M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 263 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Chasseing, Mme Jacquemet, M. Levi, Mme Perrot et MM. de Nicolaÿ et Kern.
L’amendement n° 582 rectifié bis est présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, J.M. Arnaud et Brault, Mme Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger, Fargeot et Chevalier et Mme Gacquerre.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 1 à 4
Remplacer ces alinéas par dix-huit alinéas ainsi rédigés :
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° L’article L. 111-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés au sein de la zone urbaine ou à urbaniser, à la charge de l’aménageur. Ces espaces de transition végétalisés respectent les obligations définies au III de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime et sont réputés comme zones de non-traitement. L’espace de transition végétalisé est constitué en dehors des zones dévolues à l’agriculture. Il peut exceptionnellement être dérogé à l’obligation de constituer l’espace de transition végétalisé en dehors des zones dévolues à l’agriculture après avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du même code. Lorsqu’il est constitué sur des zones dévolues à l’agriculture, l’espace de transition constitue une servitude d’utilité publique. Les propriétaires des terrains concernés peuvent mettre en demeure la commune de procéder à l’acquisition de leur terrain, dans les conditions et délais prévus au titre III du livre II du présent code. » ;
2° Après le sixième alinéa de l’article L. 141-10, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le document d’orientation et d’objectifs peut également définir, en cohérence avec le projet d’aménagement stratégique, les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé défini au deuxième alinéa de l’article L. 111-3 du présent code. » ;
3° La section 3 du chapitre Ier du titre V du livre Ier est ainsi modifiée :
a) Après l’article L. 151-6-2, il est inséré un article L. 151-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 151-6-…. – Les orientations d’aménagement et de programmation définissent, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durable, les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé défini au deuxième alinéa de l’article L. 111-3. »
b) Le 7° de l’article L. 151-7 est abrogé ;
4° Le I de l’article L. 161-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La carte communale délimite les espaces de transition végétalisés définis au deuxième alinéa de l’article L. 111-3. » ;
5° Le titre III du livre II est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa de l’article L. 230-1 est ainsi rédigé : « Les droits de délaissement prévus par les articles L. 111-3, L. 152-2, L. 311-2 ou L. 424-1, s’exercent dans les conditions prévues par le présent titre. » ;
b) Il est ajouté un article L. 230-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 230-7. – Lorsqu’un propriétaire exerce le droit de délaissement prévu par l’article L. 111-3, le prix d’acquisition défini à l’article L. 230-3 est mis à la charge exclusive de la personne dont le projet d’aménagement ou de construction nécessite la constitution d’un espace de transition végétalisé sur des zones dévolues à l’agriculture. La collectivité ou le service public qui fait l’objet de la mise en demeure informe celle-ci dès réception de la mise en demeure.
« La délivrance d’un permis de construire ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable dont la mise en œuvre nécessiterait la constitution d’un espace de transition végétalisé sur des zones dévolues à l’agriculture est subordonnée à la constitution préalable d’une garantie financière par le pétitionnaire. » ;
6° Après le cinquième alinéa de l’article L. 423-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les demandes ou déclarations concernent un projet qui nécessite la constitution d’espaces de transition végétalisés définis au deuxième alinéa de l’article L. 111-3, le dossier joint à ces demandes et déclarations indique le tracé projeté de ces espaces. Si, à titre dérogatoire, les demandes ou déclarations sollicitent la constitution d’espaces de transition végétalisés sur des zones dévolues à l’agriculture, le dossier justifie cette demande. Il comporte une estimation de prix qui sera mis à la charge du pétitionnaire en cas d’exercice du droit de délaissement et la garantie financière proposée en application de l’article L. 230-7. »
La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 263 rectifié bis.
M. Yves Bleunven. La commission des affaires économiques a introduit cet article 14 quinquies, qui vise à créer des zones de transition entre les espaces artificialisés et les espaces agricoles.
Le présent amendement vise à renforcer ce dispositif qui répond à une demande constante de la profession agricole.
Nous proposons d’étendre l’obligation de création d’un espace de transition entre les espaces agricoles et les nouveaux espaces urbanisés à l’ensemble des communes et non pas seulement à celles qui ont un plan local d’urbanisme.
Nous proposons également de renforcer le caractère dérogatoire de la possibilité offerte de créer des zones de transition sur l’emprise agricole. Pour ce faire, nous soumettons explicitement cette dérogation à un avis conforme de la CDPENAF.
Dans le cas où, à titre dérogatoire, la zone de transition serait créée sur l’emprise agricole, nous suggérons d’ouvrir un droit de délaissement au profit du propriétaire du terrain concerné. En effet, la création de la zone de transition peut entraîner une forte perte de valeur du bien. L’équité exige que les propriétaires ruraux ne supportent pas cette perte de valeur.
Pour autant, il ne serait pas plus équitable que la commune supporte seule le coût du droit de délaissement. Il est donc proposé qu’il soit à la charge de l’aménageur. En sollicitant une dérogation, celui-ci devra également procéder à une estimation de ce montant, dans le cas où le propriétaire souhaiterait l’exercer, et apporter à la commune des garanties financières de paiement.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 582 rectifié bis.
Mme Anne-Catherine Loisier. Il est défendu.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 164 rectifié bis est présenté par MM. Pla, Montaugé et Gillé, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Michau et Stanzione, Mme Bélim, M. Bourgi et Mmes Conway-Mouret et Espagnac.
L’amendement n° 447 rectifié ter est présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert et Bellurot, MM. J.B. Blanc, Bouchet, Buis, Burgoa, Brault et Cabanel, Mme Chain-Larché, MM. Chatillon et Chevalier, Mme Conte Jaubert, MM. Cuypers et Duffourg, Mmes Dumont et Duranton, M. Fialaire, Mme Garnier, MM. Gremillet et Houpert, Mmes Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. Lemoyne, H. Leroy et Lefèvre, Mme Malet, M. Milon, Mme Muller-Bronn, M. Panunzi, Mmes Paoli-Gagin, Perrot, Renaud-Garabedian et Richer, MM. Ruelle, Pointereau et Rojouan et Mmes Romagny, Schillinger et Ventalon.
L’amendement n° 585 rectifié est présenté par M. Pillefer, Mme Billon, M. Kern et Mme Jacquemet.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
1° Première phrase
Supprimer les mots :
entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés
2° Deuxième et troisième phrases
Supprimer ces phrases.
La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 164 rectifié bis.
M. Sebastien Pla. La forte pression de l’urbanisation met en danger les terres agricoles et peut être une source de conflits d’usage entre les agriculteurs et les riverains.
Si la protection sanitaire de ces derniers et des utilisateurs des produits phytosanitaires est un impératif, l’agriculture ne doit pas seule en supporter le prix.
L’obligation pour les constructeurs de prévoir dans leurs projets une zone de transition répondant aux caractéristiques des zones de non-traitement est donc une avancée significative pour la protection du foncier agricole et le maintien des continuités agricoles.
Nous proposons par conséquent que les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole intègrent un espace de transition végétalisé non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés au sein de la zone urbaine ou à urbaniser, à la charge de l’aménageur.
Un projet d’urbanisation situé en zone urbaine ou à urbaniser ne peut toutefois se situer simultanément sur l’emprise d’une zone agricole et en zone urbaine ou à urbaniser.
Dès lors, la mention « La zone de transition est projetée de préférence en dehors des zones dévolues à l’agriculture » est nulle et non avenue et la dérogation évoquée hors de propos.
On ne saurait accepter que les agriculteurs subissent un recul par rapport aux aménageurs. Le présent amendement a donc pour objet de clarifier la rédaction du nouvel article L. 151-6-3 du code de l’urbanisme en supprimant la possibilité de dérogation à l’obligation des constructeurs d’intégrer un espace de transition dans les nouvelles constructions, cette dérogation étant contraire à l’énoncé qui précède.
Nous avons élaboré cet amendement avec l’aide de la confédération des vignerons indépendants de France.
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour présenter l’amendement n° 447 rectifié ter.
M. Daniel Laurent. Cet amendement est identique au précédent.
Je signale simplement que nous sommes confrontés là à un problème récurrent, cause d’importants conflits entre les élus, qui favorisent l’urbanisation, et les agriculteurs, qui veulent vivre tranquillement de leur métier.
Il nous faut absolument y remédier et promouvoir, par nos amendements, le bien vivre ensemble !
M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour présenter l’amendement n° 585 rectifié.
Mme Annick Jacquemet. Il est défendu !
M. le président. L’amendement n° 952, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 3, deuxième phrase
Remplacer les mots :
La zone de transition est projetée
par les mots :
L’espace de transition végétalisé est situé
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. L’amendement n° 860, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, deuxième phrase
Supprimer les mots :
de préférence
II. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à modifier les modalités d’intégration, dans les projets situés en limite d’un espace agricole, des espaces de transition végétalisés. Il s’agit de supprimer la mention « de préférence » dans la phrase suivante : « La zone de transition est projetée de préférence en dehors des zones dévolues à l’agriculture. »
Je souhaite en effet que les zones de transition soient projetées en dehors des zones dévolues à l’agriculture, de sorte que l’on protège la terre agricole.
Quant à la phrase suivante, « Il peut exceptionnellement être dérogé à cette mesure après avis favorable de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers », nous y sommes favorables.
L’amendement n° 954 du rapporteur a pour objet d’exiger un avis conforme de la CDPENAF ; le Gouvernement penche plutôt pour conserver l’avis favorable.
Quelle différence, par ailleurs, entre mon amendement et ce que propose le rapporteur ?
Je souhaite que les zones de transition de type parkings, parcs de jeux et autres lieux occasionnellement fréquentés par la population n’échappent plus à la protection dont bénéficieront les espaces visés à l’alinéa 3 de l’article 14 quinquies.
Il me semble important de conserver cette protection des zones non résidentielles. Ces espaces se caractérisent certes par une moindre exposition aux risques sanitaires, mais ils restent du moins fréquentés, qu’il s’agisse d’un parking, d’un parc de jeux, d’un jardin ou de toute autre zone qui, n’étant pas constituée d’habitations, n’est pas résidentielle à proprement parler. Il ne me paraît pas souhaitable, j’y insiste, que l’on exempte ces zones de la protection accordée aux zones aménagées.
Voilà la différence, mesdames, messieurs les sénateurs, entre l’amendement du Gouvernement, que je vous demande d’adopter, et les propositions du rapporteur.
M. le président. L’amendement n° 953, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 3, deuxième phrase
Supprimer les mots :
de préférence
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. L’amendement n° 954, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 3, troisième phrase
Remplacer le mot :
favorable
par le mot :
conforme
La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à exiger l’avis conforme de la CDPENAF pour l’obtention d’une dérogation.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis : nous ne souhaitons pas revenir sur le principe en vertu duquel ces dispositions s’appliquent aux communes dotées d’un plan local d’urbanisme (PLU), et non à toutes les communes.
J’en viens aux amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié : nous voulons conserver cette possibilité de dérogation que vous proposez de supprimer, mes chers collègues. Pour la petite histoire, je fais un bref rappel à l’attention de M. Laurent : en commission des affaires économiques, nous avons accepté l’amendement que vous aviez déposé pour faire en sorte que les zones de non-traitement (ZNT) intégrées dans les projets de lotissement ou de parking situés en bordure d’un terrain agricole ne soient pas prises sur ce dernier.
À l’heure actuelle, lorsqu’un lotissement est construit, l’aménageur ne prend pas en compte la ZNT : cette ZNT s’impute donc sur les terrains agricoles attenants à ce lotissement.
Le premier progrès que nous avons fait par rapport au texte initial, c’est d’écrire que désormais l’espace de transition ne sera plus à la charge des agriculteurs : dans les communes dotées d’un PLU, mais non dans les communes sous RNU (règlement national d’urbanisme) ni même dans les communes couvertes par une carte communale, lesquelles ne voient tout de même pas beaucoup de lotissements se construire, les aménageurs devront prendre en compte, au titre de la surface de leur projet de lotissement, la bande correspondant à la ZNT.
Cela étant, force est de constater qu’il y a des endroits où cela n’est pas possible. Nous proposons donc par ailleurs qu’une dérogation à cette mesure puisse être demandée : la ZNT pourra être établie sur l’emprise agricole, mais seulement après avis conforme de la CDPENAF.
Quant à ce que vous proposez maintenant, mes chers collègues, cela revient à vouloir le beurre, l’argent du beurre, la crémière et tout ce qui va avec ! Nous avons déjà énormément avancé, en commission, en inscrivant dans le texte l’obligation pour les lotisseurs de prendre en compte la ZNT.
Mme Anne-Sophie Romagny. Certes !
M. Daniel Laurent. C’est normal !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Comme je l’ai dit à propos des deux premiers amendements de cette discussion commune, il faut réserver cette obligation aux communes dotées d’un PLU et en exempter les petites communes, où se construisent peu de lotissements : l’idée n’est pas d’imposer ce genre de contraintes à chaque fois qu’une maison se construit quelque part !
Quant à revenir sur la dérogation prévue à l’alinéa 3, j’y suis défavorable, d’autant que ladite dérogation sera subordonnée, si vous votez l’amendement n° 954 de la commission, à l’avis conforme de la CDPENAF, ce qui verrouille quand même sérieusement la situation – s’il s’agit de construire sur des longueurs énormes en bordure de terrains véritablement agricoles, je ne suis pas sûr que la CDPENAF donne beaucoup d’avis conformes…
J’en viens à l’amendement n° 860 : le Gouvernement voudrait supprimer ce qu’on pourrait appeler la « dérogation parkings », c’est-à-dire exclure les parkings et autres « zones non résidentielles à très faible fréquentation » du champ de la dérogation.
A-t-on besoin de zones de non-traitement dans des espaces non résidentiels et peu fréquentés ? La commission est également défavorable à cet amendement.
En résumé, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis, sur les amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié, ainsi que sur l’amendement n° 860.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Bleunven, madame Loisier, l’adoption de vos amendements nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis reviendrait à imposer à tout projet, y compris déposé par un particulier pour une maison individuelle, d’intégrer l’espace de transition dont il est question, ce qui n’est pas envisageable. Un droit de délaissement serait de surcroît institué, dont le coût serait à la charge de l’aménageur. Or, beaucoup d’opérations se faisant sans aménageur, un tel dispositif serait peu opérant dans de nombreux cas.
Pour ces raisons, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, je vous demande de retirer vos amendements ; à défaut, j’y serai défavorable.
Madame Jacquemet, messieurs Pla et Laurent, je souhaite comme vous éviter que les espaces de transition créés par l’article 14 quinquies ne soient pris sur les zones dévolues à l’agriculture et supprimer la dérogation s’y rapportant. C’est pourquoi le Gouvernement propose, comme le rapporteur, un amendement visant à supprimer les termes : « de préférence ».
Je demande donc le retrait des amendements nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié au profit de celui du Gouvernement.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 952 du rapporteur, il vise à remplacer les termes « zone de transition » par les termes « espace de transition végétalisé ». Ces derniers mots étant ceux inscrits à la première phrase de l’alinéa 3, il est cohérent de maintenir ce vocable dans l’ensemble de l’article : avis favorable.
J’en viens aux amendements nos 953 et 954 du rapporteur : l’article 14 quinquies, qui détermine les modalités d’institution des espaces de transition, doit être amélioré sur plusieurs points.
Tout d’abord, l’espace de transition végétalisé doit être projeté en dehors des zones dévolues à l’agriculture : l’idée est bien de préserver les zones agricoles. L’amendement n° 953 du rapporteur, de même que l’amendement n° 860 du Gouvernement, vise à éviter les dérogations en supprimant les termes : « de préférence ».
J’insiste néanmoins sur un point à propos duquel, monsieur le rapporteur, nos analyses divergent.
Vous considérez que les zones non résidentielles, c’est-à-dire où l’on ne réside pas – ni la maison ni le jardin privatif –,…
M. Laurent Duplomb, rapporteur. … peu fréquentées !
Mme Annie Genevard, ministre. … peu fréquentées – est évoquée « la faiblesse des risques sanitaires induits par la brièveté de leur fréquentation » – peuvent être exemptées de la protection instaurée au présent article.
Le Gouvernement souhaite supprimer cette possibilité d’exemption de protection que vous voulez voir s’appliquer à des zones non résidentielles qui sont malgré tout attenantes aux zones résidentielles. Songez par exemple que les zones non résidentielles situées au sein d’un lotissement sont fréquentées par les promeneurs.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. La définition que nous avons inscrite à l’article 14 quinquies est claire : non résidentiel et peu fréquenté !
Mme Annie Genevard, ministre. Et végétalisé ! Ces zones sont peut-être moins fréquentées qu’une place de marché en centre-ville, je vous l’accorde, mais elles ne sont pas non plus exemptes de toute fréquentation. Or c’est bien de l’utilisation de produits phytosanitaires et des obligations de protection afférentes que l’on parle ici !
Voilà la différence entre l’amendement du Gouvernement et ceux de la commission, monsieur le rapporteur.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.
Mme Anne-Sophie Romagny. Madame la ministre, je suis l’auteure de la proposition de loi visant à protéger les terres agricoles et à créer des zones végétalisées intégrant des zones de non-traitement, qui est à l’origine de l’amendement adopté en commission auquel le rapporteur a fait référence.
Dans l’exposé des motifs de cette proposition de loi, j’évoque notamment les camps militaires, dont l’emprise est vaste et qui sont souvent situés à proximité de champs. On ne saurait à mon sens considérer la fréquentation d’un camp militaire comme suffisante pour empêcher le traitement phytosanitaire.
Les zones dont il est question ne sont pas des zones où l’on vit : on ne vit pas sur un parking, sauf exception liée, malheureusement, à des circonstances sociales bien particulières.
Un parking, a priori, on n’y vit pas, on n’y dort pas, on n’y mange pas ; une zone militaire, c’est pareil…
Madame la ministre, vous avez parlé des parcs et des jardins pour enfants : on peut en effet se poser la question pour ce cas d’espèce.
Mais on voit bien comment les choses se passent en milieu rural : quand le fil à linge est sorti, l’agriculteur vient vous voir avant de traiter ou de faucher ! C’est le bon sens qui prévaut dans ce genre de situations : si des gens se trouvent sur la zone de traitement, les agriculteurs font attention, on l’imagine assez aisément.
En tout état de cause, on ne peut imputer les zones de non-traitement sur des espaces où l’on ne réside pas ! Ce sont bien les espaces résidentiels qui doivent faire l’objet d’une protection spécifique.
Je ne suis pas favorable à votre amendement, madame la ministre.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Très bien ! Votons !
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Je constate qu’en définitive l’usage des phytosanitaires complexifie terriblement notre droit ! (Sourires.) Il suffirait de ne pas en utiliser pour ne pas avoir besoin de telles zones de transition.
Ces zones, je le rappelle, sont perdues pour la production agricole, ce qui est bien dommage. Dans la continuité de ce que mon groupe a proposé ce soir, je suggérerais volontiers que l’on plante des haies dans ces zones, ce qui permettrait au moins d’accroître la production de biomasse : ce ne serait déjà pas si mal !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. M. Salmon ne croit pas si bien dire : c’est comme ça que ça va finir !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Ce sont les « zones attenantes aux bâtiments habités » qui sont concernées : tels sont les termes exacts inscrits à l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sans vouloir forcer le trait, mais pour la petite plaisanterie du soir, je me permets une remarque supplémentaire.
Si, comme nous sommes en train de le faire à juste titre pour protéger les terrains agricoles, on intègre les 5 ou 10 mètres de zone de non-traitement au sein du projet de lotissement, alors, s’agissant d’une distance de sécurité – vous me l’accorderez –, cette surface non habitable sera retranchée du lot qui sera vendu.
Mme Anne-Catherine Loisier. On fera une haie !
M. Laurent Duplomb, rapporteur. Le coût du projet s’en trouvera accru, puisque, par définition, ce périmètre de 5 à 10 mètres autour du lotissement ne sera pas vendu. Comment finira-t-il, à votre avis ? En haie ! Et tous les riverains finiront par dire qu’ils n’en veulent plus, de cette haie, car elle leur bouche la vue !
C’est exactement ce qui se passera : comme tout terrain qui n’est pas entretenu, faute d’être fauché régulièrement, ce périmètre deviendra une haie. Et, dans une dizaine ou une quinzaine d’années, ceux qui siégeront alors dans cet hémicycle seront de nouveau saisis du problème : comment et par quels moyens supprimer les haies qui cachent la vue des riverains ? Comment redonner de l’air aux lotissements qui auront vu pousser tout autour une multitude de haies ? C’est sans fin, et tant mieux : c’est la joie du travail parlementaire !
M. Yves Bleunven. Je retire l’amendement n° 263 rectifié bis, monsieur le président !
Mme Anne-Catherine Loisier. Et moi l’amendement n° 582 rectifié bis !
M. le président. Les amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis sont retirés.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)