M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 46.

M. Gérard Lahellec. Assouplir encore le régime applicable aux installations classées pour la protection de l’environnement, c’est porter une nouvelle atteinte au principe de non-régression du droit de l’environnement et nous exposer à un important risque contentieux. De nombreuses associations l’ont souligné, à l’instar de la direction générale de la prévention des risques (DGPR).

Pis, en proposant d’inscrire dans la loi que les avis de l’autorité environnementale doivent être fondés sur la science, on suggère que les décisions actuelles ne le sont pas ; de tels sous-entendus posent quand même question.

Enfin, cet article participe de l’instabilité du droit, donc à l’insécurité juridique, puisqu’il revient sur les dispositions de la loi Industrie verte de 2023 quant à la participation du public pour les ICPE élevage.

Comme le soulignent de nombreux acteurs, en voulant « simplifier », on crée une dérogation à l’application de ce nouveau dispositif de participation du public : les décrets d’application datent de novembre 2024. Ils viennent donc tout juste d’être publiés.

Voilà pourquoi nous proposons de supprimer cet article.

M. le président. L’amendement n° 81 rectifié n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements identiques restant en discussion ?

M. Pierre Cuypers, rapporteur. Ce n’est pas en niant les difficultés que les problèmes vont se résoudre ; nous serons au moins d’accord sur ce point.

Nous sommes face à une vraie dissonance cognitive : nos concitoyens, du moins les plus militants d’entre eux, tolèrent de moins en moins la présence de bâtiments d’élevage. Ils n’ont de cesse de dénoncer leurs nuisances, mais ils mangent toujours autant de viande…

La véritable alternative est donc la suivante : voulons-nous consommer la viande que nous produisons nous-mêmes, selon nos propres normes environnementales et sociales, ou souhaitons-nous en importer toujours plus de Pologne, d’Ukraine, de Thaïlande ou du Brésil ?

J’émets évidemment un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, rendez-vous compte de la situation dans laquelle se trouvent aujourd’hui certains éleveurs !

Dans la nuit de vendredi à samedi derniers, des activistes ont forcé l’entrée du siège social d’Evel’Up, une coopérative porcine de Bretagne. Ils ont tenté d’y mettre le feu, causant des dégâts importants, qui s’élèvent probablement à plusieurs centaines de milliers d’euros. Naturellement, une enquête est ouverte.

Il faut bien prendre la mesure des difficultés qu’éprouvent les éleveurs à se doter de nouvelles installations, voire à maintenir celles qui existent, face à des personnes qui veulent détruire leur outil de travail.

Plus que jamais, nos éleveurs sont en proie au découragement. Aux crises sanitaires et aux épizooties en tout genre s’ajoutent les difficultés causées par des environnements défavorables, ainsi que les attaques de certains activistes. Ces derniers ne veulent plus voir du tout d’élevage en France ; ils s’en prennent systématiquement aux bâtiments d’élevage, voire aux éleveurs eux-mêmes.

Dans un contexte si difficile pour nos éleveurs, la suppression de l’article 3 serait particulièrement regrettable.

Cet article vise à apporter une simplification majeure et très attendue, grâce au travail du rapporteur et de la commission, que je salue et félicite.

La rédaction initiale de la proposition de loi soulevait de nombreuses difficultés. Or le travail accompli en commission a permis d’améliorer sensiblement le texte.

Ainsi, on a pris soin d’adapter la procédure d’autorisation environnementale introduite par la loi relative à l’industrie verte afin d’ajuster les modalités de consultation du public. Au total, deux réunions publiques pourront avoir lieu ; mais, selon la nature du projet, le commissaire enquêteur pourra les remplacer par une permanence en mairie, comme cela se fait très souvent pour les projets soutenus, par exemple, par les collectivités territoriales.

Par ailleurs, les élevages soumis à autorisation au titre de la directive relative aux émissions industrielles, ou directive IED, pourront également être soumis à enregistrement.

Ces deux simplifications très importantes figurant à l’article 3, je suis défavorable à ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Bien entendu, nous condamnons toute forme de violence, qu’elle vienne des activistes que vous évoquez, madame la ministre – l’enquête fera la lumière sur cette affaire –, ou de ceux qui murent les locaux l’Office français de la biodiversité (OFB). Il faut aussi le rappeler, car il ne saurait y avoir deux poids, deux mesures.

Pour autant, ce n’est pas en édulcorant la consultation du public que l’on améliorera l’acceptabilité des projets. Nous sommes en démocratie et nous avons toujours intérêt à débattre.

Lorsque nous défendons les énergies renouvelables (EnR), nous, écologistes, nous acceptons le débat public.

Des réunions publiques sont prévues. Il faut avoir le courage de dialoguer avec nos concitoyens : moins on le fera, plus les oppositions seront fortes et moins elles seront contrôlables.

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. Je m’associe à tous ceux qui, ici, défendent l’élevage.

Je pense plus précisément à la Bretagne. Dans le seul département des Côtes-d’Armor, la production laitière a diminué de 10 millions de litres en un an. Au cours de l’année écoulée, le cheptel breton a perdu 120 bovins par jour. La production de volailles a baissé de 10 % depuis 2021, et la production de porcs de 8 %.

Les causes de cette chute doivent être cherchées ailleurs que dans la stigmatisation évoquée par certains : elle réside dans l’attractivité des métiers, dans la rémunération du travail paysan. Ces facteurs expliquent en grande partie les difficultés que je viens de citer.

De grâce ! Considérons l’élevage dans son ensemble. C’est précisément pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. Alain Cadec. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je ne sais pas si tout le monde ici se figure ce dont on parle.

On parle d’éleveurs qui, comme moi, se lèvent très tôt tous les matins, 365 jours par an, et travaillent plus de 70 heures par semaine.

On parle d’éleveurs que l’on a jetés dans la concurrence avec d’autres pays et d’autres continents,…

M. Daniel Salmon. Qui les y a jetés ?

M. Laurent Duplomb. … en leur infligeant, jour après jour, des contraintes supplémentaires.

Ces éleveurs doivent investir des centaines de milliers d’euros, qu’ils rembourseront à la sueur de leur front.

Aujourd’hui, avec la loi Industrie verte, on leur impose d’organiser un débat avec tous leurs voisins au début de l’enquête publique ; puis un second débat, à la fin de cette procédure, après que vous aurez fait monter la mayonnaise, en expliquant à ces mêmes voisins que des paysans près de chez eux, ce sont des nuisances qui feront baisser la valeur de leur bien, qui les empêcheront de dormir, qui entraîneront de mauvaises odeurs, qui attireront les mouches, etc.

M. Jean-Claude Tissot. Et si c’est vrai ?

M. Laurent Duplomb. À cause de vous, ces débats tourneront au pugilat !

Qui, en France, accepterait de faire 70 heures par semaine, de se lever si tôt tous les matins, de travailler pour gagner si peu…

M. Daniel Salmon. Pourquoi les éleveurs gagnent-ils si peu ?

M. Laurent Duplomb. … et d’investir en se mettant tous ses voisins à dos après avoir été stigmatisé ? Personne !

Il faut revoir ce régime, sinon plus aucun éleveur n’acceptera d’investir, et nous ne mangerons plus de viande française. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Bravo, monsieur Duplomb ! Avec ces amendements, nous voyons bien les deux blocs qui s’affrontent.

M. Lahellec a raison : nous assistons à la décapitalisation de nos élevages. On voit que tout menace de s’arrêter. Plus un poulailler ne se crée en Bretagne, pour une simple et bonne raison : les opposants se dressent de toutes parts et les associations utilisent le débat public pour se faire mousser. Même un pauvre poulailler de poules pondeuses fait polémique. Plus aucun agriculteur ne veut en créer un. C’est cela, la réalité !

M. Daniel Salmon. Pas du tout !

M. Vincent Louault. La simplification est indispensable.

Vous pouvez nous accuser de défendre je ne sais quel schéma… La vérité, c’est que vous n’aimez pas la production française ! (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.) Votre seul but, c’est de porter atteinte à nos outils de production.

Vous voulez sanctuariser la France. Vous voulez faire de la campagne une carte postale pour bobos parisiens. En attendant, nous ne pouvons plus produire ni installer un seul poulailler en Bretagne. (Mêmes mouvements.) Vous rendez-vous compte de cela ?

Mes chers collègues, cet article est indispensable pour que nos jeunes agriculteurs puissent encore avoir des projets et espérer produire en France.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Mes chers collègues, nous devrions pouvoir débattre de ces questions plus calmement.

À aucun moment je ne m’en suis pris à qui que ce soit. En revanche, nous avons été directement attaqués par M. Duplomb. De quoi nous accuse-t-on, d’ailleurs ? D’être des bobos ? À tout prendre, j’aime mieux être bobo que bourrin… (Marques dapprobation sur les travées des groupes GEST et SER. – Protestation sur les travées du groupe Les Républicains.)

J’ai grandi dans un village, entouré d’éleveurs : je n’ai de leçons à recevoir de personne ! Je viens d’un territoire de montagne qui ne vivrait pas sans l’élevage. Comme vous, j’ai la prétention de défendre l’élevage et l’agriculture, mais un certain type d’agriculture, celle qui fait vivre nos villages, alors que votre agriculture a littéralement vidé les campagnes.

Les exploitations ne cessent de s’agrandir et nos villages sont en train de mourir. C’est cela, votre modèle ? En tout cas, ce n’est pas le mien. Au lieu de donner des leçons, confrontons plutôt nos arguments !

Madame la ministre, vos propos m’interpellent, car ils ne semblent pas de nature à favoriser un climat de sérénité. Je suis contre toute forme de violence ; il est intolérable que les agriculteurs soient pris pour cibles. Mais il faut aussi s’interroger : pourquoi ne veut-on plus d’un certain type de poulaillers ? Parce que la société évolue – et il faut en tenir compte.

Quoi qu’il en soit, j’aurais aimé que vous évoquiez, en parallèle, les attaques contre France Nature Environnement (FNE) ou contre le siège de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Et, surtout, quel est le rapport entre l’attaque de cette coopérative et l’article dont nous débattons ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Monsieur Louault, monsieur Duplomb, j’exerce le même métier que vous : un peu de respect, je vous prie ! Vous pouvez hausser les épaules… Pourquoi auriez-vous le monopole, sinon du cœur, du moins du bon élevage ?

Nous n’avons tout simplement pas la même vision de notre métier. J’irai même plus loin : ce dont vous rêvez, en somme, c’est de faire ce que vous voulez, quand vous voulez et où vous voulez, qu’importe si cela gêne les voisins ou qui que ce soit d’autre.

Pourtant, certains chiffres parlent d’eux-mêmes. Notre pays compte aujourd’hui 400 000 paysans. Demain, ils ne seront plus que 200 000 ou 300 000 : pourquoi donneraient-ils le la à 69 millions d’habitants ?

Bien sûr, rien ne m’énervait davantage que d’entendre quelqu’un venir dans ma ferme pour me donner des leçons. Mais si l’on veut cohabiter, si l’on veut pratiquer l’élevage dans de bonnes conditions, il faut parler à nos concitoyens, aux « bobos », comme vous les appelez ; il faut leur expliquer comment nous travaillons. Il faut leur dire ce dont nous avons besoin pour gagner notre vie.

Il est inadmissible de stigmatiser ainsi certaines personnes, de dresser les uns contre les autres.

Quant à votre ritournelle sur les 70 heures de travail par semaine, c’est bon, nous l’avons assez entendue !

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.

M. François Bonhomme. M. Salmon a eu l’honnêteté de dénoncer les actions violentes de certains activistes contre des stations d’élevage ; je lui en donne acte.

Néanmoins, je me dois de relever une contradiction : à longueur d’articles sur internet, la nébuleuse environnementale, à laquelle s’associe le Parti vert, défend la théorie de la désobéissance civile.

M. Daniel Salmon. La désobéissance civile, c’est autre chose !

M. François Bonhomme. Vous appelez des militants ou des sympathisants à contester une règle, y compris par l’entrave et la suspicion, sous prétexte qu’elle ne vous convient pas, qu’elle irait à l’encontre de l’action climatique ou de la protection de l’environnement, quand bien même des discussions sont en cours avec les autorités légitimes ; cela me paraît tout à fait contradictoire avec la dénonciation vertueuse de la violence.

Vous encouragez des mouvements de protestation, puis vous prétendez que vous n’y êtes pour rien : assez d’hypocrisie ! (M. Daniel Salmon proteste.) Il y a là un problème de cohérence sur lequel j’attire votre attention. En dépit de vos condamnations, vous alimentez en sous-main des actes de violence.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Boyer. Je ne peux pas laisser dire que mon collègue Laurent Duplomb est un bourrin ! (Marques dapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Claude Tissot. Qui a dit que l’on parlait de M. Duplomb ?

M. Jean-Marc Boyer. Ceux qui tiennent de tels propos ne défendent pas l’agriculture ; d’ailleurs, je me demande bien où ils habitent…

Pour ma part, j’habite dans un village, entouré d’agriculteurs. Je vis près de jeunes producteurs de saint-nectaire, qui comme Laurent Duplomb se lèvent très tôt, et qui sont aujourd’hui pressés par des normes et des contraintes que vous soutenez, ici même, dans cette assemblée : c’est inadmissible ! En soutenant toutes ces normes et contraintes, vous ne défendez ni l’agriculture ni l’installation des jeunes.

Vous avez évoqué l’Office français de la biodiversité (OFB). Or, aujourd’hui, quand un jeune agriculteur épand par inadvertance un peu de lisier près d’un ruisseau, les agents de l’OFB arrivent aussitôt, pistolet à la ceinture. C’est vous qui avez demandé l’emploi de ces méthodes inadmissibles ! (Protestations sur les travées des groupes GEST et SER.)

Enfin, il existe dans ma région des projets de réserves collinaires vertueux préservant la biodiversité, avec des panneaux photovoltaïques. Les agriculteurs, y compris les jeunes, accordent des terrains pour la réalisation de ces chantiers. Qui est venu manifester contre ces prétendues « mégabassines » ?

M. Daniel Salmon. Ce n’est pas pareil !

M. Jean-Marc Boyer. Vous et vos amis !

M. Mickaël Vallet. On n’a plus le droit de manifester ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4, 11 et 46.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 93, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à supprimer le deuxième alinéa de l’article 3, en vertu duquel l’avis de l’autorité environnementale doit être fondé sur les enseignements de la science et citer les études académiques mobilisées pour son élaboration.

On ne peut que souscrire à l’intention de cet alinéa. Néanmoins, une telle disposition expose les projets à des risques d’annulation par le juge, au simple motif qu’une étude académique parmi tant d’autres ne serait pas mentionnée dans l’avis de l’autorité. Il convient de lever ce risque juridique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Cuypers, rapporteur. Afin d’éviter tout effet pervers, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Nous voterons cet amendement : il nous paraît en effet évident que l’on s’appuie sur la science en pareil cas…

Comme l’a rappelé M. Lahellec, de nombreux élevages sont à l’abandon en Bretagne, où l’on voit désormais des friches agricoles un peu partout. Pourquoi les jeunes ne reprennent-ils pas les exploitations ? C’est une question qu’il faut se poser.

Lors du dernier Salon des productions animales – carrefour européen (Space), un article de Ouest-France relatait qu’une personne avait investi 800 000 euros pour un poulailler neuf, en espérant se rémunérer à hauteur de 70 % du Smic. L’intéressé devra donc travailler à côté…

Quand on met l’accent sur la compétitivité au détriment des revenus, quand on pratique le moins-disant social, il ne faut pas s’étonner que l’élevage soit abandonné : chacun veut un salaire digne de ce nom, et c’est bien normal.

Certains sont peut-être fiers de travailler 70 heures par semaine, mais ce n’est pas le modèle qui se vend bien aujourd’hui.

M. Laurent Duplomb. Le droit à la paresse…

M. Daniel Salmon. Pour notre part, nous voulons un revenu décent pour les agriculteurs, s’appuyant sur la vérité des prix.

Voilà notre position. Sans aller jusqu’à dire que, par comparaison, le reste n’est qu’épiphénomène, je pense que l’on ne regarde pas les choses en face. À l’évidence, on essaie de nous enfumer, car il faut trouver un bouc émissaire…

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 93.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 68 rectifié, présenté par M. Bleunven, Mme Loisier, MM. J.M. Arnaud, Chasseing et Henno, Mmes Jacquemet et de La Provôté, MM. Levi, Longeot et Maurey, Mme Perrot et M. L. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Rétablir les 2° et 3° dans la rédaction suivante :

2° L’article L. 181-9 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la référence : « I. – » ;

b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – Par dérogation au I, lorsque que la demande d’autorisation environnementale porte sur un projet destiné à l’élevage de bovins, de porcs ou de volailles, l’instruction de la demande se déroule en trois phases :

« 1° Une phase d’examen ;

« 2° Une phase de consultation du public, qui est réalisée sous la forme d’une enquête publique conformément au chapitre III du titre II du présent livre ;

« 3° Une phase de décision. » ;

3° Après la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 181-10, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Pour les projets destinés à l’élevage de bovins, de porcs ou de volailles, elle est réalisée selon les modalités prévues au II de l’article L. 181-9. » ;

II. – Alinéas 4 à 9

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Tandis que nous nous écharpons au sujet des modèles de production, notre pays perd toujours plus d’élevages.

Moi qui suis Breton, je suis écœuré de voir à quelle vitesse l’élevage se décapitalise en Bretagne. Dans quelques années, et même dans quelques mois, on discutera de fermetures d’usines. C’est toujours la même rengaine !

Pour ma part, je tiens particulièrement à l’article 3 et je propose que l’on revienne à sa rédaction d’origine.

Cet amendement vise à conserver une participation du public dans le cadre de la procédure d’enquête publique pour les décisions ayant une incidence sur l’environnement. Maîtrisée par les agriculteurs comme par les administrations déconcentrées, cette procédure s’appliquait jusqu’en 2024.

Pour l’avenir de l’élevage français, il est essentiel que les éleveurs ne soient pas obligés d’organiser deux réunions publiques pour leurs projets soumis à autorisation. De même, ils ne sauraient devoir répondre en continu, sur un site internet, aux commentaires publiés par tel ou tel contributeur lors des consultations du public, ou être soumis à une consultation de trois mois au lieu de trente jours.

M. le président. L’amendement n° 56 rectifié bis, présenté par Mme Havet et MM. Canévet et Buis, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Rétablir les 2° et 3° dans la rédaction suivante :

2° Après le troisième alinéa de l’article L. 181-9 sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Par exception, lorsque que la demande d’autorisation environnementale porte sur un projet destiné à l’élevage de bovins, de porcs ou de volailles, l’instruction de la demande, après qu’elle a été jugée complète et régulière par l’autorité administrative, se déroule en trois phases :

« 1° Une phase d’examen ;

« 2° Une phase de consultation du public qui est réalisée sous la forme d’une enquête publique conformément aux dispositions du chapitre III du titre II du présent livre ;

« 3° Une phase de décision. » ;

3° Le premier alinéa du I. de l’article L. 181-10 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« La consultation du public est réalisée selon les modalités fixées à l’article L. 181-10-1, à l’exception :

« – du cas prévu au troisième alinéa du III de l’article L. 122-1-1 pour lequel la consultation du public est réalisée selon les modalités prévues à l’article L. 123-19 ;

« – des projets destinés à l’élevage de bovins, de porcs ou de volailles, pour lesquels la consultation du public prend la forme d’une enquête publique en l’application des dispositions prévues à l’article L. 181-9. » ;

II. – Alinéas 4 à 9

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement de notre collègue Nadège Havet tend à adapter les modalités de l’instruction des dossiers d’autorisation d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et de la phase de consultation du public aux spécificités des installations agricoles.

M. le président. L’amendement n° 55, présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéas 4 à 9

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement tend à supprimer les alinéas 4 à 9.

Mes chers collègues, il faut bien prendre conscience de ce que nous sommes en train de faire : on ne supprime pas les réunions de concertation du public pour les seuls projets d’élevage, mais pour tous les projets soumis à autorisation environnementale, c’est-à-dire toutes les ICPE – je rappelle que seules 20 % d’entre elles sont agricoles.

Monsieur le rapporteur, la rédaction que vous nous proposez, laquelle vise nombre de projets économiques au titre des installations, ouvrages, travaux et activités, est totalement hors de propos. Au nom de bénéfices discutables pour les éleveurs, c’est toute la démocratie environnementale que vous mettez à mal.

C’est d’autant plus incompréhensible que toutes les procédures ont été mises à plat et tirées vers le bas par la loi Industrie verte. Les décrets d’application de ce texte sont entrés en application le 22 octobre dernier, et vous voulez déjà tout réécrire – évidemment, en tirant toujours vers le bas.

Loin de simplifier quoi que ce soit, l’adoption d’une telle mesure complexifierait la vie de tous les acteurs, notamment les maîtres d’ouvrage, qui se sont préparés depuis un an.

J’y insiste : en réduisant pour ainsi dire à néant la consultation du public, on ne rendra service ni aux éleveurs, ni aux agriculteurs, ni à aucun porteur de projet.

Chaque activité économique doit s’implanter dans un territoire. Pour perdurer, elle doit composer de manière harmonieuse avec son environnement : acceptation par les populations, préservation du cadre de vie, débouchés en termes d’emploi et de production de richesses, etc.

Lors des réunions publiques, des dizaines de personnes peuvent interroger le maître d’ouvrage en personne. Ces discussions interactives n’ont strictement rien à voir avec des permanences. Le commissaire enquêteur voit alors les personnes en tête à tête, les unes après les autres, en absence du maître d’ouvrage, sans projeter le moindre exposé du chantier et des mesures prévues, comme c’est le cas lors des réunions publiques. Ces dernières sont utiles ; elles permettent généralement au porteur de projet d’améliorer sa copie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Cuypers, rapporteur. L’objectif est bien de simplifier les règles de la loi Industrie verte pour tous les secteurs. C’est pourquoi, en commission, nous avons donné la possibilité au commissaire enquêteur de remplacer les deux réunions publiques obligatoires, au début et à la fin de l’enquête publique, par de simples permanences en mairie. Dans de nombreux cas, il n’y aura donc plus d’enquête publique.

Mme Nicole Bonnefoy. C’est très démocratique !

M. Pierre Cuypers, rapporteur. En conséquence, la commission est défavorable à ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, il faut bien mesurer la portée de la simplification proposée.

Pour mener des projets d’installation classée pour l’environnement, nos éleveurs font face à de telles lourdeurs administratives qu’ils en sont parfois découragés : les multiples recours auxquels la procédure peut donner lieu rendent l’issue des projets tout à fait incertaine.

Simplifier la procédure, c’est donc rendre service aux porteurs de projet, qu’il nous faut encourager.

Plusieurs orateurs l’ont rappelé, y compris M. Salmon, de nombreux élevages sont en déshérence. La décapitalisation est à l’œuvre et notre souveraineté alimentaire régresse.

Nous devons porter une attention toute particulière au monde de l’élevage : il y va véritablement d’une grande tradition de l’agriculture française, notamment en montagne.

Pour bien connaître le sujet, je puis vous assurer qu’en montagne l’élevage est une activité économique matricielle. Nous devons absolument encourager, non seulement les éleveurs, mais aussi ceux qui veulent reprendre des exploitations. C’est très important.

Monsieur le sénateur Bleunven, ce texte facilitera vraiment les choses pour nos éleveurs.

C’est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de ces amendements.