M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dix ans après les terribles attentats de Charlie Hebdo, que reste-t-il du droit à la liberté d’expression ? Les moyens pour la préservation du pluralisme et de l’indépendance dans les médias sont-ils à la hauteur des menaces actuelles que certains font planer sur nos démocraties ?
Ces dernières semaines, Elon Musk a utilisé l’algorithme et les fonctionnalités de sa plateforme, X, pour tenter de déstabiliser les démocraties européennes : Royaume-Uni, Allemagne, Espagne. Ces ingérences sont insoutenables pour notre vie publique. Le Parlement français doit parler d’une voix unanime contre ces attaques.
Aussi, nous serons particulièrement vigilants quant à l’évolution des crédits de cette mission. Il nous appartient de déterminer l’ampleur des moyens à déployer pour prévenir les dérives, pour réguler et pour sanctionner ceux qui se permettent de s’affranchir de certaines règles pourtant essentielles au bon fonctionnement de notre démocratie.
Dans ce contexte, il nous semble nécessaire de renforcer les crédits consacrés à l’audiovisuel public, de préserver son modèle de financement et d’éviter à tout prix la budgétisation, qui serait désastreuse pour l’indépendance des lignes éditoriales. Ces crédits diminuent pourtant, ce qui nous inquiète.
Tout a commencé le 21 février dernier, avec l’annulation par décret de 20 millions d’euros de crédits, dans le cadre des efforts budgétaires généralisés auxquels le secteur a contribué de manière significative.
Cette réduction s’est poursuivie avec le report d’un versement de 30 millions d’euros, étendant ainsi le calendrier initial du programme de transformation de trois à quatre ans. Ce décalage a aggravé les tensions financières des acteurs de l’audiovisuel public : pour 2024, les crédits réellement versés pour ce programme représentent moins du tiers de ceux qui ont été votés dans la loi de finances initiale.
Cette tendance se prolonge au sein de ce budget, dans lequel les crédits du programme sont limités à 30 millions d’euros, au lieu des 74 millions d’euros initialement prévus. Pis encore, la trajectoire financière des COM n’est plus respectée. La dotation totale plafonne à 3,98 milliards d’euros, au lieu des 4,12 milliards d’euros attendus.
Concernant les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », la réduction des moyens pour 2025 pénalise principalement les radios associatives, qui supportent 84 % de l’effort budgétaire, soit 10,3 millions d’euros sur les 12,3 millions d’euros de baisse de crédits. Cette baisse frappe durement le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale.
Or ces structures jouent un rôle essentiel, madame la ministre, dans la vitalité du débat public local et participent à la cohésion des territoires. Leur fragilisation financière pourrait entraîner la disparition de nombreuses antennes locales et réduire drastiquement la pluralité des voix sur nos territoires, où si peu de radios nationales émettent suffisamment.
À cette occasion, le groupe du RDSE s’associe aux efforts du rapporteur pour ramener les crédits sur une trajectoire décente. Votre amendement, madame la ministre, a pour objet de rétablir la situation.
Les crédits de la mission sont aussi marqués par l’incertitude autour du rendement de la taxe dite streaming, qui connaît un décalage budgétaire de 2 millions d’euros. Aussi, nous considérons que les mécanismes de financement de la création musicale méritent une attention renforcée, pour éviter tout effet d’assèchement.
Plusieurs acteurs de la filière musicale ont avancé l’idée de relever le plafond de la taxe sur les spectacles de variétés, actuellement fixé à 50 millions d’euros. Cette proposition mérite d’être étudiée avec sérieux, car elle permettrait de soutenir davantage l’ensemble du secteur.
Mes chers collègues, face à ces constats, il nous appartient de défendre un budget qui garantisse la diversité culturelle et le pluralisme médiatique. L’audiovisuel public et les médias de proximité ne doivent pas être perçus comme de simples variables d’ajustement budgétaire. Ils sont des biens communs, des outils démocratiques essentiels, qui méritent un financement stable et ambitieux.
Le RDSE salue les efforts de maîtrise budgétaire, mais appelle à un rééquilibrage plus juste et plus respectueux des engagements pris. En ce sens, nos voix seront partagées. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à nous prononcer aujourd’hui sur les crédits des missions « Audiovisuel public » et « Médias, livre et industries culturelles », qui sont essentiels à notre souveraineté culturelle.
Premièrement, je m’exprimerai sur l’audiovisuel public au nom de ma collègue Catherine Morin-Desailly, que je supplée. Comme celle-ci le souligne très justement, nous ne pouvons aborder ces crédits sans les mettre en perspective.
Alors que de nombreuses politiques publiques se voient pour la première fois assigner des objectifs de rigueur, ce secteur y est soumis depuis huit ans déjà. En effet, entre 2016 et 2023, son budget n’a pas augmenté, absorbant près de 200 millions d’euros d’économies.
Les crédits ont connu une hausse seulement l’année dernière et uniquement pour compenser la suppression de la contribution à l’audiovisuel public. À présent, 50 millions d’euros d’économies supplémentaires sont demandés, auxquels s’ajouteront, dans quelques minutes, plusieurs millions qui feront l’objet de négociations.
Si nous comprenons le contexte de crise budgétaire, ces efforts ne seront utiles que s’ils s’inscrivent dans une vision et dans une stratégie d’ensemble cohérentes. Plusieurs points nous interpellent particulièrement.
Je pense à la disparition des 30 millions d’euros du programme de transformation lors de l’exécution 2024. Celle-ci est inexpliquée et s’apparente à un détournement pur et simple. Je pense également à la disparition incompréhensible de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques, le dispositif ayant pourtant été voté en 2009 pour compenser la suppression de la publicité après vingt heures.
Nous plaidons depuis des années en faveur d’un plan d’ensemble pour l’audiovisuel public. Celui-ci doit s’articuler autour de trois volets essentiels.
Le premier est le financement. En ce sens, une proposition de loi organique déposée notamment par Catherine Morin-Desailly et par Cédric Vial vise à en assurer la pérennité.
Le deuxième relève de la gouvernance. Une proposition de loi de Laurent Lafon a pour objet de regrouper les chaînes de l’audiovisuel public dans une holding commune.
Le troisième participe de la stratégie. Pour redéfinir les missions de service public, nous pourrons nous appuyer utilement sur les conclusions des États généraux de l’information.
Deuxièmement, pour le cinéma, l’année 2024 a été marquée par des inquiétudes légitimes sur la pérennité du modèle français de financement. Le maintien du budget du CNC à 780 millions d’euros montre néanmoins la volonté de préserver les fondamentaux de notre politique en la matière.
L’effort demandé de 450 millions d’euros sur la trésorerie du centre est, certes, substantiel, mais il a été calibré pour ne pas affecter la capacité d’intervention de cet acteur. Ce point est essentiel : l’argent des spectateurs continuera d’être intégralement consacré au soutien à la création et à la modernisation du parc de salles.
Quatre avancées significatives méritent d’être soulignées dans le domaine du cinéma.
Tout d’abord, les dispositifs de crédit d’impôt sont sanctuarisés. Leur efficacité n’est plus à démontrer : chaque euro de dépense fiscale donne lieu à 6 à 7 euros de dépenses sur notre territoire.
Ensuite, les espaces ruraux reçoivent un engagement fort. Un plan de 10 millions d’euros vise à soutenir les festivals locaux, les circuits itinérants et la modernisation des salles.
De plus, le programme La Grande Fabrique de l’image se poursuit au travers des 300 millions d’euros qui figurent dans le cadre du plan France 2030. Cet investissement est crucial pour maintenir notre compétitivité.
Enfin, notre système de financement connaît une adaptation réussie à l’ère numérique. Désormais, 20 % des ressources du CNC proviennent des plateformes internationales.
Troisièmement, la presse, comme l’a rappelé Michel Laugier, traverse une crise profonde. Les chiffres en témoignent de manière alarmante : baisse de 4,5 % des ventes en 2023, chute de 60 % pour la presse nationale et de 36 % pour la presse régionale sur la période récente.
Comme l’a si justement résumé un professionnel auditionné, Michel Laugier tenant les mêmes propos, « la presse a les charges de Gutenberg et la concurrence de Zuckerberg ». Cette formule illustre parfaitement le double défi du secteur : maintenir une infrastructure de production et de distribution coûteuse tout en affrontant des plateformes numériques qui captent désormais plus de 70 % des revenus publicitaires en ligne.
Si nous saluons le maintien des aides au pluralisme, à hauteur de 25,9 millions d’euros, et la préservation – je vous en remercie, madame la ministre – du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, qui est essentiel pour nos 746 stations de proximité, la réforme de la distribution de la presse accuse un retard préoccupant.
Le duo mortifère entre deux opérateurs, dont l’un est lourdement subventionné, n’est pas viable. Le coût pour les finances publiques est considérable : plus de 600 millions d’euros en quatorze ans pour la seule société Presstalis et pour ses avatars. Une réorganisation en profondeur de la filière est devenue urgente.
Quatrièmement, le jeu vidéo est la première industrie culturelle française, avec plus de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Sa situation mérite une attention particulière.
Si nous saluons la reconduction du crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo, qui a fait ses preuves avec plus de 150 projets soutenus en 2023, le fonds d’aide au jeu vidéo (FAJV), doté de seulement 4 millions d’euros, paraît dérisoire face aux dispositifs de nos concurrents directs : le Québec mobilise plus de 35 millions d’euros par an, tandis que le Royaume-Uni vient de porter son fonds de soutien à 25 millions de livres.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que nous disposons en France d’atouts considérables : des écoles d’excellence reconnues mondialement, des studios créatifs qui ont fait leurs preuves, comme Ubisoft, Quantic Dream ou PulluP Entertainment, et un vivier de talents qui ne demande qu’à s’épanouir. Pour préserver cette excellence, nous soutiendrons un amendement visant à porter la dotation du FAJV à 8 millions d’euros.
Notre stratégie industrielle pour le jeu vidéo doit être plus ambitieuse. Le renforcement du soutien à l’innovation, notamment dans les technologies émergentes, comme l’intelligence artificielle et la réalité virtuelle, est crucial.
Cinquièmement, j’en viens au livre et à la lecture publique. Si la progression des crédits du Centre national du livre est un signal positif, elle reste insuffisante face aux défis que doit relever le secteur. Le maintien d’un réseau dense de librairies indépendantes sur l’ensemble du territoire nécessite un soutien accru, particulièrement dans nos zones rurales, où ces établissements jouent un rôle culturel et social irremplaçable.
La transformation numérique et le développement de services innovants doivent être accompagnés plus vigoureusement, pour faire face à la concurrence du commerce en ligne.
Le développement de l’intelligence artificielle générative pose également des questions cruciales pour l’ensemble de nos industries culturelles. L’utilisation non autorisée d’œuvres protégées pour l’entraînement des modèles, la création de contenus dérivés et la juste rémunération des créateurs sont autant d’enjeux qui appellent une réponse politique forte et coordonnée.
L’absence dans ce budget de moyens spécifiques pour accompagner nos industries face à ces défis est regrettable, alors même que nous disposons en France d’une expertise reconnue dans ce domaine.
Pour conclure, le groupe Union Centriste votera en faveur de l’ensemble des crédits des missions « Audiovisuel public » et « Médias, livre et industries culturelles », car ils préservent l’essentiel dans un contexte contraint.
Néanmoins, nous resterons particulièrement vigilants sur plusieurs aspects déterminants : la mise en œuvre d’une réforme ambitieuse de la distribution de la presse, l’émergence d’un véritable plan stratégique pour l’audiovisuel public et le renforcement substantiel du soutien à la transition numérique de l’ensemble de nos industries culturelles.
Il y va de notre souveraineté culturelle, dans un monde où l’influence est devenue un enjeu géopolitique majeur. Ces investissements sont non pas des dépenses de confort, mais bien des choix stratégiques pour notre rayonnement. La France dispose d’atouts considérables dans tous ces secteurs. Notre responsabilité est de leur donner les moyens de se développer et de s’adapter aux mutations profondes qu’impose la révolution numérique. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous constatons dans ce PLF pour 2025 une baisse des aides à la presse de 1 %, ce qui ramène ainsi les crédits de la mission à 193 millions d’euros cette année.
Cette diminution frappera de plein fouet les médias indépendants, tandis que l’écrasante majorité des aides continuera à cibler presque totalement la presse des quotidiens et magazines dits d’information politique et générale. Nous pouvons nous en étonner, sachant que ces publications sont pour la plupart la propriété de grands groupes !
Les données publiées en septembre 2023 relatives aux aides à la presse versées entre 2021 et 2022 dressent d’ailleurs un constat désolant. Sept groupes non seulement concentrent les plus grandes franchises médiatiques, mais surtout perçoivent l’écrasante majorité des soutiens directs au secteur.
Parallèlement, l’appui fourni aux médias de proximité ou non professionnels n’est toujours pas revalorisé dans ce PLF, avec seulement 1,8 million d’euros de crédits dédiés. Il s’agit d’un montant stable par rapport à 2022, à 2023 et à 2024, autrement dit d’une baisse en euros constants.
Pour le groupe CRCE-K, ce choix budgétaire fait fi des mouvements de concentration de médias, qui n’ont de cesse d’accélérer ces dernières années. Pourtant, nombre d’associations reconnues, ainsi que de nombreux syndicats, mettent en garde contre ce phénomène qui menace tant l’équilibre économique du secteur que la crédibilité de l’information – en somme, le pluralisme.
Concernant le Centre national de la musique, nous regrettons très fortement que l’amendement de notre groupe visant à rehausser la taxe sur le streaming n’ait pas été adopté.
Alors que le CNM a enfin perçu le produit de cette dernière à la fin de l’année 2024, à la suite d’une initiative sénatoriale soutenue par notre groupe, le rendement s’est révélé inférieur aux prévisions, comme le souligne le rapport pour avis de la commission de la culture. Pour notre part, nous proposions un rehaussement à 1,75 %, soit un taux encore très faible, qui n’aurait perturbé ni l’équilibre économique des plateformes ni le consommateur.
En outre, de telles recettes nouvelles auraient largement permis de compenser la coupe de 1,3 million d’euros demandée au CNM cette année. Le résultat de la non-adoption de notre texte sera de privilégier les aides sélectives. Cela a conduit légitimement le syndicat privé du spectacle vivant Ekhoscènes, regroupant plus de 500 sociétés du spectacle vivant, à voter contre le budget élaboré par le Centre, alors qu’il compte parmi les principaux soutiens financiers de ce dernier.
Nous souhaitons y insister, la question du financement du CNM est d’une importance primordiale, faute de quoi cet opérateur de l’État pourrait être contraint de renoncer à certaines missions, dont celle de garantir la diversité musicale dans notre pays en finançant des projets phonographiques musicaux ou des vidéomusiques.
Enfin, nous espérions que, après des années de casse, l’horizon s’éclaircisse un tant soit peu pour l’audiovisuel public du fait de l’engagement de l’État de relever sensiblement le budget du secteur en 2025. Il n’en a rien été.
Il avait été prévu dans la loi de finances pour 2024, au titre du programme 848, « Programme incitatif de transformation », d’accorder 69 millions d’euros à quatre acteurs de l’audiovisuel public : France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Institut national de l’audiovisuel (INA). Cet engagement n’a pas été tenu, puisque seuls 19 millions d’euros ont été effectivement versés.
Un second manquement à la parole donnée a trait au PLF actuel. En effet, les crédits y sont inférieurs de 81,5 millions d’euros à ceux qui sont prévus, d’une part, dans la trajectoire budgétaire jointe au projet de loi de finances pour 2024 et, d’autre part, dans la tranche 2025 de la trajectoire budgétaire 2024-2028 figurant dans les COM.
Cette réduction des moyens de l’audiovisuel public ne s’accompagne aucunement d’une adaptation de ses missions. Faire autant avec moins, tel est le mantra de ce gouvernement, même lorsque les capacités budgétaires de nos services publics arrivent à la moelle !
Pour l’ensemble de ces raisons, mon groupe votera contre ces crédits.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je m’adresse à vous avec une vive inquiétude, qui porte sur les moyens alloués à la mise en œuvre du soutien aux médias et au financement de l’audiovisuel public.
Partout à travers le monde, un raidissement autoritaire a lieu, concomitant à l’exercice de pressions sur la presse indépendante, à la montée en puissance de médias d’opinion et à l’affaiblissement des services d’audiovisuel public.
La nomination d’Elon Musk au sein du gouvernement américain menace la vie démocratique de notre continent. Ses prises de position contre la réglementation européenne encadrant la liberté d’expression en ligne sont sans équivoque. Au sein de l’Union européenne, la France doit continuer à défendre notre modèle de régulation, donc notre encadrement de la liberté d’expression.
Le contexte impose de faire évoluer le droit. Les États généraux de l’information ont formulé des recommandations. Celles-ci nécessitent un renforcement des moyens des autorités de régulation.
Ainsi, l’Arcom se verrait confier la surveillance des nouvelles obligations que devraient respecter les plateformes, alors que ses crédits stagnent actuellement. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique pourrait se voir confier la nouvelle mission de contrôler les déclarations d’intérêts et de patrimoine des dirigeants de médias. Ces réformes impliqueraient bien sûr des ajustements budgétaires.
Depuis notre commission d’enquête sur la concentration des médias en France, nous savons que les aides à la presse sont des instruments mal calibrés. Quand pourrons-nous débattre en profondeur de la pertinence de ces financements ? Le groupe écologiste a ainsi proposé un crédit d’impôt permettant à chaque contribuable de financer le média de son choix. Cette proposition a été rejetée.
Par ailleurs, la loi de 1986 portant réforme du régime juridique de la presse mériterait une révision globale. Les seuils de concentration sont devenus inadaptés aux nouveaux modes d’information. Ils ne prennent pas en compte l’audience en ligne.
Les priorités figurant dans ce budget paraissent déconnectées du contexte préoccupant que je viens de décrire. Je m’interroge en particulier sur les annonces concernant l’exposition des enfants aux écrans, quand nous passons nous-mêmes en moyenne trois heures trente par jour sur nos téléphones – le chiffre est sans doute plus élevé au Sénat… (Sourires.) – et quand l’administration dématérialise toutes ses procédures, rendant incontournable le recours aux écrans.
Gardons-nous de postures trop dogmatiques et engageons une réflexion plus profonde pour un usage équilibré de ces nouvelles technologies !
Le projet de création d’une holding, préparant la fusion de l’audiovisuel public, est tout aussi préoccupant. Depuis la première mouture présentée par Franck Riester, rien ne permet de montrer qu’une telle structure renforcerait les chaînes publiques et permettrait de créer un ensemble comparable à la BBC. Souvenons-nous que les coopérations par le bas ont souvent eu des résultats décevants.
Pendant des années, l’existence de grands médias publics n’a pas empêché l’alternance politique. Et comme toute institution, comme toute entreprise humaine, ces derniers n’échappent pas à la nécessité de s’adapter aux circonstances de l’époque. Mais, de grâce, tenons-nous à l’écart de la tentation de vouloir organiser nous-mêmes cette réforme ! Résistons à celle de contenter les puissants dirigeants de chaîne pour s’attirer d’eux une bonne presse.
Laissons à l’audiovisuel public le soin de conduire son propre aggiornamento au regard des objectifs que nous lui assignons, et abandonnons cette proposition hasardeuse.
Éclairer le citoyen, tel était l’objectif assigné à la Documentation française, la maison d’édition publique créée après la Seconde Guerre mondiale par le Conseil national de la Résistance.
Ce budget de la mission « Audiovisuel public » est privé d’une telle ambition, et c’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’y opposera. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Motion d’ordre
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Mes chers collègues, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, la commission des finances demande l’examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Recherche et enseignement supérieur », « Écologie, développement et mobilité durables », « Cohésion des territoires » et « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Je le rappelle, il s’agit de permettre des regroupements par thématique et, ainsi, des discussions cohérentes sur l’ensemble des sujets.
M. le président. Je suis saisi, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, d’une demande de la commission des finances d’examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Recherche et enseignement supérieur », « Écologie, développement et mobilité durables », « Cohésion des territoires » et « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Sylvie Vermeillet.)