M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi d’affirmer d’emblée, sans craindre de vous surprendre, que nous n’aurions de toute façon pas voté ce budget tel qu’il nous est présenté. Mais nous n’aurons probablement pas à le voter, car nous n’aurons sans doute pas terminé son examen au moment du vote de la motion de censure à l’Assemblée nationale.

Qu’il me soit permis de le dire, si cette motion de censure risque d’être votée, si nous nous trouvons aujourd’hui dans une telle situation, la responsabilité n’en incombe pas à ceux qui ont déposé cette motion : elle relève directement, avant tout, du Président de la République. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous le savez très bien, mes chers collègues ! Vous étiez les premiers à vous opposer à de nombreuses mesures prises par les précédents gouvernements, pendant des mois et des mois. Et vous vous y opposeriez aussi aujourd’hui si le Gouvernement ne comportait pas tant de membres de votre majorité.

Vous êtes les premiers à savoir que ce gouvernement n’a pas cherché de compromis et n’a exploré les possibilités de consensus qu’avec l’extrême droite et le Rassemblement national. (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. C’est faux, et ce n’est pas digne !

M. Daniel Fargeot. Qui s’associe à l’extrême droite pour voter la censure ?

Mme Catherine Di Folco. Assumez donc vos choix !

M. Daniel Salmon. Je vous renvoie le compliment, chère collègue : assumez les vôtres !

M. Guy Benarroche. Je n’ai aucun doute à ce sujet. Et vous non plus, d’ailleurs ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

M. Laurent Burgoa. Parlez-en à M. Mélenchon !

M. le président. Poursuivez, monsieur Benarroche.

M. Guy Benarroche. Il nous semble très difficile, et je sais combien c’est aussi le cas pour vous, d’accompagner la volonté de ce gouvernement, comme de ses prédécesseurs, de faire peser sur les collectivités la responsabilité d’une dette qui ne peut leur être imputée. On ne saurait leur demander d’absorber le déficit actuel !

Nous aurons l’occasion d’en discuter, puisque ce sujet a été appelé en priorité, avec la proposition de suppression de l’article 64 et l’examen du nouveau dispositif proposé par la commission des finances, lequel ne nous satisfait pas.

L’assèchement des financements de nos territoires est démesuré. Il n’est pas de 5 milliards d’euros, vous le savez bien : si l’on considère l’ensemble des mesures qui touchent nos collectivités, la saignée est supérieure à 10 milliards d’euros, selon l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) elle-même, pour peu que l’on y ajoute le désengagement de l’État des programmes destinés aux territoires, comme le fonds vert.

Les différentes annonces du Gouvernement, comme les reculs présentés comme autant de victoires par la majorité de cet hémicycle, n’y changeront rien. Vous le savez très bien, les collectivités le savent et tous vos élus vous le disent : le compte n’y est pas, loin de là, et le Gouvernement y a contribué avec l’aide du parti Les Républicains, avec l’aide de votre majorité et, bien entendu, en cherchant à faire des concessions au Rassemblement national.

Certes, les départements ont été un peu entendus, mais qu’en est-il des autres collectivités, petites ou grandes, rurales ou non ? Rien, absolument rien, n’est prévu pour ces acteurs du quotidien, rien pour nos maires qui, l’automne venu, se trouvent fort dépourvus pour bâtir leur budget !

J’ai souvent rappelé, au nom du groupe écologiste, l’autre écueil de cette mission budgétaire : le soutien de l’État aux collectivités ne s’y limite pas ; il passe par d’autres dispositions du projet de loi de finances, dans lesquelles il a également fait défaut cette année.

Les crédits de cette mission ne représentent que 8 % des concours financiers de l’État aux collectivités, 4 % du total des transferts financiers. Un budget global dédié aux collectivités territoriales devrait être élaboré – sa création aurait déjà dû être inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée. Nous l’avons réclamé à maintes reprises. Pour la clarté, la sincérité et la lisibilité dues aux élus que nous soutenons tous, il est temps de passer aux actes.

Notre candidat à la dernière élection présidentielle défendait déjà la création d’une loi de financement des collectivités territoriales, afin d’engager un véritable approfondissement de la décentralisation, dans une triple direction : plus de démocratie, plus de justice territoriale et plus d’écologie. C’est précisément tout ce que ce gouvernement a abandonné !

Depuis plusieurs années, nous dressons également le constat d’une raréfaction et d’une complexification des ressources fiscales et financières, faisant des finances locales un système imprévisible, illisible et inaccessible pour les élus des plus petites collectivités, d’autant que ces derniers n’ont aucune vision prospective à moyen terme des sommes qui leur seront allouées.

Au total, depuis 2012, l’État a diminué de 250 milliards d’euros les ressources des collectivités locales, dont la libre administration n’est plus qu’un mot. Celle-ci est en effet mise à mal par la perte d’économie fiscale résultant de la disparition de trois impôts locaux : la taxe professionnelle, la taxe d’habitation et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

La réduction des moyens des collectivités locales, l’amenuisement de leur autonomie fiscale, l’amoindrissement de leur libre administration et des compensations qu’elles seraient en droit d’espérer sont d’ailleurs le seul point commun des projets de loi de finances des derniers gouvernements Macron.

Faute de temps, je ne reviendrai en détail ni sur la DGF, ni sur le fonds vert ni sur le fonds de soutien au développement des activités périscolaires ni sur le rabotage de la DSIL, ni sur l’extinction, dans le présent projet de loi, du plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus, dont le coût – 5 millions d’euros – n’est pourtant qu’une goutte d’eau au sein de ce budget.

Alors que le Sénat, en particulier le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, qui s’est toujours battu pour conforter les élus, avait voté ce plan, le Gouvernement a décidé de le supprimer !

Mes chers collègues, j’aimerais pouvoir vous dire que nous resterons attentifs aux évolutions et aux améliorations que notre hémicycle apportera aux crédits de la présente mission.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

Mme Frédérique Puissat. Votre temps de parole est écoulé !

M. Guy Benarroche. Néanmoins, les membres de mon groupe ne se font plus d’illusion.

Nous voterons contre ces crédits, si le temps nous en est laissé. À défaut, ils ne seront pas adoptés, et nous en serons heureux ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE-K.)

M. le président. J’ai laissé un peu plus de temps à M. Benarroche, car vous l’avez interrompu pendant quelques secondes, mes chers collègues. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Pierre-Alain Roiron. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au moment où je vous parle, et peut-être pour quelques heures encore, nous avons un gouvernement, et celui-ci porte un budget jugé injuste par les Françaises et Français. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre-Alain Roiron. Ce gouvernement n’a pas su écouter nos propositions responsables, parmi lesquelles la suppression du fonds de réserve prévu à l’article 64 du présent texte, le renforcement de l’autonomie des collectivités ou encore le maintien des moyens qui leur sont alloués. Ces propositions sont portées depuis bien longtemps par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Jérôme Durain. Très bien !

M. Pierre-Alain Roiron. Permettez-moi d’exprimer une certaine perplexité face aux crédits alloués aux collectivités territoriales.

On aurait pu penser que, en ces temps d’incertitude économique, sociale et aujourd’hui politique, ce projet de loi de finances prendrait la mesure de l’urgence de la responsabilité qui incombe à l’État. Ce n’est, hélas ! nullement le cas.

Cette mission budgétaire s’inscrit dans une autre logique, celle d’un affaiblissement continu de l’autonomie et des moyens des collectivités, qui sont pourtant les premiers amortisseurs sociaux. C’est une logique centralisatrice, par laquelle l’intelligence locale est souvent sacrifiée.

Bien que certains membres du Gouvernement, dont vous-même, madame la ministre, aient manifesté leur désaccord avec les propos de M. Le Maire, force est de constater que ce texte témoigne, hélas ! d’un accord sur le fond. Cette année encore, il est demandé aux collectivités de faire toujours plus avec toujours moins.

Nous ne pouvons que regretter cette contradiction flagrante entre les discours décentralisateurs et les actes centralisateurs de l’exécutif.

Pour rappel, les crédits de cette mission représentent seulement 8 % des concours financiers de l’État aux collectivités et 4 % du total des transferts financiers. Ils ne recouvrent donc qu’une faible partie des crédits alloués aux collectivités locales.

Nous pourrions nous réjouir de quelques-unes des mesures qui ont présidé à l’élaboration du programme 119, « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » : le maintien des dotations de soutien à l’investissement local, qu’il s’agisse de la DSIL, de la DETR ou de la dotation politique de la ville (DPV), que nous estimons plus que juste au regard du niveau de mise à contribution des collectivités dans le reste de ce PLF ; ou encore le maintien de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales, dont le montant, qui a été porté de 41,6 millions d’euros à 100 millions d’euros en 2024, reste inchangé pour 2025.

À y regarder de plus près, cette stabilité est toutefois conditionnée à un verdissement croissant des dotations que nul ici ne conteste et que mon groupe soutient.

Le Gouvernement a décidé d’attribuer jusqu’à 35 % de certains crédits à des projets liés à la transition environnementale. Si cette démarche est plus que louable, elle n’en demeure pas moins unilatérale. Dans un contexte où chaque euro compte, d’autres projets tout aussi importants pourraient être évincés.

De grâce, faisons confiance à nos élus locaux, qui sont pragmatiques et responsables, pour définir leurs priorités. Leur imposer ce cadre rigide, c’est méconnaître leur capacité d’initiative et de discernement. Il nous eût semblé plus pertinent de s’abstenir de réduire de 60 % les crédits du fonds vert.

L’évolution du programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », dont les crédits en autorisations d’engagement baissent de 29 % et augmentent de 29 % en crédits de paiement, paraît plus contrastée. Des crédits aussi éloignés des besoins structurels de nos territoires illustrent une incapacité à anticiper.

Alors que les catastrophes climatiques sont, hélas ! de plus en plus fréquentes, la dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques est figée. En Ardèche ou dans la Loire, les collectivités locales concernées doivent supporter des restes à charge insoutenables pour réparer des infrastructures essentielles.

En tant qu’élu régional, je ne puis qu’attester le rôle primordial que jouent les régions dans l’aménagement du territoire, la formation professionnelle, le développement économique, alors que leur budget est continuellement pressurisé.

Depuis la loi du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, les dotations des régions ont diminué de 467 millions d’euros, soit près d’un tiers de leur montant. Comment continuer à parler de décentration lorsque les régions ne peuvent plus remplir leurs missions ?

Quant aux départements, ils subissent aujourd’hui un effet ciseaux préoccupant. Leurs recettes stagnent, voire régressent, tandis que leurs dépenses sociales explosent. En 2023, plus d’un tiers d’entre eux ont vu leur épargne brute chuter fortement, réduisant d’autant leurs capacités d’investissement. Nous ne pouvons pas ignorer cette réalité financière, mes chers collègues. Les départements ne doivent pas être considérés comme des puits sans fond.

J’en viens aux articles rattachés.

L’article 64 portant création du fameux fonds de réserve illustre parfaitement les écueils de cette mission. Ce mécanisme, qui prévoit de prélever jusqu’à 3 milliards d’euros sur les recettes fiscales des grandes collectivités, repose sur des bases arbitraires et injustes. Non seulement il ne tient pas compte des situations financières spécifiques, mais il s’appuie sur des données passées, alors que les budgets ont été votés sans anticiper ce prélèvement.

Le caractère temporaire de ce fonds n’est par ailleurs pas garanti. Une telle opacité alimente l’inquiétude légitime des élus locaux, qui, en dépit de ce que nous a affirmé Mme la ministre, craignent un prélèvement reconduit chaque année. Quoi qu’il en soit des négociations sur ce dispositif, nous ne pouvons pas souscrire à ce rabais qui concourt à l’asphyxie des collectivités territoriales.

Que dire en outre du gel des fractions de TVA ? L’activation de ce levier, qui prive les collectivités de leur principale recette, accentue leur dépendance à des dotations étatiques. On évoque un effort « partagé », mais où est l’équité quand les collectivités, qui ne représentent que 8 % de l’endettement public, supportent 14 % des économies ?

Mon groupe se réjouit naturellement de l’adoption, en première partie du PLF, de l’amendement n° I-9 du rapporteur général de la commission des finances visant à supprimer la baisse du FCTVA injustement décidée par le Gouvernement.

Enfin, le gel de la dotation générale de fonctionnement à son niveau antérieur masque la détérioration de celle-ci. Chaque année, l’augmentation des charges grignote cette enveloppe allouée aux collectivités locales, amputant les services publics ou emportant des augmentations de la pression fiscale.

Mes chers camarades (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K. – Rires et applaudissements ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.), je veux dire mes chers collègues, à l’heure où l’État demande aux collectivités de contribuer à hauteur de plus de 8 milliards d’euros au redressement des comptes publics, permettez-moi de rappeler une évidence : les collectivités locales ne peuvent pas être la variable d’ajustement des budgets de l’État.

Portant plus de la moitié de l’investissement public dans tous les territoires, elles constituent un monteur indispensable pour nos entreprises.

Les collectivités locales ne sont pas responsables de la dette publique. Elles ne refusent pas de participer à l’effort national, mais elles demandent une répartition équitable de celui-ci et des outils respectueux de leur réalité.

Le groupe socialiste ne pouvant souscrire à une telle approche, il ne votera pas ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Michel Savin. Merci, camarade ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’étude de ce budget a une saveur particulière, nous le mesurons tous, non seulement parce que la situation politique actuelle pèse sur nos débats, mais surtout parce que nous avons la sensation d’assister au crépuscule d’un système.

Les manquements des gouvernements précédents au regard des collectivités territoriales sont systématiquement pointés, présentant celles-ci comme les grandes abandonnées ou, pis, l’exutoire des exécutifs passés.

Depuis les réformes du quinquennat Hollande et la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, la décentralisation est un bateau sans boussole.

Les grandes régions n’ont pas apporté les économies attendues, et encore moins la proximité et l’efficacité de l’action publique locale ; les départements, dont d’aucuns projetaient la suppression, sont aujourd’hui pris à la gorge par des actions sociales obligatoires au périmètre élargi, avec des ressources sans cesse plus réduites ; les communes, enfin, sont intégrées de force dans des intercommunalités technocratiques, dépossédant les maires de leur pouvoir réel et abandonnant les citoyens dans des schémas et des actions incompréhensibles.

Par ailleurs, le système de financement des collectivités a été désintégré. La suppression de la taxe d’habitation, mesure électoraliste présentée de manière illusoire comme un geste social fort, a distendu le lien entre le contribuable local et ses élus. Le transfert d’une part sans cesse croissante de la TVA aux régions et aux départements place ces collectivités sous le joug de l’État, les faisant passer d’un état d’autonomie pourtant reconnu constitutionnellement à un état de dépendance dans les faits.

Chacun attend les futures élections municipales avec inquiétude. Combien de maires ne souhaiteront pas se représenter ? Comment les quelques citoyens dévoués parviendront-ils à compléter les listes ? Et comment les futurs édiles, reconduits ou nouveaux, pourront-ils porter un réel projet, alors qu’ils sont pris dans les serres d’une législation tatillonne et d’établissements publics aux compétences sans cesse plus grandes, mais à la responsabilité sans cesse plus floue ?

En sept ans, rien n’a été fait pour remédier à cette situation. Si tout le monde s’accorde sur le constat, bien peu nombreux sont ceux qui proposent de réelles réformes. Comme souvent, le conformisme et le confort des positions acquises nuisent à nos élus locaux et créent un fossé sans cesse plus grand entre les citoyens et les collectivités locales, qui constituent pourtant la première ligne de notre démocratie.

La proposition par laquelle Gouvernement entend mettre à contribution les collectivités locales dans le cadre de l’effort de redressement des comptes publics n’est pas acceptable en l’état.

Quels efforts les départements pourraient-ils consentir, alors qu’ils sont pris en étau entre des dépenses sociales qui augmenteront du fait de la récession et de maigres ressources que le retournement de conjoncture amoindrira encore ? Si le temps ne me manquait pas, je pourrais continuer de dresser la désastreuse liste des collectivités concernées.

Le Sénat, chambre des territoires et représentant des collectivités, devra donc se lever pour assurer des ressources pérennes aux collectivités locales, qui sont à la fois les garantes des services publics locaux et les premiers investisseurs publics.

Dans la même veine que la bienvenue proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local, il nous faut prendre nos responsabilités et donner, enfin, un cadre clair et un financement réellement local aux collectivités. Or une fois de plus, ce budget ne nous le permettra pas.

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Jean-François Husson applaudit également.)

M. Cédric Chevalier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si nous vivons une situation politique particulière, il convient de poursuivre nos travaux avec le sérieux, la responsabilité et la sérénité qui sont la véritable marque de fabrique du Sénat.

L’examen de la présente mission nous conduit à nous pencher sur les financements accordés par l’État aux collectivités locales.

Les différents crédits de cette mission visent à soutenir l’investissement local et à permettre aux collectivités d’assurer les nouvelles compétences transmises dans le cadre de la politique de décentralisation. Ils regroupent également les subventions destinées à soutenir ponctuellement les collectivités confrontées à des circonstances exceptionnelles.

La stabilité des crédits de cette mission et, partant, du soutien à l’investissement des collectivités, grandement souhaitables, garantissent la continuité de l’action locale et la qualité des services publics de proximité, qui sont le socle du lien entre l’État et les citoyens. Les communes, qui réalisent 70 % des investissements publics de notre pays, sont le moteur de cette dynamique.

Ces investissements concernent tous les domaines : écoles, équipements sportifs, infrastructures de transport, projets culturels ou encore actions environnementales. Ils participent directement du dynamisme économique local, en mobilisant les entreprises, en créant des emplois et en stimulant l’innovation.

La dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales voit ses crédits pour 2025 maintenus au même niveau qu’en 2024, ce qui est une bonne chose.

Ces crédits, destinés aux communes rurales dont une grande partie du territoire est composé ou situé à proximité directe d’une aire marine protégée et qui supportent ces charges de ruralité, leur permettent de jouer un rôle essentiel dans la protection de l’environnement et le développement durable de leur territoire.

La hausse des crédits de paiement du programme 122 permettra de couvrir les restes à payer des collectivités touchées par la tempête Ciaran et à alimenter le fonds pour la reconstruction créé en réponse aux violences urbaines de juin 2023. Ces événements tragiques pour les territoires concernés montrent l’importance d’un accompagnement rapide et adapté.

Je salue le courage et la résilience des élus locaux, en particulier des maires, qui se trouvent en première ligne face à ces crises et qui méritent notre reconnaissance et notre soutien inconditionnel. Je les remercie de leur engagement pour faire vivre la République au quotidien, au cœur de nos territoires. Il nous incombe en retour de les protéger et de leur donner les moyens d’agir, mes chers collègues.

Compte tenu des très fortes contraintes budgétaires qui pèsent sur notre pays, le groupe Les Indépendants – République et Territoires estime toutefois urgent de réduire les dépenses de l’État.

S’il ne faut pas priver les collectivités de leurs capacités d’investissement, elles doivent contribuer à l’effort commun, au même titre que l’État et l’ensemble de ses organismes, en modérant leurs dépenses et en mettant en place des mécanismes permettant de faire face aux difficultés prochaines.

L’article 64 du PLF prévoit ainsi la création d’un fonds de réserve au profit des collectivités territoriales. Celui-ci sera alimenté par des prélèvements effectués auprès des collectivités et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont les dépenses réelles de fonctionnement du budget principal excèdent 40 millions d’euros. Ces collectivités contribueraient à hauteur de 2 % de leurs recettes réelles de fonctionnement, indépendamment de leurs capacités contributives.

Ce fonds permettra d’abonder, pendant les trois années suivantes, trois fonds de péréquation.

Si nous soutenons un effort partagé et indispensable, ce mécanisme doit être soutenable et l’effort commun, équitablement réparti. En aucun cas cet effort ne doit pénaliser les communes vertueuses.

Telle est la raison pour laquelle, à un tel mécanisme, nous préférons le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités, tel qu’il est proposé par les rapporteurs, et dont les sommes ainsi mises en réserve seraient reversées aux collectivités contributrices. Par ailleurs, notre groupe ne souhaite pas qu’une part de péréquation soit conservée.

N’oublions pas que les collectives territoriales sont des investisseurs publics incontournables, mes chers collègues. S’il est nécessaire que chacun participe à l’effort collectif, il importe de ne pas amputer leurs capacités à investir.

Enfin, nous accueillons positivement les évolutions apportées aux modalités de répartition de la dotation globale de fonctionnement, tout en estimant qu’une réforme globale reste nécessaire.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que s’est-il donc passé depuis sept ans dans notre pays entre l’État et les collectivités territoriales ? Pourquoi tant de tensions inutiles ?

Plus généralement, pourquoi, dans notre pays, est-il aussi difficile d’avancer et de construire ensemble, alors que les grands défis auxquels l’État et les collectivités territoriales font face sont les mêmes ? Transition écologique, avenir de l’école, cohésion nationale, redressement des comptes publics, les sujets ne manquent pourtant pas.

Les ministres des finances et du budget du précédent gouvernement n’ont eu de cesse de pointer du doigt la prétendue responsabilité des collectivités locales dans la dégradation des comptes publics.

Tout le monde sait que c’était faux. Était-ce pour détourner les regards de la mauvaise gestion budgétaire de l’État lui-même, dont les déficits ont littéralement explosé depuis 2017 ? Probablement.

M. Michel Savin. Très juste !

M. Jean-François Husson. Quoi qu’il en soit, il n’y avait rien de tel pour braquer les élus locaux et rendre très difficile, voire impossible, tout partenariat avec l’État.

En septembre dernier, une délégation de notre commission des finances s’est rendue au Japon. Quelle différence ! Et quelle surprise de constater que les relations financières entre l’État central et les collectivités locales n’y font l’objet d’aucune difficulté et sont régulièrement négociées dans des conditions à la fois sereines et constructives !

Je vous remercie donc, madame la ministre, comme j’ai déjà remercié votre collègue chargé du budget, du caractère constructif que, en si peu de temps, vous avez enfin su donner aux relations entre l’État et les collectivités.

Il nous faut en effet apprendre à travailler différemment, en associant les collectivités aux stratégies et aux projets aussi bien qu’aux efforts à consentir. Il s’agit, à mes yeux, d’un point de passage obligé, qui participe pleinement de la cohésion nationale et territoriale. Sachons donc faire France ensemble !

Telle est la raison pour laquelle j’ai toujours dit que les collectivités locales devaient prendre une part à l’effort de redressement de nos comptes publics. Il ne serait du reste ni raisonnable ni responsable que seuls l’État et la sécurité sociale endossent les efforts nécessaires.

Je salue le travail partenarial mené par notre commission des finances et le Gouvernement dans le cadre de ce budget. C’est exactement ce qu’il nous faut ! Un tel travail montre qu’un dialogue constructif entre l’exécutif et les pouvoirs locaux est possible, et qu’il peut améliorer les choses.

Oui à l’effort des collectivités, sous réserve que le montant et les modalités soient pertinents. Telle est la raison pour laquelle le Sénat, sur l’initiative de notre commission des finances, a supprimé la disposition du PLF pour 2025 qui visait à réduire à la fois l’assiette et le taux du fonds de compensation pour la TVA.

Telle est également la raison pour laquelle notre commission des finances a proposé un dispositif de lissage conjoncturel des ressources des collectivités, désormais baptisé Dilico, qui nous semble plus pertinent, plus équilibré et qui sera certainement mieux accepté que le fonds de réserve proposé à l’article 64.

Avant de conclure, permettez-moi, mes chers collègues, de saluer le travail de notre rapporteur spécial, Stéphane Sautarel, qui, avec nos équipes et votre cabinet, madame la ministre, n’a pas ménagé sa peine. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)