponse toujours plus sécuritaire à la gestion de ces traversées qui transforment chaque jour nos mers en cimetières.
C’est pourquoi nous proposons de créer un fonds consacré à la mission de sauvetage en mer.
Mme la présidente. L’amendement n° II-608 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Sauvetage en mer
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
Sauvetage en mer |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Il y aurait beaucoup à dire sur un certain nombre d’ONG, monsieur Benarroche…
Mais si je demande également le retrait de ces amendements, c’est parce que le sauvetage en mer est de la compétence du secrétariat général à la mer, qui dépend du Premier ministre. Il ne relève donc pas de cette mission.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-608 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-526 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
500 000 |
|
500 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
500 000 |
|
500 000 |
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Nous proposons d’augmenter le budget de l’Ofpra dans l’objectif de renforcer les actions de formation des agents de protection, qui ont une charge de travail énorme et pour lesquels le turnover est important.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Même avis.
Le PLF prévoit déjà un effort significatif pour l’Ofpra : comme je l’ai déjà mentionné, vingt-neuf ETP seront créés pour accélérer l’instruction des dossiers.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-526 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-523 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron, Ros et Uzenat, Mme Monier, M. Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
300 000 |
|
300 000 |
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
300 000 |
|
300 000 |
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à rehausser les crédits consacrés au pôle Protection de l’Ofpra, qui délivre les documents d’état civil. L’augmentation du nombre de décisions prises et la progression du taux de protection ont pour conséquence une augmentation du nombre d’actes d’état civil qui doivent être établis par les services de l’office.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-523 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-530 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
100 000 000 |
|
100 000 000 |
|
TOTAL |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Nous avons longuement débattu, lors de l’examen du projet de loi Immigration et intégration, du puissant levier d’intégration que constitue l’apprentissage de la langue, mais aussi des exigences disproportionnées inscrites dans ce texte et des effets d’exclusion qu’il ne manquera pas de produire.
Cet amendement vise donc à abonder de 100 millions d’euros le programme « Intégration et accès à la nationalité française », de sorte que puissent être mis en œuvre les modules de formation nécessaires pour atteindre les nouvelles exigences linguistiques fixées par le législateur.
Mme la présidente. L’amendement n° II-529 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement tend à doter de 20 millions d’euros supplémentaires les crédits du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » pour financer des formations fournies par les partenaires privés de l’Ofii dans le cadre du contrat d’intégration républicaine.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-530 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-529 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° II-586, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
1 000 000 |
|
1 000 000 |
|
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. La maîtrise de la langue française est un formidable outil de partage et d’intégration et permet un parcours sans rupture, dès lors que les moyens nécessaires sont mis en place.
La loi du 26 janvier 2024 a prévu à cet égard un rehaussement important des niveaux de français requis pour les étrangers en situation régulière. Toutefois, passer d’une obligation de suivi de formation à une obligation d’obtention d’un niveau de français va contribuer à précariser les personnes concernées, notamment les moins scolarisées d’entre elles.
Supprimer les budgets alloués à ces formations délivrées par l’Ofii et les structures de proximité, alors même qu’il y a une obligation de réussite, rendra quasiment impossible l’accès à la langue française et à la stabilité administrative.
D’un côté, l’État fixe une obligation de certification pour l’obtention de titres de séjour ; de l’autre, il ne donne pas à l’Ofii les moyens d’honorer ses missions d’intégration.
Les organismes de formation et les associations de proximité ne peuvent pas pallier ces manques, surtout au vu des enveloppes budgétaires dont elles disposent, elles aussi en baisse constante ces dernières années. Monsieur Karoutchi, s’il n’y a pas d’argent pour les associations, il n’y en a pas non plus pour l’Ofii !
Sans moyens mis en œuvre pour l’apprentissage de la langue, cette exigence devient discriminatoire et, pire encore, un prétexte d’invisibilisation des étrangers, voire d’exclusion.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je ne peux pas laisser dire que rien ne sera fait. Dans la loi Immigration et intégration, nous avons rehaussé les exigences, en passant d’une logique de moyens à une logique de résultats, et l’offre de formation va être révisée. Ainsi, une formation linguistique adaptée, en présentiel, de 600 heures sera déployée pour des publics non lecteurs et non scripteurs ; elle sera complétée par une offre complémentaire, notamment d’enseignement à distance.
Nous mettrons évidemment en place, en cohérence avec la loi, les outils nécessaires pour que les étrangers concernés puissent apprendre le français.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° II-585, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Moyens supplémentaires à destination du programme AGIR
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
15 000 000 |
|
15 000 000 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
Moyens supplémentaires à destination du programme AGIR |
15 000 000 |
|
15 000 000 |
|
TOTAL |
15 000 000 |
15 000 000 |
15 000 000 |
15 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-296, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
|
|
|
Intégration et accès à la nationalité française |
|
1 344 233 |
|
1 344 233 |
TOTAL |
|
1 344 233 |
|
1 344 233 |
SOLDE |
- 1 344 233 |
- 1 344 233 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° II-540, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
2 355 767 |
|
2 355 767 |
Intégration et accès à la nationalité française |
2 355 767 |
|
2 355 767 |
|
TOTAL |
2 355 767 |
2 355 767 |
2 355 767 |
2 355 767 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo. (Défendu ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Pardonnez-moi, mes chers collègues, mais nous parlons d’êtres humains : on ne peut pas évacuer le sujet sans avoir un minimum d’égards pour eux ! (Brouhaha sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Ravier. Passez la seconde !
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Par cet amendement, nous proposons de renforcer l’action de l’État en faveur des foyers de migrants, pour garantir à ces derniers un hébergement convenable.
La lutte contre l’immigration irrégulière est un sujet de fond, mais nous devons nous rappeler qu’il s’agit d’hommes et de femmes, parfois accompagnés d’enfants.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Défavorable pour l’amendement n° II-296 ; demande de retrait pour l’amendement n° II-540.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-524 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Intégration par le travail et régularisation des travailleurs sans titre
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
1 |
|
1 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
Intégration par le travail et régularisation des travailleurs sans titre |
1 |
|
1 |
|
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement d’appel a pour objet la création d’un nouveau programme consacré à la régularisation par le travail.
Par cet amendement, je souhaite vous interpeller, monsieur le ministre, sur l’impasse où mène votre refus politique de régulariser les travailleurs étrangers sans titre de séjour. C’est en tout cas la consigne que vous avez adressée aux préfets : régularisez moins !
Vous laissez entendre que la France régulariserait à tour de bras et de façon massive, ce qui est faux. On compte environ 30 000 étrangers régularisés par an, un chiffre stable et faible, de toute évidence, puisque cela représente 0,5 % de la population de personnes étrangères qui vivent en France. Sur ces 30 000 étrangers régularisés par an, environ 10 000 le sont pour motif économique, soit 0,03 % de la population active ou 0,35 % des chômeurs en catégorie A. Je le précise pour couper court aux discours qui laissent penser qu’on réglera le problème du chômage en refusant de régulariser les travailleurs étrangers sans titre.
Il y a urgence à aborder ces sujets avec sérieux et responsabilité !
Mme la présidente. L’amendement n° II-582, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Régularisation des travailleurs sans papiers
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Immigration et asile |
|
1 |
|
1 |
Intégration et accès à la nationalité française |
|
|
|
|
Régularisation des travailleurs sans papiers |
1 |
|
1 |
|
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Sans régularisation des travailleurs sans papiers, l’intégration est sans issue. (M. Stéphane Ravier proteste.) On peut se raconter toutes les histoires qu’on veut… D’ailleurs, certains l’ont bien compris, et je n’ai pas uniquement en tête des gens de gauche, messieurs les sénateurs de droite : je pense par exemple aux responsables du Medef ou des chambres de commerce et d’industrie.
Refuser l’intégration de tous les travailleurs qui sont sur notre territoire et galèrent pour avoir des papiers, alors que, depuis des années, ils travaillent ici à la satisfaction de leurs employeurs et pour le bien de notre économie, constitue un véritable déni de réalité.
M. Stéphane Ravier. Vous voulez 500 000 clandestins de plus ?
M. Guy Benarroche. Vous allez nous faire finir trop tard, monsieur Ravier ; ce n’est pas dans vos habitudes !
Ainsi, plus de 600 000, voire de 700 000 personnes sans papiers travaillent dans les secteurs du BTP, des plateformes, de la livraison ou du nettoyage.
Décider de les régulariser, c’est refuser de fermer les yeux sur ce système qui, dans la clandestinité, s’arrange d’une armée de réserve. C’est aussi reconnaître leur apport à notre société comme au marché du travail. C’est enfin une possibilité, une réalité d’intégration réussie.
M. Stéphane Ravier. 500 000 de plus !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. Défavorable.
M. Bruno Retailleau, ministre. Je veux juste rappeler un chiffre : plus de 460 000 étrangers en situation régulière sont inscrits à France Travail. Peut-être peut-on envisager de leur donner une qualification… Avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-524 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen de l’amendement portant sur les objectifs et indicateurs de performance de la mission « Immigration, asile et intégration », figurant à l’état G.
ÉTAT G
946 |
Immigration, asile et intégration |
947 |
Améliorer l’efficacité de la lutte contre l’immigration irrégulière (303) |
948 |
Nombre de retours forcés exécutés (303) |
949 |
Améliorer les conditions d’accueil et d’intégration des étrangers (104) |
950 |
Efficience de la formation linguistique dans le cadre du CIR (contrat d’intégration républicaine) (104) |
951 |
Réduire les délais de traitement de la demande d’asile (303) |
952 |
Délai de l’examen d’une demande d’asile par l’OFPRA (303) |
953 |
104 - Intégration et accès à la nationalité française |
954 |
Améliorer l’efficacité du traitement des dossiers de naturalisation |
955 |
Efficacité de la procédure d’instruction d’un dossier de naturalisation |
956 |
Améliorer les conditions d’accueil et d’intégration des étrangers [Stratégique] |
957 |
Efficience de la formation linguistique dans le cadre du CIR (contrat d’intégration républicaine) [Stratégique] |
958 |
Part des signataires du CIR ayant accédé à un emploi d’une durée au moins égale à un mois au cours du semestre suivant le semestre de leur inscription à France Travail |
959 |
Part des signataires du CIR ayant déclaré rechercher un emploi lors du premier entretien à l’OFII, inscrits à France Travail la même année (calendaire) que la signature du CIR |
960 |
Programme AGIR : taux de sortie positive en logement et en emploi ou en formation des bénéficiaires de la protection internationale |
961 |
303 - Immigration et asile |
962 |
Améliorer l’efficacité de la lutte contre l’immigration irrégulière [Stratégique] |
963 |
Nombre d’éloignements et de départs aidés exécutés |
964 |
Nombre de retours forcés exécutés [Stratégique] |
965 |
Optimiser la prise en charge des demandeurs d’asile |
966 |
Part des demandeurs d’asile hébergés |
967 |
Part des places occupées par des demandeurs d’asile et autres personnes autorisées |
968 |
Réduire les délais de traitement de la demande d’asile [Stratégique] |
969 |
Délai de l’examen d’une demande d’asile par l’OFPRA [Stratégique] |
970 |
Taux de transfert des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin |
Mme la présidente. L’amendement n° II-531 rectifié, présenté par Mme Narassiguin, M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi, Chaillou et Darras, Mme Harribey, MM. Jacquin et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Monier, MM. Roiron, Ros, Uzenat, Féraud et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 950
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
Accès et financement de la formation linguistique dans le cadre du CIR (Contrat d’intégration républicaine)
Délai d’attente pour accéder à une formation linguistique
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Par cet amendement, nous proposons de créer un nouvel indicateur destiné à évaluer l’effectivité de l’accès à la formation linguistique et l’adéquation des moyens mobilisés au regard des besoins.
La loi Immigration et intégration a prévu de conditionner la délivrance de la carte de séjour pluriannuelle à une maîtrise du français de niveau A2. Concrètement, cela signifie que les primo-arrivants devront atteindre, en une année seulement, un niveau de maîtrise de la langue équivalent à ce que l’on attend aujourd’hui d’un étranger établi en France depuis au moins quatre ans.
Outre son caractère injuste et disproportionné, cette mesure paraît aujourd’hui inapplicable. En effet, les organismes de formation et les centres d’examen sont déjà saturés, ils ne sont pas présents sur l’ensemble des territoires et plusieurs mois d’attente sont nécessaires avant de pouvoir intégrer une formation linguistique ou s’inscrire à un examen.
Un nouvel indicateur relatif au délai d’attente pour accéder à une formation linguistique permettrait d’évaluer l’adéquation entre les demandes et l’offre de formation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure spéciale. La commission s’en remet à la sagesse de notre assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° II-531 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Mme Laurence Harribey applaudit.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».
8
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. Lors du scrutin n° 142 de ce jour, sur les amendements identiques nos II-37 et II-250 portant sur les crédits de la mission « Santé », mes collègues Jean-Luc Brault, Louis Vogel, Alain Marc, Jean-Pierre Grand, Marc Laménie, Pierre Médevielle et Claude Malhuret souhaitaient s’abstenir.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
9
Loi de finances pour 2025
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Sécurités
Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurités » (et article additionnel après l’article 64) et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».
La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Belin, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux d’ouvrir cette discussion sur la mission « Sécurités ». Avant tout, monsieur le ministre, je veux adresser un message de reconnaissance à l’ensemble de nos forces de l’ordre placées sous votre autorité – gendarmes, policiers, sapeurs-pompiers – pour le travail extraordinaire qu’elles réalisent au quotidien et, en particulier, celui qu’elles ont accompli en 2024.
Nous avons en effet connu une année quelque peu exceptionnelle, marquée par plusieurs événements dont la réussite a exigé un engagement intense des forces de sécurité. D’un anniversaire de débarquement à un autre, en passant bien évidemment par les jeux Olympiques et Paralympiques, celles-ci ont été diablement sollicitées !
Bien évidemment, le succès hors du commun d’un événement comme les Jeux a reposé sur la bonne organisation des épreuves sportives et sur le cadre patrimonial exceptionnel – tous les monuments de Paris – dans lequel cet événement s’est inscrit. Mais il est dû, aussi, à la sécurité sans faille qui a été assurée tout au long des épreuves. Cela, monsieur le ministre, nous le devons aux gendarmes et policiers mobilisés.
Bien sûr, ce succès de la sécurité des Jeux a eu un coût. En commission des finances, nous l’avons estimé à 1,1 milliard d’euros, ce qui a eu, évidemment, des conséquences sur le budget 2024 de cette mission.
S’y sont ajoutés tous les événements survenus outre-mer – en Nouvelle-Calédonie, à la Martinique et à Mayotte –, qui ont imposé de mobiliser de nombreux moyens humains. Les auditions que nous avons eues avec la gendarmerie nationale et la police nationale nous ont permis d’en évaluer le coût à un peu plus de 150 millions d’euros.
On comprend donc bien pourquoi, à enveloppe constante, on a peiné à finir l’année, ce qui explique notamment certaines problématiques qu’il a fallu clarifier. Je pense notamment aux impayés de loyers de la gendarmerie, pour environ 90 millions d’euros, qui suscitent des interrogations. Un rattrapage est prévu dans le projet de loi de finances de fin de gestion.
Les crédits pour 2025 de la mission « Sécurités » s’inscrivent dans la continuité de la loi du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, la Lopmi. En progression, ils dépassent légèrement 24 milliards d’euros en crédits de paiement.
On ne peut que se satisfaire de cette évolution. Les besoins sont en effet immenses, comme on le voit partout sur le terrain, en particulier pour ce qui concerne la lutte contre les narcotrafics, dont vous avez fait une priorité, monsieur le ministre. Aucun territoire n’est épargné par le phénomène : vous savez à quel point, avec tous les élus de mon département de la Vienne, nous avons été marqués par les règlements de comptes qui se sont déroulés dans une ville paisible comme Poitiers, avec des conséquences des plus regrettables.
Il nous faut donc des moyens, notamment humains ; ces moyens figurent dans la copie qui nous est présentée ce soir.
Il y en a pour la police nationale, un peu moins pour la gendarmerie, et il me semble intéressant d’entrer dans le détail de cette répartition. En effet, en zone police, la police nationale a pu bénéficier du concours, de l’aide, du renfort des polices municipales – c’est une chance ! En revanche, en zone gendarmerie, les gendarmes sont les seuls à intervenir ; ils n’ont aucun recours possible. C’est pourquoi il sera essentiel de poursuivre, tout au long de l’année, les discussions sur les moyens humains : il faut que nous soyons en capacité de répondre aux besoins humains en zone gendarmerie.
Si la police nationale voit ses ressources humaines progresser, elle manque en revanche de moyens matériels, l’enveloppe budgétaire contrainte de l’année 2024 n’ayant pas permis de procéder à certains achats de matériel. On y remédie sur l’exercice 2025.
Inversement, la gendarmerie dispose de moins de moyens humains, mais un effort est fait sur l’immobilier. La commission des finances a travaillé sur ce sujet – il nous semble en effet important d’avoir, sur le terrain, des casernes de gendarmerie qui concourent à l’attractivité de la profession et offrent les conditions d’une bonne exécution des missions de gendarmerie. Nous nous sommes notamment déplacés à Dijon et sur le plateau de Satory, mais je pécherais si je n’évoquais pas également les projets de reconstruction de gendarmeries à Loudun et Civray, dans mon département. Je sais aussi qu’il en existe dans la Nièvre, car nous avons été interrogés sur la possibilité, en tenant compte des décrets du 28 janvier 1993 et du 26 décembre 2016, de trouver de nouveaux plans pour répondre aux besoins avec les financeurs, les bailleurs sociaux et les collectivités.
Cette question des nouvelles casernes, monsieur le ministre, nous renvoie à la question des moyens humains. Il faudra en effet, pour garantir le bon fonctionnement de ces structures, pouvoir armer les 80 nouvelles brigades de gendarmerie créées en 2024 et les 57 nouvelles qui sont prévues en 2025. C’est là un point essentiel.
Au titre des autres moyens nécessaires, je vous ai bien entendu, monsieur le ministre, pendant l’examen de la mission « Immigration, asile et intégration », évoquer la question des centres de rétention administrative. Il est question d’en ouvrir un certain nombre, cela a même été programmé ; il faudra aussi trouver les moyens humains pour les faire fonctionner.
Il en va de même pour la police aux frontières, qui doit faire face à tous les enjeux liés aux traversées de la mer Méditerranée et de la Manche. Vous le savez mieux que quiconque ici, tant que nous aurons un semblant d’Europe heureuse et une Afrique malheureuse, nous ferons face à de nombreuses difficultés dans nos politiques migratoires. Il faudra donc, là encore, trouver les moyens de renforcer la police aux frontières.
Je ne m’appesantirai pas sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », couramment appelé « CAS Radars ». Je profiterai des interventions, des éventuels questionnements et de l’examen des amendements pour l’évoquer, ainsi que, plus largement, le sujet de la sécurité routière. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en premier lieu, je souhaite, à l’instar de mon collègue rapporteur spécial, avoir un mot à l’égard des forces de sécurité civile – sapeurs-pompiers, personnels navigants, formateurs militaires, démineurs et associations agréées de la sécurité civile –, qui ont été particulièrement mobilisées en cette année 2024.
La sécurisation et la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 n’auraient pu être possibles sans l’engagement exceptionnel des professionnels, des volontaires et des bénévoles qui font la force et assurent la résilience de notre modèle de sécurité civile.
En outre, l’année 2024 a été marquée par des inondations sans précédent en France. Ces épisodes climatiques soulignent un impératif : celui, pour la sécurité civile, de disposer de moyens humains et matériels adaptés face à la multiplication des catastrophes naturelles.
En ce sens, le PLF pour 2025 prévoit une dotation de 861 millions d’euros en autorisation d’engagement (AE) et de 831 millions d’euros en crédits de paiement (CP).
Dans un contexte de contrainte budgétaire, et dans l’attente des conclusions des travaux du Beauvau de la sécurité civile, le Gouvernement propose donc pour le programme 161 un budget qui, pris dans sa globalité, apparaît relativement stable par rapport à l’année précédente.
Passée cette observation générale, deux éléments sont à retenir concernant l’analyse des crédits.
Premièrement, les crédits d’investissement connaissent une baisse par rapport à 2024.
Cette diminution est à nuancer pour deux raisons. D’une part, le niveau d’investissement est extrêmement variable d’une année sur l’autre en fonction des commandes d’aéronefs. Or le renouvellement de la flotte d’avions bombardiers d’eau est reporté à l’horizon 2030. D’autre part, la loi de finances initiale pour 2024 avait prévu d’importants crédits d’investissement pour la création d’une nouvelle unité terrestre, ainsi que pour la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques.
Deuxièmement, cette baisse modérée des crédits ne remet pas en cause les capacités opérationnelles de la sécurité civile, du moins à court terme.
Le PLF pour 2025 prévoit ainsi des crédits élevés pour la location d’aéronefs, pour le financement des pactes capacitaires, ou encore pour le renforcement des colonnes de renfort : autant de moyens indispensables à la mise en œuvre d’une solidarité nationale face à la double extension, temporelle et géographique, des risques de catastrophes naturelles.
J’en viens aux enjeux thématiques du programme.
La question des capacités opérationnelles m’amène d’abord à évoquer la situation de la flotte d’aéronefs de la sécurité civile.
Si la saison de feux de forêt a été sous contrôle en 2024, je tiens à souligner le caractère heureux de cette réussite. En effet, l’extrême mobilisation des agents pour les Jeux, doublée d’un taux de disponibilité anormalement bas des appareils bombardiers d’eau, aurait pu mener à des scénarios plus malheureux, avec un risque de rupture capacitaire.
Dans ce contexte, mes chers collègues, j’attire votre attention sur trois points concernant les moyens aériens.
Tout d’abord, le renouvellement de la flotte d’hélicoptères se poursuit au rythme prévu, avec la livraison des trois premiers modèles H145 d’ici à la fin de cette année.
Ensuite, le budget pour 2025 consacre la pérennisation de crédits dédiés à la location d’aéronefs : 30 millions d’euros sont ainsi prévus pour permettre la location de 10 hélicoptères et de 6 avions.
Enfin, je ne vous cache pas mon inquiétude quant à l’entretien et au renouvellement de la flotte des 12 avions Canadair français. Ce renouvellement continue d’être repoussé dans le temps et les deux premiers appareils commandés par la France via la Commission européenne ne devraient être livrés qu’en 2030, pour des raisons techniques. Il faudra donc composer avec la flotte existante encore au moins cinq ans, si ce n’est dix ans. Or cette flotte est vieillissante, ce qui contraint à ménager les appareils et risque de nous forcer à faire évoluer la doctrine française de lutte contre les incendies.
Mais les moyens de la sécurité civile ne se résument pas aux aéronefs. J’en viens donc à un deuxième sujet, celui des pactes capacitaires destinés à renforcer les moyens opérationnels des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) par l’acquisition de matériels, notamment de véhicules, cofinancés par l’État.
À la suite des incendies de 2022, pour faire face aux feux de forêt, une enveloppe additionnelle de 150 millions d’euros en AE avait été inscrite dans le PLF pour 2023. La promesse semble aujourd’hui tenue : 37 millions d’euros de CP ont été consommés en 2023 ; 29 millions d’euros devraient l’être en 2024 ; 45 millions d’euros sont prévus pour 2025.
Malgré quelques retards, ces pactes sont source de satisfaction. Dans un contexte de contrainte budgétaire, la mutualisation des commandes au niveau national a permis de baisser le prix d’achat des équipements d’environ 30 %.
Néanmoins, il est important de souligner que les pactes capacitaires, aujourd’hui essentiellement dédiés à la lutte contre les feux de forêt, constituent un dispositif de financement exceptionnel dont les crédits devraient être consommés dans leur entièreté d’ici à 2027.
Or d’autres défis s’imposent à nous.
Les conclusions de la récente mission de contrôle relative aux inondations survenues en 2023 et au début de l’année 2024, menée par nos collègues Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux, ont ainsi mis en évidence les limites capacitaires auxquelles ont pu être confrontés nos services de secours.
Il paraît donc légitime de réfléchir à la mise en place, à moyen terme, de dispositifs de financement dédiés au renforcement des moyens de prévention et de lutte contre les risques d’inondation.
Le sujet des inondations m’amène vers celui de la modernisation des systèmes d’information, de communication et d’alerte de la sécurité civile.
De fait, les inondations qui ont touché l’Espagne le mois dernier mettent en lumière l’impératif de disposer d’outils de communication et d’alerte à la population pleinement fonctionnels. Je reste donc attentif à l’évolution des projets de modernisation comme NexSIS et FR-Alert, ou encore à la possible mise en place d’un numéro unique d’urgence. Ces projets sont sur la bonne voie, mais ils nécessitent des financements publics, une mise à l’épreuve du réel et une volonté politique.
De la question de la volonté politique, mes chers collègues, j’en viens, en guise de conclusion, à la reprise, voilà quelques jours, du Beauvau de la sécurité civile.
Ce cycle de concertation nationale devrait s’achever au printemps 2025 par la présentation d’un projet de loi portant l’ambition de « poser les bases d’un modèle de sécurité civile renouvelé », trente ans après la loi de départementalisation des services d’incendie.
Par ses travaux de contrôle sur la flotte d’aéronefs bombardiers d’eau ou sur le projet NexSIS, par l’adoption de résolutions comme celle visant à reconnaître la spécificité de l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires, ou encore par les débats de samedi dernier sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurances (TSCA) et les modalités de financement des Sdis, le Sénat a déjà eu l’occasion de faire valoir ses positions.
Dans l’attente des résultats du Beauvau, dont les propositions devront être à la hauteur des attentes, je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Sécurités », qui assurent des moyens stables pour l’année 2025. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Paul, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en conformité avec la trajectoire prévue par la Lopmi, le budget de la gendarmerie nationale, avec 11,4 milliards d’euros en AE et 10,9 milliards d’euros en CP, présente cette année une hausse globale de 500 millions d’euros.
Le maintien de cette trajectoire dans un contexte budgétaire difficile est un vrai motif de satisfaction. Toutefois, le tableau est très contrasté, avec un effort sur l’investissement et un coup d’arrêt en matière d’effectifs – je développerai le premier point, tandis que Jérôme Darras évoquera le second.
Alors que, l’année dernière, l’augmentation des crédits avait été largement absorbée par les dépenses de personnel, c’est cette année l’investissement immobilier, grand oublié des deux derniers exercices, qui bénéficie, enfin, de l’essentiel de la hausse. Les crédits sont ainsi portés à 295,2 millions d’euros en AE et 175,5 millions d’euros en CP.
C’est le signe d’une véritable volonté de réamorcer la pompe, avec un budget de taille pour des opérations de maintenance, de réhabilitation et de construction. Pourtant, nous sommes encore loin des 400 millions d’euros nécessaires et de l’inscription d’une programmation immobilière dans la durée, seule susceptible d’éviter une dégradation irrémédiable du parc et un glissement vers le locatif, qui coûtera plus cher et privera le gestionnaire de ses marges de manœuvre. Le nouveau directeur général de la gendarmerie nationale a dessiné, lors de son audition devant notre commission, les contours d’une telle programmation ; espérons que celle-ci sera adossée à des moyens à la hauteur.
À court terme, il est également impératif de faciliter la vie aux collectivités qui souhaitent accueillir, en locatif, des brigades de gendarmerie. Les obstacles financiers et réglementaires restent trop nombreux et la suspension du paiement des loyers de 5 000 casernes aux collectivités, annoncée en octobre en raison des coûts non budgétés liés à la crise en Nouvelle-Calédonie et aux jeux Olympiques et Paralympiques, n’aura pas contribué à renforcer la confiance.
Au fond, la trajectoire budgétaire de la gendarmerie ressemble à un mouvement de balancier : soit on finance les augmentations d’effectifs en sacrifiant l’investissement immobilier, soit – comme cette année – on fait porter l’effort sur l’investissement en gelant les augmentations prévues par la Lopmi. Ce n’est pas satisfaisant, mais il n’y a pas de solution miracle.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donc, sur la recommandation de ses deux rapporteurs pour avis, préconisé l’adoption des crédits de cette mission, avec les réserves mentionnées. Nous attendons également les explications du Gouvernement sur l’amendement n° II-498 portant annulation de crédits, à hauteur de près de 19 millions d’euros, au profit de la police nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jérôme Darras, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le titre 2 du projet de budget de la gendarmerie apparaît correctement doté, avec une hausse de 83 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
Mais, en réalité, cette augmentation couvre la seule mise en œuvre de primes et mesures indiciaires, aucun recrutement net n’étant programmé en 2025. L’absence des 500 emplois supplémentaires prévus dans la Lopmi va singulièrement compliquer le déploiement des 57 brigades annoncées pour 2025, dans le cadre du plan de création de 239 nouvelles brigades.
Monsieur le ministre, vous avez exprimé, en audition devant la commission des lois, votre volonté de faire évoluer ce schéma d’emplois. Ce serait une bonne chose pour maintenir le nécessaire lien de confiance avec les collectivités, à un moment où celles-ci sont confrontées à des contraintes financières sans précédent.
Le second sujet de préoccupation sur les effectifs est la baisse marquée du budget de la réserve, là aussi en contradiction avec l’objectif, fixé par la loi de programmation, de 50 000 réservistes en 2027. Avec des crédits en baisse de près de 15 millions d’euros, il apparaît désormais difficile d’atteindre cet objectif, que la Cour des comptes jugeait déjà irréaliste dans son analyse de l’exécution budgétaire 2023, sauf à diminuer le nombre de jours annuels effectués, au risque d’un effet délétère sur la motivation des réservistes.
La réserve assume pourtant un rôle de plus en plus important au sein de la gendarmerie, assurant la quasi-totalité du spectre des missions.
Elle est particulièrement impliquée, par exemple, dans la lutte contre l’immigration illégale et clandestine sur les côtes de la Manche et de la mer du Nord. Les 441 réservistes mobilisés chaque jour, financés par le Royaume-Uni dans le cadre du traité de Sandhurst, constituent en effet la grande majorité des effectifs déployés. Ils interviennent dans des conditions particulièrement difficiles, avec une organisation de passeurs qui se professionnalise, n’hésitant pas à user de violence ou à se servir d’enfants comme boucliers contre l’intervention des gendarmes.
Je forme le vœu, à la suite de votre déplacement sur le littoral du Pas-de-Calais, que la position du Royaume-Uni évolue, en particulier par le rétablissement d’une voie légale d’immigration dans ce pays.
La réserve apparaît donc bien comme une composante indispensable à la gendarmerie, y compris dans les conditions d’emploi les plus dures.
En conclusion, un point général sur l’exécution de la Lopmi pour la gendarmerie serait bienvenu, alors que nous approchons de la mi-parcours, afin d’évaluer si les à-coups dus aux contraintes budgétaires dans la trajectoire des effectifs ou dans la gestion immobilière nécessitent d’ajuster la mise en œuvre de la vision stratégique initiale.
Dans l’attente de cette évaluation, notre commission a préconisé l’adoption des crédits relevant du programme 152 de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Henri Leroy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de nous prononcer sur les crédits prévus pour 2025 au titre de la police et de la gendarmerie nationales, il me semble que plusieurs leçons doivent être tirées de l’exercice 2024. J’en citerai trois.
D’abord, le défi de la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques a été relevé. Son coût, évalué à 1,1 milliard d’euros, a certes été important, mais cela montre une chose simple : il est possible de sécuriser efficacement l’espace public dès lors que l’on s’en donne les moyens.
Ensuite, les forces ont dû faire face à une succession de crises qui a culminé avec les émeutes en Nouvelle-Calédonie. Nous devons prendre conscience de la récurrence de ce type de crises et du fait qu’elles représentent toujours un surcoût. À cet égard, il me semble que nous pourrions réfléchir, monsieur le ministre, à la mise en place d’un système de provisions, comme cela se fait déjà dans le budget de la défense au titre des surcoûts engendrés par les opérations extérieures (Opex).
Enfin et surtout, nos finances publiques se trouvent désormais dans un état critique.
Le fait est connu, mais nous devons le garder à l’esprit alors que nous examinons les crédits de la mission « Sécurités ». Dans le contexte du PLF 2025, celle-ci fait figure de mission préservée. Au vu des enjeux de sécurité auxquels notre pays fait face, c’était indispensable.
Ainsi, les crédits prévus au titre de la police et de la gendarmerie nationales progresseraient de près de 1 milliard d’euros par rapport à l’an passé, soit une hausse de 4,2 %, ce qui n’a rien de négligeable.
Assurément, ce budget s’inscrit dans la dynamique que nous avons souhaité impulser en votant la Lopmi, dont les objectifs sont globalement respectés. Ce constat peut toutefois être nuancé à deux titres.
Premièrement, les schémas d’emplois nuls qui sont prévus marquent un renoncement par rapport à l’objectif fixé dans la Lopmi, qui prévoyait 856 équivalents temps plein supplémentaires cette année. Cela pourrait créer des difficultés à terme, dans la mesure où les objectifs opérationnels posés en parallèle restent inchangés. Je pense notamment à la création de 238 nouvelles brigades dans la gendarmerie.
Deuxièmement, les dépenses de fonctionnement et d’investissement de la police nationale ne sont pas aux niveaux escomptés. La Lopmi n’a pas permis d’enrayer durablement l’effet de ciseaux observé depuis la fin des années 2010 entre la masse salariale et les moyens matériels des forces.
Au-delà de 2025, des efforts importants et structurels resteront à mener. Je pense en particulier à l’indispensable remise à niveau du parc immobilier de la gendarmerie. Le constat de la dégradation de celui-ci a été précisément établi par notre collègue Bruno Belin pour la commission des finances. Le chantier auquel nous faisons face est colossal – 2,2 milliards d’euros – et il devra être mené sur plusieurs années. Devant la commission des lois, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à porter ce combat ; soyez assuré que la commission des lois vous soutiendra.
Pour l’heure, le fait que ce budget continue d’augmenter malgré la baisse générale qui est imposée aux dépenses de l’État constitue indéniablement un motif de satisfaction. La commission des lois a donc donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Françoise Dumont, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 161, relatif aux moyens nationaux de la sécurité civile.
Dans un contexte budgétaire contraint, ce PLF sanctuarise les montants dédiés aux projets structurants du programme et garantit aux forces de sécurité civile les moyens de mener à bien leurs missions.
Cette année encore, malgré des feux de forêt modérés, nous avons pu constater le défi que représente le dérèglement climatique pour les acteurs de la sécurité civile. L’extension de la période des feux, ainsi que l’élargissement des zones à risque sur le territoire métropolitain, va rendre nécessaire des investissements massifs, aux niveaux tant national que départemental.
De la même manière, l’intensification du phénomène d’inondations qui a mobilisé, des semaines durant, les militaires et les sapeurs-pompiers dans les Haut-de-France, puis dans les départements du centre-est et du sud, témoigne de la transformation du risque climatique et du besoin d’adapter notre réponse à celui-ci.
Nous saluons ainsi la hausse notable des montants consacrés aux pactes capacitaires. Ils permettront de soutenir les services d’incendie et de secours, tant pour acquérir des camions-citernes que pour se doter de moyens de pompage permettant de réagir face à des épisodes de crues d’une durée et d’une intensité inédites.
Si ces crédits sont indispensables pour le soutien à l’investissement des Sdis, ils sont néanmoins loin d’être suffisants. Je veux ici rappeler l’urgence à agir en faveur du financement de ces services. Nous l’entendons tous sur le terrain : les Sdis sont à bout de souffle et ils attendent depuis trop longtemps la définition d’un modèle de financement crédible au regard de l’intensification des risques.
Par ailleurs, la commission des lois a salué la hausse des crédits consacrés au renouvellement de la flotte d’hélicoptères. Alors que nous nous apprêtons à recevoir trois premiers hélicoptères H145 au titre de l’année 2024, le montant garanti pour ces acquisitions dans ce PLF permettra l’acquisition de huit autres appareils. La trajectoire d’acquisition définie par la Lopmi sera donc respectée.
Ce constat n’est en revanche pas transposable à la promesse d’acquisition de 16 Canadair avant 2027. La faiblesse des crédits dédiés à cet objectif au sein du budget pour 2025 compromet en effet inévitablement le respect des objectifs annoncés par le Président de la République, avec, au mieux, de premières livraisons à compter de 2028. Le renoncement, au cours de l’année, à la commande de deux Canadair hors programme européen est un autre signal d’alerte concernant le respect de la trajectoire définie.
Devant les difficultés liées à la situation monopolistique du constructeur, nous ne pouvons que souhaiter que la France parvienne à trouver des réponses, notamment à l’échelon européen, pour éviter de compromettre sa capacité opérationnelle dans les années à venir. Dans l’attente, le maintien des montants dédiés à la location d’aéronefs permettra de garantir la réactivité de la flotte durant la haute saison des feux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Motion d’ordre
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, de notre règlement, je sollicite l’examen séparé de certains amendements aux missions « Économie », « Travail, emploi et administration des ministères sociaux », « Justice » et « Relations avec les collectivités territoriales », de façon à permettre des regroupements par thématiques.
Il s’agit, dans un souci de logique et de clarté, de sortir des regroupements par gages et d’éviter des discussions communes sur un nombre excessif d’amendements.
M. le président. Je suis donc saisi, en application de l’article 46 bis, alinéa 2 du règlement du Sénat, d’une demande de la commission des finances d’examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Économie », « « Travail, emploi et administration des ministères sociaux », « Justice » et « Relations avec les collectivités territoriales ».
Y a-t-il des oppositions ?…
Il en est ainsi décidé.
Sécurités (suite)
Compte d’affectation spéciale : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers (suite)
Mes chers collègues, dans la suite de notre discussion générale, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, trois commissions – celle des finances, bien sûr, mais aussi celle des lois et celle des affaires étrangères, de la défense et des forces armées – sont concernées par la mission « Sécurités », ce qui souligne son importance.
L’année 2023 n’avait pas été particulièrement calme, avec les manifestations contre la réforme des retraites, le mouvement contre les mégabassines, ou encore les émeutes dans les banlieues.
L’année 2024 a également été une année d’engagements intenses pour l’ensemble de nos forces de l’ordre. Elle a bien sûr été marquée par la tenue des jeux Olympiques et Paralympiques à Paris, très belle réussite pour notre pays. Le défi était énorme, mais nos forces de sécurité – policiers, gendarmes, autres militaires et sapeurs-pompiers – ont su le relever avec dévouement et compétences. Nous leur adressons ce soir un message de respect et de reconnaissance.
Hélas, 2024 n’a pas été qu’une année de célébrations. Les outre-mer, particulièrement la Nouvelle-Calédonie, ont été le théâtre de violents affrontements. Nous voulons redire ici que nous condamnons fermement le recours à la violence, qui a entraîné la mort de treize personnes, dont deux gendarmes, et plusieurs centaines de blessés. Nous avons une pensée pour eux et pour leur famille. Ces violences, tout comme les dégradations qui les ont accompagnées, sont inacceptables.
Les missions de sécurisation et de maintien de l’ordre ont demandé un effort majeur à nos gendarmes et policiers. Par ailleurs, les Français nourrissent de fortes attentes en matière de lutte contre l’insécurité. Aussi, nous nous félicitons que le budget « Sécurités » soit en augmentation.
Nous ne pouvons cependant nous empêcher de remarquer que, si cette hausse est proche de celle envisagée par la Lopmi, intervenant après la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (Lopsi), elle lui est tout de même légèrement inférieure.
En outre, les événements exceptionnels que nous avons cités ont entraîné des dépenses imprévues qu’il faudra bien couvrir.
Les contraintes budgétaires auxquelles nous sommes actuellement confrontées sont très sérieuses, mais elles ne peuvent limiter l’exercice des missions régaliennes de l’État.
La Lopmi prévoyait une augmentation des recrutements. Le budget que nous examinons les suspend. Cela ne va pas dans le bon sens.
Nous devons respecter la loi de programmation et tenir notre engagement de remettre « du bleu » dans la rue. C’est une demande majeure de nos concitoyens, si ce n’est leur principale exigence.
L’insécurité progresse dans notre pays et il est de notre devoir d’inverser la tendance.
La lutte contre le narcotrafic et, plus largement, contre la criminalité organisée sera probablement l’un des grands chantiers des années à venir. La gangrène des stupéfiants ne touche plus seulement des zones bien circonscrites du territoire. Elle s’est tant étendue ces dernières années que même les villes moyennes et les zones rurales sont touchées par des règlements de comptes.
Nous ne pouvons plus laisser faire. Dans la lignée des opérations « place nette » qui ont été menées au début de l’année, il nous faut continuer à lutter de manière implacable contre ce qui ronge nos territoires et notre jeunesse.
La gendarmerie et la police devront continuer à protéger nos concitoyens contre le risque terroriste, contre la délinquance du quotidien, mais aussi contre les débordements qui, quoiqu’imprévisibles, ne manqueront pas de se produire. Elles devront également lutter contre les violences intrafamiliales et prendre à leur compte de nombreuses interventions à caractère social.
À cela s’ajoute que la France, comme tous ses partenaires européens, fait face à une augmentation des flux migratoires, notamment irréguliers. Surveiller les frontières et éloigner les étrangers qui doivent quitter notre territoire sont deux missions qui requièrent de plus en plus de personnel. Nos forces de l’ordre doivent enfin veiller à assurer la sécurité routière.
Avec des missions aussi vastes et essentielles, il est évident que les moyens des forces de l’ordre doivent être augmentés. Il importe à cet égard de susciter des vocations chez les jeunes pour réussir des recrutements de qualité et en nombre suffisant, certains territoires étant sous-dotés. La réserve opérationnelle et les cadets de la gendarmerie méritent aussi une attention particulière.
Le groupe Les Indépendants sera très attentif aux débats que nous aurons ce soir, afin que la mission « Sécurités » bénéficie de moyens suffisants. Nous nous opposerons à tout amendement tendant à diminuer les crédits de ce budget régalien.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Le Rudulier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout le monde sait que ce projet de budget a été préparé dans une période très difficile. Nous connaissons tous ici le contexte de dérapage du déficit public, qui a atteint un record historique.
Et pourtant, nous observons une hausse significative des crédits du budget de la sécurité pour 2025. Pour preuve, les autorisations d’engagement des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » ont augmenté au total de 0,7 milliard d’euros, les crédits de paiement augmentant pour leur part de 1 milliard d’euros.
La priorité accordée à la sécurité publique malgré un contexte budgétaire très dégradé est le reflet d’un choix politique clairement assumé par le Gouvernement. L’urgence sécuritaire n’a pas été sacrifiée sur l’autel de l’urgence budgétaire.
Ce budget s’inscrit dans une dynamique de réussite dont le crédit vous revient, monsieur le ministre, tant vos débuts ont été remarquables et remarqués. Vous avez notamment choisi de vous inscrire dans la trajectoire financière inédite impulsée par votre prédécesseur à travers la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur.
Nous avons l’obligation de poursuivre les efforts entrepris sans relâche depuis plusieurs années. Il faut savoir que, sur 1 000 euros de dépense publique, seulement 23 euros sont dédiés à la sécurité, contre 575 euros aux dépenses sociales. Notre État social est obèse, impotent et inconséquent ; notre budget régalien est quant à lui à l’os, nos forces de l’ordre sont quasiment clochardisées.
Le parent pauvre des dépenses publiques ne peut plus le demeurer. L’urgence sécuritaire, la vie de milliers de Français, la quiétude et le droit à la sécurité de millions d’autres sont en jeu. Oui, la France est devenue, si j’ose dire, l’homme dangereux de l’Europe !
Ainsi, l’indice de paix globale, principal indicateur utilisé pour quantifier la sécurité d’un pays donné, classe la France troisième pays le plus dangereux d’Europe. Le risque de terrorisme est parmi les plus élevés et le taux de criminalité organisée y est désormais plus élevé que chez nos voisins d’Europe occidentale.
La douce France jadis chantée par Charles Trenet a laissé place à l’ensauvagement massif et au diktat des narcotrafiquants, souvent sur fond d’enclave islamique. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie s’exclame.) Nous ne pouvons pas lutter contre cette nouvelle barbarie avec les moyens et les outils d’hier. Marianne est défigurée et doit retrouver sa dignité.
Cela passe par un budget de courage.
Oui, la France Orange mécanique ne se combat que d’une seule manière : en donnant des moyens aux héros du quotidien, à ces héros anonymes, ces femmes et ces hommes de courage, de désintéressement et de dévouement que sont nos services de sécurité, nos policiers et nos gendarmes.
Et si ce budget est marqué par une hausse incontestable des moyens alloués à la sécurité et par la continuité dans la modernisation des forces de l’ordre, il semble néanmoins que les recrutements et le renforcement du personnel, qui comptaient parmi les points forts des politiques sécuritaires récentes, marquent le pas. C’est un sujet d’inquiétude.
Pour la gendarmerie nationale, c’est un renoncement important par rapport à la programmation de la Lopmi, qui prévoyait une cible de plus de 500 équivalents temps plein.
Pour la police nationale, on assiste à un gel des recrutements, alors que 356 créations d’emplois étaient prévues en 2025 dans la Lopmi.
Ces renoncements interrogent, d’autant plus que, comme l’a relevé Henri Leroy, les objectifs opérationnels fixés par la Lopmi restent inchangés. L’absence de moyens humains supplémentaires pourrait à terme s’avérer préjudiciable pour faire face à des missions de plus en plus complexes et nombreuses.
La question du soutien est cruciale. L’année 2024 a été celle du plus grand succès sécuritaire contemporain : la sécurisation des jeux Olympiques et Paralympiques et, en particulier, de la cérémonie d’ouverture, en plein air le long de la Seine.
L’année 2024 est aussi marquée la baisse de certains types de délinquance et l’amélioration de la capacité de réponse des forces de l’ordre. C’est à saluer. Le Gouvernement peut se féliciter aujourd’hui de la récolte du courage semé hier. Mais nous ne remercierons pas nos forces de l’ordre en gelant les recrutements !
Le second motif d’inquiétude, c’est la situation alarmante du parc immobilier de la gendarmerie nationale.
Aujourd’hui, la gendarmerie est propriétaire de 649 casernes. Or ces infrastructures souffrent d’un sous-investissement chronique qui a engendré, selon la commission des finances du Sénat, une dette grise estimée à 2,2 milliards d’euros sur les dix dernières années. Certes, une hausse des crédits d’investissement, de 62 millions d’euros par rapport à 2024, est prévue en 2025. C’est un pas dans la bonne direction, mais il reste nettement insuffisant pour engager les grandes opérations nécessaires à une remise à niveau durable. Force est de reconnaître que le modèle du patrimoine de la gendarmerie est à bout de souffle. Nous ne pouvons continuer ainsi et je sais, monsieur le ministre, que vous avez conscience de ce problème. Il faut un véritable changement de paradigme : peut-être conviendrait-il de faciliter le recours aux partenariats public-privé.
Mes chers collègues, pour conclure, je dirai que, si l’on excepte ces deux motifs d’inquiétude, le budget de la mission « Sécurités » pour 2025 s’inscrit dans la continuité des réformes prioritaires portées par le gouvernement précédent. Il illustre une volonté claire : faire de la sécurité un pilier central de nos politiques publiques. Les moyens financiers qui lui sont alloués traduisent une ambition de moderniser et de renforcer l’efficacité des actions de l’État, un impératif face aux nombreux défis qui subsistent.
De grâce, ne baissons pas le rythme, car chaque euro d’argent public en moins pour la sécurité est une parcelle du territoire de la République en plus grignotée par les narcotrafiquants, les criminels et les délinquants, qui menacent notre Nation et avancent à grands pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’examen des crédits alloués à la mission « Sécurités » pour 2025, nous abordons une pierre angulaire des fonctions régaliennes de l’État.
Ce budget est marqué par une hausse globale des crédits alloués à la police et à la gendarmerie. Il s’élève à 24,3 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 1 milliard d’euros par rapport à 2024. Les membres du groupe RDPI saluent l’effort consenti dans un contexte extrêmement tendu pour les finances publiques. La hausse des crédits témoigne de la volonté de sanctuariser les moyens des forces de sécurité, en entretenant la dynamique impulsée par la Lopmi.
Cependant, cette augmentation masque certaines limites. Nous regrettons ainsi la stagnation des effectifs, qui s’inscrit à rebours de l’ambition initiale de renforcement des personnels portée par la Lopmi, notamment dans la gendarmerie. En effet, il est indispensable de renforcer les effectifs avec les nouvelles brigades prévues sur tout le territoire.
Pour la police nationale, l’effet de cannibalisation des dépenses de personnel au détriment des investissements, en particulier dans l’immobilier et les équipements, freine une modernisation pourtant essentielle. Plusieurs événements récents, qu’il s’agisse des émeutes en Nouvelle-Calédonie ou des mobilisations exceptionnelles pour les Jeux, ont souligné l’importance de disposer de forces de sécurité bien équipées et bien formées.
L’année 2024 a révélé la nécessité d’une provision budgétaire pour mieux anticiper les surcoûts liés aux crises, à l’instar du modèle de la mission « Défense » pour les opérations extérieures.
En matière de sécurité numérique, la hausse de près de 49 % des crédits destinés aux systèmes d’information est un progrès important pour lutter contre les nouvelles menaces, mais une coordination accrue et des ressources humaines adaptées restent nécessaires.
L’état préoccupant du parc immobilier de la gendarmerie, avec une dette grise estimée à 2,2 milliards d’euros, illustre les lacunes d’investissement chroniques dont nous souffrons. La solution passe par des innovations financières, comme le recours aux partenariats public-privé, pour engager des rénovations structurelles.
À ce titre, je tiens à saluer l’engagement pris par le ministère de l’intérieur de permettre à la gendarmerie d’honorer, dès ce mois-ci, les 200 millions d’euros de loyers en retard dus aux collectivités. Il y va de la confiance entre l’État et les collectivités, qui ont investi massivement pour le maintien des forces de l’ordre sur leur territoire.
Dans un même esprit, il est impératif de garantir à nos forces de l’ordre des conditions de travail dignes, en particulier dans les zones rurales et ultramarines.
Fruit d’un compromis nécessaire, ce budget n’en traduit pas moins une volonté sincère, celle de maintenir et de poursuivre les efforts engagés afin de garantir et renforcer la sécurité des Français.
Nous sommes cependant conscients que, pour répondre pleinement aux attentes de nos concitoyens et aux défis sécuritaires croissants, trois axes mériteront notre attention.
D’abord, nous devrons être attentifs au renforcement des recrutements dans les prochaines années pour atteindre les cibles de la Lopmi, avec un calendrier clair et contraignant.
Nous devrons ensuite nous attacher à la révision de nos priorités d’investissement, notamment en matière d’immobilier, pour éviter que la gestion de la dette locative n’alourdisse davantage les budgets futurs.
Enfin, il faudra prévoir l’amplification du soutien aux collectivités locales, partenaires indispensables pour les équipements des forces de sécurité et des Sdis.
Face aux nombreux défis à relever et aux importants efforts à engager, ce budget témoigne d’une réelle volonté de soutien à nos forces de l’ordre et de sécurité, dans un contexte budgétaire très contraint.
Aussi le groupe RDPI soutiendra-t-il l’adoption de ces crédits essentiels, afin de conserver la dynamique positive engagée depuis l’adoption de la Lopmi.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Michel Masset. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Sécurités » permet de financer les actions du ministère de l’intérieur visant à assurer la sécurité intérieure, à poursuivre l’effort contre la délinquance, à garantir la protection des populations et les capacités de gestion de crise, et à intensifier la lutte contre les incendies et l’insécurité routière. Je saisis cette occasion pour saluer tous ceux qui, au sein des forces de sécurité, concourent à ces missions.
Ces actions fondamentales pour la société sont au cœur des prérogatives de l’État et nous ne devons pas trembler au moment de leur allouer des moyens ambitieux permettant de répondre aux besoins présents et futurs.
La trajectoire globale proposée peut paraître insuffisante pour atteindre ces objectifs. Les crédits proposés par le Gouvernement pour 2025 s’élèvent à 17,3 milliards d’euros en CP, soit une augmentation de 3,6 % par rapport à 2024. Toutefois, cette augmentation doit être analysée à l’aune des coupes budgétaires décidées par le Gouvernement et des dépenses exceptionnelles liées au contexte de la crise en Nouvelle-Calédonie.
Pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale », nous aurions souhaité davantage de crédits, de manière à résoudre les difficultés structurelles de cette mission. La Cour des comptes a fait un bilan mitigé de la première année d’exécution de la Lopmi. Elle regrette que les dépenses d’investissement prévues soient utilisées comme variables d’ajustement des dépenses de fonctionnement, celles-ci étant pourtant connues depuis longtemps.
Or cette exécution budgétaire conduit le Gouvernement à proposer un statu quo en matière de recrutement. Ainsi, dans la police nationale, nous renoncerions à recruter les 356 ETP supplémentaires prévus par la programmation.
Pour la sécurité de nos concitoyens, nous savons que la présence du « bleu » de la gendarmerie et de la police est un facteur clé pour retrouver de la sérénité et de la proximité, en lien direct et continu avec la population. Au passage, je tiens à rappeler que les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) sont recrutés par les communes pour pallier l’insuffisance de gendarmes et de policiers. C’est une charge supplémentaire pour ces collectivités.
Je constate également que la formation des gendarmes et des policiers devrait faire l’objet d’une plus grande attention. Il n’est qu’à se référer au rapport d’information de Catherine Di Folco et Maryse Carrère sur le sous-dimensionnement chronique de la formation initiale, dans lequel sont proposées quelques pistes nouvelles.
J’en viens à la question de la sécurité civile. Samedi dernier, nous avons examiné de nombreux amendements déposés par le RDSE et d’autres groupes visant à revaloriser la taxe spéciale sur les conventions d’assurances, ainsi que la fraction allouée aux départements pour financer les Sdis. Nous aurions pu acter une trajectoire de soutien aux départements dans ce budget 2025.
J’ai bien compris qu’il fallait attendre les conclusions du Beauvau de la sécurité qui concerneront notamment le financement des Sdis. Toutefois, il faut également tenir compte d’une part, des inquiétudes que cela suscite dans un contexte de forte instabilité politique, d’autre part, du besoin urgent de revalorisation du financement de ces services.
La dynamique de la TSCA depuis 2006 – +4,9 % – ne suit pas du tout la hausse du coût des Sdis, de l’ordre de 13 % entre 2023 et 2024. Cela explique que le taux de couverture des moyens de la contribution des départements aux Sdis par la TSCA s’élève seulement à 43,6 % en 2021.
L’augmentation des besoins des Sdis est principalement le fait du changement climatique. Un débat organisé sur ce sujet par le groupe RDSE voilà trois semaines a mis en exergue l’impérieuse nécessité d’allouer dès maintenant des crédits à l’investissement. Je pense à des dispositifs de pompage pour répondre aux inondations qui touchent de nombreux territoires, notamment le département de Lot-et-Garonne, ou à des moyens pour lutter contre les incendies.
Nous appelons à un effort supplémentaire. Je souhaite que nos débats aboutissent à une revalorisation des crédits consacrés aux Sdis. Exaucer ce vœu offrira une réponse aux enjeux importants des territoires dans un contexte contraint. C’est seulement alors que le groupe RDSE votera les crédits de la mission « Sécurités ». (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et UC.)
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Florennes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Isabelle Florennes. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant tout, je tiens à saluer l’engagement de toutes les forces de sécurité – gendarmerie et police – lors tant des jeux Olympiques et Paralympiques que des cérémonies du 80e anniversaire des débarquements de Provence et de Normandie, ainsi que de la Libération de Paris.
Grâce aux 35 000 policiers et gendarmes qui ont œuvré lors des JOP, sans oublier les 45 000 bénévoles, la ferveur populaire a pu s’exprimer librement et sans crainte pour soutenir tous les sportifs présents.
Cette quiétude a eu néanmoins un coût que notre collègue et rapporteur spécial de la mission « Sécurités » Bruno Belin a estimé à 814 millions d’euros pour la période 2020-2024 pour la police nationale et à concurrence de 327 millions d’euros sur trois ans pour la gendarmerie.
Il faut espérer que ces coûts ainsi que ceux qui sont liés aux opérations de maintien de l’ordre en Nouvelle-Calédonie, en Martinique et à Mayotte, lesquels s’élèvent à 155 millions d’euros, seront cantonnés au budget 2024.
Si je conclus ce bref bilan de l’année 2024 sur un rappel des interventions dans les territoires d’outre-mer, c’est parce que celles-ci font écho à la commission d’enquête sur les émeutes survenues à compter du 27 juin 2023 dont j’ai fait partie et qui a été présidée par notre ancien collègue François-Noël Buffet.
Dans le projet annuel de performances de la mission ministérielle « Sécurités », rien n’est dit expressément dans les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale » sur les mesures à prendre pour éviter une nouvelle situation insurrectionnelle, comme celle dans laquelle a été plongée une partie du territoire français et qui a causé plus de 1 milliard d’euros de dégâts.
Certes, le budget de l’action n° 01 « Ordre public et protection de la souveraineté » du programme 176 augmente de 14,28 % et il en va de même, dans une moindre mesure toutefois – +1,05 % –, pour l’action équivalente du programme 152. Reste que rien n’est clairement spécifié dans le domaine de la prévention des émeutes.
Le rapport de la commission d’enquête a prescrit vingt-cinq mesures, six d’entre elles nécessitant une prise en compte dans le projet de loi de finances : garantir l’adéquation de la formation des forces de l’ordre aux contextes émeutiers avant leur déploiement ; se doter des moyens matériels et des équipements permettant de faire face à des contextes émeutiers longs et protéiformes ; assurer la sécurisation des bâtiments utilisés par les forces de l’ordre et des armureries pour se prémunir de toute prise d’assaut ; consolider et amplifier l’activité des services de renseignement dans le suivi et la connaissance des « quartiers sensibles » et des phénomènes de violences urbaines ; faciliter le déploiement de la vidéoprotection au sein des communes rurales ou de petite taille ; assurer un traitement judiciaire des violences urbaines efficace en contexte de crise ou d’émeutes.
Même si ces prescriptions n’apparaissent pas explicitement dans le projet annuel de performances pour 2025, je souhaite qu’elles puissent y trouver leur concrétisation.
Pour conclure, je reviens plus spécifiquement sur l’un des objectifs du programme 176 portant sur l’accueil des usagers et les conditions de travail des policiers. Ainsi, les Hauts-de-Seine, département très dense et très peuplé – 1,6 million d’habitants répartis sur trente-six communes – compte actuellement vingt-cinq commissariats ; il semble toujours envisagé d’en fermer à terme six ou sept. Comment répondre à l’ambition d’un accueil amélioré quand on éloigne une partie de la population d’un commissariat de proximité ?
La réponse ne peut pas être une augmentation des structures de police municipale. Il en est de même pour les crédits consacrés aux moyens mobiles des policiers, qui, et je le regrette, n’augmentent pas.
Malgré ces questionnements, le groupe Union Centriste votera majoritairement les crédits de la mission « Sécurités ».
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, puisque tout le monde continue comme si de rien n’était, je ferai de même. (M. le ministre manifeste son fatalisme.)
M. Stéphane Piednoir. Cela ne dépend pas de nous !
Mme Cécile Cukierman. Malgré cette boutade, je reste convaincue que les enjeux de sécurité dépassent ce qui pourrait arriver dans les heures à venir.
En effet, l’exercice de la sécurité est avant tout l’une des grandes missions régaliennes de l’État. Au travers de l’examen budgétaire de la mission « Sécurités », il nous faut la mettre en œuvre, en assurer le fonctionnement au quotidien et partout sur le territoire de la République. Il s’agit là d’un élément essentiel du pacte républicain, donc de l’égalité républicaine.
Pourtant, trop souvent, nombre de nos concitoyens ont le sentiment d’être abandonnés et de ne pas être suffisamment pris en compte, voire d’être exclus, ce qui provoque parfois des réactions qui s’expriment avec retard et entretient un sentiment d’insécurité, qu’il soit réel ou ressenti, face à un service public de la sécurité défaillant. Certains l’ont évoqué, il suffit de se remémorer les fortes violences qui se sont produites il y a plus d’un an et du désarroi dans lequel elles ont plongé les habitants de certains de nos territoires.
La sécurité est une mission régalienne que l’État doit assurer pleinement et pour l’exercice de laquelle il ne peut sans cesse se décharger sur les collectivités territoriales, même si, dans ce domaine aussi, elles sont des partenaires indispensables. J’aurai l’occasion de le répéter, une police municipale ne remplacera jamais une police de proximité et les services d’incendie et de secours ne resteront efficaces que si l’État se trouve aux côtés des départements pour financer leurs missions et assurer la mise en œuvre de celles-ci.
La sécurité n’est l’exclusive d’aucune sensibilité politique. Il s’agit de notre bien commun. Pour appartenir à une famille politique qui a malheureusement dû faire face à des émeutes dans un certain nombre de communes dès les années 1980 – le Mas du taureau ou les Minguettes –, je sais combien il est difficile de conserver une cohérence communale pour assurer le vivre-ensemble, prévenir les débordements et, le cas échéant, les réprimer.
Aujourd’hui, la plupart des villes sont confrontées à ces risques. Elles le sont avec plus de force encore qu’il y a quelques décennies, notamment en raison du déploiement du narcotrafic. Nous y reviendrons certainement lors de l’examen de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic d’Étienne Blanc et Jérôme Durain, qui fait suite au rapport de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier.
Dans ce domaine, la police municipale ne pourra pas tout faire. Les caméras mises en place par les communes et l’éventuel armement des policiers municipaux ne suffiront pas. Il faudra que l’État assure sa mission en la matière pour garantir la sécurité de celles et de ceux qui seront exposés.
Sur la mission « Sécurités », le groupe CRCE–K a déposé trois amendements sur des sujets essentiels. Ils visent notamment à donner à la gendarmerie les moyens d’exercer ses missions, ainsi qu’à favoriser le déploiement d’une véritable police de proximité. Nous demeurons en effet convaincus que, depuis les décisions de Nicolas Sarkozy, la question budgétaire ne peut servir d’argument pour réduire les effectifs. Si tout s’est bien passé pendant les jeux Olympiques, en particulier sur les sites olympiques, même si cela a été très dur pour les forces de l’ordre qui ont été mobilisées et majoritairement privées de leurs congés, c’est parce qu’elles étaient nombreuses, ce qui leur a permis d’exercer leur mission sereinement. Cette configuration a rendu possible l’alchimie entre policiers et visiteurs.
Monsieur le ministre, sans surprise, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. Le budget tout comme la politique qui est mise en œuvre ne répondent ni à nos attentes ni à l’exigence d’une sécurité du quotidien dans tous les territoires. Aujourd’hui, les premières victimes de l’insécurité, ce sont les habitants des quartiers populaires, ce sont les plus pauvres, les plus démunis, qui sont bien souvent seuls face au trafic qui se développe là où ils habitent. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et sur des travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Mélanie Vogel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, malgré une augmentation de 587 millions d’euros, soit 3,5 %, c’est sans surprise que le groupe GEST s’opposera à l’adoption des crédits de la mission « Sécurités ». En effet, cette hausse masque mal les défauts structurels des orientations politiques qui ont été choisies.
Sur les volets police et gendarmerie, ce projet de budget entre en contradiction directe avec les préconisations de la loi du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur. Dans sa version initiale, il ne contenait même pas de schéma d’emploi, tant dans la police que dans la gendarmerie, alors que la Lopmi prévoyait une embauche de plus de 8 000 agents supplémentaires. Il réduit par ailleurs les crédits pour la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale.
Le budget de la police judiciaire serait également réduit de 8 %, alors même que le Gouvernement entend faire de la lutte contre le narcotrafic et le crime organisé une grande priorité.
C’est d’autant plus incompréhensible que cette réduction s’ajoute aux baisses déjà consenties les années précédentes et à une dévalorisation du travail des policiers et des gendarmes, condamnés à faire de la politique du chiffre en matière de trafic de stupéfiants, politique épuisante, inefficace et insensée.
Est tout aussi incompréhensible la réduction du plan dédié à la lutte contre le suicide des policiers, qui passe de 2,9 millions d’euros à 1,6 million d’euros, alors que plus de 1 000 suicides ont été recensés dans la police au cours des vingt-cinq dernières années.
Sont également incompréhensibles les choix faits en matière de sécurité civile.
Le changement climatique accroît les risques de feux de forêt et d’inondations. Nous devons donc investir massivement dans la sécurité civile.
À l’exact opposé des besoins, le Gouvernement veut massivement couper les investissements dans le domaine de la sécurité civile. On mettra en tension les canadairs et on aura un pacte capacitaire inadapté à l’ensemble des défis que la crise climatique nous pose inéluctablement. Certes, les jeux Olympiques sont finis, mais tel n’est pas le cas de la crise climatique.
Monsieur le ministre, que répondrez-vous à celles et à ceux dont les habitations brûleront dans les prochains mégafeux ? Que répondrez-vous aux familles de ceux qui périront dans les inondations ? Qu’en 2024 nous ne pouvions pas prévoir qu’il fallait investir dans la sécurité civile ?
Le budget préparé par le Gouvernement augmente mal l’appareil répressif en baissant le secours aux personnes, alors qu’il faut urgemment une réforme d’ampleur.
À l’inverse, la réforme que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires appelle de ses vœux vise à rétablir la confiance de la population envers les forces de l’ordre. Ce lien de confiance est en effet rompu depuis longtemps. Les contrôles d’identité discriminatoires, les images de manifestantes et de manifestants pacifiques plaqués au sol et aspergés de gaz lacrymogène,…
M. Joshua Hochart. Pacifiques ?
Mme Mélanie Vogel. … les témoignages des victimes des tirs de LBD (lanceur de balles de défense) qui ont perdu un œil, seulement parce qu’elles sont descendues dans la rue pour défendre une cause : tout cela mine le rapport des citoyens avec la police.
Parce que la doctrine de maintien de l’ordre que nous utilisons polarise et augmente la violence qu’elle devrait au contraire combattre, il faut remettre la désescalade et le respect de la déontologie au centre.
Alors que le maintien de l’ordre est assuré toujours plus par des unités non spécialisées, comme le pointe la Cour des comptes, il faut veiller à ce que les agents qui encadrent une manifestation aient suivi des formations spécifiques.
La France a un centre de formation de renommée européenne pour le maintien de l’ordre. Utilisons-le davantage.
Parce que les unités sont envoyées toujours plus loin pour des opérations, dans des territoires qu’elles ne connaissent pas ou pas assez, nous devons urgemment réinstaurer une police de proximité.
Alors que la réponse purement sécuritaire est vaine, qu’il faut des réponses globales pour les outre-mer, ce qui permettrait d’éviter des interventions extrêmement coûteuses – 140 millions d’euros en Nouvelle-Calédonie –, qu’il faut enfin créer une autorité de contrôle indépendante de la police et de la gendarmerie, capable de sanctionner efficacement la méconnaissance des règles déontologiques, ce budget ne prévoit rien de tel.
Nos amendements visent à corriger le tir, mais il faut des réformes structurelles. Tant que ce n’est pas le cas, nous voterons contre le budget de la mission « Sécurités », qui regroupe notamment les crédits relatifs à la sécurité intérieure et à la sécurité civile. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Corinne Narassiguin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se félicite de l’augmentation des crédits demandés au titre des forces de sécurité intérieure. Comme l’a relevé le rapporteur spécial, la progression des crédits attendue pour 2025 par rapport au budget 2024 constitue plutôt une traduction satisfaisante de la Lopmi que nous avons votée.
Monsieur le ministre, il faudra tout de même que vous nous expliquiez le tour de passe-passe du Gouvernement, puisqu’un amendement vise à augmenter les crédits de 123 millions d’euros, alors que deux autres tendent à les baisser de 80 millions d’euros.
Si nous sommes globalement satisfaits, nous portons un regard critique sur certains manquements observés, notamment dans les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ». Ainsi, aucune création de postes n’est prévue.
Le Gouvernement nous répondra que ce sera compensé les années suivantes, mais le récent rapport de la Cour des comptes sur la situation marseillaise peut nous faire douter de ce qui s’apparente à un vœu pieux. Sur les moyens consacrés à la formation, nous sommes sceptiques.
Il importe de revenir sur le sort réservé à la police judiciaire, dont les moyens baisseraient de 8,1 % au cours de l’année qui vient.
Pourtant, le rapport d’information sur l’organisation de la police judiciaire de Nadine Bellurot et Jérôme Durain, dont je rappelle qu’il a fait consensus, souligne la nécessité de « rééquilibrer au plus vite les effectifs entre la voie publique et l’investigation afin de faire face aux stocks préoccupants de procédures et d’assurer le bon fonctionnement de la future filière judiciaire ».
Les conclusions de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier ont également donné lieu à un consensus des groupes politiques du Sénat.
Nous avons pris bonne note des annonces gouvernementales faites récemment à Marseille sur le front de la lutte contre le narcotrafic. Pour autant, comment ne pas pointer quelques inquiétudes relevées dans le récent rapport de la Cour des comptes intitulé L’Ofast et les forces de sécurité intérieure affectées à la lutte contre les trafics de stupéfiants ? Il s’agit bien d’un sujet d’actualité si l’on rappelle que des trafiquants ont essayé de récupérer de la cocaïne saisie par l’office anti-stupéfiant, l’Ofast, donc, dans ses locaux de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle le vendredi 22 novembre dernier. Voilà qui peut nous éclairer sur l’état de la menace…
La Cour des comptes relève à plusieurs reprises les marges de progrès possible en matière de lutte contre le blanchiment, notamment pour les effectifs de la police judiciaire spécialisés dans le blanchiment. Monsieur le ministre, comment comptez-vous répondre à cette problématique ?
Plus globalement, les investissements, s’ils sont en progression, restent insuffisants, notamment en ce qui concerne le parc immobilier de la gendarmerie, comme l’illustre la situation récemment mise en lumière par la presse concernant des impayés de loyers à des mairies. M. Bourgi l’a évoqué en commission : la Lopmi prévoyait la création de 200 brigades de gendarmerie d’ici à la fin du quinquennat. Sans effort supplémentaire, nous n’y parviendrons pas.
Nous présenterons plusieurs amendements consacrés aux zones de gendarmerie.
Nous ne pouvons que regretter les coups de rabot portés aux actions mises en œuvre au titre de la sécurité et de l’éducation routières. Du permis à 1 euro par jour aux actions de sécurité routière en outre-mer, en passant par les formations des agents de la délégation à la sécurité routière, ce sont autant d’actions d’importance qui seront touchées l’année qui vient.
Nous ne pouvons que constater une baisse des crédits accordés au programme 161 « Sécurité civile », de l’ordre de 5,6 % par rapport à l’an passé. Il faut toutefois relativiser cette baisse et la mettre en perspective avec l’augmentation substantielle – 140 millions d’euros supplémentaires – accordée à la sécurité civile dans le cadre de la loi de finances pour 2024.
C’est à l’aune de cette donnée que le groupe SER a fait le choix de ne pas déposer d’amendements sur ce programme afin de ne pas nuire aux efforts budgétaires consentis en faveur de la police et de la gendarmerie nationales dans le projet de loi de finances pour 2025.
Cependant, il nous semble essentiel d’appeler l’attention du ministre de l’intérieur sur quelques sujets prégnants dans le domaine de la sécurité civile.
Notre flotte aérienne est notamment composée de douze canadairs vieillissants, et bien trop souvent défaillants, ce qui a, hélas ! affecté et limité l’action de nos sapeurs-pompiers, confrontés à de nombreux feux de forêt à chaque période estivale.
Si nous avons pu bénéficier du soutien des véhicules aériens de nos partenaires européens ces dernières années, nous ne sommes pas en mesure d’endiguer nous-mêmes ces phénomènes, qui devraient se multiplier au cours des décennies à venir, puisque la moitié de nos forêts seront soumises à des risques élevés d’incendies d’ici à 2050.
C’est pour cette raison qu’a été prévue l’acquisition de seize nouveaux canadairs au début de l’année 2023, dans le cadre de la Lopmi. Le gouvernement français a fait le choix de mutualiser ces achats avec ceux de nos voisins européens. Cette volonté n’a, pour l’heure, pas porté ses fruits et aucun avion n’a depuis lors été livré à la France.
Afin que nos engagements votés l’an passé soient tenus, il doit désormais être sérieusement envisagé que l’industrie aérienne française produise son propre modèle d’avion bombardier d’eau. Ainsi, notre sécurité civile retrouvera son autonomie en matière de lutte contre les incendies de forêt. En résumé, il ne sert à rien d’inscrire et de voter des lignes budgétaires, si c’est pour ne pas les consommer. Cette fuite en avant n’est plus tenable.
J’en viens aux effectifs de nos sapeurs-pompiers, qu’ils soient professionnels ou volontaires. Le rapport de l’inspection générale de l’administration (IGA) et de l’inspection générale de la sécurité civile (IGSC) dépeint en la matière des recrutements en berne, liés principalement à un manque de reconnaissance tant financière que sociale, ainsi qu’à une perte de sens de l’engagement et à un épuisement professionnel, notamment en raison de la multiplication des tâches qui leur sont confiées.
Le groupe SER souhaite que l’exécutif prenne ce sujet à bras-le-corps, en permettant la revalorisation immédiate de ces métiers si importants pour le bon fonctionnement de notre sécurité civile. Il forme le vœu qu’une campagne de recrutement soit menée dans les plus brefs délais, afin de garantir une disponibilité accrue de nos sapeurs-pompiers sur le terrain, ainsi que le renouvellement des générations dans la profession. Un certain nombre de gratifications et de bonifications pour leur retraite gagneraient également à être mises en œuvre.
Enfin, nous devons engager des investissements afin d’adapter nos infrastructures et nos modes de fonctionnement face au changement climatique.
Nous le constatons toutes et tous dans nos départements : les inondations et les crues se multiplient et ne sont plus seulement liées aux épisodes cévenols ou méditerranéens dans le sud de la France. Les pluies diluviennes inhérentes à la hausse des températures et la montée des eaux intrinsèque à la fonte des glaces doivent nous inquiéter ; c’est dès maintenant qu’il faut agir.
Aussi, si nous ne pouvons empêcher pleinement ces phénomènes d’advenir, nous pouvons cependant en réduire l’impact sur nos populations, en favorisant la formation du personnel de la sécurité civile à ces enjeux, ainsi qu’en injectant davantage de moyens dans la rénovation de nos infrastructures, afin que celles-ci soient plus sûres et résistantes face aux intempéries. Nous appelons ainsi de nos vœux la mise en place de pactes capacitaires dédiés à la prise en charge des conséquences de ces aléas climatiques par les Sdis.
Personne ne sera surpris : la gauche et vous, monsieur le ministre, ne partagez pas beaucoup de points communs – vous me permettrez cet euphémisme. (M. le ministre rit.) Pourtant, au moment de discuter votre budget, nous nous inscrivons dans un esprit de responsabilité qui ne surprendra pas les acteurs de la sécurité de notre pays : nous soutiendrons les crédits consacrés à la mission « Sécurités ».
Cependant, nous défendrons quelques amendements pour les rendre mieux-disants.
Nous défendons quelques-uns des combats qui sont les nôtres depuis longtemps. Je pense ici à la création d’un nouveau programme pour défendre de meilleures conditions d’accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles dans les commissariats et gendarmeries ou encore au renforcement des moyens de l’Office mineurs (Ofmin).
Je pense aussi, quelques semaines après la publication du rapport de l’IGPN, à la proposition de nouveaux indicateurs pour évaluer la mise en œuvre des contrôles d’identité par les forces de sécurité. Cela fait écho aux travaux du comité d’évaluation de la déontologie de la police nationale (CEDPN), dont je ne doute pas que vous souhaitez les relancer. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Michel Masset applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au mois de février 2024, le précédent gouvernement a annulé 154 millions d’euros de crédits des budgets de la police et de la gendarmerie nationales.
Résultat : au mois de septembre 2024, la gendarmerie nationale a cessé de payer les deux tiers de ses loyers. La gestion de ces budgets régaliens par les gouvernements Borne et Attal aura été calamiteuse.
Pendant les jeux Olympiques, nos forces de l’ordre devaient assurer la sécurité. Elles l’ont fait. Quand on leur donne moyens et soutiens, la première des libertés des Français est assurée.
Il faut aussi fournir aux forces de l’ordre un budget substantiel. Le Gouvernement a échoué, et ce dans un contexte d’insécurité en hausse et de mal-être important des agents, notamment en raison de la disparition de la spécialisation des métiers souhaitée par le ministre Darmanin.
La situation est tellement dégradée que le gouvernement Barnier souhaite geler la hausse des effectifs des forces de sécurité intérieure prévus dans la Lopmi. Cela empêchera l’ouverture annoncée des 159 brigades de gendarmerie et toute hausse d’effectifs pour la police aux frontières, alors même que ces postes sont nécessaires à une politique migratoire ferme.
Monsieur le ministre, je voudrais croire en votre détermination pour venir à bout de la crise majeure qui sévit en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte et de la crise migratoire, ainsi que pour mener à bien la lutte contre le narcoterrorisme. Pour cela il faudra avant tout gagner les arbitrages budgétaires au sein même de ce gouvernement… ou du prochain.
Votre réconciliation avec Philippe de Villiers est un signe, voire une preuve supplémentaire de votre attachement à la France, celle que nous aimons, et aux Français, ainsi que de votre volonté de les protéger.
Comment ne pas être déçu et inquiet après votre conférence de presse à Marseille sur le trafic de stupéfiants, au cours de laquelle le mot « expulsion » n’a pas été prononcé ? Vous n’avez même pas évoqué le phénomène de l’immigration, alors que, selon la police marseillaise, 50 % des trafiquants sont des clandestins et 65 % de la délinquance est le fait d’étrangers.
M. Guy Benarroche. C’est faux !
M. Stéphane Ravier. Pourquoi un tel déni ? (Exclamations sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)
Les Marseillais attendent de l’ordre dans leur ville. En effet, quand le pire devient leur quotidien, la fatalité s’installe et la soumission et la corruption deviennent des options de vie.
Derrière ces lignes budgétaires que nous examinons se trouvent des enjeux concrets.
Je ne ferai pas l’affront au Vendéen que vous êtes d’en appeler à de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace. Je demande au ministre de l’intérieur de droite assumée de ne jamais abdiquer l’honneur d’être une cible pour la gauche et la racaille d’extrême gauche qui aiment à voir un « problème systémique dans la police » (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) et ne cessent de traîner dans la boue les forces de l’ordre, qui sont en réalité les victimes d’un racisme anti-flic, bien réel quant à lui.
En définitive, il nous faut mieux payer, mieux équiper, mieux diriger, mieux considérer le travail quotidien de nos forces de l’ordre. Une police promue et protégée, c’est une population et une France apaisées.
Monsieur le ministre, la mort en service de l’adjudant Éric Comyn à la suite d’un refus d’obtempérer ainsi que celles du gendarme Nicolas Molinari et de l’adjudant-chef Xavier Salou en Nouvelle Calédonie nous obligent à l’exemplarité et à mener les missions qui leur avaient été confiées jusqu’au bout pour que leur sacrifice n’ait pas été vain. (M. Joshua Hochart applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Bitz. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Bitz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2024, le haut niveau d’engagement des gendarmes et des policiers a permis de relever une succession de défis et de crises, à la fois en métropole et dans les outre-mer.
Nous devons cette réussite à l’extraordinaire mobilisation de nos forces de sécurité intérieure (FSI) et à leur professionnalisme. Le groupe Union Centriste tient à leur exprimer toute sa reconnaissance.
Aujourd’hui, nos débats budgétaires s’inscrivent dans un contexte politique et financier inédit. C’est donc avec un esprit de responsabilité qu’il faut rendre des arbitrages forcément difficiles.
Je formulerai trois observations.
Tout d’abord, nous constatons que nous nous écartons de la trajectoire fixée par la Lopmi. Cela avait déjà été le cas en 2024 à cause de mesures de régulation budgétaire, liées en grande partie aux surcoûts induits par l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques. Cela nous avait conduits à amputer de 154 millions d’euros les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ».
Contrairement à la trajectoire de la Lopmi, le budget pour 2025 présente un schéma d’emploi nul pour les FSI. Il était pourtant prévu de créer 500 équivalents temps plein (ETP) pour la gendarmerie et 356 ETP pour la police nationale.
Ces renoncements interrogent nécessairement notre capacité à créer les 238 nouvelles brigades de gendarmerie promises par l’État sur nos territoires et à faire de la lutte contre le narcotrafic une priorité.
De même, comment pourrons-nous combattre l’immigration irrégulière alors que l’objectif de créer 3 000 places dans les centres de rétention administrative (CRA), d’ici à 2027, est remis en cause ?
Le gel du schéma d’emploi vient également temporiser la montée en puissance de la quatrième unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile (UIISC). Or un régiment doit avoir un format précis pour optimiser sa capacité opérationnelle.
Nous exprimons aussi quelques inquiétudes en matière d’investissements. La pause effectuée en 2024 sur l’acquisition de véhicules au bénéfice des FSI n’est que partiellement rattrapée en 2025, avec la commande de 1 600 véhicules. En l’occurrence, il aurait fallu en acheter 1 989, ce dès 2024.
Les lourds travaux à réaliser sur la base de sécurité civile de Nîmes pour les avions et les hélicoptères ne pourront pas sans cesse être repoussés, car nous risquerions, à terme, de remettre en cause nos capacités opérationnelles.
Les augmentations prévues viennent pour l’essentiel alimenter une dynamique forte de dépenses de fonctionnement, liée non seulement aux engagements pris antérieurement par l’État à l’égard des personnels, mais aussi aux besoins absolument impérieux de la gendarmerie en matière immobilière.
Mes chers collègues, il s’agit d’un budget de pause. Cette orientation est compréhensible, compte tenu des contraintes financières, mais elle ne saurait être prolongée les années suivantes sans remettre en cause les objectifs affirmés par le Gouvernement, d’autant que nous les partageons.
J’en viens à ma deuxième observation.
Au-delà des créations de postes dans la police et la gendarmerie et de l’installation de nouvelles brigades, il existe d’importantes difficultés à couvrir les postes existants.
Mon excellente collègue Nathalie Goulet et moi-même avons fait ce constat dans notre département, l’Orne. Les postes ont beau être ouverts par la direction générale de la police nationale (DGPN), ils ne sont pas pourvus en raison d’un manque d’attractivité. J’ai notamment à l’esprit la situation du commissariat de Flers, dont je vous ai saisi, monsieur le ministre.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Olivier Bitz. Du côté de la gendarmerie, l’érosion des effectifs dans les brigades territoriales se fait à bas bruit et exige au moins autant d’attention que la création promise de nouvelles unités.
Du reste, nous devons pouvoir continuer à nous appuyer sur la réserve opérationnelle.
Bref, si nous pouvons comprendre la temporisation concernant la création de nouveaux postes, veillons au moins à pourvoir effectivement les postes existants. Dans cette perspective, il convient de prendre des mesures permettant de les renforcer l’attractivité des métiers concernés et de ne pas jouer sur un taux de vacances élevé pour réaliser des économies de bout de chandelle.
Troisième et dernier point : il est nécessaire de défendre notre modèle de sécurité civile, qui assure une capacité d’intervention de grande qualité à un coût maîtrisé. Or cela ne peut tenir que si nous confortons le volontariat.
Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes très attaché à ce qu’un décret vienne intégrer le volontariat au calcul de la retraite des sapeurs-pompiers volontaires : nous attendons tous qu’il soit pris ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs spéciaux, mesdames, messieurs les sénateurs, je l’ai dit au cours de l’examen de la précédente mission, cet après-midi : un budget, ce sont bien sûr des chiffres, mais aussi des choix.
Je commencerai donc par vous parler des choix, car c’est ce qu’il y a de plus important.
La mission « Sécurités » est le cœur du travail accompli par le ministère de l’intérieur et nos forces de sécurité intérieure, policiers et gendarmes.
Je veux d’abord présenter la politique que j’entends mener pour lutter contre le haut du spectre de la criminalité, notamment le narcotrafic. Je veux m’y attaquer très vigoureusement.
Nombre d’entre vous ont salué les forces de l’ordre ; je veux le faire aussi. On ne peut jamais s’abandonner à la fatalité, car jamais rien n’est perdu.
À cet égard, je vous rappellerai les beaux succès de ces derniers jours. Je remercie les agents de la police judiciaire (PJ) et les gendarmes pour leur action, mais aussi les magistrats qui les dirigent dans le cadre des enquêtes.
Pour rappel, vingt et un membres présumés de l’organisation criminelle DZ Mafia qui visaient le célèbre rappeur SCH ont été appréhendés. Fin novembre, une vingtaine de membres de cette même organisation criminelle ont été interpellés par la PJ et la brigade de répression du banditisme (BRB) de Marseille.
La semaine dernière, un des chefs présumés de ce gang – probablement l’un des plus dangereux – aurait ordonné la commission de plusieurs narcohomicides depuis la prison où il est incarcéré. Sachez qu’il a été déféré devant le juge pour être entendu.
Encore une fois, je veux qu’on puisse saluer ces très beaux succès. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) On tient toujours la chronique banale de ces événements abominables ; il n’empêche que, dans le même temps, la gendarmerie, les policiers et les magistrats réussissent de très belles opérations.
Combattre le narcotrafic, c’est non seulement s’attaquer à la cause racine de la sauvagerie et du désordre considérable qu’elle entraîne, mais c’est aussi s’attaquer à de nombreux autres éléments d’une menace à nos intérêts fondamentaux que j’estime désormais existentielle.
Je pense ainsi à la corruption et au système économique sur lesquels le narcotrafic repose. Cela ne fait que fragiliser notre démocratie et nos institutions.
Étienne Blanc, qui est présent ce soir dans l’hémicycle, avait rédigé le rapport de la commission d’enquête, totalement transversale, sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier.
Bien entendu, nous allons nous appuyer sur les conclusions auxquelles le Sénat est parvenu à l’issue de ces travaux, présidés par Jérôme Durain.
Ainsi, nous créerons une chaîne judiciaire spécialisée et un arsenal de nouvelles techniques d’investigation et d’enquête. Je suis certain que cela produira des résultats dans quelques années.
J’en viens au bas du spectre de la criminalité, celui qui empoisonne au quotidien la vie de nos concitoyens. J’ai proposé aux préfets, aux policiers et aux gendarmes de tester une approche nouvelle reposant sur un cadre totalement déconcentré.
Nous voulons employer une nouvelle méthode qui consiste à laisser plus de liberté aux agents de terrain, contre des résultats.
Il s’agit également d’identifier les lieux et les publics les plus problématiques. Aujourd’hui, un peu de plus de 5 % des délinquants « d’habitude » sont à l’origine de plus de 50 % des actes de délinquance : ce sont eux qu’il faut cibler en priorité !
Par ailleurs, j’insiste sur le fait qu’il est nécessaire d’assurer un continuum de sécurité. Mme Cukierman l’a rappelé, la police municipale ne peut remplacer ni la gendarmerie ni la police. J’ai été amené à visiter un certain nombre de villes depuis ma nomination. J’ai ainsi pu constater que, là où il y a un continuum de sécurité associant tous les acteurs, il y a des résultats.
Bien entendu, on doit tenir compte de la liberté des maires. Force est de constater que certains d’entre eux sont imprégnés d’une idéologie antisécuritaire,…
M. Guy Benarroche. Oh !
M. Bruno Retailleau, ministre. … quand d’autres se lancent à fond dans le combat contre la criminalité, qui concerne tous nos compatriotes.
Un mot sur les chiffres. Plusieurs d’entre vous l’ont rappelé, le présent budget a été élaboré dans des circonstances impossibles, puisque le pays se trouve au bord d’une crise financière.
Malgré tout, il s’agit d’un budget préservé, et même renforcé, dans la mesure où il respecte la trajectoire fixée par la Lopmi. Dans ce contexte impossible, il porte même de 293 millions à près de 300 millions d’euros les moyens qui permettent d’atteindre la cible prévue.
Par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, nous mettons plus de 623 millions d’euros supplémentaires sur la table. Je constate que ces efforts ont été salués par plusieurs d’entre vous, à droite comme à gauche ; je vous en remercie.
Dans le détail, la police nationale bénéficiera de 160 millions d’euros supplémentaires, et la gendarmerie nationale de 520 millions d’euros supplémentaires – voilà qui contentera ceux qui critiquaient l’insuffisance de moyens.
Je m’engage devant vous à ce que le plan de déploiement de nouvelles brigades de gendarmerie soit respecté. Aussi, j’ai demandé au nouveau directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN) de me communiquer, d’ici à quelques semaines, le calendrier de déploiement de ces 238 brigades et de rendre effectives les créations d’emplois annoncées.
Je sais que le Sénat est attaché à ce que les politiques couvrent l’ensemble du territoire, y compris en matière de sécurité.
Concernant la masse salariale, je souhaite une nouvelle fois que les protocoles fixés en 2022 pour la police et la gendarmerie soient respectés : c’est un point fondamental.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et les heures supplémentaires, elles seront payées ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Nous espérons que ce sera bien le cas, madame la sénatrice ! Encore faut-il que vous puissiez voter le projet de loi de finances de fin de gestion.
À défaut, les loyers des casernes de gendarmerie ne seront pas réglés – pensons aux communes et aux bailleurs sociaux –, pas plus que les primes d’activité promises à l’occasion des JOP et les heures supplémentaires ! (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Les rapporteurs spéciaux applaudissent.)
La possibilité d’examiner le projet de loi de financement de fin de gestion dépendra toutefois du vote des motions de censure annoncées… Quoi qu’il en soit, je remercie la sénatrice de La Gontrie de m’avoir fait penser à ce sujet ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
L’immobilier est également un sujet majeur. Ce budget permettra de financer les grands projets structurants, à Nice et à Valenciennes, entre autres.
Un excellent rapport, publié l’été dernier – M. Belin l’a sans doute lu (Sourires.) –, indiquait que le modèle immobilier de la gendarmerie nationale était à bout de souffle.
Il faut que l’on puisse s’attaquer de façon résolue aux problèmes qui se posent en ce domaine. En quinze ans, les loyers payés pour l’hébergement des forces de sécurité sont passés de 300 millions à 600 millions d’euros.
Or, plus nous mettons d’argent dans les loyers, moins nous sommes capables de procéder à l’investissement qui s’impose : c’est bien la raison pour laquelle il est bloqué.
Cela nécessitera sans doute un ressaut. J’ai donc demandé au nouveau DGGN de me présenter très rapidement une feuille de route pour sortir de ce dilemme.
Par ailleurs, je tiens beaucoup à la question numérique. En la matière, il y a d’énormes marges : il est certain que l’intelligence artificielle permettra de soulager le travail des gendarmes et des policiers, notamment pour la rédaction des comptes rendus d’audition.
En arrivant à ce ministère, j’ai découvert que nos outils numériques n’étaient pas au niveau. Ce n’est pas tolérable et nous devons pouvoir offrir à nos services de sécurité les meilleurs outils numériques possible.
Je sais combien il est illusoire de vouloir simplifier la procédure, notamment en matière pénale, mais nous pouvons au moins faire en sorte d’alléger le travail des gendarmes et des policiers.
Un mot sur la sécurité civile. Nous sommes bien d’accord, l’objectif prioritaire est de poursuivre la consolidation des moyens, en particulier capacitaires, pour renforcer les effectifs des Sdis.
Le modèle français est caractérisé par une mixité des statuts – volontaires et professionnels, qu’ils soient civils ou militaires – et la complémentarité des moyens locaux avec les moyens nationaux. D’où ce pacte capacitaire de 45 millions d’euros.
Dans les prochaines années, nous affecterons 500 millions d’euros au remplacement de notre flotte de sécurité civile. En 2025, 100 millions d’euros seront consacrés au remplacement de 36 hélicoptères EC 145 ; nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir lors de l’examen des amendements.
Certains m’ont questionné sur le modèle de la flotte. Les canadairs ne sont plus fabriqués ; or nous en avons commandé deux – c’est un énorme problème !
Nous nous sommes associés avec d’autres pays européens et notre modèle articule des moyens propres. Nous disposons ainsi de douze canadairs, de huit Dash et de trois avions de coordination Beechcraft.
Nous louons parfois certains appareils pour adapter notre flotte, d’autant que cela peut coûter moins cher.
J’ai demandé à la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) de repenser notre modèle d’aviation de sécurité civile. Nous avons dans notre pays de grands avionneurs ; je les ai d’ailleurs rencontrés. Ainsi, il me semble qu’on peut produire des appareils en France, madame Narassiguin, ce qui permettra de préserver notre souveraineté.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. D’ici à mercredi, ça va être difficile…
M. Bruno Retailleau, ministre. Du reste, je sais que vous êtes très attachés à la sécurité routière. Les crédits de la présente mission permettront de donner suite aux conclusions du comité interministériel de la sécurité routière (CISR), qui s’est tenu le 17 juillet 2023. Il s’agit de mettre en œuvre ce triptyque : éduquer, prévenir et sanctionner.
Pour conclure, je crois de plus en plus que l’ordre républicain est constitutif et tient notre devise républicaine. Je tenais à le dire au Sénat, à quelques jours d’une possible censure…
Il ne peut pas y avoir de liberté sans ordre républicain ; la servitude naît du désordre.
Il ne peut y avoir d’égalité si la loi de la jungle s’applique, car c’est le plus fort qui opprime le plus faible.
Enfin, la fraternité ne peut naître que s’il existe une concorde civile. L’ordre, c’est la concorde !
Tout cela constitue un beau programme. Je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir m’aider à le réaliser, en votant les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – Mme Salama Ramia applaudit également.)
sécurités
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B.
Je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures trente. Nous devrions donc achever nos travaux aux alentours de minuit cinq.
Nous avons quarante amendements à examiner. Si toutefois nous devions manquer de temps, la conférence des présidents, en accord avec la commission des finances, a renvoyé la suite de la discussion de la mission « Sécurités » à la fin de l’examen des missions inscrites à l’ordre du jour cette semaine, soit le samedi 7 décembre.
Cela semble un peu théorique (Exclamations et rires.), mais ne préjugeons pas des votes à venir…
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Sécurités |
26 057 166 585 |
25 215 409 206 |
Police nationale |
13 745 268 791 |
13 370 101 484 |
dont titre 2 |
11 608 296 295 |
11 608 296 295 |
Gendarmerie nationale |
11 366 321 344 |
10 930 839 118 |
dont titre 2 |
9 006 701 998 |
9 006 701 998 |
Sécurité et éducation routières |
84 622 634 |
83 115 152 |
Sécurité civile |
860 953 816 |
831 353 452 |
dont titre 2 |
241 518 727 |
241 518 727 |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-498 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° II-603 est présenté par Mme Schillinger, M. Patriat, Mme Ramia, MM. Rohfritsch, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale |
142 058 077 |
|
142 058 077 |
|
dont titre 2 |
142 058 077 |
142 058 077 |
||
Gendarmerie nationale |
|
18 653 258 |
|
18 653 258 |
dont titre 2 |
746 905 |
746 905 |
||
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile |
|
164 483 |
|
164 483 |
dont titre 2 |
164 483 |
164 483 |
||
TOTAL |
142 058 077 |
18 817 741 |
142 058 077 |
18 817 741 |
SOLDE |
123 240 336 |
123 240 336 |
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-498.
M. Bruno Retailleau, ministre. En effet, je ne suis pas certain de revenir samedi pour la seconde mi-temps, si j’ose dire. (Sourires.)
Mme Cécile Cukierman. On y veillera, monsieur le ministre !
M. Bruno Retailleau, ministre. Nous allons donc faire l’effort d’aller très vite, y compris dans la présentation des amendements.
Le présent amendement est important puisqu’il vise à augmenter de 142 millions d’euros les crédits alloués aux dépenses de personnels de la police nationale.
Dans le cadre de la solidarité ministérielle, des crédits nouveaux d’un montant de 60 millions d’euros permettront de couvrir les besoins.
Nous suggérons également de mobiliser les crédits programmés en 2025 qui ne seront pas consommés. Je pense, par exemple, à la protection sociale complémentaire, que nous n’arriverons pas à mettre en place avant le second semestre.
Par ailleurs, nous annulerons 18 millions d’euros de crédits alloués à la gendarmerie nationale. Nous proposerons même, à un amendement ultérieur, de procéder à un transfert de crédits, pour un montant de 28 millions d’euros.
Voilà qui permettra d’augmenter la masse salariale de la police nationale, sans préjudice pour les autres programmes de la mission.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° II-603.
Mme Patricia Schillinger. Comme l’a indiqué le Gouvernement lors du dépôt du projet de loi de finances, nous devons nous doter des moyens qui permettent d’assurer la présence renforcée des policiers sur la voie publique.
Ces amendements identiques visent précisément à mettre en œuvre cette ambition : j’espère qu’ils seront votés !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Avis très favorable !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-498 et II-603.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-479 rectifié, présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye et Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
46 864 885 |
|
37 949 860 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
58 102 423 |
|
47 789 515 |
Sécurité et éducation routières |
|
1 970 668 |
|
1 937 883 |
Sécurité civile dont titre 2 |
|
12 248 266 |
|
7 228 482 |
TOTAL |
|
119 186 242 |
|
94 905 740 |
SOLDE |
- 119 186 242 |
- 94 905 740 |
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Le présent amendement, comme l’amendement n° II-475 rectifié – le Gouvernement a d’ailleurs déposé un amendement qui lui est identique –, vise à accentuer le programme d’économies prévues dans ce projet de loi de finances, car il est essentiel d’assurer le retour à l’équilibre de nos finances publiques.
Je suis prêt à retirer cet amendement au profit des deux amendements identiques suivants : ceux-ci sont moins rigoureux et traduisent une position commune entre notre groupe et le Gouvernement.
Quoi qu’il en soit, les dépenses de fonctionnement de la mission « Sécurités », comme celles de toutes les autres missions, doivent être réduites pour supporter l’effort collectif.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° II-475 rectifié est présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye et Mme N. Goulet.
L’amendement n° II-573 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale |
|
31 626 428 |
|
31 626 428 |
dont titre2 |
31 558 341 |
31 558 341 |
||
Gendarmerie nationale |
|
20 384 389 |
|
20 384 389 |
dont titre2 |
20 384 389 |
20 384 389 |
||
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile |
|
692 889 |
|
692 889 |
dont titre2 |
688 598 |
688 598 |
||
TOTAL |
|
52 703 706 |
|
52 703 706 |
SOLDE |
- 52 703 706 |
- 52 703 706 |
L’amendement n° II-475 rectifié vient d’être défendu.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-573.
M. Bruno Retailleau, ministre. Je suis d’accord avec le sénateur Canévet : des économies sont nécessaires. C’est bien la raison pour laquelle nous avons déposé ces amendements identiques sur ce sujet, qui visent à annuler 52,7 millions d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement sur le périmètre de la mission « Sécurités ».
Cette proposition ne fait que traduire les mesures d’économies annoncées par le Gouvernement pour limiter le déficit public à 5 % du PIB.
Un certain nombre de mesures transversales ont d’ailleurs été prises en ce sens, notamment en ce qui concerne l’École nationale supérieure de la police (ENSP) et l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC).
M. le président. Monsieur Canévet, l’amendement n° II-479 rectifié est-il retiré ?
M. Michel Canévet. Oui, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-479 rectifié est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements identiques ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Favorable !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-475 rectifié et II-573.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-497 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° II-602 est présenté par Mme Schillinger, M. Patriat, Mme Ramia, MM. Rohfritsch, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke et Lemoyne, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
28 000 000 |
|
28 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
28 000 000 |
|
28 000 000 |
SOLDE |
- 28 000 000 |
- 28 000 000 |
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-497.
M. Bruno Retailleau, ministre. Par cet amendement, nous proposons d’opérer un transfert de crédits d’investissement et de fonctionnement d’un montant de 28 millions d’euros, afin de couvrir les dépenses supplémentaires nécessaires à la gestion de la masse salariale de la police nationale.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° II-602.
Mme Patricia Schillinger. Je n’ai rien à ajouter : le ministre a très bien présenté l’objet de ces amendements identiques !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-497 et II-602.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° II-518, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
1 400 000 000 |
|
1 400 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
1 400 000 000 |
|
1 400 000 000 |
|
TOTAL |
1 400 000 000 |
1 400 000 000 |
1 400 000 000 |
1 400 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Le présent amendement vise à investir davantage dans les camions-citernes feux de forêt (CCF). L’objectif consisterait à disposer de 10 000 camions sur l’ensemble du territoire d’ici à 2030, conformément à la recommandation de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF).
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Le Gouvernement a déjà accompli un effort assez significatif en la matière. Le pacte capacitaire garantit l’achat de 1 000 CCF : il serait donc complètement déraisonnable d’en acquérir 5 000 de plus, d’autant que cela supposerait de tripler l’enveloppe budgétaire.
Même les représentants de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours pensent que 1 000 CCF seront largement suffisants. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Même avis. Je comprends l’intention des auteurs de cet amendement. Toutefois, nous disposons déjà d’une grande expertise.
La stratégie actuelle consiste à attaquer les départs de feux en moins de dix minutes, notamment grâce au déploiement des moyens aériens. L’efficacité des dispositifs en place se mesure à la différence entre le nombre de départs de feux – qui n’a jamais été aussi important – et le nombre d’hectares brûlés. Ainsi, l’été dernier, 5 200 feux n’ont parcouru que 5 400 hectares.
Le Gouvernement émet un avis défavorable : très franchement, nous n’avons pas les moyens de commander 5 000 camions !
M. le président. L’amendement n° II-516, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
75 000 000 |
|
75 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
75 000 000 |
|
75 000 000 |
|
TOTAL |
75 000 000 |
75 000 000 |
75 000 000 |
75 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Les sapeurs-pompières et sapeurs-pompiers sont parfois confrontés à des situations extrêmement difficiles dans l’exercice de leur mission. Le soutien psychologique auquel ils recourent parfois reste à leur charge, la plupart du temps. Nous proposons donc qu’il soit remboursé intégralement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Les programmes budgétaires de la présente mission n’ont pas vocation à rembourser des frais de santé. Je demande donc que cet amendement soit retiré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. C’est vrai, les sapeurs-pompiers peuvent subir des blessures psychologiques dans le cadre de leurs interventions. Or ils peuvent s’adresser aux psychologues dont les Sdis sont déjà tous pourvus, ou, s’ils préfèrent, recourir à des consultations extérieures.
Dans ces conditions, le dispositif de soutien est suffisamment robuste. Demande de retrait.
M. le président. L’amendement n° II-537, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
70 000 000 |
|
70 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
70 000 000 |
|
70 000 000 |
|
TOTAL |
70 000 00 |
70 000 000 |
70 000 000 |
70 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Il s’agit d’un amendement d’appel. Je l’ai dit lors de la discussion générale : le programme « Sécurité civile » est un peu le parent pauvre de cette mission budgétaire.
Pourtant, le réchauffement climatique va entraîner des dérèglements météorologiques de plus en plus forts, ce qui impliquera de mobiliser davantage les Sdis, entre autres.
Dans un certain nombre de départements, les services publics, notamment les services de santé, sont fragilisés, quand ils ne ferment pas – et les lois que nous votons n’y changent rien ! Or les Sdis sont de plus en plus sollicités au quotidien pour couvrir les missions qui ne peuvent plus être exécutées par d’autres services.
Si nous voulons conserver notre modèle de sécurité civile, qui est à la fois une force et un exemple à l’international, nous devons aider les départements, car ils ne pourront subvenir seuls aux besoins.
Les difficultés seront encore plus grandes si nous ne votons pas les mesures qui s’imposent lors de la discussion du budget des départements, mercredi prochain.
En tout état de cause, nous demandons de réévaluer les crédits du programme « Sécurité civile ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Je partage vos constats, madame la sénatrice. Vu les conséquences du changement climatique et la multiplication des catastrophes naturelles, il est nécessaire d’adapter les moyens de la sécurité civile.
Les dispositifs mis en place à moyen terme, tels que le schéma de couverture et d’analyse des risques (SACR), permettront justement de répondre aux besoins des départements.
Le Beauvau de la sécurité civile sera d’ailleurs l’occasion de dresser un inventaire des besoins matériels et d’octroyer les moyens adéquats.
En ce sens, la DGSCGC doit définir sa nouvelle stratégie pour renouveler la flotte d’avions bombardiers d’eau d’ici à 2025, comme l’a indiqué le ministre tout à l’heure. Le ministère réfléchit également à l’acquisition de moyens lourds d’équipement de pompage.
Bref, cet amendement me paraît trop peu précis quant à la destination des crédits. La commission demande donc qu’il soit retiré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je comprends qu’il s’agit d’un amendement d’appel. Facialement, il y aura bien une baisse de crédits en 2025, par rapport à l’année 2024. De fait, les avances votées l’an dernier pour la commande des deux canadairs ne seront pas renouvelées cette année.
Par ailleurs, je signerai, demain matin, le décret portant création de la quatrième UIISC de Libourne. Sachez qu’elle ne nécessitera pas davantage de moyens en 2025. Du reste, il faut aussi tenir compte de l’organisation des JOP, l’été dernier. Au vu de ces éléments, votre calcul est faussé, madame la sénatrice.
Vous évoquiez également les départements. Justement, un décret pris conjointement avec Bercy permettra aux Sdis de bénéficier de l’exonération rétroactive de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) appliquée à leurs véhicules.
M. Bruno Retailleau, ministre. Ce seront donc 30 millions d’euros supplémentaires qui tomberont dans la poche des départements. J’ignore si j’aurais le temps de signer ce décret (Sourires.), mais je tenais à faire cette annonce devant le Sénat.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement.
Mme Cécile Cukierman. Allez, je le retire !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Quel talent, monsieur le ministre !
M. le président. L’amendement n° II-537 est donc retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-353, présenté par M. G. Blanc, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
35 000 000 |
|
35 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
35 000 000 |
|
35 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
70 000 000 |
|
70 000 000 |
|
TOTAL |
70 000 000 |
70 000 000 |
70 000 000 |
70 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. Je l’annonce d’emblée : je ne retirai pas cet amendement, qui vise, comme le précédent, à allouer 70 millions d’euros supplémentaires à la sécurité civile.
D’après la Cour des comptes, le ministère de l’intérieur consacre 1,6 milliard d’euros à la police des étrangers. Parallèlement, il accorde quasiment moitié moins de crédits à la sécurité civile.
On l’a rappelé, ce budget doit permettre de répondre à la multiplication des feux de forêt et des inondations. Comme certains de mes collègues, je suis administrateur d’un Sdis dans mon département. Vu l’évolution du climat aujourd’hui, je sais qu’il n’est pas superflu de leur accorder 1 million ou 2 millions d’euros supplémentaires !
Il y a quelques années, l’État a sorti de l’argent lorsqu’il a fallu déployer le réseau Antares, et il en a fait autant dans le cadre du pacte capacitaire.
De plus en plus de Sdis tendent désormais à requalifier les feux de forêt dans leur schéma départemental d’analyse et de couverture des risques (Sdacr) : de risques exceptionnels, ceux-ci deviennent des risques courants. Cette évolution témoigne de besoins croissants.
Cet amendement vise à attribuer 70 millions d’euros supplémentaires aux Sdis, prélevés sur l’enveloppe de 1,4 milliard d’euros allouée à la police des étrangers. Nous venons d’accorder une augmentation de 140 millions d’euros à la mission « Sécurités » ; à mon sens, la sécurité civile mérite d’être considérée comme prioritaire. La protection de nos concitoyens prime la chasse aux étrangers.
M. le président. L’amendement n° II-517, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
30 000 000 |
|
30 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
30 000 000 |
|
30 000 000 |
|
TOTAL |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Grégory Blanc a raison, nous devons disposer des moyens nécessaires pour lutter contre les inondations.
Toutefois, les montants proposés apparaissent excessivement élevés. Ils semblent anticiper les conclusions du Beauvau de la sécurité et présentent un risque d’ouverture de crédits qui, en l’absence d’une stratégie d’achat clairement établie, finiront par être reportés.
Au regard de ces éléments, je demande le retrait de cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° II-517 de Mme Vogel, qui tend à augmenter les crédits de 30 millions d’euros, mes réserves sont similaires.
Cependant, dans ce cas, je souhaite entendre la position du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Un mot sur les niveaux de réponse, alors que nous ferons face de plus en plus aux effets du dérèglement climatique : nous travaillons actuellement sur un troisième échelon.
Le niveau territorial s’appuie sur les Sdis et le niveau national se manifeste notamment à travers les pactes capacitaires et l’organisation des colonnes de feu.
Nous souhaitons donc développer un niveau supplémentaire, européen. J’aspire même, mes chers collègues, à créer un programme Erasmus pour les jeunes sapeurs-pompiers, un très beau projet que nous, ou d’autres, concrétiserons.
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Très bien !
M. Bruno Retailleau, ministre. La sénatrice Mélanie Vogel soulève la question cruciale des moyens de pompage.
Je précise que 3,6 millions d’euros ont déjà été alloués aux Sdis du Pas-de-Calais, de l’Oise, de la Somme et d’Île-de-France pour cofinancer avec l’État des pompages de grande capacité. La réserve nationale, au sein du groupement des moyens nationaux terrestres (GMNT), dispose en outre en propre de vingt-cinq pompes et de trois berces équipées de douze pompes de moyenne puissance déployables sur le territoire.
Ce dispositif sera renforcé l’année prochaine par sept nouvelles pompes, pour un montant supérieur à 5 millions d’euros. Les enjeux ont bien été identifiés et nous nous attachons à mobiliser les moyens nécessaires.
Je demande le retrait de ces deux amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-353.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 143 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 113 |
Contre | 230 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° II-517.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° II-319, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
Sécurité civile dont titre 2 |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. La situation des forces aériennes de la sécurité civile et la stratégie associée ont été exposées par M. le ministre : une intervention en moins de dix minutes, qui a démontré son efficacité.
En parallèle, notre flotte de douze canadairs connaît des déficiences croissantes : ces appareils éprouvent de plus en plus de difficultés à décoller et se retrouvent fréquemment cloués au sol.
Cet amendement vise à abonder de 50 millions d’euros les crédits destinés à l’entretien de ces avions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. L’entretien des canadairs est assuré. Une défaillance du sous-traitant a effectivement été constatée pour l’année 2024, mais les moyens ont été réévalués avec la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises afin de rectifier le tir pour 2025, ce qui sera le cas.
Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Je demande également le retrait de cet amendement.
Le problème ne réside pas dans la maintenance, qui s’effectue à Nîmes, mais dans l’acquisition des appareils. L’entreprise De Havilland, qui produit les canadairs, n’a pas relancé ses chaînes de production. C’est pourquoi je suis, quant à moi, favorable à l’étude d’une solution française.
M. le président. L’amendement n° II-321, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Sécurité civile dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Monsieur le ministre, vous évoquez une solution française : cet amendement vise précisément à soutenir l’innovation dans le domaine de la sécurité civile en allouant 5 millions d’euros au financement de projets développés par des entreprises françaises telles que Hynaero et Kepplair Evolution, qui conçoivent de nouvelles technologies de bombardiers d’eau destinés à la lutte contre les incendies.
Ces initiatives s’inscrivent dans la perspective du renouvellement de notre flotte vieillissante et du renforcement de notre capacité de réponse face aux feux de forêt.
Afin de garantir la recevabilité financière de l’amendement, les crédits sont prélevés sur l’action « Démarches interministérielles et communication » du programme « Sécurité et éducation routières ».
Cette proposition s’inscrit dans le cadre du contre-budget présenté par le groupe Rassemblement national à l’Assemblée nationale. En renforçant les moyens financiers dédiés à la sécurité et à l’innovation, cet amendement vise à garantir une meilleure réponse aux enjeux sécuritaires et environnementaux actuels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial. Dans ce dossier, le trouble est né de la promesse du Président de la République de renouveler la flotte de canadairs et de la porter de douze à seize appareils à l’horizon 2027.
Or, comme l’a souligné le ministre, les certifications n’avaient pas été obtenues et la chaîne de production n’avait pas redémarré. La construction d’un appareil nécessitant six à sept ans, les premiers canadairs ne pourront être livrés au mieux qu’en 2028, plus vraisemblablement en 2030.
La DGSCGC poursuit actuellement des discussions avec deux start-up et d’autres avionneurs français pour identifier un appareil répondant aux mêmes critères que le canadair, lequel est un modèle spécifique, un avion de niche, relativement onéreux.
La relance d’une production de canadairs ou d’appareils similaires requiert un volume minimal de commandes. Si plusieurs pays manifestent leur intérêt, l’entreprise canadienne, bien qu’ayant reçu des commandes, ne garantit pas leur livraison dans les délais impartis. Des discussions se poursuivent sur différentes modalités de ce processus.
Le programme 161 n’ayant pas vocation à financer des industriels privés, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Joshua Hochart. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-321 est retiré.
L’amendement n° II-360, présenté par MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros et Uzenat, Mme Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Amélioration des conditions d’accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles en commissariats et gendarmeries
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
464 000 000 |
|
464 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
Amélioration des conditions d’accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles en commissariats et gendarmeries |
464 000 000 |
|
464 000 000 |
|
TOTAL |
464 000 000 |
464 000 000 |
464 000 000 |
464 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement vise – dans une sorte de feu d’artifice ! – à satisfaire l’engagement pris par le Premier ministre le 25 novembre dernier, postérieurement au dépôt de ce budget, de renforcer significativement la lutte contre les violences faites aux femmes.
Notre proposition s’inscrit pleinement dans cette ambition. Faire face aux violences faites aux femmes impose de traiter les questions de l’accueil, de l’enquête et du dépôt de plainte.
L’accueil nécessite des personnels formés, des locaux adaptés et des caméras permettant d’éviter aux femmes de devoir répéter leur témoignage ; l’enquête exige, quant à elle, des opérateurs spécialisés dans ces domaines.
Concernant le dépôt de plainte, le Premier ministre a annoncé qu’il serait possible dans les hôpitaux, ce qui implique que des personnels se déplacent. Cette mesure sera mise en place, a-t-il dit, dans 377 structures d’ici à la fin de l’année 2025.
À l’évidence, votre budget ne pouvait naturellement pas intégrer cette évolution ; c’est pourquoi nous souhaitons, par cet amendement, vous y aider et vous permettre de défendre ce soir la cause des femmes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je remercie Mme de La Gontrie d’avoir soulevé cette question essentielle. J’ai une pensée pour le cas d’une jeune fille de ma commune, victime des carences d’accueil d’un commissariat qui n’a pu recueillir sa plainte un soir à dix-sept heures trente.
Le sujet sensible que vous évoquez ne saurait être traité par un simple amendement ce soir : il mérite une ligne budgétaire spécifique, voire un programme dédié.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ça ne suffit pas !
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande donc le retrait de cet amendement, tout en vous remerciant d’avoir abordé ces enjeux importants pour l’ensemble de nos concitoyens : les violences intrafamiliales constituent aujourd’hui le premier motif de sollicitation des forces de sécurité.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Faites long !
M. Bruno Retailleau, ministre. J’ai reçu récemment des représentants sur réseau d’associations Women Safe & Children et les trois correspondants sur le sujet : les deux commissaires de la préfecture de police de Paris et de la direction générale de la police nationale, ainsi que la colonelle de la gendarmerie nationale.
Un effort significatif est accompli concernant l’accueil, la prise en charge des victimes et le renforcement des moyens d’enquête. La police nationale a ainsi professionnalisé sa mission d’accueil du public : 638 référents accueil, spécialement formés, exercent au sein de ses services.
Ils s’ajoutent aux correspondants d’aide aux victimes, interlocuteurs privilégiés des services territoriaux de police, qui accompagnent les victimes dans leurs démarches. On en dénombre désormais plus de 800 à l’échelle de la police nationale et de la préfecture de police de Paris.
Depuis le 1er janvier 2024, dans le cadre de la réforme de la police nationale, une délégation départementale d’aide aux victimes a été constituée dans chaque département. Toutes ces circonscriptions disposent désormais d’un délégué à l’aide aux victimes.
Conscients des difficultés que peuvent éprouver les victimes pour déposer plainte en commissariat, nous avons multiplié les solutions d’appui : la plateforme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d’accompagnement des victimes (Pnav) mobilise vingt-neuf opérateurs spécifiquement formés, assistés d’un psychologue, pour recueillir les déclarations ; des dispositifs de visioplainte ont également été déployés.
La question concerne en premier lieu les établissements de santé – l’annonce du Premier ministre a d’ailleurs été faite dans un hôpital. À ce titre, 237 conventions ont déjà été signées, nous mettons en place des Maisons des femmes, qui sont des dispositifs d’appui.
Enfin, la gendarmerie nationale s’appuie sur une chaîne territoriale dédiée couvrant l’ensemble des échelons de terrain jusqu’au niveau central.
Le temps me manque pour détailler davantage ce dispositif, mais je vous assure de sa robustesse.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le ministre, votre réponse revient à indiquer que l’annonce du Premier ministre n’avait pas de raison d’être : les effectifs de police que vous évoquez ne représentent rien au regard de la nécessité d’assurer la présence permanente d’interlocuteurs, ainsi que l’a lui-même indiqué le rapporteur spécial.
Vous considérez que l’existant est satisfaisant, et donc, que les mesures annoncées ne sont pas nécessaires. Vous vous trompez.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-360.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 144 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l’adoption | 112 |
Contre | 213 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° II-375 rectifié ter, présenté par M. Iacovelli, Mmes Havet et Duranton, M. Lemoyne, Mmes Nadille, Phinera-Horth et Ramia, MM. Fouassin et Chevalier, Mme Billon et MM. Chasseing et Cambier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale |
25 448 573 |
|
25 448 573 |
|
dont titre2 |
25 448 573 |
25 448 573 |
||
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
25 448 573 |
|
25 448 573 |
TOTAL |
25 448 573 |
25 448 573 |
25 448 573 |
25 448 573 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Ramia, l’amendement n° II-375 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Salama Ramia. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-375 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° II-357 rectifié, présenté par MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
280 000 000 |
|
280 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
280 000 000 |
|
280 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
280 000 000 |
280 000 000 |
280 000 000 |
280 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Le budget de la mission « Sécurités » pour 2025 est marqué par une lourde baisse des moyens de la police judiciaire, atteignant plus de 8 %, que cet amendement vise à annuler.
Le renforcement de l’action de la police judiciaire et des moyens qui lui sont consacrés devrait s’imposer comme une évidence : comment, en effet, afficher la lutte contre le narcotrafic comme une priorité absolue en matière de criminalité organisée tout en réduisant les moyens dévolus à la police judiciaire, qui en est un acteur majeur ?
Lors de vos auditions devant les commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat, vous avez pourtant contesté cette baisse, contre toute évidence, arguant d’une simple modification de la présentation comptable.
S’il ne s’agit effectivement que d’un changement de maquette budgétaire : les 280 millions d’euros dédiés jusqu’à présent au financement de la police judiciaire et qui n’apparaissent plus dans ce programme devraient se retrouver ventilés sur d’autres programmes et actions. Pouvez-vous nous préciser lesquels ?
À défaut, nous maintiendrons cet amendement qui vise à garantir à la police judiciaire les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses missions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Mme la sénatrice Narassiguin soulève une question importante.
La police a fait l’objet d’une réforme. Auparavant, la structuration budgétaire globalisait l’ensemble de la filière policière judiciaire ; depuis, un double comptage est effectué : le niveau central de la police judiciaire, avec notamment la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ) et la prise en charge de la criminalité organisée au niveau central, puis les unités territoriales de la police nationale au niveau de chaque territoire. Il convient donc d’additionner les deux, c’est très clair et très précis.
Au total, en additionnant les ressources réparties à l’échelon national, c’est-à-dire la DNPJ et son unité opérationnelle (UO) consacrée à la criminalité organisée, et les budgets opérationnels de programme (BOP) zonaux dans les territoires, les moyens ne diminuent pas, bien au contraire.
Je ne prétends pas pour autant que la filière d’investigation de la police nationale ne rencontre pas de difficultés : l’une de mes priorités consiste à la conforter, non pas pour des raisons budgétaires, mais pour favoriser l’attractivité d’un métier difficile, qui mobilise entièrement ceux qui le pratiquent lorsqu’ils suivent une enquête.
M. le président. L’amendement n° II-511, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
152 000 000 |
|
152 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
152 000 000 |
|
152 000 000 |
TOTAL |
152 000 000 |
152 000 000 |
152 000 000 |
152 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° II-538, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
200 000 000 |
|
200 000 000 |
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je souhaite répondre brièvement à Mme Cukierman, car elle soulève un sujet important que nous avons évoqué, notamment à la demande de M. le rapporteur général et de M. le président Raynal, concernant les loyers et l’immobilier de gendarmerie en général.
Un travail est en cours pour tenter de trouver le montage adéquat. Comme M. le ministre l’a rappelé précédemment, les loyers prennent désormais une part considérable dans le budget.
Quoi qu’il en soit, l’essentiel est que nous puissions très prochainement voter le projet de loi de fin de gestion afin de rattraper les arriérés de l’année 2024 : certaines collectivités attendent près de 200 000 euros. Je forme le vœu que les jours à venir nous offrent cette possibilité.
En tout état de cause, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Cukierman, l’amendement n° II-538 est-il maintenu ?
Mme Cécile Cukierman. On ne sait jamais de quoi demain sera fait, je le maintiens ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° II-576, présenté par Mme Ramia, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
150 000 000 |
|
150 000 000 |
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
150 000 000 |
|
150 000 000 |
TOTAL |
150 000 000 |
150 000 000 |
150 000 000 |
150 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Le parc immobilier de la gendarmerie de Mayotte s’est particulièrement densifié au cours des vingt dernières années, alors que sa structure est passée du statut de compagnie à celui de commandement de la gendarmerie (Comgend). Les augmentations d’effectifs ont entraîné de très nombreuses prises à bail, si bien que 80 % des militaires sont désormais logés en dehors des casernes.
Cet amendement détaillé vise à répondre aux besoins du Comgend afin de lutter efficacement contre la criminalité et la délinquance à Mayotte.
Nos militaires ont besoin de se loger, de travailler dans des conditions dignes, de disposer d’un plateau technique et de renforcer leur état-major, en le déplaçant. Pour améliorer la sécurité à Mayotte, il est impératif de donner à nos gendarmes les moyens de mettre en œuvre leur politique.
Le présent amendement vise à permettre la satisfaction de l’ensemble de ces besoins à hauteur de 150 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. J’entends votre demande précise, madame la sénatrice ; nous devrons en effet nous pencher sur la situation à Mayotte dans les mois qui viennent.
Reste que, pour ce soir, je demande le retrait de cet amendement n° II-576, ainsi que de celui qui le suit, l’amendement n° II-591.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Même avis.
Je saisis cette occasion pour indiquer qu’une opération importante de décasage a commencé ce matin à Mayotte, Mme la sénatrice en est informée.
Pour ce qui concerne le projet auquel il est ici fait allusion, les études de faisabilité sont en cours, mais un problème subsiste quant à l’acquisition du terrain, propriété du département et de partenaires privés. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il sera résolu et que nous avancerons. Nous n’abandonnons pas ces projets, bien au contraire.
M. le président. Madame Ramia, l’amendement n° II-576 est-il maintenu ?
Mme Salama Ramia. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-576 est retiré.
L’amendement n° II-591, présenté par Mme Ramia, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
150 000 |
|
150 000 |
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
150 000 |
|
150 000 |
TOTAL |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Je le retire.
M. le président. L’amendement n° II-591 est retiré.
L’amendement n° II-595 rectifié, présenté par MM. Jacquin, P. Joly, Durain, Chaillou et Bourgi, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas, Temal et M. Vallet, Mme Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mmes Carlotti et G. Jourda, M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à apporter une solution au financement des petites casernes de gendarmerie en cas de reconstruction à neuf.
Un décret de 2016 garantit un loyer plafonné au maître d’ouvrage, proportionnel au nombre d’unités-logements. Ce loyer est donc décorrélé de la taille réelle de la caserne, alors qu’il doit permettre de financer également les indispensables locaux de service, dont les bureaux et les cellules. Dès lors, l’équilibre financier s’avère difficile à atteindre pour les petites gendarmeries ; à l’inverse, plus le nombre de logements est élevé, plus il est aisé de financer les locaux de service.
Ces petites gendarmeries se situent en secteur rural, où le financement des services publics est déjà complexe. Il s’agit d’une véritable double peine pour ces petites unités, pour lesquelles les collectivités doivent consentir un effort financier bien plus important que dans des secteurs plus denses.
Ce problème a été reconnu dans le cadre de la Lopmi. Afin d’anticiper la révision du décret correspondant, nous proposons d’allouer 50 millions d’euros au programme 152, car nos gendarmes des secteurs ruraux ont besoin de locaux de qualité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je remercie M. Jacquin d’avoir de nouveau soulevé cette question de l’immobilier de la gendarmerie. Nous y travaillons.
La semaine dernière, j’étais avec Mme Sollogoub pour examiner les situations au cas par cas dans la Nièvre, en collaboration avec les bailleurs sociaux et les collectivités. Nous étudions, avec les outils à notre disposition, c’est-à-dire les règles édictées en 1993 et en 2016, comment il serait possible de séparer la partie logement de la partie bureau.
Nous comptons formuler des propositions en 2025, à la suite de mon rapport d’information sur l’immobilier de la gendarmerie nationale.
Pour l’heure, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Depuis la Lopmi, je croyais que nous devions travailler sur le sujet et que la réalité du problème était reconnue.
Je maintiens cet amendement, qui vise précisément à anticiper les solutions qui seront apportées. Dans mon département, dès cette année, les deux petites gendarmeries de Vézelise et de Thiaucourt ne disposent pas de modèle économique viable et nous ne parvenons pas à réaliser les projets immobiliers nécessaires.
Il me semble important de voter cet amendement, qui apporte une solution immédiate à ces problèmes.
M. le président. L’amendement n° II-318, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
130 000 000 |
|
130 000 000 |
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
130 000 000 |
|
130 000 000 |
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
130 000 000 |
130 000 000 |
130 000 000 |
130 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° II-510, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan de recrutement d’intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
124 194 263 |
|
124 194 263 |
Plan de recrutement d’intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie |
124 194 263 |
|
124 194 263 |
|
TOTAL |
124 194 263 |
124 194 263 |
124 194 263 |
124 194 263 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à mettre en œuvre un plan de recrutement important d’intervenants sociaux pour améliorer l’accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles.
Aujourd’hui, ces postes sont au nombre de 430 en France, c’est-à-dire presque rien au regard des besoins. Il paraît donc indispensable d’en créer de nouveaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Le vecteur de financement qui est envisagé n’est pas adapté : la police et la gendarmerie ne financent pas directement les postes d’intervenants sociaux ; elles mettent des locaux à disposition.
Aussi, le programme sur lequel est imputé cet amendement n’est pas adapté à son objet. Je vous propose donc de le retirer.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-358 rectifié, présenté par MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
100 000 000 |
|
100 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Par cet amendement, nous souhaitons aborder la question centrale de la formation des policiers. Je tiens tout d’abord à alerter le Gouvernement sur l’opacité des crédits alloués dans ce domaine, ce qui soulève un véritable problème démocratique.
Jusqu’à l’année dernière, il existait une ligne budgétaire permettant, même imparfaitement, d’identifier les dépenses consacrées à la formation des forces de l’ordre. Ce n’est plus le cas dans ce budget pour 2025. Le travail de suivi et d’évaluation du Parlement s’en trouve ainsi entravé puisqu’il sera très difficile de comparer, d’une année sur l’autre, les moyens effectivement mis en œuvre à cette fin.
En procédant par recoupement d’informations, il nous semble néanmoins que les moyens alloués ne sont pas au rendez-vous. D’ailleurs, l’objectif, fixé les années précédentes, visant à augmenter le temps de formation continue de 50 % a disparu.
Il nous paraît donc essentiel de renforcer ces crédits pour permettre le recrutement de personnels de haut niveau. Il s’agit d’une condition indispensable si notre ambition est de disposer d’une police nationale de pointe, singulièrement dans le domaine des enquêtes et de la lutte contre la criminalité organisée.
M. le président. L’amendement n° II-320, présenté par MM. Hochart, Durox et Szczurek, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Demande de retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° II-536, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
500 000 |
|
500 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
500 000 |
|
500 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Ce sujet mérite, de toute évidence, un peu plus que quelques secondes ce soir.
Monsieur le ministre, au-delà des chiffres, une mission budgétaire révèle la politique mise en œuvre.
Nous demeurons, quant à nous, viscéralement attachés à renforcer la présence quotidienne, dans l’ensemble des communes où cela s’avère nécessaire, d’une police incarnant l’esprit de sa mission régalienne.
Un tel service ne devra pas obligatoirement ressusciter la police de proximité, laquelle a été supprimée, mais cet amendement vise à en rendre possible la mise en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Dans le cadre des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, nous avons demandé aux policiers et aux gendarmes d’améliorer leur présence sur la voie publique, autour du concept suivant : « La bonne patrouille au bon moment et au bon endroit. »
De cette manière, leur action sera plus visible.
M. le président. L’amendement n° II-589, présenté par M. G. Blanc, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. Cet amendement vise à créer un fonds de soutien et de subventions aux collectivités locales pour remédier aux conséquences d’une évolution que nous observons depuis près de quinze ans : la baisse continue du taux d’engagement sur le terrain des forces de sécurité.
Cette situation conduit immanquablement l’État à demander aux communes de créer des polices municipales ou de renforcer les moyens de celles qui existent, non pas pour assurer la tranquillité publique, mais bien pour intervenir en cas de crise ou de troubles à l’ordre public.
C’est d’ailleurs cela qui explique le débat actuel sur l’armement des polices municipales, auxquelles il est demandé d’assurer des missions normalement dévolues à l’État.
Si les communes subissent ainsi une sorte de transfert de compétences à bas bruit, elles doivent être financées en retour.
Ainsi, le présent amendement vise à ouvrir la voie à un mécanisme de compensation financière lorsque les polices municipales interviennent non pas dans une logique de prévention, mais en complément des forces de sécurité que sont la police nationale et la gendarmerie.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également l’amendement n° II-588.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° II-588, présenté par M. G. Blanc, et ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Grégory Blanc. À défaut de la création du fonds de soutien susvisé, cet amendement de repli vise à assurer le soutien financier de l’État aux communes dans le cadre des interventions de police municipale menées en substitution de la police nationale ou à titre de force auxiliaire. Il convient en effet que l’État paie ce qu’il doit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Le vecteur n’étant pas le bon, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Grégory Blanc. Je retire l’amendement n° II-588, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n II-588 est retiré.
L’amendement n° II-519, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Si l’augmentation du nombre de vélos circulant sur nos routes est une bonne chose, la sécurité routière ne s’est pas adaptée à cet afflux. Le nombre de cyclistes tués a augmenté de 60 % depuis 2010, au point que pas moins de 221 cyclistes ont perdu la vie dans un accident de la route l’année dernière.
La mort du cycliste Paul Varry, écrasé par une voiture après une altercation, a suscité des mobilisations d’autant plus importantes que la protection des cyclistes n’est toujours pas une priorité de la Sécurité routière.
Par cet amendement, il est donc proposé d’instaurer un plan pour la sécurité routière des cyclistes. Son adoption ne mettrait sans doute pas un terme aux décès de cycliste, mais elle constituerait une première étape de l’énorme chantier qui est devant nous, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Demande de retrait, ou à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° II-499 n’est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-359 rectifié est présenté par MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° II-509 rectifié est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
1 300 000 |
|
1 300 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
1 300 000 |
|
1 300 000 |
Sécurité et éducation routières |
|
|
|
|
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
1 300 000 |
1 300 000 |
1 300 000 |
1 300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° II-359 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à rétablir le budget alloué au programme de mobilisation contre les suicides dans la police, que le Gouvernement propose de réduire drastiquement.
En moyenne, quarante-quatre policiers se suicident en effet chaque année, le taux de suicide au sein de la police étant près de 50 % supérieur à celui de la population française.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° II-509 rectifié.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise en effet à maintenir les crédits alloués aux actions de lutte contre le suicide des agents des forces de l’ordre au même niveau que les crédits de l’année en cours.
L’année dernière, vingt-quatre agents des forces de l’ordre se sont donné la mort. Face à cette situation inacceptable, la baisse des crédits visés est incompréhensible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. En abordant ce sujet sensible, mes pensées vont aux familles et aux proches de tous ces fonctionnaires.
Des efforts ont été consentis et des psychologues recrutés.
En tout état de cause, sur ces deux amendements identiques, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. Les crédits exécutés se sont établis à 1,3 million d’euros en 2023 et à 1,2 million d’euros en 2024. J’estime donc qu’avec 1,6 million d’euros, les crédits nécessaires seront au rendez-vous.
Je demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-359 rectifié et II-509 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° II-361, présenté par MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Police nationale dont titre 2 |
1 000 000 |
|
1 000 000 |
|
Gendarmerie nationale dont titre 2 |
|
|
|
|
Sécurité et éducation routières |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
Sécurité civile dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement vise à doter l’Office mineurs de postes supplémentaires, et partant, à renforcer les moyens de celui-ci à hauteur de 1 million d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Favorable.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sécurités », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, il est minuit et cinq minutes. Afin de ne pas reporter la suite de l’examen de cette mission à samedi, je vous propose de poursuivre nos débats, sans toutefois dépasser excessivement le temps préalablement fixé par la conférence des présidents.
Nous allons procéder à l’examen des amendements portant sur les objectifs et indicateurs de performance de la mission « Sécurités », figurant à l’état G.
ÉTAT G
1415 |
Sécurités |
1416 |
(P176.1/P152.1) Évaluer objectivement la prévention de la délinquance |
1417 |
Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés |
1418 |
Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés |
1419 |
(P176.2/P152.2) Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance |
1420 |
Nombre d’heures de patrouille de voie publique rapporté à l’activité totale |
1421 |
Taux d’élucidation ciblés |
1422 |
(P176.4/P152.4) Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière |
1423 |
Nombre de tués |
1424 |
Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt (161) |
1425 |
Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux » (161) |
1426 |
Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels (161) |
1427 |
Taux de disponibilité de la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile (161) |
1428 |
152 - Gendarmerie nationale |
1429 |
Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels |
1430 |
Taux de disponibilité des flottes d’hélicoptères de la gendarmerie nationale |
1431 |
Évaluer la prévention et l’activité répressive des forces de sécurité |
1432 |
Évolution du nombre de crimes et délits commis à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique |
1433 |
Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés en zone gendarmerie |
1434 |
Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés en zone gendarmerie |
1435 |
Optimiser l’emploi des forces mobiles |
1436 |
Engagement des forces mobiles |
1437 |
Maintien en condition opérationnelle des escadrons de gendarmerie mobile |
1438 |
Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance |
1439 |
Délai moyen d’intervention |
1440 |
Effort de formation dans la lutte contre la délinquance |
1441 |
Généralisation de la police technique et scientifique |
1442 |
Lutte contre les filières, l’économie souterraine et les profits illicites |
1443 |
Recentrage des forces sur le cœur de métier |
1444 |
Réserve opérationnelle |
1445 |
Taux d’élucidation ciblés |
1446 |
Taux de présence de voie publique |
1447 |
Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière |
1448 |
Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’usage des stupéfiants |
1449 |
Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’alcoolémie |
1450 |
Renforcer la transparence du service public de sécurité intérieure |
1451 |
Efficacité de la compagnie numérique |
1452 |
Signalements par les usagers de comportements perçus comme non déontologiques |
1453 |
Taux de satisfaction des usagers |
1454 |
161 - Sécurité civile |
1455 |
Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt [Stratégique] |
1456 |
Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux » [Stratégique] |
1457 |
Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels [Stratégique] |
1458 |
Taux de disponibilité de la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile [Stratégique] |
1459 |
Taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile |
1460 |
Faire évoluer la cartographie des centres de déminage pour éliminer les munitions historiques et faire face à la menace terroriste |
1461 |
Interventions sur objets suspects dans les délais (Improvised Explosive Devices Disposal ou IEDD) |
1462 |
Taux d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes (Explosive Ordonnance Disposal ou EOD) |
1463 |
Harmoniser les moyens des services départementaux d’incendie et de secours |
1464 |
Taux de déploiement du système NEXSIS 18-112 au sein des SIS |
1465 |
176 - Police nationale |
1466 |
Évaluer la dépense fiscale |
1467 |
Nombre de bénéficiaires de l’indemnité journalière d’absence temporaire (IJAT) |
1468 |
Réserve opérationnelle |
1469 |
Évaluer la prévention et l’activité répressive des forces de sécurité |
1470 |
Évolution du nombre de crimes et délits commis à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique |
1471 |
Évolution du nombre de crimes et délits en matière d’atteintes aux biens (AAB) constatés en zone police |
1472 |
Évolution du nombre de crimes et délits et de victimes en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) constatés en zone police |
1473 |
Optimiser l’emploi des forces mobiles |
1474 |
Engagement des forces mobiles |
1475 |
Renforcer l’activité des services pour mieux combattre la délinquance |
1476 |
Délai moyen d’intervention |
1477 |
Effort de formation dans la lutte contre la délinquance |
1478 |
Généralisation de la police technique et scientifique |
1479 |
Lutte contre les filières, l’économie souterraine et les profits illicites |
1480 |
Nombre d’heures de patrouille de voie publique effectuées par la police nationale |
1481 |
Recentrage des forces sur leur cœur de métier |
1482 |
Taux d’élucidation ciblés |
1483 |
Renforcer l’efficacité dans la lutte contre l’insécurité routière |
1484 |
Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’alcoolémie |
1485 |
Accidentologie, infractions et dépistages liés à l’usage de stupéfiants |
1486 |
Renforcer la transparence du service public de sécurité intérieure |
1487 |
Délai de prise en charge de l’usager après l’arrivée au commissariat |
1488 |
Nombre de signalements externes reçus par l’IGPN via la plateforme dédiée |
1489 |
Taux d’obtention d’un rendez-vous dans les 10 jours après une pré-plainte en ligne |
1490 |
207 - Sécurité et éducation routières |
1491 |
Améliorer le service du permis de conduire dans le cadre du développement de l’éducation routière tout au long de la vie |
1492 |
Délai d’attente médian aux examens et coût unitaire d’obtention du permis de conduire |
1493 |
Mobiliser l’ensemble de la société sur la sécurité routière pour réduire le nombre d’accidents et de tués sur les routes |
1494 |
Nombre annuel des tués (France métropolitaine et départements d’outre-mer) |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-362 rectifié, présenté par M. Durain, Mme Narassiguin, MM. Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, MM. Roiron et Jacquin, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1421
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
(P176.2/P152.1) Évaluer la mise en œuvre des contrôles d’identité par les forces de sécurité
Nombre de personnes contrôlées et récurrence des contrôles via le contrôle du nombre de passages au fichier des personnes recherchées
Nombre de palpations et de fouilles
Faits constatés
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Par cet amendement, nous appelons le Gouvernement à prendre à bras-le-corps le sujet des contrôles d’identité.
Si ces contrôles, réalisés chaque jour par milliers, sont sans aucun doute l’acte de police administrative le plus souvent mis en œuvre par les forces de l’ordre, il n’existe aucune donnée statistique fiable et exhaustive les concernant, à l’exception de l’évaluation de la Cour des comptes, qui dans un rapport intitulé Les contrôles d’identité : une pratique généralisée aux finalités à préciser, estime que 47 millions de contrôles ont été réalisés en 2021.
Le Conseil d’État, dans une décision du 11 octobre 2023, estime par ailleurs, comme du reste de nombreuses études et la Cour de cassation, que ces contrôles sont très souvent discriminatoires, quand il ne s’agit pas de contrôles au faciès.
Dans le même temps, une étude du Défenseur des droits intitulée Déontologie et relations police-population : les attitudes des gendarmes et policiers, révèle que deux policiers et gendarmes sur cinq estiment que les contrôles d’identité sont peu, voire pas efficaces.
Afin d’assurer une meilleure connaissance de la pratique des contrôles d’identité, et partant, de rétablir le lien de confiance entre la population et les forces de l’ordre, qui participe du sens de la mission de ces derniers, nous proposons la création d’un nouvel indicateur budgétaire qui permettrait de comptabiliser le nombre de personnes contrôlées et la récurrence des contrôles via le contrôle du nombre de passages au fichier des personnes recherchées (FPR), ainsi que le nombre de palpations et de fouilles effectuées et le nombre de faits constatés ayant donné lieu à des suites judiciaires.
M. le président. L’amendement n° II-514, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1488
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Nombre des contrôles d’identité
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Dès 2017, le Défenseur des droits a alerté sur l’ampleur des contrôles au faciès. Le Conseil d’État ayant été saisi, il a confirmé que ces discriminations n’étaient pas des cas isolés. Il a toutefois estimé qu’il revenait, non pas à la justice, mais à une politique publique de mettre fin aux contrôles discriminatoires. Tel est donc l’objet du présent amendement.
Or, comme ma collègue Narassiguin l’a indiqué, nous ne disposons pas de données relatives au nombre de contrôles d’identité, qui ne donnent lieu à aucune trace écrite. Je propose donc l’instauration d’un indicateur budgétaire mesurant le nombre des contrôles d’identité réalisés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je demande le retrait de ces amendements, car j’estime que trop d’indicateurs tuent les indicateurs. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. L’indicateur visé reposerait soit sur une base déclarative, soit sur le nombre de consultations du fichier des personnes recherchées. Dans un cas comme dans l’autre, il ne serait pas assez fiable.
J’estime pour ma part que la solution réside dans le déploiement des caméras-piétons.
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. J’appelle en discussion l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 64, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Sécurités ».
Sécurités
Après l’article 64
L’amendement n° II-596 rectifié, présenté par MM. Jacquin, P. Joly, Durain, Chaillou et Bourgi, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron, Mme Monier, MM. Ros, Uzenat, Jeansannetas, Temal et M. Vallet, Mme Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mmes Carlotti et G. Jourda, M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 64
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Trois mois après la promulgation de la présente loi, le gouvernement remet au parlement un rapport sur les modalités de révision des décrets n° 93-130 du 28 janvier 1993 relatif aux modalités d’attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie et n° 2016-1884 du 26 décembre 2016, relatif aux conditions de réalisation et de financement d’opérations immobilières par les offices publics de l’habitat et les sociétés d’habitation à loyer modéré financées par des prêts garantis par les collectivités territoriales et leurs groupements, destinées aux unités de gendarmerie nationale, aux forces de police nationale, aux services départementaux d’incendie et de secours et aux services pénitentiaires afin de modifier les règles de calcul des subventions accordées aux collectivités pour la construction de gendarmeries et d’ajuster la durée des baux des logements aux remboursements des prêts contractés par les collectivités à cet effet.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. L’état de vétusté de nombreuses casernes de gendarmerie rend nécessaire leur rénovation. Or, aujourd’hui, les communes, en particulier rurales, qui assurent directement ou indirectement le portage financier de telles opérations, peinent à équilibrer financièrement ces dernières et à supporter une partie des charges qu’elles emportent.
Le présent amendement vise donc à demander au Gouvernement de remettre au Parlement, dans les trois mois suivant la promulgation de la loi à laquelle le présent texte donnera lieu, un rapport relatif aux modalités de révision des décrets du 28 janvier 1993 relatif aux modalités d’attribution de subventions aux collectivités territoriales pour la construction de casernements de gendarmerie et du 26 décembre 2016 relatif aux conditions de réalisation et de financement d’opérations immobilières par les offices publics de l’habitat et les sociétés d’habitation à loyer modéré.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Comme vous le savez, mon cher collègue, en juillet 2024, j’ai publié un rapport d’information sur l’immobilier de la gendarmerie nationale. Nous lui donnerons une suite, car nous sommes aussi têtus que tenaces.
Pour l’heure, je demande toutefois le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. En sus des travaux susvisés de Bruno Belin, j’ai demandé un autre rapport au nouveau directeur général de la gendarmerie nationale.
Sachez toutefois, monsieur le sénateur, que dans cette attente, j’ai pris la décision de relever de 10 % les coûts plafond, qui contraignent grandement les bailleurs sociaux et les collectivités locales, ce qui permettra de leur donner un peu d’air.
Je demande également le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Il conviendra aussi de se pencher sur les difficultés relatives à la fiscalité et à la récupération de la TVA, qui ne sont pas tout à fait réglées.
En tout état de cause, je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-596 rectifié est retiré.
compte d’affectation spéciale : contrôle de la circulation et du stationnement routiers
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers |
1 864 195 831 |
1 864 195 831 |
Structures et dispositifs de sécurité routière |
336 340 107 |
336 340 107 |
Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers |
26 200 000 |
26 200 000 |
Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières |
776 777 533 |
776 777 533 |
Désendettement de l’État |
724 878 191 |
724 878 191 |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-473 rectifié est présenté par MM. Canévet et Cambier, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Delahaye, Mme N. Goulet et M. Maurey.
L’amendement n° II-548 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Structures et dispositifs de sécurité routière |
|
|
|
|
Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers |
|
19 335 |
|
19 335 |
Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières |
|
|
|
|
Désendettement de l’État |
|
|
|
|
TOTAL |
19 335 |
19 335 |
||
SOLDE |
- 19 335 |
- 19 335 |
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° II-473 rectifié.
M. Michel Canévet. Il convient que le présent compte d’affectation spéciale contribue, comme les autres comptes d’affectation spéciale, à l’effort de réduction des dépenses publiques.
Par cet amendement, je propose donc d’introduire des économies de fonctionnement, qui, bien que d’un montant très modeste, participeront à l’effort demandé.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-548.
M. Bruno Retailleau, ministre. L’amendement ayant été excellemment défendu par le sénateur Canévet, je n’ai rien à ajouter, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-473 rectifié et II-548.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° II-364 rectifié bis, présenté par M. Bazin, Mme Eustache-Brinio, MM. Somon et Sol, Mme Lassarade, MM. Pellevat et Brisson, Mmes Muller-Bronn, Micouleau et Aeschlimann, M. E. Blanc, Mme Richer, M. Khalifé, Mme Ventalon, MM. J.B. Blanc, Pernot, Bruyen, Bouchet, Milon et Reynaud, Mmes Imbert, Belrhiti et Dumont, M. D. Laurent, Mmes P. Martin, Bellurot et Borchio Fontimp et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Structures et dispositifs de sécurité routière |
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36 000 000 |
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36 000 000 |
Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers |
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Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières |
36 000 000 |
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36 000 000 |
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Désendettement de l’État |
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TOTAL |
36 000 000 |
36 000 000 |
36 000 000 |
36 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Le présent amendement vise à augmenter les crédits du compte d’affectation spéciale alloués aux collectivités territoriales, en particulier aux départements, en affectant 36 millions d’euros supplémentaires à l’amélioration des infrastructures routières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bruno Belin, rapporteur spécial. Je comprends naturellement votre proposition, mon cher collègue. Ayant en effet le point commun d’avoir été tous deux président d’un conseil départemental, nous savons qu’il est essentiel de répondre aux besoins de financement des collectivités locales.
C’est donc avec regret que je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Retailleau, ministre. J’ai pour ma part plusieurs points communs avec le sénateur Laurent Somon, notamment, mais pas seulement, d’avoir été président d’un conseil départemental. (Sourires.)
La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS, prévoit que les collectivités locales peuvent financer et déployer des radars. Il nous faudra donc mener une réflexion pour déterminer les parts des recettes revenant respectivement à l’État et aux collectivités. Nous pourrons alors rediscuter de votre proposition, monsieur le sénateur Somon. (Sourires.)
Pour l’heure, l’avis est défavorable.
M. Laurent Somon. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° II-364 rectifié bis est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », figurant à l’état D, modifiés.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sécurités » et du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».
10
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 3 décembre 2024 :
À neuf heures trente :
Questions orales.
À quatorze heures et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2025, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (texte n° 143, 2024-2025) :
Mission « Économie » ;
Compte spécial « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » ;
Mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux » ;
Mission « Justice ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 3 décembre 2024, à zéro heure quinze.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER