Sommaire

Présidence de M. Didier Mandelli

Secrétaires :

M. Jean-Michel Arnaud, Mme Nicole Bonnefoy.

1. Procès-verbal

2. Questions orales

stérilisation des chats errants

Question n° 213 de Mme Elsa Schalck. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

interdiction du flumioxazine en france, l’agriculture française de nouveau pénalisée

Question n° 274 de M. Christian Klinger. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Christian Klinger.

stratégie pour l’accélération et la massification des innovations culturales agroécologiques

Question n° 143 de M. Lucien Stanzione. – Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

augmentation des délais de reversement de la taxe d’aménagement aux communes et epci

Question n° 207 de M. Daniel Fargeot. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme.

difficultés rencontrées par les entreprises de taxis

Question n° 182 de M. Laurent Burgoa. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Laurent Burgoa.

graisses animales : priorité à l’alimentation pour animaux ou aux biocarburants ?

Question n° 291 de M. Henri Cabanel. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Henri Cabanel.

pertes financières des communes liées à l’extension des bases aériennes

Question n° 298 de M. Hugues Saury. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Hugues Saury.

action du gouvernement face à la nouvelle vague de désindustrialisation frappant le département de l’oise

Question n° 205 de M. Alexandre Ouizille. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Alexandre Ouizille.

obligation de possession d’un téléphone portable pour accéder à ses comptes bancaires en ligne

Question n° 254 de Mme Lauriane Josende. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; Mme Lauriane Josende.

maintien des tarifs réglementés de vente d’électricité

Question n° 277 de M. Fabien Genet. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Fabien Genet.

nécessité de flécher des financements des territoires d’industrie

Question n° 282 de M. Jean-Jacques Michau. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme.

minoration des populations lors des processus de recensement démographique effectués par l’insee

Question n° 263 de M. Jean-Raymond Hugonet. – Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du tourisme ; M. Jean-Raymond Hugonet.

permettre l’exploitation des ressources naturelles de guyane

Question n° 294 de M. Georges Patient. – M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer ; M. Georges Patient.

mise en œuvre de l’école inclusive

Question n° 010 de M. Philippe Grosvalet. – M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

concours de sixième année des étudiants en médecine

Question n° 055 de M. Stéphane Sautarel. – M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche ; M. Stéphane Sautarel.

MOYENS INSUFFISANTS ATTRIBUÉS EN MATIÈRE D’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE EN SEINE-ET-MARNE

Question n° 074 de Mme Marianne Margaté. – M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

accompagnants des élèves en situation de handicap et temps méridiens, publication des décrets

Question n° 278 de M. Cédric Vial. – M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche ; M. Cédric Vial.

accès à certains métiers pour les personnes atteintes de diabète

Question n° 031 de M. Pierre-Jean Verzelen. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

évolution de la démographie médicale

Question n° 050 de M. Hervé Maurey. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; M. Hervé Maurey.

convention assurance maladie - taxis

Question n° 252 de M. Hervé Reynaud. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; M. Hervé Reynaud.

quatrième année d’études en médecine générale

Question n° 265 de M. Olivier Rietmann. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; M. Olivier Rietmann.

pérennité de l’activité des centres de santé franciliens opérés par la croix-rouge française

Question n° 034 de Mme Anne Souyris. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

défaillances récurrentes d’accès aux soins dans la nièvre

Question n° 270 M. Jean-Jacques Lozach, en remplacement de M. Patrice Joly. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; M. Jean-Jacques Lozach.

améliorer l’accès aux soins psychologiques pour les jeunes

Question n° 289 de M. Cédric Chevalier. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

revalorisation du régime indemnitaire des directeurs par intérim d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

Question n° 218 de M. Jean-Baptiste Lemoyne. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; M. Jean-Baptiste Lemoyne.

oubliés du ségur

Question n° 299 de Mme Amel Gacquerre. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

décret d’application de la loi du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l’obtention du permis de conduire

Question n° 071 de M. Pascal Martin. – M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

défense de la filière pêche

Question n° 258 de Mme Annick Billon. – Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche ; Mme Annick Billon.

conséquences de l’action mois sans pêche

Question n° 275 de M. Max Brisson. – Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche ; M. Max Brisson.

nouvelle baisse de 50 % des aides au chauffage au bois domestique

Question n° 253 de M. Daniel Chasseing. – Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche ; M. Daniel Chasseing.

accroissement des demandes de certificat de nationalité française exigées par l’administration consulaire à l’étranger

Question n° 280 de Mme Hélène Conway-Mouret. – M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger.

arsenal juridique concernant les squatteurs

Question n° 198 de M. Jean-Marie Mizzon. – M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger ; M. Jean-Marie Mizzon.

effectifs du tribunal judiciaire de tarascon

Question n° 224 de Mme Mireille Jouve. – M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger ; Mme Mireille Jouve.

prolifération des armes fabriquées à l’aide d’imprimantes 3d

Question n° 039 de M. Christophe Chaillou. – Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement.

moyens pour la sécurité et la tranquillité publique en val-de-marne

Question n° 063 de M. Pascal Savoldelli. – Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement ; M. Pascal Savoldelli.

couteaux de poche traditionnels et port d’un outil utilitaire de la vie rurale

Question n° 251 de M. Jean-Claude Anglars. – Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement.

avenir de la police municipale

Question n° 243 de Mme Christine Herzog. – Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement.

création d’une brigade de sécurisation des transports en commun au mans

Question n° 276 de M. Thierry Cozic. – Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement.

projets de l’état en termes de desserte des aéroports régionaux et d’aménagement du territoire

Question n° 231 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement ; M. Christian Redon-Sarrazy.

augmentation des tarifs ferroviaires et évolution de l’offre de la sncf

Question n° 273 de M. Pierre-Antoine Levi. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement ; M. Pierre-Antoine Levi.

augmentation du taux de cotisation des collectivités locales

Question n° 149 de Mme Céline Brulin. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement ; Mme Céline Brulin.

chiffres et mode de calcul de l’artificialisation des sols pour le grand projet ferroviaire du sud-ouest

Question n° 179 de Mme Monique de Marco. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement.

dégradation des conditions de circulation sur la ligne paris-orléans-limoges-toulouse

Question n° 297 de M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement.

révision du barème maprimerénov’ sur le chauffage au bois

Question n° 283 de Mme Anne-Catherine Loisier. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement ; Mme Anne-Catherine Loisier.

caractère obligatoire d’un agent territorial spécialisé des écoles maternelles et des classes enfantines dans les classes qualifiées d’enfantines

Question n° 236 de M. Bernard Buis. – Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement ; M. Bernard Buis.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

3. Décès d’un ancien sénateur

4. Candidature aux fonctions de secrétaire du Sénat

5. Souveraineté alimentaire et agricole. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 10 (suite)

Amendement n° 610 rectifié bis de Mme Kristina Pluchet. – Rejet.

Amendements identiques nos 89 rectifié de M. Henri Cabanel et 605 rectifié bis de M. Alain Duffourg. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 934 rectifié de la commission. – Adoption.

Amendement n° 611 rectifié bis de Mme Kristina Pluchet. – Retrait.

Amendements identiques nos 70 rectifié de M. Pierre-Antoine Levi, 239 rectifié bis de Mme Marie-Lise Housseau, 648 rectifié bis de M. Pierre Jean Rochette et 752 de M. Gérard Lahellec. – Rejet des amendements nos 70 rectifié, 239 rectifié bis et 752, l’amendement n° 648 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendement n° 381 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 487 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendements identiques nos 71 rectifié bis de M. Pierre-Antoine Levi, 173 rectifié bis de Mme Laure Darcos, 197 rectifié ter de M. Fabien Genet, 277 rectifié ter de M. Yves Bleunven, 649 rectifié bis de M. Pierre Jean Rochette et 753 de M. Gérard Lahellec. – Retrait de l’amendement n° 753 ; rejet des amendements nos 71 rectifié bis, 197 rectifié ter et 277 rectifié ter, les amendements nos 173 rectifié bis et 649 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendement n° 245 rectifié bis de Mme Brigitte Devésa. – Adoption.

Amendement n° 937 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 604 rectifié bis de M. Alain Duffourg. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 10

Amendement n° 382 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 383 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 152 rectifié de M. Henri Cabanel. – Retrait.

Article 10 bis A

Amendements identiques nos 257 rectifié ter de M. Yves Bleunven et 843 du Gouvernement. – Adoption des deux amendements rédigeant l’article.

Article 10 bis

Amendements identiques nos 619 rectifié bis de M. Daniel Gremillet et 938 rectifié de la commission. – Adoption des deux amendements rédigeant l’article.

Amendement n° 450 de M. Christopher Szczurek. – Devenu sans objet.

Amendement n° 132 rectifié quater de M. Michel Canévet. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 72 rectifié de M. Pierre-Antoine Levi, 198 rectifié ter de M. Fabien Genet, 217 rectifié de M. Henri Cabanel, 240 rectifié bis de Mme Marie-Lise Housseau, 250 rectifié quater de Mme Brigitte Devésa et 650 rectifié bis de M. Pierre Jean Rochette. – Devenus sans objet.

Amendement n° 698 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Devenu sans objet.

Après l’article 10 bis

Amendement n° 700 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait.

Article 11

Mme Marion Canalès

Adoption de l’article.

Après l’article 11

Amendement n° 76 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.

Article 12 (suppression maintenue)

Amendement n° 7 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

L’article demeure supprimé.

Après l’article 12

Amendement n° 79 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Rejet.

Amendements identiques nos 525 rectifié de M. Michel Masset et 685 de M. Guillaume Gontard. – Rejet des deux amendements.

Article 12 bis

Amendement n° 916 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 258 rectifié bis de M. Yves Bleunven et 785 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait des deux amendements.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 12 bis

Amendement n° 1 rectifié ter de Mme Françoise Dumont. – Retrait.

Amendements identiques nos 154 rectifié de M. Hervé Gillé, 218 rectifié bis de Mme Anne-Catherine Loisier, 490 rectifié quater de M. Khalifé Khalifé et 588 rectifié de M. Bernard Buis. – Adoption des quatre amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 699 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 702 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 791 rectifié quinquies de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.

Article 12 ter

Amendements identiques nos 37 rectifié bis de Mme Nadège Havet, 50 rectifié quater de M. Vincent Louault et 845 du Gouvernement. – Adoption des trois amendements rédigeant l’article.

Amendement n° 36 rectifié bis de M. Sebastien Pla. – Devenu sans objet.

Rappel au règlement

M. Michel Masset

Après l’article 12 ter

Amendements identiques nos 155 rectifié de M. Hervé Gillé, 226 rectifié bis de M. Alain Duffourg, 492 rectifié quater de M. Khalifé Khalifé et 517 de M. Bernard Buis. – Rejet des quatre amendements.

Amendement n° 219 rectifié bis de Mme Anne-Catherine Loisier. – Rejet.

Article 13

M. Michaël Weber

Amendements identiques nos 384 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot, 543 rectifié de M. Philippe Grosvalet, 577 de M. Daniel Salmon et 711 rectifié de Mme Marie-Claude Varaillas. – Rejet, par scrutin public n° 189, des amendements nos 384 rectifié ter, 577 et 711 rectifié, l’amendement n° 543 rectifié n’étant pas soutenu.

Amendement n° 874 du Gouvernement

Rappel au règlement

M. Yannick Jadot

Amendement n° 874 du Gouvernement (suite)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet

Amendement n° 874 du Gouvernement (suite). – Rejet par scrutin public n° 190.

Amendements identiques nos 259 rectifié bis de M. Yves Bleunven et 794 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 967 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 968 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 542 rectifié de M. Philippe Grosvalet. – Rejet.

Amendement n° 969 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 260 rectifié bis de M. Yves Bleunven. – Devenu sans objet.

Amendement n° 970 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 386 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Adoption, par scrutin public n° 191 de l’article modifié.

Suspension et reprise de la séance

6. Nomination d’un secrétaire du Sénat

7. Souveraineté alimentaire et agricole. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Après l’article 13

Amendement n° 74 rectifié bis de M. Hervé Gillé. – Rejet.

Amendement n° 2 rectifié ter de M. Daniel Laurent. – Retrait.

Amendement n° 797 rectifié de Mme Anne-Catherine Loisier. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 284 rectifié bis de Mme Kristina Pluchet. – Retrait.

Article 13 bis AA (nouveau)

Amendement n° 846 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Article 13 bis A (supprimé)

Amendement n° 387 rectifié bis de M. Hervé Gillé. – Rejet.

L’article demeure supprimé.

Article 13 bis B (supprimé)

Après l’article 13 bis B

Amendement n° 34 rectifié de M. Daniel Fargeot. ; sous-amendements nos 962 du Gouvernement et 963 de M. Rachid Temal – Adoption du sous-amendement n° 962 rendant l’amendement n° 963 sans objet ; adoption de l’amendement modifié insérant un article additionnel.

Article 13 bis

Amendement n° 736 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet.

Amendement n° 388 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 13 bis

Amendement n° 790 rectifié quater de Mme Nathalie Goulet. – Rejet.

Article 13 ter

Amendement n° 847 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 655 rectifié bis de M. Lucien Stanzione. – Rejet.

Amendement n° 672 rectifié quater de M. Lucien Stanzione. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article 14

M. Vincent Louault

Amendements identiques nos 262 rectifié bis de M. Yves Bleunven, 533 rectifié sexies de M. Gilbert Favreau et 787 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Retrait de l’amendement n° 787 rectifié bis ; rejet des amendements nos 262 rectifié bis et 533 rectifié sexies.

Amendement n° 45 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Rejet.

Amendement n° 451 de M. Christopher Szczurek. – Rejet.

Amendement n° 940 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 550 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendement n° 760 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet.

Amendement n° 512 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Retrait.

Amendement n° 761 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet.

Amendement n° 523 de M. Bernard Buis. – Adoption.

Amendement n° 762 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Retrait.

Amendement n° 848 du Gouvernement. – Retrait.

Amendements identiques nos 578 de M. Daniel Salmon et 941 rectifié de la commission. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 942 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 551 de M. Daniel Salmon. – Devenu sans objet.

Amendement n° 849 du Gouvernement. – Retrait.

Amendement n° 872 du Gouvernement. – Adoption.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé

Amendements identiques nos 118 rectifié quater de M. Michel Canévet et 495 rectifié bis de M. Didier Mandelli. – Adoption de l’amendement n° 118 rectifié quater, l’amendement n° 495 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendement n° 552 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendement n° 943 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 4 rectifié ter de M. Guislain Cambier. – Retrait.

Amendement n° 765 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Retrait.

Amendement n° 850 du Gouvernement. – Rejet.

Amendements identiques nos 391 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot et 766 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 553 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendement n° 554 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendement n° 389 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 390 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 767 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet.

Amendement n° 944 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 945 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 393 rectifié ter de M. Michaël Weber. – Rejet.

Amendement n° 768 rectifié de M. Gérard Lahellec. – Rejet.

Amendement n° 394 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendements identiques nos 261 rectifié bis de M. Yves Bleunven, 534 rectifié sexies de M. Gilbert Favreau et 786 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Retrait des trois amendements.

Amendement n° 395 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 396 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 946 de la commission

Amendement n° 555 de M. Daniel Salmon. – Rectification.

Amendements identiques nos 946 de la commission et 555 rectifié de M. Daniel Salmon. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 947 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 556 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendement n° 513 rectifié bis de M. Jean-François Longeot et sous-amendement n° 948 de la commission. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 851 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 397 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 579 de M. Daniel Salmon. – Rejet.

Amendements identiques nos 408 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot et 558 de M. Daniel Salmon. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 856 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 949 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 535 rectifié quater de M. Gilbert Favreau. – Retrait.

Amendements identiques nos 392 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot et 557 de M. Daniel Salmon. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 852 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 853 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 854 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 855 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 857 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 951 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 950 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 398 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 14

Amendement n° 532 rectifié de M. Bernard Buis. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 580 rectifié de M. Christian Bilhac. – Retrait.

Amendement n° 442 rectifié ter de M. Franck Montaugé. – Rejet.

Article 14 bis

Amendement n° 494 rectifié de Mme Anne-Catherine Loisier. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 14 ter – Adoption.

Après l’article 14 ter

Amendement n° 200 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Retrait.

Amendement n° 46 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Retrait.

Amendement n° 47 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 199 rectifié quater de M. Vincent Louault. – Retrait.

Article 14 quater (nouveau)

M. Vincent Louault

M. Guillaume Gontard

Amendements identiques nos 488 de M. Daniel Salmon et 859 du Gouvernement. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 14 quinquies (nouveau)

Mme Anne-Sophie Romagny

Amendements identiques nos 263 rectifié bis de M. Yves Bleunven et 582 rectifié bis de Mme Anne-Catherine Loisier. – Retrait des deux amendements.

Amendements identiques nos 164 rectifié bis de M. Sebastien Pla, 447 rectifié ter de M. Daniel Laurent et 585 rectifié de M. Bernard Pillefer. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 952 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 860 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 953 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 954 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 695 de M. Guillaume Gontard. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 14 quinquies

Amendement n° 507 rectifié bis de Mme Audrey Bélim. – Rejet.

Renvoi de la suite de la discussion.

8. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Didier Mandelli

vice-président

Secrétaires :

M. Jean-Michel Arnaud,

Mme Nicole Bonnefoy.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

stérilisation des chats errants

M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 213, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Mme Elsa Schalck. Madame la ministre, la multiplication des chats errants est un véritable problème dans bon nombre de communes. Non seulement ces chats occasionnent des nuisances, mais ils posent également un problème sanitaire, car ils risquent de transmettre des maladies infectieuses. Il s’agit d’un sujet de préoccupation pour les maires, qui, en vertu de leur pouvoir de police, sont dans l’obligation d’agir contre la divagation des chats errants.

Face à ce phénomène, nous savons désormais que la stérilisation est la seule solution à la fois pérenne et efficace pour maîtriser les populations de chats, cette solution étant soutenue tant par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) que par les associations de protection des animaux.

Il va sans dire que les maires sont de plus en plus contraints de mettre en place des campagnes de stérilisation. Beaucoup d’entre eux indiquent se sentir seuls et démunis. Par ailleurs, la stérilisation est un procédé extrêmement cher, son coût oscillant entre 70 et 130 euros par acte, alors que les chats errants se comptent par dizaines, voire par centaines.

Pour soutenir les élus, nous avions adopté, dans la loi de finances pour 2024, une aide exceptionnelle de 3 millions d’euros pour financer la stérilisation de ces animaux.

En outre, l’ancien gouvernement avait lancé un appel à projets. Toutefois, le délai imparti était tellement court – il s’étalait du 2 septembre au 10 octobre – qu’il est passé presque inaperçu : c’est dommage ! De plus, cet appel à projets, qui imposait des conditions particulièrement restrictives et dont le cahier des charges comprenait pas moins de 81 pages, mentionnait un service de fourrière, ce qui, de fait, exclut de nombreuses petites communes, en particulier dans les territoires ruraux.

Alors que les noms des lauréats de cet appel à projets ont été dévoilés, quelles sont les perspectives envisageables pour aider les communes qui sont encore confrontées à cette difficulté ? Je pense en particulier aux communes du Bas-Rhin, dont aucune ne figure sur la liste des lauréats alors que certaines d’entre elles me font part de ce problème de manière récurrente.

D’après mes calculs, il resterait environ 50 000 euros de crédits. Comment pourraient-ils être utilisés, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. L’errance animale est un sujet de préoccupation majeure pour mon ministère, compte tenu des enjeux sanitaires et de protection animale qu’il soulève. Pour avoir été maire moi-même, je sais combien cette question est un problème pour nos communes, dont vous vous faites bien légitimement la porte-parole ce matin.

Pour rappel, la législation actuelle prévoit que les animaux errants doivent être conduits en fourrière sous l’autorité du maire, pourvu que celui-ci dispose d’un tel lieu. Or ce n’est pas toujours le cas.

Toutefois, il est également autorisé de capturer, d’identifier, de stériliser, puis de relâcher les chats vivant en groupe. Cette solution présente l’avantage d’éviter la recolonisation des sites. Elle implique néanmoins un suivi de la population relâchée et suppose effectivement un budget pour la capture, les actes vétérinaires et l’alimentation des animaux.

Son financement repose sur les mairies, avec l’appui éventuel d’associations de protection animale. C’est précisément le financement de ces opérations qui apparaît comme le premier frein à la mise en place du dispositif.

Vous l’avez rappelé, une enveloppe exceptionnelle de 3 millions d’euros a été prévue dans la loi de finances pour 2024 afin d’aider les collectivités territoriales à procéder à la stérilisation des chats errants. Dans ce cadre, le ministère de l’agriculture a ouvert un appel à projets pour soutenir les projets de gestion des chats errants conduits par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Cette subvention a été attribuée dans le cadre de l’expérimentation prévue par la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes. Ce texte prévoit en effet la mise en place de conventions entre l’État et les collectivités volontaires, afin d’améliorer la gestion et la prise en charge des populations de chats errants et d’articuler, dans cet objectif, les compétences et les moyens de chaque signataire.

Pour solliciter cette subvention, les communes pouvaient répondre à cet appel à projets du 2 septembre au 10 octobre. Pour l’heure, 164 communes ont bénéficié de cette subvention. Le bilan des actions menées dans ce cadre sera effectué après l’échéance des conventions financières engagées avec les lauréats.

Selon vous, madame la sénatrice, il resterait un reliquat de 50 000 euros. Croyez bien que je vais m’en préoccuper, afin que ces crédits puissent bénéficier à leurs destinataires. Je ne manquerai pas de vous tenir informée.

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir respecter le temps de parole de deux minutes qui vous est imparti.

interdiction du flumioxazine en france, l’agriculture française de nouveau pénalisée

M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, auteur de la question n° 274, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Christian Klinger. Ma question porte sur l’herbicide Pledge, qui contient la molécule flumioxazine, largement utilisé en viticulture et en arboriculture pour la maîtrise des adventices.

Malgré le renouvellement de l’autorisation de la flumioxazine par l’Union européenne jusqu’en 2037 et son autorisation continue dans d’autres pays européens, la France envisage d’interdire le Pledge dès 2025.

Cette décision suscite plusieurs inquiétudes et constitue une impasse technique, car il n’existe aucune solution de substitution viable. En outre, une telle interdiction est contraire à l’engagement du Gouvernement : pas d’interdiction sans solution.

Par ailleurs, cette interdiction créerait une distorsion de concurrence avec nos voisins européens, comme l’Espagne, la Grèce, l’Italie et le Portugal, qui continuent d’autoriser l’utilisation du Pledge. Même l’Allemagne, réticente à l’origine, a finalement décidé d’autoriser le produit.

Contre l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), qui a rendu une décision définitive en décembre 2024, la filière viticole plaide unanimement pour le maintien de ce produit.

Madame la ministre, allez-vous aller contre la décision de l’Anses et aligner la position française sur celle de nos partenaires européens ? Par ailleurs, comment pensez-vous résoudre l’impasse technique créée par cette interdiction, particulièrement dans les régions où l’alternative mécanique n’est pas viable ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. La flumioxazine est un herbicide dont l’approbation, assortie d’un certain nombre de réserves, a été renouvelée par la Commission européenne en 2022 pour quinze ans. En France, un seul produit de référence contenant cette substance, le Pledge, était autorisé pour désherber les vignes et les vergers.

En décembre dernier, l’Anses a répondu défavorablement à la demande de renouvellement de l’autorisation de ce produit.

Je ne méconnais pas les difficultés que le retrait du Pledge pose aux filières concernées, moi qui suis régulièrement sollicitée lorsque de telles impasses techniques surviennent. Néanmoins, l’Anses, dans ses conclusions, a souligné l’impossibilité d’exclure un risque inacceptable pour les eaux souterraines, les mammifères, les organismes aquatiques et les plantes non-cibles.

La Grèce, en tant qu’État membre rapporteur, a délivré l’autorisation pour les autres pays de l’Union européenne. La Commission européenne, qui a été alertée sur ce sujet, n’a pas pris position. Ce n’est pas une issue satisfaisante.

J’ai donc demandé à mes services d’identifier toutes les possibilités dont nous disposons pour renforcer l’harmonisation des autorisations. Une note des autorités françaises est sur le point d’être envoyée à Bruxelles sur ce sujet. C’est, à mon avis, la meilleure façon de répondre aux écarts existants entre les États membres.

Au demeurant, pour pallier le retrait de la flumioxazine, plusieurs substances actives peuvent être utilisées pour désherber les couverts végétaux, bien qu’elles soient également menacées à terme.

Face à la raréfaction des solutions chimiques, je me suis impliquée, dès le jour de ma nomination, pour relancer les travaux du comité des solutions. L’objectif est d’identifier les produits dont peuvent bénéficier les producteurs des autres États membres et qui pourraient faire l’objet d’une autorisation en France.

Ces travaux sont en cours et portent sur plus de 500 usages, dans 55 filières au total. Une centaine d’entre eux sont d’ores et déjà en cours d’examen par l’Anses.

Dans une perspective de plus long terme, il nous faut anticiper et préparer les solutions de désherbage non chimique. À cet égard, plusieurs projets ont été financés en 2024 au titre de la planification écologique, dans le cadre du plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada). Les résultats sont attendus dans les meilleurs délais.

En attendant, croyez bien que c’est un sujet sur lequel je resterai très vigilante.

M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.

M. Christian Klinger. L’Anses avait interrogé la Grèce, qui était chargée d’étudier la toxicologie de la flumioxazine. Il se trouve que c’est une agence européenne qui a rendu un avis positif sur la toxicologie de la molécule, répondant ainsi aux interrogations de l’Anses. Normalement, il ne devrait plus y avoir d’obstacle à la commercialisation et à la production de cette substance.

Madame la ministre, le monde viticole et arboricole compte sur vous pour prolonger l’autorisation du Pledge dans les mêmes délais que chez nos voisins européens.

stratégie pour l’accélération et la massification des innovations culturales agroécologiques

M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, auteur de la question n° 143, adressée à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Lucien Stanzione. Madame la ministre, jeudi 6 février, lors de l’examen en séance publique du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture, vous avez demandé le retrait de mon amendement visant à inscrire dans le texte l’accélération et la massification de la diffusion des innovations culturales agroécologiques.

Pour justifier votre position, vous avez indiqué que des ressources et des programmes étaient déjà mis en œuvre pour chercher des solutions de substitution, accompagner nos producteurs et les aider à adopter des pratiques agroécologiques.

Vous avez raison de soutenir ces initiatives, madame la ministre, mais je doute qu’elles soient suffisantes. Certes, des bases de données sur les solutions de substitution aux produits phytosanitaires existent. Toutefois, rien ne garantit que les agriculteurs s’en emparent, surtout à l’échelle de l’ensemble du territoire français.

Pour l’heure, seules 3 000 exploitations agricoles sont engagées dans le réseau Dephy. Comment donc généraliser les pratiques agroécologiques et les étendre aux 400 000 exploitations que compte notre pays ? Comment y parvenir si l’État n’a pas lui-même la volonté de déployer et de piloter les moyens nécessaires ?

Vous nous avez dit n’avoir aucune idée du budget qui pourrait être consacré au Parsada en 2025. Si nous ne mettons pas en place les stratégies et les moyens financiers suffisants, rien ne changera, du moins à l’échelle de nos 400 000 exploitations.

Or c’est précisément la diffusion et la généralisation des pratiques agroécologiques sur l’ensemble du territoire qui constituent l’enjeu majeur de cette transition. Les défis climatiques ne pourront pas être relevés par un engagement partiel ou des initiatives trop isolées.

Quels moyens comptez-vous donner à cette mobilisation ? Comment entendez-vous l’accélérer ? Comment assurerez-vous la diffusion des données et veillerez-vous à ce que les agriculteurs s’en emparent sur l’ensemble du territoire français ? En définitive, quelle stratégie le ministère a-t-il définie en ce domaine ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage pleinement votre préoccupation de faciliter l’émergence et la diffusion des solutions dans le cadre de projets de recherche expérimentale et déploie d’ores et déjà des actions d’une ampleur sans précédent.

Dans le cadre du programme national de développement agricole et rural (PNDAR) 2022-2027, les programmes portés par les chambres d’agriculture, les organismes nationaux à vocation agricole et rurale (Onvar) et les instituts techniques et de recherche visent également pleinement à atteindre ces objectifs.

Cette programmation constitue le cadre stratégique de développement et de massification que vous demandez, dont l’enseignement agricole est un partenaire incontournable.

La stratégie Écophyto 2030, publiée le 6 mai 2024, traite plus globalement de la sobriété d’usage en produits phytopharmaceutiques et de la massification des bonnes pratiques. Le Parsada, qui n’est autre que le premier axe de cette stratégie, a été lancé afin de mieux préparer le retrait potentiel de substances actives menacées à l’échelon européen en recherchant et en déployant des solutions de substitution chimiques et non chimiques.

L’objectif est de donner dès à présent de la visibilité aux agriculteurs, cette visibilité qui fait défaut aux viticulteurs sur le Pledge, dont nous venons de parler.

Le financement de 143 millions d’euros engagé en 2024 dans des projets de recherche sera reconduit en 2025, comme je l’ai souhaité.

Enfin, dans le cadre du plan France 2030, le Gouvernement a lancé l’appel à manifestation d’intérêt « Prise de risque amont aval et massification de pratiques visant à réduire l’usage des produits phytopharmaceutiques sur les exploitations agricoles » (Praam). Il vise à inciter au développement et à la mise en œuvre de systèmes de pratiques de protection des cultures reposant sur l’utilisation de combinatoires de leviers déjà éprouvés via l’accompagnement de projets ciblant des acteurs économiques à l’échelle territoriale.

En outre, des crédits alloués à la planification écologique ont également permis de renforcer le soutien de l’État aux innovations culturales et à leur massification.

augmentation des délais de reversement de la taxe d’aménagement aux communes et epci

M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, auteur de la question n° 207, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Daniel Fargeot. Depuis la réforme de septembre 2022, le reversement du produit de la taxe d’aménagement aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) est devenu plus long et imprévisible. Désormais entièrement géré par la direction générale des finances publiques (DGFiP), son calendrier est complexe et l’introduction d’un nouveau fait générateur perturbe les prévisions budgétaires et la gestion de trésorerie des collectivités.

Prenons l’exemple d’un projet immobilier de moins de 5 000 mètres carrés. Le premier paiement intervient 90 jours après l’achèvement des travaux, mais au sens fiscal, c’est-à-dire lorsque le propriétaire déclare le bien habitable, et non plus selon la logique urbanistique d’avant la réforme. Cette déclaration peut intervenir six ans après l’octroi du permis de construire.

Si le montant de la taxe dépasse 1 500 euros, un second paiement intervient six mois plus tard, soit neuf mois après la fin des travaux. Pour les grandes opérations, le versement s’étale sur trois échéances : un acompte de 50 % au neuvième mois, un versement de 35 % au dix-huitième mois et le solde à la fin des travaux.

Ce n’est pas tout : les délais de reversement du produit de la taxe d’aménagement aux collectivités ne sont pas définis. Dans certains cas, il faut attendre jusqu’à six mois entre l’encaissement par l’État et le reversement aux communes. Résultat : des tensions de trésorerie, l’incapacité pour l’ordonnateur à établir un budget primitif sincère, faute de pouvoir anticiper les recettes, et une capacité d’investissement réduite dans des projets structurants.

Avant la réforme, le calendrier était bien plus clair : 50 % de la taxe étaient appelés à douze mois et le solde était versé vingt-quatre mois après l’autorisation d’urbanisme. Aujourd’hui, le nouveau système complique la gestion pour les collectivités, sans même garantir de meilleurs délais.

Madame la ministre, d’autres solutions permettraient-elles de mieux concilier les intérêts des collectivités locales et les impératifs de l’administration centrale ? Un calendrier clair est-il envisageable ? Un retour à l’ancien système, plus lisible et prévisible pour les collectivités, serait-il une option ?

La simplification que nous recherchons tous ne doit pas se faire au détriment de l’efficacité globale. Les collectivités ont besoin de réponses précises, car, à ce rythme, elles risquent d’attendre le versement du produit de la taxe d’aménagement aussi longtemps que dure un mandat municipal.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Daniel Fargeot, le transfert de la gestion de la taxe d’aménagement à la DGFiP s’est accompagné du report de la date d’exigibilité de celle-ci. Cette date est dorénavant calée sur la réalisation définitive des travaux.

Un système d’acompte a été créé, permettant de neutraliser les effets sur les ressources des collectivités, notamment pour les grands projets dont la construction s’étale sur plusieurs années.

Le décalage de calendrier évite l’émission de taxes pour des projets abandonnés, qui induisaient auparavant une annulation de taxation a posteriori et le reversement des sommes indûment perçues.

Afin d’optimiser les délais, la liquidation de la taxe s’appuie sur la dématérialisation du processus déclaratif, la création d’un référentiel des délibérations des collectivités locales et l’automatisation du calcul des taxes d’urbanisme.

Des dysfonctionnements opérationnels ont pu être observés à l’ouverture de ces services. La dématérialisation a en effet suscité des interrogations de la part des usagers et a abouti à des erreurs, ralentissant ainsi la liquidation des taxes.

Afin d’éviter l’envoi de titres de paiement erronés, la DGFiP a mis en œuvre un système de vérification préalable, qui freine les envois et les paiements associés.

Un plan d’action pour améliorer la lisibilité du processus déclaratif a donc été élaboré et un parcours rénové est proposé depuis le 3 février dernier. En parallèle, la DGFiP a commencé à sécuriser les déclarations pour 2024 et à relancer les contribuables susceptibles de devoir payer leur taxe alors qu’ils n’ont pas encore rempli leur déclaration.

Bien que le reversement du produit des taxes d’urbanisme soit décalé, les collectivités bénéficieront bien de la recette générée par l’achèvement des constructions.

En 2024, il a été néanmoins constaté une diminution des montants collectés, liée à la baisse du nombre d’autorisations d’urbanisme, à la réduction de l’assiette taxable, aux changements de processus et aux paiements reportés à l’achèvement des travaux.

Enfin, la DGFiP a rencontré des difficultés de mise en œuvre en 2025. Il n’empêche que les redevables sont identifiés et que les taxes dues seront encaissées et reversées aux collectivités.

difficultés rencontrées par les entreprises de taxis

M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 182, transmise à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

M. Laurent Burgoa. Dans mon département, le Gard, les entreprises de taxis forment un véritable maillage permettant de répondre à certains besoins de santé. Malheureusement, elles se trouvent menacées par plusieurs facteurs, à commencer, bien évidemment, par la concurrence des entreprises de véhicules de transport avec chauffeur (VTC), en particulier celles qui opèrent sous le statut d’autoentrepreneur. C’est l’équilibre économique même des entreprises de taxis qui est mis en péril.

Par ailleurs, les négociations récentes sur une nouvelle convention nationale avec l’assurance maladie soulèvent de vives inquiétudes. En effet, compte tenu du contexte budgétaire de l’État, les marges des entreprises de taxis risquent d’être considérablement réduites, ce qui rend insoutenables les conditions imposées par l’assurance maladie pour le transport médical assis.

Nous déplorons le fait que la société Uber, condamnée à plusieurs reprises par la justice, échappe à ses obligations fiscales et sociales en France.

Bref, les entreprises de taxis sont particulièrement préoccupées. Dans ce contexte, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour garantir la pérennité de la profession face à la concurrence déloyale des VTC et aux contraintes budgétaires imposées par l’assurance maladie.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Laurent Burgoa, conscient des enjeux liés à la coexistence des taxis et des VTC, l’État veille à garantir une concurrence équilibrée, au moyen d’un encadrement strict tant des conditions d’accès que des modalités d’exercice.

Vous m’interrogez sur les négociations en cours avec la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) concernant le transport sanitaire assis. Le Gouvernement est conscient du rôle essentiel joué par les taxis, qui assurent une part significative du transport des patients vers leur lieu de rendez-vous médical.

Rappelons cependant que les dépenses liées au transport sanitaire ont atteint 6,8 milliards d’euros en 2023, soit une augmentation de 10,8 %, et qu’elles sont principalement financées par la sécurité sociale. Les taxis sont les premiers bénéficiaires de ces financements, représentant 41 % des dépenses de transports sanitaires en 2023, soit environ 2,8 milliards d’euros. À titre de comparaison, les ambulances en représentent 26 % et les véhicules sanitaires légers 13,5 %.

À moyen et long termes, ces dépenses devraient continuer d’augmenter en raison du vieillissement de la population, de la hausse du nombre de patients atteints d’affections de longue durée bénéficiant d’une prise en charge à 100 % et du report du transport en véhicule sanitaire léger vers les taxis.

Dans ce contexte, les discussions entre les organisations professionnelles et la Cnam doivent se poursuivre afin d’aboutir à un accord équilibré tenant compte des contraintes budgétaires actuelles et de la situation économique des artisans taxis.

Enfin, afin de soutenir la profession, la grille tarifaire applicable aux artisans taxis a été réévaluée dans un arrêté ministériel du 20 janvier dernier. Cette revalorisation, effective depuis le 1er février, constitue une mesure concrète pour préserver la pérennité de cette activité essentielle.

Le Gouvernement reste attentif aux difficultés du secteur et poursuivra le dialogue avec les professionnels pour trouver des solutions adaptées aux défis actuels.

M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour la réplique.

M. Laurent Burgoa. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Dans quelques jours, le Sénat examinera en nouvelle lecture le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ne doutez pas que, à cette occasion, les sénateurs, très attachés à la ruralité, essaieront de faire passer un message !

graisses animales : priorité à l’alimentation pour animaux ou aux biocarburants ?

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, auteur de la question n° 291, transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Henri Cabanel. Ma question porte sur l’utilisation des graisses animales de catégorie 3, qui jouent un rôle essentiel dans la fabrication des aliments pour animaux de compagnie depuis plus de soixante ans. Afin de respecter les objectifs de décarbonation du transport routier, maritime et aérien, les récents textes européens autorisent leur utilisation pour la fabrication de biocarburants. Le recours à ces graisses a même été encouragé en France par des incitations fiscales indirectes.

Une telle évolution a aggravé la pression sur une ressource déjà rare, car directement liée à la consommation de viande, laquelle a tendance à baisser. La Fédération des fabricants d’aliments pour chiens, chats, oiseaux et autres animaux familiers (Facco) nous alerte sur les conséquences de ce détournement : pénurie, augmentation des prix et impact sur les 7 500 emplois directs et les 25 000 emplois indirects.

Ce constat va à l’encontre d’un principe fondamental de l’Union européenne consistant à prioriser l’alimentation humaine et animale avant la valorisation énergétique.

Par ailleurs, ce détournement fragilise le secteur, qui produit un excédent commercial de plus de 1 milliard d’euros, soit plus de 20 % du total de l’excédent commercial des entreprises françaises de l’agroalimentaire. Ce n’est pas rien dans un contexte économique très tendu.

D’où cette question légitime : pourquoi l’impact environnemental des graisses animales est-il considéré comme nul dans le calcul de l’empreinte environnementale des biocarburants, alors qu’il est pris en compte pour les autres industries utilisant cette même matière première ?

Le Gouvernement souhaite-t-il protéger l’utilisation de ces graisses dans les aliments pour animaux domestiques ? Le cas échéant, quelles mesures entend-il prendre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Henri Cabanel, je profite de votre question pour rappeler l’excellence de la filière de l’alimentation animale ; c’est une industrie exportatrice dont nous sommes particulièrement fiers.

Vous interrogez le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie sur l’usage des graisses animales dans les biocarburants et l’alimentation animale. La transition vers des énergies bas-carbone est cruciale pour lutter contre le changement climatique et réduire notre dépendance aux énergies fossiles importées.

Les biocarburants jouent un rôle important dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports et permettent de réduire notre dépendance aux énergies fossiles. Pour limiter les éventuels conflits d’usage, en particulier en matière alimentaire, les réglementations française et européenne favorisent en particulier le développement des biocarburants avancés, issus notamment de résidus et de matières usagées.

Je précise que les carburants fabriqués à partir des graisses animales de catégorie 3 ne sont pas considérés comme des biocarburants avancés et ne sont donc pas particulièrement favorisés. Ces graisses sont aujourd’hui valorisées dans différentes filières, dont celle de la nourriture animale, aussi bien pour les animaux de compagnie que le bétail.

Aujourd’hui, 25 % des quantités disponibles sont valorisées dans la nourriture animale, les graisses restantes étant utilisées dans les biocarburants et le secteur de la chimie.

Je vous confirme que la nourriture animale fait bien partie des usages prioritaires des graisses animales. Nous l’avons même inscrit dans l’ordre de mérite des usages de la biomasse.

Cependant, le secteur de la nourriture animale ne saurait à lui seul valoriser l’ensemble de cette ressource. La valorisation en biocarburants représente une alternative pertinente permettant de valoriser les ressources non utilisées par l’alimentation animale.

La France continuera d’être vigilante sur le potentiel conflit d’usage lors des évolutions des politiques relatives aux biocarburants et aux carburants alternatifs, afin de conserver une industrie compétitive dans le secteur de l’alimentation animale.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.

M. Henri Cabanel. Je vous remercie de cette réponse, madame la ministre.

Je partage entièrement vos propos sur les biocarburants, mais, à un moment donné, il faudra faire un choix afin que les producteurs d’aliments pour animaux domestiques n’aient pas à augmenter leurs prix, sachant que la France est le pays qui compte le plus grand nombre de ces animaux.

pertes financières des communes liées à l’extension des bases aériennes

M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, auteur de la question n° 298, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Hugues Saury. J’attire l’attention du Gouvernement sur les pertes financières subies par certaines communes en raison de l’extension de terrains à vocation militaire sur des terres agricoles. C’est le cas des collectivités locales situées autour de la base aérienne 123 d’Orléans-Bricy, qui se trouve au nord-ouest de l’agglomération orléanaise.

Au préalable, rappelons que les communes de Boulay-les-Barres, de Bricy, de Coinces et de Saint-Péravy-la-Colombe accueillent bien volontiers la base et les militaires présents. Cependant, cette situation les place dans une position financière délicate, d’autant que leurs marges fiscales sont déjà extrêmement limitées.

Tout d’abord, la présence d’une base aérienne rend impossible, pour des raisons évidentes, l’implantation d’éoliennes, privant ainsi ces communes d’une source potentielle de revenus, notamment via l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer).

Ensuite, et surtout, cette extension se fait sur des terres agricoles qui, jusqu’à présent, produisaient des recettes pour les collectivités via la taxe foncière payée par les agriculteurs. Or les aménagements militaires étant exonérés de taxes, les ressources disparaissent entièrement. D’une façon générale, les communes ne tirent aucun bénéfice financier lié à la présence d’un terrain militaire.

Avec l’arrivée de l’A400M, l’activité de la base s’est intensifiée, ce qui a nécessité la construction de nouvelles infrastructures et l’adaptation des équipements. Actuellement, vingt-deux A400M y sont stationnés, mais ce nombre devrait être porté à trente-cinq d’ici à 2035. Cette évolution, bien qu’essentielle pour l’armée, accroît encore la perte de revenus pour les collectivités locales.

Face à ces difficultés, je souhaite savoir quelles mesures de compensation pourraient être envisagées pour soutenir ces communes, non seulement dans ce cas précis, mais aussi pour d’autres territoires confrontés à des situations similaires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Hugues Saury, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la situation fiscale des communes ayant des emprises militaires sur leur territoire. Vous mentionnez à cet égard le cas de la base aérienne d’Orléans-Bricy.

Comme vous le savez, les bâtiments et terrains qui appartiennent à l’État sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties lorsqu’ils sont affectés à un service public, ou sont d’utilité générale, et ne produisent aucun revenu. Ces conditions sont cumulatives et s’apprécient à l’égard du propriétaire, en l’occurrence l’État.

Sur ce fondement, les terrains ou bâtiments, les champs de manœuvre et les casernements utilisés par les armées pour le service public de la défense nationale sont exonérés de la taxe foncière.

Néanmoins, la présence sur le ressort géographique communal d’immeubles affectés à un service public ou d’utilité générale crée des externalités positives, notamment des retombées fiscales indirectes. Ainsi, la présence de logements accueillant des familles de militaires vient renforcer la population et donc l’activité économique.

Parce qu’elle compte des milliers de militaires et des dizaines de civils, la base militaire aérienne de Bricy constitue un vivier d’emploi et une source d’activité économique importante pour les communes alentour.

J’en viens à l’extension des bases aériennes sur des terres agricoles. Dès lors qu’ils font l’objet d’une amodiation autorisant par exemple la récolte des herbes ou le pacage des animaux, les terrains militaires sont considérés comme productifs de revenus et sont donc assujettis à la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Il ne paraît opportun ni pour l’État ni pour les collectivités locales d’instituer des mécanismes compensatoires spéciaux qui seraient la négation même du principe de libre administration.

L’État n’envisage donc pas l’instauration de mesure compensatoire au profit des communes accueillant une base aérienne, d’autant que comme je l’ai souligné, du fait de la présence de militaires sur le territoire, ces emprises soutiennent substantiellement l’activité économique des communes concernées.

M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, pour la réplique.

M. Hugues Saury. Le budget des communes rurales visées est très modeste, madame la ministre.

Le renforcement du lien armée-Nation, qui est souvent évoqué, commence par l’instauration de bonnes relations, notamment financières, avec les communes d’implantation des bases militaires. Il me paraît a contrario injuste que des communes disposant de faibles ressources financières pâtissent de l’implantation d’une base militaire, qu’elles accueillent pourtant bien volontiers.

action du gouvernement face à la nouvelle vague de désindustrialisation frappant le département de l’oise

M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, auteur de la question n° 205, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Alexandre Ouizille. Je ne m’habitue ni aux drames ni aux difficultés qu’ils emportent.

Dans l’Oise, à cette heure, se joue le drame que constitue la disparition d’un certain nombre de lignes et d’emplois industriels. Permettez-moi, mes chers collègues, d’avoir une pensée pour les salariés, employés, ouvriers et cadres qui en souffrent.

Au sein de l’entreprise Forvia, sous-traitant automobile, à Méru, un plan social est en cours. Chez Agco et Gima, producteurs de machineries agricoles, à Beauvais, un plan social est en cours. Près de chez moi, à Trosly-Breuil, au sein de l’entreprise de chimie Weylchem Lamotte, un plan social est en cours.

À Villers-Saint-Paul, un site dans lequel l’entreprise Chemours devait investir cette année 200 millions d’euros supplémentaires fermera finalement.

À Montataire, l’entreprise Akzo Nobel, qui compte parmi les numéros un mondiaux du revêtement et de la peinture, a un plan social en cours.

À Creil et à Verneuil-en-Halatte, l’entreprise Stokomani, dont la marque est bien connue, a également un plan social en cours.

Face à une telle situation, que peut le Gouvernement ? Cette question simple s’articule autour de trois axes, madame la ministre.

À quand une politique industrielle instaurant des clauses de conditionnalité territoriale, comme les Américains l’ont fait dans le cadre de l’Inflation Reduction Act ?

Quand rénoverons-nous enfin nos outils antidumping ? La demande déposée par l’entreprise Weylchem Lamotte il y a vingt-quatre mois est toujours en cours d’instruction. Comme me l’indiquait son dirigeant, en vingt-quatre mois, l’entreprise aurait eu le temps de fermer trois fois !

Enfin, quelle est la stratégie de l’État, qui doit valider les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) ? Comment compte-t-il protéger les salariés concernés ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Alexandre Ouizille, vous interpellez le Gouvernement sur la situation de l’industrie dans l’Oise.

La liste des entreprises citées recouvre des cas très différents, qui appellent des réponses spécifiques. Mes collègues Éric Lombard et Marc Ferracci y travaillent.

Dans votre question écrite, vous citez la cession à venir par Sanofi et CD&R d’Opella Healthcare International SAS, qui possède une usine à Amiens. Le Gouvernement s’est montré très actif dans le suivi de ce dossier. Il a obtenu un accord exigeant incluant l’engagement des cessionnaires à maintenir les sites de production, notamment le site de Compiègne, et à adopter une trajectoire de croissance de l’emploi en France. Quelque 70 millions d’euros d’investissement sur cinq ans, ainsi que des volumes de production minimaux pour les produits sensibles, notamment le Doliprane, sont également prévus.

Nous avons souhaité et obtenu l’entrée de Bpifrance au capital d’Opella afin de disposer d’un droit de regard sur la stratégie de l’entreprise et d’y faire valoir nos intérêts, au service de notre souveraineté.

La nature de cette opération et les engagements obtenus de la part de Sanofi et CD&R ne justifiaient donc pas un refus de l’opération via l’activation de la réglementation relative aux investissements étrangers en France (IEF).

Au-delà de ce cas particulier, l’ambition du Gouvernement est d’agir sans relâche pour la reconquête industrielle de nos territoires. Depuis 2017, nous avons fait des progrès considérables en matière d’attractivité, de compétitivité et d’emploi. Quelque 130 000 emplois ont ainsi été créés dans l’industrie et, en 2024, nous avons continué à ouvrir plus d’usines qu’il ne s’en est fermé, puisque nous avons enregistré 36 ouvertures nettes d’usines au seul premier semestre.

Cela ne doit pas cacher les difficultés rencontrées, notamment dans les secteurs de la chimie, de l’automobile et de l’acier, en faveur desquels nous déployons des plans d’action à l’échelon national, mais également européen.

Le rôle de l’État est d’accompagner les chefs d’entreprise en amont des difficultés pour trouver des solutions permettant de pérenniser les activités et l’emploi à chaque fois que cela est possible. Nous nous appuyons pour ce faire sur le comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri), sur la déléguée interministérielle aux restructurations des entreprises (Dire) et sur les commissaires aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises (CRP) qui accompagnent près de 4 000 entreprises par an.

Soyez assuré que le Gouvernement sera toujours à vos côtés pour agir au service de l’industrie de la Nation, monsieur le sénateur. Marc Ferracci reste à votre disposition pour compléter cette réponse.

M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour la réplique.

M. Alexandre Ouizille. Je vous remercie de ces précisions concernant Opella, madame la ministre.

J’ai préparé cette question il y a un certain temps déjà et, depuis, cela n’aura échappé à personne, des changements de gouvernement sont intervenus.

En dépit des éléments que vous citez, je constate que la question du socle social reste pendante. Les dossiers qui s’accumulent appellent une action bien plus forte, prenant en compte l’ensemble des difficultés rencontrées par ces entreprises.

obligation de possession d’un téléphone portable pour accéder à ses comptes bancaires en ligne

M. le président. La parole est à Mme Lauriane Josende, auteure de la question n° 254, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

Mme Lauriane Josende. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur une pratique bancaire de plus en plus répandue, qui rompt avec le principe d’égalité et crée une différence de traitement inacceptable entre les usagers.

En effet, si l’entrée en vigueur, le 13 janvier 2018, de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite directive Services de paiement 2 (DSP2), constitue une avancée certaine pour l’accès aux comptes bancaires et la sécurité des paiements par le biais de l’authentification numérique, elle a toutefois reporté sur les utilisateurs une contrainte de possession et de bonne utilisation des téléphones portables.

Bien que les dispositions de l’article L. 311-9 du code monétaire et financier prévoient notamment que « le client peut, immédiatement et à n’importe quel moment de la relation contractuelle, s’opposer par tout moyen à l’usage d’un support durable autre que le papier et demander sans frais à bénéficier d’un support papier », la mise en œuvre pratique de ce droit ne s’applique pas à la consultation des comptes bancaires.

De plus en plus de banques exigent que leur client ait un smartphone. De fait, l’obligation d’utiliser le téléphone portable pour accéder à son compte en banque crée une fracture numérique. Cette obligation, qui diffère drastiquement d’une banque à l’autre selon les services clients, pèse notamment sur les personnes âgées ou fragilisées, qui ne possèdent pas de téléphone et ne sont pas formées à leur utilisation.

Que compte faire le Gouvernement pour assurer un égal accès de tous les usagers aux services bancaires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Madame la sénatrice Lauriane Josende, le Gouvernement partage votre souhait que les consommateurs disposent d’un niveau d’information adéquat de la part des établissements bancaires dont ils sont clients et que les informations soient accessibles pour toutes les catégories de clients.

Dans ce contexte, un client doit donner son accord au passage d’un support papier à un support dématérialisé de ses documents ou avoir la possibilité de s’y opposer. La plupart des banques offrent du reste à leurs clients la possibilité d’utiliser les guichets automatiques pour la consultation de leur compte bancaire en utilisant uniquement leur carte de paiement et leur code confidentiel.

De manière générale, pour consulter leur compte bancaire et effectuer diverses démarches bancaires, les clients qui n’ont pas de smartphone disposent de plusieurs modalités d’accès à leur compte bancaire – en contactant leur conseiller bancaire par téléphone ou en utilisant un ordinateur classique. Ils peuvent également se rendre dans leur agence bancaire et utiliser un guichet automatique – qui se trouve le plus souvent dans le sas de l’agence – ou s’adresser à un conseiller au guichet.

L’égalité d’accès de nos concitoyens qui ne possèdent pas de smartphone à leurs informations bancaires est donc assurée, madame la sénatrice.

M. le président. La parole est à Mme Lauriane Josende, pour la réplique.

Mme Lauriane Josende. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Dans les zones rurales, l’égal accès aux comptes bancaires tel que vous le décrivez est toutefois bien souvent une illusion. En pratique, les agences sont loin, en particulier pour des personnes âgées qui rencontrent des difficultés pour se déplacer. La plupart du temps, les numéros d’appel des services clients, a fortiori des nouvelles banques qui ne proposent leurs services qu’en ligne, sont difficiles d’accès.

J’espère donc que vous prendrez tout de même des dispositions pour imposer aux établissements bancaires d’être plus diligents, notamment à l’égard des personnes âgées.

maintien des tarifs réglementés de vente d’électricité

M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, auteur de la question n° 277, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Fabien Genet. Ma question s’adressait au ministère chargé de l’industrie et de l’énergie, que je souhaite interroger sur le maintien des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE), madame la ministre.

Après la crise majeure des prix de l’énergie que nous avons traversée, une réforme du marché intérieur de l’électricité a été entreprise et adoptée par le Parlement européen au mois d’avril 2024. Cette réforme prévoit notamment un dispositif d’urgence en donnant aux États membres la possibilité de réguler les prix de l’électricité en cas de crise, mais cette régulation sera à la fois soumise à des conditions très restrictives et limitée dans le temps.

Étant toujours considérés comme une exception aux règles de fonctionnement de l’Union européenne, les tarifs réglementés de vente d’électricité appliqués par la France sont, de fait, menacés. La France est d’ailleurs tenue de remettre un rapport à la Commission européenne pour justifier de leur maintien.

La possibilité d’intervention des États membres est quant à elle susceptible de faire l’objet d’un réexamen de la Commission européenne d’ici au 31 décembre 2025. La Commission européenne pourrait à cette occasion déposer une proposition législative prévoyant l’extinction de ces tarifs réglementés.

Dans un contexte de forte hausse du coût de l’énergie, les tarifs réglementés de vente d’électricité, plus protecteurs que les tarifs libres, sont essentiels pour protéger les petites entreprises, les collectivités locales et les particuliers. À défaut, ceux-ci peineraient à poursuivre leur activité ou à boucler leur budget.

Êtes-vous en mesure de nous assurer qu’une position ferme sera défendue par le Gouvernement pour maintenir les TRVE, outil indispensable pour protéger les Français face au renchérissement du coût de l’énergie, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Fabien Genet, la France, comme tous les États membres, devait remettre à la Commission européenne un rapport sur les tarifs réglementés de vente (TRV).

En raison de la situation en fin d’année dernière, notre pays a remis ce rapport à la Commission européenne avec un léger décalage. Ce rapport s’appuie sur les évaluations menées par l’Autorité de la concurrence et par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Permettez-moi de résumer les arguments qui ont été soumis à la Commission européenne.

Les TRV permettent d’offrir de la visibilité aux consommateurs et d’assurer la stabilité des prix. La crise que nous avons traversée entre 2022 et 2023 l’a démontré : en sus du bouclier tarifaire que nous avons mis en place, les TRV ont permis d’amortir les variations de prix et de réduire l’impact sur nos concitoyens.

C’est peut-être moins connu, mais les TRV contribuent également à la sécurité d’approvisionnement. Le dispositif « heures pleines/heures creuses » permet en effet de concentrer notre consommation aux moments où elle a l’impact le plus faible sur notre système électrique.

Enfin – c’est un point que la Commission européenne étudiera attentivement –, les TRV ne constituent pas un frein à la concurrence sur le marché de détail. Les consommateurs sont libres de faire jouer la concurrence et d’opter pour des offres moins chères.

Je connais votre attachement aux tarifs réglementés de vente, qui constituent un point de repère pour nos concitoyens, monsieur le sénateur. Pour les raisons que j’ai évoquées, je vous confirme que notre pays soutiendra le maintien des tarifs réglementés de vente. Le Gouvernement est en effet convaincu que leur suppression emporterait des désagréments plus nombreux que les prétendus bénéfices qui en sont attendus.

M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.

M. Fabien Genet. Je vous remercie de cette réponse très claire, madame la ministre.

Je partage cette vision : les TRV permettent de ménager la visibilité des consommateurs sur les prix et d’assurer la stabilité de ces derniers, mais ils jouent également un rôle d’amortisseur et contribuent à renforcer la sécurité d’approvisionnement tout en préservant la libre concurrence.

Je ne doute pas que de nombreux collègues soutiendront cette sage position.

nécessité de flécher des financements des territoires d’industrie

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 282, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Jean-Jacques Michau. Lors du débat, organisé à la demande de la commission des affaires économiques, relatif au programme Territoires d’industrie, qui s’est tenu au Sénat le 14 janvier dernier, le ministre chargé de l’industrie et de l’énergie a affirmé son soutien au dispositif Territoires d’industrie et sa volonté de reconduire le dispositif Rebond industriel.

Je souhaite insister sur les besoins de financement de Territoires d’industrie. Dans un contexte où les ressources publiques sont de plus en plus limitées et alors que notre pays dispose enfin d’un budget pour 2025, il est en effet primordial que la plus grande partie possible des crédits alloués à la réindustrialisation cible les territoires d’industrie.

Ces espaces économiques, qui ont été sélectionnés par l’État au regard de leur potentiel industriel, devraient en effet bénéficier d’un traitement particulier, notamment en matière de soutien aux investissements structurants des PME industrielles.

Dans cette perspective, il paraît souhaitable de s’inspirer du dispositif Rebond industriel, qui a montré son efficacité, par lequel chaque territoire d’industrie s’est vu allouer un budget géré en concertation entre les services déconcentrés de l’État, l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et la gouvernance locale dudit territoire.

Pouvez-vous m’indiquer le montant des financements qui seront alloués par l’État aux territoires d’industrie afin de renforcer leur compétitivité et de soutenir leur développement, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Jean-Jacques Michau, je vous remercie de cette question adressée à mon collègue Marc Ferracci et de votre engagement en faveur du programme Territoires d’industrie.

Pour rappel, ce programme représente 2 millions d’emplois industriels et réunit, à date, 630 intercommunalités. J’en profite du reste pour saluer Sébastien Martin, président d’Intercommunalités de France, pour son implication dans la stratégie industrielle de la France.

Lancé en 2018 et confirmé dans sa phase 2 en 2023 par le Président de la République, ce dispositif cofinance notamment un réseau de chefs de projet chargé d’animer la gouvernance des projets en lien avec les élus et les industriels. Depuis 2023, 153 chefs de projet contribuent à ce dispositif qui est soutenu par l’État à hauteur de près de 7 millions d’euros.

Le programme s’appuie également sur l’ANCT, qui alloue un budget d’ingénierie d’un montant de 2 millions d’euros aux projets les plus complexes. L’an passé, cet appui a notamment permis d’accompagner la structuration d’une filière bois dans le Lot, la requalification de foncier à Sète ou la valorisation des métiers industriels dans huit territoires d’industrie.

La phase II du dispositif Territoires d’industrie, qui a été lancée, inclut la prise en compte de la transition écologique. Dans ce cadre, 60 millions d’euros de crédits du fonds vert ont abondé le programme, afin de soutenir des projets vertueux pour l’environnement tels que l’industrie biosourcée, l’économie circulaire, le réemploi ou les relocalisations permettant de réduire l’empreinte carbone d’une production. Plus de 160 dossiers d’investissement ayant été recensés, ces crédits seront le levier de près de 780 millions d’euros d’investissements privés et de la création de 2 600 emplois.

Comme vous pouvez le constater, ce programme permettant aux élus et aux industriels d’accompagner le développement industriel à l’échelon local porte ses fruits, monsieur le sénateur. Soyez assuré que l’État continuera de le soutenir afin de poursuivre la réindustrialisation de nos territoires.

minoration des populations lors des processus de recensement démographique effectués par l’insee

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, auteur de la question n° 263, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Jean-Raymond Hugonet. Le processus de recensement de la population est devenu un véritable sujet de préoccupation, madame la ministre.

Jusqu’en 2004, ce recensement était effectué tous les dix ans dans les communes de plus de 10 000 habitants. Depuis cette date, il est effectué chaque année sur un échantillon représentant 8 % du parc de logements, répertorié de façon exhaustive par les municipalités.

L’Insee, qui est chargé de ces opérations de recensement, définit la population légale en multipliant le nombre de logements de la commune par le nombre moyen d’occupants par logement.

Force est de constater que le compte n’y est pas.

Les analyses administratives de l’Insee sont en effet fortement éloignées des réalités de terrain, au détriment des communes. Dans le département dont je suis élu, l’Essonne, qui compte plus de 1,3 million d’habitants, de nombreux maires et élus de grandes villes constatent un écart significatif, notamment à Évry-Courcouronnes, préfecture de notre département chère à votre collègue Manuel Valls.

Alors que, d’un point de vue administratif, les populations municipales décroissent, le nombre de demandes de logements augmente, les programmes urbains sont en forte expansion et l’augmentation des inscriptions en crèche ou dans les écoles est parfaitement tangible.

Les conséquences financières de tels écarts sont lourdes, elles pèsent notamment sur le calcul du montant de la sacro-sainte dotation globale de fonctionnement (DGF) versée par l’État aux communes.

Quelle mesure le Gouvernement compte-t-il donc prendre afin de rendre plus réaliste le mode de calcul des populations démographiques municipales effectué par l’Insee pour les communes de plus de 10 000 habitants, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du tourisme. Monsieur le sénateur Jean-Raymond Hugonet, le recensement est mené en partenariat entre l’Insee et les communes. Dans les communes de plus de 10 000 habitants, la population est calculée par l’Insee uniquement à partir des informations recueillies par les communes : le nombre de logements issu du répertoire d’immeubles localisés et le nombre moyen de personnes par logement issu des enquêtes effectuées auprès des habitants.

Les communes sont donc à l’origine des informations utilisées pour le calcul des populations. Les nouvelles constructions sont par exemple bien prises en compte dans le répertoire susvisé, qui est mis à jour en continu à partir des permis de construire et que les communes peuvent amender à tout moment.

Le recensement de la population fait de plus l’objet d’une évaluation permanente par la Commission nationale d’évaluation du recensement de la population (Cnerp), présidée par le sénateur Éric Kerrouche.

Des travaux sont actuellement menés sous l’égide de cette commission afin de réduire à deux ans l’écart entre la date de publication des populations et leur date de référence. Afin de garantir l’égalité de traitement de toutes les communes, qui ne sont pas recensées la même année, la population publiée à la fin d’une année reflète actuellement la situation au milieu du cycle quinquennal de recensement, soit la situation effective trois ans auparavant. Ce décalage, qui emporte de nombreuses incompréhensions, constitue la principale difficulté soulevée par les élus locaux.

Se fondant sur les résultats d’une étude méthodologique réalisée par l’Insee en concertation avec les élus, la Cnerp vient d’approuver la réduction de ce décalage à deux ans, délai qui a été reconnu comme le meilleur équilibre entre « fraîcheur » et robustesse des données.

Sous réserve de la validation finale de l’Insee qui, conformément au code de bonnes pratiques de la statistique européenne, agit en toute indépendance, cette adaptation devrait être mise en œuvre en 2026.

Ces avancées conjointes et consensuelles, qui attestent la qualité du travail partenarial mené par l’administration et les élus locaux sur le sujet du recensement, répondent à vos demandes, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour la réplique.

M. Jean-Raymond Hugonet. Je vous remercie de votre réponse précise, madame la ministre.

Je sais que vous partagez ma préoccupation pour ce sujet, dont il faut bien avouer qu’il constitue un marronnier. Toutefois, quand je vous entends parler de 2026, je constate que l’on se hâte avec lenteur. Il serait temps de mettre le booster ! (Sourires.)

permettre l’exploitation des ressources naturelles de guyane

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 294, adressée à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer.

M. Georges Patient. Monsieur le ministre, alors que nos voisins, le Suriname et le Guyana, sont sur le point de connaître un essor économique fulgurant grâce à l’exploitation de leurs ressources, la Guyane française demeure dans un état de précarité et de pauvreté, non par manque de richesses, car elle dispose des mêmes ressources que ses voisins, mais parce que des décisions centralisées entravent toute dynamique de développement, maintenant la Guyane sous cloche.

La Guyane est en effet asphyxiée par des réglementations excessives et inadaptées, un accès au foncier verrouillé et des projets bloqués au nom d’une protection environnementale, qui, paradoxalement, favorise l’exploitation illégale et l’économie souterraine, qui n’ont que faire des critères écologiques.

Voilà qui a pour résultat une population privée d’emploi et de perspectives, un sentiment croissant d’injustice, incitant même à la révolte.

Comment en effet expliquer à la population guyanaise que son territoire souffre d’une économie moribonde, alors que celui-ci est riche de ressources au grand potentiel économique ?

Combien de temps encore la Guyane devra-t-elle subir ce traitement d’exception, alors qu’elle pourrait être un moteur économique pour tout le pays, monsieur le ministre ? Est-elle condamnée à être l’éternelle sacrifiée ?

Ne pensez-vous pas qu’il est temps de reconsidérer la position de l’État pour assurer le développement durable de la Guyane, dans le respect de ses écosystèmes, cela va sans dire, mais aussi de ses propres besoins de plus en plus pressants ?

Plus spécifiquement, n’envisagez-vous pas d’abroger pour la Guyane l’application de la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement, dite loi Hulot, que les Guyanais perçoivent comme un boulet colonial, leur territoire étant le seul territoire sud-américain à subir une telle mesure ?

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État.

M. Manuel Valls, ministre dÉtat, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, cher Georges Patient, en effet, la Guyane dispose de ressources naturelles exceptionnelles – j’insiste sur le pluriel – à la valorisation desquelles le Gouvernement est attaché. C’est un enjeu de développement économique, d’emploi et de souveraineté.

Comme vous le savez, l’État déploie en permanence en forêt plus de 300 militaires des forces armées de Guyane, ainsi que des forces de la gendarmerie nationale, pour préserver ces ressources naturelles, notamment pour permettre l’orpaillage légal.

En matière de simplification des normes, notre pays dispose d’importantes marges de progression. Le projet de loi de simplification de la vie économique adopté en première lecture par le Sénat comporte notamment une disposition relative à l’orpaillage – je sais que vous y êtes vigilant, monsieur le sénateur – prévoyant que l’autorisation d’exploitation vaille également autorisation d’occupation.

Au-delà de l’or, le sous-sol guyanais est susceptible de renfermer d’autres métaux précieux. C’est pourquoi une actualisation de l’inventaire national des ressources minérales sera lancée à la fin du premier trimestre.

Je reste à votre disposition pour discuter en détail des réalisations et des voies d’amélioration en matière agricole ou en faveur du secteur de la pêche, monsieur le sénateur.

J’en viens aux hydrocarbures, qui sont au cœur de votre question. En vertu de l’article L. 116-6 du code minier, la recherche de nouvelles exploitations n’est plus permise.

Le 13 décembre 2023, la COP28, organisée à Dubaï, s’est conclue par un appel, rejoint par la France, à « s’éloigner des combustibles fossiles ». Nous observons toutefois que les pays voisins de la Guyane – le Guyana, le Suriname et le Brésil – accélèrent pour leur part la prospection afin d’ouvrir de nouvelles exploitations.

Je demanderai donc à mes services d’étudier la conventionnalité, c’est-à-dire la compatibilité avec les traités internationaux et le droit communautaire d’éventuelles initiatives législatives d’origine parlementaire. En tout état de cause, j’estime qu’il nous faut ouvrir le débat, y compris sur la loi Hulot, pour toutes les raisons que vous avez évoquées, qu’elles aient trait à l’exploitation, à l’emploi ou au sentiment profond des citoyens de Guyane. J’y suis prêt et je compte sur votre engagement sur cette question, monsieur le sénateur.

Si les territoires ultramarins nous font rayonner, il est temps qu’ils rayonnent aussi par eux-mêmes au sein de territoires qui sont en train d’évoluer.

En tout état de cause, soyez assuré de ma disponibilité et de ma volonté d’ouvrir ce débat, monsieur le sénateur. Ce ne sera pas facile, mais, ensemble, je crois que nous y parviendrons.

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour la réplique.

M. Georges Patient. Je vous remercie de vos propos et je ne tarderai pas à vous rendre visite pour en discuter, monsieur le ministre.

mise en œuvre de l’école inclusive

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, auteur de la question n° 010, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Grosvalet. Il y a exactement vingt ans, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées introduisait le principe d’école inclusive, garantissant à toutes et tous une scolarisation dans un établissement spécialisé ou en milieu ordinaire.

Le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire est passé de 162 000 en 2004 à plus de 513 000 en 2024. Cette augmentation s’explique en partie, hélas ! par le manque de place dans les dispositifs spécialisés. Malgré le recrutement de plus de 4 000 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) depuis 2017, trop d’élèves se retrouvent sans solution, tandis que d’autres élèves sont insuffisamment accompagnés dans un milieu qui n’est pas adapté à leurs besoins, ce qui les expose à des situations de détresse pouvant engendrer de la violence contre eux-mêmes ou contre leurs camarades, comme cela s’est produit à l’école élémentaire Les Halbrans, à Pont-Saint-Martin, en Loire-Atlantique.

En 2023, le gouvernement d’alors a lancé un acte II de l’école inclusive, incluant la revalorisation du métier d’accompagnant, l’augmentation des effectifs d’AESH, ainsi que la création de pôles d’appui à la scolarité (PAS).

Les AESH continuent pourtant de déplorer leurs conditions de travail dégradées, certains devant accompagner jusqu’à neuf élèves par semaine dans le cadre d’un temps partiel subi.

Les parents d’élèves de l’école Les Halbrans constatent que « les conditions d’apprentissage pour tous, normalement garanties par l’État, ne sont actuellement pas remplies ». Ils demandent que leur soient donnés les moyens d’une école inclusive non subie.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour assurer une école réellement accessible et inclusive pour toutes et tous ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche, chargé de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Philippe Grosvalet, faire de l’école un lieu véritablement inclusif est un engagement fort du Gouvernement.

Depuis 2017, la création de 34 000 postes d’AESH a constitué un effort massif de transformation du système scolaire et de l’accompagnement scolaire.

Nous allons encore plus loin. Au mois de septembre 2025, 2 000 nouveaux AESH viendront renforcer nos effectifs. Par ailleurs, afin d’améliorer la reconnaissance des AESH et de les accompagner dans leur développement professionnel, nous avons réduit de six ans à trois ans le passage de CDD à CDI et mis en place un ensemble de revalorisations. C’est ainsi que nous agissons pour les AESH.

Nous mettons également en œuvre des solutions plus rapides et plus adaptées pour les familles. Depuis la rentrée 2024, nous expérimentons les pôles d’appui à la scolarité que vous avez évoqués, monsieur le sénateur. Dans quatre départements, en complément des équipes mobiles d’appui médico-social, les PAS sont déployés pour la scolarisation des élèves. Ces équipes interviennent en prévention et le plus en amont possible d’un risque de rupture de parcours.

Tout est donc mis en œuvre pour permettre un accompagnement plus fluide, des réponses plus rapides et une meilleure articulation entre l’éducation nationale et le secteur médico-social.

Cette année, nous irons plus loin en créant plus d’une centaine de nouveaux pôles d’appui à la scolarité sur tout le territoire. Chaque famille doit en effet pouvoir compter sur un accompagnement efficace, sans avoir à mener de bataille administrative et, si possible, sans attente interminable.

L’école pour tous n’est pas un slogan, monsieur le sénateur. C’est une exigence et un combat quotidien. Soyez assuré que la ministre d’État et le Gouvernement dans son ensemble sont déterminés à le mener.

concours de sixième année des étudiants en médecine

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 055, adressée à M. le ministre auprès de la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Stéphane Sautarel. Ces dernières années, plusieurs modifications ont été apportées aux études de médecine. Désormais, l’examen de la sixième année détermine en particulier le choix de la spécialité et le lieu d’études pour les quatre à six années à venir.

Depuis le mois de septembre 2023, ce concours est composé d’un écrit national, d’un parcours étudiant validé par tous, ainsi que d’un examen oral appelé examen clinique objectif structuré (Ecos). Cette dernière épreuve est validante – il faut avoir obtenu une note supérieure à dix pour pouvoir valider la sixième année d’études –, mais aussi classante.

Force est de constater que les modalités de ce concours national renforcent les déserts médicaux sur notre territoire.

En 2024, lors des épreuves de l’Ecos, plusieurs dysfonctionnements ont été révélés ; par ailleurs, les candidats ont souligné un manque d’équité. La perte d’un demi-point à cet examen pouvant faire perdre jusqu’à 1 000 places dans le classement national, cet oral ne paraît pas adapté.

Dans d’autres pays, cet oral est validant, il n’est pas validant et classant.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, si vous envisagez de rendre cet examen uniquement validant, plutôt que validant et classant. Envisagez-vous par ailleurs de remettre en cause le caractère national du concours qui favorise encore plus les déserts médicaux dans les territoires éloignés des centres hospitaliers universitaires (CHU) ?

Je prolonge ma question, si vous le permettez, monsieur le président. Depuis sa rédaction, il semble en effet que d’autres difficultés concernant les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) aient vu le jour, alors que nous avons urgemment besoin de médecins. Plusieurs candidats auraient été arbitrairement recalés en raison d’une suppression injustifiée de postes par le jury. Alors que nous appelons tous à la régularisation des Padhue, indispensables au fonctionnement de nos services de santé, l’administration joue une partition inverse et pour le moins curieuse.

Qu’en est-il, monsieur le ministre ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Sautarel, la réforme de l’accès à l’internat de médecine a en effet été mise en place pour la cohorte d’étudiants en sixième année de médecine en 2024. Elle a été construite en concertation avec les associations de représentants d’étudiants, en particulier. Son objectif était de permettre une évaluation non seulement sur des connaissances, mais aussi sur des compétences.

Le nouveau concours met ainsi en place des épreuves dématérialisées nationales, dites EDN, réalisées sur tablette, et des examens cliniques objectifs structurés, dits Ecos. Les Ecos évaluent la capacité des étudiants à agir en milieu professionnel à travers leur savoir-faire et leur savoir-être, compétences bien évidemment essentielles pour de futurs médecins. Les évaluations sont réalisées par deux examinateurs et sont standardisées grâce à une grille très précise limitant, autant que faire se peut, les risques de subjectivité. Comme pour les épreuves écrites, une très faible différence entre les notes obtenues influence significativement le classement final.

Compte tenu du caractère nouveau du concours, une épreuve-test pour les Ecos a été réalisée au mois de mars 2024. Cela a permis d’identifier quelques dysfonctionnements et des ajustements ont pu être apportés pour les épreuves réelles, qui se sont déroulées sans difficulté du 28 mai au 29 mai 2024, simultanément pour 8 000 étudiants dans trente-deux facultés de médecine.

Aujourd’hui, il n’y a pas de raison de remettre en question le caractère classant de cette épreuve clinique, car elle évalue des compétences différentes et complémentaires de celles des épreuves écrites. Par ailleurs, le caractère national des épreuves est indispensable pour garantir un classement équitable des étudiants à partir d’épreuves identiques. À l’issue de ce concours, une répartition par région et par spécialité est réalisée, qui tient notamment compte de la démographie médicale et des besoins en santé des territoires que vous avez très justement soulignés, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.

M. Stéphane Sautarel. Bien évidemment, monsieur le ministre, je ne remets pas en cause le principe même de ce concours. Reste que son caractère classant, en renforçant la dimension nationale de l’épreuve, est défavorable à un certain nombre de nos territoires.

MOYENS INSUFFISANTS ATTRIBUÉS EN MATIÈRE D’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE EN SEINE-ET-MARNE

M. le président. La parole est à Mme Marianne Margaté, auteure de la question n° 074, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Marianne Margaté. Monsieur le ministre, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les moyens insuffisants attribués à l’enseignement du premier degré en Seine-et-Marne.

Le taux d’encadrement des élèves y était pour la rentrée 2024 de 5,56 %, contre 6,07 % dans l’académie de Créteil et 6,03 % à l’échelon national. Dans ce département, le taux d’encadrement des élèves est donc le même, cette année, que celui qui prévalait à l’échelon national en 2018 !

Par ailleurs, en matière de création de postes dans les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased), il y a de graves insuffisances, tout comme en matière d’accompagnement des élèves en situation de handicap.

L’ensemble de ces faits, combiné à l’augmentation de la population départementale, a eu pour conséquence de rendre la rentrée particulièrement difficile. De nombreuses classes ont été fermées, dont quatorze de manière brutale, alors que la rentrée avait déjà eu lieu. Imaginez la colère et l’incompréhension des élus, des parents et des enseignants, sans parler du désarroi des élèves !

Le maintien annoncé des 4 000 postes d’enseignants, qui avaient été initialement supprimés, dans le projet de loi de finances pour 2025, doit se concrétiser sur le terrain. En effet, la baisse démographique doit être envisagée comme une chance qui permettra d’améliorer les conditions de travail du personnel et les conditions d’apprentissage des élèves.

Ce premier pas doit s’inscrire dans un engagement plus large en faveur du service public de l’éducation qui se traduira par un recrutement massif d’enseignants titulaires formés et par une revalorisation des conditions salariales. En effet, ce service public est le seul à même de combattre les inégalités sociales et de garantir une éducation laïque, égalitaire et gratuite.

Dans le département de la Seine-et-Marne plus spécifiquement, il faut un plan d’urgence qui relève a minima le taux d’encadrement des élèves au niveau de celui qui prévaut dans l’académie de Créteil et qui prévoit des moyens à la hauteur des besoins pour les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).

Les premières annonces concernant la carte scolaire sont inquiétantes. Elles prévoient moins de postes dans l’académie de Créteil et moins de postes pour le département de la Seine-et-Marne, puisqu’il y aurait 210 fermetures de classe, y compris en milieu rural, pour seulement 117 ouvertures.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour que la Seine-et-Marne ne soit plus la dernière de la classe ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche. Madame la sénatrice Margaté, dans le budget 2025, l’éducation nationale demeure la priorité du pays. J’en veux pour preuve l’annulation de la suppression de 4 000 postes d’enseignants. C’est un choix politique assumé, malgré le contexte budgétaire et la baisse du nombre d’élèves.

Pourquoi avons-nous fait ce choix ? Nous considérons – et c’est là un point d’accord avec vous – que la baisse démographique doit être une opportunité pour améliorer les conditions d’apprentissage des élèves.

Vous m’interrogez sur la situation spécifique de la Seine-et-Marne. Depuis 2017, votre département a vu ses effectifs scolaires diminuer de 2 514 élèves, soit environ 1,6 % des effectifs, avec pour conséquence directe des classes un peu moins chargées. Ainsi, en 2017, une classe seine-et-marnaise comptait en moyenne 24,2 élèves contre 23,1 élèves par classe aujourd’hui, et cette baisse continuera en 2025.

Pour ce qui est de l’école inclusive, madame la sénatrice, alors que nous célébrons les vingt ans de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, je mesure l’ampleur des attentes. Oui, nous avons progressé, mais nous devons aller encore plus loin.

C’est pourquoi nous prévoyons d’investir en créant dès la rentrée prochaine 2 000 postes d’AESH et en consacrant 200 millions d’euros supplémentaires pour renforcer l’inclusion scolaire. Ce sont des engagements concrets que nous prenons pour tous les enfants concernés dans tous les territoires.

Notre ambition est simple : elle est celle d’une école plus inclusive, plus proche des réalités du terrain et plus exigeante pour la réussite de tous.

accompagnants des élèves en situation de handicap et temps méridiens, publication des décrets

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, auteur de la question n° 278, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Cédric Vial. Monsieur le ministre, ma question porte sur l’application de la loi du 27 mai 2024 visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne.

En effet, malgré son adoption à l’unanimité, la mise en œuvre de la loi a été entravée, et ce pour deux raisons : d’une part, la complexité administrative excessive introduite par une note de service datant du mois de juillet dernier et rendant la procédure particulièrement complexe, d’autre part, le manque de moyens financiers affectés.

En effet, un financement à hauteur de 10 millions d’euros était nécessaire pour couvrir le dernier trimestre de 2024 et il faudra 31 millions d’euros pour couvrir l’ensemble de l’année 2025, selon l’estimation qui a été produite.

Depuis septembre 2024, j’ai à plusieurs reprises alerté les ministres de l’éducation nationale qui se sont succédé sur les graves problèmes qui subsistent quant à la mise en application de cette loi. J’ai notamment fait adopter un amendement visant à inscrire ce montant de 31 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2025 contre l’avis du Gouvernement. Ces crédits ont été supprimés en commission mixte paritaire, dans des conditions sur lesquelles nous pourrons revenir.

L’ancienne ministre de l’éducation nationale, Mme Anne Genetet, a annoncé le 2 décembre dernier la publication prochaine d’un décret visant à simplifier la procédure administrative instaurée par la note de service du 24 juillet. Ce décret, qui devait être publié au mois de décembre 2024, a été reporté compte tenu de la censure du Gouvernement au début du mois de janvier 2025, c’est-à-dire après la nomination du nouveau ministre de l’éducation nationale. Nous sommes le 11 février et il n’y a toujours pas de décret à l’horizon.

Monsieur le ministre, quand ce décret sera-t-il publié ? Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour s’assurer de la bonne application de la loi du 27 mai 2024 ? Les enfants en situation de handicap l’attendent.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Philippe Baptiste, ministre auprès de la ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche, chargé de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Vial, l’inclusion scolaire ne s’arrête pas aux portes de la classe. Elle doit être une réalité tout au long de la journée, y compris sur le temps méridien. C’est tout le sens de la loi dite Vial, puisque cette loi porte votre nom, entrée en vigueur à la rentrée 2024, qui confie désormais à l’État le financement de l’accompagnement des élèves en situation de handicap durant le temps méridien.

La mise en œuvre de cette réforme repose sur plusieurs priorités claires.

La première priorité, c’est d’adapter l’accompagnement aux besoins réels des élèves. L’État, par l’intermédiaire du recteur d’académie ou du directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen), est responsable de la décision et des modalités d’accompagnement. Chaque situation est étudiée en s’appuyant sur les recommandations des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ainsi que sur l’expertise des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial) et des pôles d’appui à la scolarité (PAS). Les familles sont associées à l’organisation de la temporalité de prise en charge de l’enfant.

La seconde priorité, c’est de simplifier et de sécuriser le dispositif. C’est pourquoi un décret a été présenté au comité social d’administration du ministère de l’éducation nationale (Csamen), le 21 janvier dernier, afin de clarifier les règles et de faciliter la mise en place de cet accompagnement sur la pause méridienne. L’État assumera pleinement ses obligations en tant qu’employeur, garantissant ainsi aux familles, lorsque cela est jugé nécessaire, une prise en charge stable et efficace.

Monsieur le sénateur, notre ambition est claire – et je crois qu’elle est partagée – : permettre à chaque élève en situation de handicap d’avoir un accompagnement adapté à ses besoins et à son degré d’autonomie, tout au long de la journée.

M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour la réplique.

M. Cédric Vial. Monsieur le ministre, vous venez d’illustrer parfaitement la différence entre « potentiellement » et « concrètement ». Potentiellement, vous avez raison ; concrètement, le dispositif ne fonctionne pas du tout comme vous le dites.

accès à certains métiers pour les personnes atteintes de diabète

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la question n° 031, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le ministre, les derniers chiffres nous indiquent que plus de 4 millions de Français souffrent de diabète. Les cas sont en constante augmentation et la prise en charge de la maladie représente un véritable enjeu de santé publique.

Parmi ces personnes, beaucoup se sont vu refuser l’accès à certaines professions, notamment celles de militaire, policier, hôtesse de l’air, steward ou contrôleur de la SNCF. Cette réglementation était justifiée, à l’époque, par des mesures de précaution exigées pour l’exercice de certains métiers. Malgré quelques assouplissements, notamment pour les réservistes de l’armée, il y a eu en réalité peu d’évolutions concrètes.

Aujourd’hui, ces restrictions apparaissent dépassées au regard des progrès de la médecine. En effet, il est désormais possible de surveiller sa glycémie grâce à des lecteurs qui permettent de prévenir un déséquilibre. Les risques sont alors beaucoup mieux maîtrisés.

La loi du 6 décembre 2021 relative aux restrictions d’accès à certaines professions en raison de l’état de santé prévoit la mise en place d’un comité interministériel d’évaluation. Les décrets nécessaires pour former sa composition ont été pris très tardivement. Ce comité doit, ou plutôt devait, rendre un rapport au Gouvernement et au Parlement tous les ans. À ce jour, aucun rapport n’a été publié. Les associations ont fait part de leur déception et l’avenir des personnes concernées demeure incertain.

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous nous communiquer ces rapports, du moins s’ils existent ? À défaut, pouvez-vous nous dire quand ils seront publiés et comment se poursuivront les travaux qui doivent permettre aux personnes victimes d’une pathologie chronique d’accéder à ces emplois ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Verzelen, au-delà du diabète, votre question englobe l’ensemble des patients qui sont porteurs d’une pathologie chronique et porte sur un enjeu de justice sociale et d’égalité des chances.

Comme vous l’avez rappelé, la loi du 6 décembre 2021 a institué un comité d’évaluation des textes encadrant le marché du travail. La composition de ce comité a été fixée par le décret du 22 avril 2022 et finalisée par l’arrêté du 29 juin 2022, de manière à pouvoir évaluer la réglementation en vigueur et à en apprécier la pertinence à la lumière des avancées médicales et scientifiques afin de formuler des propositions.

Ce comité, installé en 2022, a mené des travaux. Son premier rapport couvrant l’année 2022 a été transmis au Parlement. Si vous ne l’avez pas reçu, il faudra savoir pourquoi et je veillerai à ce qu’il vous soit renvoyé. Quant au rapport couvrant l’année 2023, il est en cours de transmission. Ces rapports permettent d’apprécier les avancées qui sont réalisées dans l’évaluation des conditions d’accès à certains métiers comme ceux des corps actifs, notamment de la police nationale.

L’évolution des connaissances sur le diabète et les progrès technologiques pour améliorer les moyens de surveillance de la glycémie ont été intégrés dans la réflexion du comité. Nous nous engageons à rendre publiques les recommandations qui découleront des travaux menés.

De plus, nous étudierons, en nous appuyant sur les rapports de 2022 et de 2023, la possibilité de modifier la réglementation en vigueur au titre de la justice sociale.

évolution de la démographie médicale

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 050, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, il y a tout juste douze ans, au mois de février 2013, Jean-Luc Fichet et moi-même présentions un rapport d’information intitulé Déserts médicaux : agir vraiment. Douze ans plus tard, aucun gouvernement n’ayant agi vraiment, ni même vraiment agi, et ce malgré nos interpellations régulières, la situation n’a fait qu’empirer.

L’étude réalisée par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), un service de votre ministère, montre que le desserrement du numerus clausus ne réglera en rien les problématiques de disparité de répartition des médecins sur le territoire. Cette même étude confirme que la situation ne sera réglée ni en 2030, ni en 2040, ni en 2050.

On ne peut donc qu’espérer que des mesures fortes soient enfin prises, un jour, par un gouvernement courageux et que soit mise en place une régulation à l’installation des médecins pour apporter des solutions concrètes à cette problématique. Rappelons que de telles mesures ont produit leur efficacité dans d’autres pays où elles ont été expérimentées, et même en France pour des professions de santé autres que les médecins.

Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, si le Gouvernement envisage enfin de changer de braquet et d’agir vraiment en prenant les mesures qui s’imposent pour résorber les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Maurey, je vous remercie de cette question qui montre que nous faisons tous le même constat, quelle que soit notre couleur politique : il n’y a pas eu d’anticipation en matière de démographie médicale.

Encore une fois, comme j’ai déjà souvent eu l’occasion de vous le dire, nous formons globalement le même nombre de médecins qu’en 1970, alors que notre pays compte 15 millions d’habitants de plus, que la population a vieilli et que, surtout – c’est un facteur qui n’a jamais été pris en compte –, le rapport au travail a complètement changé pour les médecins : ainsi, lorsque l’un d’entre eux part à la retraite, il faut l’équivalent de 2,3 postes de médecin pour le remplacer.

Un rapport de la Cour des comptes confirme ce que vous venez de dire, en indiquant que les résultats de la transformation du numerus clausus en numerus apertus sont en deçà des objectifs prévus.

La proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par la territorialisation et la formation que j’ai présentée, lorsque j’étais député, offre des pistes de solution. Elle a été adoptée à l’Assemblée nationale au mois de décembre 2023 et son examen sera – je l’espère – inscrit à l’ordre du jour des travaux du Sénat durant le premier semestre 2025. Elle vise à supprimer le numerus apertus et à former de nouveaux médecins en fonction des besoins du territoire, en tenant compte du capacitaire. Elle prévoit aussi que tous les étudiants français qui sont partis étudier à l’étranger, en Roumanie, en Belgique ou en Espagne pourront revenir faire leur deuxième cycle en France.

Nous souhaitons également la juste installation, dans de bonnes conditions, de la quatrième année de médecine générale dans nos territoires. Quelque 3 600 docteurs juniors sont concernés par cette mesure qui interviendra le 2 novembre 2026. Nous travaillons d’arrache-pied pour trouver des lieux de stage et pour préparer les décrets nécessaires pour cette installation.

Enfin, nous voulons améliorer l’évaluation des Padhue qui interviennent dans notre système hospitalier en prévoyant que celle-ci se fera sur site.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, je me réjouis que vous fassiez le même constat que moi. Il est vrai que vous étiez élu d’un département rural qui, comme le département de l’Eure, connaît des problèmes d’accès aux soins.

Malheureusement vous n’avez pas répondu au souhait que j’ai exprimé, à savoir que le Gouvernement puisse s’engager dans la mise en place de politiques plus audacieuses que celles qui ont eu cours jusqu’à présent. J’avoue que je n’avais guère d’espoir, puisque, malheureusement, depuis que je suis sénateur, quelles que soient les majorités, ou la non-majorité comme c’est le cas aujourd’hui, j’ai l’impression de prêcher dans le désert et, en l’espèce, dans le désert médical, sans mauvais jeu de mots.

J’ajoute, monsieur le ministre, que j’ai demandé à tous vos prédécesseurs de nous fournir un bilan des politiques incitatives mises en place pour faciliter l’accès aux soins. Je ne l’ai jamais obtenu. Pourriez-vous nous le transmettre ?

convention assurance maladie - taxis

M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, auteur de la question n° 252, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Hervé Reynaud. Monsieur le ministre, les chauffeurs de taxi conventionnés sont très mobilisés contre le projet de réforme de la convention-cadre qui a vocation à s’appliquer pour les cinq prochaines années entre la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) et les organisations syndicales représentatives. À Lyon, les 2 et 3 décembre dernier, près de 3 000 véhicules taxis se sont mobilisés.

Si, face à cette mobilisation, le statu quo devrait a priori perdurer jusqu’à la fin du mois de mai, la convention impose des conditions plus strictes pour ce qui est des tarifs et des critères de qualité de service. Le texte envisage en effet une tarification prévue à la baisse, une obligation de pratiquer le taxi partagé, ainsi que celle de respecter le trajet le moins onéreux possible, sous réserve que celui-ci reste compatible avec l’état de santé du malade.

Les taxis dans nos territoires vivent essentiellement du transport professionnalisé, qui représente une part très significative de leur chiffre d’affaires. C’est aussi le cas dans ma commune, pourtant un peu plus urbaine : plusieurs entreprises de taxis qui ont pignon sur rue, comme Taxi Faure, m’ont interpellé sur ce sujet. En effet, le nouveau modèle risque de mettre en péril ces entreprises et d’alourdir les difficultés des patients qui vivent dans des territoires ruraux et des villes moyennes.

Aussi, comment le Gouvernement entend-il prendre en compte la situation particulière des taxis qui ont une activité de transport sanitaire, notamment ceux qui travaillent en milieu peu dense ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la situation des taxis et je suis d’autant plus sensible à votre question que, lors de la manifestation du mois de décembre dernier, j’ai reçu leurs représentants en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Il est indispensable de prendre en compte la différenciation territoriale pour traiter ces sujets, parce que l’enjeu du transport sanitaire n’est pas le même dans une métropole qui bénéficie d’un métro, d’un tramway et de bus que dans un territoire rural comme celui de ma circonscription où l’accès aux soins nécessite forcément d’avoir recours au transport sanitaire.

Toutefois, ne nous y trompons pas, dans certains cas, le transport sanitaire est indispensable pour l’accès aux soins, quel que soit l’endroit, notamment quand un patient doit aller faire une chimiothérapie, une radiothérapie ou une séance de dialyse.

Pour garantir davantage d’efficience, l’article 17 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoit de revoir le conventionnement auquel tous les modes de transport sanitaire sont soumis. Il faudra donc nous accorder sur les éléments qui figureront dans cette convention.

Nous devrons pour cela fixer un degré d’efficience à atteindre, comme nous le faisons dans les autres secteurs, en veillant à responsabiliser les acteurs et à lutter contre les possibilités de fraude tout en garantissant le maintien du transport sanitaire. Il est hors de question de déstabiliser le réseau des taxis, mais cela n’empêche pas de développer une approche conventionnée.

Le transport partagé ne pose pas de problème si les patients peuvent le supporter, c’est-à-dire si leur état de santé n’est pas incompatible avec un voyage en compagnie d’une autre personne dans un habitacle clos, pour des questions d’immunité. En outre, si le délai d’attente n’est pas trop important, les entreprises pourront tout à fait organiser ce mode de transport.

Je resterai vigilant sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, pour la réplique.

M. Hervé Reynaud. J’entends parfaitement qu’il est nécessaire de trouver une certaine efficience, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, et de prévoir des mesures d’économie. Toutefois, il est important de préserver l’accès aux soins.

De plus, il faudra penser la réalité économique en fonction de la différence des situations selon les territoires. Ainsi, dans mon département, comme dans le vôtre, puisqu’ils sont voisins, les conditions diffèrent totalement de celles qui caractérisent des zones hyperdenses.

J’espère que nous pourrons faire preuve de discernement et que nous saurons entendre ces revendications au moment d’examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 en nouvelle lecture.

quatrième année d’études en médecine générale

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 265, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Olivier Rietmann. Monsieur le ministre, je ne vous apprends rien en vous disant que la médecine générale est essentielle à l’avenir de notre système de santé.

Pour que les jeunes médecins soient de plus en plus nombreux à choisir cette voie et à s’installer dans nos territoires, en 2022, une quatrième année au diplôme d’études spécialisées de médecine générale a été prévue par la loi. Cette période de consolidation doit notamment faciliter et sécuriser l’installation des jeunes médecins, en particulier dans les zones les moins dotées en professionnels de santé.

Vous le savez, cette mesure est attendue avec impatience. Pourtant, les décrets d’application dont la publication était initialement annoncée pour juin 2023 n’ont toujours pas été publiés. Le 15 mai 2024, à l’occasion d’une séance de questions orales, ici même, le ministre Valletoux avait pourtant assuré une publication d’ici à la fin de l’été 2024.

Alors que cette quatrième année doit entrer en vigueur dans le courant de l’année 2026, il est urgent de publier ces textes réglementaires. Leur absence freine la préparation des médecins généralistes encadrants, celle des futurs docteurs juniors, mais aussi celle des collectivités territoriales, qui doivent anticiper des enjeux majeurs tels que la rémunération, l’accueil, les lieux de consultation ou encore les logements.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire à quelle date ces décrets seront publiés ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Rietmann, je vous remercie de me donner l’occasion de revenir sur cette fameuse quatrième année de médecine générale.

Vous savez tous que, depuis que j’ai pris mes fonctions comme ministre de la santé, le 24 décembre dernier, je me suis saisi à bras-le-corps de ce sujet. J’ai très rapidement reçu les associations d’internes, que ce soit l’Intersyndicale nationale des internes (Isni) ou l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG) qui m’ont annoncé leur intention de lancer un mouvement de grève.

Comme vous l’avez dit, des engagements ont été pris par mes prédécesseurs, notamment au sujet de la publication de certains décrets. Je rappelle que je suis le quatrième ministre de la santé depuis le début de l’année 2024 ; or, sur des sujets sensibles comme celui-ci, il faut de la stabilité dans l’action gouvernementale.

Par conséquent, que dire de plus ? Je suis en lien avec l’ensemble des collectivités territoriales, avec les agences régionales de santé (ARS) et avec les facultés de médecine, par l’intermédiaire du collège national des enseignants de médecine générale, ainsi que des doyens, qui m’aident à trouver les meilleurs lieux de stage possible. Il nous en faut 3 600 pour le 2 novembre prochain.

J’ai bon espoir de pouvoir prendre les premiers décrets nécessaires, notamment grâce à l’adoption du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. Ainsi, tous les décrets qui peuvent être pris par voie réglementaire le seront au printemps prochain – j’en prends l’engagement devant vous. Quant à ceux qui nécessitent de passer par la voie législative, nous les prendrons dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ils permettront notamment de régler des problèmes de statut, de rémunération, de responsabilisation ou de participation à la permanence des soins, soit l’ensemble des questions que les internes nous ont soumises.

J’ai bon espoir que nous puissions trouver collectivement les solutions qui permettront d’améliorer l’offre de soins dans les territoires tout en améliorant la formation de nos docteurs juniors.

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour la réplique.

M. Olivier Rietmann. Monsieur le ministre, je ne doute absolument pas de votre engagement sur le sujet.

Je vous entendais dire ce matin sur une chaîne d’information qu’il fallait rétablir la confiance. Pour rétablir la confiance en politique, nous devons gagner en crédibilité en concrétisant les engagements que nous prenons et que nous votons, ici au Sénat ou à l’Assemblée nationale.

La loi prévoyant une quatrième année au diplôme d’études spécialisées de médecine générale a été votée en 2022. Les patients, les élus, les médecins, les jeunes futurs docteurs juniors attendent que les décrets soient pris pour que nous puissions avancer dans cette voie qui rétablira la présence médicale sur nos territoires.

Je vous remercie de votre engagement, monsieur le ministre : nous comptons sur vous.

pérennité de l’activité des centres de santé franciliens opérés par la croix-rouge française

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, auteure de la question n° 034, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

Mme Anne Souyris. Monsieur le ministre, tous les mois, nous découvrons avec effroi qu’un nouveau centre de santé risque de fermer. Ainsi, le Conseil de Paris débat cette semaine de l’avenir des centres de santé Réaumur, Stalingrad et de l’Institut mutualiste Montsouris.

La situation critique de ces trois établissements fait écho à ma question sur les centres de la Croix-Rouge française en Île-de-France. Ces centres, qui prennent en charge plus de 40 000 patients sans dépassement d’honoraires, ont fermé au mois de mai dernier après cessation de paiements.

Les maires concernés, les élus de Paris et les organisations syndicales se sont exprimés contre la cessation de ces centres à un acteur privé à but lucratif dont nous avons bien démontré au Sénat la tentative d’offre publique d’achat (OPA) sur notre système public de santé. En effet, comme vous le savez, la commission d’enquête sénatoriale sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France a été sans appel quant à ses conclusions sur le sujet.

Si la Ville de Paris peut accompagner dans une certaine mesure ces centres – sa capacité a des limites –, toutes les collectivités ne peuvent pas faire face à ce qui n’est rien d’autre qu’une catastrophe de santé publique.

Ainsi, ces risques de fermeture mettent en lumière l’insoutenabilité du modèle actuel des centres de santé, notamment pour financer les missions à destination des plus vulnérables, c’est-à-dire celles et ceux qui nécessitent davantage de soins. De facto, la tarification est antisociale.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour garantir la pérennité des centres de santé, en lien avec les collectivités territoriales ? Quand déploierez-vous un plan de sauvegarde de ces centres, monsieur le ministre ? Quand instaurerez-vous un financement au forfait ?

Monsieur le ministre, les patients des centres de santé Réaumur, Stalingrad, de la Croix-Rouge Haxo et Olympiades, ainsi que l’Institut mutualiste Montsouris attendent une réponse concrète. En ce jour des vingt ans de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, je pense particulièrement aux personnes handicapées qui étaient spécifiquement prises en charge aux Olympiades et ne le sont plus.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Madame la sénatrice Souyris, les centres de santé jouent en effet un rôle majeur dans l’accès aux soins : ils sont souvent situés dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), le tiers payant intégral y est généralement pratiqué et ils mènent des actions de prévention.

L’Île-de-France compte 1 093 centres de santé, 271 se trouvant à Paris, sur un total de 2 875 centres de santé dans l’ensemble du pays – vous connaissez ces chiffres mieux que moi. Comme vous le savez, l’agence régionale de santé (ARS) soutient depuis dix ans la création de tels centres : au total, 1,3 million d’euros leur ont été alloués en 2024, plus de 150 000 euros ayant été fléchés vers les centres parisiens.

Vous l’avez dit, ces centres sont confrontés à des difficultés structurelles : inflation, difficultés de recrutement, répercussions du Ségur de la santé… L’ARS Île-de-France est de plus en plus engagée à leurs côtés.

La fermeture des centres de la Croix-Rouge française Olympiades et Haxo a été actée le 30 juin dernier ; pour ma part, j’ai pris mes fonctions le 24 décembre. Cela prouve l’intérêt de maintenir une forme de stabilité dans la gouvernance de ce ministère.

J’ai demandé à l’ARS Île-de-France de coopérer avec l’assurance maladie pour accompagner ces centres de santé, notamment dans l’optique de prendre en charge les personnes en situation de handicap. Je leur ai également demandé d’identifier les centres à fort impact sur l’offre de soins, d’un point de vue quantitatif comme qualitatif, pour leur accorder un suivi rapproché.

Ainsi, madame la sénatrice, j’espère déployer un plan d’action au premier trimestre 2025 pour maintenir l’offre de soins dans les secteurs concernés. J’aurai l’occasion d’en reparler avec vous.

défaillances récurrentes d’accès aux soins dans la nièvre

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, en remplacement de M. Patrice Joly, auteur de la question n° 270, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le ministre, j’interviens en remplacement de Patrice Joly, sénateur de la Nièvre, mais la question de l’offre sanitaire vaut également pour la Creuse.

Dans la Nièvre, le système hospitalier – en particulier les services d’urgence – traverse depuis des mois des difficultés majeures, qui compromettent gravement la prise en charge des patients, mettant leur vie en danger. Les exemples de défaillances sont nombreux et se répètent sans cesse, mois après mois, année après année. Celles-ci donnent lieu à des situations de plus en plus dramatiques, dont certaines ont malheureusement conduit des Nivernais à perdre la vie.

Le dernier exemple est récent : il y a un mois, un homme de 82 ans a été transporté en urgence à l’hôpital de Cosne-Cours-sur-Loire pour une suspicion d’accident vasculaire cérébral (AVC), les urgences de Nevers ayant fermé et celles de Decize n’étant pas en mesure de l’accueillir. Alors que sa prise en charge, vitale, aurait dû être rapide, ce patient s’est heurté à un enchaînement de défaillances. Il ne doit son salut qu’à la ténacité de sa famille, qui lui a fait parcourir 70 kilomètres, soit plus d’une heure de route, pour atteindre l’hôpital de Moulins. Là, il a enfin été diagnostiqué d’un AVC, mais trop tard pour bénéficier d’un traitement thrombolytique.

À en croire les nombreux témoignages similaires, cette situation est, hélas ! loin d’être isolée et soulève de nombreuses interrogations quant à la capacité du système de santé à répondre aux besoins urgents des Nivernais et Nivernaises.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour améliorer l’accès aux soins d’urgence dans la Nièvre, en particulier dans les établissements hospitaliers de Cosne-Cours-sur-Loire, de Nevers, de Decize et de Clamecy et pour garantir que chaque patient bénéficie d’une prise en charge adaptée, rapide et sécurisante ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Lozach, la situation que vous décrivez au nom de Patrice Joly est inacceptable et dramatique.

Pour y répondre, il faut avant tout améliorer la régulation. Ainsi, le temps d’attente téléphonique doit être réduit, car, pour certaines pathologies, dont l’accident vasculaire cérébral, mais également l’infarctus du myocarde, le pronostic du patient est conditionné au délai de prise en charge.

Dans le cas que vous évoquez, nous avons saisi l’agence régionale de santé Bourgogne-Franche-Comté, qui a demandé aux établissements concernés, notamment le centre hospitalier de Nevers et le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon, de faire en sorte que la filière de prise en charge des accidents vasculaires cérébraux garantisse à chaque patient l’exécution d’une thrombolyse, voire d’une thrombectomie – il est parfois possible d’extraire le caillot directement dans le cerveau du patient –, dans un délai raisonnable.

Plus globalement, les mesures qu’il faut prendre sont des mesures de bon sens. Il convient avant tout de former beaucoup plus de soignants et de médecins que ne le permet le numerus apertus. Comme il faut dix ans pour former un médecin, dans l’immédiat, nous devons envoyer davantage de docteurs juniors dans les territoires pour réaliser les diagnostics au domicile du patient ou à l’hôpital ; nous devons recruter des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) pour faire tourner nos hôpitaux ; nous devons rapatrier nos compatriotes étudiant à l’étranger pour qu’ils réalisent leur internat en France.

Toutes ces mesures permettront de restaurer la confiance et d’améliorer les filières de prise en charge des patients.

Quoi qu’il en soit, je vous ferai parvenir, monsieur le sénateur, les renseignements que nous avons demandés à l’ARS Bourgogne-Franche-Comté.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le ministre, il est de notre devoir de ne pas nous résigner à ce genre de situations et d’agir, d’analyser en profondeur les défaillances de notre système de santé et de trouver des solutions durables.

Nietzsche estimait que faire une chose de la même manière et s’attendre à un autre résultat était une forme de lâcheté. Mes chers collègues, ne soyons pas lâches ! Il est temps de ne plus fermer les yeux sur la répétition incessante des mêmes erreurs. Nous devons agir sans délai pour apporter des changements concrets et garantir à chaque Nivernais un accès aux soins qui respecte sa dignité et sa vie.

améliorer l’accès aux soins psychologiques pour les jeunes

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, auteur de la question n° 289, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Cédric Chevalier. Monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur l’importance de pérenniser et de renforcer le dispositif MonSoutienPsy, qui joue un rôle essentiel dans l’accès aux soins psychologiques, notamment pour les jeunes, lesquels ont été durement touchés par les conséquences de la crise sanitaire.

Si ce dispositif a constitué une avancée majeure en facilitant l’accès à des psychologues conventionnés, plusieurs limites persistent : un financement insuffisant, une accessibilité inégale selon les territoires et des délais d’attente trop longs. Ces obstacles entravent une prise en charge rapide et efficace des personnes en détresse.

La pandémie de covid-19 a laissé des séquelles profondes sur la santé mentale de notre population, plus particulièrement chez les jeunes. L’isolement, les perturbations scolaires et les incertitudes professionnelles ont entraîné une augmentation préoccupante des troubles anxieux, dépressifs et comportementaux. Ainsi, de nombreuses études soulignent que les besoins en accompagnement psychologique n’ont jamais été aussi élevés.

Pourtant, les jeunes rencontrent encore de nombreuses difficultés pour bénéficier d’un suivi adapté. Le nombre insuffisant de professionnels disponibles et l’absence de structures adaptées dans certains territoires constituent des freins majeurs. Il est donc impératif d’augmenter les moyens alloués au dispositif, de revaloriser le tarif des consultations et d’améliorer le maillage territorial des professionnels de la santé mentale.

L’adolescence et le début de l’âge adulte sont des périodes charnières, marquées par des transitions scolaires, sociales et professionnelles qui peuvent être source de stress et d’angoisse. Un suivi psychologique accessible et adapté est donc indispensable pour prévenir les situations de détresse conduisant à l’échec scolaire, à l’isolement ou, dans les cas les plus graves, à des conduites à risque.

Au surplus, la question du bien-être mental des jeunes ne peut être dissociée des défis sociaux auxquels ils sont confrontés : précarité économique, pression scolaire, manque de perspectives professionnelles… Il est essentiel de combiner un renforcement de l’accompagnement psychologique et des politiques publiques favorisant l’insertion sociale pour garantir un avenir serein à la jeunesse de notre pays.

De même, il convient d’organiser davantage de campagnes de sensibilisation au sein des établissements scolaires et universitaires…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Cédric Chevalier. … afin de lutter contre la stigmatisation des troubles psychologiques et d’encourager les jeunes à demander de l’aide sans crainte.

Monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous pour pérenniser le dispositif MonSoutienPsy ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur, de manière générale, MonSoutienPsy a vocation à améliorer la prise en charge psychologique de nos concitoyens, particulièrement des plus jeunes d’entre eux. Je vous confirme que la crise sanitaire a confronté notre jeunesse à une situation inédite. À ce titre, je partage pleinement vos inquiétudes.

Je rappellerai quelques chiffres : depuis sa création au mois d’avril 2022, ce dispositif a permis à plus de 336 000 patients de bénéficier de 1,8 million de séances avec un psychologue prises en charge par l’assurance maladie. Pour augmenter le nombre de prises en charge au cours de cette grande année de la santé mentale, il faut, au risque de me répéter, puisque je l’ai déjà indiqué en répondant aux questions précédentes, former davantage.

Il faut tout d’abord former davantage de médecins en ouvrant des places en études de médecine. Parmi les étudiants, certains choisiront la psychiatrie comme spécialité, qui n’est pas dépourvue d’attractivité. Ensuite, il faut former davantage de professionnels paramédicaux, notamment des infirmiers, qui peuvent également se spécialiser en psychiatrie. Pour cela, nous travaillons avec les régions. Enfin, nous travaillons avec les universités pour former davantage de psychologues.

En ce qui concerne les revalorisations, je vous rappelle que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoit de supprimer l’adressage médical préalable : il sera désormais possible de consulter directement un psychologue sans passer par son médecin généraliste. Lorsque j’étais rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, j’ai toutefois demandé un rapport pour améliorer cette action.

Par ailleurs, nous augmentons le nombre de séances prises en charge, de huit à douze par année civile et nous revalorisons les tarifs des consultations, désormais fixés à 50 euros par séance.

Avec les élus locaux, nous renforcerons également le maillage territorial grâce aux professionnels médicaux et paramédicaux et les psychologues qui seront formés afin d’améliorer la prise en charge des patients.

Vous avez raison de dire qu’il faut déstigmatiser la consultation d’un psychologue, monsieur le sénateur.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre !

M. Yannick Neuder, ministre. Il est possible d’implanter des référents en santé mentale dans toute organisation professionnelle, scolaire ou autre.

revalorisation du régime indemnitaire des directeurs par intérim d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, auteur de la question n° 218, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Monsieur le ministre, ma question porte sur la nécessaire revalorisation du régime indemnitaire des directeurs par intérim d’Ehpad. Au gré de mes rencontres dans l’Yonne avec des élus et des directeurs d’établissement, singulièrement ceux du groupement des Ehpad publics de l’Yonne (Gepy), j’ai constaté qu’il convenait de se pencher sur ce sujet.

En effet, d’après le décret n° 2018-255 du 9 avril 2018, l’indemnité d’un directeur d’Ehpad assumant également les fonctions de directeur par intérim est de 300 euros à 415 euros mensuels. Or les responsabilités afférentes à la gestion d’un second établissement en plus de son établissement d’origine demandent du temps et une présence physique importants et supposent donc une meilleure rémunération. Cette indemnité mérite d’être au moins doublée.

De même, la situation des directeurs adjoints de ces établissements, qui épaulent les directeurs par intérim, doit être examinée.

Une telle revalorisation ne grèverait pas les finances des établissements concernés, puisque le montant de la prime est très nettement inférieur au salaire d’un directeur de plein exercice. Quel est le point de vue du Gouvernement sur cette question ?

Par ailleurs, je suis très sensible à ce que les directeurs d’établissement et les conseils d’administration travaillent en bonne intelligence. Une bonification à la main du président du conseil d’administration est-elle envisageable en complément de cette revalorisation ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question extrêmement précise sur le régime indemnitaire des directeurs par intérim d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Tout d’abord, permettez-moi de saluer le travail de ces directeurs, qu’ils soient intérimaires ou non, dans ces fonctions difficiles – et souvent décriées – auprès de nos aînés.

Cette filière fait en effet face à un manque d’attractivité, sans quoi il n’y aurait pas besoin de directeurs intérimaires. Il convient donc de rendre plus attractif le travail de directeur d’établissement. Je me suis d’ailleurs rendu à la rentrée des élèves directeurs à l’École des hautes études en santé publique (EHESP) pour montrer l’engagement du ministère sur leur formation.

J’en viens à la majoration significative que vous appelez de vos vœux.

L’application des coefficients multiplicateurs prévus par la réglementation représente une augmentation allant de 33 % à 41 % du montant de la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats, lorsque l’intérim est assuré dans un autre établissement.

Ces situations d’intérim sont malheureusement en hausse. On dénombrait 1 591 directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux en activité au 1er janvier 2023, contre 1 865 en 2013, soit une diminution de 14,7 %.

Il nous faut donc agir sur ces primes de fonctions et de résultats pour améliorer les conditions financières de ces missions intérimaires, mais surtout améliorer l’attractivité de cette filière.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour la réplique.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je prends cette question comme un point de départ et non un point d’arrivée.

Concrètement, vous ne m’avez pas fait part d’une quelconque volonté de modifier le décret fixant la rémunération de ces directeurs par intérim, monsieur le ministre. À l’avenir, il nous faudra y travailler pour rendre plus attractives ces missions d’intérim. Le chantier peut naturellement être plus vaste, en envisageant de revaloriser la mission de directeur d’Ehpad en général.

J’espère avoir l’occasion de travailler sur ce sujet très bientôt avec vous et vos services.

oubliés du ségur

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 299, transmise à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l’autonomie et du handicap.

Mme Amel Gacquerre. Monsieur le ministre, j’appelle l’attention du Gouvernement sur la situation des agents des filières administrative, technique et ouvrière et des agents des services hospitaliers qualifiés des établissements sociaux et médico-sociaux publics autonomes.

Comme vous le savez, le complément de traitement indiciaire (CTI) issu des accords du Ségur de la santé de 2020 est une mesure de revalorisation salariale ayant vocation à reconnaître l’engagement, le dévouement et l’utilité sociale de l’ensemble des professionnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS). Il leur donne droit à une prime de 189 euros net mensuels.

Initialement réservée aux seuls agents des hôpitaux et Ehpad, la prime dite Ségur a été progressivement étendue et rendue obligatoire à d’autres structures et personnels. À date, l’ensemble des catégories d’agents publics y sont éligibles au sein des centres hospitaliers et des Ehpad, ainsi qu’une majorité des personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux publics autonomes.

Toutefois, au sein de ces derniers, une exception subsiste : les agents des filières administrative, technique et ouvrière et les agents des services hospitaliers qualifiés n’en bénéficient pas. Cette inégalité de traitement crée une disparité injustifiée entre personnels selon leur établissement d’affectation, qui concernerait entre 2 000 et 5 000 agents.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour mettre fin à cette inégalité de traitement et garantir l’accès à la prime Ségur à tous les professionnels du secteur social et médico-social public autonome ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Madame la sénatrice Gacquerre, vous évoquez une nouvelle catégorie d’oubliés du Ségur de la santé.

Permettez-moi tout d’abord de rappeler que, dans le cadre du Ségur, l’État et les départements ont pris des décisions historiques en augmentant de 4 milliards d’euros les rémunérations des professionnels du secteur social et médico-social. Au total, près de 700 000 salariés ont bénéficié d’une revalorisation de 183 euros net mensuels – 192 euros net mensuels pour ceux du secteur public –, environ 500 000 au titre du Ségur et de la mission conduite par Michel Laforcade.

Il convient de souligner que, par l’article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 créant le complément de traitement indiciaire, le Parlement a souhaité que tous les personnels relevant des établissements sanitaires et des Ehpad de la fonction publique hospitalière bénéficient de la prime Ségur en reconnaissance de leur engagement dans la crise sanitaire.

À la suite des accords Laforcade, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a ensuite élargi le CTI aux personnels soignants, notamment ceux des établissements et services sociaux et médico-sociaux de la fonction publique hospitalière. Ce dispositif a également été étendu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 à tous les personnels, y compris administratifs et techniques, des ESSMS rattachés à un établissement sanitaire.

Toutefois, cette disposition n’a pas été retenue pour les personnels administratifs et techniques des ESSMS autonomes de la fonction publique hospitalière, qui sont principalement rattachés à des établissements publics départementaux ou communaux. Il s’agissait de garantir l’unicité des statuts des personnels relevant d’un même établissement hospitalier, tout en tenant compte des spécificités des métiers selon qu’ils s’exercent en milieu hospitalier ou sous l’autorité d’une collectivité territoriale.

Cette différence de traitement a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité adressée le 21 décembre 2023 par la Fédération hospitalière de France (FHF). Par sa décision n° 2023-1084 QPC du 21 mars 2024, …

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre !

M. Yannick Neuder, ministre. … le Conseil constitutionnel a considéré que cette distinction opérée par l’article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 était conforme à la Constitution.

décret d’application de la loi du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l’obtention du permis de conduire

M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, auteur de la question n° 071, transmise à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Pascal Martin. Monsieur le ministre, l’article 3 de la loi du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l’obtention du permis de conduire permet le financement par le compte personnel de formation (CPF) de « la préparation aux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d’un véhicule terrestre à moteur », y compris le permis de conduire moto.

Au cours de l’examen de la proposition de loi, le Gouvernement a présenté et fait adopter un amendement tendant à préciser que « les conditions et modalités d’éligibilité au compte personnel de formation de la préparation aux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d’un véhicule terrestre à moteur sont précisées par décret, après consultation des partenaires sociaux ».

Pourtant, le bruit court dans la presse et parmi les organisations professionnelles représentant les services de l’automobile et des mobilités que le Gouvernement envisagerait de restreindre la possibilité de faire financer le permis moto par le CPF.

En effet, le CPF ne pourrait être mobilisé que pour l’obtention d’un premier permis de conduire. Il serait alors impossible pour les citoyens déjà titulaires d’une catégorie du permis de conduire d’y recourir pour financer leur permis moto, notamment les candidats au permis A – moto – ayant déjà un permis B – voiture.

Ces restrictions seraient problématiques à plusieurs égards : d’une part, en raison de la hiérarchie des normes, une disposition prise par décret ne peut, en principe, contrevenir à une disposition législative clairement exprimée par le Parlement ; d’autre part, restreindre le financement du permis moto via le CPF compromettrait les professionnels de nombreux secteurs pour lesquels la mobilité est essentielle, notamment la livraison, les soins à domicile et divers métiers commerciaux.

Les organisations professionnelles représentant les services de l’automobile et de la mobilité ont donc proposé deux autres voies : soit limiter le recours au CPF au financement d’un seul permis léger, quand bien même le titulaire disposerait par exemple déjà d’un permis B, soit instaurer un délai après l’obtention d’un premier permis financé par le CPF durant lequel il ne serait pas permis d’utiliser ses droits pour financer un second permis de conduire.

Monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir m’indiquer les suites que vous entendez réserver à ces propositions.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur, les droits individuels au compte personnel formation sont acquis chaque année à hauteur de 500 euros par an ou de 800 euros par an pour les travailleurs peu ou pas qualifiés. Le CPF est un levier essentiel pour acquérir des compétences nouvelles.

Tous les permis sont éligibles au CPF depuis la loi du 21 juin 2023 et le décret n° 2024-444 du 17 mai 2024 qui en porte application. Les partenaires sociaux ont été dûment consultés en amont de l’encadrement. La Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) s’est d’ailleurs tenue le 17 avril 2024.

Par ce décret, les droits CPF du titulaire peuvent être mobilisés pour une préparation à un permis véhicule léger uniquement lorsque le titulaire ne dispose pas déjà d’un permis véhicule léger en cours de validité. Il a été considéré que la valeur ajoutée pour se rapprocher de l’emploi d’un second permis léger était assez faible.

Par ailleurs, toute personne née après 1988 peut conduire une moto ne dépassant pas les 50 centimètres cubes, sans avoir besoin de passer le permis. Ce permis AM est obtenu au collège ou au lycée.

De plus, le décret ne modifie pas les conditions d’obtention de l’équivalent du permis A1 pour les titulaires d’un permis B. Pour conduire des motos jusqu’à 125 centimètres cubes, ces derniers doivent toujours suivre une formation de sept heures, qui n’est pas éligible au CPF, car non certifiante.

Durant les six premiers mois de 2024, les permis moto A1 ont représenté moins de 3 % des permis moto financés par les droits CPF des titulaires. La quasi-totalité des permis moto financés via le CPF concernent des motos de grosses cylindrées – jusqu’à 35 kilowatts –, par exemple les Harley-Davidson.

En outre, les permis poids lourd et remorque restent éligibles au CPF et finançables avec les droits des titulaires.

défense de la filière pêche

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 258, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Annick Billon. Madame la ministre, à l’heure où je vous parle, de nombreux pêcheurs sont empêchés de travailler dans le golfe de Gascogne, et ce jusqu’au 20 février.

Dans le sillage des bateaux qui restent au port – dans l’absence de sillage, devrais-je dire –, toute une filière est affectée : pêcheurs, mareyeurs, criée… Lorsqu’un pêcheur reste à quai, ce sont trois emplois indirects qui prennent l’eau et l’addition est salée.

Certes, votre ministère a annoncé une indemnisation de 20 millions d’euros pour la filière pêche et son aval, mais, comme cela a pu être constaté en 2024, il s’agit d’une réponse à court terme, alors qu’une interdiction de pêche a des effets sur le long terme. En effet, les importations palliant l’absence de pêche risquent de perdurer et de durcir les négociations commerciales avec les distributeurs. Du fait de l’absence de débarquement, les personnels des criées s’orientent vers d’autres métiers.

L’indemnisation colmate une fuite, mais la filière pêche continue de tanguer. Madame la ministre, comment le Gouvernement – désormais dépourvu de ministère de la pêche, celle-ci étant fondue dans l’écologie quand l’agriculture est associée à la souveraineté alimentaire… – entend-il, en cette année de la mer, mettre en place les outils nécessaires à la défense de la filière pêche ? Quelles actions entend-il mener pour s’opposer à de nouvelles fermetures du golfe de Gascogne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice Billon, le Président de la République et le Premier ministre m’ont confié ce nouveau portefeuille dans un esprit de cohérence avec nos ambitions en matière écologique, à la veille de la tenue en France de la troisième conférence des Nations unies sur l’océan, l’Unoc 3.

Cette décision a été prise pour deux raisons.

D’une part, mon portefeuille regroupe tous les leviers pour agir contre le dérèglement climatique. Ainsi, il intègre non seulement les leviers de décarbonation, mais aussi les deux grands puits de carbone que constituent la forêt et l’océan. C’est la première fois que mon ministère intègre les questions de pêche, mais c’est nécessaire pour atteindre nos objectifs.

D’autre part, l’écologie est devenue un enjeu de souveraineté. Cette dernière constitue d’ailleurs le fil rouge de nombreux portefeuilles ministériels. En matière écologique, ce qui est en jeu est l’accès à des matières premières et des ressources naturelles qui deviennent de plus en plus rares. Pour ce qui concerne la pêche, il s’agit notamment des poissons et des coquillages. Cette raréfaction suppose d’agir pour garantir notre souveraineté, notamment alimentaire.

De manière très concrète, les priorités de mon ministère sont les suivantes.

Premièrement, je défendrai évidemment les intérêts de la pêche française à l’échelle européenne dans le cadre des prochaines négociations sur le Brexit et de la révision de la politique commune de la pêche. Je l’ai signifié au commissaire Kóstas Kadís la semaine dernière.

Deuxièmement, la modernisation et la décarbonation de la flotte sont une condition clé de sa compétitivité et font également l’objet de négociations à l’échelle européenne.

Troisièmement, je souhaite fixer notre stratégie en finalisant le contrat stratégique de filière pêche d’ici à la tenue du salon de l’agriculture. Les différents leviers dont nous disposons y seront abordés : l’amont, c’est-à-dire la pêche, mais également l’aval, c’est-à-dire le mareyage et les criées, qui doivent être innovantes et renforcées.

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.

Mme Annick Billon. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Par indemnisations en aval, j’entendais notamment les taxes et redevances perçues par les criées au moment des débarquements, lesquelles varient énormément en fonction des espèces qui sont débarquées. Dans le même temps, les charges fixes, elles, demeurent. Les représentants de la criée des Sables-d’Olonne m’ont alertée sur les difficultés que cela entraîne pour les criées.

Nous aurons certainement l’occasion, madame la ministre, de travailler ensemble sur ce sujet à l’avenir.

conséquences de l’action mois sans pêche

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 275, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Max Brisson. Ma question est très similaire à celle que vient de poser Annick Billon.

Le mois sans pêche est reconduit pour la seconde année, alors même qu’il est largement contesté.

Il est contesté, d’abord, pour son inefficacité. Alors qu’il a été décidé pour protéger les populations de dauphins, les rapports de l’observatoire Pelagis indiquent que le nombre d’échouages a connu une forte hausse lors de la fermeture de la pêche l’année dernière, ceux-ci étant passés de 187 en 2023 à 273 en 2024, malgré le mois sans pêche.

C’est là la démonstration éclatante que la pêche n’est pas la principale responsable des échouages.

Il est contesté, ensuite, pour des raisons écologiques. Alors qu’elle importe déjà 80 % de sa consommation de produits aquatiques, la France sera encore un peu plus dépendante des importations avec des produits de provenances toujours plus lointaines. C’est une aberration écologique.

Il est contesté, enfin, pour des raisons économiques. En effet, le mois sans pêche prive des milliers de mareyeurs, de transporteurs et de poissonniers du fruit de leur travail, tandis que la seule indemnisation de l’État ne permet pas de compenser leurs lourdes pertes. Cela fragilise grandement l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement et menace la pérennité des emplois de toute la filière.

Madame la ministre, ma question est très simple : comment le Gouvernement compte-t-il mettre un terme à ce dispositif du mois sans pêche, qui risque d’anéantir la pêche française sans pour autant sauver les dauphins du golfe de Gascogne ?

Mme Annick Billon. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Brisson, je me permets d’abord de contester ce que vous venez de dire : oui, la fermeture du golfe de Gascogne est, clairement, très efficace pour réduire le nombre d’échouages de cétacés et, partant, celui de morts précoces. Ainsi, on a enregistré une division par quatre du nombre de décès de dauphins.

Ensuite, je veux le rappeler, c’est une décision de justice qui a amené le Gouvernement à prendre cette décision de fermeture à la pêche du golfe de Gascogne, laquelle vaut pour trois ans, le temps nécessaire au déploiement de mesures alternatives destinées à l’effarouchement des cétacés, ce qui permettra de concilier la préservation de ces populations avec les activités de pêche.

Dans cette attente, des mesures d’urgence ont été prises. D’une part, ainsi que vous l’avez indiqué, 20 millions d’euros ont été débloqués afin de compenser les pertes de chiffre d’affaires des pêcheurs à hauteur de 80 % à 85 %, ce qui est un niveau très élevé si on le compare à celui auquel sont indemnisés les pêcheurs espagnols, à savoir 47 %. D’autre part, en aval, les pertes d’excédent brut d’exploitation des mareyeurs sont également compensées.

Cela étant, vous avez raison sur ce point, monsieur le sénateur, on ne peut pas se satisfaire de cette situation. L’enjeu est donc de parvenir à des solutions permettant de rouvrir la pêche en 2027 tout en protégeant la nature. Je pense en particulier aux dispositifs d’effarouchement des cétacés, qui font l’objet d’évaluations par les scientifiques.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Madame la ministre, je suis très surpris par vos affirmations. Moi, je sais compter : on a dénombré 273 échouages l’année dernière, en l’absence de tout bateau de pêche, contre 187 l’année précédente, alors que les bateaux de pêche opéraient.

Que vous vouliez faire porter aux pêcheurs cette responsabilité, soit, mais, ce faisant, vous avez tort de vous en prendre à la pêche : ces échouages ont certainement bien d’autres causes. Les pêcheurs du golfe de Gascogne servent aujourd’hui de boucs émissaires, ce qu’ils vivent très mal.

Votre réponse ne donne pas l’impression que le Gouvernement a réellement l’intention de sauver la filière pêche. On continuera d’importer, d’être dépendants. Où est la souveraineté alimentaire ?

nouvelle baisse de 50 % des aides au chauffage au bois domestique

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 253, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Daniel Chasseing. Madame la ministre, après une première baisse de 30 % le 1er avril 2024, une nouvelle réduction de 30 % des aides à la rénovation concernant les appareils de chauffage au bois domestique est entrée en vigueur en ce début d’année.

Cela représente plus de 50 % en huit mois.

Cette mesure est contestée, car le chauffage au bois, notamment par granulés, présente de nombreux avantages.

C’est une énergie économique, dont le coût est inférieur à 350 euros la tonne. Elle est ainsi trois fois moins chère que l’électricité et deux fois moins chère que le gaz ou le fioul.

C’est une énergie faiblement émettrice de CO2, souvent locale, avec un rayon de distribution, entre le lieu de prélèvement et le lieu de consommation, généralement inférieur à 200 kilomètres.

Elle s’inscrit dans une logique d’économie circulaire, car elle valorise les résidus de l’industrie du bois, qui, autrement, seraient considérés comme un déchet.

Si l’on met en regard les économies pour l’État de 50 millions d’euros avec la baisse des recettes de TVA et les conséquences socioéconomiques des fermetures d’entreprise de la filière, le gain n’est pas certain. Et je ne parle pas des nombreux ménages modestes qui ne pourront pas se chauffer à moindre coût.

De plus, cette décision est catastrophique pour la filière, laquelle a enregistré en 2023 une baisse de 70 % des ventes de chaudières et de poêles par rapport à 2022. Comment expliquer cette position du Gouvernement, alors que, dans le cadre de la planification écologique, il est recommandé d’encourager le chauffage au bois domestique s’il remplace un chauffage carboné ? Le Gouvernement envisage-t-il de revoir le projet de révision du barème de MaPrimeRénov’ concernant ce type de chauffage ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur Chasseing, vous l’avez dit, le bois est une énergie renouvelable, décarbonée, économique, source d’emplois et ancrée dans nos territoires, notamment ruraux et de montagne. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement continue à soutenir les installations de chauffage au bois domestique à haute efficacité énergétique. Elles doivent permettre de remplacer les équipements les moins performants et les plus polluants tels que les chaudières au fioul, mais également le chauffage au bois en foyer ouvert, inefficace, dont le rendement est compris entre 15 % et 20 %, contre 85 % pour un chauffage à foyer fermé efficace. Tout l’enjeu est donc de remplacer ces anciens modes de chauffage par des équipements plus innovants.

J’en viens à la ressource. Les études sur la disponibilité de la biomasse, notamment les travaux de préparation de la programmation pluriannuelle de l’énergie, ont montré que nos besoins en la matière seront deux fois supérieurs aux quantités produites. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi de destiner la biomasse aux usages que nous avons considérés comme prioritaires et les moins substituables.

De fait, le Gouvernement a décidé de réduire, non pas de 50 % – Valérie Létard et moi-même nous sommes battues pour cela –, mais de seulement 30 % les aides à l’achat d’un équipement de chauffage au bois dans le cadre de MaPrimeRénov’. Ainsi, il sera toujours possible de percevoir une aide de 4 000 euros pour l’acquisition d’une chaudière biomasse en remplacement d’un chauffage carboné.

En 2025, les ménages les plus modestes pourront ainsi bénéficier d’un soutien financier qui pourra atteindre 9 000 euros, ces aides pouvant être cumulées avec le dispositif des certificats d’économies d’énergie. Il est important de le signaler.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour la réplique.

M. Daniel Chasseing. Madame la ministre, il est important que cette aide perdure. La production de granulés, ce sont 250 entreprises, 73 usines, 20 000 emplois.

Nous sommes inquiets à la lecture de la presse spécialisée, qui indique le souhait du ministre chargé de l’industrie et de l’énergie de supprimer les incitations à l’installation d’appareils de chauffage dans le cadre du prochain projet de loi de finances. Je note que vous venez d’affirmer le contraire, madame la ministre. J’espère donc qu’il en sera bien ainsi.

accroissement des demandes de certificat de nationalité française exigées par l’administration consulaire à l’étranger

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la question n° 280, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, je suis régulièrement saisie par des conseillers des Français de l’étranger, que vous connaissez bien et dont je salue l’engagement sur le terrain, qui me font part de l’impasse administrative dans laquelle se retrouvent certains de nos compatriotes confrontés à un refus de certificat de nationalité française (CNF).

Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères est au fait de cette problématique, puisqu’il a adressé, en 2022 puis en 2024, deux instructions à nos consulats rappelant notamment que la présentation d’un titre valide ou périmé depuis moins de cinq ans et ne présentant aucun signe manifeste qu’il ait été délivré par erreur suffit pour prouver la nationalité française du demandeur et ne pas exiger de CNF, quel que soit l’acte demandé.

De toute évidence, cela n’a pas résolu le problème, puisque la présentation d’un CNF est toujours exigée dans le cadre de simples démarches administratives comme le renouvellement d’un titre d’identité, de voyage, ou la transcription d’un acte d’état civil.

De nombreux usagers, qui possèdent pourtant la pleine et entière nationalité française, se lancent alors dans une démarche longue et complexe auprès du tribunal judiciaire pour obtenir cette preuve de nationalité. Beaucoup se heurtent à un refus pour des motifs purement formels comme l’oubli de joindre un document ou de cocher une case. D’ailleurs, les statistiques du ministère de la justice montrent que le taux de refus est passé de 69 % à 80 % entre 2018 et 2023.

Dans plusieurs circonscriptions consulaires, nous observons qu’un refus de CNF peut avoir des conséquences dramatiques telles que la radiation du registre et de la liste électorale, ou, pis encore, le retrait d’un titre d’identité ou de voyage.

Je pense à cette mère de famille en Inde, française par filiation, dont le renouvellement du passeport a été refusé en raison d’un refus de CNF et qui risque, avec toute sa famille, de se retrouver en situation irrégulière dans son pays de résidence, l’Inde ne reconnaissant pas la double nationalité.

Ce n’est malheureusement pas un cas isolé.

Monsieur le ministre, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères ne dispose d’aucune donnée chiffrée sur le nombre de CNF sollicités par les postes consulaires. Ne serait-il pas temps de mettre en place un indicateur lui permettant d’avoir une vision globale des pratiques dans nos consulats, de manière à éviter que certains ne procèdent à une demande systématique de CNF, suscitant le désarroi d’usagers dont la qualité de Français ne fait aucun doute ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de létranger. Madame la sénatrice Hélène Conway-Mouret, vous posez d’abord la question des statistiques.

De fait, il n’existe aucun recensement global des demandes de CNF. En revanche, le tribunal judiciaire de Paris étant compétent pour instruire celles-ci, il est possible de se reporter au nombre de requêtes dont il est saisi à cette fin pour établir des statistiques. Ces dernières indiquent une baisse significative du nombre de demandes de CNF par les Français nés et établis hors de France : alors que l’on en dénombrait 20 280 en 2018, elles n’étaient plus que 7 917 en 2023.

En parallèle, le taux de refus a, quant à lui, augmenté, passant de 68 % en 2018 à 81 % en 2023.

Démonstration est donc faite que ces demandes de CNF sont bien justifiées.

Cela étant dit, vous l’avez indiqué, une note diplomatique rédigée conjointement par le service central d’état civil (SCEC) et le centre des titres d’identité et de voyage (CTIV), intitulée Appréciation de la nationalité française dans le cadre dune démarche consulaire, a été adressée le 6 décembre dernier à l’ensemble du réseau des ambassades et des consulats. Cette note distingue les usagers titulaires d’éléments de possession d’état de Français consolidée et ceux qui ne peuvent en justifier.

Il est demandé aux postes de ne pas remettre en question la nationalité française des personnes relevant de la première catégorie, à moins qu’ils ne soient confrontés à un doute sérieux qui nécessiterait une vérification de la nationalité de l’usager. Ils sont donc invités à se livrer, avant d’exiger la production d’un CNF, à une analyse de la nationalité de l’usager relevant de la seconde catégorie, en interrogeant l’intéressé sur sa situation pour éliminer des cas de perte automatique, en sollicitant des pièces complémentaires et en interrogeant le SCEC et le CTIV.

Ce n’est qu’à l’issue de ces vérifications, si la nationalité française de l’usager n’est pas clairement établie, que le poste devra solliciter un CNF.

Il a en outre été demandé aux élus de porter à la connaissance de la direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire (DFAE) et du SCEC les cas qui leur seraient soumis, afin de permettre une intervention de l’administration centrale.

arsenal juridique concernant les squatteurs

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 198, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le ministre, en Moselle, mais cela vaut également pour le reste du territoire national, la liste est longue des médias qui font régulièrement état de logements squattés.

L’évacuation et la restitution à leurs propriétaires légitimes de ces logements occupés illégalement, le plus souvent très dégradés, demeurent trop difficiles.

Certes, depuis 2017, la procédure d’évacuation forcée permet aux préfets, saisis en ce sens et dans un délai de quarante-huit heures après le dépôt de plainte, de mettre en demeure les squatteurs de quitter le logement. Pour autant, cette procédure accélérée, créée par la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi Asap, répond en partie seulement aux attentes des victimes. Ce texte est donc perfectible, ne serait-ce que parce qu’il ne dissuade absolument pas les squatteurs. Les violations de domicile sont toujours aussi nombreuses et les travaux de remise en état toujours aussi onéreux pour les victimes de cette infraction, qui sont donc doublement pénalisées.

Aussi, afin que cet arsenal juridique soit davantage dissuasif, n’est-il pas temps d’envisager une plus grande sévérité dans les peines encourues ainsi que de lourdes sanctions financières pour tout contrevenant à la loi sur la propriété privée ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de létranger. Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, le ministère de la justice est engagé de longue date dans la lutte contre l’occupation illicite des logements. L’arsenal législatif a d’ailleurs été renforcé par la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite.

Dans sa nouvelle rédaction, l’article 226-4 du code pénal porte les peines encourues en cas d’introduction illicite dans le domicile d’autrui d’un à trois ans d’emprisonnement et de 15 000 à 45 000 euros d’amende.

Par ailleurs, le législateur a créé aux articles 315-1 et 315-2 du code pénal deux nouveaux délits protégeant la propriété immobilière : d’une part, l’introduction ou le maintien illicites « dans un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel », d’autre part, « le maintien sans droit ni titre dans un local à usage d’habitation en violation d’une décision de justice ».

En outre, les quanta des peines encourues du chef de sous-location illicite ont été augmentés et un nouveau délit de propagande en faveur de ces comportements a été créé à l’article 226-4-2-1 du code pénal.

Dans le prolongement de cette loi, le garde des sceaux a invité, dans une circulaire datée du 23 novembre 2023, les procureurs de la République à mettre en œuvre une politique pénale empreinte de fermeté.

Enfin, le législateur a étendu et facilité la mise en œuvre de la procédure d’évacuation administrative prévue par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite Dalo, permettant à la personne concernée de demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux et de procéder le cas échéant à son évacuation forcée.

La loi du 27 juillet 2023 a étendu cette procédure au squat de tout local à usage d’habitation, alors que, auparavant, seul le squat d’un domicile était concerné.

Par ailleurs, les démarches administratives pour la personne concernée et le constat de l’occupation illicite ont été simplifiées.

Enfin, la possibilité pour le juge d’accorder aux occupants des délais pour quitter les lieux expulsés a été exclue en cas de squat.

Considérons donc que l’arsenal juridique existant apparaît aujourd’hui comme suffisamment complet.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le ministre, la question que je vous ai posée porte sur un sujet connu de tous, et ce depuis longtemps.

D’un point de vue intellectuel, votre réponse est satisfaisante. En revanche, en pratique, au regard des réalités auxquelles sont confrontés nos concitoyens, les résultats ne sont pas aussi splendides que pourrait le laisser à penser l’arsenal juridique que vous venez de rappeler.

J’espère que, à l’avenir, la justice appliquera les règles comme elle doit le faire.

effectifs du tribunal judiciaire de tarascon

M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, auteure de la question n° 224, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Mireille Jouve. Monsieur le ministre, je souhaite vous alerter sur les moyens humains au tribunal judiciaire de Tarascon.

Commençons par les motifs de satisfaction. Dans le cadre de la justice de proximité, ce tribunal a pu bénéficier de renforts significatifs en recrutant au fil de l’eau sept contractuels de catégorie A de 2021 à 2024, cinq juristes assistants et deux chargés de mission.

Cela a permis d’améliorer la situation, qui demeure toutefois tendue. C’est pourquoi les effets des annonces du 28 mars dernier sont désormais très attendus. Ce jour-là, à Annecy, Éric Dupond-Moretti, alors garde des sceaux, ministre de la justice, a concrétisé la dernière phase des recrutements de la loi du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice, dite LOPJ, en dévoilant la répartition des effectifs supplémentaires au sein de toutes les juridictions.

Le tribunal judiciaire de Tarascon pourra compter sur deux postes de magistrat du siège, deux autres au parquet, deux postes de greffier, deux postes de contractuel de catégorie A, attachés de justice.

Ces créations sont indispensables pour renforcer cette juridiction, qui doit se montrer à la hauteur des missions qui lui sont assignées et répondre aux fortes attentes de nos concitoyens. Il importe à la fois de pérenniser les postes créés et de voir aboutir ceux qui ont été annoncés.

Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer le maintien de la trajectoire budgétaire de recrutement ? Pouvez-vous également me préciser le rythme de mise en œuvre ? Le tribunal de Tarascon peut-il espérer de nouveaux postes en 2025 ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Laurent Saint-Martin, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de létranger. Madame la sénatrice Mireille Jouve, pour le quinquennal 2023-2027 et conformément à la LOPJ, les effectifs évoqués dans votre question sont confirmés, comme est maintenue la trajectoire budgétaire.

Pour le tribunal judiciaire de Tarascon, les effectifs cibles demeurent donc de dix-sept magistrats du siège et de sept magistrats du parquet, incluant les quatre créations de poste sur le quinquennal – deux au parquet et deux au siège –, et de sept attachés de justice, avec les quatre créations de poste prévues entre 2023 et 2025.

Enfin, s’agissant des effectifs de greffe, l’effectif cible du tribunal judiciaire de Tarascon est fixé à cinquante-quatre agents à ce jour, dont vingt-huit greffiers, auxquels s’ajouteront deux nouveaux greffiers à l’horizon 2027.

Au 1er février 2025, un poste de directeur des services de greffe judiciaires, un poste d’adjoint administratif, un poste d’adjoint technique et un poste de contractuel B recruté dans le cadre de la justice de proximité demeurent vacants. Il est toutefois à noter qu’un secrétaire administratif ainsi qu’un contractuel de catégorie A sont en surnombre.

Par ailleurs, un greffier rejoindra la juridiction le 1er mars 2025 dans le cadre des campagnes de mobilité.

M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, pour la réplique.

Mme Mireille Jouve. Voilà donc de nouveaux motifs de satisfaction, je vous en remercie, monsieur le ministre. Le tribunal de Tarascon pourra ainsi rendre une justice plus sereine.

prolifération des armes fabriquées à l’aide d’imprimantes 3d

M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, auteur de la question n° 039, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Christophe Chaillou. Madame la ministre, permettez-moi d’appeler votre attention sur la problématique des armes fabriquées à l’aide d’imprimantes 3D, dites armes fantômes, aujourd’hui intraçables, contrairement aux armes manufacturées.

Voilà un an, au mois de février 2024, l’unité cyber de la gendarmerie nationale a annoncé le démantèlement, entre la France et la Belgique, d’un vaste réseau de trafic de pièces fabriquées à l’aide d’une imprimante 3D permettant l’assemblage d’armes à feu.

Il s’agit d’une première en France et cela doit nous alerter sur la rapidité de l’évolution de cette technologie qui frappe d’ailleurs un certain nombre de pays. On l’a vu avec l’assassinat, aux États-Unis, au mois de décembre dernier, d’un grand chef d’entreprise.

Il est aujourd’hui possible, à l’aide d’une imprimante 3D, que chacun peut se procurer à des conditions assez simples, de fabriquer puis d’assembler une arme fantôme. L’imprimante est capable de créer, grâce à des plans disponibles gratuitement et facilement sur internet, des pièces en plastique comme la crosse, la gâchette, les chargeurs et certains types de munitions.

Il est aussi possible de manufacturer des armes lourdes. Par exemple, dans le Var, a été saisi un pistolet-mitrailleur fabriqué à partir d’une imprimante 3D et tirant en rafales des cartouches traditionnelles de neuf millimètres.

La facilité avec laquelle chacun peut accéder aux imprimantes 3D, aux plans de fabrication d’armes à feu sur Telegram, avant d’envoyer celles-ci à l’aide de Vinted, sans permis, en l’absence de tout numéro de série et d’élément de traçabilité, est particulièrement préoccupante. Il nous semble donc indispensable de mettre en place des mesures urgentes permettant d’endiguer ces nouvelles pratiques, qui, dans un contexte national marqué malheureusement par la prolifération des armes sur l’ensemble du territoire et leur utilisation croissante, mettent sans aucun doute en péril la sécurité nationale.

Madame la ministre, quelle est la position du Gouvernement à cet égard et quelles mesures envisage-t-il de mettre en place, et avec quels moyens, pour endiguer ce phénomène afin de mettre un terme à ces armes fantômes ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Christophe Chaillou, votre constat est parfaitement lucide : la fabrication additive d’armes à feu est désormais une menace extrêmement sérieuse.

Vous citez le démantèlement d’un réseau à Marseille au mois de février 2024 par la gendarmerie nationale. Vous avez là une partie de la réponse à vos préoccupations. Les services de police et les unités de gendarmerie sont présents sur l’ensemble du spectre des trafics d’armes et déploient des savoir-faire reconnus sur le terrain comme dans le cyberespace.

J’ajoute bien sûr à cette mobilisation les douanes.

Le constat actuel conduit toutefois à penser que le phénomène demeure contenu.

D’abord, parce que certains freins technologiques limitent toujours – à moins de gros investissements – les possibilités de fabrication.

Ensuite, parce que l’acquisition d’armes manufacturées reste malheureusement beaucoup plus simple pour les criminels, qu’elles soient acheminées par les filières du trafic ou issues de cambriolage de particuliers ou d’armureries.

À notre dispositif opérationnel en place s’ajoute une réglementation stricte. La fabrication d’armes à feu relève de la profession d’armurier. Celui qui fabrique sans avoir ce statut tombe donc sous le coup de la loi, que l’arme soit manufacturée ou fabriquée à l’aide d’une imprimante 3D.

Pour aller plus loin, nous envisageons de pénaliser la fabrication, la possession et la cession par toute personne non-armurier de fichiers informatiques présentant le plan de fabrication d’une arme 3D. Les discussions sont d’ailleurs engagées avec le ministère de la justice ainsi qu’avec les instances européennes dans le cadre de la prochaine directive sur l’uniformisation des infractions pénales entre États membres.

moyens pour la sécurité et la tranquillité publique en val-de-marne

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, auteur de la question n° 063, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, ma question porte sur les moyens de la sécurité publique en Val-de-Marne.

La baisse de la construction de logements sociaux et l’augmentation des loyers du privé freinent l’accès aux logements des agents de police en banlieue proche de Paris. C’est donc un frein à l’attractivité. Par quels moyens l’État pourrait-il y remédier ?

Par ailleurs, je veux vous interroger sur deux circonscriptions de sécurité concernées par l’arrivée des gares du Grand Paris Express (GPE) – avec, en corollaire, une augmentation de la population, de la circulation et des enjeux de mobilité.

Au Kremlin-Bicêtre, élus, habitants et agents de police se sont réjouis du début des travaux de rénovation du commissariat au mois de septembre 2024, fruit d’une longue mobilisation. Pour autant, la question des effectifs et de la proximité reste entière. C’est pourquoi les cinq maires demandent l’accroissement des effectifs et l’ouverture d’un second commissariat à Villejuif. Que pouvez-vous nous répondre à ce sujet ?

Voilà quelques jours, j’étais au quartier des Quatre-Cités de Champigny-sur-Marne. Les habitants font face à un éloignement constant des services publics nationaux. L’actuel commissariat, situé quartier du Bois-l’Abbé, est géographiquement trop éloigné. Là aussi, les citoyens demandent un nouveau déploiement d’effectifs et la création d’un second commissariat couvrant les Quatre-Cités, le Tremblay, Polangis, mais aussi les communes de Bry-sur-Marne et de Joinville-le-Pont. Où en est ce projet, d’ailleurs réclamé de longue date ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Pascal Savoldelli, vous le savez, la répartition des effectifs au sein des commissariats de police tient compte de la population et des enjeux de sécurité qui sont propres à chaque territoire.

Néanmoins, le modèle spécifique d’organisation de la préfecture de police présente la particularité d’intégrer, sous l’autorité du préfet de police, l’ensemble des services de police qui œuvrent à la sécurité des habitants.

Les directions ou les brigades spécialisées de la préfecture peuvent donc à tout moment intervenir sur les territoires des communes de l’agglomération parisienne, permettant ainsi de renforcer, si besoin, la présence de voie publique, y compris les unités de force mobile.

Il s’agit de rechercher évidemment une plus grande efficacité.

Ce modèle d’organisation, associé à l’investissement que vous avez mentionné, a permis une baisse importante de la délinquance en 2024 dans les communes que vous citez, au Kremlin-Bicêtre, à Champigny-sur-Marne, à Villejuif. C’est seulement à Joinville-le-Pont que les résultats ont été moins bons en ce qui concerne les atteintes aux biens, tandis que l’amélioration était nette quant à l’intégrité des personnes physiques.

La préfecture accorde une attention permanente à l’ensemble de son parc immobilier. Des travaux d’entretien sont réalisés dans chacun des commissariats de l’agglomération parisienne. Comme vous l’avez souligné, plusieurs locaux dans le Val-de-Marne, à Villejuif, à Vitry-sur-Seine ou à Choisy-le-Roi ont fait l’objet d’importants travaux d’investissement et d’exploitation, notamment dans le cadre des jeux Olympiques.

Cependant, les projets de rénovation lourde ou de restructuration, comme vous l’avez noté, ne peuvent aboutir dans un temps court. Ils font l’objet aujourd’hui de négociations pour définir les priorités. Il n’en reste pas moins que les efforts conduits avec les collectivités, que nous remercions, soulignent l’engagement de l’État, présent et à venir, pour mener à bien l’effort de rattrapage nécessaire dans votre département. Je pense là au nouveau commissariat de Maisons-Alfort.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.

M. Pascal Savoldelli. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Je dispose des chiffres de la délinquance, rendus publics le 6 février par la préfecture de police – ils sont donc récents. Ils confirment la nécessité d’augmenter les effectifs et les moyens.

À Champigny-sur-Marne, dont un collectif d’habitants est aujourd’hui présent dans nos tribunes, on observe un accroissement des vols dans les transports. Aussi, l’attente des habitants et des élus est forte. Il serait appréciable que vos collègues transmettent à l’ensemble des maires les tendances que vous nous avez communiquées sur le renforcement des moyens : ils ne sont même pas au courant !

Enfin, en ce qui concerne ce possible nouveau commissariat pour Champigny-sur-Marne, Bry-sur-Marne et Joinville-le-Pont, seriez-vous prête, vous ou l’un de vos collègues du Gouvernement, à recevoir le collectif des citoyens dont certains représentants assistent à cette séance de questions orales ? (Mme la ministre déléguée acquiesce.)

couteaux de poche traditionnels et port d’un outil utilitaire de la vie rurale

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 251, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Jean-Claude Anglars. Madame la ministre, ces derniers mois, la rumeur selon laquelle le simple fait de porter un couteau traditionnel pourrait désormais entraîner une amende de 500 euros et une mention au casier judiciaire s’est propagée en Aveyron, suscitant incompréhension, interrogation et inquiétude.

En effet, le couteau pliant de poche, le Laguiole par exemple, est un objet patrimonial vivant, issu de savoir-faire traditionnels et artisanaux, de fabrication locale. C’est aussi un ustensile profondément enraciné dans notre culture territoriale.

Le couteau est un outil usuel du quotidien que chacun utilise à table, mais aussi comme un instrument utilitaire. En milieu rural, avoir son couteau dans la poche est souvent plus utile qu’avoir un portable. (Sourires.)

Dès lors, dans les territoires ruraux, l’idée de sanctionner le port du couteau apparaît comme totalement inopportune et serait vécue comme une atteinte à la liberté et au mode de vie en ruralité.

Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer que le port d’un couteau dans l’espace public n’est pas automatiquement sanctionné ? La sanction dépend du contexte, notamment si ledit couteau est porté dans les lieux où la loi interdit le port d’arme. Le critère déterminant est la légitimité du port dans un contexte spécifique.

Le couteau Laguiole, qui est un couteau pliant à lame fixe, n’est donc pas considéré comme une arme par nature ; il peut être classé comme une arme par destination selon le contexte d’utilisation.

La subtilité consiste donc à différencier la légitimité, au regard de la loi, du contexte pour déterminer si le port de l’objet est légal ou sanctionnable, ce qui n’est pas toujours évident.

En effet, le dernier paragraphe de l’article 317-8 du code de la sécurité intérieure mentionne « le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 500 euros » en cas de remise volontaire à l’agent verbalisateur, « aux fins de transfert de propriété à l’État et de destruction éventuelle ».

Madame la ministre, pouvez-vous nous rassurer : est-il encore possible de se promener avec un Laguiole, un Liadou, un Sauveterre, un Larzac ou un Najac sur soi en Aveyron ? (Sourires. – Mme la ministre déléguée rit.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Jean-Claude Anglars, merci de ce tour d’Aveyron des couteaux ! (Nouveaux sourires.)

À votre dernière question, je réponds évidemment : oui.

Le couteau de poche traditionnel peut être apprécié comme un outil utilitaire de la vie rurale.

La notion d’appréciation est précisément au cœur de la réglementation qui encadre le port des articles de coutellerie. Seuls les poignards et les couteaux-poignards, se distinguant notamment par un tranchant sur chaque côté de la lame, sont expressément visés par le code de la sécurité intérieure et classés en catégorie D : ils ne peuvent être vendus qu’à des majeurs et dans des commerces ayant été autorisés par le préfet. Leur port et leur transport sont formellement interdits sauf motif légitime, comme le fait de se rendre à une action de chasse ou de reconstitution historique.

Les autres couteaux, notamment ceux que vous citez et qui reflètent la richesse artisanale de nos régions, ne sont pas expressément classés dans cette catégorie. Toutefois – l’actualité nous le rappelle trop souvent –, ils sont susceptibles de blesser, voire de tuer, si on les détourne de leur usage.

C’est en cela qu’ils peuvent être appréciés, en cas de contrôle, comme des armes blanches présentant un danger pour la sécurité publique. À ce titre, ils peuvent également relever de la catégorie D quant aux conditions de port et de transport.

Le motif légitime est apprécié par le policier ou le gendarme au cas par cas, sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Les circonstances de temps et de lieu, plus largement le contexte, ont à cet égard toute leur importance.

Le recours à la procédure expérimentale de l’amende forfaitaire délictuelle repose sur les mêmes principes. Il s’inscrit dans le cadre de la politique pénale locale, qui s’assure du discernement des intervenants.

avenir de la police municipale

M. le président. La parole est à Mme Christine Herzog, auteure de la question n° 243, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Christine Herzog. Ma question porte sur l’avenir de la police municipale.

Créé sur l’initiative du maire, ce service de proximité est chargé de la surveillance de l’ordre public et de la prévention.

Face à l’augmentation de la délinquance et des violences urbaines, face à la progression du narcotrafic et à l’ensauvagement de la population, les policiers municipaux sont les premiers sur le terrain. Ils interviennent souvent avant la police ou la gendarmerie nationales. Le maintien de la sécurité est pourtant l’une des premières fonctions régaliennes.

Le maire ne doit pas être contraint d’orienter les missions de ses agents de police pour suppléer les carences de l’État en matière de sécurité des populations. Les effectifs de la police et de la gendarmerie nationales, dont le détail n’est d’ailleurs pas connu, tendent pourtant à être remplacés par des policiers municipaux.

La mission de prévention et de proximité de la police municipale s’en trouve nécessairement mise à mal. En outre, un tel effort coûte cher aux collectivités territoriales : en 2023, les polices municipales représentaient près de 4 % des dépenses de fonctionnement des communes.

J’ajoute que les policiers municipaux doivent prendre de plus en plus de risques, faute d’équipements suffisants et de prérogatives judiciaires étendues.

Opter pour des solutions judiciaires, c’est choisir un modèle plus répressif, qui changerait le rapport des policiers municipaux au public ; ce n’est pas forcément ce que souhaitent les élus.

Madame la ministre, l’État va-t-il consentir davantage de moyens pour permettre l’intervention des policiers et gendarmes partout sur le territoire ? Ne peut-on pas trouver une meilleure complémentarité avec les policiers municipaux sur le terrain pour garantir la sécurité de nos concitoyens ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Christine Herzog, vous le soulignez avec raison, plus aucune partie de notre territoire, pas même les zones rurales, n’est épargnée par la délinquance.

Vous le savez, le renforcement de la présence de la police et de la gendarmerie nationales passe non seulement par les effectifs, mais aussi par le maillage territorial. C’est tout le sens des 239 brigades que le Gouvernement a décidé de constituer, dont 80 ont été créées en 2024.

Pour autant, quel que soit le point du territoire concerné, les forces de sécurité intérieure ne peuvent agir seules. Leur travail doit s’articuler au mieux avec celui des autres acteurs du continuum de sécurité.

Les maires sont, dans leur commune, les pivots de la lutte contre la délinquance. Ils disposent de compétences propres, d’outils dédiés, comme la vidéoprotection, et de moyens humains spécifiques, parmi lesquels ceux des polices municipales. Ces dernières constituent une troisième force de sécurité intérieure – je n’oublie pas le tribut qu’elles paient, elles aussi, à la violence.

Si des progrès ont été enregistrés, nous devons aller plus loin pour que les polices municipales s’engagent plus efficacement dans la sécurité du quotidien.

M. le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a élevé au rang d’enjeu majeur la montée en puissance des polices municipales. Il a ainsi demandé aux préfets d’en faire un axe fort de leurs plans d’action départementaux de restauration de la sécurité du quotidien.

Je n’irai pas jusqu’à parler d’interopérabilité, car bien des éléments singularisent les polices municipales, parmi lesquels leurs autorités d’emploi – vous l’avez rappelé –, le rôle de l’autorité judiciaire et leurs compétences légales. J’ajoute que la libre administration des collectivités reste un principe essentiel.

Cela étant – nous sommes d’accord sur ce point –, il faut davantage de complémentarité et de synergies opérationnelles. Nous devons aussi accroître les prérogatives et les moyens des polices municipales, notamment leur armement et leur protection.

Les conclusions du Beauvau des polices municipales, mené par François-Noël Buffet, sont attendues pour le début du mois d’avril prochain. Le renforcement des dispositifs de coordination figure parmi les axes de travail retenus dans ce cadre. La contraventionnalisation de certains délits, par exemple ceux qui ne sont pas punis d’une peine d’emprisonnement, constitue plus précisément une hypothèse à étudier.

La représentation nationale sera bien sûr informée de l’issue de ces discussions, et je ne doute pas que nous aurons, ensemble, à faire ensuite avancer un certain nombre de sujets de nature législative.

création d’une brigade de sécurisation des transports en commun au mans

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, auteur de la question n° 276, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Thierry Cozic. La sécurité dans les transports en commun est une préoccupation de plus en plus prégnante dans nos villes.

Cette problématique est d’ailleurs identifiée depuis plusieurs années. Conscient de cet enjeu, l’ancien ministre de l’intérieur Gérald Darmanin avait décidé une offensive contre les incivilités, en promettant dès 2022 la création de soixante-dix-sept unités dédiées à la sécurisation des transports, soit 2 000 policiers et gendarmes supplémentaires. À ce titre, trente-sept nouvelles brigades de sécurisation des transports en commun (BSTC) devaient voir le jour dans les villes moyennes, notamment au Mans.

Ces renforts étaient censés être déployés au plus tard au printemps 2024. La création d’une telle brigade aurait permis de sécuriser les transports en commun du Mans, en particulier en renforçant les contrôles et opérations de sécurisation, déjà nombreux, menés quotidiennement.

Cet effort est important, voire essentiel, dans une ville comme Le Mans, carrefour de flux de voyageurs empruntant TGV, lignes de bus et tramways. Il y va du bien-être et de la sécurité des usagers, comme l’avait dit M. Darmanin, lequel s’était engagé, à l’époque, à créer dix postes en tout.

Les ouvertures de postes nécessaires aux BSTC devaient être rendues possibles par la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi). Pourtant, ce texte, promulgué le 24 janvier 2023, ne fait aucune mention des effectifs supplémentaires affectés à ces brigades.

Malgré les promesses gouvernementales, aucune brigade de sécurisation des transports en commun ne s’est, à ce jour, matérialisée au Mans, alors que quatorze villes sur trente-sept en disposent déjà, en plus de Nice et de Saint-Étienne.

Madame la ministre, cette absence suscite de vives interrogations. Où sont donc les dix postes supplémentaires promis pour la BSTC de la ville du Mans ? Pouvez-vous me préciser les raisons de ce retard ? Pouvez-vous m’indiquer le calendrier désormais retenu pour la mise en place effective de cette unité et l’affectation des dix postes promis ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Thierry Cozic, le Gouvernement est évidemment déterminé à poursuivre le renforcement de la sécurité des transports en commun. Il convient, en particulier, d’assurer le contrôle des flux afin de répondre aux préoccupations des usagers.

La sécurité des transports en commun est une composante incontournable de l’action des forces de l’ordre. Les doctrines d’emploi en tiennent pleinement compte. En outre, M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a demandé aux préfets d’y être attentifs en élaborant les plans d’action départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, qui sont appelés à monter en puissance.

Dans ce domaine comme dans d’autres, le continuum de sécurité est fondamental : qu’il s’agisse des exploitants et de leurs services de sécurité, des autorités organisatrices des transports ou des polices municipales, chacun a son rôle à jouer en la matière. La proposition de loi relative au renforcement de la sûreté des transports, texte d’initiative sénatoriale déposé à la fin de l’année 2023, devrait, à cet égard, offrir de nouveaux outils.

La sécurité dans les transports en commun est encore renforcée par de nombreuses conventions avec les opérateurs.

Les moyens humains ont bien sûr toute leur importance, mais leur renforcement ne saurait être la seule réponse. De nombreuses autres voies doivent être explorées : moins de bureaucratie, moins de procédures et de charges indues, moins d’impunité. Ce sont là autant de domaines dans lesquels nous avançons.

J’en viens maintenant à votre question précise.

Avant tout, je vous assure de la mobilisation des fonctionnaires de police du Mans, dont je tiens à saluer le travail.

D’après les données dont nous disposons, le nombre d’heures de mission des forces de gendarmerie dans les divers réseaux de transports a progressé de 25 % entre 2023 et 2024 dans le département de la Sarthe. Ce chiffre témoigne de l’importance que l’État accorde à cette question.

J’ajoute que le travail accompli porte ses fruits : en 2024, on a observé à la fois une baisse du nombre de victimes dans les transports en commun et une hausse du nombre de mis en cause.

Faut-il créer une unité spécialisée au Mans ? Notre ligne de conduite, vous le savez, est dictée par le pragmatisme, dans une logique de déconcentration. Nous n’allons pas décider depuis Paris si Le Mans a besoin d’une nouvelle unité de cette nature. Le projet reste de créer, à terme, une telle brigade de sécurisation des transports en commun. Toutefois, à ce jour, ce n’est pas la priorité de la direction départementale de la police nationale (DDPN). Vous pouvez néanmoins en être assuré : la lutte contre l’insécurité dans les transports en commun figure bien parmi ses priorités.

projets de l’état en termes de desserte des aéroports régionaux et d’aménagement du territoire

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, auteur de la question n° 231, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cette année comme les précédentes – c’est désormais de coutume –, la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) va être affectée par la suppression de tous les trains de la journée : entre neuf heures trente et dix-sept heures trente, elle sera totalement fermée pour travaux, à partir du mois de mars prochain et jusqu’en janvier 2026.

Cette fermeture risque naturellement d’entraîner un report des flux de voyageurs sur les trains restants, le matin et le soir. Déjà, au cours des derniers mois, le service s’est fortement dégradé.

Il faut savoir que, pour janvier et février 2025, au titre du service que la SNCF qualifie de « normal », deux à quatre des dix allers-retours quotidiens sont supprimés, ce qui est déjà insupportable.

Une réduction supplémentaire du nombre de trajets se profile, d’ici quelques semaines, sans que l’on propose la moindre mesure de substitution aux habitants des départements traversés par le Polt. Cette perspective est tout simplement catastrophique pour l’équilibre économique et la dynamique desdits territoires, notamment pour le département de la Haute-Vienne.

Pour l’heure, les Haut-Viennoises et Haut-Viennois n’ont aucune solution de substitution à la fermeture partielle de cette ligne, du côté des transports collectifs. Les liaisons vers le TGV Ouest sont interrompues entre Limoges et Angoulême, et très fortement dégradées sur la ligne Limoges-Poitiers.

Dès lors, élus et représentants des milieux économiques de mon département me chargent de vous poser cette question : un rétablissement des vols entre Limoges et Paris, eux aussi supprimés, est-il possible pour faire face à la fermeture programmée de la ligne ferroviaire Paris-Limoges ?

Madame la ministre, l’État est-il prêt à s’engager pour compenser cette rupture de desserte, notamment en finançant une liaison aérienne de remplacement ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Monsieur le sénateur Redon-Sarrazy, mon collègue Philippe Tabarot, ne pouvant être présent au Sénat ce matin, m’a chargée de vous apporter cette réponse.

Comme vous le savez, les travaux programmés d’avril 2025 à janvier 2026 sont indispensables à la modernisation de la ligne Polt. Toutefois, pour minimiser leur impact sur les voyageurs, le Gouvernement a veillé à maintenir des dessertes ferroviaires aux heures de pointe du matin et du soir.

Vous évoquez le rétablissement d’une liaison aérienne entre Limoges et Paris comme solution de substitution.

La direction générale de l’aviation civile (DGAC) a étudié en détail les différentes options qui s’offrent à nous. À cet égard, plusieurs obstacles juridiques et pratiques doivent être pris en compte.

Premièrement, les obligations de service public (OSP) sur cette liaison sont aujourd’hui éteintes ; elles devraient être entièrement redéfinies pour s’adapter aux besoins spécifiques de cette période de travaux.

Deuxièmement, le calendrier, très contraint, ne permet pas de lancer une procédure classique de délégation de service public, laquelle nécessiterait plusieurs mois de travail.

Toutefois, une autre solution est à l’étude : une exploitation commerciale sans subvention, laquelle pourrait être mise en œuvre plus rapidement. Nous travaillons avec les acteurs concernés pour définir un programme de vols adapté et étudier les différentes formes de soutien possibles dans le respect du droit européen.

M. le ministre des transports et ses services restent pleinement mobilisés pour accompagner les collectivités territoriales dans la recherche d’une solution. Il convient d’assurer au mieux la connectivité du territoire pendant cette période de travaux, tout en respectant le cadre juridique et budgétaire qui s’impose à nous.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour la réplique.

M. Christian Redon-Sarrazy. Madame la ministre, je vous remercie de ces éléments de réponse.

J’insiste de nouveau sur les enjeux d’aménagement du territoire que soulèvent les projets de l’État en matière de transports.

Si les situations comme celle que je viens d’exposer sont devenues récurrentes, c’est parce que, dans le département de la Haute-Vienne, comme ailleurs, les problèmes d’enclavement ne sont toujours pas résolus, en dépit des alertes que les parlementaires lancent inlassablement.

L’enclavement pénalise des territoires entiers. Chargé d’évaluer la pertinence de la création d’une nouvelle école vétérinaire, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a ainsi émis des réserves quant au choix de la ville de Limoges,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Christian Redon-Sarrazy. … en particulier du fait de la faiblesse de la desserte ferroviaire.

augmentation des tarifs ferroviaires et évolution de l’offre de la sncf

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, auteur de la question n° 273, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.

M. Pierre-Antoine Levi. Ma question porte sur les transports ferroviaires.

Les Français sont de plus en plus nombreux à choisir le rail : à preuve, le train a vu le nombre de ses voyageurs augmenter de 3 % entre 2022 et 2023. Cette aspiration se heurte toutefois à une réalité tarifaire préoccupante.

Le prix moyen des billets Ouigo est passé de 27,60 euros à 34,20 euros en quatre ans, soit une augmentation de 24 %. Les tarifs inOui ont quant à eux bondi de 6 % pendant la seule année 2024. De telles augmentations risquent d’exclure de nombreux Français du transport ferroviaire.

La situation est d’autant plus préoccupante, voire choquante, que le PDG de la SNCF a récemment déclaré que « le TGV n’[était] pas un service public ». « Prendre le TGV a son prix », a-t-il ajouté, annonçant une nouvelle hausse des tarifs de 1,5 % pour 2025. L’augmentation dépasserait ainsi 10,5 %, en deux ans.

Cette politique est d’autant plus problématique qu’elle s’accompagne d’une réduction de l’offre. En effet, le déclassement de 100 rames en parfait état en 2013 et le transfert récent de 14 rames Duplex en Espagne ont considérablement réduit notre capacité. Les chiffres sont éloquents : l’offre TGV inOui a baissé de 24 % en dix ans.

Certes, la SNCF a pris la mesure de cet enjeu en lançant le programme Obsolescence déprogrammée, mais les retards de livraison des nouvelles rames TGV M par Alstom complexifient la situation.

Comment le Gouvernement entend-il garantir une politique tarifaire permettant réellement l’accès au train pour tous ?

Comment comptez-vous accélérer le renouvellement du parc de rames TGV et assurer que les choix stratégiques de la SNCF s’alignent sur les besoins des Français ?

Enfin, n’est-il pas temps de repenser le modèle de financement de notre réseau ferroviaire, qui fait aujourd’hui peser 40 % du prix du billet sur le financement des infrastructures, cas unique en Europe ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Monsieur le sénateur Pierre-Antoine Levi, avant tout, soyez assuré de toute l’attention que les membres du Gouvernement, notamment M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports, portent sur l’accessibilité des tarifs des transports publics en général et des tarifs voyageurs de la SNCF en particulier.

En tant qu’opérateur d’un service librement organisé, la SNCF dispose d’une autonomie de gestion pour fixer sa politique tarifaire, gérer son parc de matériel roulant et adapter son offre de transport à grande vitesse.

Si les prix des services ferroviaires librement organisés ont fortement chuté du fait de la crise sanitaire, ils ont fait l’objet d’un rattrapage de l’indice des prix à la consommation en 2023. Pour l’année 2025, en revanche, les prix des cartes Avantage, de la carte Liberté ainsi que des abonnements Max Jeune et Senior seront gelés.

Pour les billets de TGV inOui, la SNCF a mis en place un bouclier tarifaire limitant la hausse moyenne des prix au niveau de l’inflation anticipée pour l’année 2025, soit 1,5 %.

Par rapport à 2019, la progression du prix moyen d’un billet grande vitesse est inférieure à 10 %, alors même que l’indice des prix, reflétant l’inflation générale, a augmenté de l’ordre de 20 %.

De plus, SNCF Voyageurs a fortement développé l’offre Ouigo, qui permet de proposer des trajets à prix bas pour plus de soixante destinations. En 2025, plus de la moitié des billets Ouigo seront à moins de 30 euros.

Mon collègue Philippe Tabarot est particulièrement attentif au financement des mobilités : cet enjeu sera au cœur d’une conférence nationale qui se tiendra au printemps prochain. Les points sur lesquels vous insistez seront largement débattus dans ce cadre et l’ensemble des acteurs, parmi lesquels, bien sûr, les parlementaires, seront associés à cette conférence, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.

M. Pierre-Antoine Levi. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse, qui rassurera certainement les millions de Français qui prennent régulièrement le train.

Nous connaissons l’opiniâtreté du ministre chargé des transports, Philippe Tabarot, au sujet du ferroviaire. (Mme la ministre acquiesce.) Nul doute qu’il arrivera à convaincre les autorités compétentes, sinon de revoir les prix, du moins de leur accorder une attention particulière. J’y insiste, les tarifs aujourd’hui pratiqués pénalisent beaucoup de Français.

augmentation du taux de cotisation des collectivités locales

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, auteure de la question n° 149, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

Mme Céline Brulin. Le Gouvernement a imposé, sans la moindre concertation préalable, une augmentation de douze points du taux de cotisation employeur à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), régime de retraite des agents territoriaux et hospitaliers. Un décret a été pris à cette fin, dans la précipitation, au mois de janvier dernier.

De ce fait, les collectivités territoriales subiront un surcoût de 1,2 milliard d’euros au titre des dépenses de fonctionnement, que le Gouvernement leur demande par ailleurs de diminuer…

Les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), également en tension, verront eux aussi leurs dépenses de fonctionnement exploser. Le Sdis de Seine-Maritime devra ainsi assumer 4 millions d’euros supplémentaires par an.

Les hôpitaux, que l’on sait en très grande difficulté, ne pourront pas absorber ce coût supplémentaire, sauf à dégrader encore les conditions de recrutement et de travail des soignants.

Certes, le régime de la CNRACL affichait un déficit de 3,8 milliards d’euros en 2024, mais l’augmentation des cotisations employeur est-elle, pour le Gouvernement, le seul moyen d’y faire face dans la durée ?

Depuis des années maintenant, la CNRACL pallie le déficit d’autres régimes de retraite. Depuis les années 1970, cet effort représente une ponction de l’ordre de 100 milliards d’euros. Sans ces prélèvements répétés, la CNRACL disposerait de réserves suffisantes pour les dix prochaines années, à taux de cotisations constants.

Le Gouvernement entend-il ouvrir un dialogue de fond sur la situation de la CNRACL ? Nous avons besoin d’une véritable concertation associant les collectivités territoriales, les Sdis et les hôpitaux, ainsi, sans doute, que les agents et leurs organisations syndicales. Ce faisant, nous pourrons envisager des solutions durables et soutenables, en lieu et place de ponctions qui ne feront qu’aggraver la situation d’acteurs majeurs du service public.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Madame la sénatrice Céline Brulin, vous l’avez rappelé, le régime de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers se trouve dans une situation particulièrement préoccupante. Sa pérennité est même menacée.

Le déficit de ce régime, qui s’élevait à 2,5 milliards d’euros en 2023, atteindra, si rien n’est fait, 11 milliards d’euros en 2030.

La dégradation de l’équilibre financier de ce régime, dont le financement repose quasi exclusivement sur les cotisations, s’explique par celle de son ratio démographique. Il se trouve, à cet égard, dans la même situation que tous les autres régimes de retraite.

Afin d’apporter une première réponse à cette situation d’urgence, le Gouvernement a décidé, par décret en date du 30 janvier 2025, d’augmenter de trois points par an pendant quatre ans, de 2025 à 2028, le taux de cotisation des employeurs. Certes, cette hausse est importante, mais, comme l’a souhaité M. le Premier ministre, elle est moins brutale que prévu initialement.

Le Gouvernement ne perd pas de vue les autres mesures susceptibles de redresser ce régime. Saisies de ce dossier au mois de novembre 2023, l’inspection générale des finances (IGF), l’inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale de l’administration (IGA) ont émis un certain nombre de propositions. Ces dernières doivent maintenant faire l’objet d’une concertation sans tabou, en bonne intelligence avec les employeurs territoriaux et hospitaliers : c’est précisément le travail que vous appelez de vos vœux.

Avec Catherine Vautrin, Amélie de Montchalin et Astrid Panosyan-Bouvet, François Rebsamen a donc proposé aux principales associations d’élus d’examiner, dans le cadre d’une concertation, les solutions à apporter pour garantir l’équilibre financier durable de la CNRACL.

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.

Mme Céline Brulin. Madame la ministre, la concertation que vous annoncez devrait, à mon sens, mettre un coup d’arrêt aux augmentations de taux de cotisation, d’autant que la compensation promise par l’État à la suite de la hausse de 2024 n’a pas été au rendez-vous.

Dans les différentes fonctions publiques, il faut aussi se pencher sur le sujet des contractuels. Ces derniers cotisent en effet au régime général ; leur multiplication ne saurait expliquer, à elle seule, le déficit de la CNRACL,…

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Céline Brulin. … mais il s’agit là d’une piste à explorer.

chiffres et mode de calcul de l’artificialisation des sols pour le grand projet ferroviaire du sud-ouest

M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, auteure de la question n° 179, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Monique de Marco. Le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) implique la construction de 327 kilomètres de lignes à grande vitesse (LGV) entre, d’une part, Bordeaux et Toulouse, d’autre part, Bordeaux et Dax.

Dans sa dernière version, la liste des projets d’envergure nationale, présentée lors de la conférence régionale du « zéro artificialisation nette » (ZAN) de Nouvelle-Aquitaine, précise les surfaces consommées d’espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) pour le tronçon entre Bordeaux et Toulouse.

Pour le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest, ce document de travail se fonde sur le seul décompte de l’emprise sous les rails pour calculer la surface artificialisée. Cette dernière est ainsi établie à 740 hectares, soit environ 3 hectares par kilomètre de voie ferrée.

À titre de comparaison, l’emprise foncière de la ligne entre Tours et Bordeaux représentait 13 hectares par kilomètre de voie ferrée construite, d’après un calcul de grillage à grillage, comme le prévoit la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et Résilience.

Un décret d’application de cette loi qualifie en effet d’artificialisées « les surfaces à usage résidentiel, de production secondaire ou tertiaire, ou d’infrastructures notamment de transport ou de logistique, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée ».

Une modification non justifiée du mode de calcul a ainsi permis de diviser par quatre la surface artificialisée entre deux projets comparables. C’est là une entorse majeure à la loi Climat et Résilience, dont l’objectif est d’atteindre le zéro artificialisation nette des sols d’ici à 2050.

Pour que la loi soit respectée, le terre-plein de sécurité autour des rails soit aurait dû être compté comme surface artificialisée pour les deux projets, soit n’aurait dû l’être pour aucun des deux.

Madame la ministre, je demande au Gouvernement de revoir le mode de calcul de la surface artificialisée, conformément à la loi Climat et Résilience, et de réévaluer l’impact environnemental du GPSO en utilisant la méthode de décompte appliquée pour la ligne Tours-Bordeaux.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Madame la sénatrice Monique de Marco, vous m’interrogez sur la manière dont a été estimée la consommation d’espace du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest.

La méthode actuelle de calcul de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers repose sur la comptabilisation des espaces effectivement urbanisés. Il n’y a donc pas lieu de se référer aux surfaces artificialisées et non artificialisées. Non seulement ces notions ne devaient être appliquées qu’à compter de 2031, mais elles pourraient être abandonnées au terme des réflexions menées par le Gouvernement et le Parlement.

J’en viens au détail de ce calcul. Le décompte de 740 hectares pour le GPSO correspond à une simple estimation du programme de travaux en Nouvelle-Aquitaine, pour 491 hectares, et en Occitanie, pour 249 hectares.

Cette estimation inclut la plateforme ferroviaire, les raccordements, les voies d’accès et les ouvrages annexes. À l’inverse, les surfaces végétalisées des abords de l’infrastructure, qui peuvent constituer des espaces naturels, ne sont pas comptabilisées, dès lors que nous restons en mode de comptabilisation dit des Enaf. Il n’y a donc pas lieu, à ce stade, de revoir le mode de calcul retenu pour ce projet.

S’agissant plus largement de notre capacité à respecter le forfait de 12 500 hectares, le législateur a prévu que le Gouvernement mette à disposition annuellement des informations relatives à la consommation des projets d’envergure nationale ou européenne (Pene).

Sur ce sujet, un rapport devra être remis au Parlement en 2026. Il permettra d’ajuster les premières estimations au regard de la consommation effective de chaque projet, afin de s’assurer du respect des objectifs de la loi Climat et Résilience.

dégradation des conditions de circulation sur la ligne paris-orléans-limoges-toulouse

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Vayssouze-Faure, auteur de la question n° 297, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. Les usagers du Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt) sont habitués aux dysfonctionnements de cette ligne ferroviaire, et pour cause, ils sont devenus récurrents…

À l’heure actuelle, les voyageurs subissent une nouvelle fois le manque de fiabilité qui caractérise cette liaison. Le début de l’année 2025 confirme, plus précisément, un mouvement délétère pour la vitalité et l’attractivité du département du Lot, une nouvelle série de difficultés affectant le sud de la ligne : trains supprimés ou retardés, correspondances non assurées, halls de gare bondés, etc.

En outre, cette dégradation devrait se poursuivre, puisque la SNCF vient de nous annoncer de nouvelles suppressions de trains, comme c’est le cas chaque mois désormais.

Pourtant classée par l’État comme axe d’intérêt national, cette ligne ferroviaire survit avec des engins de traction en service depuis trente à quarante ans, affichant parfois 10 millions de kilomètres au compteur, circulant sur des infrastructures qui présentent un défaut manifeste d’entretien.

Aux difficultés techniques dues au sous-investissement chronique s’ajoute une pénurie de personnel. Le nombre d’agents de la SNCF est en constante diminution, tandis que les moyens nécessaires pour compenser les défaillances techniques et les pannes de locomotives ne cessent d’augmenter.

La modernisation de cette ligne historique n’est plus une option, elle est un impératif pour les quatre régions traversées et les cinq millions d’habitants concernés.

À cet égard, je salue l’effort engagé par l’État, qu’il s’agisse du projet de modernisation ou du remplacement du matériel roulant. Pour autant, quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il prendre pour assurer un niveau de service acceptable, d’ici à la modernisation effective de la ligne Polt et à la livraison des rames Oxygène, en 2027 ?

Cette demande vaut aussi pour les usagers de la ligne Paris-Clermont-Ferrand, lesquels sont confrontés aux mêmes difficultés.

Nos territoires ruraux doivent être écoutés et respectés. Malheureusement, les priorités du Gouvernement pour ces axes ferroviaires ne sont manifestement pas toujours celles que nous défendons. Je fais allusion ici à la décision, qui vient d’être annoncée par le ministre des transports, d’ouvrir la ligne Polt à la concurrence.

Madame la ministre, je le dis une nouvelle fois avec gravité, dans cet hémicycle,…

M. le président. Merci de poser votre question, mon cher collègue.

M. Jean-Marc Vayssouze-Faure. … nous ne nous résoudrons jamais à ce que le département du Lot et les autres territoires traversés par le Polt soient le bagage oublié des gouvernements.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Monsieur le sénateur Jean-Marc Vayssouze-Faure, mon collègue Philippe Tabarot, ministre chargé des transports, m’a chargée de répondre à cette question importante.

Je vous confirme que l’État, en tant qu’autorité organisatrice, est pleinement mobilisé pour améliorer durablement la qualité de service sur la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.

L’État a engagé un programme d’investissement sans précédent de 1,9 milliard d’euros sur la période 2018-2027 pour la régénération et la modernisation de la ligne. Ces travaux, qui avancent conformément au calendrier prévu, permettront d’améliorer significativement la régularité et les temps de parcours.

Par ailleurs, nous avons investi 400 millions d’euros dans l’acquisition de vingt-huit nouvelles rames Oxygène qui remplaceront progressivement le matériel actuel à partir du printemps 2027.

Aussi, concernant les perturbations actuelles, la SNCF a lancé un plan d’action qui a déjà permis d’augmenter la régularité de près de 8 points par rapport à 2023, avec 83 % des trains arrivant à l’heure.

Les travaux prévus entre Boisseaux et la gare des Aubrais, qui sont prévus de fin août 2025 à janvier 2026, sont indispensables pour atteindre nos objectifs d’amélioration. Nous avons veillé à maintenir des relations directes avec Paris, y compris au départ et à l’arrivée de Brive-la-Gaillarde et de Cahors, avec des compositions renforcées pour limiter la gêne pour les voyageurs.

Je précise également que le schéma directeur prévoit, à partir du mois de décembre 2027, le passage à onze allers-retours quotidiens, dont deux trajets rapides entre Paris et Limoges, permettant de réduire le temps de parcours à deux heures et cinquante-deux minutes.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que l’amélioration de la ligne Polt est une priorité du ministre chargé des transports.

révision du barème maprimerénov’ sur le chauffage au bois

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteure de la question n° 283, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement.

Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la ministre, après une première baisse de 30 % en avril 2024, le Gouvernement a choisi de réduire de nouveau les aides à l’installation d’appareils de chauffage au bois de 30 % au 1er janvier 2025.

En huit mois, on observe ainsi une diminution de 50 % du soutien de l’État aux millions de foyers français utilisant des appareils de chauffage au bois, et ce alors que le bois représente la première source d’énergies renouvelables en France.

Ces baisses ont pourtant été décidées sans analyse des bénéfices du remplacement d’appareils, notamment en termes d’émission de gaz à effet de serre et de particules fines, et sans prise en compte des territoires concernés. En effet, de nombreux Français vivent dans des zones qui ne sont pas desservies par le gaz.

Pourtant, le chauffage au bois, notamment le granulé, est reconnu comme vertueux par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Il s’agit d’une énergie économique – c’est d’ailleurs la moins chère, devant le fioul, le gaz ou l’électricité. Elle est locale et consommée à proximité des lieux de production, jamais à plus de 200 kilomètres du point de prélèvement. Le chauffage au bois est vertueux pour l’environnement, puisqu’il ne rejette que 26 grammes de CO2 par kilowattheure. Enfin, cette énergie s’inscrit dans une logique d’économie circulaire, puisqu’elle utilise les déchets de bois.

Prise au nom du « bouclage biomasse » à horizon 2035, la décision du Gouvernement privilégie finalement les usages industriels de décarbonation, au détriment des usages résidentiels. Elle méconnaît les besoins des habitants des territoires ruraux qui supporteront mal de voir des camions remplis de bois issu de leurs forêts partir alimenter des industries à des centaines de kilomètres, pendant que leur sera dénié le droit d’utiliser eux-mêmes la biomasse pour se chauffer.

Madame la ministre, le Gouvernement va-t-il donc persister dans cette stratégie qui privilégie la décarbonation des industries au détriment des particuliers ? Pourtant, le chauffage au bois est une énergie renouvelable vertueuse lorsqu’elle est utilisée à proximité des points de prélèvement. Surtout, elle est accessible économiquement à un grand nombre de nos concitoyens.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Madame la sénatrice Anne-Catherine Loisier, la décarbonation du chauffage des logements est essentielle pour atteindre nos objectifs climatiques. Le chauffage au bois, notamment aux granulés, a joué un rôle important dans cette transition, notamment en zone rurale où il est utilisé comme substitut au fioul.

Cependant, nous devons faire face à une réalité : la ressource en biomasse est limitée et des tensions apparaîtront dès 2030, selon les différents scénarios de la planification écologique.

Pour garantir notre souveraineté énergétique et préserver cette ressource précieuse, nous devons prioriser les usages les plus efficaces. La troisième stratégie nationale bas-carbone (SNBC) considère à ce titre que la chaleur haute température pour l’industrie et les réseaux de chaleur est prioritaire, tandis que le chauffage résidentiel doit être développé de manière raisonnée.

Nous aurons aussi un fort besoin de biomasse pour la construction, qui devra se décarboner massivement.

C’est pourquoi nous avons décidé de réduire progressivement et de façon modérée, à hauteur de 30 %, les aides MaPrimeRénov’ pour les équipements de chauffage au bois. Je vous rappelle que je me suis battue pour limiter cette réduction, qui devait être plus importante encore !

Cette décision ne remet pas en cause l’accès à ces équipements ni les autres soutiens comme la TVA réduite ou l’éco-prêt à taux zéro, qui permettent d’obtenir une aide financière pour l’accès à ce mode d’énergie.

Nous continuons de soutenir la filière bois-énergie et encourageons les solutions de substitution comme les pompes à chaleur, la géothermie et le solaire thermique.

Nous devons agir de manière responsable et stratégique pour assurer une transition énergétique durable et équitable pour tous, tout en reconnaissant la sensibilité de ce sujet. Soyez assurés que cela ne m’a pas échappé, madame la sénatrice.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour la réplique.

Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la ministre, je reconnais votre engagement. Cependant, le bouclage biomasse est un véritable sujet de débat.

Disons-le clairement : nous n’aurons pas suffisamment de biomasse pour alimenter, à long terme, la décarbonation de l’industrie. Certes, pour le moment, nous avons des arbres qui dépérissent dans nos forêts, mais la ressource finira par se tarir, alors que les investissements dans les industries sont pensés sur le long terme. Le sujet ne me semble donc pas correctement appréhendé.

caractère obligatoire d’un agent territorial spécialisé des écoles maternelles et des classes enfantines dans les classes qualifiées d’enfantines

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, auteur de la question n° 236, transmise à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

M. Bernard Buis. Madame la ministre, ma question porte sur le caractère obligatoire de la présence d’un agent territorial spécialisé des écoles maternelles (Atsem) dans les classes qualifiées d’enfantines.

J’ai été alerté sur la nécessité de clarifier la réglementation liée à l’article R. 412-127 du code des communes dans sa version en vigueur depuis le 16 mai 1981.

Cet article n’impose la présence d’un Atsem que dans les classes dites maternelles, sans spécifier si cette obligation concerne également les classes dites enfantines. Cette absence de clarté pose un problème d’interprétation pour les acteurs éducatifs dans les zones les plus rurales de notre pays.

Les Atsem jouent pourtant un rôle fondamental dans l’éducation de nos enfants. Ils assistent les enseignants dans l’accueil et l’encadrement des jeunes en veillant par exemple à leur bien-être et en soutenant les activités pédagogiques.

Toutefois, l’interprétation de la réglementation peut laisser penser que la présence de ces agents serait uniquement obligatoire dans les classes maternelles accueillant des enfants de 3 à 5 ans. Dans les milieux ruraux où les effectifs sont limités, les classes maternelles sont souvent remplacées par des classes enfantines, ce qui leur permet d’accueillir un panel plus large d’enfants âgés de 4 à 7 ans. C’est la raison pour laquelle il convient d’éclaircir la question du caractère obligatoire de la présence d’un Atsem dans les classes enfantines.

Ainsi, madame la ministre, pourriez-vous préciser l’interprétation de la réglementation en vigueur afin d’apporter une réponse aux acteurs engagés pour l’éducation de nos enfants dans les milieux ruraux ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Monsieur le sénateur Bernard Buis, comme vous l’avez rappelé, le statut particulier des Atsem précise leurs missions. Ils sont notamment « chargés de l’assistance au personnel enseignant pour l’accueil et l’hygiène des très jeunes enfants ainsi que de la préparation et la mise en état de propreté des locaux et du matériel servant directement à ces enfants », d’après l’article 2 du décret n° 92-850 du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d’emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles.

Par ailleurs, l’article R. 412-127 du code des communes prévoit que « toute classe maternelle doit bénéficier des services d’une personne occupant l’emploi d’agent spécialisé des écoles maternelles et des classes enfantines ».

La classe enfantine étant le degré intermédiaire entre l’école maternelle et l’école primaire, l’obligation de présence d’Atsem s’étend donc à ce type de classe.

Je vous rappelle en tout état de cause que le recrutement et l’affectation des Atsem relèvent de la seule compétence du maire, en concertation avec le directeur de l’école, qui donne son avis.

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour la réplique.

M. Bernard Buis. Madame la ministre, je vous remercie de cette clarification.

La question se pose régulièrement dans les écoles de nos territoires ruraux. Nous pourrons désormais apporter une réponse aux acteurs concernés.

M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

3

Décès d’un ancien sénateur

Mme la présidente. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jacques Chaumont, qui fut sénateur de la Sarthe de 1977 à 2004.

4

Candidature aux fonctions de secrétaire du Sénat

Mme la présidente. J’informe le Sénat que le groupe Les Républicains a fait connaître à M. le président du Sénat le nom du candidat qu’il propose pour remplacer, en qualité de secrétaire du Sénat, M. Philippe Tabarot, qui a été nommé le 23 décembre dernier ministre chargé des transports.

La candidature de M. Fabien Genet a été publiée et sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévue par notre règlement.

5

Article 10 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 10 (suite)

Souveraineté alimentaire et agricole

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture (projet n° 639 [2023-2024], texte de la commission n° 251, rapport n° 250, avis nos 184 et 187).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre III, à l’amendement n° 610 rectifié bis à l’article 10.

TITRE III (suite)

FAVORISER L’INSTALLATION DES AGRICULTEURS AINSI QUE LA TRANSMISSION DES EXPLOITATIONS ET AMÉLIORER LES CONDITIONS D’EXERCICE DE LA PROFESSION D’AGRICULTEUR

Chapitre II (suite)

Mesures en matière d’installation des agriculteurs et de transmission des exploitations

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 10

Article 10 (suite)

I. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le chapitre préliminaire du titre III du livre III est ainsi modifié :

a) L’article L. 330-4 est ainsi rétabli :

« Art. L. 330-4. – I. – Dans chaque département, le réseau France installations-transmissions est constitué du point d’accueil départemental unique pour la transmission des exploitations et l’installation des agriculteurs mentionné au 4° de l’article L. 511-4, des structures de conseil et d’accompagnement agréées en application de l’article L. 330-7 et des établissements locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles.

« Le réseau mentionné au premier alinéa du présent I propose un service d’accueil et d’orientation à toute personne ayant un projet d’installation ou souhaitant céder son exploitation agricole ainsi qu’à l’éventuel conjoint de cette personne et aux salariés agricoles et des industries agroalimentaires dans les cinq premières années de leur activité dans le secteur agricole ou agroalimentaire. Il propose un service de conseil et d’accompagnement à toute personne qui souhaite s’engager dans une activité agricole ou qui projette de cesser son activité agricole, dans les conditions prévues aux articles L. 330-5 à L. 330-8.

« II. – Chaque personne accueillie par le réseau est enregistrée par le point d’accueil dans un répertoire départemental unique destiné à faciliter les mises en relation entre les cédants et les repreneurs ainsi que le suivi des installations et des transmissions.

« Un décret, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, établit les conditions d’enregistrement dans le répertoire et les conditions d’accès aux informations qu’il contient.

« Détenues par les conseillers du réseau mentionné au I, ces informations sont mises gratuitement à disposition des usagers du réseau France installations-transmissions, notamment sur une plateforme en ligne, dès lors que la personne ayant transmis l’information, demandant un accompagnement plus actif, y consent.

« À des fins de suivi et de pilotage de la performance du réseau, une base nationale est constituée par l’établissement public mentionné à l’article L. 513-1, compilant les données de ces répertoires départementaux uniques. »

« III. – Les conditions dans lesquelles l’autorité administrative contrôle le respect des règles mentionnées aux articles L. 330-5 à L. 330-8 par les membres du réseau mentionné au I du présent article sont prévues par voie réglementaire. » ;

b) L’article L. 330-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 330-5. – Cinq ans avant que les exploitants agricoles du département atteignent l’âge légal de départ à la retraite, le point d’accueil départemental unique les invite à lui transmettre, dans les meilleurs délais, les caractéristiques de leur exploitation, leur éventuel projet de cession et à lui indiquer s’ils ont identifié un repreneur potentiel.

« Sur la base d’informations transmises régulièrement par les services et les organismes chargés de gérer les retraites dans les conditions fixées au premier alinéa de l’article L. 114-9 du code des relations entre le public et l’administration, trois ans avant l’âge estimé de départ effectif à la retraite, le point d’accueil relance les exploitants agricoles qui n’auraient pas déjà transmis les informations mentionnées au premier alinéa du présent article.

« Les courriers envoyés par le point départemental unique en application des premier et deuxième alinéas du présent article répondent à un cahier des charges national défini par Chambres d’agriculture France et rappellent l’intérêt de préparer suffisamment à l’avance la transmission de son exploitation. Ils présentent les outils existants d’estimation de la valeur d’une exploitation, les primes existantes en cas d’inscription au répertoire départemental unique et proposent un rendez-vous avec un référent unique au sein du point d’accueil.

« Ces informations sont enregistrées dans le répertoire départemental unique mentionné au II de l’article L. 330-4.

c) Sont ajoutés des articles L. 330-6 à L. 330-8 ainsi rédigés :

« Art. L. 330-6. – Toute personne ayant pour projet d’exercer une activité agricole au sens de l’article L. 311-1 ou de céder une exploitation agricole prend contact avec le point d’accueil départemental unique.

« Le point d’accueil oriente la personne ayant un projet vers des structures de conseil et d’accompagnement agréées par l’État dans les conditions prévues à l’article L. 330-7. Il présente aux personnes qu’il oriente, de manière exhaustive, les structures de conseil et d’accompagnement. Il veille à l’équité entre ces dernières et au respect du pluralisme. Il doit satisfaire à une obligation de neutralité dans la présentation de l’offre de ces structures.

« Le point d’accueil organise, dans le respect du pluralisme, un temps collectif d’échange entre les personnes ayant un projet d’installation, en favorisant la rencontre de personnes envisageant des orientations technico-économiques différentes.

« Art. L. 330-7. – Les structures de conseil et d’accompagnement sont agréées par l’autorité administrative compétente de l’État sous réserve de remplir les conditions prévues par un cahier des charges.

« Ce cahier des charges comprend :

« 1° Des règles nationales définies par décret après avis d’une instance nationale de concertation sur la politique d’installation et de transmission des exploitations agricoles, comprenant des représentants de l’État, des régions et des autres acteurs intéressés par cette politique ;

« 2° Des règles propres à chaque région, définies par l’autorité administrative compétente après avis d’une instance régionale de concertation comprenant des représentants des mêmes acteurs.

« Il précise notamment, en tenant compte de la diversité des projets à accompagner, les compétences, les modalités de préservation du secret des affaires et les modalités de la coordination des services rendus par ces structures au sein du réseau mentionné à l’article L. 330-4.

« Les structures de conseil et d’accompagnement sont agréées pour les missions mentionnées au deuxième alinéa du I de l’article L. 330-8 ou pour l’une d’entre elles seulement.

« Les conditions de délivrance et de retrait de l’agrément sont précisées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 330-8. – I. – Les structures de conseil et d’accompagnement facilitent les mises en relation entre les personnes ayant un projet d’installation et celles souhaitant céder leur exploitation agricole, en s’appuyant sur les données du répertoire départemental unique mentionné au II de l’article L. 330-4.

« Elles fournissent aux personnes ayant un projet d’installation un conseil ou un accompagnement pour assurer la viabilité économique, environnementale et sociale de leur projet, notamment au regard du changement climatique. Elles proposent aux personnes souhaitant céder leur exploitation agricole un parcours spécifique d’accompagnement à la transmission.

« Les structures de conseil et d’accompagnement peuvent notamment orienter les personnes ayant un projet vers des prestataires de services compétents, en veillant à respecter le pluralisme et l’équité entre eux.

« La structure de conseil et d’accompagnement choisie par la personne ayant un projet d’installation ou de transmission réalise un état des lieux des compétences et, si elle l’estime nécessaire au regard de cet état des lieux, conçoit, sur la base d’une méthodologie commune, et propose un parcours de formation pour lui permettre d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à la mise en œuvre de son projet professionnel.

« Dans chaque département, cette méthodologie commune est établie par l’autorité administrative de l’État compétente en matière d’enseignement agricole, conjointement avec les partenaires du réseau mentionnés à l’article L. 330-4. Elle en supervise l’application.

« Pour suivre une formation recommandée dans le parcours de formation, le porteur de projet choisit librement l’organisme de formation, public ou privé, auquel il fait appel.

« Les structures de conseil et d’accompagnement transmettent les informations relatives aux personnes qu’elles conseillent et accompagnent au point d’accueil départemental unique, afin que ce dernier tienne à jour le répertoire départemental unique mentionné au II de l’article L. 330-4.

« II. – Dans les conditions prévues par les dispositions qui leur sont applicables et sans créer d’obligations administratives supplémentaires, le bénéfice de certaines aides publiques accompagnant l’installation ou la transmission peut être subordonné à la condition d’avoir bénéficié du conseil ou de l’accompagnement et, le cas échéant, d’avoir suivi la formation mentionnés au I du présent article. » ;

2° La première phrase du 4° de l’article L. 511-4 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Assure, selon des modalités définies par décret, une mission de service public liée à la politique d’installation et de transmission des exploitations agricoles pour le compte de l’État et des autorités chargées de la gestion des aides à l’installation qui le souhaitent, notamment en mettant en place un point d’accueil départemental unique chargé de l’accueil initial, de l’information, de l’orientation et du suivi des actifs et des futurs actifs agricoles. Dans le cadre de cette mission, elle satisfait à une obligation de neutralité dans l’information et l’orientation de tous les actifs et les futurs actifs agricoles. » ;

2° bis (nouveau) La dernière phrase du 4° de l’article L. 511-4 est ainsi rédigée : « En Corse, cette mission est confiée à l’établissement mentionné à l’article L. 112-11, à l’exception de la mise en place du point d’accueil départemental unique et du volet transmission qui sont confiés à la chambre départementale d’agriculture ; »

3° L’article L. 512-2 est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Elle assure le suivi de la mise en œuvre de la mission de service public mentionnée au 4° de l’article L. 511-4 et en rend compte au représentant de l’État dans la région et à l’instance régionale de concertation de la politique de l’installation et de la transmission mentionnée au 2° de l’article L. 330-7. » ;

4° L’article L. 513-1 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Au sixième alinéa, après les mots : « de l’installation », sont insérés les mots : « et de la transmission », et après le mot : « notamment » sont insérés les mots : « à l’aide du répertoire départemental unique mentionné au II de l’article L. 330-4, » ;

b) (nouveau) Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « – il assure la promotion de la mission de service public liée à la politique d’installation et de transmission en agriculture mentionnée au 4° de l’article L. 511-4 ; »

5° Au second alinéa de l’article L. 741-10, les mots : « de la politique d’installation prévue à l’article L. 330-1 et auquel est subordonné le bénéfice des aides de l’État à l’installation en agriculture » sont remplacés par les mots : « d’une proposition de formation établie dans les conditions prévues au quatrième alinéa du I de l’article L. 330-8 ».

II. – Le présent article entre en vigueur dans les conditions suivantes :

1° La situation des exploitants agricoles qui, au 1er janvier 2026, se trouvent à deux ans au plus de l’âge requis pour bénéficier des droits à la retraite demeure régie par l’article L. 330-5 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la présente loi ;

2° Les personnes ayant un projet d’installation ou de transmission peuvent demander à bénéficier du service mentionné à l’article L. 330-6 du même code à compter du 1er janvier 2026 ;

3° (Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 610 rectifié bis, présenté par Mme Pluchet, MM. Bouchet et Dhersin, Mmes Belrhiti, Guidez et Valente Le Hir, MM. Khalifé, Brisson, Lefèvre et de Legge, Mme Lassarade, MM. C. Vial, Reynaud et P. Vidal, Mmes Borchio Fontimp, Joseph et Josende, MM. Klinger, J. B. Blanc et Naturel, Mme Billon, MM. Pointereau et Somon, Mme Aeschlimann et M. Cuypers, est ainsi libellé :

Alinéa 34

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Kristina Pluchet.

Mme Kristina Pluchet. Dans son avis, le Conseil d’État considère que « la possibilité de conditionner le bénéfice des aides publiques accompagnant la transmission au respect [du] suivi effectif du parcours d’accompagnement personnalisé porte une atteinte excessive à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle qui découlent de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ».

Il est en effet paradoxal de qualifier un système d’incitatif ou de facultatif si le fait de ne pas y recourir occasionne une privation d’aides qui étaient auparavant de droit. Comment parler de liberté de choix si ceux qui n’intègrent pas le dispositif peuvent être pénalisés ?

Aussi, le bénéfice des aides à l’installation ne saurait être conditionné à l’accompagnement par France installations-transmissions.

En outre, l’alinéa 34 laisse présager une ouverture à de futures conditionnalités par voie réglementaire, dont le législateur se prive de mesurer la portée et l’ampleur.

Cet alinéa attente ainsi plus que de raison à la liberté des exploitants et des cédants : l’ouverture de la conditionnalité des aides rendrait possibles une centralisation et un contrôle de la transmission et des installations disproportionnés dans un pays de tradition libérale.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 89 rectifié est présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 605 rectifié bis est présenté par MM. Duffourg et Henno, Mme Paoli-Gagin et MM. Bleunven et Hingray.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 34, au début

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les personnes ayant eu recours au dispositif de conseil et d’accompagnement prévu au présent article reçoivent une attestation qu’elles doivent être en mesure de présenter sur demande de l’autorité administrative.

II. – Alinéa 46

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

« 3° L’attestation mentionnée au II de l’article L. 330-8 du même code est présentée, sur demande de l’autorité administrative compétente, par toute personne qui s’installe ou cède son exploitation afin de justifier d’avoir bénéficié du même service, à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard du 31 décembre 2026. »

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 89 rectifié.

M. Henri Cabanel. Cet amendement a pour objet de remettre en place l’obligation, pour les agriculteurs, de présenter l’attestation de recours à France installations-transmissions à l’autorité administrative.

En effet, l’administration et les usagers doivent pouvoir conserver, si besoin est, un justificatif du recours d’un cédant ou d’un accédant à ce dispositif. Il est nécessaire de pouvoir garder une trace du passage au guichet afin de prouver l’efficacité et l’efficience de cet outil pour le renouvellement des générations en agriculture.

En outre, l’absence d’attestation de passage au point d’accueil de France installations-transmissions viderait ce dispositif de sa substance. En effet, elle serait de nature à induire une opacité concernant ceux qui ont recours à ce dispositif, alors même que l’une des vocations premières du guichet unique de France installations-transmissions est précisément d’apporter de la transparence sur l’installation et la transmission.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 605 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 934 rectifié, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 34

Supprimer les mots :

ou la transmission

La parole est à M. le rapporteur.

M. Franck Menonville, rapporteur de la commission des affaires économiques. Cet amendement tend à préciser que la conditionnalité des aides ne s’applique qu’aux candidats à l’installation, afin de lever une ambiguïté.

À droit constant, les aides à l’installation sont soumises à un certain nombre de conditions relatives, par exemple, à la capacité professionnelle agricole. Cependant, les cédants ne sauraient en aucun cas être soumis à des conditions pour toucher des aides à la transmission.

Mme la présidente. L’amendement n° 611 rectifié bis, présenté par Mme Pluchet, MM. Bouchet et Dhersin, Mmes Belrhiti, Guidez et Valente Le Hir, MM. Khalifé, Brisson, Lefèvre et de Legge, Mme Lassarade, MM. C. Vial, Reynaud et P. Vidal, Mmes Borchio Fontimp et Josende, MM. Klinger, J. B. Blanc et Naturel, Mme Billon, MM. Pointereau et Somon, Mme Aeschlimann et M. Cuypers, est ainsi libellé :

Alinéa 34

Après le mot :

transmission

insérer le mot :

ne

La parole est à Mme Kristina Pluchet.

Mme Kristina Pluchet. Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 611 rectifié bis est retiré.

Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 70 rectifié est présenté par MM. Levi, Brisson et Henno, Mme de La Provôté, MM. Khalifé, Dhersin, Laugier, Burgoa, Médevielle et L. Vogel, Mmes Sollogoub et Patru, MM. Reynaud, Courtial, Canévet, S. Demilly, V. Louault, Laménie, H. Leroy et Bonhomme, Mmes Billon et Gacquerre, M. Klinger, Mmes M. Mercier et Canayer et MM. Ravier et Bleunven.

L’amendement n° 239 rectifié bis est présenté par Mmes Housseau et Guidez, M. Duffourg et Mme Doineau.

L’amendement n° 648 rectifié bis est présenté par MM. Rochette, A. Marc et Capus, Mme Bourcier, MM. Brault, Grand et Wattebled et Mme Herzog.

L’amendement n° 752 est présenté par MM. Lahellec et Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’alinéa 34

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« III – Les personnes ayant eu recours au dispositif de conseil et d’accompagnement prévu au présent article reçoivent une attestation qu’elles doivent être en mesure de présenter sur demande de l’autorité administrative. » ;

II. – Alinéa 46

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° L’attestation mentionnée au III de l’article L. 330-8 dudit code est présentée, sur demande de l’autorité administrative compétente, par toute personne qui s’installe ou cède son exploitation afin de justifier d’avoir bénéficié du même service, à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard du 31 décembre 2027.

La parole est à M. Vincent Louault, pour présenter l’amendement n° 70 rectifié.

M. Vincent Louault. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Lise Housseau, pour présenter l’amendement n° 239 rectifié bis.

Mme Marie-Lise Housseau. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 648 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 752.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement a pour objet de mettre en place l’obligation, pour les agriculteurs, de présenter l’attestation de recours à l’accompagnement et au conseil de France installations-transmissions à l’autorité administrative.

En effet, l’administration et les usagers doivent pouvoir conserver et justifier, au besoin, du recours d’un cédant ou d’un nouvel installé à ce dispositif. Il est nécessaire de pouvoir garder une trace du passage au guichet afin de démontrer l’efficacité et l’efficience de cet outil pour le renouvellement des générations en agriculture.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. L’amendement n° 610 rectifié bis vise à supprimer la conditionnalité des aides à l’installation. Madame Pluchet, nous avons soutenu l’un des amendements que vous avez défendus hier sur cet article. Néanmoins, vous le savez, je suis favorable au maintien de la conditionnalité pour les jeunes agriculteurs, afin d’assurer à ces derniers un accompagnement, des conditions d’accès au métier et une formation de bon niveau. En revanche, je ne souhaite pas poser de conditions particulières à l’accès aux aides pour les cédants.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement.

La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 89 rectifié et 605 rectifié bis, qui visent à rétablir l’attestation. Il faut préférer une démarche d’incitation et d’accompagnement à une logique de contrainte, laquelle s’est souvent révélée inopérante dans le passé.

J’ajoute, sans idéologie aucune, que les dispositions que nous adoptons aujourd’hui pourront évoluer au gré des réalités territoriales.

Enfin, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 70 rectifié, 239 rectifié bis et 752, qui ont également pour objet la réintroduction de cette attestation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. Je suis également défavorable à la réintroduction de l’attestation.

D’abord, les débats à l’Assemblée nationale ont conduit à la suppression du caractère obligatoire de la présentation d’une attestation.

Ensuite, l’absence de mention d’une telle attestation dans le projet de loi ne s’oppose pas nécessairement à la conditionnalité du bénéfice de certaines aides. C’est en effet une possibilité qui reste ouverte par l’alinéa 34.

Enfin, dans la mesure où l’adoption de la loi permettra la création d’un répertoire départemental unique, il est superflu de prévoir une attestation.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement no 610 rectifié bis, les amendements identiques nos 89 rectifié et 605 rectifié bis, ainsi que sur les amendements identiques nos 70 rectifié, 239 rectifié bis et 752, au profit de l’amendement n° 934 rectifié, sur lequel il émet un avis favorable.

L’amendement de la commission vise en effet à ouvrir la possibilité de conditionner les aides publiques au passage par le guichet unique en cas d’installation, comme le prévoit actuellement le texte, tout en revenant sur cette disposition dans le cas d’une transmission.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Permettez-moi de m’étonner de la position de Kristina Pluchet, qui refuse toute forme de conditionnalité.

Pourtant, une bonne partie des aides publiques sont soumises à conditionnalité. Que ne dirait-on si les aides sociales n’étaient pas octroyées sous condition ! (Marques dironie sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb, rapporteur de la commission des affaires économiques. Parce qu’elles le sont ?

M. Daniel Salmon. Les conditions sont tout de même un principe de base. Quand on entreprend une politique publique, en général, c’est pour obtenir des résultats à la hauteur des objectifs que l’on s’est fixés.

Aussi, la conditionnalité n’est rien de plus qu’une condition sine qua non ! Je trouve donc les propos de Mme Pluchet assez surprenants – je le dis sans aucune idéologie, bien entendu. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Heureusement que vous le dites ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur, nul ne disconviendra du fait que l’argent public ne se distribue pas sans condition.

Du reste, c’est précisément ce que prévoit l’alinéa 34 de l’article 10.

M. Daniel Salmon. Tout à fait ! Mes propos s’adressaient à Mme Pluchet.

Mme Annie Genevard, ministre. Certaines aides publiques accompagnant l’installation, ainsi que la transmission – l’amendement du rapporteur vise néanmoins à revenir sur cette dernière disposition –, pourront être subordonnées à la condition d’avoir bénéficié du conseil et de l’accompagnement de France installations-transmissions.

L’amendement du rapporteur tend non pas à faire disparaître la conditionnalité, mais à la restreindre aux seules installations.

M. Franck Menonville, rapporteur. C’est déjà le cas.

Mme Annie Genevard, ministre. En effet, c’est le cas aujourd’hui. Nous souhaitons seulement supprimer la conditionnalité des aides à la transmission, car, vous en conviendrez, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat ne se pose pas tout à fait dans les mêmes termes pour le cédant et pour l’accédant.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 610 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 89 rectifié et 605 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 934 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 70 rectifié, 239 rectifié bis et 752.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 381 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À ce titre, elle publie annuellement un bilan de son action sur la base d’indicateurs définis par décret après avis de l’instance nationale de concertation de la politique d’installation et de transmission prévue au IV de l’article L. 1 du code rural.

La parole est à M. Denis Bouad.

M. Denis Bouad. Cet amendement vise à renforcer le cadre législatif applicable aux dispositifs de suivi de la mise en œuvre de la politique d’installation et de transmission en agriculture dans le cadre des missions confiées aux chambres d’agriculture.

Tenant compte de la mise en place du point d’accueil départemental unique de France installations-transmissions, nous proposons d’obliger les chambres départementales à publier un bilan annuel des actions menées à leur échelle et dans le cadre de leur mission. Cette évaluation serait construite sur la base d’indicateurs standardisés pour en faciliter le suivi. Ceux-ci seraient définis par décret.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Il est déjà prévu que les chambres d’agriculture et l’ensemble de leurs partenaires réalisent un bilan.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Pour être très précis, l’article 4 de l’arrêté du 28 décembre 2016 fixe pour les établissements concernés une obligation de remettre chaque année au préfet de département un rapport d’activité. Votre demande, tout à fait légitime, est donc satisfaite par le droit existant, monsieur le sénateur.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 381 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 487, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 36

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

° La première phrase du premier alinéa de l’article L. 511-7 est complétée par les mots : « avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne » ;

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Les chambres d’agriculture se voient confier une nouvelle mission de service public liée à la politique d’installation et de transmission, notamment la mise en place d’un point d’accueil départemental unique chargé de l’accompagnement des cédants et des porteurs de projet.

Si cette mesure semble faciliter les démarches pour les paysans, le manque de pluralisme induit par cet interlocuteur unique suscite une vive inquiétude.

En effet, pour accueillir une diversité de profils et de projets agricoles, les chambres d’agriculture doivent impérativement s’ouvrir à ce pluralisme et assurer une représentation équitable des différents syndicats agricoles, sous peine de verrouiller le parcours des porteurs de projets d’installation et d’exclure les acteurs les plus originaux.

Les petits producteurs indépendants, les agriculteurs pratiquant des modèles alternatifs et même les salariés agricoles, qui sont pourtant plus nombreux que les exploitants, sont largement sous-représentés.

Or une chambre d’agriculture se doit d’être un lieu d’échange et de construction collective, non le bastion d’une seule vision de l’agriculture. Le verrouillage actuel des instances empêche une véritable prise en compte des préoccupations de tous, notamment celles des nouvelles générations d’agriculteurs qui souhaitent concilier production et respect de l’environnement.

Il s’agit là d’une attente forte et, si nous n’y répondons pas, nous risquons de rencontrer de sérieuses difficultés en matière d’installation et de transmission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Nous sortons d’une campagne pour les élections aux chambres d’agriculture, dont les résultats sont tombés jeudi dernier. Les agriculteurs se sont exprimés et les résultats induisent des mouvements sur les territoires.

Cher collègue, vous évoquez l’évolution du mode de scrutin des chambres d’agriculture. Or, comme je l’ai indiqué à l’occasion de la discussion de la proposition de loi portant diverses mesures visant à adapter le fonctionnement des instances de gouvernance des chambres d’agriculture et de la mutualité sociale agricole, je ne suis pas favorable à la proportionnelle stricte.

En effet, ce mode de scrutin, comme nous l’avons constaté lorsqu’il était en vigueur il y a quelques années dans les conseils régionaux, rendrait les chambres d’agriculture ingouvernables.

Quand une liste obtient moins de 50 % des voix, elle n’est plus majoritaire et doit composer avec d’autres listes minoritaires. Le scrutin actuel permet donc le pluralisme de la représentation, dans le collège des chefs d’exploitants comme dans tous les autres collèges dont la réunion constitue la session de la chambre d’agriculture.

Par ailleurs, les chambres d’agriculture sont des établissements publics exerçant des missions de service public encadrées par le code rural et de la pêche maritime.

Par le passé, il existait des organisations différentes sur le territoire. Daniel Gremillet le sait bien : dans le Grand Est, les Jeunes Agriculteurs détenaient historiquement la maîtrise du point Accueil Installation. Demain, celle-ci reviendra aux chambres d’agriculture, qui devront jouer tout leur rôle, ainsi que ce texte en aura décidé.

Dans d’autres départements, comme en Aveyron, où subsiste une association de développement, d’aménagement et de services en environnement et en agriculture (Adasea), les règles ne sont pas tout à fait les mêmes.

Les dispositions portées par cette loi sont sécurisantes pour le fonctionnement du système, dans la durée.

L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Deux raisons s’opposent à la modification du mode de scrutin des élections aux chambres consulaires.

Premièrement, un obstacle constitutionnel : le mode de scrutin de ces élections relève du domaine réglementaire et non de la loi, en vertu des articles 34 et 37 de la Constitution. Il n’y a donc pas matière à légiférer sur ce point.

Deuxièmement, lors des consultations régulières que je mène auprès des cinq organisations professionnelles agricoles, aucune ne s’accorde sur le mode de scrutin qu’elle souhaiterait voir adopter.

Vous comprendrez donc aisément que je n’aie pas donné droit à leurs demandes de modification avant l’élection et qu’une telle évolution ne pourrait en aucune façon avoir lieu sans que nous procédions à un nouveau tour de consultations et que nous réfléchissions aux conséquences attendues, au regard des résultats des élections.

M. le rapporteur soulève enfin des questions fondamentales : scrutin majoritaire ou scrutin proportionnel. Il s’agit d’un véritable et beau débat politique, que nous ne manquerons d’ailleurs pas d’avoir un jour ou l’autre, ici et là-bas !

En attendant, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. En effet, c’est par voie réglementaire que le mode de scrutin des élections aux chambres d’agriculture peut être défini. Je l’entends parfaitement, mais il va falloir s’y employer, car, comme je le soulignais en présentant l’amendement, la question du pluralisme se pose.

Les dernières élections l’ont montré : lorsqu’un département bascule, par exemple de la FNSEA à la Coordination rurale, la prime majoritaire entraîne un changement complet et brutal. Une très large majorité s’installe et marginalise les minorités.

Promouvoir le pluralisme ne signifie pas pour autant qu’il faille instaurer la proportionnelle intégrale. Il ne s’agit pas de passer d’un extrême à l’autre. Cependant, une évolution est indispensable pour garantir une représentation pluraliste.

À l’avenir, ceux qui défendaient ardemment la prime majoritaire seront peut-être contraints de revoir leur position à mesure qu’ils perdront des départements : lorsque l’on occupe une position hégémonique, la prime majoritaire est toujours bienvenue, mais dès lors que l’on se retrouve minoritaire, on l’apprécie nettement moins !

Il est temps de transcender ces clivages et d’œuvrer résolument en faveur d’un authentique pluralisme au sein des chambres d’agriculture.

Madame la ministre, nous avons cinq années devant nous, ne laissons pas le temps nous échapper. Trop souvent, on procrastine, puis, à l’approche des échéances électorales, on se rend compte qu’il est trop tard pour agir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 487.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les six premiers sont identiques.

L’amendement n° 71 rectifié bis est présenté par MM. Levi, Brisson et Henno, Mme de La Provôté, MM. Khalifé, Dhersin, Laugier, Burgoa, Médevielle et L. Vogel, Mmes Sollogoub et Patru, MM. Reynaud, Courtial, Canévet, S. Demilly, V. Louault, Laménie, H. Leroy et Bonhomme, Mmes Billon et Gacquerre, M. Klinger, Mmes M. Mercier et Canayer et M. Ravier.

L’amendement n° 173 rectifié bis est présenté par Mme L. Darcos, MM. Brault, Capus et Chevalier, Mme Paoli-Gagin et M. Wattebled.

L’amendement n° 197 rectifié ter est présenté par MM. Genet et Pernot, Mmes Belrhiti et Micouleau, MM. D. Laurent, Saury, Bouchet et Paul, Mmes P. Martin, Joseph et Bellurot, MM. Longeot et Sido et Mme Josende.

L’amendement n° 277 rectifié ter est présenté par M. Bleunven, Mmes Jacquemet et Perrot et M. Kern.

L’amendement n° 649 rectifié bis est présenté par MM. Rochette et A. Marc, Mme Bourcier, MM. Grand et Chasseing et Mme Herzog.

L’amendement n° 753 est présenté par MM. Lahellec et Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces six amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 41

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Vincent Louault, pour présenter l’amendement n° 71 rectifié bis.

M. Vincent Louault. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 173 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est Mme Pauline Martin, pour présenter l’amendement n° 197 rectifié ter.

Mme Pauline Martin. Le dispositif France installations-transmissions souffre d’une insuffisance : la communication et la promotion incombent exclusivement à la chambre d’agriculture. Pour en garantir l’efficacité, il est essentiel que l’ensemble des acteurs qui le composent partagent cette responsabilité.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 277 rectifié ter.

M. Yves Bleunven. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 649 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 753.

M. Gérard Lahellec. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 753 est retiré.

L’amendement n° 245 rectifié bis, présenté par Mme Devésa et MM. Le Rudulier et Courtial, est ainsi libellé :

Alinéa 41

Remplacer le mot :

assure

par les mots :

contribue à assurer

La parole est à Mme Brigitte Devésa.

Mme Brigitte Devésa. L’installation et la transmission en agriculture constituent des enjeux complexes, qui requièrent une implication de tous les acteurs concernés à différents niveaux.

Ainsi, pour garantir l’efficacité du dispositif France installations-transmissions, il est primordial que la communication et la promotion en soient partagées entre les acteurs qui le composent.

Cet amendement vise donc à préciser que les chambres d’agriculture contribuent à assurer, parmi d’autres acteurs, la promotion de la mission de service public liée à la politique d’installation et de transmission. En remplaçant « assurer » par « contribue à assurer », nous ne restreignons pas cette mission à un seul acteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Les trois amendements identiques tendent à supprimer l’alinéa 41, lequel confie aux chambres d’agriculture la mission de promouvoir le guichet unique. Je souhaite m’expliquer sur ce point, car c’est la raison pour laquelle j’émettrai un avis de sagesse sur l’amendement de Mme Devésa.

Nous souhaitons que les chambres d’agriculture portent le guichet unique et en assurent la promotion. Pour autant, il n’y a pas d’exclusivité ; d’autres acteurs peuvent également y contribuer. Je ne suis donc pas hostile à une rédaction remplaçant le terme « assure » par « contribue à assurer ».

Il est nécessaire que le détenteur du guichet unique ait la responsabilité d’en assurer la promotion ; cependant, ce rôle ne doit pas se limiter aux seules chambres d’agriculture. Les Jeunes Agriculteurs s’interrogeaient sur ce point, et je tiens à les rassurer.

J’émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 71 rectifié bis, 197 rectifié ter et 277 rectifié ter et un avis de sagesse sur l’amendement n° 245 rectifié bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Les chambres d’agriculture vont naturellement assurer la promotion du guichet unique : elles en sont chargées. Toutefois, à un second niveau intervient l’accompagnement, lequel est pris en charge par d’autres structures, qui promouvront également le travail qu’elles effectueront auprès des agriculteurs.

La formulation « contribue à assurer la promotion » me semble représenter un compromis satisfaisant.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur les amendements identiques qui visent à supprimer cette mission.

S’agissant de l’amendement de Mme la sénatrice Devésa, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Nous approuvons naturellement ces amendements, dont les dispositions vont dans le bon sens.

Je profite de cette occasion pour interpeller Mme la ministre. Nous venons de le rappeler, les chambres d’agriculture sont un élément essentiel, mais elles sont loin d’être le seul : les régions jouent ainsi un rôle primordial, comme le souligne la régionalisation en cours depuis de nombreuses années des outils en matière d’installation-transmission, des aides aux jeunes et aux nouveaux agriculteurs en lien avec la politique agricole commune (PAC) ou encore des crédits d’installation et de transmission, qu’elles pilotent très largement.

D’ailleurs, de nombreux rapports, comme ceux du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) ou de la Cour des comptes, mettent en avant leur action positive et volontariste en matière d’installation et de transmission.

On peut ainsi saluer la qualité du dialogue entre les régions et les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) dans les différents territoires – je puis en témoigner s’agissant de la Bretagne –, dans le cadre des comités régionaux installations-transmissions.

Or les régions ne sont pas directement citées à l’article 10, à l’exception d’une ou deux mentions, madame la ministre.

Je souhaite donc obtenir de votre part l’assurance que celles-ci, en tant que collectivités et pouvoirs publics pleinement investis, au-delà des autorités administratives, lesquelles renvoient plutôt à l’État, seront bien associées à la définition du cahier des charges des points France installations-transmissions, ainsi qu’à la gouvernance et à la mise en œuvre du dispositif, dans un rôle non pas de simple exécutant, mais bien de coconstructeur, aux côtés de l’État et de l’échelon départemental, qui permet de renforcer la proximité.

N’oublions pas leur responsabilité, car elles sont en première ligne et déploient des actions volontaristes. Ainsi, en Bretagne, notre président Loïg Chesnais-Girard et son équipe portent l’ambition de mille installations aidées par an. Nous mettons tous les moyens pour cela, avec l’ensemble des partenaires concernés.

Nous souhaitons donc que les régions soient confortées dans leur rôle.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Les chambres d’agriculture bénéficient d’une délégation de service public et reçoivent, pour l’exercer, 800 millions d’euros d’impôts, acquittés par les agriculteurs sur l’ensemble de leur production. Il semble donc parfaitement normal que l’organisation des points d’installation relève exclusivement d’elles.

Je comprends que certaines régions se veuillent des fers de lance et qu’elles aient la volonté politique d’intervenir sur ces sujets.

Cependant, nous observons une dissémination des actions entre une multitude de collectivités. Les intercommunalités, notamment, se mettent désormais à agir comme de mini-ministères de l’agriculture, ce qu’elles ne sont pas, en matière d’application des dispositions des lois Égalim, pour augmenter la consommation des cantines et développer les circuits courts, par exemple.

Il convient donc d’être vigilants. Je tiens mon esprit pour convenablement structuré : chaque chose doit être à sa place. Le point d’installation relève des chambres d’agriculture !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur Uzenat, c’est l’ancienne conseillère régionale, qui était membre de la commission d’installation des jeunes agriculteurs, qui vous répond. J’ai mesuré alors, et je sais que c’est encore le cas, combien les conseils régionaux sont des acteurs importants en matière agricole.

Du reste, les régions qui sont très allantes en matière de soutien à l’agriculture peuvent véritablement constituer des déterminants essentiels du dynamisme agricole d’un territoire.

Je tiens à réaffirmer avec force à quel point elles sont un maillon fondamental de la politique d’installation et, plus généralement, de la politique agricole, en particulier en matière de gestion des fonds européens.

On observe du reste que, lorsque cela fonctionne bien, leur rôle est très profitable, alors que leurs éventuels dysfonctionnements emportent des conséquences négatives considérables sur les territoires.

Je souhaite donc vous rassurer : le cahier des charges de l’accompagnement est élaboré conjointement par l’État et les régions. Ces dernières sont ainsi pleinement intégrées au cœur du dispositif.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 71 rectifié bis, 197 rectifié ter et 277 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 245 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 937, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 45

Remplacer l’année :

2026

par l’année :

2027

La parole est à M. le rapporteur.

M. Franck Menonville, rapporteur. Cet amendement tend à reporter d’un an la mise en place du dispositif, car les aléas subis par le projet de loi rendent le délai initial impossible à tenir.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 937.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 604 rectifié bis, présenté par MM. Duffourg et Henno, Mmes Saint-Pé, Romagny et Paoli-Gagin et MM. Bleunven et Hingray, est ainsi libellé :

Alinéa 46

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

- L’attestation de passage par le réseau France installations-transmissions constitue une pièce justificative du dossier de demande retraite.

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Il s’agit d’un amendement de mon collègue Alain Duffourg.

Dans la perspective de renforcer l’obligation de passage au guichet unique pour les cédants, et afin de rendre incontournable le dispositif France installations-transmissions pour tous les acteurs, il est proposé ici d’adjoindre au dossier de retraite l’attestation de passage, qui en constituerait une pièce nécessaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Je l’ai déjà dit : je suis très défavorable à cette mesure.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 604 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 10, modifié.

(Larticle 10 est adopté.)

Article 10 (suite)
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Article 10 bis A

Après l’article 10

Mme la présidente. L’amendement n° 382 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

“Il a principalement pour but d’améliorer l’exploitation agricole des biens qui y sont soumis dans le respect de l’environnement et des paysages, en favorisant l’installation d’exploitants agricoles et les projets agroécologiques tels que définis à l’article 1 du présent code. Il doit également avoir pour objet l’aménagement rural du périmètre dans lequel il est mis en œuvre et peut permettre, dans ce périmètre, une utilisation des parcelles à vocation naturelle, agricole ou forestière en vue de la préservation de l’environnement.”

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Je vais aborder brièvement la question du foncier. Cet amendement vise à actualiser l’article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime, relatif à l’aménagement foncier agricole et, plus particulièrement, à la nécessité de favoriser le regroupement des parcelles.

Ce projet de loi se fixe pour objectif, comme nous l’avons maintes fois répété, de favoriser le renouvellement des générations et de faciliter l’installation ; nous estimons donc qu’il constitue le véhicule législatif approprié pour procéder à cette modernisation.

Cet amendement vise ainsi à assigner à notre politique d’aménagement foncier agricole les objectifs de respect de l’environnement et des paysages, d’encouragement des projets agroécologiques, de diversification de nos agricultures, ainsi que de déspécialisation de certaines grandes exploitations agricoles, conformément à l’amendement que vous avez malheureusement rejeté hier, mes chers collègues.

Cette disposition vient ainsi relier les différents amendements que nous avons défendus depuis le début de l’examen de ce texte et qui tendaient à s’inscrire dans la même logique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. C’est un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 382 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 383 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l’article L. 330-1 du code rural est complété par les mots : « , notamment les principes de l’agroécologie tels que définis au II de l’article L. 1 du présent code. »

La parole est à M. Simon Uzenat.

M. Simon Uzenat. Cet amendement tend à s’inscrire dans la continuité du précédent. Il vise à modifier l’article L. 330-1 du code rural et de la pêche maritime, qui détermine l’attribution des aides publiques en matière d’installation des exploitations agricoles.

Comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire à de nombreuses reprises, nous faisons de la transition vers des pratiques agroécologiques l’une de nos priorités, à l’instar de très nombreux agriculteurs, comme l’indique le taux de succès des mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec) dans nos différentes régions, en particulier en Bretagne.

À ce titre, toute installation ou transmission doit être, selon nous, l’occasion d’encourager une telle transition, afin d’assurer un renouvellement durable des générations agricoles, pour lesquelles cette question est centrale dans le processus d’installation.

Notre amendement vise donc à affirmer l’intégration des principes agroécologiques dans les projets d’installation soutenus par l’argent et l’action publics.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Je ne suis pas favorable à cet amendement, qui me semble déjà satisfait : l’article L. 330-1, que vous proposez de modifier, dispose que « les candidats élaborent un projet global d’installation intégrant les aspects économiques et environnementaux ».

J’estime donc que cette dimension est d’ores et déjà pleinement intégrée dans la rédaction actuelle.

La commission émet par conséquent un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 383 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 152 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 1er octobre 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport estimant le coût pour les services de l’État de la mise en œuvre effective du réseau France installations-transmissions et fait également apparaître les crédits effectivement consacrés, à la date de la promulgation de la présente loi, aux services de l’État pour l’application de ces dispositions. Ce rapport doit faire apparaître les crédits effectivement nécessaires au déploiement effectif et optimal du réseau France installations-transmissions.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport estimant le coût pour les services de l’État de la mise en œuvre effective du réseau France installations-transmissions.

Ce document devra, en outre, préciser les crédits effectivement consacrés à la date de promulgation de la présente loi aux services de l’État à l’application du réseau France installations-transmissions.

Il précisera surtout les fonds nécessaires au déploiement optimal de ce réseau, afin que nous puissions abonder en conséquence la ligne budgétaire lui étant consacrée lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.

Je rappelle en effet que l’efficacité du réseau dépend en premier lieu des moyens humains et financiers nécessaires à sa pleine exécution.

Il s’agit d’un amendement d’appel, et je sais quelle issue lui sera réservée, mais je souhaite disposer d’une vision du financement du dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Considérant qu’il s’agit d’un amendement d’appel, je me propose de laisser Mme la ministre y répondre.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Ce guichet unique et le réseau France Services agriculture ne seront pas mis en place dans l’immédiat : nous venons d’adopter un amendement visant à les instaurer au 1er janvier 2027.

Quoi qu’il en soit, nous nous sommes préparés, monsieur Cabanel, puisque l’aide à l’installation et à la transmission en agriculture (Aita), initialement fixée à 13 millions d’euros dans le projet de loi de finances, a été portée à 20 millions d’euros, dans l’hypothèse où le dispositif fonctionnerait à plein régime, ce qui ne sera pas le cas.

Nous sommes donc en mesure de le financer, notamment sa préfiguration : en effet, même si le dispositif n’entrera pleinement en vigueur que le 1er janvier 2027, des actions de cet ordre pourront être financées avant cette date.

Cela dit, l’évaluation du coût pour les services de la mise en œuvre effective aura nécessairement lieu préalablement à l’exercice budgétaire.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Même si vous n’avez pas évalué le coût de cette mise en place, il me semble important d’avoir une idée, même approximative, de ce qu’il représentera pour les chambres d’agriculture, pour les régions ou pour d’autres acteurs.

En effet, le démarrage de ce dispositif nécessitera des moyens humains et financiers, pour son fonctionnement comme pour sa promotion, qu’il serait intéressant de connaître.

Quoi qu’il en soit, je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 152 rectifié est retiré.

Après l’article 10
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Article 10 bis

Article 10 bis A

(Non modifié)

Jusqu’au 31 décembre 2024, le décret en Conseil d’État prévu au 1° de l’article L. 718-2-1 du code rural et de la pêche maritime peut prendre effet au 1er janvier 2022 en tant qu’il détermine les disponibilités dont le fonds d’assurance formation prévu au même article L. 718-2-1 peut disposer au 31 décembre d’une année donnée.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 257 rectifié ter est présenté par M. Bleunven.

L’amendement n° 843 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le deuxième alinéa de l’article L. 718-2-3 du code rural et de la pêche maritime est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les dépenses de formation engagées par le candidat à la création ou la reprise d’une exploitation agricole sont éligibles en tout ou partie au financement du fonds d’assurance de formation des non-salariés agricoles selon les critères définis par le conseil d’administration du fonds.

« Le fonds d’assurance de formation des non-salariés agricoles peut abonder le compte professionnel de formation du candidat à la création ou la reprise d’une exploitation agricole. »

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 257 rectifié ter.

M. Yves Bleunven. Le présent amendement vise à permettre à Vivea, le fonds d’assurance formation des non-salariés en agriculture, de cofinancer en tout ou partie les porteurs de projet d’installation en agriculture mobilisant leur compte personnel de formation (CPF), par exemple, et ainsi de contribuer à la politique publique de renouvellement des générations en agriculture.

Il tend à supprimer la condition aux termes de laquelle Vivea intervient par abondement du CPF uniquement « à défaut d’un financement par un organisme de financement de la formation professionnelle continue ou de demandeurs d’emploi », qui est porteuse d’une grande rigidité.

Ainsi, les dispositions du code du travail qui, à l’article L. 6323-4, permettent déjà l’abondement du CPF par les fonds d’assurance-formation seront rappelées au sein du code rural et de la pêche maritime.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 843.

Mme Annie Genevard, ministre. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 257 rectifié ter et 843.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 10 bis A est ainsi rédigé.

Article 10 bis A
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Après l’article 10 bis

Article 10 bis

Le livre III du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le chapitre préliminaire du titre III est complété par un article L. 330-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 330-9. – Le droit à l’essai est défini comme une période au cours de laquelle une ou plusieurs personnes physiques majeures expérimentent un projet d’agriculture en commun avec un statut d’associé à l’essai.

« Afin de préparer son projet d’association au sein d’une société ayant pour objet principal l’exploitation agricole, toute personne majeure peut effectuer un test d’association à l’essai. Dans le même objectif, un chef d’exploitation déjà installé peut, en vue de la constitution d’une société à objet principalement agricole avec un ou plusieurs autres exploitants agricoles ou de son entrée dans une telle société, effectuer un test d’association à l’essai.

« L’essai est encadré par une convention écrite liant cette personne et la société dans laquelle se réalise le test ou les exploitants agricoles concernés par le test. Cette convention précise les conditions de réalisation de l’essai et détermine les conditions d’exercice de l’activité au sein de l’exploitation agricole, notamment la participation au travail en commun ainsi qu’aux décisions relatives à la direction collective de l’exploitation. Elle précise, selon le cas, le statut sous lequel est placée la personne réalisant le test ou que le test relève des articles L. 325-1 à L. 325-3. La convention prévoit un accompagnement relationnel réalisé par une personne qualifiée.

« L’essai est réalisé sur une période d’un an, renouvelable une fois, avec l’accord de l’autorité administrative ; la fin de la convention fait l’objet d’une déclaration à l’autorité administrative.

« La convention d’association à l’essai ne peut s’accompagner de la détention d’une part quelconque du capital social de la société d’exploitation agricole ni d’aucune part en industrie. S’il n’exerce pas déjà une activité agricole, l’associé à l’essai n’est pas considéré comme installé au sens du présent chapitre.

« Nonobstant l’exécution de la fin du contrat régissant le statut sous lequel est placée la personne réalisant le test ou la fin du contrat d’entraide, il peut être mis un terme à tout moment à la convention d’association à l’essai par l’une des parties, sans que la convention puisse engager financièrement ni obliger l’associé à l’essai ou la société au sein de laquelle l’essai est réalisé.

« France installations-transmissions constitue le réseau de référence pour informer, accompagner et formaliser la convention d’association à l’essai définie au présent article.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. » ;

2° L’article L. 325-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les chefs d’exploitation relevant de l’article L. 330-9 peuvent convenir d’exercer l’essai sous le régime de l’entraide. Dans ce cas, aucune société n’est formée entre eux. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 619 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon et Belin, Mmes Josende et Joseph, MM. Genet, Somon et Bacci, Mmes Dumont et Drexler, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, M. Reynaud, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon.

L’amendement n° 938 rectifié est présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre préliminaire du titre III du livre III du code rural et de la pêche maritime est complété par deux articles L. 330-9 et L. 330-10 ainsi rédigés :

« Art. L. 330-9. – I. - Afin de préparer son projet d’exercice en commun de l’activité agricole, toute personne physique majeure peut effectuer un essai d’association.

« L’essai s’entend d’une période d’un an, renouvelable une fois, au cours de laquelle cette personne, qu’elle ait ou non déjà la qualité de chef d’exploitation, expérimente un projet d’exploitation en commun dans une société à objet principalement agricole ou avec un ou plusieurs autres exploitants agricoles.

« Sauf lorsque l’essai est effectué par un aide familial, la personne à l’essai est liée à la société ou aux exploitants par un contrat de travail, d’apprentissage, de stage ou, lorsqu’elle a la qualité de chef d’exploitation, par un contrat d’entraide au sens du présent code.

« L’essai n’est pas considéré comme une installation au sens du présent code.

« II. - Sans préjudice du contrat liant la personne à l’essai et la société ou les exploitants, l’essai est formalisé dans une convention écrite conclue à titre gratuit, dont le modèle est établi par arrêté du ministère chargé de l’Agriculture.

« Cette convention précise les conditions de réalisation de l’essai, en prévoyant notamment un accompagnement relationnel par une personne qualifiée.

« Elle ne peut prévoir pour la personne à l’essai ni détention de parts sociales, ni participation aux bénéfices, ni contribution aux pertes. Elle ne forme pas un contrat de société.

« Elle est conclue pour une durée d’un an, renouvelable une fois. Elle peut être résiliée à tout moment et sans indemnité par l’une ou l’autre des parties.

« III. - Le réseau mentionné à l’article L. 330-4 informe les personnes souhaitant effectuer un essai agricole.

« IV. - Les conditions d’application du présent article peuvent être précisées par voie réglementaire.

« Art. L. 330-10. – Le salarié qui souhaite participer à l’activité d’une exploitation agricole dans les conditions prévues à l’article L. 330-9 peut solliciter le congé mentionné au 1° de l’article L. 3142-105 du code du travail, dans les conditions prévues à la section III du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie de ce code, sous réserve des dispositions suivantes.

« Par dérogation aux articles L. 3142-117 et L. 3142-119 du code du travail, la durée du congé prévu au présent article est d’un an. Elle peut être prolongée au plus d’un an. »

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 619 rectifié bis.

M. Daniel Gremillet. Aujourd’hui, en France, plus de 40 % des exploitations agricoles prennent une forme sociétaire : groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec), exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) ou société civile d’exploitation agricole (SCEA).

La forme sociétaire permet à davantage d’acteurs du secteur de poursuivre une activité agricole et de répondre aux exigences actuelles de l’agriculture et de la société.

Cet amendement vise à permettre à une société d’accueillir en son sein une personne qui y travaillera, sera rémunérée, sera associée aux décisions et participera aux bénéfices, d’ailleurs sans prendre le risque des pertes. Pour cela, il est nécessaire de créer un statut d’associé à l’essai.

En outre, ce dispositif doit être sécurisé, car il concernera pour l’essentiel des salariés.

Ainsi, nous proposons que, comme c’est le cas pour un salarié qui reprend une entreprise, le contrat de travail de l’intéressé soit suspendu, et non rompu, durant la période d’essai. Ainsi, si l’essai n’est pas concluant, il pourra retrouver son poste antérieur ; dans le cas contraire, il pourra s’installer et devenir membre de la société concernée.

Nous permettrons ainsi à davantage de femmes et d’hommes, qui seront de moins en moins issus de familles d’agriculteurs, d’intégrer une exploitation agricole, ce qui apportera une réponse positive au très lourd déficit auquel notre pays est confronté en matière de reprise et d’installation des jeunes.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 938 rectifié.

M. Franck Menonville, rapporteur. L’association dans une société n’est pas simple. Il s’agit d’un projet à la fois entrepreneurial et personnel, mais aussi d’une question de relations humaines. Il convient donc de tester ces différentes dimensions.

Tel est l’objet de ce droit à l’essai que nous entendons ainsi mettre en place. Ce statut est sécurisant, tant pour le cédant et les associés existants, qui ouvrent leur société, que pour l’entrant, qui peut ainsi s’assurer qu’il y sera bien et qu’il pourra mener son projet à terme.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Aux arguments qui ont déjà été avancés, notamment la nécessité d’assurer la sécurisation juridique, j’en ajoute un autre : le dispositif prévu par ces amendements présente l’intérêt de permettre à un jeune se lançant dans une association de producteurs d’en mesurer toutes les implications personnelles.

En effet, je suis frappée de voir combien les mésententes se multiplient, par exemple au sein des Gaec. Les conflits, parfois interminables, sont très complexes ; ils font courir de grands risques aux exploitations et déstabilisent les associés.

Le droit à l’essai est intéressant, car il permet de mesurer concrètement ce que signifie être associé et de se rendre compte qu’un divorce d’association, toujours compliqué, emporte des conséquences importantes.

Pour cette raison et pour celles qui ont été avancées auparavant, le Gouvernement émet un avis tout à fait favorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Mme Marie-Do Aeschlimann. L’idée d’un droit à l’essai en agriculture est très positive. Si les terres cultivées agricoles ne sont pas nombreuses dans le département des Hauts-de-Seine, la moitié du territoire de l’Île-de-France est de nature agricole.

Or je rencontre de nombreuses personnes qui, dans une seconde partie de leur vie active, souhaitent se reconvertir et donner du sens à leur vie professionnelle, notamment en se rapprochant de la nature. Toutefois, comme elles ne sont pas fils ou filles d’agriculteur, ces personnes ne peuvent être certaines que leurs aspirations correspondent à cette expérience professionnelle et à la réalité si singulière de la vie d’agriculteur.

Donner aux actifs la possibilité de bénéficier d’un droit à l’essai est donc une bonne chose.

En outre, dans le cadre du renouvellement des générations, il est important d’aider davantage de jeunes à s’orienter et à se former aux métiers agricoles, mais aussi de donner aux actifs, parfois d’un certain âge, la possibilité de retrouver un métier qui a du sens.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Nous voterons en faveur de ces deux amendements identiques, par idéologie et en assumant complètement notre dogmatisme, car il est important de soutenir le travail collectif ! (Sourires.)

En effet, on constate que les jeunes projetant de s’installer se tournent non vers des Gaec, mais plutôt vers des structures individuelles, pourtant souvent plus précaires et fragiles. Il est donc très important d’encourager ce système d’association provisoire, tout en maintenant une porte de sortie si l’essai n’est pas concluant.

Vous l’avez bien expliqué, madame la ministre, le système présente l’intérêt de faire comprendre à de futurs associés quelles sont les difficultés, mais aussi les avantages et la sécurité que fournit l’association, en matière tant de savoir-faire que de revenus.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Nous sommes également très favorables au droit à l’essai, particulièrement efficace pour les personnes qui ne sont pas issues du milieu agricole.

J’ai reçu le témoignage d’une personne qui voulait s’installer en Gaec, mais avec des membres de sa famille. Or cette hypothèse, loin d’être plus simple, était très compliquée à mettre en œuvre. Il est essentiel de disposer d’un temps d’appropriation du travail collectif avant de voir si l’on peut poursuivre l’essai.

En revanche, nous avons défendu lors de l’examen des articles 1er et 8 des droits à l’essai bien plus étendus, qui comportaient en particulier la possibilité de tests, dont le manque se fait cruellement sentir.

Nous ne sommes pas parvenus à faire adopter ces dispositions par le Sénat. Pourtant, de tels tests sont essentiels pour les expérimentations, parfois réalisées en dehors du cadre collectif, que nous défendons par ailleurs. Ils permettent également à un jeune, ou à un moins jeune, d’expérimenter et de constater ce qui fonctionne, ou non, avant de s’engager durablement.

Nous voterons donc en faveur de ces amendements, mais en regrettant beaucoup que le dispositif n’ait pas été élargi et qu’il demeure trop restrictif.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. Il s’agit ici de créer un statut visant à favoriser la reprise et la pérennisation des exploitations agricoles. Le droit à l’essai est un atout, et nous voterons par conséquent en faveur de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je remercie Mme la ministre de son avis favorable.

Nous sommes en train de combler un vide. Dans les années 1980, quand je n’avais pas encore de cheveux blancs et que j’étais président du Centre départemental des jeunes agriculteurs (CDJA) des Vosges, nous avions créé le contrat emploi formation installation, financé par le conseil général.

Dès cette époque, le souci était d’accueillir des personnes qui n’étaient pas issues du milieu agricole. En effet, la condition pour pouvoir souscrire ce contrat est de ne pas avoir de lien de parenté avec la personne transmettant son exploitation.

Comme Mme la ministre l’a souligné, dans la plupart des sociétés, les échecs sont dus non à des raisons financières, mais à des mésententes ou à des incompréhensions, qui font parfois s’écrouler de très beaux projets.

Le dispositif que nous allons adopter constitue un premier pas, mais nous devrons le consolider pour permettre à tous les agriculteurs, réunis dans une association ou bien à titre individuel, de bénéficier de ce droit à l’essai. Nous devons accueillir les femmes et les hommes qui ont envie de prendre la responsabilité de devenir agriculteur.

Nous avons beaucoup parlé du métier d’éleveur. À cinq années de la retraite, combien d’exploitants ont envie d’avoir un jeune à leurs côtés, qui leur permet d’éviter le déclin de leur exploitation et de conserver leur enthousiasme ? Car c’est ainsi que nous y arriverons !

Mes chers collègues, je le répète, nous nous apprêtons à faire un premier pas, mais il faudra retravailler ce dispositif.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 619 rectifié bis et 938 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 10 bis est ainsi rédigé, et les amendements nos 450 et 132 rectifié quater, les amendements identiques nos 72 rectifié, 198 rectifié ter, 217 rectifié, 240 rectifié bis, 250 rectifié quater et 650 rectifié bis, ainsi que l’amendement n° 698 rectifié, n’ont plus d’objet.

Article 10 bis
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Article 11

Après l’article 10 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 700 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon et Belin, Mmes Josende et Joseph, MM. Genet, Somon et Bacci, Mme Dumont, M. Pointereau, Mmes Bellurot et Drexler, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon, est ainsi libellé :

Après l’article 10 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 321-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 321-7.- Le chef d’exploitation et l’associé d’exploitation prévoient, d’un commun accord et par écrit, que la participation à la mise en valeur de l’exploitation relève du statut d’associé d’exploitation, ainsi que le délai dans lequel l’une ou l’autre des parties pourra dénoncer l’adhésion au statut. » ;

2° L’article L. 321-8 est abrogé ;

3° Au début de l’article L. 321-9, les mots : « À défaut du chef d’exploitation et de l’associé d’exploitation à la convention type départementale prévue à l’article L. 321-7, en cas de dénonciation ou à défaut d’existence d’une telle convention, » sont supprimés ;

4° L’article L. 321-10 est ainsi modifié :

a) La première phrase est supprimée.

b) Au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut de convention type, » sont supprimés ;

5° Le second alinéa de l’article L. 321-12 est supprimé.

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Cet amendement vise à reprendre le statut d’associé d’exploitation créé en 1964, à la suite des lois d’orientation agricole. Ce statut était réservé aux fils et aux filles d’agriculteurs, qui pouvaient en bénéficier pendant un certain temps. Il a besoin d’être toiletté : figurez-vous que, à l’époque, si un associé d’exploitation se mariait, il perdait son statut dans les deux ans.

Cet amendement tend également à effectuer un autre toilettage : les bases de rémunération de ce statut sont toujours fixées à 860 francs de l’époque…

Ce statut est issu des grandes lois d’orientation de 1960 et 1962, qui ont permis de faire tellement évoluer l’agriculture dans nos territoires. Même s’il n’apporte pas toutes les réponses, je propose ici de le restaurer et d’en profiter pour mettre à jour l’indemnité mensuelle que toucheraient les jeunes qui bénéficieraient de ce statut.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Je comprends l’enjeu et l’engagement de Daniel Gremillet, mais je préfère que nous investissions le dispositif qui a été adopté à l’instant à l’article 10 bis. Le statut d’associé d’exploitation existe depuis longtemps, mais il n’a pas été beaucoup utilisé.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur Gremillet, je vous rejoins : ce statut mérite d’être réinterrogé, voire actualisé. En effet, son application est demeurée assez faible. En revanche, il ne me semble pas souhaitable d’inscrire cette évolution dans la loi.

Une étude d’impact préalable est nécessaire : il faut prendre le temps de la réflexion. Si vous le souhaitez, monsieur le sénateur, nous pourrons y travailler ensemble.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Madame la ministre, je vous remercie de votre proposition. Il est important de travailler sur ce statut, car il serait dommage d’abandonner ce qui a été réalisé dans les années 1960.

En tout cas, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 700 rectifié est retiré.

Après l’article 10 bis
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Après l’article 11

Article 11

(Non modifié)

La section 2 du chapitre Ier du titre V du livre III du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 351-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 351-8-1. – Lorsqu’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire est ouverte à l’égard d’une entreprise exerçant une activité agricole, au sens de l’article L. 311-1, et membre de l’un des groupements d’employeurs mentionnés aux articles L. 1253-1 et L. 1253-17 du code du travail, les créances détenues par ce groupement d’employeurs sur cette entreprise sont garanties :

« 1° Pour la part des créances correspondant à la facturation des sommes dues aux salariés mis à la disposition de l’entreprise, par des privilèges identiques à ceux applicables aux créances des salariés dans les conditions prévues au 3° de l’article 2331 et au 2° de l’article 2377 du code civil et aux articles L. 3253-2 et L. 3253-4 du code du travail ;

« 2° Pour la part des créances correspondant à la facturation des charges sociales dues au titre des salariés mis à la disposition de cette entreprise, par un privilège identique à celui applicable aux créances des organismes de sécurité sociale dans les conditions prévues à l’article L. 243-4 du code de la sécurité sociale. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, sur l’article.

Mme Marion Canalès. L’objectif du projet de loi est également de permettre le renouvellement des générations. Alors que, à ce titre, il faudrait envoyer des signaux positifs à la protection sociale des agriculteurs, ce sujet n’a malheureusement pas été inclus dans ce texte, ce que nous regrettons.

Les retraites des non-salariés agricoles restent en moyenne très inférieures à la moyenne des autres régimes. Surtout, les femmes retraitées agricoles, anciennes conjointes, collaboratrices et aides familiales continuent de percevoir des pensions nettement inférieures à celles de leurs compagnons du fait que leurs carrières ne sont pas reconnues ou le sont mal. Concrètement, ces femmes touchent en moyenne entre 550 euros et 700 euros de pension.

On parle de la création d’un nouveau droit à l’essai, on aborde d’autres sujets… Les avancées contenues dans les lois Chassaigne 1 et 2 ont certes permis d’améliorer les retraites de nombreux salariés agricoles, mais, depuis lors, elles ont été minorées par des dispositions d’origine gouvernementale, qui restreignent ou limitent leur portée.

Ainsi, dans nos territoires, nous constatons l’écrêtement des pensions des polypensionnés ou l’exclusion du complément différentiel de retraite complémentaire obligatoire, qui empêchent les aides familiaux ou les conjoints de toucher des pensions représentant 85 % du Smic.

En février 2023, nous avons ouvert la voie à un alignement progressif des pensions de retraite dans le PLFSS, mais des injustices demeurent, en particulier pour les veuves et les veufs. André Chassaigne y travaille, mais nous nous devons de souligner que de telles dispositions auraient pu figurer dans le projet de loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11.

(Larticle 11 est adopté.)

Article 11
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Article 12

Après l’article 11

Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard le 31 décembre 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la nécessité d’inclure les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification « agriculture et espaces verts » dans le champ d’application du décret n° 2022-1714 du 29 décembre 2022 relatif à l’aide unique aux employeurs d’apprentis et à l’aide exceptionnelle aux employeurs d’apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Par cet amendement, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport évaluant la nécessité d’inclure les groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (Geiq) « agriculture et espaces verts » dans le champ d’application du décret relatif à l’aide unique aux employeurs d’apprentis et à l’aide exceptionnelle aux employeurs d’apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.

Le 27 avril 2024, le décret portant suppression de l’aide exceptionnelle aux employeurs de salariés en contrat de professionnalisation a supprimé, à compter du 1er mai 2024 l’aide à l’embauche pour les alternants en contrat de professionnalisation, qui pouvait atteindre 6 000 euros.

Cette suppression a un impact majeur sur le fonctionnement des Geiq, ces collectifs d’entreprises pilotés par leurs adhérents, qui organisent des parcours d’insertion et de qualification.

Porté sur un territoire par les entreprises qui y adhèrent, chaque Geiq met à la disposition de celles-ci des salariés pour des parcours allant de six à vingt-quatre mois. Chaque parcours vise une qualification, généralement de premier niveau, et permet au salarié d’acquérir des savoir-faire inhérents à son poste, dans un cadre sécurisant et motivant, propice à son développement.

Cet amendement d’appel vise à étudier la possibilité de rétablir l’aide exceptionnelle aux employeurs de salariés en contrat de professionnalisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Franck Menonville, rapporteur. Monsieur Cabanel, votre amendement vise à étudier la possibilité de rétablir cette aide, mais aussi à en évaluer les impacts. Bien évidemment, la commission étant défavorable aux demandes de rapport, son avis sera défavorable.

Nous devons nous saisir des outils de contrôle dont nous disposons, comme les questions écrites ou orales au Gouvernement, ou encore les auditions en commission, pour évaluer les effets de ces décrets. Par ailleurs, Mme la ministre s’exprimera peut-être sur ce sujet.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Les contrats de professionnalisation dépendent non pas du ministère de l’agriculture, mais de celui du travail, qui est quantitativement bien plus concerné par cette question.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 11
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Après l’article 12

Article 12

(Suppression maintenue)

Mme la présidente. L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chevalier et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Brault, Capus et Chasseing, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, Médevielle, Rochette, L. Vogel, Verzelen et Wattebled, est ainsi libellé :

Rétablir l’article 12 dans la rédaction suivante :

I. - Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est complété par un article L. 322-25 ainsi rédigé :

« Art. L. 322-25. – I. – Tout groupement foncier agricole mentionné à l’article L. 322-1, qui lève des capitaux auprès d’investisseurs en vue de les investir dans l’intérêt de ces derniers et conformément à une politique d’investissement que ce groupement ou sa société de gestion définit, est un groupement foncier agricole d’investissement. Ce groupement est soumis à l’article L. 214-24 du code monétaire et financier.

« Un groupement foncier agricole d’investissement est une société civile régie par les articles 1832 à 1870-1 du code civil et par les articles L. 322-1 à L. 322-21 et L. 322-23 du présent code. Il peut offrir au public ses parts sociales.

« II. – L’offre au public de ses parts sociales par un groupement foncier agricole d’investissement est soumise aux articles L. 214-86 à L. 214-113 du code monétaire et financier et respecte les conditions suivantes :

« 1° Les statuts prévoient au profit des membres du groupement autres que les personnes morales un droit de préférence pour l’acquisition des parts mises en vente. Les statuts peuvent accorder un droit de priorité aux associés participant à l’exploitation des biens du groupement, notamment en vertu d’un bail à long terme ;

« 2° À concurrence de 15 % au moins, le capital maximal du groupement, tel que fixé par ses statuts, doit être souscrit par le public dans un délai de deux années après la date d’ouverture de la souscription. À défaut, le groupement est dissous et ses associés sont remboursés du montant de leur souscription ;

« 3° L’ensemble des biens immobiliers du groupement foncier agricole doit être donné à bail à long terme ;

« 4° L’actif du groupement foncier agricole d’investissement est constitué d’immeubles à usage ou vocation agricole en vue de l’exercice d’une activité agricole définie à l’article L. 311-1 du présent code et de liquidités ou valeurs assimilées. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions et limites de détention et de gestion de ces actifs, en particulier pour ce qui concerne la composition de l’actif du groupement foncier agricole d’investissement, les opérations d’échange et de cession de l’actif, les règles de gestion et de fusion des groupements fonciers agricoles d’investissement ;

« 5° Pour l’application de l’article L. 214-89 du code monétaire et financier, la responsabilité de chaque associé d’un groupement foncier agricole d’investissement qui a recours à l’offre au public ne peut dépasser le montant de sa part dans le capital.

« III. – Le groupement foncier agricole d’investissement mentionné au II est soumis aux articles L. 231-8 à L. 231-21 du code monétaire et financier.

« IV. – Pour l’application des articles L. 321-1, L. 411-1 à L. 412-1, L. 621-1, L. 621-8 à L. 621-8-2 et du I de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, les parts des groupements fonciers agricoles d’investissement sont assimilées à des instruments financiers.

« V. – Pour l’application des articles L. 621-5-3, L. 621-5-4 et L. 621-8-4 du code monétaire et financier, les groupements fonciers agricoles d’investissement sont assimilés à des organismes de placement collectif.

« VI. – Le règlement général de l’Autorité des marchés financiers précise les conditions d’exercice de l’activité de gestion des groupements fonciers agricoles d’investissement relevant du présent article.

« VII. – L’application du présent article ne permet de déroger à aucune des règles applicables aux baux ruraux prévues au chapitre VI du titre Ier du livre IV du code rural et de la pêche maritime. »

2° Le 3° du II de l’article L. 141-1 est complété par les mots : « ou la totalité des parts de groupements fonciers agricoles d’investissement tels que définis à l’article L. 322-25 » ;

3° Après la première phrase de l’article L. 322-13, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce délai est porté à deux ans pour les groupements fonciers agricoles d’investissement définis à l’article L. 322-25. »

II. - Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À l’intitulé du paragraphe 4 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II, après le mot : « forestière », la fin est ainsi rédigée : « , groupements forestiers d’investissement et groupements fonciers agricoles d’investissement » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 214-86, après le mot : « forestier », sont insérés les mots : « et les groupements fonciers agricoles d’investissement définis à l’article L. 322-25 du code rural et de la pêche maritime » ;

3° Aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 214-89, après le mot : « investissement », sont insérés les mots : « et des groupements fonciers agricoles d’investissement » ;

4° Au début du deuxième alinéa de l’article L. 214-103, sont ajoutés les mots : « Sous réserve de l’article L. 322-10 du code rural et de la pêche maritime, ».

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur de la commission des affaires économiques. La commission n’a pas souhaité réintroduire l’article 12, supprimé par nos collègues députés.

Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Comme M. le rapporteur vient de l’indiquer, la question a été assez longuement débattue par l’Assemblée nationale. Nous n’avons pas voulu ouvrir le foncier agricole aux fonds d’investissement privés, car nous ne souhaitions pas risquer de financiariser les terres agricoles.

Pour autant, hier, le Sénat a adopté un amendement de M. le rapporteur visant à créer des fonds d’investissement mixtes, public-privés, toujours placés sous la tutelle ou le contrôle de l’État, qui s’implique dans leur gestion, ce qui limite les risques en matière de financiarisation des terres.

Au reste, ce dispositif existe déjà : il ne s’agissait que de l’inscrire dans la loi. Mais il n’est pas bien formulé.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. En effet, nous avons chassé les groupements fonciers agricoles d’investissement (GFAI) par la porte, mais, hier, ils sont revenus par la fenêtre : le Sénat a ouvert le foncier agricole à l’investissement privé, en l’encadrant peut-être un peu plus, mais en ouvrant tout de même une brèche.

Hier, nous avons voté contre l’intrusion du privé dans le foncier agricole,…

Mme Annie Genevard, ministre. Cela existe déjà !

M. Daniel Salmon. … car nous estimons que celui-ci doit absolument être protégé de toute spéculation.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Hier, nous n’avons pas du tout ouvert de brèche ! Nous avons permis, lorsque les collectivités investissent dans le foncier agricole, que le secteur privé fasse un apport à cet investissement. Ce n’est pas du tout la même chose !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Exactement !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour explication de vote.

M. Christian Redon-Sarrazy. Le point ne m’a pas semblé aussi clair que les explications de la ministre… J’en appelle à la vigilance lors de la commission mixte paritaire, pendant laquelle ce sujet reviendra probablement.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous serons vigilants !

M. Christian Redon-Sarrazy. Nous devrons préciser les modalités selon lesquelles le secteur privé peut concourir au portage du foncier.

En effet, nous avons peut-être ouvert une porte par laquelle je ne doute pas que certains investisseurs français ou étrangers seraient prêts à s’engouffrer. Soyons prudents et clarifions ce point lors de la navette.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Je voudrais vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs. Hier, nous n’avons fait qu’inscrire dans la loi des pratiques qui ont déjà cours en matière foncière, à savoir l’association de fonds publics et privés. Dès que ce type d’association a lieu, l’État porte un regard sur la situation.

C’est par exemple le cas avec le fonds Entrepreneurs du vivant ou avec Terre de liens, ou peut-être même avec la société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), qui – je parle sous le contrôle des spécialistes – est un organisme à caractère privé exerçant des missions de service public.

Plusieurs types de sociétés privées peuvent être intéressés par ces investissements, qu’il s’agisse du privé associatif ou du privé investi de missions de service public. Dès lors que l’État est présent dans le dispositif, il n’y a rien à craindre.

M. Jean-Claude Tissot. Cela dépend à quelle hauteur !

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement ne participe pas à la réunion de la commission mixte paritaire, bien évidemment, mais je vous garantis qu’il ne poussera pas à modifier le texte sur ce point.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 12 demeure supprimé.

Article 12
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Article 12 bis

Après l’article 12

Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 111-2-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les projets alimentaires territoriaux comportent une stratégie sur l’aménagement foncier rural et sur l’évolution des structures d’exploitation agricoles. Les porteurs de projets alimentaires territoriaux sont consultés pour avis sur les demandes d’autorisation d’exploiter et les cessions opérées par les sociétés d’aménagement et d’établissement rural. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 143-7-2, après les mots : « informe les maires », sont insérés les mots : « et les porteurs de projets alimentaires territoriaux ».

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à financer le déploiement des projets alimentaires territoriaux en associant leurs porteurs à la politique foncière agricole.

Pour rappel, les projets alimentaires territoriaux répondent à l’objectif de structurer l’économie agricole et d’élaborer un système alimentaire territorial, en rapprochant les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivités territoriales et les consommateurs, mais aussi en développant une agriculture de qualité sur les territoires.

Ces projets fonctionnent très bien. Ils participent à la consolidation de filières territorialisées, à la lutte contre le gaspillage et la précarité alimentaire, ainsi qu’au développement de la consommation de produits issus de circuits courts, qui relèvent souvent de productions biologiques ou d’une démarche collective de certification environnementale.

Ils favorisent la résilience économique et environnementale des filières territorialisées, permettent une alimentation saine, durable et accessible, et contribuent en outre à la garantie de la souveraineté alimentaire nationale.

Il semble donc cohérent d’inclure les porteurs de projets alimentaires territoriaux, en particulier les collectivités territoriales, à la politique foncière agricole. Nous proposons qu’ils soient consultés pour avis au sujet des demandes d’autorisation d’exploiter et en cas de cession opérée par des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Monsieur Cabanel, nous avons envie de voter votre amendement, mais que signifie cette association des porteurs de projets alimentaires territoriaux à la politique foncière agricole ?

Quelle structure recueillerait-elle l’avis des collectivités ? La commission départementale d’orientation de l’agriculture (CDOA) ? Et ne faisons-nous que leur demander leur avis, ou nous engageons-nous à en tenir compte ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 525 rectifié est présenté par MM. Masset, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 685 est présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l’article L. 312-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il tient compte des orientations des projets alimentaires territoriaux définis à l’article L. 111-2-2. ».

La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 525 rectifié.

M. Éric Gold. Cet amendement a pour objet que le schéma directeur régional des exploitations agricoles tienne compte des orientations des projets alimentaires territoriaux, que M. Cabanel vient d’évoquer.

Les transmissions et reprises nécessitent de déployer une approche de détection et d’accompagnement en amont, en vue de construire des trajectoires lisibles correspondant aux objectifs des territoires.

Il est donc essentiel de garantir une meilleure articulation entre projets alimentaires territoriaux et gouvernance foncière, afin d’assurer la résilience économique et environnementale des filières territorialisées, de permettre une alimentation saine, durable et accessible et de contribuer à la garantie de la souveraineté alimentaire nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 685.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement identique, travaillé avec France urbaine et AgriParis Seine, a pour objet d’assurer la bonne inclusion des projets alimentaires territoriaux dans l’écosystème agricole, notamment avec les schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles (Sdrea) élaborés en concertation avec les acteurs du monde agricole à l’échelle des régions.

Justement, l’articulation entre ces schémas et les projets des collectivités locales mérite d’être améliorée. Les transmissions et les reprises d’exploitations nécessitent de déployer une approche de détection et d’accompagnement en amont, en vue de construire des trajectoires d’installation et de transmission lisibles et correspondant aux objectifs du territoire.

Il est donc essentiel de garantir une meilleure articulation entre projets alimentaires territoriaux et gouvernance foncière.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous l’assumons, nous ne voulons pas alourdir ou complexifier les éléments du schéma directeur régional des exploitations agricoles.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 525 rectifié bis et 685.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Après l’article 12
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 12 bis

Article 12 bis

Avant le chapitre Ier du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime, il est ajouté un article L. 320-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 320-1. – Dans des conditions définies par décret, les sociétés civiles mentionnées aux chapitres II, III, IV et VII du présent titre peuvent compléter les activités mentionnées à l’article L. 311-1 par des activités connexes ou complémentaires qui s’inscrivent dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation, ainsi que l’ensemble des opérations, artisanales, commerciales et non commerciales connexes à l’activité agricole. Les recettes tirées de ces activités sont limitées à 20 000 euros, correspondant au plus à 50 % de leurs recettes annuelles issues de l’activité agricole. Pour les groupements visés au chapitre III, le plafond de 20 000 € est multiplié par le nombre d’associés que compte le groupement. »

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 916, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 320-1. Les sociétés mentionnées aux chapitres II, III, IV et VII du présent titre peuvent, sans perdre leur caractère civil, compléter les activités mentionnées à l’article L. 311-1 par des activités accessoires de nature commerciale, et présentant un lien avec l’activité agricole. Les recettes tirées de ces activités accessoires n’excèdent ni 20 000 euros ni 40 % des recettes annuelles tirées de l’activité agricole. Pour les groupements visés au chapitre III, le plafond de 20 000 euros est multiplié par le nombre d’associés que compte le groupement. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement a pour objet de clarifier la rédaction retenue par l’Assemblée nationale, de plafonner certains montants et de permettre une consolidation juridique du dispositif prévu.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 258 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Levi, Mmes Gacquerre et Jacquemet et MM. de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 785 rectifié est présenté par M. Gremillet, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon et Belin, Mme Josende, MM. Genet, Somon et Bacci, Mme Dumont, M. Pointereau, Mmes Bellurot, Drexler et Joseph, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Dans des conditions définies par décret, les sociétés civiles mentionnées aux chapitres II, III, IV et VII du présent titre peuvent compléter les activités mentionnées à l’article L. 311-1 par des activités artisanales, commerciales et non commerciales connexes ou complémentaires à l’activité agricole.

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 258 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Rejoignant les objectifs définis tant par l’Assemblée nationale que par les rapporteurs de la commission des affaires économiques du Sénat, cet amendement vise à autoriser les sociétés civiles agricoles à pratiquer, à la marge et de manière très limitée, des activités commerciales accessoires.

Il a pour objet de clarifier le champ des activités non agricoles qui pourraient être ouvertes aux sociétés civiles agricoles.

Des dispositions de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, il résulte que « les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation » sont déjà « réputées agricoles ». Par conséquent, les sociétés civiles agricoles sont d’ores et déjà autorisées à les réaliser.

Afin d’éviter toute confusion entre les activités réputées agricoles au regard des dispositions dudit article et les nouvelles activités non agricoles ouvertes aux sociétés civiles agricoles à l’article 12 bis, nous proposons de supprimer la référence aux activités « connexes ou complémentaires qui s’inscrivent dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation ».

Par ailleurs, afin d’encadrer la dérogation qui leur serait exclusivement ouverte, seules les activités connexes ou complémentaires à l’activité agricole des sociétés civiles agricoles seraient admises. Ainsi, nous pourrons atteindre l’objectif de simplifier le dispositif.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 785 rectifié.

M. Daniel Gremillet. Il a été parfaitement défendu par notre collègue, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 258 rectifié bis et 785 rectifié ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Mes chers collègues, la réécriture globale de l’article 12 bis proposée par la commission satisfait votre demande : notre amendement a pour objet de consolider juridiquement le dispositif, et nous avons suivi les mêmes louables intentions que vous.

Je sollicite donc le retrait de ces deux amendements identiques, au profit de l’amendement n° 916 de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. L’amendement n° 916 de M. le rapporteur vise à sécuriser l’exercice des activités commerciales accessoires à l’activité agricole, en particulier en limitant les recettes issues des activités non agricoles à 40 % des recettes totales.

Le Gouvernement demande donc le retrait des amendements identiques nos 258 rectifié bis et 785 rectifié au profit de celui de M. le rapporteur, sur lequel il émet un avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Nous pourrions voter en faveur de l’amendement de M. le rapporteur, mais nous avons besoin d’une précision. Est-ce que les productions d’énergie sont comprises parmi les activités accessoires de nature commerciales et présentant un lien avec l’activité agricole ? La méthanisation, par exemple, serait-elle concernée ?

En effet, si ces productions sont limitées à 40 % de la richesse agricole, mais qu’il n’y a pas de plafond, il me semble difficile de défendre une telle proposition.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il y a un plafond !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur, votre question est tout à fait pertinente.

Je ne souhaite pas que les recettes d’une activité tirée de la production d’énergie excèdent un jour le produit de l’activité agricole. La production agricole ne doit pas devenir un sous-produit de l’énergie, c’est clair !

M. Jean-Claude Tissot. C’est aussi ce que nous disions auparavant !

Mme Annie Genevard, ministre. Je le répète, mon opinion sur le sujet est constante.

Il me semble que la production d’énergie est incluse dans les activités commerciales non agricoles, de sorte que l’on évite le risque que vous mentionnez.

M. Jean-Claude Tissot. Nous sommes d’accord !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Mon amendement étant satisfait, d’après les explications tant de M. le rapporteur que de Mme la ministre, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 785 rectifié est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Par politesse, je rendrai à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu, en remerciant les services du ministère, qui nous ont apporté une aide précieuse pour clarifier juridiquement la rédaction de cet amendement.

Monsieur Tissot, il serait logique, au nom de la continuité, que la production d’énergie soit comprise au sein des activités accessoires de nature commerciale connexes à l’activité agricole. La raison en est simple : cette production permet déjà de bénéficier de l’exonération accordée aux zones de revitalisation rurale (ZRR), car elle est conçue comme un prolongement de l’activité agricole.

De plus, cet article tend à mettre en place un plafond de 20 000 euros. La production d’énergie renouvelable visée ne serait donc pas d’un rendement financier extrêmement important.

M. Christian Redon-Sarrazy. C’est bien pour cela que je posais la question !

Mme la présidente. Monsieur Bleunven, l’amendement n° 258 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Yves Bleunven. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 258 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 916.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 12 bis, modifié.

(Larticle 12 bis est adopté.)

Article 12 bis
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 12 ter

Après l’article 12 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 1 rectifié ter, présenté par Mmes Dumont et Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci et Belin, Mmes Bellamy, Bellurot, Belrhiti et Borchio Fontimp, M. Brisson, Mme Canayer, MM. Daubresse et de Nicolaÿ, Mme Di Folco, M. Genet, Mmes Gruny, Imbert, Josende et Lassarade, MM. D. Laurent et H. Leroy, Mmes Malet, M. Mercier, Micouleau, Muller-Bronn et Noël, MM. Panunzi et Pointereau, Mme Puissat, MM. Rapin et Somon, Mme Ventalon, MM. P. Vidal, J.-P. Vogel et Favreau, Mme F. Gerbaud et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il en est de même des revenus tirés des fermes-auberges, des gîtes à la ferme, des chambres d’hôtes à la ferme, des tables d’hôtes à la ferme, des campings à la ferme, de l’accueil des enfants dans le cadre scolaire ou de loisirs dans les fermes pédagogiques, permettant à un ou plusieurs exploitants agricoles de faire découvrir les métiers du monde agricole, ses productions ainsi que plus généralement le mode de vie rural. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement a été déposé par Françoise Dumont, qui est retenue ailleurs. Il est cosigné par plusieurs de nos collègues ici présents.

À ce jour, les activités d’accueil touristique proposées par les agriculteurs sont assujetties non pas à la fiscalité agricole, mais à la fiscalité commerciale, à l’exception des prestations équestres. Ces activités sont pourtant clairement reconnues comme des leviers pédagogiques pour favoriser le « manger mieux » et le « manger local ».

L’agrotourisme étant considéré comme une activité économique, les exploitants doivent s’acquitter des impôts et des taxes correspondants, même si certaines spécificités et exonérations peuvent s’appliquer selon la nature des prestations et les recettes fiscales induites par l’activité commerciale.

Afin d’aider les agriculteurs à élargir, s’ils le désirent, leur champ de travail et de favoriser le développement, souhaitable, de cette pratique en France, cet amendement vise donc à réputer agricoles, aux termes de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, les activités de l’agrotourisme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement est déjà satisfait, et cela à un double titre.

D’une part, l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime inclut déjà dans les activités agricoles les activités qui sont exercées par un exploitant dans le prolongement de l’acte de production. Par définition, l’agrotourisme est concerné.

D’autre part, l’article 12 bis que nous venons d’adopter a précisément pour objet d’inclure ces activités, dans la limite d’un plafond de 20 000 euros.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Madame Aeschlimann, l’amendement n° 1 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Marie-Do Aeschlimann. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 1 rectifié ter est retiré.

Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 154 rectifié est présenté par M. Gillé.

L’amendement n° 218 rectifié bis est présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, de Nicolaÿ, J.-M. Arnaud, Brault et Levi, Mmes Billon et Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger et Fargeot, Mme Saint-Pé, M. Chevalier, Mme Gacquerre, M. Chasseing, Mmes Romagny, Jacquemet et de La Provôté et MM. Pillefer, Somon, Gremillet et Daubet.

L’amendement n° 490 rectifié quater est présenté par MM. Khalifé, Lefèvre et Mizzon, Mme Belrhiti, MM. Burgoa, Milon et Panunzi, Mme Guidez, MM. Saury et P. Vidal, Mme Dumont, MM. Piednoir, Brisson, Sautarel, Grosperrin, Courtial et Paul, Mmes Borchio Fontimp, Micouleau et Malet, M. H. Leroy, Mme Ventalon, M. Belin, Mmes Goy-Chavent et Bellurot, M. Lemoyne, Mme Aeschlimann et M. Cuypers.

L’amendement n° 588 rectifié est présenté par M. Buis.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il en est de même pour les entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers. »

La parole est à M. Hervé Gillé, pour présenter l’amendement n° 154 rectifié.

M. Hervé Gillé. Cet amendement a pour objet de faciliter l’accès des entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers, définies dans le cadre de l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, aux dispositifs d’aides, de financement et d’accompagnement proposés par les différentes structures publiques.

Seraient concernés la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf), la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » (Casdar), la commission régionale de l’économie et du monde rural (Coream), le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), les agences de l’eau, Écophyto…

Les entreprises de travaux et de services agricoles jouent un rôle essentiel dans le maintien et le développement du secteur agricole et rural. Elles ne bénéficient pourtant pas toujours d’un soutien proportionnel à leur importance dans la chaîne de valeur de l’agriculture durable. Leur éligibilité aux divers mécanismes serait donc bienvenue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 218 rectifié bis.

Mme Anne-Catherine Loisier. J’ajoute que ce dispositif permettrait aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers de contribuer davantage à la transition écologique. Elles le font déjà au quotidien, mais leur action n’est pas reconnue par l’ensemble des administrations.

Mme la présidente. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l’amendement n° 490 rectifié quater.

M. Khalifé Khalifé. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 588 rectifié.

M. Bernard Buis. Il est également défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Le problème de ces quatre amendements identiques est que la jurisprudence ne semble pas complètement claire quant à savoir si ces entreprises de travaux sont réputées agricoles ou non. Elles exercent dans ce secteur, c’est indéniable. Mais il est tout aussi vrai qu’il s’agit de prestataires de marché n’ayant pas juridiquement la maîtrise directe du cycle de production…

Placés devant cette incertitude et ne mesurant pas parfaitement les implications qu’aurait une telle reconnaissance, nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Ces quatre amendements identiques visent à modifier l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime. Leur objectif est d’y intégrer les activités de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers.

Le droit national distingue les activités civiles des commerciales. À ce titre, il convient de noter que l’article du code visé par cet amendement précise que l’activité agricole se définit par « un caractère civil ».

Or les entreprises dont il est ici question ont vocation à proposer des prestations de services aux exploitants agricoles et aux propriétaires forestiers. Cette activité pour le compte de tiers revêt un caractère commercial au sens de l’article L. 110-1 du code de commerce et se distingue ainsi de l’activité agricole au sens de l’article L. 311-1.

Il n’est pas pertinent d’inclure ces activités dans le champ de l’article L. 311-1. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 154 rectifié, 218 rectifié bis, 490 rectifié quater et 588 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12 bis.

L’amendement n° 699 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon, Belin, Genet, Somon et Bacci, Mmes Dumont, Drexler et Josende, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent, Milon et P. Vidal, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au quatrième alinéa de l’article L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « groupement », sont insérés les mots : « , à l’exception des activités de vente de la production du groupement exercées dans un magasin de producteur défini à l’article L. 611-8 et dans les mêmes conditions que celles prévues au troisième alinéa de l’article L. 323-7. »

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Plongeons-nous dans la vie réelle ! Cet amendement vise à accorder aux groupements agricoles d’exploitation en commun (Gaec) une participation effective aux magasins de producteurs. Ces derniers sont nombreux à voir le jour actuellement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 699 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12 bis.

L’amendement n° 702 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon, Bruyen, Belin, Genet, Somon et Bacci, Mmes Dumont, Drexler et Josende, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent, Milon et P. Vidal, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 323-2 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots : « ou à un assolement en commun défini à l’article L. 411-39- 1 ».

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Cet amendement vise également à prendre en compte les problématiques actuelles de l’agriculture.

Les exploitations individuelles se prêtaient naguère à l’échange de parcelles. Sur le même modèle, nous proposons de permettre aux Gaec, à l’issue d’une réflexion commune, de mettre en commun l’assolement.

L’intérêt serait double. D’une part, cette pratique entraînerait des économies d’énergie au moment où nous avons tant besoin de réduire notre empreinte carbone. D’autre part, nous garantirions de meilleurs échanges entre agriculteurs sur un périmètre donné.

Cette mesure est fortement souhaitée par les sociétés. Sa pratique est d’ailleurs déjà tolérée dans certains départements. J’en parle en connaissance de cause, car la direction départementale des territoires (DDT) de ma circonscription a accepté localement la participation des Gaec à cette forme d’assolement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il est parfois difficile de reconnaître son ignorance… (Sourires.) En l’occurrence, ne sachant pas, je me rallierai à l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le plus embarrassant – j’ai l’honnêteté de le reconnaître –, c’est que cet amendement vise un dispositif que je ne connais pas non plus ! (Nouveaux sourires.). Vous nous mettez quelque peu dans l’embarras, monsieur le sénateur !

Heureusement, mes services ont travaillé sur votre proposition. Je connais bien le principe des Gaec. Cette forme sociétaire est très répandue chez moi. J’ai d’ailleurs beaucoup travaillé sur l’adoption de ces groupements entre époux et sur leur transparence. Pourtant, à ma connaissance, l’assolement en commun ne se pratique pas sur mon territoire. C’est pourquoi je suis quelque peu embarrassée par votre proposition.

De plus, vous nous affirmez que certaines DDT tolèrent ce mode de fonctionnement. Or le principe du Gaec est de mettre en commun pour l’ensemble des associés toutes les activités de production agricole. Face à cette forme de Gaec « total » existeraient donc des Gaec « partiels » : en quelque sorte ad hoc, ils permettraient l’assolement en commun.

Avant de procéder à la généralisation d’une pratique tolérée dans un département, car tel serait le cas si votre amendement était adopté, si j’ai bien compris, il nous faut creuser la question et mettre en place des concertations.

Je prends l’engagement de me pencher sur le sujet. Puisqu’une promesse similaire a déjà permis le retrait de l’un de vos précédents amendements, peut-être accepterez-vous un second retrait ?…

Mme Annie Genevard, ministre. Tant pis ! J’insiste néanmoins : avant de généraliser une telle pratique, il faut, par une étude d’impact, en évaluer les conséquences.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Cher collègue Gremillet, l’assolement en commun semble intéressant dans l’absolu.

Cette pratique signifie travailler une même unité de terrain qui appartient à deux propriétaires différents. Le problème, c’est que nous risquons d’encourager ainsi une espèce de remembrement déguisé, qui permettrait aux intéressés de disposer d’une plus grande surface. Dans le cas contraire, en effet, l’assolement en commun n’aurait pas beaucoup d’intérêt… Et ce sont les haies qui risquent d’en faire les frais !

Par conséquent, je suis plus que réservé. Certains Gaec permettent de réaliser des travaux de manière collective sans en passer par l’assolement en commun, qui peut entraîner la réduction du nombre des haies, celles-ci étant désormais dépourvues de fonction.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Cette fois, je ne retirerai pas mon amendement. Autant je vous faisais confiance, madame la ministre, pour que nous travaillions ensemble sur le statut d’associé, autant nous sommes ici dans la vraie vie.

Monsieur Salmon, nous avons tous les deux le même prénom, mais nous avons une interprétation différente de l’assolement en commun : vous voyez le négatif, moi le positif !

Je vais donner un exemple concret de cette pratique. Dans les départements des Vosges et de Meurthe-et-Moselle, pour régler des problèmes de pollution aux nitrates, nous avons mis autour de la table l’ensemble des paysans du territoire, dans le cadre des opérations Ferti-Mieux ; j’ai présidé à l’époque le comité de pilotage de cette opération en tant que président de chambre d’agriculture.

Notre objectif était de trouver des accords : comment faire pour ne pas cultiver uniquement du maïs à tel endroit ? Comment réserver une part des terrains à la pousse d’herbe pour diminuer les conséquences des nitrates ? C’est la vérité de ce que nous sommes capables de faire dans le monde paysan ! Encore une fois, ne voyons pas seulement le négatif : il y a aussi du positif.

Je comprends, madame la ministre, que mon amendement n’est peut-être pas parfait, mais nous disposerons de quelques jours pour l’améliorer, entre la fin de l’examen de ce projet de loi par le Sénat et la réunion de la commission mixte paritaire.

Je maintiens donc cette proposition et vous prie de m’en excuser, madame la ministre, car, si je la retirais, elle disparaîtrait de nos débats.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Daniel Gremillet a une parole qui compte dans cet hémicycle, car il ne s’exprime pas souvent, contrairement à moi ! (Sourires.)

Je voterai en faveur de son amendement et je vous demande d’en faire de même, mes chers collègues. En effet, la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) n’arrive pas à comprendre ce qu’est la vraie vie – nous le savions déjà ! –, c’est-à-dire qu’elle ne comprend pas les façons modernes de gérer les entreprises, comme l’assolement en commun.

Or c’est comme en informatique : quand une mise à jour est impossible, il faut changer tout le système d’exploitation…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 702 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12 bis.

L’amendement n° 791 rectifié quinquies, présenté par Mmes N. Goulet et Jacquemet, MM. Canévet et Longeot et Mme Perrot, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant les modalités de simplification et d’homogénéisation de l’affiliation sociale en vue de rattacher au guichet unique de la mutualité sociale agricole les activités de valorisation des produits agricoles, des terres, des cultures marines ainsi que des activités de diversification ayant pour support l’exploitation agricole ou l’agriculture.

La parole est à Mme Annick Jacquemet.

Mme Annick Jacquemet. Cet amendement a été déposé par Nathalie Goulet.

La Mutualité sociale agricole (MSA) est l’interlocutrice unique pour les agriculteurs et pour les entreprises agricoles en matière de versement de toutes les prestations auxquelles l’exploitant, sa famille et les salariés du secteur peuvent prétendre : santé, famille, retraite, accidents du travail et maladies professionnelles.

Ce guichet unique, qui permet également d’assurer le recouvrement des charges sociales, répond à une logique de service aux adhérents : relation aux entreprises, parcours usagers, solutions sociales personnalisées en cas de difficultés.

Toutefois, ce régime unique simplifié n’est pas efficient aujourd’hui, car l’application de la réglementation sociale a créé une hétérogénéité dans l’affiliation de nos agriculteurs, notamment pour les activités de valorisation des produits agricoles, des terres et des cultures marines, ainsi que pour les activités de diversification reposant sur l’exploitation agricole.

En effet, ne sont pas retenues les activités complémentaires ayant pour support l’exploitation agricole ou l’agriculture, qui sont développées et déployées par les exploitants afin d’atteindre des revenus suffisants.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement a pour objet de demander un rapport supplémentaire. Or le Sénat n’est pas très friand des rapports…

En revanche, madame la ministre, si vous pouviez nous fournir quelques éclairages sur la simplification de l’affiliation des agriculteurs à un tel organisme unique, nous serions preneurs !

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement est satisfait : les activités dites de prolongement sont d’ores et déjà rattachées au régime de protection sociale agricole.

Pour vous répondre, monsieur le rapporteur, je vous assure que le Gouvernement, mais vous le savez déjà, est très attaché aux mesures de simplification. De nombreux chantiers sont en cours, dont la simplification et la dématérialisation du dossier d’affiliation à la MSA.

Le sujet peut être traité directement dans le cadre des rendez-vous mensuels de la simplification, que j’ai lancés le 30 novembre dernier. Il ne paraît pas nécessaire d’inscrire dans la loi la remise d’un rapport.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Jacquemet, l’amendement n° 791 rectifié quinquies est-il maintenu ?

Mme Annick Jacquemet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 791 rectifié quinquies est retiré.

Après l’article 12 bis
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 12 ter

Article 12 ter

(Non modifié)

Au plus tard le 31 décembre 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les besoins des fonds propres des coopératives agricoles, notamment sur le rôle que peut jouer la majoration des plafonds des parts sociales d’épargne.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 37 rectifié bis est présenté par Mme Havet, MM. Bleunven, Canévet, Buis, Buval et Patriat, Mmes Phinera-Horth, Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Patient et Rambaud, Mme Ramia, MM. Rohfritsch et Théophile et Mme Schillinger.

L’amendement n° 50 rectifié quater est présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret.

L’amendement n° 845 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 523-4-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles donnent droit à un intérêt dont les statuts peuvent fixer le taux à deux points au-dessus de celui des parts sociales d’activité. » ;

2° Au e de l’article L. 524-2-1, les mots : « d’au moins 10 % des excédents annuels disponibles à l’issue des délibérations précédentes » sont supprimés.

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 37 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour présenter l’amendement n° 50 rectifié quater.

M. Vincent Louault. Il est également défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 845.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement du Gouvernement a pour objet de simplifier et de rendre plus attractive la rémunération des parts sociales d’épargne pour les associés coopérateurs agricoles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ces dispositions sont identiques à un amendement que j’avais déposé au nom de mon groupe lors de l’examen du projet de loi de finances, mais qui, si j’ose dire, s’était pris une balle en tant que cavalier législatif… J’y souscris entièrement.

La commission émet donc un avis tout à fait favorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 37 rectifié bis, 50 rectifié quater et 845.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 12 ter est ainsi rédigé, et l’amendement n° 36 rectifié bis n’a plus d’objet.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour un rappel au règlement.

M. Michel Masset. Mon intervention se fonde sur l’alinéa 3 de l’article 44 bis de notre règlement, qui est relatif à la recevabilité des amendements.

Plusieurs de mes collègues et moi-même avions déposé un amendement visant à autoriser les agriculteurs à installer sur leur exploitation des habitations réversibles, respectant le principe de non-artificialisation des sols, afin d’y vivre. Dans le Lot-et-Garonne et ailleurs, une telle disposition aurait été utile.

Or cet amendement a été déclaré irrecevable pour une raison qui m’échappe. En effet, cette mesure présente un lien direct avec le texte. Il s’agit d’une aide à l’installation, car les revenus du monde agricole sont nuls ou presque la première année.

De plus, il était précisé dans l’amendement que le maire ou le service instructeur compétent donnerait son accord préalable pour prévenir toute installation anarchique dans la commune.

Cette interprétation de l’irrecevabilité me semble donc erronée, d’autant que ces structures, qui sont économes et écologiques, entre autres qualités, représentent une solution concrète au défi du renouvellement des générations d’agriculteurs. De fait, l’année de leur installation, les exploitants sont régulièrement pris en étau entre le risque d’endettement insoutenable, l’absence d’accès au logement et la réglementation datée.

Leur permettre de vivre dans des habitations réversibles, telles que des maisons en bois, encouragerait l’agriculture locale et simplifierait l’installation en tant que maraîcher, éleveur ou autre. Ainsi, nous apporterions une base légale à la construction de logements de fonction sous la forme de résidences démontables.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous vous prions d’offrir aux agriculteurs une aide à l’installation, eux pour qui l’accès au foncier et au bâti représente une charge financière trop souvent dissuasive.

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Article 12 ter
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 13 (début)

Après l’article 12 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les quatre premiers sont identiques.

L’amendement n° 155 rectifié est présenté par M. Gillé.

L’amendement n° 226 rectifié bis est présenté par MM. Duffourg et Henno, Mme Saint-Pé, M. Levi, Mmes Romagny et Gacquerre, M. Chasseing, Mme Paoli-Gagin et MM. Bleunven et Hingray.

L’amendement n° 492 rectifié quater est présenté par MM. Khalifé, Lefèvre et Milon, Mme Belrhiti, MM. Mizzon, Burgoa et Panunzi, Mme Guidez, MM. Saury et P. Vidal, Mme Dumont, MM. Piednoir, Brisson, Sautarel, Grosperrin et Paul, Mmes Micouleau et Malet, MM. Brault et H. Leroy, Mme Ventalon, M. Belin, Mmes Bellurot et Aeschlimann et M. Cuypers.

L’amendement n° 517 est présenté par MM. Buis, Buval et Patriat, Mmes Havet, Phinera-Horth, Cazebonne et Duranton, MM. Fouassin, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Patient et Rambaud, Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 12 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article L. 315-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Cette personne morale doit comprendre plusieurs exploitants agricoles ou entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers et peut comporter d’autres personnes physiques ou morales, privées ou publiques. Les exploitants agricoles ou entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers doivent détenir ensemble la majorité des voix au sein des instances du groupement. »

La parole est à M. Hervé Gillé, pour présenter l’amendement n° 155 rectifié.

M. Hervé Gillé. Le présent amendement a pour objet la création d’un groupement d’intérêt économique et environnemental (Giee) spécifiquement destiné aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers, afin de permettre à ces derniers de participer plus activement à la mise en œuvre du plan Écophyto.

Mis en place pour réduire l’usage des produits phytosanitaires en agriculture, ce plan repose en grande partie sur l’adoption de pratiques agricoles alternatives et écologiques.

Bien que son objectif principal d’une réduction de 50 % de l’usage de ces substances ait été considérablement affaibli, les entreprises de travaux et services agricoles, qui interviennent directement sur le terrain en assurant des prestations cruciales pour la gestion des cultures, des espaces naturels ou des forêts, doivent également être impliquées dans cette dynamique de transition agroécologique.

À l’heure actuelle, elles rencontrent plusieurs obstacles les empêchant d’intégrer pleinement les objectifs du plan Écophyto dans leurs activités.

Ainsi, il est proposé de créer un Giee dédié, afin de structurer leurs efforts et de renforcer leur contribution à la réduction de l’usage des phytosanitaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Duffourg, pour présenter l’amendement n° 226 rectifié bis.

M. Alain Duffourg. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Khalifé Khalifé, pour présenter l’amendement n° 492 rectifié quater.

M. Khalifé Khalifé. Il est également défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l’amendement n° 517.

M. Bernard Buis. Défendu !

Mme la présidente. L’amendement n° 219 rectifié bis, présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, de Nicolaÿ, J.-M. Arnaud, Brault et Levi, Mmes Billon et Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger et Fargeot, Mme Saint-Pé, M. Chevalier, Mme Gacquerre, M. Chasseing, Mmes Romagny, Jacquemet et de La Provôté et MM. Pillefer, Gremillet et Daubet, est ainsi libellé :

Après l’article 12 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 315-1 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « agricoles » sont insérés les mots : « ou entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers ».

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Il est lui aussi défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Créer un Giee dédié seulement aux entreprises agricoles reviendrait à faire bénéficier ses membres de fonds provenant du Casdar, qui sont pourtant collectés uniquement à partir des cotisations des agriculteurs. Je ne suis donc pas favorable à cette mesure.

En revanche, les entreprises de travaux agricoles ont actuellement la possibilité de faire partie d’un Giee aux côtés d’agriculteurs. Je ne tiens pas à ouvrir davantage ces groupements.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements en discussion commune.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 155 rectifié, 226 rectifié bis, 492 rectifié quater et 517.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 219 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

TITRE IV

SÉCURISER, SIMPLIFIER ET FACILITER L’EXERCICE DES ACTIVITÉS AGRICOLES

Après l’article 12 ter
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Article 13 (interruption de la discussion)

Article 13

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

I. – Au I de l’article L. 171-7, après le mot : « exercées », sont insérés les mots : « et sous réserve de l’article L. 171-7-2, ».

II. – Après l’article L. 171-7-1, il est inséré un article L. 171-7-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 171-7-2. – Lorsque les infractions mentionnées au 1° de l’article L. 415-3 n’ont pas été commises de manière intentionnelle au sens dudit article ou par négligence grave, l’autorité administrative compétente peut ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 450 €.

« Elle peut, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 171-7 et hors cas de récidive, prononcer la même sanction pour le fait, sans la déclaration ou l’enregistrement mentionnés au II de l’article L. 214-3 et à l’article L. 512-7 et exigés pour un acte, une activité, une opération, une installation ou un ouvrage, de :

« 1° Commettre cet acte ou exercer cette activité ;

« 2° Conduire ou effectuer cette opération ;

« 3° Exploiter cette installation ou cet ouvrage ;

« 4° Mettre en place ou participer à la mise en place d’une telle installation ou d’un tel ouvrage.

« L’autorité administrative peut suspendre l’exécution des actes de toute nature constitutifs des infractions mentionnées aux premier à sixième alinéas du présent article, à moins que des motifs d’intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s’y opposent.

« Elle peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne responsable de l’atteinte. Elle peut également obliger la personne physique ou le dirigeant de la personne morale responsable de l’atteinte à suivre un stage de sensibilisation aux enjeux de l’environnement, et notamment à la reconnaissance et à la protection des espèces et habitats.

« Sauf en cas d’urgence, les mesures mentionnées au présent article sont prises après avoir communiqué à l’intéressé les éléments susceptibles de fonder les mesures et l’avoir informé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé. »

III. – À l’article L. 171-11, après la référence : « L. 171-7 », il est inséré la référence : « , L. 171-7-2, ».

IV (nouveau). – Le premier alinéa de l’article 173-1 est ainsi modifié :

1° Les références : « L. 214-3 » et « L. 512-7 » sont supprimées ;

2° Le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ;

3° Après la référence : « L. 712-2 », sont insérés les mots : « et au I de l’article L. 214-3 ».

(nouveau). – L’article L. 415-3 est ainsi modifié :

1° Après l’avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité administrative peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite des délits mentionnés au 1° du présent article, dans les conditions prévues par le deuxième alinéa du I et les III à V de l’article L. 173-12. » ;

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, les infractions mentionnées au 1° sont soumises, lorsqu’elles n’ont pas été commises par négligence grave ou de manière intentionnelle, aux sanctions prévues par l’article L. 171-7-2 du présent code. Sont réputés n’avoir pas été commis de manière intentionnelle, les faits répondant à l’exécution d’une obligation légale ou réglementaire ou des prescriptions prévues par une autorisation administrative, ou correspondant à l’exercice des activités prévues par des documents de gestion mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier. »

Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, sur l’article.

M. Michaël Weber. L’article 13 a pour objet de supprimer les sanctions pénales prévues à l’encontre des destructions non intentionnelles d’espèces protégées, ainsi que de faire en sorte que toutes les destructions soient présumées non intentionnelles.

Cette proposition est clairement contre-productive. Elle constitue une entrave à la sanction des comportements irrespectueux de la biodiversité, puisqu’elle renverse la charge de la preuve. Obliger à démontrer l’intention de détruire une espèce protégée constitue, en fin de compte, la négation même de la protection dont ces espèces sont censées bénéficier.

D’une part, cet article est contraire au droit et à la jurisprudence européenne. S’il était adopté, il ouvrirait la voie à de nombreux contentieux, au terme desquels la condamnation de la France ne ferait guère de doute.

D’autre part, comment démontrer juridiquement le caractère intentionnel du fait de porter atteinte à des espèces ou à des habitats protégés ? Comment distinguer une simple imprudence d’une négligence grave ? Tout contrevenant pourrait ainsi se prévaloir du caractère non intentionnel des faits reprochés, ce qui risque de faire exploser le nombre des contentieux.

Les destructions d’espèces protégées sont, dans tous les cas, des faits extrêmement graves et irrémédiables. Néanmoins, elles sont malheureusement dues, dans la majeure partie des cas, à de coupables imprudences ou négligences. Ce sont ces petites infractions qui, mises bout à bout, sont la cause du déclin vertigineux de la biodiversité.

Les peines d’emprisonnement et les amendes de 150 000 euros prévues sont des plafonds. Elles ne sont jamais appliquées en pratique, même en cas de récidive. Leur rôle est avant tout dissuasif, mais elles présentent l’avantage de pouvoir adapter la sanction en fonction de la gravité du préjudice.

Plutôt que de créer un mécanisme de contournement des sanctions qui risque de compromettre nos efforts de lutte contre l’érosion de la biodiversité, il serait bien plus opportun de donner aux exploitants les moyens d’identifier et de cartographier les espèces naturelles présentes sur leur parcelle agricole ou forestière, pour qu’ils puissent travailler sereinement et en connaissance de cause.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 384 rectifié ter est présenté par MM. Tissot, Montaugé et M. Weber, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 543 rectifié est présenté par MM. Grosvalet, Bilhac, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 577 est présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 711 rectifié est présenté par Mme Varaillas, MM. Lahellec et Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l’amendement n° 384 rectifié ter.

Mme Marion Canalès. Dans la même perspective, les sénateurs de notre groupe demandent par cet amendement la suppression de l’article 13. Cette disposition constitue une véritable ligne rouge, qui rendra très difficile pour nous un vote en faveur de ce projet de loi.

Devons-nous encore rappeler l’effondrement de la biodiversité ? Apparemment, oui !

Cet article contient toute une batterie de mesures tendant à alléger le régime de répression des atteintes à la biodiversité, alors que le déclin de celle-ci et la pollution environnementale se ressentent chaque jour, et à restreindre les sanctions applicables à la destruction illicite d’espèces, d’habitats naturels ou de sites protégés. La santé de nombre de nos concitoyens en fera directement les frais.

De plus, l’article a pour objet de poser le principe de présomption de non-intentionnalité des infractions. Celui-ci sera, selon nous, une source d’interprétations et de dérives considérables.

En outre, particulièrement à la suite de son passage en commission, le texte tend à alléger l’échelle des sanctions applicables en cas d’infraction, pour les rendre encore moins dissuasives.

Dans le contexte actuel d’effondrement de la biodiversité et de pollution de nos sols, de notre air et de notre eau, cet article est inacceptable. Surtout, il vient répondre à une demande d’une partie bien particulière du monde agricole, qui se dit victime de sanctions arbitraires ou de contrôles inadmissibles.

Certains ont ainsi voulu pointer du doigt les opérateurs de l’État chargés de la police environnementale, à commencer par l’Office français de la biodiversité (OFB).

Or nous savons tous, preuve à l’appui, que la situation a été montée en épingle. Le récent rapport de l’inspection interministérielle sur les relations entre les agriculteurs et l’OFB, paru il y a quelques jours, montre la quasi-absence de tensions sur le terrain. Ainsi, moins de 1 % des contrôles auraient été source de conflits depuis la création de l’établissement public.

Dans ce contexte, nous proposons par voie d’amendement la suppression de l’article 13.

Mme la présidente. L’amendement n° 543 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 577.

M. Daniel Salmon. Cet article est le point d’orgue d’une offensive contre le droit de l’environnement ! Je souhaite à mon tour dénoncer fortement cette régression environnementale, qui est particulièrement grave et inédite.

Cette disposition, qui distingue les atteintes intentionnelles aux espèces protégées des actes de bonne foi, n’est ni plus ni moins qu’un permis de détruire la biodiversité.

Dans le contexte actuel d’effondrement de la biodiversité, dont tout le monde est conscient, je l’espère, il s’agit d’un renoncement extrêmement grave, de nature à rendre impossible l’atteinte des objectifs que la France s’est engagée à atteindre lors des COP biodiversité. Cette invitation à détruire des espèces protégées en toute impunité, ou presque, est également en contradiction totale avec la stratégie nationale pour la biodiversité présentée voilà peu.

Aux termes de cet article, il faudra désormais prouver que la destruction de la nature a été volontaire et réfléchie pour condamner le contrevenant.

Or, vous le savez très bien, mes chers collègues, en droit, prouver que la personne avait l’intention de tuer une espèce est très difficile, voire impossible. La plupart du temps, vous le savez très bien également, la destruction de l’espèce est un dommage collatéral. La négligence grave est très rare ! Pourtant, c’est cette négligence grave qui devra être invoquée si l’on veut poursuivre au pénal.

Ce sont les négligences simples, les imprudences et les manquements à une obligation de prudence qui entraînent aujourd’hui les poursuites et les condamnations pour atteinte aux espèces protégées.

La disposition inscrite à l’article 13 pourrait permettre à tout individu, agriculteur ou non, d’invoquer son ignorance ou un manque de considération non intentionnel pour échapper à toute sanction. J’ai bien dit « agriculteur ou non », car le périmètre de cette disposition est très large.

Pour la rendre conforme au droit, il a été prévu en effet que la présomption de non-intentionnalité concernerait non pas les seuls travaux agricoles et forestiers, mais toutes les actions humaines, projets industriels, projets de production d’énergie renouvelable, action des particuliers.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 711 rectifié.

M. Gérard Lahellec. Je vais essayer de traduire cet article, c’est-à-dire la notion d’intentionnalité, dans le langage courant, plus précisément dans le langage des enfants : « Si tu portes atteinte à l’environnement, ce n’est pas grave si tu ne l’as pas fait exprès. » Voilà ce que dit cet article ! Et c’est la négation du droit.

Par conséquent, si nous voulons éviter d’inscrire dans notre droit une disposition fragile, il vaudrait mieux ne pas nous en remettre à l’appréciation de ce qui est ou non intentionnel : tel est le sens de notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. « Je préfère privilégier, sur des infractions mineures, la sanction administrative, c’est plus rapide, c’est plus clair. On évite cette dimension qui est extraordinairement intrusive d’une procédure pénale où on a l’impression d’être un grand délinquant. Lorsque vous garez mal votre voiture, vous avez une amende, lorsque vous faites mal une procédure environnementale, sans qu’il y ait un impact majeur sur l’environnement, vous avez une amende. Cela paraît raisonnable. »

Si ces mots venaient de moi, je suis persuadé, mes chers collègues, que vous me prendriez pour un grand délinquant de l’environnement et de l’écologie… Or ils ont été prononcés le 22 janvier 2025 par la ministre de l’écologie. (Exclamations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.) Voilà qui répond, me semble-t-il, au problème soulevé : la rédaction de l’article 13 met exactement en musique ce que souhaite la ministre de l’écologie !

J’émets donc un avis défavorable sur tous les amendements de suppression de l’article 13.

M. Jean-Claude Tissot. Laurent Duplomb se réfère à la ministre de l’écologie, on aura tout vu !

Mme Annie Genevard, ministre. On cite toujours les bons auteurs, monsieur le sénateur ! (Sourires sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Jean-Claude Tissot. Vous avez raison, madame la ministre. Et je pourrais vous en citer, des auteurs !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Cet article 13 est au cœur du débat ; si vous me le permettez, madame la présidente, je vais y consacrer un peu de temps.

La question qui nous est posée n’est pas de savoir s’il faut prévoir une autorisation à détruire des espèces protégées ! Elle est de savoir s’il faut ou non, et dans quels cas, apporter une réponse pénale aux atteintes aux espèces protégées. En d’autres termes, le sujet est la dépénalisation. Et la notion d’intentionnalité est évidemment au cœur du dispositif.

Je rappelle le droit général : « Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre », dit le code pénal. Tel est notre droit !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Exactement !

Mme Annie Genevard, ministre. Et il n’y a pas de raison que, en matière d’environnement, on déroge à cette règle de droit. Il appartient donc au juge d’apprécier l’intentionnalité. Cela suppose d’enquêter sur les faits, de les établir et d’en déterminer l’intentionnalité.

Quand l’acte incriminé est reconnu comme non intentionnel, ce n’est qu’à titre dérogatoire qu’il peut être reconnu comme une infraction. Le principe est néanmoins, j’y insiste, qu’il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ; la question de l’intentionnalité est donc centrale ! Je le répète : il s’agit de savoir, non pas s’il faut autoriser la destruction d’espèces protégées, mais quelle réponse juridique il convient d’apporter lorsqu’il n’y a pas d’intentionnalité !

Je souhaitais rappeler ce point de droit, qui est essentiel, me semble-t-il, pour les législateurs que vous êtes.

Le sujet des contrôles et de la manière dont les irrégularités sont traitées était, vous le savez, au cœur de la crise agricole.

Les agriculteurs sont soumis à de très nombreux contrôles : les contrôles usuels dont font l’objet beaucoup d’autres chefs d’entreprise – contrôles fiscaux, contrôles de l’inspection du travail, etc. –, mais aussi d’autres types de contrôles, qui ciblent leur profession en particulier : contrôles de la PAC, contrôles de la police de l’environnement, contrôles sanitaires, etc.

Les agriculteurs sont soumis à une multitude de normes qui garantissent, il est vrai, notre sécurité alimentaire, notre sécurité sanitaire, la protection des salariés agricoles et la protection de l’environnement. Ces normes sont parfois complexes, souvent changeantes, dans un monde qui évolue rapidement, sous la contrainte économique, mais aussi sous l’effet du changement climatique et de la transition agroécologique.

Il en résulte que, de bonne foi, c’est-à-dire sans aucune intentionnalité – j’insiste de nouveau sur ce mot –, les agriculteurs commettent des erreurs liées à la complexité et à l’instabilité desdites normes, dont il arrive, d’ailleurs, qu’elles se contredisent.

C’est donc de manière légitime que les agriculteurs ont pointé ce sujet durant la crise. Et le Gouvernement s’est engagé à reconnaître un droit à l’erreur.

Ainsi, aux termes de l’amendement gouvernemental adopté en séance à l’Assemblée nationale, lorsque l’agriculteur agira de bonne foi ou avec des autorisations dans le cadre de procédures légales – je vais vous donner quelques exemples –, la non-intentionnalité sera présumée, et il ne sera plus sanctionnable ni sanctionné. Cette disposition me semble une avancée significative, qui permettra d’apporter une réponse de terrain à des situations qui étaient, à juste titre, mal vécues.

En effet, en l’état du droit, les agriculteurs peuvent se retrouver embarqués dans des procédures pénales lourdes, infamantes et disproportionnées, alors même qu’ils ont agi de bonne foi.

Notre objectif est donc de simplifier les procédures de contrôle, de mieux prendre en compte la bonne foi et la non-intentionnalité, de donner la priorité aux mesures éducatives et administratives et, enfin, de prévoir en dernier ressort le prononcé de peines proportionnées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout de même de vous rappeler le quantum de la peine encourue : trois ans de prison et 150 000 euros d’amende !

M. Ronan Dantec. Pour atteinte à quelle espèce ?

Mme Annie Genevard, ministre. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

Mme Annie Genevard, ministre. J’en viens à quelques exemples de verbalisations fondées sur l’article L. 415-3 du code de l’environnement, qui ne devraient plus exister à compter de l’entrée en vigueur du présent texte.

Cas numéro 1, forêt communale, mai 2020 : une entreprise de travaux forestiers ayant procédé à une coupe de chablis imposée par la nécessité d’évacuer des arbres scolytés dans un délai le plus court possible, elle est verbalisée par l’Office national des forêts (ONF) à la suite de la plainte d’un riverain, plainte motivée par la présence de nids dans les arbres coupés. L’entreprise avait l’autorisation de procéder à une coupe ; elle est verbalisée.

Cas numéro 2, forêt domaniale : coupe et broyage de végétation basse réalisés par un acheteur de coupe entre le 22 juillet 2019 et le 1er septembre 2019, le long d’une route départementale, à des fins de sécurité. Il n’y a eu, en la circonstance, aucun constat de destruction d’espèces ou de nids et l’ONF n’avait pas connaissance de la présence d’espèces protégées.

Pourtant, il y a eu verbalisation, au motif de l’interdiction de procéder sans dérogation à des broyages de cloisonnement en période de nidification, même lorsque des questions de sécurité préalable sont en jeu et même si la présence d’une espèce protégée n’est pas avérée, car il y allait de la protection des habitats potentiels.

Mme Kristina Pluchet. C’est scandaleux !

Mme Annie Genevard, ministre. Cas numéro 3 : débroussaillement. Une personne débroussaille sa parcelle en application de la réglementation OLD (obligations légales de débroussaillement) ; elle est verbalisée, derechef, pour atteinte à l’habitat potentiel d’espèces protégées.

Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, on atteint là les limites de la justice.

Il faut bien se rendre compte que la dépénalisation que nous proposons n’est pas une autorisation de tout détruire : elle est bordée, ce qui sera très clairement précisé par mon amendement n° 874.

Je signale de surcroît que, aujourd’hui, notre droit est une surtransposition du droit européen !

Mme Annie Genevard, ministre. En droit communautaire, les atteintes non intentionnelles à l’environnement ne font pas l’objet d’une pénalisation.

Voilà posé le cadre du débat : j’ai donné des exemples très précis de la façon dont notre droit fonctionne aujourd’hui. Il convient, je le crois, d’y remettre un peu de bon sens et de le faire évoluer en fonction de ce qui se fait à l’échelle européenne et de ce qui est juste.

Actuellement, on peut respecter une réglementation et se trouver pénalisé par le respect même de cette réglementation : ce n’est pas acceptable ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – M. Guillaume Gontard proteste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. J’ai malgré tout le sentiment, madame la ministre, que vous avez tenté de noyer le poisson. Je ne sais pas s’il s’agissait d’une espèce protégée, mais enfin… (Sourires.)

Les trois cas que vous avez cités se sont soldés par trois ans d’emprisonnement… C’est bien cela, j’ai bien suivi votre raisonnement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le quantum de peine, c’est bien trois ans d’emprisonnement !

M. Ronan Dantec. Ah ! Soyez, je vous en prie, extraordinairement précise et rigoureuse !

Mme Annie Genevard, ministre. C’est le quantum de peine actuellement applicable !

M. Ronan Dantec. Vous nous avez donc expliqué que ces trois cas avaient donné lieu au prononcé d’une peine de trois ans d’emprisonnement, ou alors je n’ai rien compris – à moins que vous ne mélangiez tout pour nous égarer, mais jamais je ne vous ferai un tel procès d’intention, madame la ministre…

Voici ce que je sais, en tout cas.

Sans les réglementations actuelles sur les espèces protégées, nous aurions perdu, en France, énormément d’espèces. Nous avons perdu, officiellement il y a quelques mois – en réalité, cela faisait déjà un certain temps qu’il était éteint –, le courlis à bec grêle. C’est la première espèce d’oiseau eurasienne qui disparaît par destruction de son habitat.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Et les agriculteurs, combien ont disparu ?

M. Ronan Dantec. Évidemment, il y a un lien entre habitat et espèce, mais je ne vous apprends rien.

Sans les efforts que nous avons réalisés en matière de réglementation relative aux espèces protégées, la liste des espèces disparues serait aujourd’hui bien plus importante qu’elle ne l’est. Nous pouvons donc être extrêmement fiers de l’évolution du droit de l’environnement. Si l’on peut, par exemple, observer beaucoup plus d’ardéidés qu’auparavant, c’est parce que l’on n’a plus le droit de les chasser.

À l’entrée du Sénat, vous pouvez admirer une tenture figurant un héron, qui est représenté en forêt. Savez-vous pourquoi il est représenté en forêt, alors que nous pouvons en voir un peu partout au bord des routes ? C’est parce que, à l’époque où la pièce dont je parle a été réalisée, le héron était chassé : les derniers membres de l’espèce vivaient au fin fond des forêts, ils ne s’aventuraient plus ailleurs.

Mme Anne-Catherine Loisier. Il y en a partout, des hérons !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Oui, partout !

M. Ronan Dantec. Autrement dit, notre réglementation relative aux espèces protégées a donné des résultats !

Je ne pense pas que cette disposition prospérera, car elle fera évidemment l’objet de recours pour non-conformité au droit européen ; mais, le cas échéant, je puis vous le dire, ce que vous êtes en train de faire entraînera une multiplication des procès, portant y compris sur des préjudices autres que pénaux.

Vous allez encore complexifier et durcir, sur le terrain, les rapports entre les uns et les autres, là où notre responsabilité commune est au contraire d’apaiser les choses.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.

M. Rémy Pointereau. Voici le spécialiste des hérons ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Yannick Jadot. Arrêtez avec ce genre de réflexions, cher collègue ! C’est soûlant !

J’ai toujours contesté deux arguments qui sont sans cesse invoqués dans le débat sur l’agriculture : premièrement, celui-ci ne concernerait que les agriculteurs ; deuxièmement, c’est un débat dont on devrait exclure les agriculteurs, parce qu’ils en sont partie prenante et qu’ils sont donc en situation de conflit d’intérêts. Je refuse ces deux arguments : le débat sur l’agriculture est un débat d’intérêt général !

Or je suis assez surpris, madame la ministre, de vous entendre nous dire que, en quelque sorte, pour ce qui est de la notion d’intentionnalité, la loi française, que vous vous apprêtez à modifier, n’est pas légale.

M. Rémy Pointereau. Elle surtranspose !

M. Yannick Jadot. Car c’est la loi française que vous voulez changer aujourd’hui,…

M. Yannick Jadot. … au mépris du droit européen.

On ne saurait être dans le négationnisme de l’effondrement de la biodiversité et appliquer la présomption de non-intentionnalité à l’agriculture, mais aussi, au-delà, à l’industrie, à la chasse et à toutes les activités humaines !

Partout, les scientifiques nous alertent quant à l’effondrement de la biodiversité. Nous avons des règles, qui sont européennes. Mais cela ne vous suffit pas de vous attaquer à l’OFB et à la police de l’environnement en général : c’est à la loi même que vous voulez vous attaquer, en matière de protection de la biodiversité. Ce n’est pas sérieux !

Qu’une ministre conteste le droit français en vigueur, que la Haute Assemblée conteste les règles européennes, les règles françaises et les stratégies mises en œuvre pour protéger la biodiversité, ce n’est pas sérieux !

Mme Kristina Pluchet. Allez dire cela à la Mairie de Paris ! Nous n’avons pas de leçons à recevoir de vous !

M. Yannick Jadot. On sait à quel point l’agriculture est l’une des causes de l’effondrement de la biodiversité. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Kristina Pluchet. Quelle honte !

M. Yannick Jadot. Il faut travailler à régler ce problème.

Désormais, c’est l’absence d’intentionnalité qui sera présumée. Il suffira à ceux qui tuent les bêtes et détruisent des espèces de plaider la bonne foi, toute obligation de repérage et d’identification ayant été levée : rien ne les obligera désormais à travailler à la préservation des habitats – c’est ainsi que nous nous rassurons, mes chers collègues ? –, puisque les atteintes à la biodiversité seront présumées non intentionnelles.

Un tel négationnisme, dans cette enceinte ? Ce n’est pas sérieux ! (M. Ronan Dantec applaudit. – Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes au cœur de la meule du problème ! On ne va pas s’entendre, c’est sûr !

Madame la ministre, vous avez donné des exemples qui sont de votre ressort – l’ONF et les forêts domaniales, c’est l’État. Mais le problème est bien plus large.

M. Vincent Louault. Je pense à Roger, cet agriculteur qui n’a pas vu l’arrêté départemental d’interdiction d’arrosage : le lendemain, un 14 juillet, il fait l’objet d’une plainte au pénal et attend presque huit mois avant d’être déféré devant le juge ; il finira par passer au pénal, donc, avec tout le stress que cela implique.

Je pense à cet autre agriculteur de l’Oise qui, au mois de juin, n’arrivait pas à planter ses tournesols en semis direct. Il a fini par labourer et il se retrouve lui aussi au pénal. L’audience a eu lieu il y a exactement quinze jours, et la décision sera rendue dans un mois, car il a labouré des sols auxquels avaient été appliqués du Roundup. C’est lunaire !

La justice a autre chose à faire que de s’occuper de telles affaires, qui doivent relever de sanctions administratives. Songez à ce qui se passe quand vous vous faites arrêter pour une infraction au code de la route.

M. Ronan Dantec. Le sujet, ce sont les espèces protégées !

M. Vincent Louault. Mais mon raisonnement vaut pour tout, et pas seulement pour la protection des espèces !

Quand Mme la ministre évoque le broyage, il n’est pas directement question d’espèces protégées. Mais il y a toujours un lien avec les espèces protégées : le lien, ce sont les habitats ! (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

Soyez un peu de bonne foi, mes chers collègues : vous nous opposez en permanence l’habitat de l’espèce protégée. Il est évident que personne ne roule avec son tracteur sur l’espèce protégée ! Tous les agriculteurs protègent les nids de rapaces pendant la moisson et font attention à leur écosystème.

M. Vincent Louault. Il faut cesser de tout caricaturer en permanence ! Il s’agit simplement, avec cet article, de remettre un peu de bon sens et de réalité dans notre droit.

Je rappelle que, pour ce qui est des infractions au code de la route, ce n’est pas le même régime qui s’applique selon que l’excès de vitesse est ou non supérieur à 50 kilomètres à l’heure : au-dessus de 50 kilomètres à l’heure de dépassement, l’infraction relève de sanctions pénales. Il n’est pas difficile de comprendre que certaines infractions, parmi celles que les agriculteurs sont susceptibles de commettre, doivent être dépénalisées.

Évidemment, les agents de l’État, que j’ai toujours défendus, notamment ceux de l’OFB, appliquent des réglementations, celles-là mêmes que nous essayons de modifier aujourd’hui. Je soutiendrai donc ce texte à mort ! (Marques dironie sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. Monsieur Louault, préservez-nous de la mort !

Je pense que, en effet, nous sommes là au cœur du sujet de ce texte.

Tout d’abord, mes chers collègues, ce n’est pas la peine de pousser des cris d’orfraie…

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Des deux côtés !

M. Michaël Weber. … quand nous parlons de l’effondrement de la biodiversité et de ses causes. Tout le monde est d’accord pour reconnaître, ici et ailleurs, que c’est l’activité humaine en général qui est la cause de l’effondrement de la biodiversité mondiale, mais aussi que l’agriculture, quoi que l’on en dise, a une part dans cette évolution. Nous pouvons au moins partager ce constat.

Ce constat étant dressé, la première question à se poser est la suivante : quelles sont les pratiques de transition que l’on met en œuvre pour éviter que l’agriculture ne soit demain un accélérateur de la perte de biodiversité et de la disparition des fondements mêmes de la biodiversité sur notre planète ? Voilà une bonne façon d’aborder ce débat !

Ensuite, madame la ministre, certains, dans cet hémicycle et ailleurs, pensent que le droit de l’environnement n’a pas la même valeur que les autres droits applicables en France ; qu’il est, en somme, un droit au rabais. Il faudrait cesser de considérer la question environnementale comme une question de droit, plaident-ils, pour en faire une simple question d’intentionnalité ou de non-intentionnalité. Or, vous le savez très bien, l’intentionnalité est très difficile à prouver !

Enfin, pour ce qui est de la surtransposition, dont on nous rebat en permanence les oreilles, je vous suivrais volontiers sur ce terrain, mes chers collègues, à condition que nous adoptions la même approche pour toutes les thématiques !

Voilà seulement quelques jours, notre assemblée a adopté à l’unanimité des groupes politiques une proposition de résolution européenne sur la réduction de l’utilisation des microplastiques. Bizarrement, personne ne nous a reproché de surtransposer. Pourtant, en l’espèce, l’exigence française allait bien au-delà de ce qu’exigent les règles européennes.

Si nous savons nous montrer vertueux sur les microplastiques ou sur d’autres thématiques, nous pouvons et nous devons l’être aussi sur l’agriculture !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Madame la ministre, l’heure est assez grave : vous continuez vous aussi – cela me déçoit fortement – de colporter l’idée selon laquelle les agriculteurs seraient harcelés – entre autres, par l’OFB. (Mme Kristina Pluchet sexclame.)

J’ai sous les yeux quelques chiffres – il faut les examiner, de temps en temps ! En 2022, seuls 136 agriculteurs ont été impliqués dans une procédure en lien avec le droit de l’environnement. 136 ! Faisons attention aux arguments que nous avançons : de cas particuliers, on ne peut pas tirer une généralité.

En tout état de cause, cet article est extrêmement dangereux. S’attaquer à la protection de la biodiversité, c’est s’attaquer à des espèces bien concrètes : le bouvreuil pivoine, la loutre, le hérisson, toutes ces espèces qui sont aujourd’hui protégées, parce qu’elles sont menacées de disparition.

Avec cette présomption de non-intentionnalité, c’est tout notre droit de l’environnement que l’on fragilise. Cela a été dit, l’objet de cet article est vraiment de montrer que le droit de l’environnement est secondaire : « Les atteintes à l’environnement ne sont pas très graves, au fond ! » Tel est le message qui est ici envoyé, j’y insiste : « Tant pis pour l’environnement, et après nous le déluge : on verra bien quelles espèces il restera demain ! »

Quelle est la valeur d’une espèce ? Quel sens donnons-nous à nos actions d’aujourd’hui, notamment à notre agriculture, si elles se paient demain au prix de la disparition d’une multitude d’espèces ? J’ai cité des espèces dont l’extinction est bien visible ; mais de nombreuses espèces invisibles pour la plupart d’entre nous disparaissent également…

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Boyer. Il y en a assez des donneurs de leçons ! À vous entendre, il y a d’un côté les prêcheurs de bonne parole, qui ont pour eux la vertu, et, de l’autre, les destructeurs.

Pour vivre dans le milieu rural et dans la nature, mon impression est que certains ici n’y vont pas souvent… (Exclamations sur des travées des groupes GEST et SER.)

M. Michaël Weber. Mais bien sûr…

M. Daniel Salmon. Nous aussi, nous allons dans la ruralité !

M. Jean-Marc Boyer. Les agriculteurs sont les meilleurs écologistes : ce sont eux qui entretiennent l’espace, les prés, les forêts.

Une revue scientifique anglaise vient pour la troisième fois d’établir que l’agriculture française est la plus vertueuse au monde ! Ce n’est pas moi qui le dis : c’est la revue scientifique The Economist.

Il faut savoir raison garder : la protection de la biodiversité n’est l’apanage de personne ! Et les agriculteurs prennent leur part de cette protection.

Pourquoi les agriculteurs ont-ils manifesté il y a un an ? Pourquoi ont-ils continué à se mobiliser dernièrement ?

M. Yannick Jadot. Pour leurs revenus !

M. Jean-Marc Boyer. Pour plusieurs raisons : pour défendre leurs revenus, mais surtout pour protester contre les normes et les contraintes qui leur sont imposées. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Non ! Pour les revenus !

M. Jean-Marc Boyer. Cela vous ennuie que nous le disions, mais c’est la vérité ! Ils se mobilisent surtout contre les contraintes et les normes qui pèsent sur leur activité !

Pourquoi sont-ils allés manifester devant le siège de l’OFB ? Pour se faire plaisir ? Pour passer le temps ? Pour s’amuser ? Pas du tout ! S’ils manifestent, c’est parce que l’ensemble des normes que subissent les agriculteurs fait peser sur eux un poids bien réel !

Mme la ministre a donné tout à l’heure quelques exemples. J’aimerais à mon tour vous en donner quelques-uns, dont j’ai été saisi. Je sais bien que, de cas particuliers, on ne peut pas tirer de conclusions générales, mais tout de même… Les agriculteurs devraient avoir droit à l’erreur.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Marc Boyer. Épandage de lisier ? Sanctionné ! Retrait des branches d’un ruisseau alors qu’il y a inondation ? Sanctionné !

Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé !

M. Jean-Marc Boyer. Il faut arrêter avec ce genre de discours et en revenir à un peu de bon sens !

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Le moment est grave, mes chers collègues. Quel message souhaitez-vous envoyer ?

M. Guillaume Gontard. Voici quel est au fond votre message : « La biodiversité, ce n’est pas bien grave ! »

M. Jean-Marc Boyer. Je n’ai pas dit cela ! Les agriculteurs sont les meilleurs défenseurs de la nature.

M. Guillaume Gontard. À vous entendre, le premier problème des agriculteurs, ce sont les textes qui réglementent l’exercice de leur profession. Mais des réglementations, il y en a pour tous les métiers !

Telle n’est pas du tout la réalité de ce que demandent les agriculteurs : dans leur très grande majorité, ils respectent la loi, et cela sans aucun problème.

M. Guillaume Gontard. Mon collègue Daniel Salmon a cité les chiffres : 136 agriculteurs ont été impliqués en 2022 dans une procédure en lien avec le droit de l’environnement. Et, au bout du compte, une très grande majorité de ces 136 agriculteurs ont simplement reçu une convocation de la part de l’Office français de la biodiversité.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est faux !

M. Guillaume Gontard. Mme la ministre a cité tous les exemples dont elle dispose, car, me semble-t-il, il n’y en a pas d’autres.

En revanche, vous souhaitez modifier le droit en vigueur, au motif, a dit Mme la ministre, qu’il serait en quelque sorte « hors la loi ». Mais cette modification ne s’appliquera pas seulement à l’agriculture : elle vaudra pour les industriels, pour les chasseurs !

Récemment, un chasseur a tué l’un des derniers aigles vivant sur mon territoire. Qu’a-t-il dit pour sa défense ? Qu’il ne l’avait pas fait exprès : il avait confondu l’aigle avec un faisan ! (Sourires.) Il a été condamné à 55 000 euros d’amende, heureusement ! Il est bon qu’un tel message ait pu être envoyé.

Avec la disposition que vous vous préparez à mettre en œuvre, les choses auraient été bien différentes. Le chasseur n’a pas fait exprès de tuer l’aigle ? Impunité, 450 euros d’amende !

Lactalis déverse des eaux souillées dans les ruisseaux ; une fromagerie du groupe a été condamnée, dans le Doubs, à une amende de 100 000 euros. Même discours : elle a pollué sans le faire exprès, c’est sa station d’épuration qui fonctionne mal… Vous imaginez ce que vous êtes en train de mettre en place ? Franchement, c’est criminel pour la biodiversité ! Or, sans biodiversité, il n’y a plus d’agriculture ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Tissot. Je ne sais pas si je suis vertueux, donneur de leçons ou pollueur. En tout cas, certaines réalités s’imposent, et j’aime à les rappeler. J’ai la chance – je le pense – d’avoir été agriculteur. Je ne le suis plus : j’ai pris ma retraite.

Je pense avoir moi aussi contribué à polluer les terrains que j’ai exploités. Quant à mes parents – la génération qui m’a précédé –, ils ont aussi été des pollueurs, à cette différence près que, eux, ils ne savaient pas qu’ils l’étaient !

Qu’a-t-on dit aux paysans voilà trente, quarante ou cinquante ans ? On leur a dit – vous en êtes témoins, mes chers collègues : « Nourrissez la France, allez-y : il faut augmenter les rendements ! »

Nous avons su, collectivement, augmenter les rendements, mais à grand renfort de chimie. Cela, il ne faut pas le nier : c’est vrai ! Les traitements ont été une véritable catastrophe pour l’environnement, mais aussi pour les paysans. Quand nous allions traiter le maïs dans des tracteurs sans cabine et que nous revenions tout verts ou tout bleus, il y avait tout de même des questions à se poser ! Il ne faut pas nier la réalité.

C’est pourquoi je pointe du doigt vos propos, madame la ministre, comme ceux des rapporteurs et de mes collègues de la droite sénatoriale. Et c’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article 13 : aujourd’hui, nous avons des solutions pour remédier à ces problèmes de pollution.

Nous les connaissons : nous pouvons nous appuyer sur les avis des scientifiques. Notre collègue Jean-Marc Boyer l’a dit : il faut s’appuyer sur les conclusions de la science. Encore faut-il lire jusqu’au bout les rapports scientifiques !

Nous avons désormais des solutions, disais-je, pour pallier la pollution entraînée par l’activité humaine, notamment par l’activité agricole. Ayez au moins l’honnêteté de le reconnaître.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sans vouloir relancer les débats, je citerai quelques chiffres.

Dans le département de la Haute-Loire, en 2024, un peu plus de 1 000 contrôles ont été effectués sur 3 500 exploitations agricoles, dont 700 ont été réalisés par la direction départementale des territoires (DDT) sur la PAC, un peu moins de 300 par la direction départementale de la protection des populations (DDPP) sur l’identification et l’utilisation des antibiotiques, et 50 par l’Office français de la biodiversité (OFB).

Sur les 50 contrôles réalisés par l’OFB, 49 ont été au pénal. Voilà la réalité, et ce n’était pas le cas il y a encore quelques années ! (M. Vincent Louault approuve.)

La direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), qui traite également des problèmes d’environnement et d’écologie pour les entreprises, n’envoie, elle, que deux dossiers au pénal pour 50 contrôles. Voilà où nous en sommes !

Nier les faits, c’est condamner les agriculteurs à revivre sans cesse le même problème. Ils sont traités comme de très grands délinquants (Mme Mathilde Ollivier sexclame.), alors que les faits qui leur sont reprochés méritent tout au plus une sanction administrative, mais en aucun cas le pénal !

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. Nous soutenons cette démarche, car elle nous ramène à un principe général du droit auquel nous sommes tous attachés, à savoir la proportionnalité.

Les situations sont hétéroclites. Parfois, les interventions sont parfaitement justifiées, mais d’autres ne le sont malheureusement pas, comme c’est souvent le cas en matière de travaux forestiers ; j’ai pu le constater moi-même.

On parle de la disparition des espèces, mais nombre d’entreprises disparaissent également. Par excès ou par zèle législatif, certaines d’entre elles ont été interdites d’exercice ou n’ont pu postuler à des marchés publics pendant de long mois, pendant toute la période du contentieux. Ainsi privées d’activité, elles ont disparu.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.

M. Pierre Cuypers. Sommes-nous tous d’accord pour dire que la France est l’un des plus beaux pays du monde ?

M. Pierre Cuypers. Par ailleurs, est-ce que ce sont les agriculteurs qui détériorent notre pays ?

M. Pierre Cuypers. Les agriculteurs contribuent-ils à la longévité de nos concitoyens ?

Ne devraient-ils pas être remerciés pour leur travail ? Après tout, ils nous nourrissent, ils créent des richesses que nous exportons, ils produisent de l’énergie et de nombreuses matières premières indispensables à la vie de nos concitoyens.

Monsieur Jadot, vous devriez présenter vos excuses au monde agricole pour les propos que vous avez tenus contre eux !

M. Yannick Jadot. Certainement pas !

M. Pierre Cuypers. Libre à vous de ne pas être d’accord avec les agriculteurs, mais je n’admets pas que vous défendiez vos idées de cette façon-là. Les agriculteurs doivent aujourd’hui être félicités et remerciés ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Marques dironie sur les travées des groupes GEST et SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.

Mme Mathilde Ollivier. Franchement, ce débat, c’est la honte ! (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) On fixe de grands objectifs pour défendre la biodiversité à l’échelle française, on fait de grandes annonces à l’échelle internationale, mais ici, à l’occasion de cet article, on fait tout le contraire !

Les agriculteurs ne seront pas les seuls concernés par cet article : il y aura aussi les pêcheurs et les chasseurs, ainsi que toutes les entreprises qui porteront atteinte à la biodiversité. Eux aussi pourront arguer du caractère non intentionnel de ces atteintes !

Si, demain, une entreprise déverse des produits chimiques dans une rivière, pourra-t-elle se contenter de dire qu’elle n’a pas fait exprès, qu’elle ignorait qu’il y avait un trou dans ses tuyaux ? Quid des poissons qui mourront et les espèces protégées qui potentiellement disparaîtront de ce cours d’eau ? Puisque l’atteinte n’était pas intentionnelle, faudrait-il se contenter d’une amende de 450 euros et dire adieu à la biodiversité ?

Ce débat est une honte pour les objectifs que la France se fixe en matière de protection de la biodiversité terrestre – directement touchée par l’agriculture –, mais aussi marine. À quelques mois du sommet des Nations unies sur les océans, ce débat est catastrophique également pour les espèces de poissons et les mammifères marins !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Madame la sénatrice Ollivier, qui peut ici raisonnablement affirmer que le respect de la biodiversité est superflu ? Vos propos sont une caricature !

Quant à vous, monsieur Jadot, si vous n’étiez plus sur Twitter, j’aurais pu croire que votre intervention était faite pour une capsule vidéo ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

En effet, c’était totalement caricatural.

M. Yannick Jadot. La moitié de vos interventions à vous sont faites pour le congrès de la FNSEA !

Mme la présidente. Monsieur Jadot, je vous demande un peu de respect envers Mme la ministre.

Veuillez poursuivre, madame la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. La non-intentionnalité est bordée : trois cas de figure la déterminent.

Premier cas de figure, il s’agit d’un ordre de la loi. Je pense, par exemple, à l’obligation légale de débroussaillement.

Deuxième cas de figure, il s’agit d’une autorisation. Anne-Catherine Loisier a cité l’exemple des entreprises de travaux forestiers : on leur délivre une autorisation et on les accuse ensuite de destruction d’espèces protégées.

Troisième cas de figure, il s’agit d’un plan de gestion validé. Là non plus, il n’y a pas intentionnalité, puisqu’il y avait autorisation d’intervenir, voire injonction.

Remettons donc un peu d’ordre !

M. Guillaume Gontard. Parce qu’il n’y a pas d’ordre actuellement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, même si le juge, attaché à la question de la proportionnalité de la peine, ne prononce pas la peine maximale de trois ans de prison et de 150 000 euros d’amende – Richelieu disait d’ailleurs : « Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c’est autoriser la chose qu’on veut défendre » –,…

M. Guillaume Gontard. Vous remettez en cause la justice ?

Mme Annie Genevard, ministre. … même si l’on n’applique pas le quantum de peine, disais-je, l’agriculteur – car c’est exclusivement de lui qu’il est question, comme s’il était le seul à être responsable de la disparition dramatique de la biodiversité – est placé en garde à vue comme un délinquant présumé coupable, son nom est publié dans le journal, il est livré à l’infamie publique comme étant un destructeur de biodiversité !

M. Rémy Pointereau. Exactement !

M. Jean-Marc Boyer. Il est traité comme un gangster !

Mme Annie Genevard, ministre. Vous voyez bien tout ce que cela implique : il comparaît en correctionnelle, doit payer des frais d’avocats et subit deux à cinq ans de procédure, durant lesquels il est en état d’insécurité juridique et de stress permanent. (Marques dapprobation sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Protestations sur les travées du groupe GEST.)

Mme Nadia Sollogoub. Exactement !

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Jadot, vous avez prononcé un mot inadmissible au cours de votre intervention. Vous avez parlé de négationnisme.

M. Yannick Jadot. De la biodiversité, oui !

Mme Annie Genevard, ministre. C’est une honte que d’utiliser ce terme, qui est historiquement très bien documenté. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Vincent Louault applaudit également. – Protestations sur les travées du groupe GEST.)

Mme Catherine Belrhiti. Cherchez la définition de ce mot avant de l’utiliser !

Mme Annie Genevard, ministre. Vous n’avez pas le droit, de surcroît dans le contexte actuel de regain de l’antisémitisme, d’utiliser ce mot ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Vous en êtes-là, madame la ministre ? C’est honteux ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 384 rectifié ter, 577 et 711 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 189 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l’adoption 107
Contre 22 5

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 874, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 171-7-1, il est inséré un article L. 171-7-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 171-7-2. – Sans préjudice des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d’atteinte irréversible à la conservation d’espèces animales non domestiques, d’espèces végétales non cultivées et d’habitats naturels en violation des interdictions ou des prescriptions prévues à l’article L. 411-1 et par les règlements ou les décisions individuelles pris en application de l’article L. 411-2, l’autorité administrative compétente peut, sans avoir préalablement procédé à une mise en demeure, obliger la personne physique ou le dirigeant de la personne morale responsable de l’atteinte à suivre un stage de sensibilisation aux enjeux de l’environnement, notamment à la reconnaissance et à la protection des espèces et des habitats. » ;

2° L’article L. 415-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du 1°, après le mot : « fait », sont insérés les mots : « , commis de manière intentionnelle » ;

b) Après le d du même 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Est présumée ne pas commettre de manière intentionnelle les faits mentionnés aux a à d du présent 1° la personne qui exécute une obligation légale ou réglementaire, les prescriptions assortissant une autorisation administrative ou les activités prévues par des documents de gestion mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier dans des conditions qui prévoient la mise en œuvre de mesures pour éviter ou réduire les atteintes portées aux espèces protégées et à leurs habitats, présentant des garanties d’effectivité telles qu’elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu’il apparaisse comme n’étant pas suffisamment caractérisé. » ;.

c) Au 2°, après la référence : « L. 411-6 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

d) Après le treizième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité administrative peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite des délits prévus au 1° du présent article, dans les conditions prévues au second alinéa du I et aux III à V de l’article L. 173-12. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l’article 13 issue des travaux de l’Assemblée nationale, en la complétant par des éléments sur les documents de gestion forestière.

Il s’agit donc de rétablir cette version, qui est à la fois plus cohérente et sécurisée juridiquement, en y ajoutant des garanties supplémentaires s’agissant des pratiques forestières.

En effet, la version votée par la commission des affaires économiques du Sénat soulève de nombreuses difficultés en élargissant le champ d’application de l’article aux réglementations relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et aux installations, ouvrages, travaux et activités (Iota) soumis à la loi sur l’eau.

Cette extension me paraît dangereuse, car elle s’appliquerait à tous et non aux seuls agriculteurs, c’est-à-dire qu’elle vaudrait aussi pour les industriels et les activités dangereuses.

Je rappelle que l’objectif visé par le Gouvernement au travers de cet article est d’adapter les sanctions relatives aux atteintes aux espèces et aux habitats protégés aux circonstances des infractions, en prenant en compte le fait que ces infractions résultent dans certains cas d’activités autorisées ou font l’objet d’obligations légales.

L’article 13 vise également, pour les infractions volontaires, à restaurer la possibilité de transactions pénales qui existait jusqu’en 2016. Cette dernière permet d’éteindre l’action publique après paiement d’une amende transactionnelle proposée par le préfet et validée par le procureur de la République. La remise en état, quand elle est possible, est bien entendu obligatoire.

L’amendement du Gouvernement vise donc à circonscrire les sanctions aux atteintes non intentionnelles, en laissant de côté les ICPE et les Iota, qui relèvent d’une autre réglementation, et à rétablir la possibilité de recourir à la transaction pénale, qui était en vigueur jusqu’en 2016.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette rédaction est juridiquement sécurisée, ce qui est très important : elle n’ouvre pas une possibilité de dépénalisation pour toutes les formes d’atteinte à l’environnement. Elle est également bordée, puisqu’il s’agit d’atteintes non intentionnelles et de dégradations non définitives d’habitats. En cas de dégradations volontaires, il sera possible de recourir à la procédure de transaction pénale.

Ce dispositif est solide et robuste juridiquement. C’est la raison pour laquelle je vous propose de l’adopter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur la rédaction proposée par la commission des affaires économiques du Sénat.

Tout d’abord, madame la ministre, je ne crois pas que la rédaction que nous avons votée pour cet article soit moins juridiquement tenable que la vôtre.

Mme Annie Genevard, ministre. Si, sur les ICPE et les Iota !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ensuite, vous proposez de recourir à la transaction pénale. C’est aussi ce que nous prévoyons de faire.

En revanche, nos deux rédactions divergent bien sur un élément. Tout à l’heure, vous avez trouvé anormal que certains agriculteurs se retrouvent placés en garde à vue. Pour l’éviter, il importe que le régime soit administratif et non pénal, comme vous le proposez au travers de votre amendement. Si le régime restait pénal, comme le souhaite l’Assemblée nationale, il ne serait pas possible de mettre fin aux gardes à vue.

M. Vincent Louault. Tout à fait !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Mes chers collègues, si nous voulons instaurer une réelle différence de traitement entre le véritable délinquant et l’agriculteur qui commet un petit écart au niveau environnemental, mieux vaut s’en tenir à la rédaction proposée par la commission des affaires économiques du Sénat.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement de réécriture de l’article.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Nous ne parlons pas de la même chose, monsieur le rapporteur.

En élargissant la dépénalisation aux ICPE, c’est-à-dire aux installations classées, vous dépénalisez des actes pouvant porter atteinte à la sécurité publique. Il pourrait s’agir, par exemple, d’installations industrielles qui répandraient accidentellement leur stock de matières dangereuses dans l’environnement.

Un tel incident ne serait pas intentionnel, certes, mais il pourrait mettre en jeu la sécurité publique et la santé de nos concitoyens. Le cadre n’est donc pas du tout le même. Comment pourrions-nous appliquer à ce type d’infractions la dépénalisation prévue pour les atteintes non intentionnelles et involontaires à l’environnement ? Ce n’est pas du tout la même chose.

La rédaction proposée par le Gouvernement est sécurisée et circonscrite à un objet particulier. Monsieur le rapporteur, en l’élargissant aux ICPE et aux Iota, vous compromettez le dispositif, car il ne tiendra pas, et vous le savez.

En commission, vous avez adopté un amendement d’appel. Votre rédaction sera peut-être maintenue cet après-midi, car nous sommes au Sénat et vous êtes ici chez vous, mais elle n’a aucune chance de passer en commission mixte paritaire, ni devant le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel. C’est impossible ! Vous pouvez vous faire plaisir avec un effet d’annonce, mais cette rédaction ne tiendra pas.

En ce qui concerne les ICPE, il existe bien un problème, mais il ne sera réglé ni par l’amendement du Gouvernement ni par le vôtre : je veux parler de la question des seuils des bâtiments d’élevage. Je vous l’accorde, c’est un vrai sujet.

L’ensemble de la profession – nous y reviendrons dans le cours du débat – demande davantage de souplesse. L’idée, bien sûr, n’est pas d’aller jusqu’à la ferme des mille vaches – cette tradition n’existe pas chez nous, inutile d’élaborer une chimère ! Il s’agit simplement de traiter le cas d’un éleveur qui aurait 55 vaches au lieu de 49. Cela change-t-il quelque chose en matière de sécurité ? Évidemment, non ! Il conviendra donc de régler ce problème, mais en traitant ce cas de figure à part.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous demande d’adopter cet amendement, qui est le seul adapté à l’objectif que nous visons, à savoir éviter à des agriculteurs qui, de bonne foi, causeraient une destruction ou une altération de l’environnement, à condition qu’elle ne soit pas irrémédiable et qu’elle ne soit pas intentionnelle, d’être sanctionnés pénalement.

Cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de réponse à l’acte : nous avons prévu une obligation de remise en état et de stage. S’il y a eu destruction non intentionnelle, c’est bien qu’il y avait méconnaissance. Une formation sera utile à l’agriculteur pour lui éviter toute récidive. Je vous demande donc instamment de voter ce dispositif.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot, pour un rappel au règlement.

M. Yannick Jadot. Mon intervention se fonde sur l’article 33 de notre règlement.

Madame la ministre, au cours de notre débat, vous m’avez accusé de faire la promotion de l’antisémitisme. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme Annie Genevard, ministre. Non !

M. Rémy Pointereau. Pas du tout !

M. Yannick Jadot. Si, c’est exactement ce que vous avez dit, madame la ministre !

Nous rencontrons avec cet article un problème extrêmement important de négation de la réalité des recherches scientifiques autour de l’effondrement de la biodiversité. C’est un fait ! Toutes les études scientifiques démontrent que l’agriculture en est l’une des causes.

Mme Catherine Belrhiti. Le mot « négationnisme » a un sens !

M. Yannick Jadot. Je n’accuse pas les agriculteurs, mais c’est une réalité scientifique, que nul ne peut nier !

Madame la ministre, quand vous dites que je fais la promotion de l’antisémitisme, non seulement vous m’insultez, mais vous insultez aussi les victimes de la Shoah ! (Vives protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Je vous demande donc de retirer vos propos, car ils n’ont rien à voir avec ce débat ! (Mêmes mouvements.)

M. Jean-François Husson. N’importe quoi !

Mme Kristina Pluchet. Vous êtes tordu !

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Quelle mauvaise foi !

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur Jadot, j’observe avec intérêt que vous n’avez pas utilisé, cette fois, le mot négationnisme. Vous avez parlé de « négation » – ce n’est pas la même chose. Vous auriez pu également parler de « déni » – ce n’est pas la même chose.

M. Yannick Jadot. Retirez-vous vos propos ?

Mme Annie Genevard, ministre. Vous êtes un homme instruit, monsieur Jadot, vous savez très bien ce que signifie le mot négationnisme (M. Yannick Jadot proteste.), et vous savez aussi très bien que je ne vous ai pas accusé d’antisémitisme. Ne soyez pas malhonnête !

Je ne me permettrai jamais d’affirmer une telle chose, d’autant que je ne vous connais pas. Je dis simplement que le mot que vous avez utilisé, monsieur le sénateur, est totalement inapproprié.

M. Yannick Jadot. Ouvrez le Larousse !

Mme Annie Genevard, ministre. On ne peut pas banaliser ce terme dans la période actuelle. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. Yannick Jadot. Vous avez parlé d’antisémitisme, allez-vous retirer vos mots ?

Mme la présidente. Mes chers collègues, je souhaite clore ce débat.

Je rappelle que les faits personnels sont examinés à la fin de la séance.

Nous reprenons l’examen de l’amendement n° 874 du Gouvernement.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. J’espère, madame la ministre, que nous en resterons à la rédaction de la commission. Contrairement à ce que vous affirmez, celle-ci ne vise nullement à dépénaliser tous les cas de figure.

En ce qui concerne les ICPE et les Iota, il s’agit simplement de dépénaliser les activités soumises à déclaration et à enregistrement, pas celles qui sont soumises à autorisation et qui resteront pénalisées. Les grosses entreprises chimiques que vous évoquez n’auront donc pas le droit de tout faire.

En revanche, madame la ministre, c’est avec plaisir que j’ai écouté votre proposition. Un agriculteur qui a 150 vaches, ce qui correspond au régime de déclaration, doit-il passer devant le juge pénal parce qu’il en comptabilise finalement 151 ou 152, ce qui correspond au régime d’enregistrement ? Pour deux vaches de trop, est-ce opportun et nécessaire ? Je ne le crois pas. Une amende administrative me paraît donc préférable.

Quant à la rédaction de cet article, dans un souci d’ouverture, je suis prêt à y revenir en commission mixte paritaire, de façon à parvenir à un compromis acceptable. Mais, dans l’immédiat, restons-en là.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Mme la ministre a semé le doute. Mais au Sénat, en cas de doute, c’est la prime au rapporteur !

Mme Annie Genevard, ministre. Vraiment ? Cela m’avait échappé ! (Sourires.)

M. Vincent Louault. Passer à un régime de répression administrative change tout. Selon la Cour des comptes, sur les 100 000 délits ayant fait entre 2015 et 2019 l’objet d’une réponse pénale, 350 peines de prison de plus d’un an et des amendes de plusieurs centaines d’euros ont été prononcées. Les procédures durent plusieurs années. Le pénal, ce n’est pas anodin dans ce pays.

On n’a pas créé un parquet national de l’environnement en France pour traiter trois affaires par an, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire sur les travées d’en face ! On n’a pas non plus créé l’OFB, avec 3 000 agents sur le terrain, pour sucrer les fraises ! Ils travaillent, selon des procédures bien huilées, et cela fonctionne. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 100 000 délits constatés en quatre ans !

Certes, je comprends Mme la ministre : les arbitrages ne dépendent pas uniquement d’elle. C’est le gros du problème, me semble-t-il : le ministère de l’environnement ne veut pas lâcher. L’arbitrage a dû être défavorable au ministère de l’agriculture…

Mme Annie Genevard, ministre. Vous n’y êtes pas du tout !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Boyer. On a beaucoup fait référence ici aux scientifiques. Or, chaque année, le magazine britannique The Economist publie l’ordre de durabilité des modèles agricoles et alimentaires dans le monde. Pour la troisième année consécutive, la France est première au palmarès.

Élaboré par The Economist Intelligence Unit, comprenant chercheurs, économistes et journalistes, l’indice de durabilité alimentaire est une étude comparative, permettant d’analyser les différentes façons de produire et de consommer dans 77 pays, représentant à eux seuls 90 % du PIB mondial et environ 80 % de la population.

Chaque année, un score est attribué par pays, selon une quarantaine d’indicateurs, répartis en trois catégories : le gaspillage de l’eau et de la nourriture ; la durabilité des méthodes agricoles ; la gestion des problématiques nutritionnelles.

Au regard de tous ces critères, le système agricole français est jugé comme étant le plus vertueux. La France serait même « à l’avant-garde » ! Au cours de leur étude, les auteurs ont notamment salué les politiques de lutte contre le gaspillage alimentaire conduites chez nous.

C’est en matière de durabilité des pratiques agricoles que la France progresse le plus cette année. Elle est désormais au troisième rang mondial.

Préservation de la biodiversité, diversification des cultures, lutte contre l’artificialisation des sols, The Economist cite notamment les actions menées dans l’Hexagone en faveur de l’agroécologie. Est également saluée notre ambition de sortir du glyphosate d’ici à la fin de 2020.

Cette année encore, pour la troisième fois consécutive, l’indice de durabilité alimentaire vient donc récompenser les efforts encourageants de la France et de ses agriculteurs en matière de transition agroécologique.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Ne m’en veuillez pas, chers collègues, mais j’utiliserai moi aussi un mot en « isme » : corporatisme, car vous nous en offrez aujourd’hui un bel exemple ! Vous défendez tous les agriculteurs, parce que ce sont des agriculteurs.

Certes, une majorité d’entre eux font bien leur travail, malgré un modèle assez destructeur. Mais vous voulez ici couvrir quelques brebis galeuses qui ne respectent pas la loi. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Voilà pourquoi elles sont condamnées ! Il y a une loi dans ce pays et une justice, en qui j’ai confiance. Lorsqu’une infraction relève du pénal, c’est qu’elle est relativement grave.

J’ignore à quelle sanction a été condamné l’agriculteur à la vache supplémentaire dont M. le rapporteur a parlé, mais je pense que, pour aller au pénal, il faut avoir commis des actes d’une certaine gravité.

M. Vincent Louault. C’est faux !

M. Daniel Salmon. Or vous êtes en train d’organiser la quasi-impunité de toutes les atteintes à l’environnement. Et cela me semble gravissime à l’heure où l’effondrement de la biodiversité est énorme.

L’Académie nationale des sciences américaine – pardonnez-moi cette référence non française… – montre bien que, dans la hiérarchie des causes de l’effondrement de la biodiversité, l’agriculture est la principale responsable, du fait de l’intensification des pratiques. C’est un fait scientifique ! L’agriculture n’est pas la seule responsable, mais elle occupe la première place. Il faut donc s’en inquiéter.

La préoccupation pour l’environnement n’est pas une lubie d’écologistes. Elle est fondamentale pour assurer la pérennité de notre modèle et, tout simplement, de l’humanité.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, si vous appelez la gendarmerie parce que vous avez heurté, la nuit, un animal protégé, comme un loup ou un lynx, qui a surgi devant les roues de votre voiture, vous serez placé en garde à vue.

Mme Annie Genevard, ministre. L’amendement du Gouvernement vise à remettre un peu de rationalité et de mesure. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

Pour sa part, M. le rapporteur vous propose d’élargir cette dépénalisation aux ICPE, au-delà des seules activités agricoles. Je répète qu’il y a une difficulté pour ce qui concerne l’élevage, mais nous ne pouvons pas la traiter ici, car ce n’est pas le même sujet.

Du fait de cette ouverture aux ICPE, qui s’appliquera aux activités industrielles, la fabrication ou le stockage de produits dangereux, toxiques, explosifs, inflammables, par exemple, pourra être concernée par l’amendement du rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Pas aux activités qui sont sous le régime de la déclaration !

Mme Annie Genevard, ministre. C’est la raison pour laquelle je vous propose de circonscrire vraiment la dépénalisation aux atteintes non intentionnelles à l’environnement. Il faut être raisonnable !

De toute façon, je le répète, l’amendement de M. le rapporteur ne tiendra pas.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. On verra bien !

Mme Annie Genevard, ministre. C’est certain, monsieur le rapporteur, et vous le savez !

Bien sûr, monsieur Louault, la position récurrente des sénateurs ne m’a pas échappé. Mais c’est à cela que sert le débat ! Ou alors il faut s’abstenir de discuter et passer directement à la commission mixte paritaire… Le débat permet d’exposer les points de vue pour éclairer le vote.

Pour ma part, je ne renonce pas à faire appel à votre bon sens. Dieu sait que celui-ci est important en matière agricole !

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.

M. Hervé Gillé. Il y a, bien sûr, du bon sens dans le monde agricole. Il y a, heureusement, du bon sens chez de nombreuses familles professionnelles, et j’espère qu’il y a aussi du bon sens politique. Ce n’est pas le problème.

Je souhaite revenir sur la notion d’ICPE, qui est particulièrement importante.

Je prendrai un seul exemple. En Gironde, de nombreux établissements situés dans le port autonome de Bordeaux sont classés ICPE. Ils sont particulièrement surveillés pour leur dangerosité – elle est plus ou moins grande, mais elle peut être élevée. Ils sont, bien sûr, très suivis par l’ensemble des collectivités riveraines.

Si jamais nous allions dans le sens de M. le rapporteur, nous ouvririons donc une brèche considérable en termes de sécurité et d’appréciation de la faute qui peut être commise.

J’attire votre attention sur ce sujet, mes chers collègues : il y aurait là un dérapage très important. Imaginez que l’on applique effectivement cet amendement dans vos territoires où se trouvent des ICPE. Notre responsabilité à l’égard des habitants serait considérable.

La proposition du Gouvernement, qui est une position de repli, me paraît bien plus équilibrée.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sans avoir la prétention de clore les débats, je veux dire que l’on amalgame tous les IPCE, en confondant toutes les strates.

Nous ne sommes pas en train de discuter de la strate des entreprises soumises à autorisation, contrairement à ce que semblent penser certains. Nous sommes en train de parler des entreprises dont la taille les place sous les régimes de la déclaration et l’enregistrement.

Madame la ministre, vous dites que notre rédaction ne tient pas juridiquement. Pardon, mais nos services, souvent, se confrontent aux vôtres pour savoir comment faire bouger les choses d’une manière qui soit solide juridiquement. Et ils ne me disent pas que ce que nous sommes en train d’écrire est complètement à côté de la plaque !

Acceptons que l’Assemblée nationale, le Sénat et la commission mixte paritaire (CMP) fassent chacun leur travail. Comme vous l’avez dit, la CMP doit mener un travail de mise en accord entre les deux chambres et avoir le temps de vérifier les différents arguments.

Pour ma part, je pense que nos dissensions enrichissent le débat. Si l’on considère que nous sommes obligés de retenir la rédaction de l’Assemblée nationale, parce qu’elle serait la plus tenable juridiquement, cela veut dire que l’on n’a plus besoin du Sénat, et autant le supprimer !

Faisons comme d’habitude, restons sur notre position. Nous mettrons ensuite notre texte dans la balance juridique, pour voir s’il pèse plus ou moins lourd que celui des députés.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Tout à l’heure, vous avez cité Montesquieu, madame la ministre. Celui-ci disait aussi qu’il ne faut changer la loi que d’une main tremblante. Or nous sommes en train de jouer aux apprentis sorciers !

Sous couvert de défense des agriculteurs, c’est, en réalité, l’entièreté du code de l’environnement que nous changeons. Au-delà des seuls agriculteurs, ce sont toutes les ICPE qui sont ici visées, avec un impact potentiellement très fort sur l’ensemble des habitants de nos territoires, ce qui est tout de même dangereux.

Je pense d’ailleurs que, si nous inscrivons cette mesure dans la loi, nous y reviendrons dans peu de temps, parce que nous nous apercevrons très vite des dangers entraînés par les facilités que nous avons votées. Et je ne parle même pas du message que nous envoyons !

J’ai cité tout à l’heure l’exemple de Lactalis. Le nombre de condamnations pour déversements et pollution de l’eau reste particulièrement important, sur de petites unités justement. L’intentionnalité sera très facile à écarter !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. On est là dans le régime de l’autorisation !

M. Guillaume Gontard. Cela me paraît vraiment très dangereux. Je suis d’ailleurs assez surpris qu’une ministre de la République tienne des discours en ce sens.

Vous avez dit, madame la ministre, que celui dont la voiture heurtait un animal protégé, comme un loup, allait en garde à vue. J’aimerais que vous m’en donniez des exemples ! Le seul cas dont j’ai eu connaissance est celui d’une personne, en Savoie, qui avait percuté un loup de manière intentionnelle – une vidéo a prouvé qu’elle avait ce projet. C’est une situation quelque peu différente de celle que vous avez décrite !

On peut toujours caricaturer, mais je pense que le débat se portera mieux si nous restons à peu près sensés.

(Mme Sylvie Vermeillet remplace Mme Anne Chain-Larché au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour explication de vote.

M. Lucien Stanzione. Sans aller jusqu’aux ICPE, la question, madame la ministre, est sûrement celle de la position du curseur sur la possibilité de déroger.

Vous avez cité le cas où l’on peut se retrouver en garde à vue parce que l’on a percuté un animal sauvage. À l’extrême, on acceptera une dérogation réglementaire pour tous les animaux possibles et imaginables !

Il serait bon que vous puissiez nous expliquer où se trouve le curseur dans cette affaire. Comme l’on dit certains de mes collègues, on ne peut s’engager à l’aveugle.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Je veux évoquer un argument qui plaide en faveur de l’adoption de l’amendement du Gouvernement.

M. le rapporteur a expliqué que le dispositif de la commission se limitait aux ICPE sous le régime de la déclaration ou de l’enregistrement et ne concernait pas celles qui relèvent de l’autorisation.

Sur un site tout à fait officiel, celui de la réglementation de la prévention des risques et de la protection de l’environnement – nous sommes donc dans notre sujet –, la nomenclature est tout à fait claire.

Avec l’amendement de la commission des affaires économiques, il serait possible de stocker, dans les installations soumises à enregistrement ou déclaration, une quantité totale de matières actives de produits possiblement dangereux qui serait supérieure ou égale à 100 kilogrammes, mais inférieure à 500 kilogrammes. On pourrait donc y stocker 499 kilogrammes de matières de produits explosifs ! Nous ne pouvons pas décider une chose pareille !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’essence, c’est explosif ! L’ammonitrate aussi ! Or j’en ai 25 tonnes…

Mme Annie Genevard, ministre. C’est la raison pour laquelle je vous demande instamment, mesdames, messieurs les sénateurs, de borner la dépénalisation aux atteintes non intentionnelles à l’environnement. C’est le cœur du sujet.

On ne peut s’engager dans une direction qui mettra en péril la sécurité publique et la santé d’autrui. Ce n’est pas possible !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sur mon exploitation, qui ne relève ni de la déclaration ni de l’enregistrement, je stocke 25 tonnes d’ammonitrate. Et je rappelle qu’AZF a explosé avec de l’ammonitrate !

Quand on cherche à faire peur, on peut faire dire tout ce qu’on veut à tout un tas de choses, mais il me semble que les trois piliers sur lesquels notre République est assise aujourd’hui, ce sont la liberté, l’égalité et la fraternité. Ce ne sont pas la peur, la culpabilité et l’interdit !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 874.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 190 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 256
Pour l’adoption 41
Contre 215

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 259 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mmes Billon et Jacquemet et MM. Levi, de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 794 rectifié est présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol et Brisson, Mme Berthet, MM. Burgoa, Klinger et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon et Belin, Mmes Josende et Joseph, MM. Genet, Somon et Bacci, Mmes Dumont et Drexler, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 4

Après les mots :

infractions mentionnées

insérer les mots :

aux articles L. 216-6, L. 432-2 et

II. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

…. – Après le premier alinéa de l’article L. 216-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, les infractions mentionnées au présent article sont soumises, lorsqu’elles n’ont pas été commises par négligence grave ou de manière intentionnelle, aux sanctions prévues par l’article L. 171-7-2 du présent code. Sont présumés n’avoir pas été commis de manière intentionnelle, les faits répondant à l’exécution d’une obligation légale ou réglementaire ou des prescriptions prévues par une autorisation administrative. »

….. – L’article L. 432-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, les infractions mentionnées au présent article sont soumises, lorsqu’elles n’ont pas été commises par négligence grave ou de manière intentionnelle, aux sanctions prévues par l’article L. 171-7-2 du présent code. Sont présumés n’avoir pas été commis de manière intentionnelle, les faits répondant à l’exécution d’une obligation légale ou réglementaire ou des prescriptions prévues par une autorisation administrative. »

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 259 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Cet amendement se justifie par le débat que nous venons de mener. Il vise à dépénaliser les infractions de pollution des eaux qui ne sont pas commises intentionnellement ou par négligence grave.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 794 rectifié.

M. Daniel Gremillet. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je pense que nous sommes déjà allés suffisamment loin sur le sujet…

Compte tenu de la teneur des débats, mes chers collègues, je sollicite le retrait de ces amendements, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.

M. Yannick Jadot. Trop, c’est trop !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Bleunven, l’amendement n° 259 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Yves Bleunven. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 259 rectifié bis est retiré.

Monsieur Gremillet, l’amendement n° 794 rectifié est-il maintenu ?

M. Daniel Gremillet. Non, je le retire également, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 794 rectifié est retiré.

L’amendement n° 967, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Nonobstant toute disposition contraire, hors cas de récidive, et sans préjudice des dispositions prévues à l’avant-dernier alinéa du présent article, ne peut être sanctionné que d’une amende d’un montant au plus égal à 450 €, prononcée par l’autorité administrative, le fait, sans procéder à la déclaration ou à l’enregistrement mentionnés au II de l’article L. 214-3, à l’article L. 512-7 et à l’article L. 512-8 et exigés pour un acte, une activité, une opération, une installation ou un ouvrage, de :

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 967.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 968, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de récidive, le montant de l’amende est porté à 1 500 €.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement a pour objet d’alourdir les sanctions en cas de récidive.

Les peines augmenteraient de façon importante lors d’une seconde atteinte non intentionnelle – ou pensée comme telle.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Pour qu’il y ait récidive, il faut qu’il y ait condamnation. Or la dépénalisation supprime la condamnation ! Il ne peut pas y avoir de récidive quand il n’y a pas eu de primocondamnation.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Madame la ministre, on ne parle pas de pénalisation pénale ! On parle de pénalisation administrative. Il y a donc bien pénalisation.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. La pénalisation administrative, cela n’existe pas.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 968.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte lamendement.)

Mme Annie Genevard, ministre. C’est n’importe quoi !

Mme la présidente. L’amendement n° 542 rectifié, présenté par MM. Grosvalet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Supprimer les mots :

, en toute hypothèse,

La parole est à M. Philippe Grosvalet.

M. Philippe Grosvalet. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer les termes « en toute hypothèse » avant la possibilité d’édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne responsable de l’atteinte.

Une telle modification ne fait pas évoluer substantiellement l’article, raison pour laquelle le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 542 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 969, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 11, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement a pour objet le stage. Nous en avons très peu parlé, mais il y aurait beaucoup à en dire… Nous trouvons totalement infantilisant pour les agriculteurs que ceux-ci puissent être condamnés à faire un stage lorsqu’ils commettent un écart sur une déclaration – Mme la ministre a évoqué ce cas de figure.

Nous souhaitons donc supprimer ce stage de sensibilisation.

Mme la présidente. L’amendement n° 260 rectifié bis, présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Levi, Mmes Gacquerre et Jacquemet et MM. de Nicolaÿ et Kern, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un décret précise les modalités dans lesquelles le stage de sensibilisation peut s’effectuer.

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Cet amendement vise à prévoir les possibles structures organisatrices des stages de sensibilisation, par exemple en orientant vers les chambres d’agriculture lorsque ce sont des agriculteurs qui sont concernés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 260 rectifié bis ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui est moins disant que le sien.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Bleunven, votre amendement est satisfait, car les modalités et les structures organisatrices des stages existent déjà de manière parfaitement formalisée. Aussi, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

En ce qui concerne le stage de sensibilisation, vous avez largement voté, mesdames, messieurs les sénateurs, pour des raisons de solidarité sénatoriale que je comprends, l’amendement de M. le rapporteur qui vise la dépénalisation. Cependant, vous n’échapperez pas à la réalité juridique, si je puis dire.

C’est sans doute d’ailleurs parce que vous savez qu’il y aura forcément un nettoyage du texte sur ce point que vous avez voté en faveur de l’amendement… Mais je n’en fais absolument pas une question de principe, et je referme la parenthèse. Je crois avoir compris comment fonctionnait votre assemblée ! (Sourires.)

Il est vrai que le stage est vécu par certains agriculteurs comme étant infantilisant. Mais il faut bien voir que l’on fait des stages dans des tas de domaines !

Un agriculteur qui détruit non intentionnellement une espèce protégée a besoin d’être éclairé pour éviter la récidive. C’est de la pédagogie ! Et cette pédagogie peut être assurée par les chambres d’agriculture, c’est-à-dire par les pairs, plutôt que par un agent, un inspecteur ou quelqu’un qui va culpabiliser l’agriculteur. Cette sensibilisation peut être faite par les agriculteurs pour les agriculteurs, de manière à éviter des situations difficiles.

Si je comprends que l’obligation de faire un stage puisse heurter certains agriculteurs, je pense qu’il ne faut pas exagérer les conséquences possibles de ce stage. Il vaut tout de même mieux faire un stage qu’être en garde à vue, de s’engager dans trois à cinq ans de procédure pénale ou d’avoir son nom évoqué sur la place publique ! Ramenons les choses à leur juste proportion.

Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Madame la ministre, je vais vous suivre sur ce sujet.

Monsieur le rapporteur, il ne faut pas se couper du stage s’il peut permettre une action de l’administratif. D’ailleurs, si l’on envoie les agriculteurs faire un stage dans les associations qui les attaquent, cela va les dissuader de recommencer ! (Sourires sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 969.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 260 rectifié bis n’a plus d’objet.

L’amendement n° 970, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéas 14 à 17

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

IV. – Au premier alinéa de l’article L. 173-1, la référence « L. 512-7 » est supprimée.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Il s’agit de dépénaliser le développement d’activités réglementées au titre de la législation ICPE entrant dans le cadre du régime d’enregistrement. J’ai déjà exposé la possible dangerosité d’une telle mesure.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 970.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 386 rectifié ter, présenté par MM. Tissot, Montaugé et M. Weber, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 22, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à notre amendement de suppression de l’article 13.

Il vise à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 22, qui introduit une présomption de non-intentionnalité dès lors que des infractions sont commises dans le cadre d’une obligation légale ou réglementaire ou en application d’une autorisation administrative d’un plan de gestion forestière.

À l’instar de l’ensemble de l’article 13, cette disposition adresse un très mauvais signal sur l’impunité. Elle aboutira, dans les faits, à de nombreuses destructions d’espèces.

Nous proposons donc de supprimer cette phrase, qui serait source de dérives.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’adoption de cet amendement reviendrait à supprimer la dépénalisation.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. La mise en œuvre de cette mesure reviendrait à ne pas prendre en compte le cas d’injonctions contradictoires, par exemple entre plusieurs réglementations, ou celui dans lequel la commission des faits est involontaire.

L’objectif du Gouvernement est d’adapter aux circonstances de l’infraction les sanctions relatives aux atteintes à des espèces et habitats protégés. Cette adaptation est extrêmement importante.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. C’est mon vote sur l’ensemble de l’article que je vais expliquer.

Je pense que le Sénat se fourvoierait et ne se grandirait pas en votant cet article, qui nous paraît non conforme au droit de l’Union européenne.

En effet, ses dispositions contreviennent aux conventions internationales auxquelles la France est partie, telles que la convention de Berne et la directive Habitats-faune-flore de 1992, qui impose clairement des mesures de protection, à la fois positives et d’évitement.

Elles s’opposent également à la directive EIE relative aux incidences sur l’environnement des projets ICPE et Iota, laquelle pose des règles en matière d’évaluation, d’enregistrement et d’autorisation qui pourraient aussi être opposables à cet article.

Cet article n’est pas non plus conforme à la directive sur la destruction des espèces protégées et de leurs habitats, laquelle est justement encadrée par la directive européenne du 11 avril 2024 relative à la protection de l’environnement par le droit pénal, qui précise que ce délit peut être sanctionné même s’il n’est pas intentionnel.

Il contrevient également à la Charte de l’environnement, qui intègre le principe de précaution.

Je pense que l’on ne mesure pas l’ampleur de cet article. La non-intentionnalité profitera à énormément d’infractions ! M. le rapporteur affirmait tout à l’heure que le dispositif était bordé, puisqu’il ne concernait que les ICPE soumises à autorisation, et non les ICPE relevant de la déclaration et de l’enregistrement.

Pour avoir travaillé un peu sur la méthanisation, je sais que la plupart des méthaniseurs sont en dessous du seuil d’autorisation et que l’on constate très régulièrement des pollutions de l’eau liées à des négligences soit simples, soit graves.

Avec la non-intentionnalité, nous n’arriverons plus à prouver qu’il y a vraiment matière à sanction !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 386 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 13, modifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 191 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 314
Pour l’adoption 206
Contre 108

Le Sénat a adopté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 13 (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Discussion générale

6

Nomination d’un secrétaire du Sénat

Mme la présidente. Je rappelle que le groupe Les Républicains a présenté la candidature de M. Fabien Genet pour remplacer M. Philippe Tabarot en qualité de secrétaire du Sénat.

Le délai prévu par l’article 2 bis du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Fabien Genet secrétaire du Sénat. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est l’heure de gloire du Charolais ! (Sourires.)

7

Article 13 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 13

Souveraineté alimentaire et agricole

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 13 bis AA (nouveau)

Après l’article 13

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 74 rectifié bis, présenté par MM. Gillé, Mérillou, Pla et M. Weber, Mme Bélim, MM. Omar Oili, P. Joly, Ros, Lurel, Devinaz et Bourgi et Mmes Conway-Mouret, Monier, Poumirol et Espagnac, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 251-20 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Lorsqu’une parcelle plantée en vignes ne respecte pas le premier alinéa de l’article L. 251-10, les propriétaires sont tenus, dans un délai de six mois à compter de la mise en demeure, de proposer un projet de reconversion ou de renaturation de la parcelle concernée. Ce projet pourra inclure, en fonction des spécificités locales, des actions telles que :

« - le reboisement de la parcelle avec des essences locales adaptées aux conditions climatiques ;

« - la transformation de la parcelle en zone de biodiversité protégée ;

« - la reconversion en un autre type d’exploitation agricole respectueux de l’environnement, tel que l’agriculture biologique.

« Les projets devront respecter des critères environnementaux visant à la restauration de la biodiversité, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires et la préservation des sols.

« À défaut de présentation d’un projet de reconversion ou de renaturation dans les six mois suivant la mise en demeure, ou si le projet proposé est jugé insuffisant au regard des critères environnementaux précités, le propriétaire pourra être soumis à une contravention de cinquième classe, dont le montant sera affecté au financement d’actions de reconversion écologique dans la région concernée.

La parole est à M. Hervé Gillé.

M. Hervé Gillé. À l’heure actuelle, certains exploitants sont en grande difficulté. Aussi, cet amendement vise à encourager la reconversion et la renaturation des parcelles de vignes abandonnées plutôt que d’appliquer directement des sanctions pénales, même si ces deux procédés ont la même finalité, notamment sur le plan sanitaire.

Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert, Belrhiti et Bellurot, MM. J.B. Blanc et Bouchet, Mme Bourcier, MM. Brault, Bruyen, Buis, Burgoa et Cabanel, Mmes M. Carrère et Chain-Larché, MM. Chatillon, Chevalier, Cuypers et Duffourg, Mmes Dumont, Dumas et Duranton, M. Fialaire, Mme Garnier, MM. Genet et Gillé, Mme Gosselin, M. Gremillet, Mme Gruny, M. Houpert, Mme Josende, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. Lefèvre, Lemoyne, H. Leroy et Longeot, Mmes Malet, P. Martin, M. Mercier et Micouleau, M. Milon, Mme Muller-Bronn, M. Nougein, Mme Paoli-Gagin, M. Panunzi, Mme Perrot, MM. Pointereau et Rapin, Mme Renaud-Garabedian, M. Rojouan, Mme Romagny, M. Ruelle, Mme Richer, M. Saury, Mmes Schillinger, Sollogoub et Ventalon et M. C. Vial, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 251-20 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Est puni d’une contravention de cinquième classe le fait de ne pas respecter le premier alinéa de l’article L. 251-10 du présent code pour les parcelles plantées en vignes. »

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Depuis plusieurs années, les parcelles de vignes abandonnées se multiplient sur l’ensemble du vignoble français. Elles deviennent des foyers potentiels de propagation de la flavescence dorée, une maladie de dépérissement de la vigne contre laquelle le code rural et de la pêche maritime oblige à lutter.

Cette situation, nettement aggravée par la crise multifactorielle que subit aujourd’hui la viticulture française, contribue à la forte déprise agricole et affaiblit très sérieusement la stratégie de lutte contre la cicadelle. Cet insecte est vecteur de la flavescence dorée, qui se développe de manière logarithmique et contre laquelle il n’existe aucun remède.

Dans la mesure où les parcelles abandonnées constituent des réservoirs d’agents pathogènes, il est nécessaire de traiter très régulièrement les parcelles voisines concernées par les dispositions du code précité, afin de prévenir leur contamination.

L’augmentation de l’usage d’insecticides qui en découle va totalement à l’encontre de la stratégie globale de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires et de la préservation de la biodiversité.

La solution définitive au problème des vignes non cultivées consiste en leur arrachage dans le cadre des sanctions pénales. Toutefois, les procédures d’arrachage administratif ou judiciaire sont très longues à mettre en œuvre, coûteuses pour l’État et peu efficaces. En outre, elles ne répondent pas à l’enjeu majeur de multiplication de parcelles de vignes non cultivées.

Afin d’améliorer l’efficacité de la stratégie de lutte contre la flavescence dorée et de réduire son effet sur l’environnement, il est nécessaire de dissuader les propriétaires de conserver ces parcelles en l’état.

La réforme du code rural et de la pêche maritime inscrite au cœur de ce projet de loi prévoit d’instaurer un dispositif de sanction contraventionnelle pour non-respect de la stratégie de lutte contre la flavescence dorée. Il serait mis en œuvre au titre des mesures d’exécution des arrêtés, à l’issue d’une mise en demeure, restée sans effet, d’arracher les vignes. Le traitement contre le vecteur de la maladie n’est plus possible dès lors que les parcelles se sont transformées en friches arbustives.

La nouvelle sanction proposée serait mieux adaptée à la grande diversité des situations juridiques rencontrées par les propriétaires de parcelles de vignes non cultivées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Lors de l’examen de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, nous avons adopté un amendement du Gouvernement qui permettait de traiter ce problème par ordonnance.

Nous laisserons la ministre s’exprimer sur ce sujet, mais je pense, mes chers collègues, que vos propositions sont satisfaites. En conséquence, la commission sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Comme l’a souligné le rapporteur à l’instant, cette question a été traitée lors de l’examen de la proposition de loi sénatoriale défendue par MM. Duplomb et Menonville la semaine dernière. Ainsi, une ordonnance permettra bel et bien d’adapter le dispositif de sanctions pénales pour le rendre plus proportionné et plus opérationnel.

Il s’agira notamment d’instaurer des contraventions pour sanctionner la non-réalisation de certaines mesures de lutte, telles que le non-arrachage des vignes contaminées par la flavescence dorée.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Sans malice aucune, je voudrais vous poser une question : la personne qui abandonne ses vignes a-t-elle l’intention de propager une maladie ? Pourquoi appliquer une sanction lorsque la propagation se fait « à l’insu de son plein gré », c’est-à-dire sans intentionnalité ?

Nous avons mis le doigt dans un engrenage et nous ne savons pas jusqu’où il sera broyé…

Mme Annie Genevard, ministre. J’ignorais que les vignes étaient une espèce protégée…

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Votre interprétation est un peu erronée, monsieur Salmon. Nous n’avons pas dit qu’il n’y aurait pas de sanctions, mais que seule une sanction administrative serait appliquée. À vous entendre, vous préféreriez que ces cas soient traités par le juge pénal, ce qui est pire ! C’est bien pour éviter une sanction disproportionnée que nous avons décidé de légiférer comme nous le faisons.

Celui qui abandonne sa vigne n’est pas entièrement responsable de la propagation, raison pour laquelle il fera l’objet d’une sanction administrative plutôt que d’une sanction pénale.

Mme la présidente. Monsieur Gillé, l’amendement n° 74 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Hervé Gillé. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 74 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 2 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Daniel Laurent. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 797 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, de Nicolaÿ, J.M. Arnaud, Brault et Levi, Mmes Billon et Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger, Fargeot et Chevalier, Mmes Gacquerre, Romagny, Jacquemet et de La Provôté et MM. Pillefer, Gremillet, Lemoyne et Daubet, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 121-6 du code forestier, il est inséré un article L. 121-… ainsi rédigé :

« Art. L. 121-… – Les travaux forestiers réalisés dans le cadre de la gestion durable des forêts et de leur exploitation sont considérés comme indispensables à la préservation des écosystèmes, à l’adaptation des milieux naturels au changement climatique et à fournir des produits bois à tous les usages. À ce titre, les activités suivantes sont reconnues d’intérêt général et sécurisées juridiquement tout au long de l’année, dès lors qu’elles s’inscrivent dans le respect du présent code et des instructions données par les documents de gestion ou les autorisations légales de coupe ou les demandes de boisement :

« 1° Les travaux de préparation au boisement ou reboisement ;

« 2° Les travaux de plantation et d’entretien sylvicole ;

« 3° Les travaux d’exploitation forestière, incluant la récolte des bois destinés aux filières industrielles et énergétiques ;

« 4° Les travaux de prévention des risques ;

« 5° Les débroussaillements et obligations légales de débroussaillement ;

« 6° Les interventions visant à prévenir les incendies de forêt ;

« 7° La stabilisation et la restauration des sols de pentes ;

« 8° La mobilisation des bois présentant des dépérissements sanitaires ;

« 9° Les entretiens des abords des réseaux routiers, ferrés, électriques ou gaziers ;

« 10° Les travaux de prévention des aléas climatiques.

« Ces travaux contribuent directement à :

« 1° La résilience des forêts françaises face aux risques climatiques et biologiques, au renouvellement forestier ;

« 2° La prévention des risques pour les personnes, les biens et les infrastructures ;

« 3° La transition écologique de l’économie française en favorisant l’utilisation de matériaux renouvelables et bas carbone ;

« 4° L’amélioration de la balance commerciale en réduisant les importations de bois et en renforçant la souveraineté forestière. »

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Du fait de contraintes réglementaires importantes, les entreprises de travaux forestiers se font plus rares, ce qui met de nombreuses régions en difficulté.

Ces entreprises sont pourtant un maillon essentiel de l’entretien sylvicole. Elles favorisent la gestion durable et la résilience de nos forêts, mobilisent le bois à destination des entreprises et éradiquent certaines espèces de bois lorsque des problèmes sanitaires se posent.

Elles interviennent aussi sur des terrains de montagne pour lutter contre l’érosion des sols. Enfin, elles approvisionnent toutes nos industries de transformation du bois à des fins de construction, de fabrication de mobilier ou d’usage industriel.

Dans ces conditions, le présent amendement vise à sécuriser juridiquement ces entreprises en reconnaissant qu’elles accomplissent une mission d’intérêt général dans la mesure où leurs actions se conforment non seulement aux dispositions du code forestier, mais aussi aux instructions délivrées via les documents de gestion ou les autorisations légales de coupe ou de boisement.

Cet amendement tend également à harmoniser les pratiques régionales, les entreprises de travaux forestiers intervenant dans de multiples régions avec des approches diversifiées, ce qui complique les choses.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je pourrais vous répondre que cet amendement est déjà satisfait par l’article 13, tel que nous venons de le voter.

Néanmoins, étant donné les difficultés juridiques que celui-ci soulève et les corrections que nous serons contraints d’apporter au cours de la commission mixte paritaire, je m’en remets à la sagesse de cette assemblée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement n’est tout simplement pas compatible avec le droit européen. Notez que la Pologne, qui avait tenté d’introduire une disposition analogue visant à exclure la gestion forestière des obligations européennes en matière d’espèces protégées, a été condamnée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement est par définition respectueux du droit européen puisqu’il vise à sécuriser l’activité des entreprises de travaux forestiers. Ainsi, ces dernières agiront nécessairement de façon conforme au droit et aux engagements de gestion durable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 797 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13.

L’amendement n° 284 rectifié bis, présenté par Mme Pluchet, MM. Bouchet et Dhersin, Mme Belrhiti, M. Bacci, Mmes Guidez et Valente Le Hir, MM. Khalifé, Brisson, Lefèvre, de Legge, C. Vial, Reynaud et P. Vidal, Mmes Joseph, Josende et Gruny, MM. Klinger, J.B. Blanc, Naturel et Levi, Mme Billon, MM. Genet, Pointereau et Somon, Mme Bellurot, M. Rojouan, Mme Aeschlimann et M. Cuypers, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre VII du livre Ier du code de l’environnement est complété par un article L. 170-… ainsi rédigé :

« Art. L. 170-… – Le représentant de l’État dans le département se prononce de manière explicite sur toute demande d’une personne posant une question nouvelle et non dépourvue de caractère sérieux ayant pour objet de connaître l’application à une situation de fait d’une législation environnementale. Il se prononce dans un délai de trois mois lorsqu’il est saisi d’une demande écrite, précise et complète par une personne de bonne foi assujettie aux prescriptions du présent code.

« Lorsque l’autorité administrative a pris formellement position, elle ne peut plus adopter une position différente sur la question qui lui a été soumise, à moins que n’intervienne entre-temps une modification de la réglementation ou un changement de circonstance.

« Lorsqu’une personne s’est conformée à une disposition environnementale selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, l’administration ne peut poursuivre en soutenant une interprétation différente.

« Cette prise de position de l’administration cesse de produire ses effets en cas de changement de la réglementation au vu de laquelle la question soumise par le demandeur a été appréciée, si la situation du demandeur ne correspond plus aux informations fournies ou s’il est démontré que la position ainsi prise par l’administration reposait sur des informations erronées transmises par le demandeur.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »

La parole est à Mme Kristina Pluchet.

Mme Kristina Pluchet. Le rapport de notre collègue Jean Bacci sur le fonctionnement de l’Office français de la biodiversité a recommandé d’instaurer par voie législative un rescrit environnemental. En effet, aucun mécanisme de mise en cohérence n’étant prévu au cours du processus législatif, les prescriptions des différents codes peuvent parfois être difficilement conciliables, voire contradictoires.

Ce rescrit environnemental, à l’instar du rescrit fiscal, doit permettre aux acteurs de saisir l’administration sur l’interprétation officielle d’une norme environnementale vis-à-vis de leur propre situation, dans une logique de sécurité juridique renforcée. La réponse ainsi obtenue étant précise, définitive et publique, elle serait opposable aux opérateurs et services chargés de la police de l’environnement.

Cette procédure permettrait non seulement de réduire drastiquement les divergences territoriales qui peuvent exister dans l’appréciation et l’interprétation du droit de l’environnement, mais aussi d’unifier la mise en œuvre d’une police de l’environnement à l’échelle nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission sollicite l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Vous proposez d’instaurer un rescrit environnemental sur le modèle du droit fiscal. Je partage avec vous l’objectif de sécuriser juridiquement les acteurs du territoire, notamment les agriculteurs, vis-à-vis des normes environnementales, afin qu’ils puissent mener leurs activités dans un environnement apaisé et avec le moins de contraintes possible.

Votre dispositif n’est toutefois pas adapté à l’hétérogénéité des demandes ou des projets. Différentes procédures peuvent s’appliquer, avec des délais qui excèdent parfois de trois mois celui que vous proposez.

En revanche, le système de réponse unique de l’administration est utile pour des projets ciblés. C’est la raison pour laquelle nous travaillons à la mise en place d’un guichet unique de la haie, par exemple.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Pluchet, l’amendement n° 284 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Kristina Pluchet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 284 rectifié bis est retiré.

Après l’article 13
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 13 bis A

Article 13 bis AA (nouveau)

Avant le 1er octobre 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport estimant le coût pour les services de l’État de la mise en œuvre effective des mesures de prévention, de contrôle, de contrainte et de répression des prescriptions de lutte obligatoire contre les organismes nuisibles telles que définies aux articles L. 250-1 à 9 et L. 251-3 à 11 du code rural et de la pêche maritime. Ce rapport fait également apparaître les crédits effectivement consacrés, à la date de la promulgation de la présente loi, aux services de l’État pour l’application de ces dispositions.

Mme la présidente. L’amendement n° 846, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. L’article 13 bis AA, introduit en commission, prévoit la remise d’un rapport destiné à évaluer le coût, pour les services de l’État, de la mise en œuvre des mesures de prévention et de lutte contre les organismes nuisibles réglementés sur le territoire et de le comparer aux crédits actuellement consacrés à ces missions.

Je vois exactement ce qui inspire cette disposition… (M. le rapporteur sourit.) Toutefois, celle-ci est en très grande partie satisfaite : les dépenses mises en œuvre pour ces mesures, imputées sur le programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation », sont détaillées dans le rapport annuel de performances (RAP) que l’État transmet au Parlement chaque année. Je comprends que tout le monde ne le lise pas, mais ce document fait bel et bien état de l’ensemble de ces éléments.

En conséquence, le Gouvernement vous propose de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 846.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 13 bis AA est supprimé.

Article 13 bis AA (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 13 bis B

Article 13 bis A

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 387 rectifié bis, présenté par MM. Gillé, Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le chapitre III du titre II du code des douanes est complété par un article 59… ainsi rédigé :

« Art. 59… – I. – Les agents des douanes et les personnes placées sous l’autorité de collectivités territoriales ou établissements publics peuvent, sur demande circonstanciée et dans des objectifs fixés au II, se communiquer, dans le respect du règlement UE 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD), les renseignements et les documents détenus ou recueillis respectivement dans l’exercice de leurs missions relatives à la tenue du casier viticole informatisé prévu à l’article 145 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés et produits agricoles et dans la conduite de leur projet.

« II. – L’objectif mentionné au premier alinéa s’entend de celui répondant aux conditions suivantes :

« 1° Il vise à dimensionner une politique publique de soutien au secteur vitivinicole ;

« 2° Il vise à aider les collectivités territoriales et établissements publics à mesurer et à améliorer l’impact de leurs politiques publiques en faveur de la profession vitivinicole ;

« 3° Il vise à mettre à disposition des Interprofessions et des syndicats viticoles des outils de pilotage publics et privés de leurs démarches environnementales et de leur production ;

« 4° Il respecte le règlement UE 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) en particulier le secret statistique ;

« III. – Un arrêté du ministre en charge du budget reconnaît les objectifs répondant aux critères fixés au II et précise les modalités d’applications du présent article. »

La parole est à M. Hervé Gillé.

M. Hervé Gillé. Cet amendement vise à rétablir l’article 13 bis A, supprimé en commission par les rapporteurs, mais dans une rédaction différente.

Contrairement à ce qui a pu être dit en commission, cette mesure n’a pour effet ni de nuire aux viticulteurs ni de porter atteinte à la confidentialité de leurs informations à caractère personnel. Elle allégerait plutôt l’accomplissement des formalités administratives en évitant de dupliquer la saisie de données pour des acteurs publics différents.

Par ailleurs, cet amendement a pour objet de faciliter l’accès aux données du casier viticole informatisé (CVI), afin de permettre à l’État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics d’adapter plus efficacement les politiques publiques de soutien au secteur viticole.

Il s’agit d’une demande ancienne formulée par de nombreux acteurs de la filière et soutenue par la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Un courrier signé par le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) et la région Nouvelle-Aquitaine en faisait état dès 2021.

Les protagonistes du programme VitiREV, qui a été fondé par quatre interprofessions, attendent que nous adoptions cet amendement dans la mesure où il permettrait d’apporter aux viticulteurs un soutien plus ciblé et cohérent.

Ce programme vise notamment à développer, par l’expérimentation et la recherche, des dispositifs d’adaptation au changement climatique. Ces éléments et données sont absolument essentiels pour accompagner nos viticulteurs, qui font actuellement face à de grandes difficultés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.

M. Hervé Gillé. Je souhaiterais que le rapporteur et la ministre m’expliquent ce qui est gênant dans le fait de communiquer ces données. L’accès à ce fichier assurerait une mise en place plus fine et poussée des dispositifs d’accompagnement en direction des viticulteurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Votre amendement vise à permettre l’accès des collectivités territoriales et des établissements publics aux données du CVI.

Le Gouvernement, par principe et par construction, n’est pas opposé à un partage de certaines informations, mais il souhaite mener le sujet à bien en concertation avec les représentants des professionnels et les interprofessions concernées.

L’accès aux données du CVI que vous proposez est trop large et insuffisamment justifié, y compris lorsque vous faites référence aux syndicats viticoles. Cet élargissement dépasse en effet le cadre des organismes de défense et de gestion (ODG) et des interprofessions, qui peuvent déjà accéder à ces données dans l’exercice de leur mission. Voilà pourquoi le Gouvernement a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Le CVI contient des informations très précises – certaines ont même un caractère personnel – sur les parcelles viticoles ou les aides reçues individuellement par les exploitants. Ce fichier est détenu par les services des douanes, lesquels peuvent, par ce moyen, exercer leurs prérogatives de contrôle. Dès lors, donner un plus large accès à ces informations nous paraît quelque peu risqué.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 387 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 13 bis A demeure supprimé.

Article 13 bis A
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 13 bis B

Article 13 bis B

(Supprimé)

Article 13 bis B
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 13 bis

Après l’article 13 bis B

Mme la présidente. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par M. Fargeot, est ainsi libellé :

Après l’article 13 bis B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 199 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques est ainsi modifié :

1° Les mots : « marché d’intérêt national de Paris-Rungis » sont remplacés par les mots : « marché d’intérêt national de la région parisienne » ;

2° L’année « 2049 » est remplacée par l’année « 2068 ».

La parole est à M. Daniel Fargeot.

M. Daniel Fargeot. En matière de souveraineté alimentaire, les défis sont multiples : sécuriser nos approvisionnements, diversifier les pôles d’attractivité en valorisant la production agricole de proximité et renforcer la résilience de nos infrastructures agrologistiques en cas de crise.

Alors que le marché d’intérêt national de Rungis, maillon essentiel de notre chaîne agroalimentaire, approche de la saturation du fait de l’accroissement continu de la population francilienne, qui emportera une augmentation de 37 % des besoins de transport de denrées alimentaires fraîches d’ici à 2035, la mise en place d’un second pôle francilien est une nécessité absolue.

C’est dans ce contexte que le projet Agoralim, élaboré de manière concertée avec l’État, les acteurs locaux et la Société d’économie mixte d’aménagement et de gestion du marché d’intérêt national de Rungis (Semmaris), a vu le jour. Reconnu d’intérêt général par l’État, ce second pôle stratégique s’implantera dans l’est du Val-d’Oise, conformément aux orientations fixées par le Gouvernement dans le cadre du plan d’actions pour le Val-d’Oise.

La réalisation de ce projet suppose l’investissement par la Semmaris de 800 millions d’euros, sans aucun coût pour l’État. Afin de garantir la viabilité économique de cet investissement, cet amendement vise à prolonger jusqu’à 2068 la concession de la Semmaris, dont l’échéance est aujourd’hui prévue en 2049. Cette prolongation est essentielle pour l’amortissement des investissements et des infrastructures.

Dans le cadre d’une convention existante qu’il suffira d’actualiser, la Semmaris continuera d’exercer sa mission de service public. Elle dispose à ce titre d’un droit d’exploitation économique des terrains acquis pour le compte de l’État, l’ensemble des biens acquis dans ce cadre sans contribution de l’État étant définis sous forme de biens de retour appartenant ab initio à celui-ci.

Agoralim est un projet clé pour notre résilience alimentaire. Le seul frein à son déploiement résidant aujourd’hui dans la durée d’amortissement des investissements, une adaptation de la durée de concession s’impose.

Par cet amendement, je vous propose donc d’effectuer une adaptation technique sans conséquence budgétaire pour l’État, mais d’intérêt stratégique majeur pour notre souveraineté alimentaire.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 962, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 34

Compléter cet amendement par trois alinéas ainsi rédigés :

…° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« À ce titre, la société, faisant l’objet d’un contrôle de l’État, aménage et gère les installations existantes et réalise les investissements nécessaires à la bonne marche de sa mission dans une logique d’aménagement du territoire, de souveraineté alimentaire, d’amélioration de la qualité environnementale et de sécurité alimentaire notamment dans un contexte de hausse de la population, conformément aux objectifs définis à l’article L. 761-1 du code de commerce.

« Au plus tard un an après la promulgation de la loi n° … du … d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture, l’État définit dans un cahier des charges approuvé par décret notamment la nature et le volume des investissements mentionnés au deuxième alinéa, les modalités du contrôle de l’État et les conditions dans lesquelles les biens affectés au service public retournent dans le patrimoine de l’État à l’échéance de cette mission. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. L’amendement n° 34 rectifié de M. le sénateur Fargeot vise à prolonger jusqu’en 2068 le droit exclusif dont bénéficie actuellement la société Semmaris, chargée d’administrer le marché de Rungis.

Au regard des enjeux de sécurité alimentaire, d’aménagement du territoire et d’amélioration de la qualité environnementale auxquels ce projet permet de répondre, le Gouvernement soutient le projet Agoralim porté par la Semmaris.

Ce projet implique l’extension géographique et temporelle du droit exclusif dont jouit la Semmaris. Afin de sécuriser l’action de ladite société et d’éviter la requalification de l’extension de sa concession en aide de l’État au sens du droit européen, il convient toutefois de préciser – tel est l’objet du présent sous-amendement – que l’État exercera un contrôle étroit sur l’entreprise et qu’une nouvelle convention conclue entre l’État et la Semmaris définira précisément les modalités de la prolongation de ces droits, de sorte que celle-ci soit strictement proportionnée à l’amortissement des nouveaux investissements.

Je serai donc favorable à l’amendement n° 34 rectifié du sénateur Daniel Fargeot, sous réserve de l’adoption du présent sous-amendement.

Je demanderai en conséquence à M. le sénateur Temal de bien vouloir retirer le sous-amendement n° 963, qui tend à prévoir expressément la conclusion, dans un délai d’un an après la promulgation de la présente loi, d’une convention entre l’État et la Semmaris, ainsi que les éléments devant y figurer.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 963, présenté par MM. Temal et Bazin et Mme Eustache-Brinio, est ainsi libellé :

Amendement n° 34 rectifié

Compléter cet amendement par trois alinéas ainsi rédigés :

….° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« À ce titre, la société aménage, gère les installations existantes et réalise les investissements nécessaires pour répondre à des objectifs d’aménagement du territoire, de souveraineté alimentaire, de qualité environnementale et de sécurité alimentaire, notamment dans un contexte de hausse de la population, conformément aux objectifs définis à l’article L. 761-1 du code de commerce.

« L’État et la société d’économie mixte d’aménagement et de gestion du marché d’intérêt national de la région parisienne concluent une convention qui détermine les investissements mentionnés au deuxième alinéa, les modalités du contrôle par l’État de ces investissements et les conditions dans lesquelles les biens nécessaires au service public retournent dans le patrimoine de l’État à l’échéance de cette mission. »

La parole est à M. Rachid Temal.

M. Rachid Temal. Par le présent amendement transpartisan, Arnaud Bazin, Jacqueline Eustache-Brinio et moi-même apportons notre soutien à M. Fargeot. Étant tous trois élus du Val-d’Oise, tout comme M. Fargeot, nous soutenons le projet de nouveau marché Agoralim.

Comme Saint Thomas, nous ne croyons toutefois que ce que nous voyons, madame la ministre. Il y a quelques années, l’État a en effet tiré le tapis sous des projets structurants pour notre territoire.

Nous souscrivons naturellement à la prolongation de la concession de la Semmaris jusqu’en 2068, qui permettra à cette société d’effectuer les investissements nécessaires, ainsi qu’à la conclusion, non pas d’un cahier des charges fixé unilatéralement par l’État, comme vous le proposez, madame la ministre, mais d’une nouvelle convention. Je rappelle, du reste, que l’État ne détient que 30 % du capital de la Semmaris.

La convention telle que nous la proposons, qui devra être conclue avant un an, suppose un accord des parties, seul à même de garantir que la Semmaris ira bien jusqu’au bout. Autrement dit, par cet amendement, nous entendons mettre ceinture, bretelles et casque lourd !

Mes chers collègues, je vous invite donc à adopter l’amendement n° 34 rectifié de M. Fargeot, ainsi que le présent sous-amendement transpartisan.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je suis favorable à l’amendement n° 34 rectifié de M. Fargeot, ainsi qu’au sous-amendement n° 962 du Gouvernement, car il me paraît important de sécuriser juridiquement la prolongation de la concession susvisée.

Je demande en conséquence le retrait du sous-amendement n° 963 ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Afin de sécuriser ce projet de longue durée et de grande ampleur financière, il importe que la prolongation de la concession jusqu’en 2068 soit encadrée par un cahier des charges.

Je vous invite donc à adopter le sous-amendement n° 962, mesdames, messieurs les sénateurs. Sous cette réserve, je serai favorable à l’amendement n° 34 rectifié.

Je suis en revanche défavorable au sous-amendement n° 963.

Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.

M. Rachid Temal. Nous ne parlons pas de la même chose, madame la ministre. Dans votre sous-amendement, que je viens de relire, il n’est pas question de convention.

Il n’est pas vrai que le dispositif que vous proposez serait plus sûr. Votre méthode consiste à imposer par décret un cahier des charges à la Semmaris au terme d’un délai qui nous fera perdre un an.

La convention que nous proposons inclura naturellement un cahier des charges. Toutefois, contrairement à vous, nous n’envisageons pas que celui-ci soit fixé dans un an seulement. Nous n’envisageons pas de perdre une année, au terme de laquelle nous découvrirons si ce que vous entendez imposer au travers de ce cahier des charges est acceptable ou non. Dans un an, mes chers collègues, il n’y aura peut-être plus de projet pour le Val-d’Oise !

Je ne souhaite pas de mirages, mais des réalités et des engagements concrets. Une convention suppose que tout le monde se mette autour de la table. Nous serons alors fixés sur la réalité des prix et la Semmaris et l’État pourront juger s’ils peuvent ou non s’engager dans le projet. Cela me paraît nettement préférable à une procédure qui nous fera perdre du temps et au terme de laquelle le projet pourrait disparaître, ce que je redoute pour le département.

En ce moment même, une réunion se tient à la préfecture du Val-d’Oise pour l’achat des terrains à Goussainville. Mais si nous soumettons le projet à la fixation d’un cahier des charges dans un délai d’un an, tout s’arrêtera net.

Notre proposition sécurise le projet et permet à chacun des acteurs d’avancer et au projet d’aboutir. Je vous invite donc à voter notre sous-amendement, mes chers collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour explication de vote.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je souscris pleinement aux arguments de mon collègue Rachid Temal. Le département du Val-d’Oise a été abandonné pendant des années. Aucun projet de l’État, rien. Il ne faut donc pas perdre de temps pour mettre en œuvre ce projet, fût-il complexe et coûteux. Ce département s’appauvrit de jour en jour, ce qui suscite peu d’espoir pour toute une partie de la population.

Non seulement il convient de maintenir le sous-amendement n° 963, mais il faut le voter, mes chers collègues.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour explication de vote.

M. Daniel Fargeot. Il est bien entendu que la concession étant prolongée jusqu’en 2068, il appartient au Gouvernement d’actualiser la convention. Cette disposition est le préalable au plan d’actions du Val-d’Oise, qu’il importe de mettre en œuvre.

Je vous invite donc à voter l’amendement n° 34 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 962 du Gouvernement, mes chers collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Le cahier des charges est impératif, car il sécurise le partenariat et concrétise les exigences de l’État vis-à-vis du projet.

Par ailleurs, si la rédaction proposée reprend la formule usuelle selon laquelle le cahier des charges sera défini « un an au plus tard à compter de la promulgation de la loi », cela ne signifie pas pour autant que nous attendrons un an avant de l’arrêter. Ne mélangeons pas tout.

Je suis consciente de l’importance de ce projet pour le département dont vous êtes élus, madame la sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio, monsieur le sénateur Rachid Temal. Il faut toutefois comprendre ce qui est proposé.

M. Rachid Temal. Nous comprenons très bien, d’où notre sous-amendement !

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 962.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, le sous-amendement n° 963 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 34 rectifié, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 bis B.

Après l’article 13 bis B
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 13 bis

Article 13 bis

Le chapitre III du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration est complété par un article L. 123-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 123-3. – Lors d’un contrôle opéré dans une exploitation agricole, la bonne foi de l’exploitant est présumée.

« Les procédures alternatives aux poursuites définies conformément à l’article L. 41-1 du code de procédure pénale sont priorisées.

« Lorsqu’il est constaté un manquement reposant sur une norme qui entre en contradiction avec une autre norme, l’exploitation agricole ne peut être sanctionnée. »

Mme la présidente. L’amendement n° 736 rectifié, présenté par MM. Lahellec et Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. L’article 13 bis me paraît redondant. Il instaure une présomption de bonne foi de l’exploitant dans le cadre d’un contrôle opéré sur son exploitation, ce qui ne me choque pas du tout. Toutefois, le droit à l’erreur existe déjà, bien qu’il soit écarté en ce qui concerne les sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l’Union européenne.

J’estime donc qu’il serait sage de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 736 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 388 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. L’article 13 bis crée une présomption de bonne foi de l’exploitant dans le cadre d’un contrôle opéré sur son exploitation.

Je m’interroge fortement sur la réelle portée de cet article, qui paraît davantage symbolique que juridique. Les rapporteurs indiquent pour leur part que la portée juridique de cet article paraît « incertaine ». Lors de la première lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, le ministre de l’agriculture de l’époque avait également fait part de ses réserves, voire de son opposition.

En tout état de cause, au-delà du principe général qui a présidé à la rédaction de cet article, le présent amendement vise seulement son dernier alinéa, qui dispose : « Lorsqu’il est constaté un manquement reposant sur une norme qui entre en contradiction avec une autre norme, l’exploitation agricole ne peut être sanctionnée. »

Cette précision, introduite en commission par le Sénat, ouvre un champ d’interprétation et de recours éventuels beaucoup trop vaste pour être adoptée en l’état. Le Gouvernement avait d’ailleurs déposé un amendement de suppression d’une disposition identique à l’Assemblée nationale, au motif que cette rédaction présentait un risque juridique trop important.

J’estime de plus que le présent projet de loi, à l’instar de l’article 13 que nous avons examiné il y a un instant, prévoit déjà un certain nombre de dispositifs permettant de préserver l’exploitant agricole d’interprétations abusives.

En conséquence, je vous propose de supprimer l’alinéa 4 du présent article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. Les rapporteurs et le Gouvernement s’accordent pour dire que la portée juridique de cet article est improbable. Dès lors, pourquoi l’inscrire dans la loi, monsieur le rapporteur ? Pourquoi le Gouvernement a-t-il changé d’avis depuis l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale, madame la ministre ? Les raisons de ce revirement sont-elles purement symboliques, comme l’indiquait ma collègue ? Ne sont-elles pas plutôt politiciennes ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 388 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 13 bis.

(Larticle 13 bis est adopté.)

Article 13 bis
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Article 13 ter

Après l’article 13 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 790 rectifié quater, présenté par Mmes N. Goulet et Jacquemet, MM. Canévet et Longeot et Mme Perrot, est ainsi libellé :

Après l’article 13 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l’article L. 311-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« 1° Il exerce des activités réputées agricoles au sens de l’article L. 311-1 du présent code ou des activités de prestations de service en agriculture au sens des articles L. 722-2 et L. 722-3 du même code ; ».

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Par cet amendement, notre collègue Nathalie Goulet souhaite renforcer la lutte contre la fraude.

Ne trouvant pas suffisamment de main-d’œuvre dans notre pays, les exploitants agricoles, notamment les producteurs de fruits et légumes, sont obligés d’employer temporairement de la main-d’œuvre étrangère pour assurer la collecte et le ramassage des produits agricoles.

En 2022, le Gouvernement a donc étendu aux entreprises de travaux agricoles (ETA) la possibilité de recourir à de la main-d’œuvre étrangère. Afin d’assurer que le recours à des saisonniers étrangers s’effectue dans les meilleures conditions et de lutter contre le travail dissimulé, la Mutualité sociale agricole est dotée de prérogatives de contrôle.

Cet amendement vise à étendre les prérogatives de la MSA au travail illégal, en lui permettant notamment de vérifier sur le terrain le respect du cadre légal fixé par le ministère de l’intérieur.

Il s’agit donc d’un amendement de bon sens, mes chers collègues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à élargir la définition du chef d’exploitation agricole aux personnes qui exercent des activités de prestations de service en agriculture en effectuant des travaux agricoles. Ce serait, selon moi, aller trop loin : s’il me paraît légitime de lutter contre le travail dissimulé, il n’est pas acceptable d’élargir la définition du chef d’exploitation pour résoudre une difficulté qui n’a pas trait à celle-ci.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Aux arguments du rapporteur, j’ajouterai que la MSA, qui effectue des contrôles sur pièce sur la base des déclarations qui sont enregistrées, n’a pas vocation à valider des déclarations : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

M. Guy Benarroche. J’ai rencontré hier des représentants de la MSA Provence-Azur, qui regroupe les départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes. Ces derniers m’ont indiqué que certains travailleurs étrangers ne sont pas enregistrés par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) et que des exploitants tirent plus de revenus de l’emploi de ces prétendus travailleurs étrangers que de leurs activités d’exploitation.

Les représentants de la MSA ont souligné qu’ils étaient totalement démunis face à cette situation et qu’ils souhaiteraient que l’Ofii, le ministère de l’intérieur et toute autre instance compétente leur transmette les informations qui leur seraient utiles pour agir.

Je ne suis pas certain que les dispositions proposées par Nathalie Goulet visent à répondre à ce cas particulier, mais il me paraît en tout cas que l’on ne peut pas nier les difficultés ni estimer que la MSA n’a pas pour rôle d’y remédier.

Mme la présidente. Monsieur Canévet, l’amendement n° 790 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Oui, je le maintiens, madame la présidente. Comme l’indiquait Guy Benarroche, il importe en effet de contrôler l’activité des sociétés intérimaires, ou prétendument telles, qui emploient des étrangers. Or, s’agissant du secteur agricole, j’estime que tel est bien le rôle de la MSA.

Il nous faut élargir les outils à la disposition de l’ensemble de nos institutions pour lutter contre la fraude, dont nous savons qu’elle s’amplifie, en particulier dans ce secteur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 790 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 13 bis
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Article 14

Article 13 ter

L’État se donne pour objectif, dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, en coordination avec les professionnels des filières concernées et l’établissement mentionné à l’article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime, de dématérialiser les documents d’accompagnement des bovins et de mettre en place une plateforme permettant l’accès à ces informations à l’ensemble des opérateurs ayant-droit intéressés, aux fins et dans les conditions définies à l’article L. 212-2 du même code, et dispensant les opérateurs de les conserver sous format papier.

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’étape détaillant notamment l’état d’avancement des travaux de dématérialisation des documents d’identification et d’accompagnement des bovins, ainsi que les modalités de gestion et de financement du système cible.

Mme la présidente. L’amendement n° 847 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi

par les mots :

dans un délai de trente mois à compter de la publication de la présente loi

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à desserrer quelque peu le calendrier de mise en œuvre de la dématérialisation du passeport bovin.

Il est donc proposé de porter à trente mois le délai que la commission des affaires économiques du Sénat a fixé à vingt-quatre mois. Compte tenu de l’état d’avancement et de la complexité de ce projet d’ampleur, qui est très attendu par les éleveurs, cela me paraît plus réaliste.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La dématérialisation de la base de données permettra de soulager les agriculteurs d’un travail répétitif. Il faut donc accélérer sa mise en œuvre et la rendre effective au plus vite, madame la ministre.

L’avis de la commission est toutefois favorable.

M. Rachid Temal. Il faudrait un cahier des charges !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 847 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 655 rectifié bis, présenté par MM. Stanzione et P. Joly, Mme Conway-Mouret et MM. Omar Oili, Pla, Bourgi et Michau, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Il est nécessaire de simplifier les rouages administratifs de l’Institut national de l’origine et de la qualité.

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Cet amendement vise à simplifier les rouages administratifs de l’Institut national de l’origine et de la qualité (Inao) selon trois orientations concrètes.

Les modalités de traitement des dossiers doivent tout d’abord être uniformisées au niveau national, de sorte que chaque région puisse traiter les dossiers avec un maximum de flexibilité, point par point ou globalement, selon la méthode la plus efficace. Une telle uniformisation permettra également de réduire les délais de traitement, qui sont actuellement compris entre trois ans et onze ans, ce qui est trop long dans un monde qui évolue aussi rapidement.

Les organismes de défense et de gestion (ODG) pourront ensuite effectuer eux-mêmes les modifications mineures nécessaires à l’avancement des dossiers, ce qui s’inscrit dans le cadre de leur mission et permettra de désengorger l’Inao.

Le processus décisionnaire de l’Institut, qui emporte actuellement de nombreuses redondances commissionnaires, sera enfin simplifié.

De telles dispositions permettront de réduire les délais pour les porter à un an environ, alors qu’il faut parfois une décennie pour instruire les dossiers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Conscient de la nécessité de simplifier ses procédures, l’Inao a engagé ce travail : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 655 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 672 rectifié quater, présenté par MM. Stanzione, Ros et P. Joly, Mme Conway-Mouret, MM. Omar Oili, Pla et Bourgi, Mme Monier et M. Michau, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

Face au changement climatique et de crises agricoles, il est nécessaire de simplifier la gestion administrative des exploitations.

Il convient d’établir un état exhaustif de tous les documents redondants quelle que soit l’administration d’origine et de fusionner ces documents en fiche unique transmise simultanément à chaque administration demanderesse.

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Cet amendement vise à simplifier la gestion administrative des exploitations pour tenir compte du changement climatique et des crises agricoles.

Il convient en effet d’établir un état exhaustif de tous les documents redondants, quelle que soit l’administration d’origine, et de fusionner ces documents en une fiche unique transmise simultanément à chaque administration demanderesse. La déclaration annuelle d’inventaire et la déclaration de stock sont, par exemple, aisément « fusionnables ».

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le présent article porte sur la dématérialisation des documents d’accompagnement des bovins, monsieur le sénateur. Vous conviendrez que s’il a trait, lui aussi, à la dématérialisation, le sujet que vous pointez est tout de même différent.

J’ai demandé à mes services que nous avancions, avec le ministère de la transition numérique, sur le « dites-le-nous une fois ». Il n’est pas acceptable que nous en soyons toujours au Moyen Âge de la saisie des informations administratives, et cela vaut pour tous les ministères.

Du reste je ne comprends pas, mais sans doute est-ce parce que je ne suis pas informaticienne, qu’il soit si difficile d’appliquer un principe aussi simple. Quoi qu’il en soit, il n’est pas normal que les usagers en soient encore à saisir plusieurs fois les mêmes informations dans différents formulaires. Il faut que cela change.

Tout en comprenant les raisons qui ont présidé au dépôt de cet amendement, j’estime que ce n’est pas par son adoption que nous rendrons effectif le « dites-le-nous une fois ». Monsieur le sénateur, je vous demande donc de bien vouloir accepter de le retirer ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Stanzione, l’amendement n° 672 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Lucien Stanzione. Voilà quelques jours, j’ai fait l’objet d’une chronique sur France Inter après avoir retiré un amendement. Je retire donc celui-ci aussi, en espérant que le Sénat sera cité demain matin sur la même radio ! (Sourires et applaudissements.)

Mme la présidente. L’amendement n° 672 rectifié quater est retiré.

Je mets aux voix l’article 13 ter, modifié.

(Larticle 13 ter est adopté.)

Article 13 ter
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Après l’article 14

Article 14

I. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre Ier du livre IV est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« La protection et la gestion durable des haies

« Art. L. 412-21. – I. – Sauf disposition spéciale, une haie est une unité linéaire de végétation d’une largeur maximale de vingt mètres qui comprend au moins deux éléments parmi les trois suivants :

« 1° Des arbustes ;

« 2° Des arbres ;

« 3° D’autres ligneux.

« Sont régies par la présente section les haies, à l’exclusion des allées d’arbres et des alignements d’arbres au sens de l’article L. 350-3, qu’ils bordent ou non des voies ouvertes ou non à la circulation publique, et à l’exclusion des haies implantées en bordure de bâtiments ou sur une place, qui constituent l’enceinte d’un jardin ou d’un parc attenants à une habitation ou qui se situent à l’intérieur de cette enceinte.

« II. – La valeur des haies est reconnue pour les services écosystémiques qu’elles rendent.

« Elles font l’objet d’une gestion durable, maintenant leur multifonctionnalité agronomique, écologique et paysagère dans l’espace et dans le temps.

« Cette gestion durable inclut les travaux d’entretien usuels et permet la valorisation économique des produits de la haie, notamment la biomasse. En tout état de cause, ces travaux ne sont pas assimilables à la destruction de haie au sens de l’article L. 412-24.

« Les gestionnaires de voirie, d’infrastructures ferroviaires, d’infrastructures de communications électroniques et de réseaux de distribution publique d’électricité mettent en œuvre un plan d’action pour atteindre l’objectif de gestion durable des haies.

« III. – Toute destruction de haie ayant bénéficié de financements publics pour sa plantation doit respecter les prescriptions de l’article L. 114-3 du code rural et de la pêche maritime s’agissant du bon usage des deniers publics.

« Art. L. 412-22. – I. – Tout projet de destruction d’une haie mentionnée à l’article L. 412-21 est soumis à déclaration unique préalable.

« Dans le cas où la destruction de la haie est soumise à déclaration en application d’une ou de plusieurs des législations mentionnées à l’article L. 412-24, la déclaration unique en tient lieu. Le projet est apprécié au regard des critères et des règles prévus par ces législations.

« Dans un délai de deux mois, l’autorité administrative peut s’opposer à la destruction projetée. Les travaux ne peuvent commencer avant l’expiration de ce délai. Le silence ou l’absence d’opposition de l’administration vaut absence d’opposition au titre des législations applicables au projet.

« II. – Le fait de détruire une haie, lorsque cette destruction requiert l’absence d’opposition à la déclaration unique prévue au I du présent article, sans avoir obtenu cette absence d’opposition ou en violation d’une mesure de retrait de cette absence d’opposition est puni de l’amende prévue pour les contraventions de deuxième classe.

« Art. L. 412-23. – I. – Dans le délai de deux mois mentionné au dernier alinéa du I de l’article L. 412-22, l’autorité administrative compétente peut indiquer à l’auteur de la déclaration que la mise en œuvre de son projet est subordonnée à l’obtention d’une autorisation unique, lorsqu’une des législations énumérées à l’article L. 412-24 soumet la destruction de la haie concernée à une autorisation préalable.

« Elle l’informe que sa déclaration est regardée comme une demande d’autorisation unique, lui demande, le cas échéant, la transmission des éléments complémentaires nécessaires à l’instruction de cette demande et lui indique le délai dans lequel la décision est prise. Les travaux ne peuvent commencer avant la délivrance de cette autorisation unique.

« L’autorisation unique tient lieu des déclarations, des absences d’opposition, des dérogations et des autorisations énumérées à l’article L. 412-24, lorsque le projet de destruction de haie les nécessite.

« La demande d’autorisation est appréciée au regard des critères et des règles propres aux législations énumérées à l’article L. 412-24 qui lui sont applicables. La décision d’autorisation est soumise à participation du public selon les modalités prévues à l’article L. 123-19 lorsqu’elle a une incidence directe et significative sur l’environnement.

« Les règles de procédure et de consultation applicables à l’autorisation unique se substituent aux règles de procédure et de consultation prévues par le présent code et les autres législations pour la délivrance des décisions énumérées à l’article L. 412-24.

« II. – Le fait de détruire une haie, lorsque cette destruction requiert l’autorisation unique prévue au I, sans avoir obtenu cette autorisation unique ou en violation d’une mesure de retrait de cette autorisation unique est puni de l’amende prévue pour les contraventions de quatrième classe.

« Art. L. 412-24. – Les déclarations, les absences d’opposition, les dérogations et les autorisations au titre des législations applicables au projet de destruction de haie mentionnées aux deux derniers alinéas du II de l’article L. 412-22 et au troisième alinéa du I de l’article L. 412-23 sont les suivantes :

« 1° La dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d’intérêt géologique, d’habitats naturels, d’espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application des 4° et 7° du I de l’article L. 411-2 ;

« 2° L’absence d’opposition au titre du régime d’évaluation des incidences Natura 2000 en application du VI de l’article L. 414-4 ;

« 3° L’autorisation ou l’absence d’opposition à une déclaration de travaux de consolidation ou de protection des berges comportant une destruction de la ripisylve, en application de l’article L. 214-3 ;

« 4° L’autorisation spéciale de modifier l’état ou l’aspect de territoires classés en réserve naturelle ou en instance de classement, en application des articles L. 332-6 ou L. 332-9, lorsqu’elle est délivrée par l’État ou lorsque l’accord de l’autorité compétente a été recueilli ;

« 5° L’autorisation spéciale de modifier l’état des lieux ou l’aspect d’un site classé ou en instance de classement en application des articles L. 341-7 et L. 341-10 ;

« 6° L’autorisation ou l’absence d’opposition à une déclaration de travaux dans le périmètre de protection d’une source d’eau minérale naturelle déclarée d’intérêt public, en application de l’article L. 1322-4 du code de la santé publique ;

« 7° L’autorisation délivrée en application de l’article L. 1321-2 du même code pour la protection des haies dans le cadre des périmètres de captage d’eau potable ;

« 8° L’autorisation de destruction d’une haie bénéficiant de la protection prévue à l’article L. 126-3 du code rural et de la pêche maritime ;

« 9° L’absence d’opposition à une déclaration préalable prévue, en application de l’article L. 421-4 du code de l’urbanisme, pour les travaux portant sur des éléments classés en application de l’article L. 113-1 du même code ou identifiés comme présentant un intérêt en application des articles L. 111-22, L. 151-19 et L. 151-23 dudit code lorsque la décision sur cette déclaration préalable est prise au nom de l’État ou lorsque l’accord de l’autorité compétente a été recueilli ;

« 10° L’absence d’opposition à une déclaration préalable ou l’autorisation prévue dans le cadre d’un régime d’aide publique en cas de destruction de haie, notamment au titre de la mise en œuvre des bonnes conditions agricoles et environnementales, à laquelle est subordonné le paiement des aides de la politique agricole commune ;

« 11° L’autorisation spéciale des travaux aux abords des monuments historiques en application de l’article L. 621-32 du code du patrimoine ;

« 12° L’autorisation spéciale des travaux dans le périmètre des sites patrimoniaux remarquables en application de l’article L. 632-1 du même code ;

« 13° La déclaration préalable des travaux sur les sites inscrits, en application du dernier alinéa de l’article L. 341-1 du présent code.

« Le présent article ne s’applique pas dans les cas, prévus à l’article L. 425-1 du code de l’urbanisme, où un permis de construire, de démolir ou d’aménager ou une décision prise sur une déclaration préalable, autre que celles mentionnées au 9° du présent article, tient lieu de l’une des décisions énumérées au présent article.

« Art. L. 412-25. – Toute destruction de haie est subordonnée à des mesures de compensation par replantation d’un linéaire au moins égal à celui détruit, réalisées dans les conditions prévues à l’article L. 163-1.

« L’autorité administrative compétente peut fixer toute autre prescription nécessaire au respect des intérêts protégés par les législations énumérées à l’article L. 412-24.

« Elle peut prévoir que le demandeur doit solliciter un conseil avant les opérations de destruction et de replantation.

« S’il apparaît que le respect des intérêts mentionnés au deuxième alinéa du présent article n’est pas assuré par l’exécution des prescriptions préalablement édictées, l’autorité administrative compétente peut imposer toute prescription complémentaire à cet effet.

« Art. L. 412-26. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de la présente section. Il précise notamment :

« 1° Les modalités et les conditions de la déclaration unique prévue à l’article L. 412-22 et de l’autorisation unique prévue à l’article L. 412-23 ;

« 2° Les conditions dans lesquelles la destruction d’une haie fait l’objet des mesures de compensation mentionnées au premier alinéa de l’article L. 412-25. Il prévoit une application territorialisée des mesures de compensation ;

« 3° Les conditions dans lesquelles il peut être procédé à la destruction d’une haie en cas d’urgence, notamment pour assurer la sécurité et l’intégrité des personnes et des biens.

« Art. L. 412-27 (nouveau). – Dans chaque département, en s’appuyant sur les données publiques disponibles, en particulier de l’Observatoire de la haie, et après avis des organisations représentatives agricoles et des associations représentatives d’élus locaux, l’autorité administrative compétente prend un arrêté qui établit pour le département :

« 1° Une période d’interdiction de travaux sur les haies, en tenant compte des périodes sensibles pour les espèces à enjeux locaux au regard des périodes de nidification ainsi que des spécificités et conditions climatiques et pédologiques du département ou des zones concernées ;

« 2° Un coefficient de compensation en cas de destruction de haie en application du 2° de l’article L. 412-26. Ce coefficient tient compte, notamment, de la densité de haie dans le département, de la dynamique historique de destruction ou de progression du linéaire de haie et de la valeur écologique des haies détruites en fonction d’une typologie de haies définie par un arrêté des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture ;

« 3° Une liste des us et coutumes réputés répondre, de manière constante sur le territoire du département, aux obligations de gestion durable définies à l’article L. 412-21.

« Art. L. 412-28 (nouveau). – I. – À titre informatif, l’autorité administrative compétente dans le département met à la disposition du public, en ligne, une cartographie régulièrement mise à jour des protections législatives ou réglementaires applicables aux haies, à une échelle géographique fine.

« II. – Lors de la mutation d’une parcelle à usage agricole ou du changement des parties d’un bail rural, l’acquéreur ou le preneur à bail est informé de la présence de protections applicables aux haies implantées sur la ou les parcelles concernées.

« III. – Un décret en Conseil d’État établit des prescriptions encadrant le degré de précision de la cartographie mentionnée au I et, le cas échéant, les écarts d’interprétation entre plusieurs départements limitrophes. » ;

1° bis (Supprimé)

2° Le I de l’article L. 181-2 est complété par un 19° ainsi rédigé :

« 19° Absence d’opposition à la déclaration ou à l’autorisation unique de destruction de haies prévues aux articles L. 412-22 et L. 412-23 du présent code. » ;

3° Le II de l’article L. 181-3 est complété par un 14° ainsi rédigé :

« 14° Le respect des conditions de non-opposition à la déclaration unique ou de délivrance de l’autorisation unique préalables à la destruction de haies prévues aux articles L. 412-22 et L. 412-23 du présent code, lorsque l’autorisation environnementale tient lieu de cette déclaration ou de cette autorisation. » ;

4° (Supprimé)

II. – (Supprimé)

III (nouveau). – La cartographie des protections législatives et réglementaires applicables à la haie dans chaque département mentionné à l’article L. 412-28 du présent article est réalisée dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, sur l’article.

M. Vincent Louault. Cet article est emblématique du présent projet de loi.

Actuellement, la haie est gérée par les agriculteurs en bons pères de famille. Si l’administration est parfois pointilleuse, ils parviennent à s’accommoder de ses exigences, y compris de celles de l’Office français de la biodiversité, avec lequel tout se passe bien. Si les agriculteurs doivent arracher une partie de haie, ils s’entendent avec l’administration pour replanter plus loin.

En encadrant la haie dans le droit, nous prenons le risque de mettre à mal cette entente à bas bruit. Dans le pire des cas, nous aurons contribué à complexifier les choses. Il faut que ce soit dit, mes chers collègues.

Je regrette vivement d’avoir perdu l’arbitrage à l’issue duquel la commission a supprimé la référence à l’implantation des haies. À la campagne, les haies sont en effet toujours implantées pour une raison, par exemple pour tenir lieu de clôture pour les vaches. Or, par la magie de cette suppression, tous les bords de rivière vont devenir des haies.

Il suffira d’un frêne tous les deux mètres et d’un marsaule tous les mètres pour y voir une haie. Monsieur Duplomb, je vous demanderai de me répondre sur ce point, car nous risquons – et mon petit cœur va saigner ! – de nous retrouver à devoir entretenir des milliers de kilomètres de haie en bord de rivière pour prévenir le risque d’inondation, sans avoir rien vu venir.

J’y insiste, car je ne veux pas sortir de cet hémicycle en sachant que nous aurons créé ces milliers de kilomètres de haies, que nous ne serons pas capables d’entretenir alors que nous le devrons… Soyons clairs, nous sommes en train de créer l’ABF des haies !

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 262 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Levi, Mmes Gacquerre et Jacquemet et MM. de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 533 rectifié sexies est présenté par MM. Favreau, Sautarel et Brisson, Mme Dumont, M. Bouchet, Mme Belrhiti, M. Klinger, Mme Josende, MM. Chevrollier, de Legge, Burgoa et Panunzi, Mme P. Martin, M. Khalifé, Mmes Garnier et Joseph, MM. Belin et H. Leroy et Mmes Goy-Chavent et Canayer.

L’amendement n° 787 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet, Rietmann et Sol, Mmes Berthet, Malet, Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon, Genet, Somon et Bacci, Mmes Gruny et Drexler, M. Sido, Mmes Bonfanti-Dossat et Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent, Milon et P. Vidal.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le premier alinéa de l’article L. 411-2-1 est complété par les mots : «, ainsi que les projets de destruction et les travaux d’entretien d’une haie mentionnée à l’article L. 412-21 du présent code » ;

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 262 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Cet amendement vise à introduire une présomption de raison impérative d’intérêt public majeur pour les travaux d’entretien de haies, afin de faciliter l’accès à la dérogation d’interdiction de destruction d’espèces protégées.

En effet, les travaux réalisés sur les haies peuvent, dans certains cas, imposer l’obtention d’une dérogation au régime de protection des espèces. Une telle dérogation est soumise à des conditions strictes, puisqu’il convient notamment de démontrer que le projet répond à une raison impérative d’intérêt public majeur. Ce dernier point, qui se révèle délicat à démontrer pour des travaux d’une faible ampleur, est source de fragilité juridique.

Afin de garantir la possibilité de réaliser des travaux d’entretien des haies selon un mode de gestion durable, et compte tenu de la nouvelle obligation générale de compensation instaurée par le projet de loi, qui contribuera à atteindre l’objectif d’augmentation du linéaire de haies d’ici à 2030, il convient de sécuriser l’obtention, le cas échéant, d’une dérogation au régime de protection des espèces.

Par cet amendement, nous proposons donc d’étendre aux projets de destruction et aux travaux d’entretien des haies le mécanisme déjà instauré au bénéfice des projets de production d’énergie renouvelable, c’est-à-dire la création d’une présomption légale qu’un tel projet répond à une raison impérative d’intérêt public majeur. On voit en effet venir l’usine à gaz…

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Favreau, pour présenter l’amendement n° 533 rectifié sexies.

M. Gilbert Favreau. Le pacte en faveur de la haie, présenté par le Gouvernement en septembre 2023, a pour ambition d’atteindre un gain net du linéaire de haies de 50 000 kilomètres d’ici à 2030.

Dans cette perspective, l’article 14 du projet de loi permet aux bénéficiaires d’une décision de non-opposition à déclaration unique ou d’une autorisation unique tenant lieu de législation applicable de sécuriser juridiquement la réalisation des projets d’entretien ou la destruction des haies.

Toutefois, le mécanisme proposé n’apporte pas de véritable simplification. Il doit encore être amélioré pour lever les freins à la conservation des haies existantes et à la restauration des linéaires disparus.

Afin de garantir la possibilité de réaliser des travaux d’entretien selon un mode de gestion durable et compte tenu de la nouvelle obligation générale de compensation instaurée par le projet de loi, qui contribuera à atteindre l’objectif d’augmentation du linéaire de haies d’ici à 2030, il convient de sécuriser l’obtention, le cas échéant, d’une dérogation au régime de protection des espèces.

C’est la raison pour laquelle nous proposons, au travers de cet amendement, d’étendre aux projets de destruction ou aux travaux d’entretien des haies le mécanisme déjà instauré au bénéfice des projets de production d’énergie renouvelable, c’est-à-dire la création d’une présomption légale qu’un tel projet répond à une raison impérative d’intérêt public majeur.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 787 rectifié bis.

M. Daniel Gremillet. Il a été très bien défendu par mes collègues, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il semblerait que les mesures proposées dans ces trois amendements ne soient pas conformes au droit européen. La commission sollicite donc l’avis du Gouvernement.

Monsieur Louault, laissez-moi tenter de répondre à vos questions, même si je ne le fais pas de manière exhaustive. Qu’avons-nous voulu faire au travers de l’article 14 ? Tout d’abord, nous avons souhaité donner une définition de la haie – mais les définitions, par essence, ne sont jamais parfaites – en veillant à ce qu’elle corresponde à ce que tous les agriculteurs connaissent. Nous avons donc repris celle de la politique agricole commune, pour qu’elle soit la plus simple et la plus lisible possible et pour que les agriculteurs y reconnaissent ce qu’ils pratiquent déjà.

Ensuite, nous avons voulu défendre un principe de territorialisation. Il n’y a rien de plus différent qu’une haie d’un endroit à l’autre. Les haies ne sont pas du tout les mêmes dans le bocage normand et en Saône-et-Loire, non plus que dans mon territoire de la Haute-Loire, où jamais personne n’a considéré qu’un alignement de buissons pouvait être une haie, dès lors qu’il n’a pas été exploité comme tel pour délimiter une parcelle.

Ce principe de territorialisation nous a permis de traiter plusieurs sujets, au premier rang desquels l’entretien usuel des haies, car il faut que nous puissions les entretenir sans risquer de condamnation.

Nous avons également traité la problématique de la compensation : d’un territoire à l’autre, la réalité a pu varier depuis 1950 ou depuis 1900, et les kilomètres de haies se sont parfois multipliés.

Nous avons aussi essayé d’être le plus précis possible en ce qui concerne les dates d’intervention, qui ne sont pas les mêmes selon que l’on se trouve à 100 mètres d’altitude ou à 1 200 mètres d’altitude, la végétation poussant plus vite dans un cas que dans l’autre.

Enfin, nous avons souhaité montrer qu’il était nécessaire d’établir une cartographie pour que les agriculteurs ne soient pas soumis à un système dont ils n’auraient aucun moyen de connaître la logique avant d’intervenir. Il faut donc définir, dans le cadre des réunions départementales qui se tiennent sous l’égide du préfet, une organisation dont chaque élément sera clairement défini.

Monsieur Louault, cet article est sans doute loin d’être parfait. J’y ai longuement réfléchi, mais je ne prétends pas avoir résolu le problème, car nous sommes dans un cadre assez particulier. Cet article 14 avait initialement pour objet de simplifier la multitude de règlements et de normes qui s’appliquent à la haie ; or je ne suis pas certain que nous y soyons parvenus.

Mais que fallait-il faire ? Devions-nous conserver les quatorze règlements et supprimer l’article 14, ou bien le conserver en le rapprochant le plus possible de la réalité des territoires ? J’ai choisi de privilégier ce lien direct avec les territoires, l’avenir nous dira si je me suis trompé ou non.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Madame la présidente, permettez-moi, comme je l’ai fait précédemment sur la dépénalisation, de prendre le temps d’un préambule sur cet article important, qui a donné lieu au dépôt de nombreux amendements.

Le présent article vise à instaurer et un régime juridique et un guichet uniques de la haie. La situation actuelle est compliquée pour les agriculteurs et constitue une source d’insécurité. Je veux donc illustrer par des exemples les effets du dispositif proposé, en comparant l’avant et l’après.

Cette loi d’orientation agricole intervient alors que les réglementations sur la haie sont nombreuses. Les agriculteurs doivent vérifier eux-mêmes lesquelles s’appliquent à leur cas. Ils doivent également faire les déclarations ou les demandes d’autorisation nécessaires pour chacune des réglementations auxquelles ils sont soumis.

En outre, il y a de fait une inégalité dans l’application de la loi, qui ne cible aujourd’hui que les agriculteurs, alors que les haies ne se trouvent pas uniquement sur des terres agricoles, mais partout sur le territoire.

Enfin, les agriculteurs peuvent être verbalisés dans le cadre d’une réglementation même contradictoire, comme nous l’avons vu lors de nos débats sur la dépénalisation.

Avec le régime unique de la haie, les agriculteurs, ainsi que tous les propriétaires gestionnaires de haies, sauf les particuliers, s’adresseront dorénavant à un guichet unique, celui de la direction départementale des territoires. L’administration vérifiera elle-même, au regard de l’ensemble des réglementations, celles qui s’appliquent ou non au cas d’espèce.

De plus, elle délivrera un document unique, soit un récépissé s’il s’agit d’une déclaration, ou bien une autorisation. Il y aura donc une présomption de bonne foi, conformément à l’article 13. Le récépissé, ou l’autorisation, sera opposable en cas de contrôle et permettra de prouver la bonne foi. Aucune poursuite pénale ne sera donc possible.

En outre, tous les propriétaires gestionnaires de haies, sauf les particuliers, seront soumis au régime unique de la haie fondé sur sa protection, sur son caractère dynamique – on pourra déplacer la haie s’il y a compensation – et sur sa multifonctionnalité, qu’il s’agisse de la biodiversité, de l’eau, du carbone ou de la biomasse.

J’ajoute que le régime de base consistera en une simple déclaration à un guichet unique, qui pourra toutefois basculer vers une demande d’autorisation, dans le cas où la destruction de haies à haute valeur écologique est envisagée.

Les dates des travaux seront départementalisées pour prendre en compte les conditions pédoclimatiques dans chaque territoire, ce qui permettra de réduire la période de non-intervention.

Enfin, des travaux d’urgence seront possibles, sous réserve d’une régularisation a posteriori, dès lors qu’ils seront justifiés par un impératif de sécurité des biens et des personnes ou de continuité des réseaux. Vous avez été nombreux à déposer des amendements sur les réseaux ferroviaires, routiers et d’électricité. La sécurité est un argument qui s’impose.

Pour conclure, ce travail sur les haies, dont je rappelle qu’il a été réalisé par mon prédécesseur, s’est attaché à résoudre les difficultés rencontrées par les agriculteurs tout en mettant l’accent sur la nécessité de reconnaître l’intérêt écologique de la haie. Il en propose une définition simple et large, qui inclut les haies constituées d’arbres et d’arbustes, mais exclut les alignements d’arbres. Il s’agit avant tout d’une sécurisation, mais aussi d’une simplification par la création d’un dispositif unique. Nous ne souhaitons pas supprimer les dix réglementations, mais fusionner leur application en un dispositif unique, qui les rendra invisibles pour l’administré.

J’y insiste, la simplification des démarches se fera grâce à l’instruction d’un seul dossier dans un guichet unique, ce qui permettra de concentrer les procédures administratives en une seule. Quant à la sécurisation, elle sera garantie par le récépissé, ou l’autorisation, opposable à l’administration. Le dispositif fonctionnera aussi sur l’incitation, grâce à la reconnaissance du caractère dynamique de la haie dans le temps et dans l’espace, ainsi que de ses différentes fonctions, la biodiversité ne l’emportant pas sur la biomasse.

Au sujet de la compensation, il faut bien préciser que son obligation dans une proportion au moins égale à celle du linéaire détruit sera adaptée en fonction des territoires. M. le rapporteur vous l’a dit : l’obligation de compensation ne s’appliquera pas de la même manière dans les territoires où il y a beaucoup de haies et dans ceux où il y en a très peu.

Cette déclaration liminaire et générale me conduit donc à émettre un avis défavorable sur ces trois amendements identiques, notamment parce que le dispositif proposé est inconventionnel.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Même avis, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Monsieur Duplomb, je suis d’accord avec tout le déroulé de votre raisonnement. D’ailleurs, depuis le début de l’examen de ce texte, de l’article 1er jusqu’à celui-ci, je me suis toujours rangé à votre avis – j’ai certes légèrement chicané sur l’article 1er, mais sans jamais vous embêter réellement. Nous faisons, en somme, tout ce que vous nous demandez. (Exclamations amusées sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.) Les groupes Union Centriste et Les Indépendants – République et Territoires vous suivent, même contre l’avis du Gouvernement.

Laissez-moi vous lire la définition de la haie, telle qu’elle figure dans la PAC. Tous les agriculteurs la connaissent, mais il semble que vous n’ayez pas été capable de relire correctement ces trois lignes, de sorte que j’ai de sérieux doutes sur la qualité de votre travail… (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.) Une haie est « une unité linéaire de végétation ligneuse implantée ». « Implantée », monsieur le rapporteur ! « Implantée », « implantée », « implantée » ! Je le répète, car c’est là le mot important ! Si nous le supprimons, nous risquons de créer des kilomètres et des kilomètres de haies en bord de rivière que nous ne serons pas capables d’entretenir !

Mes chers collègues, je vous prie d’excuser mon discours passionné, mais le sujet est d’importance !

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.

Mme Frédérique Puissat. Je voulais rappeler à mon collègue, qui l’a sans doute déjà très bien compris, que lorsque nous votons des textes ou des amendements, nous ne le faisons pas pour être d’accord avec le rapporteur ni pour lui faire plaisir, mais par conviction. Et nous le faisons dans le cadre d’une stratégie législative réfléchie, qui tient compte des discussions qui ont lieu au Sénat et de la commission mixte paritaire qui suivra. (M. Laurent Duplomb, rapporteur, le confirme.)

Monsieur Louault, vous vous êtes emporté un peu fort sur un sujet qui nous passionne tous. Il faut savoir raison garder dans ce débat qui est long et qui se poursuivra tard dans la nuit.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je n’avais pas l’intention de prendre la parole, mais le sujet est bien plus complexe qu’il n’y paraît, comme notre rapporteur l’a laissé entendre. Je suis d’ailleurs surpris de son avis défavorable sur nos amendements.

Si vous compariez la photographie d’une région, d’un département ou d’un canton aujourd’hui avec celle d’il y a cinquante ans et d’il y a un siècle, vous seriez surpris : tous ceux qui affirment que les haies ont été largement détruites seraient étonnés de constater que, dans certains secteurs, de nombreuses haies sont apparues.

M. Christian Redon-Sarrazy. Ce n’est pas partout pareil…

M. Daniel Gremillet. Je n’ai pas dit qu’il s’agissait d’un phénomène uniforme. Je dis simplement que nous sommes en train d’établir une règle générale qui pénalisera certains territoires, alors qu’il y a bien plus de haies qu’on ne le pense.

De plus, comme notre collègue vient de le souligner et comme je l’avais moi-même dit lors de nos travaux en commission, on finit par appeler « haie » ce qui ne l’était pas auparavant. Vous l’avez vous-même reconnu, madame la ministre.

Ce qui n’était au début que des champs abandonnés a fini par devenir forêt. De la même manière, sur les bordures de certains chemins où il n’y a plus de circulation, la végétation s’est soudainement développée et on appelle cela une haie. Pourtant, il ne s’agit pas d’une haie qui a été implantée : c’est une simple friche, qui s’est développée au fil des années.

Tout l’intérêt de mon amendement était d’établir cette distinction. Je le retire pour répondre à la demande de notre rapporteur, mais j’ai le sentiment de ne pas faire correctement mon travail de sénateur dans la défense de la diversité de nos territoires. Le problème est réel et nous choisissons de ne pas le prendre en compte. La situation est différente selon les territoires. Regardez les photographies et vous serez surpris : c’est aussi ça, la vraie vie !

Mme la présidente. L’amendement n° 787 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Pourquoi ce débat est-il si passionnel ? Parce que, dans certains territoires, les condamnations apparaissent comme une totale injustice. Dans les journaux et les médias, on a expliqué que les agriculteurs arrachaient les haies à tour de bras. Or c’est là tout le problème : certains parlent de l’agriculture sans véritablement la connaître !

Je vous invite tous à vous rendre sur le site www.geoportail.gouv.fr, qui est accessible à tous. Vous pourrez entrer un code postal, par exemple celui de votre commune, et vous obtiendrez la photo de l’endroit concerné en 2022 ou en 2023. Je vous invite alors à enlever le masque cadastral pour garder uniquement la photo, puis à utiliser la barre d’outils qui permet de changer le fond de carte. Vous y trouverez la photo aérienne du même endroit, prise entre 1950 et 1960. Amusez-vous à faire cet exercice : à chaque fois que vous cliquerez sur la barre d’outils, vous passerez d’une photo à l’autre, de celle de 2022 à celle de 1950.

Je suis quasiment certain que, dans une très grande majorité de cas, vous constaterez qu’il y a plus de haies aujourd’hui qu’à l’époque. C’est qu’en 1950, il y avait des troupeaux et des pâturages partout. Les chèvres et les moutons mangeaient dans les chemins et dans les fossés. Mais tout cela a disparu, parce que le nombre d’agriculteurs a fortement baissé.

Dès lors qu’ils sont moins nombreux, les agriculteurs ont moins le temps de s’occuper du bord de la parcelle. Ils ont donc laissé pousser ce qui voulait bien pousser, la nature reprenant ses droits, c’est-à-dire des buissons et des arbres. Ils n’ont pas pu entretenir le territoire comme leurs prédécesseurs le faisaient longtemps avant eux. Les plus anciennes photos, qui datent d’avant 1900, montrent qu’il n’y avait pas un arbre et pas un buisson, quasiment rien : on s’en servait pour se chauffer et on faisait pâturer les troupeaux.

Ce sujet est passionnel, parce que nous n’acceptons pas le constat objectif qui consiste à dire que, dans les territoires où il y a beaucoup de haies, quand l’entretien est bien fait, il ne faut pas verbaliser. Dans certains cas, la verbalisation est allée trop loin, en frappant des agriculteurs qui entretenaient leur parcelle en veillant à repousser les buissons sur le bord. Car pour un agriculteur, entretenir correctement sa parcelle, c’est tenir les buissons en respect pour éviter qu’ils gagnent le milieu. Il doit les repousser régulièrement, à quelques années d’intervalle, pour les ramener au bord de la parcelle. S’il ne le fait pas, il n’y aura plus de parcelle, mais seulement des buissons. Voilà quelle est la réalité !

Et quand on verbalise un agriculteur qui fait ce travail d’entretien et qui s’y pique les doigts, parce que couper les aubépines, ce n’est pas facile ni très intéressant – certains croient que les agriculteurs passent l’épareuse, mais ce n’est pas vrai et chez moi on continue de couper les buissons à la main –, il y a un vrai sentiment d’injustice.

Ce qui est certain, c’est que la rédaction de l’article 14, comme vous le soulignez, monsieur Louault, ne permettra pas de régler ce problème passionnel. En réalité, nous n’aurions jamais dû en parler.

M. Vincent Louault. Et voilà !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. La haie a fait couler beaucoup d’encre. Au centre de nombreux débats, elle cristallise les attentes et a parfois été instrumentalisée. Au Sénat, nous devons donc prendre de la hauteur sur cette question.

Pour cela, nous pouvons nous appuyer sur le rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, qui pose un constat à l’échelle nationale, la seule qui soit pertinente. Celui qui regarde devant chez lui ne verra pas le même paysage que celui qui regarde dix kilomètres, cent kilomètres ou mille kilomètres plus loin. Or les chiffres qui figurent dans le rapport du CGAAER montrent une très large érosion de la haie dans notre pays.

Certes, il y a eu des évolutions. Il est sans doute vrai que des haies ont disparu dans les années 1950 et même auparavant, du fait d’une mauvaise gestion. La haie a besoin d’être entretenue, elle est un patrimoine et une infrastructure écologique de première importance.

Voilà sur quoi portent l’article 14 et les articles additionnels après l’article 14, qui visent à reprendre les dispositions de ma proposition de loi en faveur de la préservation et de la reconquête de la haie, que nous avions votée à l’unanimité.

Il nous faut considérer le sujet avec raison. La haie ne doit être ni vilipendée ni adorée. Elle fait partie de l’agriculture et du monde rural. Nous en avons besoin, nous devons trouver une manière de la gérer qui soit la plus durable possible. Tel est l’objet de ce débat, dont j’espère qu’il se tiendra sans trop de passion, mais avec de la raison.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Cadec, pour explication de vote.

M. Alain Cadec. Je veux saluer le travail qui a été réalisé par le Sénat sur la haie, non seulement en commission, mais également plus en amont. Je félicite tous ceux qui ont travaillé sur ce dossier et je rappelle que nous avions voté le rapport de notre collègue Daniel Salmon à l’unanimité : il faut en tenir compte.

Je considère que la renaturation des haies dans nos campagnes est un acte particulièrement responsable et nécessaire pour corriger leur destruction pendant de trop nombreuses années. Je prendrai l’exemple de la Bretagne, même s’il est vrai, comme le soulignent certains de nos collègues, que la situation n’est pas comparable dans tous les départements.

En Bretagne, le conseil régional a mis en place, voilà quelques années, le dispositif Breizh bocage, qui a donné d’excellents résultats avec la participation active des agriculteurs. Que l’on ne vienne donc pas nous dire que ce type de mesure est contre les agriculteurs et contre l’agriculture.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.

M. Hervé Gillé. Monsieur le rapporteur, il est un sujet de fond que nous devrions nous efforcer d’approfondir : celui de la différenciation. Cette question est fondamentale dans un grand nombre de politiques publiques.

Ainsi, pour prendre l’exemple de l’eau, il est logique qu’une différenciation territoriale intervienne selon la nature des projets à mettre en place. Aucun dogme national ne devrait s’imposer, tout simplement parce que les territoires sont différents, de sorte que certains projets sont réalistes quand d’autres ne le sont pas selon l’endroit où l’on se trouve.

La différenciation est importante, mais l’on a beaucoup de mal à avancer politiquement dans cette direction, à donner du sens et à parvenir à une formulation juridique claire. Pour autant, nous devrions nous efforcer de pousser ce sujet.

Dans certains territoires, on trouve peut-être plus de haies aujourd’hui qu’en 1950, mais il faudrait considérer chaque pas de temps : les années 1950, 1960, 1970, etc. Monsieur le rapporteur, sauf erreur de ma part, malgré les encouragements et les dispositifs incitatifs, il y a globalement moins de haies aujourd’hui qu’il y a une dizaine ou une vingtaine d’années.

Vous contestez cette réalité en opposant un principe d’objectivation. Toutefois, jusqu’à maintenant, nous en étions restés à ce constat que le rapport de notre collègue Salmon me semble bien confirmer : il y a quand même moins de haies qu’auparavant. Et cela n’empêche pas que nous soyons tous d’accord pour reconnaître l’apport de la haie en matière de biodiversité.

Faisons de la différenciation territoriale, mais n’oublions pas de prendre en considération l’enjeu de la haie, qui est bénéfique pour nous tous.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 262 bis et 533 sexies.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 45 rectifié quater, présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, L. Vogel, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret, est ainsi libellé :

Alinéas 5 à 9

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 412-21. – La haie régie par la présente section s’entend de toute unité linéaire implantée à plat, sur talus ou sur creux, avec présence d’arbustes et, le cas échéant, présence d’arbres ou d’autres ligneux tels que les ronces, les genêts ou les ajoncs. Ne sont pas inclus dans les haies les alignements d’arbres caractérisés par la présence d’une unité linéaire de végétation ligneuse composée uniquement d’arbres, à l’exclusion des allées d’arbres et des alignements d’arbres mentionnés à l’article L. 350-3 et des haies implantées en bordure de bâtiments ou sur une place, qui constituent l’enceinte d’un jardin ou d’un parc attenant à une habitation ou qui se situent à l’intérieur de cette enceinte. »

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. J’avais rédigé cet amendement pour les députés du groupe Horizons, qui l’ont défendu à l’Assemblée nationale.

Le mot « implantée » figure dans la définition proposée, car il a tout son sens et fait écho à la définition retenue par la PAC.

Si j’ai une seule demande à vous faire, monsieur le rapporteur, c’est de bien vouloir réécrire, avec l’accord bienveillant du Gouvernement, la définition de la haie en réintroduisant ce terme. Je sais que le ministère de la transition écologique n’y est pas favorable, car il souhaite faire glisser dans cette définition des arbres qui poussent en bord de rivière pour créer ainsi plusieurs milliers de kilomètres de haies. Que dire de plus ? J’ai déjà tout donné sur ce sujet.

J’ai planté dix kilomètres de haies chez moi. En Indre-et-Loire, avec le conseil départemental de l’époque, nous avions même planté des centaines de kilomètres, en 1994. Je souscris complètement à l’analyse qu’a faite M. Duplomb. J’ai une photo satellite qui date de 1950 : il n’y avait pas une haie, rien du tout. Les moutons mangeaient tout. On en comptait des milliers en Touraine et dans d’autres départements. Le bocage n’était pas le monde des Bisounours de l’arrière-temps que certains veulent dépeindre.

Sur ce point précis et technique de la haie « implantée », je vous conjure, mes chers collègues, de retrouver la raison. À défaut, il faudra assumer de dire aux agriculteurs que des milliers de kilomètres en bord de rivière sont devenus des haies, qu’ils devront entretenir pour la seule raison qu’un marsaule et un frêne se succèdent à intervalles réguliers. Le problème est qu’ils n’arriveront même plus entretenir les zones relevant du plan de prévention des risques d’inondation (PPRI), dont vous savez tous que la mise en œuvre est difficile.

Pour ma part, je vous aurai averti et m’endormirai ce soir la conscience tranquille.

Mme la présidente. L’amendement n° 451, présenté par MM. Szczurek, Hochart et Durox, est ainsi libellé :

Alinéas 5 à 9

Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 412-21. – I. – La haie régie par la présente section s’entend de toute unité linéaire de végétation ligneuse d’origine humaine, implantée à plat, sur talus ou sur creux, remplissant l’un des critères suivants :

« 1° Présence d’arbustes, et, le cas échéant, présence d’arbres ou d’autres ligneux ;

« 2° Présence d’arbres et d’autres ligneux.

« Ne sont pas considérés comme haies et ne sont pas régis par cette section :

« 1° Les alignements d’arbres caractérisés par la présence d’une unité linéaire de végétation ligneuse composée uniquement d’arbres, sans arbustes, ni autres ligneux ;

« 2° Les bosquets, constitués d’un élément non linéaire d’arbres ou d’arbustes. »

La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 940, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

végétation

insérer les mots :

, autre que des cultures,

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à exclure de la définition des haies certaines cultures agricoles qui pourraient leur être assimilées.

Mme la présidente. L’amendement n° 550, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

comprend au moins deux éléments parmi les trois suivants :

par les mots :

est composé d’arbres ou d’arbustes, ou des deux,

II. – Alinéas 6 à 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Nous faisons beaucoup de sémantique dans ce débat. Monsieur Louault, « implantée » signifie non pas « plantée », mais « située ». Il est simplement question des haies qui se trouvent le long d’une rivière, sans qu’on les ait nécessairement plantées.

On trouve des définitions diverses et variées de la haie, ce qui entraîne des contestations. L’objet de cet amendement est donc de préciser cette définition, pour la rendre plus compréhensible et assurer ainsi une protection juridique maximale au pétitionnaire.

La rédaction actuelle est restrictive et interprétative, ce qui réduit considérablement le champ d’application du régime de simplification proposé et en affaiblit la portée pour les agriculteurs.

Tel qu’il nous est soumis, cet article impose deux critères minimum cumulatifs, ce qui, de fait, exclut de la définition les haies de taillis, qui sont composées exclusivement d’arbustes, et les haies de futaie, qui sont composées exclusivement d’arbres. Pourtant, dans ces deux cas, il s’agit bien de haies.

À mon sens, une définition efficace et protectrice de la haie doit être suffisamment souple pour assurer une protection fonctionnelle à ces ensembles de linéaires. Or, dans la rédaction actuelle de l’article, les projets de destruction des deux types de haies que j’ai mentionnés ne pourront bénéficier ni de la nouvelle procédure ni du régime unique instaurés par ce projet de loi, ce qui complexifiera les procédures réglementaires et augmentera les risques de contentieux, qui sont inévitables dès lors que la définition pose des problèmes d’interprétation.

En imposant deux critères, la définition actuelle est trop exigeante. Un critère unique me semble suffisant, car une haie arbustive est bel et bien une haie.

Mme la présidente. L’amendement n° 760 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Des talus.

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Nous avons adopté voilà quelques jours la proposition de loi de notre collègue Daniel Salmon, dont je salue le travail, en faveur de la préservation et de la reconquête de la haie. Par cohérence, la commission des affaires économiques a donc intégré à l’article 14 de ce projet de loi la protection et la gestion durable des haies.

Si nous avons évoqué tous les bénéfices des haies pour l’aménagement du territoire et pour l’agriculture, je voudrais rappeler que les talus ont également leur importance. Ceux-ci recèlent de grandes potentialités : ils permettent de retenir l’eau et de la restituer en période d’étiage pour soutenir le débit des rivières. La haie absorbe de l’eau en profondeur et épure la nappe quand le talus limite le ruissellement.

Aussi, les talus représentent un outil essentiel pour lutter contre la sécheresse dont souffrent nos agriculteurs. Tout comme les haies, il nous faut les protéger. Dans le débat sur la place de la haie, n’oublions pas les talus !

Mme la présidente. L’amendement n° 512 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mme Billon, MM. Menonville, Bonneau et Pillefer, Mme de La Provôté, MM. Duffourg, Laugier et S. Demilly, Mme Saint-Pé, MM. Kern et J.M. Arnaud, Mmes Romagny et Jacquemet, M. Courtial, Mme Perrot, MM. Levi, Khalifé, de Nicolaÿ et P. Vidal, Mme Canayer et M. Bleunven, est ainsi libellé :

Alinéa 9

1° Supprimer la seconde occurrence du mot :

et

2° Compléter cet alinéa par les mots :

, et à l’exclusion des haies présentant un risque pour l’intégrité des réseaux et des infrastructures de transports

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement tend à préciser que les gestionnaires d’infrastructures linéaires sont déjà engagés dans une dynamique d’entretien durable d’un patrimoine végétal important, contribuant au maintien de peuplements favorables à la biodiversité.

L’alinéa 13 de cet article prévoit de renforcer cette dynamique en obligeant les gestionnaires d’infrastructures linéaires à mettre en œuvre un plan d’action pour atteindre l’objectif de gestion durable des haies.

Cet amendement vise à exclure du régime de protection et de gestion durable les haies qui présentent des risques pour la sécurité et la continuité de service des infrastructures linéaires, en préservant le strict gabarit nécessaire à la sécurité des infrastructures linéaires.

Les conséquences du changement climatique, notamment la fréquence de plus en plus importante des tempêtes, entraînent une augmentation sensible des chutes d’arbres, ce qui cause des accidents et nuit à la régularité des infrastructures linéaires, notamment ferroviaires. Il n’est d’ailleurs pas rare que certains d’entre nous arrivent en retard, car leur train a été ralenti par la présence d’un arbre sur les voies… (Sourires.)

Mme la présidente. L’amendement n° 761 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer les mots :

, à l’exclusion des allées d’arbres et des alignements d’arbres au sens de l’article L. 350-3, qu’ils bordent ou non des voies ouvertes ou non à la circulation publique, et à l’exclusion des haies implantées en bordure de bâtiments ou sur une place, qui constituent l’enceinte d’un jardin ou d’un parc attenants à une habitation ou qui se situent à l’intérieur de cette enceinte

par les mots :

comportant une ou plusieurs essences sur une largeur maximum de 20 mètres, d’une longueur minimum de 25 mètres et sans interruption de plus de 20 mètres,

Alinéa 9

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Si je tiens à souligner la sagesse et l’effort de conciliation qui ont présidé à la conception de l’article 14 de ce projet de loi, la définition de la haie faisant l’objet d’une protection nous paraît quelque peu restrictive en l’état.

Celle-ci, par exemple, n’englobe ni les haies monospécifiques, ni les haies issues non pas d’une intervention humaine, mais d’un processus de régénération naturelle, ni les allées et alignements d’arbres qui bordent les voies.

C’est pourquoi nous proposons de retenir une définition plus inclusive, qui mentionne précisément la nature du linéaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Voilà un exercice bien difficile… Ces amendements contiennent des multitudes d’éléments, totalement différents les uns des autres. Je vais tenter d’apporter quelques éclaircissements…

Monsieur Louault, permettez-moi de revenir sur la définition que vous proposez à l’amendement n° 45 rectifié quater : « La haie régie par la présente section s’entend de toute unité linéaire implantée… » – je précise ici, comme monsieur Salmon, qu’« implantée » ne signifie pas « plantée », sinon nous aurions écrit « plantée » ! Je poursuis : « … à plat, sur talus ou sur creux… » – pardonnez-moi, mais cela veut dire partout !

Cette définition n’est absolument pas restrictive : ce qui n’est pas plat est en creux ; ce qui n’est pas en creux est un talus. Je ne vois pas ce qui peut exister d’autre qui soit ou en pente ou à plat…

M. Vincent Louault. C’est la définition de la PAC !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. À moins qu’il existe des haies en lévitation, mais je n’en ai jamais vu !

Vous écrivez ensuite : « avec présence d’arbustes et, le cas échéant, présence d’arbres ou d’autres ligneux tels que les ronces, les genêts ou les ajoncs ». En quoi cette rédaction serait-elle plus restrictive que la nôtre ? Je vous rappelle que nous définissons la haie de la même manière que la PAC, en précisant qu’il doit s’agir d’un linéaire composé de deux des composantes que sont les arbres, les arbustes et les végétaux ligneux. Je précise que les végétaux ligneux excluent de fait les ajoncs – mais pas, je vous le concède, les genêts.

Selon votre définition, un alignement d’arbres implantés le long d’une route – j’allais dire des platanes, mais vous m’auriez rétorqué qu’ils ont été plantés – serait considéré comme une haie, ce qui ne serait pas le cas selon la définition de la PAC, que nous avons retenue, puisque ces arbres doivent être accompagnés d’arbustes pour être considérés comme une haie.

Vous l’aurez compris, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 45 rectifié quater.

L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 451, qui tend à considérer les bosquets comme des haies.

L’amendement n° 550 du groupe écologiste vise, de manière assumée, à considérer tout alignement de végétaux comme une haie, qu’il s’agisse uniquement d’arbres, uniquement d’arbustes ou d’un mélange des deux. Au moins, c’est clair, tout y passe !

M. Daniel Salmon. C’est clair !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 760 rectifié du groupe communiste vise à élargir la réflexion sur d’autres éléments paysagers du monde rural. En tout état de cause, il s’agit, là encore, de rendre la définition moins restrictive : avis défavorable.

Monsieur Longeot, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 512 rectifié bis, non pas parce que j’y suis défavorable, mais parce que l’un de vos amendements ultérieurs tend à régler les problèmes des gestionnaires de réseaux que vous mentionnez ; à défaut, l’avis serait défavorable. Je vous prie de me faire confiance.

Le but de cet article, depuis sa genèse, est de mettre fin à la multitude de définitions et de règles qui peuvent prévaloir en matière de haies. Il s’agit donc de simplifier, mais pas au point de tromper un agriculteur en lui laissant croire qu’il peut tout faire et en l’exposant à un risque de représailles de l’Office français de la biodiversité, par exemple, qui pourrait lui reprocher d’avoir détruit un habitat potentiel d’espèces protégées.

Notre objectif est d’inscrire dans la loi une définition la plus claire et lisible possible. Celle de la PAC propose une vision suffisamment restrictive pour y pourvoir. Nous l’assumons, car, contrairement à M. Salmon, nous considérons qu’un alignement d’arbres n’est pas une haie, y compris les thuyas d’un particulier. Du reste, un particulier désignera les thuyas alignés le long de sa maison comme sa haie, mais il ne dira jamais qu’un alignement d’arbres le long d’une route est la haie de sa commune : il ne verra qu’un alignement d’arbres ! Or l’amendement n° 761 rectifié tend également à intégrer à la définition tout alignement d’arbres et de végétaux le long des habitations. Selon cette rédaction, un particulier ne pourrait plus entretenir ou couper sa haie de thuyas sans risquer de se heurter à la réglementation de protection des haies.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Je ne prétends pas que notre définition soit parfaite – personne ne peut se prévaloir d’avoir écrit quelque chose de parfait sur un sujet aussi compliqué. Toutefois, cette définition n’est pas plus restrictive que ce que vous proposez – elle l’est même moins – et a le mérite d’être plus claire. Comme l’a souligné M. Gillé, la territorialisation nous permettra de porter un œil plus objectif sur les territoires où le nombre de haies a augmenté et sur ceux où il a diminué.

Il s’agit d’un jeu d’équilibre. Peut-être ne suis-je pas le meilleur pour marcher sur un fil, mais je m’efforce de trouver des solutions et Dieu sait que ce n’est pas simple.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 45 rectifié quater, 451, 550, 760 rectifié et 761 rectifié.

La définition de la haie emporte le périmètre d’application du régime juridique que nous créons. Il nous faut donc être à la fois prudents et rigoureux. Nous ne voulons pas intégrer à cette définition les alignements d’arbres, qui sont traités dans un autre titre du code de l’environnement. De même, nous ne voulons pas intégrer les cultures ou les ronces ayant poussé spontanément en bord de chemin.

Je rappelle que nous définissons la haie comme un linéaire intégrant au moins deux des trois éléments suivants : des arbres, des arbustes ou d’autres ligneux.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. On est au moins d’accord sur ça !

Mme Annie Genevard, ministre. En effet, nous sommes d’accord sur ce point, monsieur le rapporteur.

Par ailleurs, il nous faut bien coordonner le dispositif avec la PAC pour éviter d’ajouter de la complexité à la complexité. Après les tâtonnements à l’Assemblée nationale, la commission des affaires économiques du Sénat me semble avoir trouvé une position d’équilibre.

Je vous propose donc, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous en tenir à la rédaction actuelle, à l’exception de la précision pertinente que tend à introduire l’amendement n° 940 de la commission, sur lequel le Gouvernement émet un avis favorable.

Quant à l’amendement n° 512 rectifié bis, je vous invite, monsieur le sénateur Longeot, à bien vouloir le retirer au profit de l’amendement n° 872 du Gouvernement, que je présenterai ultérieurement. En effet, nous partageons la même volonté de garantir une plus grande sécurité juridique dans le cadre de la maintenance et de la gestion de réseaux.

L’amendement que nous avons déposé tend ainsi à prévoir que les travaux nécessaires à la préservation du gabarit de sécurité des infrastructures linéaires ne sont pas assimilables à la destruction de haies. Cela répond à votre préoccupation légitime : il faut pouvoir détruire ce qui contrevient à la sécurité des réseaux, des infrastructures ferroviaires ou des adductions électriques.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Vous pouvez tourner mon amendement en dérision, monsieur le rapporteur, mais j’ai repris l’expression « implantée à plat, sur talus ou sur creux » de la définition de la PAC. Mais il est vrai que la réglementation européenne est parfois un peu creuse…

Par ailleurs, quand je mentionne la présence d’arbustes, je précise clairement : « et, le cas échéant, présence d’arbres ou d’arbustes ». Il est pour le moins caricatural de dire que cette définition apparente des alignements d’arbres à des haies !

En outre, j’ajoute « ou d’autres ligneux tels que les ronces, les genêts ou les ajoncs », car votre définition ne tient pas compte de la question des trous dans les haies. Souvent, des trous de plusieurs mètres dans une haie font l’objet de grands débats avec les associations environnementales. En intégrant de tels ligneux à la définition, il est facile de replanter pour garantir la tranquillité et éviter des débats interminables.

Enfin, j’écris noir sur blanc : « Ne sont pas inclus dans les haies les alignements d’arbres caractérisés par la présence d’une unité linéaire de végétation ligneuse composée uniquement d’arbres. » Voilà qui ne correspond en aucun cas à la caricature que le rapporteur et la ministre ont faite de mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Selon votre définition, monsieur le rapporteur, une haie doit comporter deux des trois éléments suivants : des arbustes, des arbres ou d’autres ligneux. Permettez-moi de prendre l’exemple de ma région.

Les agriculteurs aiment ce qui est propre, ce qui implique bien souvent, mécanisation aidant, de tout nettoyer entre les arbres. Ainsi, ils ne laissent aucun arbuste ou ligneux ; il reste un chêne ici ou là, sans réelle continuité. Dès lors, on peut considérer que cette végétation n’a plus besoin de protection, puisqu’elle ne s’apparente plus à une haie.

Je ne dis pas que les agriculteurs le font sciemment, mais voilà comment les choses se passent. Dans mon département, les haies ont disparu massivement lors du remembrement, mais aussi de manière plus insidieuse, des haies devenant de simples alignements d’arbres et disparaissant peu à peu.

C’est pour tenir compte de cette réalité que je demande que la présence d’un seul des trois éléments que j’ai mentionnés suffise à définir une haie. Nous ne tomberons certainement pas d’accord là-dessus, mais j’estime qu’il faut étendre la protection à bien plus de linéaires que ne le permet la définition actuelle. Sinon, le linéaire de haie continuera de diminuer année après année, ce qui n’est, me semble-t-il, pas l’objectif de ce texte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 45 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 451.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 940.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 550.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 760 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Longeot, l’amendement n° 512 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-François Longeot. Monsieur le rapporteur, peut-être ai-je mal lu, mais mon amendement ne me semble pas en contradiction avec ce que vous proposez ; au contraire, il me paraît complémentaire.

Cela étant dit, j’ai été convaincu par l’explication de Mme la ministre et je le retire donc au profit de l’amendement n° 872, à venir, du Gouvernement.

Mme la présidente. L’amendement n° 512 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 761 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 523, présenté par MM. Buis, Lemoyne, Buval et Patriat, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Est également exclue la chaussée de toute voie cadastrée sous l’appellation “chemin rural”.

M. Bernard Buis. L’article 14 du projet de loi pose une définition des haies visant à mieux les protéger et les reconstituer, dans le cadre d’une stratégie ambitieuse dont l’objectif est un gain net de 50 000 kilomètres de linéaire par an d’ici à 2030.

Toutefois, cette définition risque d’entraver la réouverture des chemins ruraux envahis par la végétation. Or ces chemins sont indispensables aux pratiques de pleine nature, qui connaissent un essor important. Un chemin obstrué pourrait être considéré comme une haie, ce qui rendrait sa réhabilitation complexe et contraignante pour les communes.

Cet amendement vise donc à exclure la chaussée des chemins ruraux du champ d’application de l’article 14, afin d’éviter toute confusion et de mieux concilier préservation des haies et maintien des accès ruraux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Voilà un exemple typique des problèmes que pose un excès de règles et de lois : monsieur Buis, vous avez totalement raison et je suis très favorable à votre amendement.

Vous pointez le cas d’un chemin rural ou communal, qui, n’ayant pas été emprunté pendant un certain temps, se serait « enfriché ». Les buissons qui s’y sont formés pourraient alors nous amener à considérer cet ensemble comme une haie. Autrement dit, nous pourrions instaurer une prescription sur le domaine public, dont le droit dit qu’il est imprescriptible et inaliénable ! Lorsqu’un chemin est abandonné, le gestionnaire public, qui est tenu de l’entretenir, pourrait se voir interdire de le rouvrir, car il s’apparenterait désormais à une haie : ce n’est pas acceptable !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet donc un avis très favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Le diable se cache dans les détails : un chemin rural est en général encadré par deux haies ; en excluant ce chemin du périmètre de la définition de la haie au prétexte qu’il se serait enfriché, nous risquons de faire disparaître les deux haies qui l’encadraient à l’origine. Cette rédaction me semble quelque peu bancale.

Cela étant dit, il faut apporter de la clarté. Considérant qu’un tel chemin rural a vocation à être rouvert, je comprends bien l’intérêt de l’extraire du périmètre de la définition. Mais vous voyez bien le danger que cela emporterait de le faire de la sorte : mieux vaut deux haies que pas de haie du tout !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Permettez-moi de revenir sur l’avis du Gouvernement et de livrer à votre réflexion les questions que pose la rédaction de cet amendement.

Monsieur Buis, nous comprenons la philosophie de votre amendement, mais en l’adoptant, nous n’enlevons rien à la réglementation qui régit la haie. Nous risquons donc de laisser penser qu’il est possible de détruire les haies préexistantes, alors que celui qui le ferait s’exposerait à des récriminations au titre de la réglementation unique de la haie.

Autrement dit, cette idée a priori louable est en réalité une fausse bonne idée, car elle induit des risques pour l’auteur potentiel de la destruction des haies qui bordaient le chemin rural à l’origine. S’il était adopté, nous pourrions retravailler la rédaction de cet amendement au cours de la navette parlementaire, mais je ne saurais émettre un avis favorable à son endroit.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est l’exemple typique d’une technocratie abrutissante ! Imaginons que notre amendement soit adopté : que ferait un juge en cas de litige, si le texte ne lui paraissait pas assez clair pour trancher ? Il lirait les comptes rendus des débats en séance et en commission pour connaître l’intention du législateur.

M. Henri Cabanel. Tout à fait !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Aussi, je m’adresse à ce juge qui pourrait me lire dans dix ou quinze ans : l’intention des auteurs de cet amendement est simplement de préciser que la végétation qui a prospéré en plein milieu de la chaussée d’un chemin rural temporairement abandonné ne doit pas être protégée de la destruction. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant !

Ainsi, le juge qui aura été saisi saura que cet amendement ne visait pas les haies bordant le chemin, comme l’explique M. Salmon, mais simplement le milieu du chemin. Cela ne pose aucun problème : les haies bordant le chemin continuent d’être soumises à la réglementation de la haie, mais pas les buissons qui poussent entre deux haies.

Ceux qui suivent les débats doivent se dire que nous sommes complètement à côté du vélo…

M. Stéphane Sautarel. C’est vrai !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Arrêtons de réfléchir avec les pieds, soyons intelligents et sortons de cette technocratie qui nous éloigne du bon sens ! Il n’est pas question de permettre de couper des haies au bord des chemins pour le plaisir de couper des haies, nous laissons simplement aux communes la faculté de rouvrir un chemin à la demande de pétitionnaires !

Je rappelle qu’un chemin rural est un bien imprescriptible et inaliénable. Nous faisons juste en sorte que ceux qui doivent le rouvrir ne se heurtent pas à un mur législatif.

Comment faire entendre à un pétitionnaire souhaitant accéder à un chemin que le maire ne peut pas le rendre accessible parce que les buissons qui ont poussé au milieu du chemin sont davantage protégés que sa bordure ? C’est ce genre de mesure incompréhensible qui jette les gens dans les bras des extrêmes !

Mes chers collègues, votons cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Il ne sert à rien de s’énerver. Le régime unique de la haie protège, par une réglementation simplifiée, celui qui couperait des haies sans y avoir été autorisé. S’il a l’autorisation pour ce faire, il n’y a aucun problème !

Dans l’exemple que vient de citer M. le rapporteur, il suffira de se mettre en conformité avec le régime unique.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est nul !

Mme Annie Genevard, ministre. Mais non ! Si nous conservons cette rédaction, nous serons confrontés au cas de figure que je vous ai décrit précédemment : quelqu’un qui détruirait une haie en se croyant dans son bon droit pourrait se retrouver en garde à vue !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous ne parlons pas de ça !

Mme Annie Genevard, ministre. Mais si ! Le régime unique de la haie protège ceux qui interviennent sur la haie et ont autorité pour le faire, voilà tout.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Il est tout de même culotté de devoir demander une autorisation à l’administration pour enlever une haie implantée sur un chemin rural !

Nous parlons matin, midi et soir de renforcer le pouvoir des maires en disant que nous respectons les élus locaux et nous allons les forcer à appeler la direction départementale des territoires pour avoir l’autorisation de réhabiliter un chemin rural.

Il existe un cadastre : il n’est pas question de détruire une haie au-delà des bornes, mais de remettre en état le chemin entre ces bornes. C’est tout de même facile à comprendre !

Nous voterons l’amendement de M. Buis.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

M. Jean-Raymond Hugonet. C’est non plus à un débat que nous assistons, mais à un steeple-chase ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la ministre, ce que vient de dénoncer notre ami et collègue Laurent Duplomb, c’est ce que vivent en permanence les élus dans leurs relations avec l’administration. C’est clair, c’est net et c’est facile à comprendre ! Nous n’en pouvons plus ! Certes, nous entendons vos arguments, mais, sauf votre respect, permettez-moi de vous dire que ceux du rapporteur et de M. Louault sont beaucoup plus audibles pour des sénateurs enracinés dans leur territoire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 523.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 762 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« La gestion durable des haies implique une continuité dans le temps des étages de végétation, une largeur minimale de houppier ou un potentiel de développement de la végétation, ainsi que le maintien d’une emprise ligneuse au sol minimale associée à un ourlet enherbé. Elle permet le renouvellement des arbres et arbustes dans un équilibre avec le prélèvement de biomasse éventuel.

« La garantie de cette gestion durable des haies fait l’objet d’une certification, dont les conditions de délivrance sont fixées par le décret mentionné à l’article L. 412-26.

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à définir la gestion durable selon des critères permettant d’atteindre le bon état écologique de la haie.

La certification proposée pour assurer cette qualité doit être vécue non pas comme une contrainte, mais plutôt comme un avantage en ce qu’elle doit permettre d’apporter une garantie supplémentaire dans la valorisation de ces espaces et l’entretien de la haie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Monsieur Lahellec, votre amendement, permettez-moi de vous le dire, n’est pas du tout conforme au « pacte de confiance » que nous avons conclu avec M. Salmon lors de l’examen de sa proposition de loi : nous étions alors convenus que la certification de la gestion durable serait optionnelle – il a même été question d’un crédit d’impôt pour favoriser celle-ci. Or vous proposez là de la rendre contraignante. Par conséquent, je vous invite à retirer votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

M. Gérard Lahellec. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 762 rectifié est retiré.

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 848, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elles font l’objet d’une gestion durable qui tient compte de leur caractère dynamique dans le temps et dans l’espace. Cette gestion permet le maintien de leur multifonctionnalité agronomique, écologique, économique et paysagère, notamment comme habitats d’espèces animales et végétales, comme auxiliaires de culture, comme corridors écologiques au sens de l’article L. 371-1, pour l’amélioration de la qualité et de l’infiltration de l’eau dans les sols, pour le stockage de carbone aussi bien dans la partie végétative des haies que dans les sols, pour l’affouragement et la production de biomasse, notamment de bois énergie et de bois-construction, ainsi que comme élément paysager structurant des milieux ruraux, urbains et périurbains.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement tend à rappeler le caractère dynamique de la haie et à mettre en avant son rôle multifonctionnel, à la fois agronomique, écologique, économique et paysager.

À l’image de ce dont dispose le code forestier pour la forêt, dresser la liste des différentes fonctions de la haie permettra d’éviter que l’une ne l’emporte sur les autres : il convient de les concilier toutes et d’éviter toute sanctuarisation de la haie qui la figerait et en limiterait les usages.

Une telle vision, réductrice, risquerait d’entraver son intégration dans les systèmes agricoles, de réduire sa capacité à répondre à des enjeux variés comme la production, l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, et d’entraver sa contribution à la gestion des ressources naturelles.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 578 est présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 941 rectifié est présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 11

Remplacer les mots :

Elles font l’objet d’une gestion durable, maintenant

par les mots :

Les pratiques d’interventions sur les haies visent un objectif de gestion durable définie comme permettant le maintien de

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 578.

M. Daniel Salmon. Par cet amendement, nous entendons travailler au maintien de l’attractivité économique, de l’implantation et de la gestion des haies par des dispositifs non pas obligatoires, mais incitatifs, ainsi que nous nous y sommes efforcés, avec le rapporteur, au travers de ma proposition de loi. L’objectif est de permettre leur développement dans les systèmes agricoles et d’y assurer leur pérennité.

Aussi, cet amendement vise à définir la gestion durable comme un objectif vers lequel peuvent – il n’y a donc pas de caractère contraignant – tendre les agriculteurs pour la gestion des haies. Alors que la terminologie « gestion durable » est actuellement utilisée dans les dispositifs publics pour caractériser des pratiques volontaires des agriculteurs, rémunérés via des dispositifs incitatifs tels que l’écorégime, les mesures agroenvironnementales et climatiques, le label bas-carbone ou les paiements pour services environnementaux (PSE), en faire une nouvelle obligation ne serait pas opérationnel et ferait « dysfonctionner » l’ensemble de ces politiques publiques.

Si la gestion durable devenait obligatoire pour tous les agriculteurs, cela perturberait les dispositifs précités, qui ne pourraient plus être activés par les agriculteurs en ce qu’ils récompensent un changement de pratique.

On peut aussi imaginer que cette obligation de gestion durable conduirait à sa redéfinition, ce qui la rendrait floue pour les agriculteurs et imposerait encore une fois de revoir l’ensemble des dispositifs incitatifs existants qui fonctionnent sur les territoires et accompagnent nos changements.

On pourrait, dans l’absolu, rendre obligatoire la gestion durable. Mais, dans les faits, elle s’en trouverait grandement perturbée : une gestion durable qui n’aurait pas de caractère incitatif serait une gestion durable au rabais.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 941 rectifié et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 848.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Comme vient de l’indiquer notre collègue Salmon, nous proposons, par cet amendement identique au sien, de préciser que la gestion durable des haies par les agriculteurs est pour eux un objectif vers lequel ils doivent tendre, grâce à une sorte de cahier des charges, et non pas une obligation.

En revanche, l’objet de l’amendement n° 848 du Gouvernement est quelque peu différent. Autant nous souscrivons à l’idée que la gestion durable des haies tienne compte « de leur caractère dynamique dans le temps et dans l’espace » – ainsi, nous trouvons normal qu’elles puissent être déplacées moyennant compensation –, autant nous entendons maintenir le caractère optionnel et non pas obligatoire de cette gestion durable, contrairement à ce que vous proposez, madame la ministre.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 578 et 941 rectifié ?

Mme Annie Genevard, ministre. Je retire l’amendement n° 848 au profit de ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. L’amendement n° 848 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 578 et 941 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 942, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les haies peuvent faire l’objet de travaux d’entretien usuels tenant compte de leur caractère dynamique dans le temps et dans l’espace et permettant la valorisation économique de ses produits, notamment la biomasse.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à indiquer qu’il est possible que les haies fassent l’objet d’entretiens usuels sans que cela soit considéré comme une action de destruction. Il s’agit là d’une précision indispensable.

Mme la présidente. L’amendement n° 551, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 12, première phrase

Supprimer les mots :

inclut les travaux d’entretien usuels et

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à supprimer l’inclusion, dans la définition de la gestion durable, de la notion de « travaux d’entretien usuels », cette expression étant floue et non opérationnelle. Il est utile d’avoir une définition simple et précise de la gestion durable. Soyons clairs si nous voulons atteindre nos objectifs.

Mme la présidente. L’amendement n° 849, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 12, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Par cet amendement, le Gouvernement entend supprimer cet alinéa de l’article 12, qui dispose que les travaux d’entretien usuels des haies ne sont pas assimilables à une action de destruction.

Dans la majorité des cas, en effet, ces travaux d’entretien menés dans le cadre d’une gestion durable ne constituent pas une destruction. Toutefois, il ne peut être exclu que certains d’entre eux, notamment lorsqu’ils sont répétés dans le temps, puissent conduire à une destruction de haie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 551 et 849 ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’amendement n° 849 du Gouvernement est satisfait par l’amendement de la commission, lequel apporte une précision au sujet des travaux d’entretien usuels : j’en demande donc le retrait.

Concernant l’amendement n° 551 du groupe écologiste, l’avis est défavorable. Mon cher collègue Salmon, vous proposez, à l’alinéa 12, de supprimer les mots « inclut les travaux d’entretien usuels ». Si je comprends bien, en l’absence de labellisation, il ne serait plus possible d’entretenir les haies ? (M. Daniel Salmon fait une moue dubitative.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 942 et 551 ?

Mme Annie Genevard, ministre. Favorable à l’amendement n° 942, au profit duquel je retire l’amendement n° 849, et défavorable à l’amendement n° 551.

Mme la présidente. L’amendement n° 849 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 942.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 551 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 872, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les travaux nécessaires à la préservation du gabarit de sécurité des infrastructures linéaires ne sont pas assimilables à la destruction d’une haie.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement, que nous avons évoqué précédemment, vise à préciser que les interventions sur les haies situées à proximité des infrastructures linéaires – routières, ferroviaires ou électriques – ne sont pas assimilables à des actions de destruction.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement répond en partie à la préoccupation qu’a exprimée M. Longeot concernant les gestionnaires de réseaux – notre collègue obtiendra pleine satisfaction tout à l’heure.

La commission émet un avis très favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 872.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)

PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.

Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein de l’article 14, l’examen des amendements.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 118 rectifié quater est présenté par M. Canévet, Mmes N. Goulet, Havet, Billon et Saint-Pé, MM. S. Demilly, Duffourg, Folliot, Pillefer, Longeot et Bleunven et Mme Herzog.

L’amendement n° 495 rectifié bis est présenté par MM. Mandelli, Burgoa, Bouchet, J.P. Vogel, Reynaud, Brisson et Paul, Mmes Dumont et Lassarade, MM. Perrin, Rietmann et Rapin, Mmes Joseph et Gosselin, M. de Nicolaÿ, Mmes Garnier et Imbert, MM. Lefèvre, Klinger et H. Leroy, Mme Lopez, M. D. Laurent, Mme Ventalon, MM. Genet et Somon, Mmes Canayer, Bonfanti-Dossat et Josende et M. Cuypers.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 13

Supprimer les mots :

et de réseaux de distribution publique d’électricité

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 118 rectifié quater.

M. Yves Bleunven. Il est défendu !

M. le président. L’amendement n° 495 rectifié bis n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui tend à exclure les gestionnaires de réseaux de distribution publique d’électricité de l’obligation de mettre en œuvre un plan d’action pour atteindre l’objectif de gestion durable des haies.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Un amendement du Gouvernement a été adopté tout à l’heure, aux termes duquel « les travaux nécessaires à la préservation du gabarit de sécurité des infrastructures linéaires ne sont pas assimilables à la destruction d’une haie ». Sont visées là l’ensemble des infrastructures linéaires et non pas seulement les linéaires de réseaux de distribution d’électricité.

Le Gouvernement préférant cette rédaction, qui lui semble plus large, il émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Une haie reste une haie ! J’entends souvent les agriculteurs récriminer contre les obligations auxquelles ils sont assujettis, cependant que les autres gestionnaires de haies ne seraient, quant à eux, pas embêtés. De fait, force est de constater que, bien souvent, les haies dont ont la charge des gestionnaires comme EDF – puisque c’est d’elle qu’il est question dans cet amendement – sont en grande partie massacrées. Aussi, il serait bien utile que ces entités s’engagent, elles aussi, dans une gestion durable des haies, qui, je le rappelle, stockent du carbone et peuvent produire de la biomasse. Aucune raison de les maltraiter !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 118 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 552, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …. – La destruction d’une haie s’entend de sa suppression définitive, notamment par arrachage ou par coupe conduisant à sa disparition.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Cet article 14 pose un cadre clair et simplifié pour la destruction des haies. C’est pourquoi, afin d’éviter autant que possible les contentieux, il nous paraît important de définir précisément ce qu’est une telle destruction, même si celle-ci n’est pas souhaitable.

Par exemple, il convient d’éviter une situation dans laquelle un gestionnaire de haies, qui réalise une bonne coupe sylvicole – recépage, prélèvement –, permettant une repousse, soit finalement sanctionné par l’autorité compétente qui assimilerait cette coupe à une destruction.

De plus, il nous paraît important que la définition d’une destruction englobe une grande partie des méthodes de suppression des haies, qui consistent rarement en un arrachage brutal, mais bien plus insidieusement en une action ayant cours sur plusieurs années.

L’alinéa 12 du présent article dispose : « En tout état de cause, ces travaux ne sont pas assimilables à la destruction de haie au sens de l’article L. 412-24. » Or cette rédaction ne permet pas à elle seule de couvrir toutes les méthodes de destruction. Ainsi, elle couvre les coupes de prélèvement pour récolter la biomasse, mais pas les destructions d’après coupe, avec broyage ou abroutissement des repousses, qui empêchent la haie de repartir. C’est tout sauf une gestion durable.

Pour traiter cet enjeu, nous proposons, par cet amendement, de reprendre la définition qu’avaient proposée les rapporteurs de la commission des affaires économiques en juin 2024 : « La destruction d’une haie s’entend de sa suppression définitive, notamment par arrachage ou par coupe conduisant à sa disparition. »

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 552.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 943, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer cet alinéa, qui fait doublon avec l’article L. 114-3 du code rural, qui dispose qu’en cas de destruction de haies, la collectivité qui a attribué des subventions pour leur plantation peut en demander le remboursement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 943.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié ter, présenté par M. Cambier, Mme Romagny, M. Longeot, Mme Jacquemet, M. Daubresse, Mme Perrot, MM. Somon et Chevalier, Mme Gacquerre, M. Darnaud, Mmes Billon, Doineau, Herzog, Joseph, Antoine et Jouve, M. J.B. Blanc, Mme de La Provôté et MM. Grosvalet et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« IV. – Les haies implantées le long des voies publiques et des chemins ruraux ont des sujétions particulières concernant la liberté et la sécurité de la circulation.

« Les travaux de taille ou d’élagage de ces haies entrepris pour assurer la sûreté et la commodité de la circulation, constituent des travaux d’intérêt public majeur qui visent à garantir la sécurité publique. La mise en œuvre de ces dispositions se fait librement et ne requiert aucune autorisation ou déclaration préalable.

« Afin de prévenir les risques d’érosion, pour tout projet de destruction d’une haie implantée aux limites des voies publiques ou des chemins ruraux constituées d’un talus ou dénivelé, l’avis favorable de l’autorité gestionnaire de la voie doit être joint au dossier.

La parole est à Mme Annick Jacquemet.

Mme Annick Jacquemet. Il est défendu !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement n’apporte pas de garanties suffisantes sur le plan juridique : retrait, ou bien avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

Mme Annick Jacquemet. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 765 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Remplacer les mots :

mentionnée à l’article L. 412-21

par les mots :

, par arrachage ou par techniques dégradant significativement le développement de la végétation ligneuse et portant atteinte aux services écosystémiques de la haie,

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Il est retiré, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 765 rectifié est retiré.

L’amendement n° 850, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 17 et 19

Remplacer les mots :

de deux mois

par les mots :

fixé par décret en Conseil d’État

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement a pour objet de renvoyer à un décret en Conseil d’État la fixation des délais de réponse de l’administration visés aux alinéas 17 et 19.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous ne pouvons accepter d’ajouter de nouvelles contraintes aux agriculteurs sans que celles-ci soient réciproques.

Dans la mesure où tout projet de destruction d’une haie est obligatoirement soumis à déclaration, il est normal que l’État soit, lui aussi, dans l’obligation de répondre à l’agriculteur demandeur le plus rapidement possible. À cet égard, un délai de deux mois nous paraît suffisant. Aller au-delà ne ferait qu’ajouter des contraintes à l’activité agricole : avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Ce sont des raisons de sécurité juridique qui justifient le dépôt de cet amendement, lequel vise deux délais : d’une part, le délai de réponse dont dispose l’autorité administrative pour s’opposer à la destruction projetée ; d’autre part, le délai dans lequel elle peut indiquer à l’auteur de la déclaration que la mise en œuvre de son projet est subordonnée à l’obtention d’une autorisation unique.

Pourquoi est-ce nécessaire ? Parce que ces délais doivent être cohérents avec les différentes procédures légales dont relève le régime unique de la haie.

Prenons un exemple. Une haie située aux abords d’un bâtiment classé est soumise à des procédures obéissant à une temporalité propre. Il faut donc laisser cette souplesse à l’administration plutôt que de lui imposer un délai unique, qui ne correspond pas forcément à chacune des procédures d’autorisation dont relève le régime unique de la haie.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je souhaite apporter une petite précision.

Quelle est la réalité ? Si l’on rajoute des délais, on risque d’être hors délai pour intervenir sur les haies… Dès lors, il devient totalement impossible à l’agriculteur de savoir ce qu’il doit faire. Il fait une demande à l’administration ; celle-ci met un certain temps pour lui répondre. Et quand il reçoit cette réponse, il ne peut plus travailler sur sa haie, parce qu’il est désormais dans la période où c’est interdit. C’est du Kafka !

Soyons plus clairs, soyons plus rapides, soyons plus réactifs. C’est d’ailleurs exactement ce que l’on demande tous les jours aux agriculteurs !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 850.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 391 rectifié ter est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 766 rectifié est présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 17, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 391 rectifié ter.

M. Christian Redon-Sarrazy. L’alinéa 17, que nous proposons de supprimer, du présent article prévoit que, en cas de silence ou d’absence d’opposition de l’autorité administrative, le projet de destruction est réputé autorisé.

Or, au vu de l’encombrement actuel de l’administration, une telle disposition pourrait revenir à laisser le champ ouvert à des autorisations multiples, faute de réponse, et donc à des destructions en masse. Ce risque est d’autant plus réel que les rapporteurs ont, en commission, modifié le texte du projet de loi pour indiquer que l’administration disposerait d’un délai de deux mois pour répondre, alors que le texte initial renvoyait à un décret le soin de fixer celui-ci.

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 766 rectifié.

M. Gérard Lahellec. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 553, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 17, troisième phrase

Remplacer les mots :

ou l’absence d’opposition de l’administration vaut absence d’opposition

par les mots :

vaut opposition

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Par cet amendement, nous proposons que l’absence de réponse de l’autorité vaille décision, non pas d’acceptation, mais de refus, contrairement à ce que prévoit cet alinéa dans sa rédaction actuelle.

Lorsque l’agriculteur dépose sa demande de destruction de haie, il ne sait pas si elle sera qualifiée de demande d’autorisation. Il serait préjudiciable qu’une absence de réponse à une déclaration du fait d’un retard de l’administration vaille acceptation, alors que le projet pourrait être en définitive soumis à autorisation.

Il importe donc que l’administration statue tout d’abord en identifiant avec certitude le régime applicable. Le principe selon lequel le silence vaut acceptation met à mal la sécurité juridique des agriculteurs et constitue un risque, eu égard aux enjeux attachés à la préservation des haies.

D’une manière globale, convenons que l’arrachage d’une haie peut s’anticiper d’une année sur l’autre. Personne, en se levant un bon matin, ne va être pris de l’envie d’arracher une haie ! Un arrachage, normalement, répond à un besoin réel, qui peut être anticipé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’avis est défavorable, pour une simple et bonne raison : on ne peut pas demander aux autres ce qu’on ne s’applique pas à soi-même.

Déjà, on ne peut pas demander à un agriculteur de déclarer impérativement tout travail qu’il sera amené à réaliser : il a bien d’autres choses à faire que de remplir des papiers administratifs. En outre, alors que ces déclarations ont pour objet de lui garantir une sécurité juridique, comment lui expliquer que l’absence de réponse de l’administration dans les délais impartis vaudrait tout simplement refus ? Qui peut croire que ce sera compris par ceux qui sont censés travailler à tout autre chose qu’à remplir des documents administratifs ? Qui peut donc penser que les agriculteurs comprendront que l’absence de réponse vaut refus ? On est vraiment dans un système de dingue !

Si l’administration veut tant contrôler les haies, eh bien qu’elle se donne les moyens de le faire en temps et en heure ! Et une fois qu’elle se sera donné les moyens de le faire en temps et en heure, qu’elle réponde aux requêtes ! C’est quand même la moindre des choses ! Personne ne demandait qu’on aille aussi loin dans cette logique technocratique. Si telle est la volonté, donnons-nous les moyens d’en assumer correctement les conséquences.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 391 rectifié ter et 766 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 553.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 554, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. Alinéa 18

Remplacer le mot :

deuxième

par le mot :

troisième

II. Alinéa 24

Remplacer le mot :

quatrième

par le mot :

cinquième

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Monsieur le rapporteur, il faut effectivement donner à l’administration les moyens de traiter les dossiers en temps et en heure. Mais, dans cet hémicycle, on préfère généralement diminuer le nombre de fonctionnaires…

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il y a peut-être des sujets plus urgents !

M. Daniel Salmon. On procède à des coupes drastiques dans tel ou tel service : dès lors, il ne faut pas s’étonner s’il y a des embouteillages et si l’on n’arrive pas à répondre aux demandes dans les temps.

J’en viens à l’objet de cet amendement.

Les catégories de peines proposées en cas de destruction de haie paraissent insuffisantes pour être dissuasives. À l’évidence, un certain nombre de haies risquent d’être arrachées sans demande préalable, l’amende n’étant guère élevée.

De plus, de si faibles montants relativisent la gravité du préjudice entraîné par une destruction de haie. Nous proposons donc de les revoir à la hausse en revenant au texte voté par l’Assemblée nationale. Les amendes prévues seraient portées de 150 à 450 euros et de 750 à 1 500 euros, voire à 3 000 euros en cas de récidive.

Je l’entends bien souvent dans cet hémicycle : si une peine n’est pas a minima dissuasive, elle ne sert pas à grand-chose…

M. le président. L’amendement n° 389 rectifié ter, présenté par MM. Tissot, Montaugé et M. Weber, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Remplacer les mots :

deuxième classe

par les mots :

troisième classe

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Cet amendement, comme le précédent, vise à rehausser le montant des contraventions applicables au fait de détruire une haie sans avoir obtenu une absence d’opposition, ou en violation d’une mesure de retrait de cette absence d’opposition.

Nos collègues députés avaient opté pour une contravention de troisième classe, remplacée en commission, sur l’initiative de nos rapporteurs, par une simple contravention de deuxième classe.

Il convient selon nous de rétablir le montant fixé par l’Assemblée nationale, lequel nous semble plus dissuasif.

M. le président. L’amendement n° 390 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

quatrième classe

par les mots :

cinquième classe

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Nous souhaitons également rétablir, à l’alinéa 24, le montant d’amende voté par nos collègues députés.

Il s’agit en l’occurrence de la sanction applicable au fait de détruire une haie sans avoir obtenu d’autorisation unique, ou en violation d’une mesure de retrait de ladite autorisation.

MM. les rapporteurs ont aussi fait le choix d’alléger cette sanction, en remplaçant l’amende de cinquième classe par une amende de quatrième classe. Pour notre part, nous proposons de revenir au texte de l’Assemblée nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Lorsqu’un agriculteur arrache une haie sans autorisation, il est déjà sanctionné en vertu de l’article 13. Mais s’il n’a rien détruit, il n’a rien à se reprocher, sinon de ne pas avoir fait de déclaration… Pourquoi multiplier par trois la pénalité à laquelle il s’expose pour n’avoir pas rempli le bon papier ?

La commission est défavorable à ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. La procédure que nous mettons en œuvre vise précisément à sécuriser l’agriculteur, pour éviter qu’il ne soit pénalisé.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Exactement !

Mme Annie Genevard, ministre. Les dispositions de ces amendements vont donc à rebours de ce texte. Elles sont contraires à son esprit même. Aussi, le Gouvernement émet à son tour un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Monsieur le rapporteur, la sanction prévue à l’alinéa 24 vise bien « le fait de détruire une haie » : il ne s’agit pas d’une simple question de déclaration. Si la haie n’est pas détruite, il n’y aura pas de sanction.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Monsieur Salmon, il me semble que vous faites erreur. (M. Daniel Salmon sexclame.) Les dispositions de l’alinéa 24 s’appliquent au « fait de détruire une haie, lorsque cette destruction requiert l’autorisation unique prévue au I, sans avoir obtenu cette autorisation unique ».

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Les sanctions prévues en cas de destruction d’une haie sont fixées par l’article 13. À présent, nous parlons des pénalités applicables quand l’agriculteur n’a pas demandé d’autorisation unique…

M. Jean-Claude Tissot. Mais après avoir détruit la haie !

M. Daniel Salmon. Si la haie n’est pas détruite, il n’y a pas de sanction !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Raisonner ainsi – vous me l’accorderez –, c’est somme toute renverser la logique retenue.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Monsieur Tissot, en votant les dispositions que vous proposez, on augmenterait les pénalités prévues en l’absence de déclaration.

M. Jean-Claude Tissot. Mais à la suite de l’arrachage d’une haie !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est bien de cela qu’il s’agit, pour en revenir à l’objet de ces trois amendements.

La commission confirme son avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Mes chers collègues, je vous l’avoue, je suis assez surpris du temps que nous passons sur le sujet des haies, alors que l’enjeu majeur de ce projet de loi, c’est la souveraineté alimentaire et agricole de la France. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous sommes bien d’accord !

M. Daniel Gremillet. Sincèrement, de tels débats me laissent perplexe.

M. Laurent Burgoa. Vous êtes donc déçu par la gauche ? (Sourires sur les mêmes travées.)

M. Daniel Gremillet. Nous avons parfois la mémoire courte. Qui se souvient des premiers contrôles organisés au titre de la politique agricole commune ? Lorsque, pour le calcul de sa surface cultivée, un paysan oubliait de retrancher telle ou telle haie, il s’en trouvait pénalisé. Qui pense à le rappeler ? (M. Vincent Louault applaudit.) Ce précédent est pourtant riche d’enseignements…

Avec de telles sanctions, avec les diverses mesures contraignantes dont nous débattons au titre de ce projet de loi, j’ai bien peur que nous n’aboutissions à l’inverse du but visé.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est sûr !

M. Daniel Gremillet. On ne cesse de culpabiliser les paysans et de leur faire peur. Pour ma part, j’en suis sûr, ils vont finir par tout arracher : plus une brindille ne dépassera. Qu’il s’agisse d’une haie ou d’un arbre, ils ne prendront pas le risque de laisser pousser quoi que ce soit.

Non seulement les agriculteurs vont se sentir menacés par l’arsenal législatif que nous voyons émerger, mais ils ont tout de même mieux à faire que d’appliquer de telles procédures.

Alors, je vous en prie, revenons-en au cœur du présent texte : la souveraineté alimentaire et agricole de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe INDEP.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 554.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 389 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 390 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Laurent Burgoa. On taille la haie… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. L’amendement n° 767 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mme Varaillas, M. Gay, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 19

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« En outre, est soumise à autorisation toute demande de destruction de haies déposée moins de cinq ans suivant la précédente demande de destruction et concernant la même parcelle.

« L’autorité administrative peut refuser de délivrer l’autorisation en raison de la gravité de l’atteinte aux services écosystémiques de la haie, compte tenu notamment des opérations de destruction de haies précédemment réalisées. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à éviter la destruction de haie par petites portions via des déclarations successives.

Selon nous, toute demande de destruction portant sur une parcelle ayant fait l’objet d’une demande similaire dans les cinq dernières années doit être automatiquement soumise à autorisation ; et l’autorité administrative doit pouvoir s’opposer à un tel arrachage, compte tenu de l’atteinte infligée aux services écosystémiques par ces opérations successives.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Une telle inventivité me laisse pantois. Comment imaginer qu’un agriculteur se lève le matin en se disant : « Je ne rêve que d’une chose, c’est de détruire une haie ! » Je vous le dis sincèrement, il faut cesser de raisonner ainsi.

La commission est défavorable à cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 767 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 944, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 21

Supprimer les mots :

, lorsque le projet de destruction de haie le nécessite

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 944.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 945, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 25

Remplacer la référence :

II

par la référence :

I

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est également un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 945.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 393 rectifié ter, présenté par MM. M. Weber, Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 29

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 29 de l’article 14 afin d’exclure les réserves naturelles du dispositif de simplification des procédures.

La plupart des actes de classement en réserve naturelle interdisent, par principe, de porter atteinte de quelque manière que ce soit aux végétaux non cultivés. La destruction de haies sauvages n’est donc pas juridiquement possible dans ces réserves.

Quant aux haies composées de végétaux cultivés, on pourrait considérer qu’elles sont soumises à l’objectif de bon état de conservation du patrimoine naturel de la réserve naturelle, et qu’il n’est, partant, pas possible d’y porter atteinte.

Par ailleurs, en vertu de l’article 14, toute destruction de haie s’accompagne de mesures de compensation à l’arrachage, parmi lesquelles l’obligation de replantation d’un linéaire de haies au moins égal à celui qui a été détruit. Or je tiens à insister sur cette réalité essentielle, déjà rappelée par plusieurs de nos collègues députés : une haie ancienne présente des caractères de biodiversité, de maturité et de fonctionnalité qu’une replantation ne saurait compenser.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Défavorable également, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 393 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 768 rectifié, présenté par M. Lahellec, Mmes Varaillas et Margaté, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéas 40 à 42

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 412-25. – Tout projet de destruction de haie doit être conçu conformément à la séquence “éviter, réduire, compenser”, telle qu’elle est mentionnée à l’article L. 122-1-1 du code de l’environnement.

« Le cas échéant, toute destruction de haie est subordonnée à des mesures de compensation par replantation, au moins proportionnelles à l’impact environnemental évalué et d’un linéaire au moins égal au double de celui détruit, réalisées dans les conditions prévues à l’article L. 163-1. La définition des mesures compensatoires à mettre en œuvre est précisée dans le décret prévu à l’article L. 412-26.

« L’autorité administrative compétente fixe toute autre prescription nécessaire au respect des intérêts protégés par les législations énumérées à l’article L. 412-24 et en particulier des intérêts protégés par les dispositions des articles L. 211-1 et L. 511-2.

« Le demandeur doit solliciter un conseil préalable à l’opération de destruction et de compensation proposée. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Comme le précise le code de l’environnement, la destruction d’une haie ne saurait être décidée qu’en dernier ressort et doit être assortie de mesures de compensation.

Selon nous, cette compensation peut être dans certains cas supérieure au linéaire détruit. En outre, la demande de conseil préalable doit être rendue obligatoire. On préviendra ainsi bon nombre de destructions injustifiées.

M. le président. L’amendement n° 394 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 40

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 412-25. – Tout projet de destruction de haie doit être conçu conformément à la séquence « éviter, réduire, compenser » telle que définie à l’article L. 110-1.

« Le cas échéant, toute destruction de haie est subordonnée à des mesures de compensation par replantation, proportionnelles à l’impact environnemental évalué et d’un linéaire au moins égal à celui détruit, réalisées dans les conditions prévues par l’article L. 163-1. La définition des mesures compensatoires à mettre en œuvre est précisée dans le décret prévu à l’article L. 412-26. »

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Il convient de garantir la parfaite application de la séquence « éviter, réduire, compenser » (ERC) en cas de destruction de haies.

La compensation à une atteinte environnementale doit être vue comme un dernier recours, conformément au code de l’environnement. En précisant d’emblée que « toute destruction de haie est subordonnée à des mesures de compensation », la rédaction actuelle de l’alinéa 40 nous semble contraire aux objectifs que nous nous sommes fixés à cet égard, notamment dans le cadre du pacte en faveur de la haie et de l’agroforesterie. Il s’agit – je le rappelle – de parvenir à un gain net de 50 000 kilomètres de linéaire de haies d’ici à 2030.

Nous proposons en conséquence de réécrire l’alinéa 40, afin de rappeler que les haies sont également soumises au principe de la séquence « éviter, réduire, compenser ».

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 261 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Courtial, Mmes Gacquerre et Jacquemet et MM. Levi, de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 534 rectifié sexies est présenté par MM. Favreau, Sautarel et Brisson, Mme Dumont, M. Bouchet, Mme Belrhiti, M. Klinger, Mme Josende, MM. Chevrollier, de Legge, Burgoa et Panunzi, Mme P. Martin, MM. Khalifé, Belin et H. Leroy et Mmes Goy-Chavent, Canayer et Bellurot.

L’amendement n° 786 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet, Rietmann et Sol, Mmes Berthet, Malet, Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon, Genet, Somon, Bacci et Pointereau, Mme Drexler, M. Sido, Mmes Bonfanti-Dossat et Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 41 à 43

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 261 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. Cet amendement tend à supprimer la faculté, pour l’autorité compétente, d’ajouter des prescriptions complémentaires ou d’imposer un conseil préalable pour le pétitionnaire.

En effet, les alinéas visés créent des contraintes qui ne figurent pas systématiquement dans les réglementations encadrant aujourd’hui les haies.

En outre, la nouvelle section relative à la protection des haies précise d’ores et déjà que l’autorité compétente pourra demander des éléments complémentaires au dossier et ajouter, si nécessaire, des prescriptions.

Mes chers collègues, lors de notre séance d’hier, nous avons longuement parlé du bachelor agro, diplôme de niveau bac+3. Au train où vont les choses – nous voyons de fait émerger une véritable usine à gaz –, il faudra bientôt posséder un bac+12 pour être paysan en France ! (Sourires sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour présenter l’amendement n° 534 rectifié sexies.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 786 rectifié bis.

M. le président. L’amendement n° 395 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 41

Remplacer les mots :

peut fixer

par le mot :

fixe

La parole est à Mme Viviane Artigalas.

Mme Viviane Artigalas. Au-delà des mesures de compensation, l’autorité administrative doit pouvoir fixer toute prescription nécessaire au respect du régime applicable à la destruction de la haie.

Il s’agit, ce faisant, de rendre la loi prescriptive. Le terme « nécessaire » suffit à indiquer qu’une telle faculté relève du champ d’interprétation et d’action de l’autorité administrative.

M. le président. L’amendement n° 396 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 41

Compléter cet alinéa par les mots :

et les intérêts protégés par les dispositions de l’article L. 211-1

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. N’en déplaise à certains, je vais prendre le temps de présenter cet amendement. En commission, on nous demande d’être concis au motif que le débat aura lieu en séance ; puis, une fois dans l’hémicycle, on nous reproche de défendre trop longuement nos positions. Comprenne qui pourra…

Cet amendement vise à compléter l’alinéa 41, relatif aux mesures de prescription nécessaires en cas de destruction d’une haie.

Il s’agit d’apporter la précision suivante : la possibilité ouverte à l’autorité administrative de fixer toute autre prescription nécessaire au respect des intérêts de la haie, tels qu’énoncés au nouvel article L. 412-24, vaut également lorsqu’il s’agit de la qualité de l’eau.

La préservation de l’eau, en qualité comme en quantité, constitue un enjeu dont l’importance n’est plus à démontrer. Il semble donc nécessaire de faire également référence à l’article L. 211-1 du code de l’environnement, relatif à la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau.

M. le président. L’amendement n° 946, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 42

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elle informe le demandeur de la possibilité de solliciter un conseil avant les opérations de destruction et de replantation, et lui propose une liste d’organismes agréés compétents.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement tend à assurer une information systématique sans obligation.

M. le président. L’amendement n° 555, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 42, au début

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Elle informe le demandeur de la possibilité de solliciter un conseil avant les opérations de destruction et de replantation, et lui propose une liste d’organismes agréés compétents.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Je vous l’avoue, le coup de sang de notre collègue Daniel Gremillet m’a un peu étonné. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous débattons sereinement, peut-être de manière trop paisible au goût de certains : il faudrait tout à coup accélérer le rythme de nos discussions.

Mes chers collègues, il est vingt-deux heures ; il y a somme toute moins d’une heure que nous parlons de la haie. (Exclamations sur les mêmes travées.) Ce sujet mérite clairement que nous nous y arrêtions.

Nous avons déjà discuté des enjeux de souveraineté et nous pourrons bien sûr y revenir. Pour ma part, je suis persuadé qu’à son échelle la haie est nécessaire à notre souveraineté alimentaire.

Cette mise au point étant faite, je souhaite rectifier mon amendement pour le rendre identique à celui que M. le rapporteur vient de défendre. L’information relative au conseil me paraît suffisante – il me semble, d’ailleurs, que c’est la moindre des choses.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 555 rectifié, dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 946.

L’amendement n° 947, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 43

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’amendement n° 768 rectifié tend à permettre la replantation « d’un linéaire au moins égal au double de celui détruit ». Or, pour sa part, la commission préfère s’en tenir au ratio d’un pour un. Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 394 rectifié ter étant selon nous satisfait, nous en demandons le retrait. À défaut, nous émettrons un avis défavorable.

De même, les amendements identiques nos 261 rectifié bis, 534 rectifié sexies et 786 rectifié bis sont largement satisfaits par la rédaction actuelle : c’est pourquoi la commission en demande le retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

La commission est défavorable aux amendements nos 395 rectifié ter et 396 rectifié ter.

Quant à l’amendement n° 555, rectifié afin d’être rendu identique à l’amendement n° 946 de la commission, il reçoit par définition un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Tissot, le régime unique de la haie a vocation non pas à créer de nouvelles règles, mais à instituer un guichet unique d’instruction. De plus, je ne crois pas qu’il faille rendre systématique l’édiction de prescriptions autres que la replantation. Aussi, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 395 rectifié ter et 396 rectifié ter.

Vous invoquez, en parallèle, la séquence « éviter, réduire, compenser ». Mais, selon nous, il n’est pas utile de faire référence à une obligation qui, dans la mesure où elle figure déjà dans le code de l’environnement, doit s’appliquer aux projets visés par l’article 14. Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 394 rectifié ter, ainsi qu’à l’amendement n° 768 rectifié, présenté par M. Lahellec.

Le Gouvernement est également défavorable aux amendements identiques nos 261 rectifié bis, 534 rectifié sexies et 786 rectifié bis, respectivement présentés par MM. Bleunven, Sautarel et Gremillet. Le principe de l’autorisation unique suppose de suivre les prescriptions des autres législations si elles s’appliquent.

Par ailleurs, le conseil prévu à l’alinéa 42 permet d’accompagner le demandeur et de s’assurer que les opérations d’arrachage et de compensation sont menées de manière à réduire les impacts au minimum. C’est donc une mesure utile pour le demandeur et pour l’environnement.

Enfin, le Gouvernement est favorable aux amendements identiques nos 946 et 555 rectifié, qui ont pour objet les modalités de ce conseil. En revanche, il est défavorable à l’amendement n° 947, qui tend à supprimer l’alinéa 43. Ce dernier permet, comme l’alinéa 41, à l’autorité administrative compétente d’imposer toute prescription complémentaire ; mais ces deux alinéas ne traitent pas des mêmes sujets.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 768 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 394 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Daniel Gremillet. Je retire mon amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 786 rectifié bis est retiré.

Monsieur Bleunven, l’amendement n° 261 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Yves Bleunven. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 261 rectifié bis est retiré.

Monsieur Sautarel, l’amendement n° 534 rectifié sexies est-il maintenu ?

M. Stéphane Sautarel. Je le retire également, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 534 rectifié sexies est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 395 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 396 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 946 et 555 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 947.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 556, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 46

Compléter cet alinéa par les mots :

et notamment la méthode de détermination des coefficients mentionné au 2° de l’article 412-27, qui tient compte, notamment, de la densité de haie dans le département, de la dynamique historique de destruction ou de progression du linéaire de haie et de la valeur écologique des haies détruites en fonction d’une typologie de haies définie par un arrêté des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture

II. – Alinéa 50

1° Première phrase

Remplacer les mots

Un coefficient

par les mots :

Des coefficients

2° Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Afin d’assurer une mise en œuvre rapide, efficace et équitable du dispositif de protection et de gestion durable des haies, la méthode de calcul du coefficient de compensation doit être définie à l’échelle nationale.

L’autorité compétente dans le département disposera ainsi d’un cadre méthodologique unique pour déterminer, en collaboration avec les parties prenantes, les coefficients applicables à son territoire.

Nous souhaitons également préciser qu’il existe plusieurs coefficients par département, notamment pour tenir compte de la typologie des haies et de la valeur écologique de ces dernières.

M. le rapporteur ne peut qu’approuver une telle démarche de territorialisation ; la méthode sera simplement définie à l’échelle nationale pour aider au mieux les territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La territorialisation est le contraire du jacobinisme… Une méthode imposée à l’échelle nationale ne laisserait que très peu de marges de manœuvre à nos territoires. Or ces derniers doivent garder le pouvoir de décider.

La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Bien sûr, le guichet doit être unique, mais l’adaptation aux territoires constitue la base de cette réglementation.

Chaque région étant singulière, notamment du fait de son climat, il est très important de conserver une telle souplesse, gage d’adaptation territoriale.

Le Gouvernement émet à son tour un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 556.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 513 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mme Billon, MM. Menonville, Bonneau et Pillefer, Mme de La Provôté, MM. Duffourg, Laugier et S. Demilly, Mme Saint-Pé, MM. Kern et J.M. Arnaud, Mmes Romagny et Jacquemet, M. Courtial, Mme Perrot, M. Levi, Mme Canayer et MM. de Nicolaÿ, Bleunven, Khalifé et P. Vidal, est ainsi libellé :

Alinéa 47

Après le mot :

destruction

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

de haie pour assurer la sécurité des biens et des personnes, ainsi que l’intégrité des réseaux et des infrastructures de transport, pour assurer une obligation légale ou réglementaire ou en cas d’urgence.

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Le nouveau régime de protection et de mise en œuvre des plans de gestion durable des haies, créé par l’article 14 du présent texte, est censé s’appliquer aux haies situées sur les emprises des infrastructures linéaires et qui n’engagent pas leur gabarit de sécurité.

Les gestionnaires d’infrastructures linéaires sont déjà engagés dans une dynamique d’entretien durable. Ils s’efforcent, ce faisant, de préserver un important patrimoine végétal, maintenant un peuplement favorable à la biodiversité.

L’alinéa 13 du présent article renforce d’ailleurs cette dynamique en imposant aux gestionnaires d’infrastructures linéaires de mettre en œuvre un plan d’action pour atteindre l’objectif de gestion durable des haies.

Pour notre part, nous estimons que les haies présentant des risques pour la sécurité et la continuité des services d’infrastructures linéaires ne sauraient être soumises au régime de protection et de gestion durable.

Il convient de préserver le strict gabarit nécessaire à la circulation et à la sécurité desdites infrastructures : nombre d’événements climatiques, comme les tempêtes, entraînent une augmentation sensible du nombre de chutes d’arbres, multipliant ainsi les accidents.

M. le président. Le sous-amendement n° 948, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 5

I. – Remplacer les mots :

des biens et personnes

par les mots :

publique

II. – Après le mot :

que

insérer les mots :

, en cas d’urgence,

III. – Remplacer la seconde occurrence du signe :

,

par le mot :

ou

et remplacer les mots :

ou en cas d’urgence

par les mots :

, dans le respect de l’article 16 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Monsieur Longeot, nous sommes très favorables à votre amendement : c’est précisément pourquoi nous souhaitons en accroître encore la portée.

À cette fin, nous vous proposons de remplacer la mention de l’urgence par celle de la sécurité publique. En effet, le préventif nous semble préférable au curatif. En procédant ainsi, l’on élargira les possibilités de destruction dans certains cas bien particuliers.

M. le président. L’amendement n° 851, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 47

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que l’intégrité des réseaux

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à préciser que la destruction d’une haie est possible en cas d’urgence pour assurer la sécurité, l’intégrité des personnes et des biens, ainsi que l’intégrité des réseaux.

D’autres rédactions ont été proposées, mais, à mon sens, cette formulation est la plus englobante. C’est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de l’amendement n° 513 rectifié bis et du sous-amendement n° 948 au profit de l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’intégrité des réseaux est aussi mentionnée par l’amendement de M. Longeot ; si l’on y ajoute encore le motif de sécurité publique, comme le suggère la commission, ces dispositions nous semblent bien meilleures que celles qui ont été proposées par le Gouvernement.

En conséquence, la commission est défavorable à l’amendement n° 851.

M. le président. Le Gouvernement a déjà donné son avis.

La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

M. Jean-François Longeot. Je me rallie à la position de M. le rapporteur !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 948.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 513 rectifié bis, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 851 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 397 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 47

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

… Les modalités de contrôle, de vérification et de suivi des destructions et des mesures compensatoires des demandes de destruction de haies.

La parole est à M. Lucien Stanzione.

M. Lucien Stanzione. Cet amendement vise à préciser le contenu du futur décret en Conseil d’État qui déterminera les conditions d’application de l’article 14.

Dans sa version actuelle, ce décret définit « les conditions dans lesquelles la destruction d’une haie fait l’objet [de] mesures de compensation ». Par cet amendement, nous proposons que celui-ci prévoie également les modalités de contrôle, de vérification et de suivi des destructions de haies, ainsi que les mesures compensatoires à mettre en œuvre.

Pour s’assurer du bon respect de l’application de la loi et se donner les moyens d’atteindre l’objectif de replanter 50 000 kilomètres de haies d’ici à 2030, il semble en effet indispensable de disposer d’outils de suivi et de contrôle de ce type.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 397 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 579, présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 48

Après le mot :

haie,

Insérer les mots :

sur les us et coutumes réputés usuels dans le département,

II. – Alinéa 51

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Par cet amendement, nous proposons de simplifier la prise en compte des us et coutumes dans la rédaction de l’arrêté établissant, pour le département, les dates de taille des haies et les coefficients de compensation.

Les us et coutumes font référence à des documents complexes, publiés il y a parfois une centaine d’années, et qui n’ont pas nécessairement été mis à jour. Aussi, les prendre en considération paraît aussi peu utile qu’opérationnel, a fortiori si l’autorité départementale doit en extraire une liste exhaustive destinée à être appliquée par les agriculteurs.

Si les us et coutumes d’un département devaient être retenus dans la rédaction de cet arrêté, il serait préférable qu’ils soient considérés, en amont de la définition de celui-ci, comme un élément de contexte, au même titre que d’autres données, telles que la typologie et le linéaire des haies dans le département ou les données climatiques et environnementales.

Le présent amendement tend donc à simplifier la mise en œuvre du guichet unique. Les us et coutumes départementaux seraient simplement consultés au moment de la fixation du coefficient de compensation et de la période d’interdiction de la taille des haies. Cela éviterait également aux gestionnaires de haies d’avoir à s’y conformer pour respecter le principe de gestion durable.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 408 rectifié ter est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 558 est présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 51

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 408 rectifié ter.

M. Christian Redon-Sarrazy. Cet amendement vise à supprimer la référence aux us et coutumes relatifs aux haies.

Cette mention ne nous paraît pas pertinente. En effet, concernant les haies, les coutumes et usages locaux font référence à des pratiques anciennes, qui n’ont jamais été révisées.

Par ailleurs, dans sa rédaction actuelle, le texte prévoit que la liste de ces us et coutumes doit répondre à une obligation de gestion durable des haies, ce qui représenterait une nouvelle contrainte pour les agriculteurs en termes de pratiques.

La disparité des us et coutumes en fonction des départements et la caducité d’une grande partie d’entre eux ne sauraient que complexifier la lecture et l’interprétation faite par les gestionnaires de leurs droits et obligations en matière de gestion des haies.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 558.

M. Daniel Salmon. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 856, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 51

Remplacer les mots :

us et coutumes réputés

par les mots :

pratiques locales usuelles présumées

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à remplacer la notion d’« us et coutumes » par celle de « pratiques locales usuelles ». Cette formulation me paraît plus conforme au droit que celle qui a été retenue dans la version actuelle du projet de loi.

M. le président. L’amendement n° 949, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 51

Après le mot :

département,

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

à la notion de travaux d’entretien usuels de la haie.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que les us et coutumes établis par arrêté sont réputés répondre « à la notion de travaux d’entretien usuels de la haie », et non aux « obligations de gestion durable ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 579, 408 rectifié ter et 558, qui tendent à supprimer purement et simplement la référence aux us et coutumes.

En effet, notre interprétation est opposée à celle des auteurs de ces amendements : c’est bien parce que ces us et coutumes ont existé que les haies sont toujours là. Sans cela, elles auraient disparu depuis longtemps déjà !

Vous aurez beau dire que les us et coutumes appartiennent au passé, la réalité, c’est que les haies n’ont pas disparu. Reconnaissons aussi que les agriculteurs n’ont pas toujours détruit les haies : par respect des us et coutumes, ils ont conservé beaucoup d’éléments du paysage, et en particulier les haies.

La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 856 du Gouvernement, qui vise à remplacer l’expression d’« us et coutumes », dont le caractère quelque peu désuet ne reflète pas correctement la portée, par celle de « pratiques locales usuelles ». L’adoption de cet amendement permettrait en outre de satisfaire les auteurs de l’amendement n° 579.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. J’invite les auteurs des amendements nos 579, 408 rectifié ter et 558 à les retirer au profit de l’amendement n° 856 du Gouvernement.

En effet, si je les rejoins sur la nécessité de prendre en compte les usages locaux dans la mise en œuvre de la réglementation, la notion d’« us et coutumes » a une définition juridique bien précise qui n’est pas pertinente dans le cadre de ce projet de loi.

Par ailleurs, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 949.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 579.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 408 rectifié ter et 558.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 856.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 949.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 535 rectifié quater, présenté par MM. Favreau, Sautarel et Brisson, Mme Dumont, M. Bouchet, Mme Belrhiti, M. Klinger, Mme Josende, MM. Chevrollier, de Legge, Burgoa et Panunzi, Mme P. Martin, MM. Khalifé, Belin et H. Leroy, Mmes Canayer et Bellurot et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Après le mot :

avis

insérer le mot :

conforme

La parole est à M. Stéphane Sautarel.

M. Stéphane Sautarel. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

M. le président. L’amendement n° 535 rectifié quater est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 392 rectifié ter est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 557 est présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 48

Remplacer les mots :

des organisations représentatives agricoles et des associations représentatives d’élus locaux,

par les mots :

des acteurs concernés et notamment des organisations représentatives agricoles, des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, des organisations professionnelles concernées et des associations de protection de l’environnement agréées,

La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l’amendement n° 392 rectifié ter.

Mme Marion Canalès. Cet amendement vise à préciser la disposition prévoyant que, dans chaque département, l’autorité administrative compétente prend un arrêté établissant une période d’interdiction de travaux sur les haies et un coefficient de compensation en cas de destruction.

Cet arrêté doit être pris après avis des organisations représentatives agricoles et des associations représentatives d’élus locaux.

Au vu de l’importance de ce futur arrêté, nous estimons nécessaire d’inclure dans les instances consultées les organisations professionnelles concernées et les associations de protection de l’environnement agréées, qui sont également qualifiées pour émettre un avis.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 557.

M. Daniel Salmon. Bien que cet amendement soit identique à celui qui vient d’être défendu, je tiens à le présenter, car il faut savoir prendre son temps !

Il est en effet nécessaire d’associer toutes les parties prenantes à la définition de l’arrêté. Les associations environnementales et les organisations professionnelles de la haie en particulier contribueront à fixer des périodes d’interdiction de la taille des haies et des coefficients de compensation justes, adaptés au contexte local et reposant sur des connaissances techniques et scientifiques.

La contribution des associations environnementales est indispensable, même si je sais d’avance que l’idée que celles-ci s’occupent de ce qui se passe sur les terres des agriculteurs ne plaira pas beaucoup. Après tout, il est question ici de 27 millions d’hectares, soit la moitié de la surface de notre pays : cet ordre de grandeur justifie que toutes les parties prenantes s’en préoccupent. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Cuypers. Il s’agit de terrains privés !

M. le président. L’amendement n° 852, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Remplacer les mots :

des organisations représentatives agricoles et des associations représentatives d’élus locaux

par les mots :

de la commission mentionnée à l’article L. 341-16

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement propose de renvoyer à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) le soin de rendre un avis sur le projet d’arrêté préfectoral définissant les périodes d’interdiction de travaux sur les haies, les coefficients de compensation et les pratiques usuelles locales.

Cette commission a le mérite d’exister. En y recourant, nous éviterions de multiplier les « comitologies » parallèles.

En outre, la composition de la CDNPS est équilibrée. Elle pourrait rendre ce type d’avis en mobilisant des compétences diverses, telles que celles des représentants de l’État, des élus locaux, des agriculteurs, ainsi que des associations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission qui sera chargée de définir les pratiques locales usuelles doit compter parmi ses membres tous les acteurs concernés par la haie, sa gestion et son entretien – autrement dit, tous les propriétaires de haies, qu’il s’agisse de fermiers, d’agriculteurs exploitants ou propriétaires, ou de gestionnaires d’infrastructures comme EDF ou la SNCF. Il ne me semble pas nécessaire d’élargir à outrance la composition de cette commission pour y laisser s’y exprimer des avis divers et variés.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements en discussion commune.

M. Laurent Burgoa. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 392 rectifié ter et 557.

Le rapporteur voudrait que ne soient décisionnaires que les principaux intéressés. Or la CDNPS a, je le répète, le mérite d’exister : ainsi, elle se réunit et produit des avis.

En outre, elle se compose à la fois d’agriculteurs, de représentants de l’État et d’associations environnementales. À mon sens, il serait préférable d’associer l’ensemble de ces acteurs à la prise de décision, qui plus est au sein de cette commission, plutôt que de les tenir à l’écart.

M. Olivier Rietmann. Mais ce sont ceux-là mêmes qui vont attaquer les décisions !

Mme Annie Genevard, ministre. Opposer systématiquement agriculture et environnement ne peut que nous conduire à l’impasse. Il vaut mieux encourager le dialogue entre les différentes instances. Une telle mesure serait de nature à sortir d’un clivage quelque peu hystérique, reconnaissons-le, entre environnement et agriculture sur cette question de la haie.

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. J’entends bien les propos du rapporteur.

Cependant, la proposition de loi en faveur de la préservation et reconquête de la haie, récemment adoptée par notre assemblée, prévoit que le plan national d’actions est doté d’une instance de concertation et de suivi qui comprend notamment des représentants des filières et des organisations professionnelles ainsi que des associations nationales de protection de l’environnement.

Dans la mesure où ce texte prévoit qu’un vaste collectif participe à la concertation, pourquoi ne pas pousser la logique jusqu’au bout et intégrer ces acteurs aux commissions décisionnaires ? Cela me paraît tout à fait légitime.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. J’exprime mon soutien total au rapporteur sur ce sujet.

Nous sommes dans le délire collectif ! On va bientôt demander à n’importe quelle commission de donner son avis sur tout et n’importe quoi… Tant qu’on y est, madame la ministre, faisons de même pour la gestion de la forêt privée, l’assolement de nos fermes, et tout un tas de sujets !

Nous cédons à une forme d’inquisition généralisée, sous prétexte d’une bien-pensance qui finit par confiner au ridicule.

M. Jean-François Longeot. Ça, c’est dit !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 392 rectifié ter et 557.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 852.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 853 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Après le mot :

locaux,

insérer les mots :

ainsi que des représentants des gestionnaires d’infrastructures de réseaux,

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Il serait bon que les représentants des gestionnaires d’infrastructures et de réseaux soient également consultés par l’autorité administrative chargée d’établir l’arrêté. Ces acteurs sont en effet éminemment concernés par la question des haies qui bordent leur linéaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement, mais en penchant tout de même vers un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Si cet amendement est adopté, la logique voudrait que soient également consultées les associations foncières, qui représentent un linéaire de haies considérable au sein des territoires !

M. Clément Pernot. Tout à fait !

M. Daniel Gremillet. Je crains qu’ainsi, madame la ministre, nous commencions à dresser une liste à la Prévert à laquelle nous nous sommes refusés jusqu’à présent…

Mme Annie Genevard, ministre. Nous avons tout de même beaucoup parlé des réseaux !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 853 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 854, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 49

Supprimer les mots :

ou des zones concernées

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à supprimer les dispositions prévoyant de permettre à l’autorité administrative compétente de fixer au niveau infradépartemental les périodes d’interdiction de travaux sur les haies.

Seule la maille départementale nous semble adéquate. Il ne paraît nécessaire ni d’aller au-delà ni de multiplier les dates d’interdiction au sein d’un même département. Cela risquerait de créer une confusion en matière de règles applicables et de nuire aux objectifs de sécurisation des gestionnaires et propriétaires de haies et de simplification administrative.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La territorialisation implique de se tenir au plus près de la réalité des territoires. Dans un département comme le mien, où l’altitude des terrains varie de 150 à 1 700 mètres, les dates d’interdiction peuvent être totalement différentes.

Il est nécessaire de prendre en compte de tels critères. Et c’est pourquoi il faut laisser chaque département continuer à faire dans la dentelle. Ainsi, les Français n’auront plus le sentiment que certaines décisions qu’ils ne comprennent pas leur sont imposées d’en haut, ce qui les amène de plus en plus à rejeter les règles. (M. Daniel Salmon marque son approbation.) Je suis content de voir M. Salmon hocher la tête : il me donne l’impression de partager mes propos ! (Sourires.)

Revenons à la réalité du terrain et favorisons la territorialisation des décisions. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 854.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 855, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 50

1° Première phrase

Remplacer les mots :

Un coefficient

par les mots :

Les coefficients

2° Seconde phrase

a) Remplacer les mots :

Ce coefficient tient compte

par les mots :

Ces coefficients tiennent compte

b) Supprimer les mots :

dans le département

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à clarifier l’application du coefficient de compensation.

La définition de ce coefficient devra résulter du croisement de plusieurs critères, notamment la valeur écologique des haies détruites et le contexte du projet dans lequel s’inscrit la destruction.

Il n’est pas possible d’imposer un coefficient unique pour tous les projets dans un même département. Le Gouvernement propose de mettre le terme « coefficient » au pluriel, afin de conférer au texte la souplesse qu’appelait précisément de ses vœux le rapporteur dans l’avis qu’il a rendu sur l’amendement précédent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Madame la ministre, nous pourrions être d’accord, mais vous oubliez un léger détail, que j’ai pourtant rappelé au début de l’examen de cet article.

Il est nécessaire de prendre en compte l’évolution du département et des différentes zones entre 1950 et 2020.

Dans un département comme le mien, une simple photographie aérienne montre qu’il n’y avait presque aucune haie en 1950 quand il y en a aujourd’hui des dizaines de milliers de kilomètres. Dès lors, comment expliquer qu’un coefficient de 2 pourrait être appliqué pour tout mètre de haie arraché à Brioude, à 150 mètres d’altitude, tandis qu’un coefficient de 1 pourrait prévaloir dans une autre commune ?

Les agriculteurs le diront : notre territoire a vu croître un nombre colossal de haies. Alors, pourquoi la compensation exigée pour l’arrachage serait-elle différente d’un endroit à l’autre ? Cela défierait le bon sens !

Les dates d’entretien doivent s’appuyer sur la réalité du terrain, et être définies en fonction de chaque territoire, secteur par secteur, l’altitude étant à l’origine de différences importantes.

En revanche, il est logique qu’un même coefficient de compensation s’applique en cas de destruction des haies sur un territoire où elles se sont multipliées de manière exponentielle ces dernières années – et cela sera facilement vérifiable, puisque l’autorité administrative fournira les moyens de le démontrer. À l’inverse, une compensation plus importante pourra être demandée sur un territoire où une forte régression des haies est avérée. Mais au moins, tous les agriculteurs seront traités de la même manière, car, entre 1950 et 2020, une tendance similaire aura marqué l’ensemble du territoire.

La commission est donc défavorable à l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 855.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 857, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 52, 54 et 62

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer la cartographie en ligne des protections législatives ou réglementaires applicables aux haies.

Disons-le franchement : la faisabilité technique même de cette cartographie n’est pas assurée. L’objectif est légitime, mais l’objectivation de la dynamique de la haie pose problème.

De plus, il faudrait embaucher en masse des agents chargés de réaliser cette cartographie.

Au demeurant, nous avons créé, à la demande des agriculteurs, un observatoire de la haie qui réalisera une cartographie de suivi, en s’appuyant sur les travaux de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et sur l’intelligence artificielle.

M. le président. L’amendement n° 951, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 54

Après la référence :

I

supprimer la fin de la phrase.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 857 ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Madame la ministre, EnvErgo a précisément été conçu pour cela : c’est un service de cartographie qui permet de refléter l’importance de la présence des haies sur le territoire.

Aujourd’hui, avec l’aide des photos satellite, il est très facile de connaître l’emplacement des haies – je vous invite de nouveau à consulter Géoportail. Il est inutile d’embaucher des milliers de fonctionnaires pour s’en rendre compte. Et avec l’intelligence artificielle, tout cela ira encore plus vite. EnvErgo devrait servir à cela !

Si l’on demande aux agriculteurs d’être aussi précis que possible dans l’entretien de leurs haies en fonction des réalités de leurs territoires, il faudra que l’administration se mette à niveau pour évaluer correctement la situation. Cette cartographie donnera à chaque agriculteur une vision très précise des différents travaux d’entretien à réaliser. Telle est la logique à suivre, me semble-t-il.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 951 ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Madame la ministre, sans cartographie, pas de compréhension ! Je suis donc entièrement d’accord avec le rapporteur.

Je vous rappelle l’existence d’un excellent système informatique, Telepac, qui, de surcroît, ne coûte rien ! Grâce à cette interface, il s’agira simplement de demander aux agriculteurs de dessiner leur linéaire de haies, comme ils dessinaient les contours de leurs champs en leur temps. Cela se fera tout seul !

Nous autres, braves paysans, n’aurons plus qu’à définir notre linéaire et à appuyer sur un bouton. Il suffira d’intégrer la réglementation qui en découle et, en un clic, quel que soit l’endroit où l’on se trouve en France, l’information sera disponible.

Si vous le souhaitez, je peux vous faire une démonstration des capacités exponentielles de Telepac : je le redis, c’est un logiciel dont dispose déjà le ministère et qui nous éviterait de créer une énième interface qui nous coûterait un pognon de dingue !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Anglars. Je partage les propos du rapporteur sur l’intérêt d’une cartographie.

Je rappelle que, pour régler cette problématique des haies, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable avait proposé d’engager la réflexion sur la base d’une analyse de la réalité de la situation dans chaque département, à l’aide des moyens modernes qui ont été décrits.

De tels logiciels permettront d’y voir plus clair, commune par commune, parmi la dizaine de réglementations existantes. L’amendement de la commission est essentiel en la matière : mettons-nous d’accord avec les paysans sur ce qu’est une haie ; une fois cela réglé, il n’y aura aucune difficulté à gérer le dispositif.

M. Laurent Burgoa. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 857.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 951.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 950, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 53

Supprimer cet alinéa

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Par cet amendement, nous proposons de supprimer l’information systématique des acquéreurs de parcelles à usage agricole.

Nous estimons en effet que cette procédure va devenir beaucoup trop lourde. Nous avons voté le principe d’une cartographie au travers du logiciel EnvErgo : nous pouvons donc alléger la démarche de déclaration des protections applicables aux haies.

C’est un autre avantage, si besoin était de le démontrer, d’un outil cartographique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. L’obligation d’informer l’acquéreur ou le preneur à bail de la présence de protections applicables aux haies lors de la mutation ou du changement des parties d’un bail rural n’est pas de nature à encourager la cession ou la mise à bail. C’est une contrainte supplémentaire dans l’acte de transmission.

Par conséquent, le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 950.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 398 rectifié ter, présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

… – Au plus tard trois ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le nouveau régime applicable aux haies. Il dresse un bilan de la mise en œuvre du I. du présent article et fait notamment état des contrôles et des sanctions prononcées en cas de non-respect.

La parole est à M. Sebastien Pla.

M. Sebastien Pla. Cet amendement vise à compléter l’article 14, afin d’assurer un suivi de l’application de la loi et du nouveau régime applicable à la haie.

Nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur sa mise en œuvre dans les trois ans suivant sa promulgation. Ce rapport permettrait d’évaluer le bon respect de la loi et des sanctions éventuellement prononcées.

Nous sommes très attachés au bon suivi de l’application des lois. Nous estimons qu’au vu des objectifs fixés en matière de gestion durable des haies le Parlement doit bénéficier d’un suivi précis, afin d’adapter le régime si celui-ci ne se révélait pas efficace ou dissuasif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 398 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Je tiens vraiment à remercier Marc Fesneau pour ce moment… J’espère que nous n’avons pas créé un monstre, mais je n’en suis pas certain.

Je pense aux agriculteurs : mon groupe s’abstiendra sur cet article, afin de ne pas en rajouter.

M. le président. Je mets aux voix l’article 14, modifié.

(Larticle 14 est adopté.)

Article 14
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 14 bis

Après l’article 14

M. le président. L’amendement n° 532 rectifié, présenté par MM. Buis, Salmon, Cadec, Bouchet, Gremillet et Fialaire, Mme Aeschlimann, MM. Cabanel, Pellevat et M. Weber, Mmes Saint-Pé et Belrhiti, MM. Lahellec, Gay, Stanzione, Tissot, Gontard, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, MM. Patriat et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 1 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « préservation », sont insérés les mots : « , de la gestion durable » ;

b) Sont ajoutés les mots : « , afin de tendre, à compter du 1er janvier 2030, par rapport au 1er janvier 2024, à une augmentation nette du linéaire de haies de 50 000 kilomètres, à un linéaire de haies en gestion durable, au sens de l’article L. 611-9, de 100 000 kilomètres, et à compter du 1er janvier 2048, à un linéaire de haies de 500 000 kilomètres, géré durablement, sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin » ;

c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Il veille à la promotion de la valorisation économique des haies gérées durablement. » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 4 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les documents de programmation stratégique nationale prévus par le droit de l’Union européenne et élaborés en vue de la mise en œuvre de la politique agricole commune sont compatibles et contribuent à tendre aux objectifs prévus par la stratégie définie à l’article L. 126-6 du présent code. » ;

3° Le chapitre VI du titre II du livre Ier est complété par une section ainsi rédigée :

« Section…

« Stratégie nationale pour la gestion durable et la reconquête de la haie

« Art. L. 126-6. – I. – Une stratégie nationale pour la gestion durable et la reconquête de la haie définit les orientations à suivre pour conduire la politique de gestion et de développement durables du linéaire de haies sur le territoire.

« Cette stratégie définit une trajectoire chiffrée et un plan national d’actions afin de tendre aux objectifs mentionnés à l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 1.

« Le plan national d’actions définit des objectifs chiffrés en termes de plantations et des mesures en faveur du développement de la reconstitution de haies par régénération naturelle.

« Il définit également les mesures permettant d’atteindre une mobilisation, en 2030, de 500 000 tonnes de matière sèche par an issues de haies gérées durablement au sens de l’article L. 611-9, et d’atteindre en 2050, sur le total de la biomasse mobilisée issue de haies, 70 % de matière sèche issue de haies gérées durablement au sens de ce même article L. 611-9, en articulation avec la stratégie mentionnée à l’article L. 211-8 du code de l’énergie.

« Il établit un inventaire des pratiques de gestion des haies favorisant leur bon état écologique ainsi que la liste des financements publics et des mesures destinés à la recherche, à la formation et au soutien des acteurs publics et privés, en particulier des exploitations agricoles, en vue d’atteindre les objectifs mentionnés au présent I et notamment le développement de la gestion durable des haies au sens de l’article L. 611-9 du présent code.

« Le plan national d’actions est doté d’une instance de concertation et de suivi. Cette instance comprend notamment des représentants des filières et des organisations professionnelles concernées, des organismes publics intéressés, des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, des associations nationales de protection de l’environnement agréées, l’ensemble des organisations syndicales représentatives, des organismes nationaux à vocation agricole et rurale au sens des articles L. 820-2 et L. 820-3, des organismes de formation et de recherche compétents et des associations nationales de défense des consommateurs agréées. Elle est présidée par les ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement.

« Cette stratégie est actualisée au moins tous les six ans.

« II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la stratégie définie au I, ainsi que la composition de l’instance de concertation et de suivi du plan national d’actions du même I.

« III. – Le plan national d’actions mentionné au I s’appuie sur un observatoire de la haie qui permet de collecter des données quantitatives et qualitatives pour suivre et évaluer les politiques publiques déployées sur le territoire national et rend disponible gratuitement, au format numérique, une agrégation et un suivi, jusqu’à l’échelle de la commune, des données de cartographie des haies et de leur implantation, du déploiement de la gestion durable des haies, au sens de l’article L. 611-9, et de mobilisation de la biomasse issue de cette gestion durable. » ;

4° Le chapitre Ier du titre Ier du livre VI est complété par un article L. 611-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 611-9. – I. – Les gestionnaires de haies peuvent faire l’objet d’une certification garantissant la gestion durable des haies sur la totalité de l’exploitation.

« Cette certification garantit des pratiques de gestion des haies permettant leur pérennité, un niveau d’emprise au sol minimal, un niveau élevé de services écosystémiques rendus par chaque type de haie au moyen de pratiques de coupe et de mise en défens garantissant la reprise végétale de la haie, et d’itinéraires techniques assurant sa régénération, l’équilibre du prélèvement de biomasse, la protection de la biodiversité, et excluant les pratiques dégradantes.

« La certification permet d’atteindre le bon état écologique de la haie, défini par des étages de végétation ou un potentiel de végétation continus, une emprise au sol de la haie, des fonctions écosystémiques permettant la régénération de la haie, une biodiversité riche, une protection contre le ruissellement et l’érosion des sols, un stockage du carbone et une production de biomasse renouvelable.

« La certification prévoit un cahier des charges national incluant des critères et prescriptions adaptés aux différents contextes pédoclimatiques.

« II. – Les distributeurs de bois peuvent faire l’objet d’une certification garantissant que le bois distribué est issu en totalité de haies certifiées au sens du I, avec une empreinte carbone et environnementale liée au transport limitée, un nombre d’intermédiaires réduit, une juste rémunération du gestionnaire de haie et une traçabilité complète sur l’origine du bois pour le consommateur final.

« III. – Les certifications publiques ou privées de gestion durable de la haie et de distribution durable de bois issu de haies gérées durablement qui satisfont les conditions énumérées au I et au II peuvent être reconnues, pour une durée renouvelable de six ans, par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement. »

II. – L’article L. 222-3-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « bois », sont insérés les mots : « , la stratégie nationale pour la gestion durable et la reconquête de la haie » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « En fonction de la biomasse issue de haies existant sur le territoire, ce schéma inclut, pour les chaufferies collectives dont les personnes morales publiques et privées sont chargées, des trajectoires chiffrées d’augmentation progressive d’approvisionnement en bois distribué durablement et issu de haies gérées durablement, faisant l’objet à ce titre d’une certification reconnue dans les conditions prévues au III de l’article L. 611-9 du code rural et de la pêche maritime. » ;

3° Après le mot : « biomasse », le troisième alinéa est complété par les mots : « et de l’observatoire de la haie ».

IV. – Le II est applicable lors de la prochaine révision du schéma régional biomasse dans les conditions prévues à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 222-3-1 du code de l’environnement.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement, cosigné par de nombreux collègues de cette assemblée, tend à introduire dans le présent projet de loi les dispositions de la proposition de loi en faveur de la gestion durable et de la reconquête de la haie de notre collègue Daniel Salmon.

Cette proposition de loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat la semaine dernière, repose sur une certification garantie par l’État pour valoriser la gestion durable des haies, développer les objectifs de valorisation énergétique du bois bocager et instituer une stratégie en faveur de la reconquête de la haie, afin de donner une assise législative au pacte en faveur de la haie, présenté fin 2023.

Malgré l’absence regrettable, dans le texte issu de la commission mixte paritaire, du crédit d’impôt initialement prévu par le texte et voté par notre assemblée, qui aurait introduit une véritable logique incitative, le travail de compromis réalisé en commission comme en séance publique a permis de mettre en place un cadre clair et simplifié pour nos haies.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à émettre le même vote que la semaine dernière. Nous reviendrons sur ce crédit d’impôt lors de l’examen d’un éventuel projet de loi de finances rectificative ou du projet de loi de finances pour 2026.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je rappelle que cette proposition de loi « marche sur deux jambes », pour reprendre les termes employés par Daniel Salmon lui-même en commission.

D’un côté, elle vise à instaurer une labellisation et une certification de gestion durable des haies, que nous appelons tous de nos vœux, pour peu que cette démarche soit facultative et optionnelle. De l’autre, l’objectif est d’agir en faveur d’une reconnaissance du travail des agriculteurs qui s’engagent dans cette voie, via un crédit d’impôt dédié.

Par conséquent, je ne vous cache pas que je ressens une certaine frustration : nous nous apprêtons à sautiller sur une jambe, alors que nous souhaitions marcher sur les deux.

Je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement, mais il conviendrait, madame la ministre, que le vote de ce dispositif soit suivi d’un engagement du Gouvernement à tout mettre en œuvre pour que, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026, nous parvenions enfin à donner une véritable portée à ce texte, dans l’intérêt de la gestion durable des haies. (M. Daniel Salmon approuve.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Les semaines se suivent et ne se ressemblent pas au Sénat !

La semaine dernière, monsieur Salmon, vous êtes parvenu à faire adopter à l’unanimité un texte magnifiant la haie et exaltant sa défense ; aujourd’hui, a contrario, nous avons assisté à plusieurs reprises à une remise en cause de la réglementation visant à protéger la haie par un guichet unique. Mais passons…

Nous regardons avec intérêt la requête de M. le sénateur Buis. Ce projet de loi d’orientation agricole offre l’occasion d’intégrer le résultat des travaux que vous avez réalisés sur la haie, puisque cet article 14 aborde spécifiquement le sujet. Sur le principe, j’y suis favorable, car cela me semble cohérent.

Cependant, cette cohérence achoppe sur un point : si nous introduisons la proposition de loi en l’état, exception faite du crédit d’impôt, nous risquons de nous retrouver dans une impasse juridique, car nous serons à cheval sur deux codes, le code de l’environnement et le code rural et de la pêche maritime.

Éparpiller les règles relatives à la gestion de la haie entre deux codes n’est pas chose aisée et ne participe ni à la simplification ni à l’intelligibilité de la loi.

C’est du reste pourquoi nous avions déposé des sous-amendements visant à harmoniser ces dispositions : ils vous auraient satisfaits tout en répondant aux attentes de l’auteur de l’amendement. Malheureusement, ceux-ci ont été jugés irrecevables, et l’écueil demeure.

Par conséquent, je m’en remets, tout comme la commission, à la sagesse de la Haute Assemblée, un avis qui appelle néanmoins une harmonisation des codes, faute de quoi nous porterions véritablement préjudice à un objectif assez largement partagé.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je serai bref, car les enjeux ont été très bien explicités à la fois par mon collègue Bernard Buis et par le rapporteur.

La proposition de loi en faveur de la préservation et de la reconquête de la haie a effectivement fait l’objet d’un important travail transpartisan au Sénat, qui a permis d’aboutir à une adoption à l’unanimité. Cependant, j’éprouve moi aussi de la frustration concernant le crédit d’impôt, qui avait également été voté à l’unanimité, mais qui n’a pas survécu à la commission mixte paritaire. Il s’agit d’un élément essentiel de ce texte, mais ce que nous votons aujourd’hui l’est tout autant.

L’autre jambe, dont nous n’avons pas beaucoup parlé, est celle de la biomasse et de la production.

Vous souscrivez tous ici à la nécessité que l’agriculture soit productrice. La haie participe de cette production et y a toujours contribué par le passé – c’était même là un élément central du monde rural.

À mon sens, elle doit retrouver cette vocation, mais dans le cadre d’une gestion durable, telle qu’elle est mise en exergue dans ma proposition de loi, et d’une trajectoire visant à offrir un exutoire au bois issu d’une telle démarche de préservation.

De nombreuses collectivités ont ainsi mis en place des chaufferies au bois et s’interrogent sur leur approvisionnement futur. Actuellement, nous y parvenons avec du bois issu de la forêt, mais cette dernière est en mauvais état. Il importe donc d’assurer un approvisionnement, que la haie, gérée de manière durable, me semble à même de garantir, tout en assurant une diversification des revenus des agriculteurs.

Cette proposition de loi se veut incitative. C’est ainsi qu’elle a été conçue, parce que je sais pertinemment que les réglementations et les interdictions ne rencontrent pas ici un franc succès. Je m’inscris donc pleinement dans cette logique.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il y a quelques jours, nous avons effectivement adopté à l’unanimité la proposition de loi que l’amendement de Bernard Buis vise à introduire dans ce texte.

Mme la ministre a précisé que, sur le fond, elle partageait cette ambition, mais qu’un travail restait néanmoins à mener pour ne pas compliquer les choses entre les deux codes concernés.

Fort opportunément, une commission mixte paritaire se tiendra dans quelques jours. À défaut de l’examen des sous-amendements que le Gouvernement avait déposés, celle-ci offrira l’occasion, me semble-t-il, de régler définitivement ce problème.

La belle unanimité qui était la nôtre il y a quelques jours doit trouver une traduction législative ce soir. Deux avis de sagesse ont été exprimés, une sagesse « au carré » en quelque sorte. Voilà qui doit nous conduire à l’adoption de cet amendement, que je voterai résolument.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 532 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

L’amendement n° 580 rectifié, présenté par MM. Bilhac, Daubet, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve et MM. Laouedj, Masset et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Toute parcelle ou unité foncière d’un seul tenant d’une superficie supérieure à 8 hectares doit être partagée par une ou plusieurs haies, délimitant des parcelles inférieures à 5 hectares.

La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Nous sommes tous d’accord, me semble-t-il, pour considérer que la haie participe à l’équilibre naturel des espaces agricoles et que nous avons perdu trop de kilomètres de linéaire de haie dans les années passées. Pourtant, c’était nécessaire : il fallait remembrer et s’adapter à l’agriculture mécanisée ; on ne pouvait pas continuer à cultiver des parcelles de cinq, dix ou cinquante ares.

Aujourd’hui, on veut réimplanter la haie. Pour ma part, je suis propriétaire d’un hectare de vigne, réparti en cinq parcelles – cela fait une moyenne de vingt ares par parcelle, mais certaines d’entre elles font dix ares quand d’autres en font vingt-cinq. Comment voulez-vous que je maintienne des haies sur de telles surfaces ? Ce n’est pas possible ! D’autant que ma vigne se trouve en pleine garrigue, un milieu totalement naturel et riche en biodiversité.

En revanche, lorsque je survole le bassin parisien – pardonnez-moi, mes chers collègues, il m’arrive de prendre l’avion pour venir ici – et que je vois des parcelles de cinquante, cent ou cent cinquante hectares sans la moindre haie de séparation, je me dis qu’il y a là matière à réflexion. Il faudrait, en accord avec la profession, fixer une surface minimum de parcelle agricole, mécanisable et exploitable, séparée par une haie, afin de réconcilier biodiversité et agriculture.

Il s’agit d’un amendement d’appel. J’ai certes cru comprendre que la commission y était défavorable, mais je vous demande tout de même, monsieur le rapporteur, d’y réfléchir.

Oui aux haies, mais certaines parcelles sont trop petites pour qu’on les maintienne, tandis que d’autres sont trop grandes pour qu’il n’y en ait pas !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Si je vous comprends bien, monsieur le sénateur, vous voulez que toutes les parcelles d’une surface d’au moins huit hectares soient délimitées par des haies. Cela signifie qu’il faudrait planter des kilomètres de haies pour rediviser les parcelles de cent hectares que vous apercevez en avion et en faire des parcelles de huit hectares, n’est-ce pas ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je trouve que c’est un peu excessif et je ne pense pas que cela s’inscrive véritablement dans la logique de notre démarche.

Traiter le problème des haies en bordure de parcelle constituerait déjà une forme d’ouverture. Je trouve qu’il est préférable de légiférer ainsi plutôt que de créer une obligation de morceler les parcelles, après les avoir agrandies.

Il serait plus raisonnable, à mon sens, de commencer par planter en bordure de parcelle que d’essayer de planter au beau milieu. Ainsi, nous regagnerions tout de même beaucoup de linéaire par la plantation de kilomètres de haies.

La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Bilhac, l’amendement n° 580 rectifié est-il maintenu ?

M. Christian Bilhac. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 580 rectifié est retiré.

L’amendement n° 442 rectifié ter, présenté par MM. Montaugé et Tissot, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Kanner, Mmes Bélim, Bonnefoy et Espagnac, MM. Jacquin et Kerrouche, Mme Monier, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Lurel, Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les externalités positives de l’agriculture sont scientifiquement définies et donnent lieu à des dispositifs de reconnaissance spécifiques permettant de conforter le développement de l’agroécologie.

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Notre rapporteur, Laurent Duplomb, cite souvent la morale de la fable : « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. »

Je vous présente donc de nouveau, mes chers collègues, un amendement d’appel qui vise à promouvoir les paiements pour services environnementaux.

L’agriculture française, dans la variété de ses terroirs et des techniques employées, contribue à répondre aux besoins divers de la société. Au-delà de sa fonction nourricière première, elle produit des externalités qui affectent positivement l’environnement, les paysages et la biodiversité, tout en permettant à tous les Français de profiter d’espaces valorisés et protégés ou d’y vivre.

Ces effets positifs relèvent de l’intérêt général de la Nation et, à ce titre, doivent être scientifiquement définis et portés à la connaissance du public.

Ce n’est qu’en marge du dispositif de l’amendement proprement dit que, du fait de l’article 40 de la Constitution, j’ajoute que ces externalités pourraient faire l’objet d’une valorisation au bénéfice des agriculteurs qui en sont à l’origine, dans le cadre du plan stratégique national de la politique agricole commune (PAC).

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je ne sais pas si c’est à mettre au compte de la patience et de la longueur de temps ou de la force et de la rage, mais la commission est défavorable à cet amendement ! (Sourires.)

Nous ne sommes pas hostiles à une reconnaissance des externalités positives de l’agriculture, car nous pourrions trouver des solutions en la matière, mais nous nous opposons à une définition globale : nous devons nous donner un peu plus de temps.

Nous en avons discuté ensemble, monsieur le sénateur Montaugé : les résultats des récentes élections aux chambres d’agriculture montrent qu’il y a matière à travailler ensemble sur ce point, pour aider les territoires auxquels vous faites allusion à travers cette définition.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à établir le principe de la reconnaissance des services environnementaux rendus par l’agriculture, afin de conforter le développement de l’agroécologie.

Des outils permettent déjà la rémunération des services environnementaux et l’accompagnement des transitions opérées par les exploitations agricoles. J’ai à l’esprit les écorégimes, les aides à la conversion à l’agriculture biologique, ou les mesures agroenvironnementales et climatiques (Maec).

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Je partage avec M. Montaugé et de nombreux autres collègues le sentiment qu’il est nécessaire de mener une réflexion sur les paiements pour services environnementaux. Je me réjouis d’entendre le rapporteur s’inscrire dans cette démarche. Il est absolument crucial que nous avancions sur ce sujet.

Au-delà de ce qui est proposé à travers la PAC avec les Maec, et au-delà de ce qui est envisagé avec certains paiements pour services environnementaux liés à la gestion de l’eau, il convient d’engager une réflexion plus globale sur les apports potentiels de ces services, notamment en ce qui concerne les paysages.

Je suis élu d’un département dans lequel les étés sont très chauds et les incendies fréquents, où les vignes constituent de véritables coupe-feux naturels et rendent ainsi un service précieux à la société en contribuant à lutter contre la propagation des flammes. À cela s’ajoute toute la problématique liée à la prévention des inondations.

Toutes ces questions méritent d’être considérées au niveau territorial, mais il est impératif d’engager un véritable travail de fond sur le sujet.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. L’activité agricole couvre la moitié de la surface de notre pays et rend effectivement de multiples services, dont le premier est de nous nourrir.

Pour y parvenir, l’agriculture doit être en adéquation avec l’environnement, car il s’agit d’un véritable écosystème. Lorsque des politiques et des modèles agricoles produisent de nombreux services environnementaux, il est légitime que ceux-ci soient reconnus. Les paiements pour services environnementaux constituent l’une des formes de cette reconnaissance, en contrepartie des efforts consentis et de la contribution apportée à la stabilité du climat.

Je ne m’attarderai pas sur tous les avantages de la haie, mais elle permet notamment de stocker le carbone, et, donc, de limiter le réchauffement climatique. C’est précisément pour cette raison qu’il faut préserver l’existant, avant d’envisager la reconquête et la replantation des haies.

La haie fait également partie intégrante de notre paysage, de notre histoire et de notre patrimoine. Gérard Lahellec évoquait ainsi les talus avec une certaine poésie dans la voix.

Il est nécessaire de réenchanter notre monde agricole, largement abîmé par des décennies d’intensification. Je suis convaincu qu’il est possible de concilier souveraineté alimentaire et préservation de l’environnement. Ces deux objectifs ne sont nullement antinomiques ; bien au contraire, l’un ne saurait aller sans l’autre.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. Les externalités positives de l’agriculture préexistaient à l’émergence de la notion d’agroécologie. Elles sont intrinsèquement liées à l’activité agricole depuis toujours et ne sont pas directement corrélées à la question de l’agroécologie et de son développement, même si leur prise en compte devra se renforcer dans le cadre d’un développement agroécologique de l’agriculture. J’en suis intimement convaincu.

Madame la ministre, je tiens à vous remercier de nous avoir donné, à Henri Cabanel et à moi-même, la possibilité d’échanger avec vos services. Ce fut un moment très intéressant.

J’espère, comme l’a envisagé M. le rapporteur, que nous pourrons cheminer ensemble pour trouver des solutions concrètes au service de l’agriculture, de notre pays et, surtout, des agriculteurs, notamment pour ce qui est de leur rémunération.

Je le répète ici : l’un des déterminants de la crise que traverse l’agriculture, que traduisent peut-être – rien n’est moins sûr – les résultats des dernières élections aux chambres d’agriculture, est la question du revenu et d’un revenu décent.

Les externalités positives constituent l’un des outils qui doit contribuer à l’instauration d’un revenu minimum agricole – notion qui, je l’espère, ne froissera personne – auquel ont droit tous les agriculteurs de France.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur, je tiens à vous remercier de votre magnifique plaidoyer à propos de ce que l’agriculture et les agriculteurs apportent à la France.

Vos propos contrastent avec la parole de tant d’autres, qui ne mesurent pas la contribution de l’agriculture à notre pays.

L’agriculture nous assure la souveraineté alimentaire, ou du moins devrait-elle nous l’assurer, comme le soulignait le sénateur Gremillet ; elle contribue également à l’entretien et à la beauté de nos paysages ; elle perpétue la grande tradition de l’élevage et nous offre de merveilleux produits. Elle est parmi les plus vertueuses, sinon la plus vertueuse du monde.

Il est important de le dire et de le rappeler, car nous devons nous opposer à cette pensée de plus en plus dominante qui incrimine les agriculteurs, ce que je trouve absolument détestable.

Il est intolérable que ceux qui travaillent aussi dur que les agriculteurs, de surcroît pour nous nourrir, fonction essentielle s’il en est, soient la cible de propos parfois insupportables.

Mme Annie Genevard, ministre. La question de la rémunération des externalités positives de l’agriculture recoupe celle du revenu, laquelle est essentielle, matricielle. Pour attirer davantage d’agriculteurs, il faut que ceux-ci soient assurés d’exercer un métier attrayant – c’est le cas des métiers du vivant –, mais qu’ils aient également l’assurance d’en tirer une juste rémunération.

Peut-être parviendrons-nous un jour à évaluer les externalités positives de l’agriculture, ce qui n’est pas chose aisée, vous en conviendrez.

M. Franck Montaugé. Il existe des études sur le sujet !

Mme Annie Genevard, ministre. À ce stade, nous pourrions commencer par nous intéresser au revenu lié à l’activité, c’est-à-dire d’abord à l’allégement des charges, qui y contribue, ainsi qu’aux rendements, qui impliquent un accès à la terre, à l’eau, aux moyens de traitement des cultures et de protection de l’élevage.

Enfin, il nous faut aborder la question du prix des produits de l’agriculture. C’est l’objet des lois Égalim, dont je ne prétends pas qu’elles soient parfaites. Elles ont toutefois mis en évidence un élément essentiel : la juste rémunération de la matière première agricole.

Quand nous aurons résolu ces trois problèmes – l’allégement des charges, la hausse des rendements et la juste rémunération –, je ne dis pas que la question de la valorisation des externalités positives sera secondaire, mais nous aurons déjà parcouru un sacré bout de chemin.

Merci encore de vos propos, monsieur le sénateur, ils font du bien ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 442 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 14
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 14 ter

Article 14 bis

À l’article L. 214-14 du code forestier, les mots : « et 4° » sont remplacés par les mots : « à 5° ».

M. le président. L’amendement n° 494 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, de Nicolaÿ, J.M. Arnaud, Brault et Levi, Mmes Billon et Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger et Fargeot, Mmes Gacquerre, Romagny et Jacquemet et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement tend à supprimer l’article 14 bis, au motif qu’il est satisfait par le droit existant.

Je suis très ennuyée, madame la ministre, car je sais que cet article vous tient à cœur, mais la Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) est également très préoccupée.

L’article 14 bis vise à autoriser le défrichement des forêts publiques dans des boisements spontanés de première génération, sans autorisation ni compensation. Je rappelle qu’en France 87 % des boisements sont en régénération naturelle et spontanée, et que seulement 13 % des surfaces forestières sont effectivement plantées.

Ce dispositif est contraire aux articles L. 214-13, L. 112-1 et L. 341-3 du code forestier, parmi d’autres, ainsi qu’à de nombreux articles du code rural et de la pêche maritime, qui ont pour objet de placer les forêts sous la protection de la Nation.

Le code forestier dispose ainsi que les bois ou forêts d’une collectivité locale, qu’ils relèvent ou non du régime forestier, ne peuvent faire l’objet d’aucun défrichement, sauf autorisation de l’autorité administrative compétente de l’État. Défricher est donc possible, après visa de l’État et élaboration d’un projet territorial.

Par ailleurs, de nombreuses dérogations répondent à l’objectif, bien légitime, de reconquête des espaces agricoles. L’article L. 341-2 du code forestier précise ainsi que « ne constituent pas un défrichement », et ne sont donc pas soumises à autorisation, « les opérations ayant pour but de remettre en valeur d’anciens terrains de culture, de pacage ou d’alpage envahis par une végétation spontanée ».

Cela concerne, me semble-t-il, les quelque 3,5 millions d’hectares de terres agricoles qui ne sont pas cultivés aujourd’hui. Cet article du code forestier, vous le remarquerez, ne fixe pas de limite d’âge des peuplements.

De surcroît, ce même article précise que « le défrichement destiné à la réouverture des espaces à vocation pastorale est autorisé après que le représentant de l’État dans le département a soumis, pour avis, le projet à la commission de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) ». Il s’agit donc de projets de territoire, étudiés avec les préfets et acceptés sous forme de réglementation des boisements par l’article L. 126-1 du code rural et de la pêche maritime ou d’aménagements fonciers par l’article L. 123-21 du même code.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Anne-Catherine Loisier. Nous sommes donc en présence d’une multitude de dispositifs, lesquels sont fort complexes, je le reconnais, et c’est pourquoi je vous invite, madame la ministre, à ne pas en rajouter.

En revanche, il conviendrait de les clarifier par voie de circulaire, afin que les agriculteurs puissent effectivement mettre en œuvre tous les instruments de reconquête agricole qui sont à leur disposition.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Comme vous le savez, madame la sénatrice, je travaille sur ce sujet depuis très longtemps, non pas à titre personnel, mais au sein de l’Association nationale des élus de la montagne (Anem), que j’ai eu l’honneur de présider.

Je tiens à préciser que ce dispositif ne concerne en effet que les territoires de montagne.

En montagne, nous assistons à la fermeture de certains espaces, car la nature a une propension à occuper le terrain. Cet amendement vise ainsi les bois et l’enfrichement naturel résultant de l’absence d’intervention humaine. Comme c’est le cas pour les haies, lorsque l’on ne contraint pas la nature, celle-ci se développe, et ce, au détriment des terres agricoles.

Mme Annie Genevard, ministre. L’objectif premier de cet article est de reconquérir de la surface agricole utile.

Cette démarche revêt une importance particulière en montagne, où l’activité matricielle est l’élevage extensif, car les exploitations recherchent de plus en plus l’autonomie fourragère et ont donc besoin de prairies, lesquelles, je le rappelle, sont d’aussi bons capteurs de carbone que les forêts.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Dans le département du Doubs, en un siècle, nous avons perdu 100 000 hectares de terres agricoles, dont 75 000 au profit de la forêt, qui a gagné du terrain partout et continue de le faire, et 25 000 au profit de l’urbanisation. Il ne s’agit donc pas d’empêcher la forêt de progresser, ce qu’elle fait considérablement dans notre pays.

M. Olivier Rietmann. C’est vrai !

Mme Annie Genevard, ministre. Cet article fait sortir les forêts publiques du régime de l’autorisation de défrichement, à l’instar de ce que nous avons déjà fait pour les forêts privées.

Cela n’obligera en rien les maires à défricher. De telles décisions resteront toujours à leur appréciation ; il n’est pas question de leur imposer le défrichement des accrus forestiers de moins de quarante ans, au motif que ceux-ci auraient empiété sur des terres agricoles. Le maire, l’élu, le conseil municipal resteront toujours maîtres de leur territoire et de son entretien.

Au risque de me répéter, il s’agit simplement d’étendre aux forêts publiques les dispositions récemment adoptées pour les forêts privées.

Je vous le rappelle, quand on défriche des terrains forestiers, on doit compenser ce défrichement par un reboisement au moins équivalent de terres agricoles ; en revanche, l’inverse n’est pas vrai. C’est une injustice profonde, fondamentale !

Mme Annie Genevard, ministre. Si nous n’arrivons pas à regagner de la surface agricole utile, nous ne progresserons pas en matière de souveraineté alimentaire.

Il ne s’agit pas de s’attaquer à la forêt. Il s’agit de circonscrire, en zone de montagne, les « enforestations » naturelles, ou, si vous préférez, la broussaille ayant poussé naturellement, qui n’est ni exploitée ni valorisée, alors que l’agriculteur, lui, pourrait la valoriser utilement.

C’est la raison d’être de cet article sur lequel nous avons travaillé avec les élus de la montagne, dans le cadre de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), et des élus de votre région, madame la sénatrice Loisier.

Cette mesure est vraiment attendue. Dans le cadre de visites de terrain avec des agriculteurs et les services de la direction départementale des territoires (DDT), j’ai pu réfléchir à la meilleure manière d’appliquer ces dispositions. Il s’agit ici d’une simplification et d’une harmonisation du code forestier (Mme Anne-Catherine Loisier le conteste.) : rien n’obligera un maire à défricher s’il ne le souhaite pas ; en revanche, s’il le souhaite, il en aura la possibilité légale. C’est tout de même intéressant.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. C’est clair !

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la ministre, je suis convaincue que rien n’obligera le maire à défricher une forêt publique, d’autant plus que le code forestier lui interdit de le faire.

Dans le fond, nous sommes complètement d’accord. Simplement, ce que vous venez d’évoquer est déjà autorisé par le code rural et de la pêche maritime et le code forestier.

J’y insiste, l’article L. 341-2 du code forestier précise que « ne constituent pas un défrichement », et ne sont donc pas soumises à autorisation, « les opérations ayant pour but de remettre en valeur » d’anciennes terres agricoles.

J’ajoute que, dans la version initiale de l’article 14 bis, que vous avez contribué à faire adopter, il n’est pas question d’accrus forestiers, mais de « boisements spontanés » et de régénération naturelle.

En outre, ces surfaces représentent non pas quelques centaines de milliers, mais 3,5 millions d’hectares de terres agricoles non cultivées, et entrent déjà dans le champ d’application des nombreuses dérogations prévues par le code rural et de la pêche maritime et le code forestier.

Madame la ministre, je vous invite vraiment à faire un peu de ménage – passez-moi l’expression – face à cet empilement de dérogations. Aujourd’hui, on ne sait plus quelles sont les dispositions opérationnelles, et on continue de multiplier les exemptions à des dispositifs existants.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Madame la sénatrice, vous avez raison de parler d’empilement.

Ce dossier paraît certes simple et frappé au coin du bon sens – la forêt ou, plutôt, la friche, les broussailles non exploitables gagnent sur les terres agricoles, alors que nous voulons reconquérir notre souveraineté alimentaire –, mais vous n’imaginez pas depuis combien d’années je travaille sur le sujet, et à quel point il est difficile de faire évoluer les choses !

Dans le cadre de l’examen du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, adopté en 2016, nous sommes d’abord parvenus à exonérer de compensation financière les défrichements en zone de montagne.

Dans celui de l’examen de la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, nous avons réussi à étendre le champ de cette exemption. Nous le devons à Marc Fesneau, qui a accepté de reprendre un amendement que j’avais déposé en tant que députée, et qui avait été déclaré irrecevable au motif qu’il créait une charge supplémentaire – alors qu’en réalité il visait à alléger une dépense de l’État. Je remercie l’ancien ministre de l’agriculture d’avoir repris cette mesure à son compte et de l’avoir fait adopter. Seul bémol, nous avons oublié au passage de traiter public et privé à égalité.

Lors de la visite de terrain que j’évoquais tout à l’heure, je me suis aperçu que, malgré l’exonération de compensation financière et la suppression des demandes d’autorisation, la réglementation et la puissance du droit ne baissaient pas les armes aussi facilement. Ainsi, le directeur départemental des territoires m’a soufflé à cette occasion qu’il fallait également prendre en compte la directive Habitats…

Devant la profusion des règles, je vous propose une mesure de simplification, qui vise à laisser à la main du maire une simple faculté, sans créer aucune obligation.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Madame la ministre, vous nous avez remerciés d’avoir parlé des services environnementaux rendus par les agriculteurs.

Je vous remercie à mon tour de mentionner les spécificités de l’agriculture de montagne, très peu abordée dans le projet de loi. Ce modèle particulièrement résilient, dans lequel les surfaces exploitées sont souvent de petite taille, doit faire l’objet d’un accompagnement spécifique et se développer. Je vous remercie par conséquent de mettre les agriculteurs de montagne en avant.

Je suis globalement assez d’accord avec les propos que vous venez de tenir, à l’exception d’un point : vous nous dites que la forêt avance, mais, en fait, c’est plutôt l’agriculture qui a reculé. C’est à cet enjeu qu’il convient de réfléchir aujourd’hui.

Laurent Duplomb nous invite, à raison, à nous rendre sur le site Géoportail. Dans les années 1950, on voit bien que, dans les zones de montagne, les alpages étaient largement utilisés. Ces surfaces sont désormais en friche ou se sont refermées en raison du changement de notre modèle d’agriculture et de la mécanisation, mais aussi à cause de la baisse du nombre d’agriculteurs et de la déprise du foncier agricole – ces problèmes sont d’ailleurs liés au modèle d’agriculture qui a été privilégié.

Madame la ministre, vous avez raison : il faut donner aux collectivités la possibilité de défricher pour regagner des terrains agricoles, mais il faut derrière mener une politique foncière et d’accompagnement des installations. C’est précisément ce qui manque dans ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Membre du groupe d’études Forêt et filière bois, j’écoute toujours avec attention sa présidente Anne-Catherine Loisier. Cependant, j’ai également entendu les explications d’Annie Genevard.

Comme nous le disons régulièrement dans cet hémicycle, la France est diverse. Il ne faut pas passer tous les territoires sous la même toise, car les enjeux y sont très variés. Nous ne pouvons donc pas ignorer la voix des territoires de montagne.

Je sais combien, dans ses fonctions antérieures, Annie Genevard s’est engagée pour la défense de ces territoires et a travaillé à la mise en œuvre de dispositifs opérationnels. L’explication qu’elle vient de nous donner, mes chers collègues, me semble tout à fait satisfaisante et convaincante.

S’il doit y avoir des ajustements, au regard des craintes émises par Anne-Catherine Loisier et les cosignataires de cet amendement, nous disposons encore de quelques jours pour affiner le dispositif en vue de la réunion de la commission mixte paritaire.

À mon sens, il convient de conserver la rédaction actuelle de l’article 14 bis, qui apporte une vraie réponse aux maires des communes de montagne. Ceux-ci sont pour l’instant démunis, et nous devons leur donner les moyens d’agir sans pour autant imposer quoi que ce soit aux maires des autres communes de France.

Voilà la raison pour laquelle je ne voterai pas en faveur de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je suis cosignataire de cet amendement, mais, après vous avoir entendue, madame la ministre, je souhaite préciser deux choses.

Tout d’abord, vos propos résonnent de manière particulièrement juste dans le cadre de notre réflexion sur les choix stratégiques à opérer pour nos territoires. Cela étant, je ne comprends pas pourquoi votre raisonnement n’est pas le même sur ce sujet que lors de notre très long débat sur les haies. Pardonnez-moi de faire ce parallèle, madame la ministre, mais la plantation de haies participe bel et bien à la consommation des terres agricoles. Malgré un environnement de plus en plus complexe, il faut savoir tirer les conséquences de ses analyses.

Ensuite, je veux parler de ce régime de défrichement qui n’est aujourd’hui applicable qu’en montagne. À ce sujet, je n’oublie pas que la dotation jeunes agriculteurs (DJA) a en premier lieu bénéficié aux agriculteurs de montagne, avant de profiter aux agriculteurs de plaine.

Même si les interrogations de notre collègue Anne-Catherine Loisier sont légitimes, je ne souhaite plus soutenir son amendement que, je le redis, j’ai cosigné. Je considère néanmoins qu’il est nécessaire de travailler sur tous les sujets, et notamment sur celui de la haie.

Car, madame la ministre, vous n’avez pas voulu entendre ce que nous disions à ce propos, à savoir que des kilomètres de haies sont apparus aux dépens des terres agricoles, de même que des terres agricoles abandonnées sont devenues spontanément des accrus forestiers en montagne.

Tout cela manque de cohérence, mais je vous fais confiance, madame la ministre, et je ne voterai pas cet amendement.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. L’inconvénient, quand on demande l’avis du Gouvernement, c’est qu’il finit toujours par le rendre… (Sourires.)

Après l’avoir écoutée, comment ne pas être d’accord avec Mme la ministre ? Elle défend l’idée qu’il faut redonner à l’agriculture des terrains agricoles « abandonnés », ce qui correspond tout à fait à l’ambition de ce projet de loi, qui vise à assurer notre pleine souveraineté alimentaire.

Nous ne parlons pas là de terres plantées d’arbres, ce qui ne serait pas tout à fait la même chose. N’oublions pas que, dans les années 1960 à 1970, une période marquée par la déprise agricole, beaucoup de terrains agricoles ont été recouverts de forêts par leurs propriétaires pour qu’ils puissent échapper à l’imposition. Ainsi, en Haute-Loire, sur 500 000 hectares, on compte plus de 230 000 hectares de forêt, qui ont été totalement pris sur l’agriculture.

L’article 14 bis ne concerne que les surfaces qui ont été abandonnées par l’agriculture et qui, demain, pourraient lui revenir.

Malgré toute l’amitié que je porte à la sénatrice Loisier et malgré la passion qui l’anime, il me semble plus judicieux de ne pas supprimer cet article. Le dispositif permettra en effet de ne pas infliger de contraintes supplémentaires à tous ceux qui rencontrent déjà des difficultés. Je pense à ces nombreux maires, dans mon département, qui défrichent ce que l’on appelle les « timbres-poste », des surfaces de petite dimension susceptibles d’améliorer les parcelles, sans pour autant vouloir en faire des parcelles de 100 hectares.

La logique et le bon sens imposent de ne pas supprimer cet article : la commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. Je me réjouis à mon tour des propos qu’a tenus Mme la ministre, qui prennent leur source à la montagne, mais qui conviennent aussi très bien à la Bretagne. (Sourires.)

Ma région est aussi une région d’élevage. Sans dresser de parallèle excessif avec les territoires de montagne, les productions étant sensiblement différentes, nous constatons également en Bretagne une déprise et une décapitalisation de l’élevage, pourtant caractéristique de l’agriculture bretonne. Au cours de l’année dernière, 120 têtes de bovins ont disparu en moyenne chaque jour : c’est énorme !

Madame la ministre, je vous remercie par ailleurs de vos propos sur la valorisation des activités de notre agriculture, qu’il s’agisse des prix rémunérateurs, du foncier ou des externalités positives.

Au fond, vous avez pointé les grandes questions autour desquelles le projet de loi aurait dû s’attarder. Nous le ferons peut-être une autre fois, mais je vous remercie déjà de les avoir mentionnées. En tout cas, nous sommes disponibles pour véritablement traiter l’ensemble des problématiques auxquelles l’agriculture est confrontée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 494 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 bis.

(Larticle 14 bis est adopté.)

Article 14 bis
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Après l’article 14 ter

Article 14 ter

(Non modifié)

Au 3° de l’article L. 342-1 du code forestier, les mots : « du 1° » sont supprimés – (Adopté.)

Article 14 ter
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Article 14 quater (nouveau)

Après l’article 14 ter

M. le président. L’amendement n° 200 rectifié quater, présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, L. Vogel, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret, est ainsi libellé :

Après l’article 14 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 2° du I de l’article L. 341-2 du code forestier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les opérations portant sur les vignes abandonnées ; ».

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. Cet amendement vise à faciliter l’arrachage des vignes abandonnées, qui posent d’énormes problèmes sanitaires pour les exploitations voisines. Monsieur le rapporteur, j’imagine que vous allez encore m’expliquer en quoi cela ne va pas…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Louault, votre demande est satisfaite. Les agents de l’État qui réalisent les contrôles disposent de différents leviers pour faire exécuter les mesures. Il existe déjà un délit pour sanctionner les propriétaires défaillants. Malheureusement, je vous l’accorde, ces procédures sont lourdes et n’aboutissent pas toujours.

Pour remédier à ce problème, le Gouvernement a défendu un amendement dans le cadre de l’examen de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur des rapporteurs Duplomb et Menonville, lequel a été adopté par le Sénat.

Une ordonnance permettra d’adapter le régime de sanctions pénales pour le proportionner correctement et le rendre plus opérationnel. Il s’agira notamment d’instaurer des contraventions pour sanctionner la non-réalisation de certaines mesures de lutte, telles que le non-arrachage de vignes contaminées par la flavescence dorée, par exemple.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.

M. le président. Monsieur Louault, l’amendement n° 200 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Vincent Louault. J’ai obtenu la réponse que je souhaitais. Je retire mon amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 200 rectifié quater est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 46 rectifié quater, présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, L. Vogel, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret, est ainsi libellé :

Après l’article 14 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du I de l’article L. 341-2 du code forestier, les mots : « depuis moins de trente ans » sont remplacés par les mots : « depuis moins de 50 ans ».

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. La culture du peuplier est aujourd’hui considérée comme une culture agricole, à l’instar de celle du maïs par exemple, mais seulement durant trente ans. Pendant trente ans, les surfaces sont considérées comme des cultures ; au-delà de cette période, on estime qu’il s’agit de bois forestier dont l’abattage doit être soumis à compensation environnementale.

Je connais un jeune agriculteur qui a acheté une propriété de 30 hectares plantés de peupliers. Or ces arbres ont 35 ans. Ils sont mûrs, mais s’il les coupe, il ne peut pas utiliser cette surface pour ses vaches, et est obligé de replanter des peupliers… Ma chère collègue Anne-Catherine Loisier, nous avons certes besoin de bois, mais nous avons aussi besoin de vaches ! C’est une aberration, d’autant que la monoculture de peupliers est très intensive et consomme bien plus d’eau qu’une prairie.

Mon amendement vise donc à ce que cette culture soit considérée comme une culture agricole pendant non plus trente, mais cinquante ans.

Il s’agit d’un point de détail, mais de nombreux agriculteurs sont affectés. Je pense aussi à tous ces maires, qui aménagent des espaces naturels sensibles autour de leurs communes et qui nettoient les peupleraies abandonnées, et qui sont soumis à cette obligation de replanter.

M. le président. L’amendement n° 47 rectifié quater, présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, L. Vogel, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret, est ainsi libellé :

Après l’article 14 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du I de l’article L. 341-2 du code forestier, les mots : « depuis moins de trente ans » sont remplacés par les mots : « depuis moins de 40 ans ».

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. Il s’agit d’un amendement de repli, qui tend à porter de trente à quarante ans la durée pendant laquelle la culture du peuplier doit être considérée comme culture agricole.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ces deux amendements visent à autoriser les opérations portant sur les taillis à courte rotation pendant cinquante ou quarante ans – selon les cas – au lieu des trente ans actuellement en vigueur.

Compte tenu de l’exemple qui vient d’être cité, de ce jeune agriculteur qui pourrait se faire rattraper par la patrouille, j’aurais tendance à émettre un avis favorable. Mais, dans le doute, je préfère solliciter l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le sénateur, le Gouvernement comprend votre préoccupation : entre les deux durées que vous proposez, je préfère celle de quarante ans par souci d’harmonisation avec le dispositif de l’article 14 bis, que nous venons de voter, et qui prévoit une durée similaire d’exemption dans les territoires de montagne.

Aussi, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 46 rectifié quater, et un avis favorable sur l’amendement n° 47 rectifié quater.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je me rallie à cette position. La commission est favorable à l’amendement n° 47 rectifié quater et défavorable à l’amendement n° 46 rectifié quater.

M. Vincent Louault. Je retire l’amendement n° 46 rectifié ter, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 46 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 ter.

L’amendement n° 199 rectifié quater, présenté par MM. V. Louault, Capus et Médevielle, Mme Lermytte, M. Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Laménie, Brault, Chevalier, Rochette et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret, est ainsi libellé :

Après l’article 14 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° de l’article L. 342-1 du code forestier est abrogé.

La parole est à M. Vincent Louault.

M. Vincent Louault. M. Salmon va être content, il va découvrir mon côté écolo ! (Sourires.)

Comme le rapporteur l’a indiqué, des défrichements abusifs ont parfois lieu, notamment pour remettre en culture des surfaces de forêts dont la superficie est comprise entre 0,5 hectare et 4 hectares. Je propose de rétablir une demande d’autorisation préalable pour le défrichage des toutes petites parcelles de bois, qui sont malheureusement lourdement attaquées, et ce de manière pas toujours justifiée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Mon collègue Franck Menonville et moi-même nous sommes donnés pour principe de privilégier en toutes circonstances la souplesse. Pour le coup, mon cher collègue, vous proposez d’ajouter une contrainte, ce qui ne correspond pas à notre manière de voir les choses.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, même si notre position pourrait évoluer à l’écoute de l’avis rendu par le Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Je souhaite laisser la place à une discussion à l’échelon local, le préfet étant en mesure de décider du meilleur seuil. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Cela ne répond pas au problème : au niveau local, aujourd’hui, la réglementation ne laisse aucune souplesse. Quoi qu’il arrive, n’importe quel agriculteur qui achète une parcelle d’une superficie comprise entre 0,5 et 4 hectares peut décider demain de la défricher et de la remettre en culture sans demander d’autorisation au préfet.

Je suis prêt à retirer mon amendement, mais je pourrais citer de nombreux exemples d’abus, partout en France. Je suis moi-même agriculteur : j’estime que, pour rester crédible, la profession doit aussi faire des efforts.

D’un côté, on protège les haies, de l’autre, on laisse impunément bousiller 4 hectares de forêt en un claquement de doigts : c’est le grand écart !

Mme Anne-Catherine Loisier. Et parfois même plus que 4 hectares !

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je ne peux qu’encourager le côté écolo de Vincent Louault (Sourires.), dont je soutiendrai l’amendement. Défricher une parcelle boisée sans autorisation est problématique, même si, comme Anne-Catherine Loisier l’indiquait, des exceptions existent pour les boisements les plus récents.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. J’espère qu’un examen juridique approfondi de nos échanges sera mené : nous réécrivons des choses qui existent déjà dans le code forestier et le code rural et de la pêche maritime. C’est l’illustration parfaite de ce que l’on appelle le « bavardage législatif » !

Mon cher collègue, vous proposez de contrôler les défrichements pour des surfaces inférieures à 4 hectares, alors que nous les autorisons sur des terres beaucoup plus étendues et renouvelées par régénération naturelle…

Le code forestier est déjà très chargé et compliqué, en particulier les dispositions consacrées au défrichement. Nous sommes en train d’y ajouter de nouvelles mesures, au risque de le rendre totalement illisible !

M. Vincent Louault. Allez, je retire mon amendement !

M. le président. L’amendement n° 199 rectifié quater est retiré.

Après l’article 14 ter
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Article 14 quinquies (nouveau)

Article 14 quater (nouveau)

Avant le dernier alinéa de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, il est inséré un c ainsi rédigé :

« c) Par dérogation au a, non artificialisée une surface occupée par des constructions, ouvrages, installations ou aménagements nécessaires à l’exploitation agricole. »

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, sur l’article.

M. Vincent Louault. Historiquement, pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les communes, on ne prenait pas en compte la surface occupée par les constructions dédiées à l’exploitation agricole dans le calcul de l’artificialisation des sols.

Ce projet de loi vise à assurer notre souveraineté alimentaire, ce qui suppose de construire des bâtiments pour l’élevage, comme des poulaillers ou des systèmes de plein air. Or, dans le même temps, on prévoit de déduire la surface de chaque bâtiment agricole des enveloppes d’artificialisation, comme s’il s’agissait de logements.

En faisant entrer ces surfaces en concurrence avec celles que la rurbanisation exige, nous créons un conflit inédit entre les agriculteurs et les maires.

Je ne dis pas qu’il ne faut pas prendre en compte les poulaillers et les bâtiments d’élevage dans le calcul de l’artificialisation des sols. Je dis simplement qu’il ne faut pas que ces surfaces soient déduites des enveloppes attribuées aux collectivités. Si on ajoute les surfaces consacrées à l’agriculture à l’objectif de réduction de 50 % d’artificialisation nette, on va aboutir à une réduction de 70 % des droits à construire des maires et des présidents d’EPCI.

Mes chers collègues, je vous invite à adopter cet article dans sa rédaction actuelle, et à ne surtout pas adopter l’amendement du Gouvernement. Pas touche au texte de la commission !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.

M. Guillaume Gontard. L’article 14 quater crée une exception très problématique au principe du zéro artificialisation nette, en cherchant à exempter les bâtiments agricoles de son calcul.

J’interviens plus particulièrement sur cet article, car nous avions déposé un amendement, avec le soutien de la fédération de l’habitat réversible, qui a été qualifié de cavalier législatif, alors qu’il avait justement pour objet d’apporter un début de réponse aux enjeux soulevés par cette disposition.

Cet amendement visait à autoriser les agriculteurs et agricultrices à vivre directement sur leurs exploitations en y installant des logements de fonction réversibles, sans fondation ni artificialisation des terres, qu’il s’agisse d’habitats légers de loisir (HLL), de mobil-homes ou de yourtes.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Nous parlons des bâtiments agricoles et non du logement !

M. Guillaume Gontard. La difficulté à trouver un logement en bon état, peu coûteux, peu énergivore et proche de l’exploitation freine de nombreux candidats à l’installation, en particulier les « non-issus du milieu agricole », qui constituent le principal vivier de ces candidats.

La mesure que nous défendons contribuerait à la transition vers des systèmes de production diversifiés et viables économiquement, ainsi qu’à la diversification des profils que ce projet de loi vise à favoriser.

Économiques, ces résidences démontables correspondent à une forme d’installation progressive, une dynamique qu’encourage le texte à l’article 8.

De plus, en permettant aux exploitants agricoles de réduire leurs dépenses en matière de logement, cette disposition concourt à l’amélioration de leur revenu et à l’attractivité du métier.

Enfin, comme elles ne favorisent pas l’imperméabilisation des sols et comme ces bâtiments peuvent être désinstallés en cas d’arrêt de l’activité agricole, ces résidences démontables et habitats réversibles participent bien à l’objectif de transition vers des modèles agricoles plus résilients sur les plans économique, social et environnemental.

Madame la ministre, vous connaissez évidemment les problèmes de logement que rencontrent les agriculteurs. Alors que notre amendement s’inscrivait dans la droite ligne de ce projet de loi, nous regrettons de ne pas avoir pu défendre nos arguments. Nous vous invitons à agir pour autoriser les agriculteurs, sous condition évidemment, à habiter sur leurs terres sans pour autant contribuer à l’artificialisation des sols.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 488 est présenté par MM. Salmon et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 859 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 488.

M. Daniel Salmon. L’artificialisation, qu’il s’agisse d’un bâtiment agricole ou d’un bâtiment destiné à un autre usage, empêche le sol de conserver sa fonction.

Par cet amendement, je demande la suppression de l’article 14 quater, qui prévoit d’exclure les bâtiments agricoles du décompte des surfaces artificialisées.

Aujourd’hui, les friches agricoles sont nombreuses. Dans ma région, en Bretagne, de nombreux poulaillers sont abandonnés, laissant de l’amiante un peu partout. Il faut des fonds pour renaturer ces zones, car beaucoup d’agriculteurs n’ont pas les moyens d’engager des travaux.

Une telle renaturation pourrait servir de surcroît à compenser la consommation de sols artificialisés aux alentours. Il y a un véritable effort à faire sur ce sujet.

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 859.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à supprimer l’article 14 quater, qui a été introduit dans ce projet de loi par la commission des affaires économiques.

Sachez tout d’abord que les contraintes du dispositif zéro artificialisation nette (ZAN) ont déjà été allégées pour le bâti agricole…

M. Laurent Burgoa. Très bien !

Mme Annie Genevard, ministre. … grâce à la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, un texte d’initiative sénatoriale, et grâce aux décrets d’application de celle-ci.

Ainsi, « une autorisation d’urbanisme relative à une construction ou installation nécessaire à une exploitation agricole ne saurait être refusée au seul motif que sa délivrance serait de nature à compromettre de tels objectifs ». Actuellement, le ZAN n’est donc pas une contrainte pour le bâti agricole.

Par ailleurs, une part d’artificialisation des sols peut être réservée, à l’échelle régionale, aux projets de bâtiment agricole permettant de contribuer aux objectifs du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).

Néanmoins, il s’agit d’enrayer la consommation de terres consacrées à l’agriculture. Comme je l’ai indiqué, il s’agit non pas d’interdire les constructions agricoles, mais de prendre en compte l’artificialisation réelle qu’elles entraînent. J’en veux pour preuve le rapport publié en 2023 par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) : il y était indiqué que plus du tiers de la consommation d’espaces agricoles résultait de l’emprise des bâtiments.

De plus, il convient d’éviter que le bâti agricole ne serve d’alibi à d’autres constructions. N’ouvrons pas la boîte de Pandore !

Enfin, le rôle du législateur est de légiférer, certes pour le moment présent, mais aussi pour l’avenir. Il existe un risque de voir s’accélérer le phénomène de démembrement des parcelles à la revente, étant entendu que le bâti agricole est davantage exposé que les terres. La séparation des parcelles, selon qu’elles sont bâties ou non, est déjà visible à l’heure actuelle. Il en résulterait un retour à des parcelles sans constructions agricoles, mais d’une superficie réduite.

Pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable à ces deux amendements identiques.

Prenons quelques minutes pour démontrer la monstruosité du ZAN.

La réalité est simple. Le premier objectif de ce dispositif est la baisse de 50 % de la consommation d’espaces artificialisés d’ici à 2031 par rapport à la décennie précédente. En somme, si vous avez consommé 600 hectares entre 2011 et 2021, vous ne pourrez consommer que 300 hectares entre 2021 et 2031, voire un peu moins, car il arrive qu’une partie de l’enveloppe soit régionalisée.

Si rien ne change, la déclinaison des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols dans les documents d’urbanisme devra être achevée au 1er février 2027. Tous les territoires qui auront réduit de moitié leur consommation de foncier à cette date seront déjà dans le dispositif ZAN. Aussi, comme M. Salmon l’a bien précisé, pour construire dans ces territoires, il faudra déconstruire et renaturer.

Nous avons créé un tel monstre que, désormais, pour l’empêcher de grandir, nous essayons de cacher sous le tapis tous les problèmes qu’il pourrait causer, tel celui du contingentement des constructions agricoles.

Moi qui suis un petit paysan doté d’un peu de bon sens, je me demande à quoi peut bien servir le ZAN. Si ce dispositif a pour seule vocation de protéger les terres agricoles, quel intérêt aura-t-on à le maintenir quand il aura dévoré les agriculteurs eux-mêmes ? Il n’y aura plus de paysans ! En réalité, à travers cet article, nous tentons de sauver le dispositif et de trouver des solutions.

On nous rétorque qu’il est nécessaire de contingenter le bâti agricole, car il existerait un risque de démembrement des parcelles. Je vous crois !

Je le redis, à partir de 2031, l’objectif de zéro artificialisation nette des sols s’appliquera ; il s’appliquera même à partir du 1er février 2027 dans tous les territoires qui auront consommé la totalité de la surface autorisée. À compter de cette date, pour construire, il faudra, j’y insiste, déconstruire et renaturer. Dès lors, que croyez-vous que feront les promoteurs immobiliers ?

Ceux qui voudront construire à Montpellier, à Paris ou à Lyon par exemple, afin de satisfaire une forte demande, verront la France comme un vaste marché, puisque rien ne les empêchera, en l’état actuel de notre législation, d’exporter des droits à construire d’un territoire rural vers un territoire urbain.

À cause du monstre que l’on aura créé, les promoteurs achèteront des bâtiments agricoles en nombre, car, comme vous l’avez souligné, madame la ministre, ceux-ci sont très consommateurs de foncier.

Personnellement, je possède une construction de 6 000 mètres carrés, mais ce n’est pas vraiment un choix : c’est simplement que j’avais besoin d’une grande surface pour élever le nombre de vaches suffisant pour faire vivre ma femme, mon fils et mon neveu.

Dans quelques années, il est possible qu’un promoteur se présente chez moi pour m’offrir, en échange de ce bâtiment agricole de 6 000 mètres carrés, 3 millions ou 4 millions d’euros. Il aurait raison, cela lui permettra d’exporter une surface équivalente à un endroit où elle en vaudra plusieurs dizaines de millions ; et cette surface accueillera ensuite le projet d’installation d’un bâtiment d’une valeur de plusieurs centaines de millions d’euros… Ce mécanisme de valorisation permettra de rémunérer grassement tout vendeur de foncier agricole ! Croyez-vous qu’un agriculteur y réfléchira à deux fois avant de se saisir d’une telle opportunité ?

Voilà pourquoi le ZAN est un monstre ! Cet article ne vise qu’un seul objectif : offrir l’occasion d’arrêter cette folie. Si nous n’adoptons pas cette mesure, je l’affirme publiquement : le ZAN sera ruralicide ! Il tuera la campagne !

L’objectif derrière le ZAN, tout le monde le connaît : c’est de continuer à construire en ville pour amplifier la concentration urbaine et faire en sorte que la ruralité se vide de plus en plus ! Cela donnera l’occasion aux citadins d’aller prendre l’air, tranquilles, pendant les vacances et les week-ends… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Yves Bleunven applaudit également.)

Voilà la réalité ! Quand on aura supprimé tous les paysans, on aura beau jeu de s’en émouvoir ! Et nos petits-enfants ne comprendront pas pourquoi nous aurons mis en œuvre ce ZAN, un dispositif qui devait protéger les terres agricoles, mais qui n’aura d’autre conséquence que de faire disparaître tous les agriculteurs. Arrêtons cette folie, ouvrons la porte et votons cet article !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 488 ?

Mme Annie Genevard, ministre. J’ai moi-même de fortes préventions contre le zéro artificialisation nette : mon amendement ne vaut d’ailleurs pas validation du dispositif.

Accordons-nous sur un point : les bâtiments agricoles consomment du foncier agricole en quantité, ZAN ou pas.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Et alors ? Nous cultivons !

Mme Annie Genevard, ministre. Je vois comment les choses se passent chez moi : quand les générations se succèdent sur une même exploitation, chacune a à cœur de construire sa propre maison ou d’apporter ses propres améliorations au bâti existant. L’idée est de veiller à contenir ces pratiques.

Lorsque vous démembrez une exploitation, vous pouvez très bien vendre la maison de l’exploitant, voire une partie du bâti agricole à d’autres fins, pour peu qu’il y ait un changement de destination.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ce sera démoli et renaturé…

Mme Annie Genevard, ministre. C’est ainsi que se créent des hameaux. Face au risque que les terres échappent à leur vocation d’origine, mesdames, messieurs les sénateurs, l’amendement du Gouvernement vise à prévenir les changements d’usage qui pourraient résulter de l’article 14 quater, et voilà tout.

Pour autant, si vous voulez parler du ZAN, parlons-en : je ne suis pas du tout favorable à la façon dont on a abordé les choses. La concentration des droits à construire sur les centres-bourg au détriment du reste des communes ne me convient absolument pas, la congélation de l’espace rural non plus.

Or ce n’est pas de cela qu’il est question avec cet amendement du Gouvernement. L’objectif est de protéger l’avenir des bâtiments agricoles en en conservant leur finalité d’origine. C’est tout !

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Mes chers collègues, ne refaisons pas le débat sur le ZAN ce soir. Ce serait un peu long, n’est-ce pas, monsieur Gremillet ! (Sourires.)

Depuis tout à l’heure, nous sommes en pleine caricature en opposant ainsi méchants urbains, préempteurs de terres, et agriculteurs. Restons sérieux !

Accueillir un habitant en zone urbaine permet de consommer deux fois moins de surface qu’en zone rurale. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb, rapporteur. C’est l’exemple typique : empiler toujours plus !

M. Daniel Salmon. En effet, les formes d’habitat diffèrent, mais c’est un fait : à surface équivalente, beaucoup plus de personnes sont accueillies en ville. J’y insiste, le problème est plus complexe que la simple opposition entre gentils et méchants.

Aussi, le dispositif du ZAN a tout son intérêt, même s’il est peut-être nécessaire de le faire évoluer.

Je ne vous comprends pas, monsieur le rapporteur : vous allez de contradiction en contradiction. Vous prétendez préserver les terres agricoles, mais vous voulez y établir des bâtiments pour l’agriculture, ce qui revient, que vous le vouliez ou non, à artificialiser. On ne peut pas dire le contraire !

De fait, en zone rurale, je vois bien souvent fleurir de grands hangars agricoles qui n’ont d’autre finalité que d’accueillir des panneaux solaires, avec trois balles de paille par-dessous… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il s’agit là encore d’une artificialisation des sols !

Le modèle que nous privilégions depuis des années a entraîné la disparition de 100 000 fermes en dix ans. Il existe donc certainement un grand nombre de friches, constituées de bâtiments agricoles abandonnés, qu’il conviendra de réutiliser au mieux.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je remercie Laurent Duplomb : il a l’honnêteté de dire qu’il considère que le ZAN est une connerie.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ça, c’est vrai ! Je ne l’ai pas dit comme ça, mais je le pense vraiment.

M. Guillaume Gontard. Ce n’est pas le discours qui est tenu d’habitude. J’entends plutôt : « il faut tenir les objectifs, mais pas de cette manière, pas maintenant, même s’ils sont essentiels, parce qu’il faut préserver les terres agricoles »…

Laurent Duplomb, lui, assume qu’il faudrait arrêter tout de suite. Pour le coup, c’est franc ! Ces propos nous changent du discours classique de la droite. (M. Jean-Marc Boyer proteste.)

Daniel Salmon vient de le dire, environ 100 000 fermes ont disparu en dix ans. Mais le ZAN n’y est pour rien, mes chers collègues, il n’est pas encore appliqué ! De fait, ce qui vide nos communes, c’est cette disparition de 200 fermes par semaine. Quand une exploitation agricole disparaît, c’est en effet une famille qui s’en va et des bâtiments qui restent inutilisés. Il faudrait s’interroger sur les causes de ce phénomène. Une réflexion en termes d’urbanisme et d’aménagement du territoire mériterait de s’engager.

Malgré les difficultés qu’emporte ce dispositif, nous devons garder cet objectif de zéro artificialisation nette en 2050. En réalité, la question ne se pose même pas : nous ne pouvons pas continuer de la même manière. À l’heure actuelle, nous artificialisons à un rythme de 40 000 à 90 000 hectares chaque année. En trois ans, nous bouffons l’équivalent des terres agricoles du département de l’Isère ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Inutile de protester : c’est ce qui se passe actuellement ! C’est la réalité !

Le même raisonnement vaut pour toutes les ressources, notamment l’eau. La terre est un bien commun…

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La terre n’est pas un bien commun !

M. Guillaume Gontard. Refusons de la considérer ainsi, continuons de maugréer comme vous le faites sur ces travées et attendons : à un moment donné, nous n’aurons plus nulle part où construire. Il sera alors bien vain de parler de souveraineté alimentaire…

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Anglars. Nous refaisons ce soir le débat sur le ZAN : en 2023, nous discutions déjà de ce qui se passerait en 2031. Comme l’a très bien expliqué Laurent Duplomb, en l’état actuel du texte, les bâtiments agricoles seront concernés par l’objectif de réduction de l’artificialisation, d’autant que le premier objectif du dispositif est de diviser l’enveloppe des surfaces utilisées par les communes par deux.

En 2031, les mairies devront donc débattre de l’application du mécanisme si le texte n’était pas amélioré auparavant, notamment par la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux, dite proposition de loi Trace. Il y aura là un vrai sujet.

Pour en revenir aux constructions agricoles, nous savons que ces bâtiments ne peuvent pas être cantonnés dans des zones d’activité : ils doivent toujours être à proximité d’une ferme, car ils sont nécessaires à l’exploitation et souvent conçus pour le bien-être animal. Il faut rappeler ces quelques faits à chaque fois.

En 2023, nous nous étions prononcés sur le sujet. Madame la ministre, j’ai bien lu l’objet de votre amendement de suppression. Vous reprenez à votre compte les propos de M. Béchu, qui nous avait alors invités à ne pas nous inquiéter, dans la mesure où les régions pourraient, nous disait-il, prévoir une réserve dédiée aux surfaces agricoles.

Or nous constatons, depuis 2023, que certaines régions – je peux les citer ! – n’en prévoient pas dans leur Sraddet. Nous ne voulons pas que les communes, en 2031, du fait du ZAN, aient à choisir entre un bâtiment agricole et deux maisons ! Pour faire simple, le débat se posera en ces termes.

Il faut faire preuve de responsabilité et se rappeler les faits : lorsque nous échangions du ZAN dans cet hémicycle, le ministère de l’environnement était au banc du Gouvernement et c’est le ministère de l’agriculture qui regrettait de ne pas avoir été associé à l’élaboration du dispositif.

Ce que nous affirmons relève du bon sens.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Claude Anglars. Le décret du 27 novembre 2023 relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols traduisait la volonté de M. Béchu qu’une part d’artificialisation des sols soit réservée à l’échelon régional. Pourtant, prenons l’Occitanie : rien n’est prévu pour les bâtiments agricoles.

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi, afin de poursuivre l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Boyer. Le ZAN, dispositif issu de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et Résilience, a suscité une levée de boucliers de l’ensemble des maires sur le territoire national.

M. Christian Redon-Sarrazy. C’est la loi que vous avez votée !

M. Jean-Marc Boyer. En effet, à la suite des propositions de la Convention citoyenne pour le climat dont vous êtes à l’initiative !

M. Jean-Marc Boyer. Si !

Ce mécanisme contraint désormais l’ensemble des collectivités à réduire leur surface à artificialiser entre 2031 et 2050, échéance à laquelle l’artificialisation devra être à zéro. Résultat des courses : les maires se rendent compte que le ZAN freine sérieusement tout développement à l’échelle de leur territoire. Nous le voyons déjà à travers l’élaboration des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi) : des réductions de l’ordre de 50 % à 60 % de l’artificialisation sont proposées aux différentes communes.

Les effets de ce dispositif commencent à se faire sentir chez les particuliers. Je peux vous dire que, lorsqu’un maire annonce à ses administrés que leur terrain, qui était constructible, ne le sera bientôt plus, le changement est perceptible !

Nos collègues Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc ont déposé cette proposition de loi Trace. Son prochain examen sera l’occasion de tout mettre à plat et de réintroduire du bon sens.

Je partage tout à fait les arguments de Jean-Claude Anglars et de Laurent Duplomb : ce mécanisme entrave toute liberté d’action. Les bâtiments agricoles font partie des solutions qui doivent permettre aux agriculteurs de continuer d’exercer leur activité.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je soutiens totalement les propos de notre rapporteur.

En premier lieu, il serait avisé de prendre en compte, dans ce débat – madame la ministre, vous avez oublié de le signaler –, la succession des décisions européennes et franco-françaises concernant le bien-être animal. Mon propos n’est pas de dire qu’il ne fallait pas agir en ce sens ! Toutefois, cette politique se traduit mécaniquement par une augmentation du nombre de mètres carrés dont ont besoin les agriculteurs.

D’ailleurs, ce sujet vaut pour la montagne. Normalement, les vaches doivent être non plus attachées, mais en liberté. Or bon nombre d’exploitations en zone de montagne sont dans l’incapacité de disposer des bâtiments nécessaires.

En second lieu, la mise aux normes environnementales des fermes – nous l’oublions trop facilement – a été énormément consommatrice de surface foncière, pourtant nécessaire à l’agriculture. Les travaux devaient de surcroît être achevés en moins de cinq ans, une mise en conformité qui concernait – et concerne toujours – les jeunes qui s’installent. Cette politique s’est traduite par des audits rendus impératifs.

J’espère que nous en débattrons, cher Jean-Marc Boyer, lors de l’examen de la proposition de loi Trace. En l’état actuel des textes, je pense qu’il est nécessaire de suivre notre rapporteur de manière à ne pas hypothéquer l’avenir.

Pour conclure, madame la ministre, j’attire votre attention sur le fait qu’il faudra résoudre la problématique des anciens corps de ferme qui n’ont plus de vocation agricole, et qui sont dépourvus de solution fiscale facilitant leur transition en logement. Le sujet, par sa complexité, excède certes le périmètre de ce seul article.

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

M. Laurent Somon. Au risque d’être un peu redondant, je vais évoquer à mon tour quelques souvenirs.

Vétérinaire en milieu rural, j’étais aux premières loges pour observer les mutations qu’ont connues toutes nos campagnes. Je confirme que ce sont les obligations liées au bien-être animal et aux mises aux normes environnementales qui ont poussé les agriculteurs à sortir des villages.

M. Jean-Marc Boyer. Exactement !

M. Laurent Somon. En effet, il faut consacrer de nombreux mètres carrés à l’installation de bâtiments d’élevage et au stockage des aliments.

Les exploitants agricoles qui n’ont pas pu le faire, s’apercevant en outre que l’élevage n’était plus rentable, se sont tournés vers d’autres cultures, notamment les céréales. Ces productions posaient problème dans les villages, car elles supposaient un transport de marchandises considérable, de nuit parfois, des outils et des machines plus volumineux. Nous avons donc aussi contraint ces agriculteurs à construire des hangars à l’extérieur des villages.

Monsieur Salmon, cher Daniel, vous avez affirmé que les paysans construisaient des hangars dans la campagne pour y poser des panneaux photovoltaïques : c’est faux, ils le font pour stocker leurs céréales afin que ces dernières soient emportées, de nuit comme de jour, par des transporteurs ! Ceux qui, à l’époque, ont justement voulu installer des panneaux en ont d’ailleurs été empêchés, parce qu’il leur était interdit d’affecter leur exploitation à deux usages différents, celle d’une coopérative, au travers de la location pour le stockage, et celle de producteur d’énergie photovoltaïque.

La dispersion des agriculteurs en zone rurale a par ailleurs résulté, non seulement de l’essor de la production de céréales, mais aussi du développement des élevages hors sol. En effet, comment les éleveurs auraient-ils pu se livrer à cette pratique dans des bâtiments situés en plein village – je pense aux poulaillers de plein air –, et d’autant plus avec la réglementation en vigueur en faveur du bien-être animal ?

C’est ce qui explique que les installations se situent aujourd’hui à l’extérieur des bourgs, et c’est pourquoi je suis favorable à ce qu’on les exclue du décompte des surfaces artificialisées. Nous le faisons bien pour les maisons situées en zone inondable, dès lors que les normes en vigueur imposent de les déplacer du littoral vers l’arrière-pays.

Dernière remarque, comme Daniel Gremillet l’a fait observer, la diversification se constate parfois au sein même des corps de ferme. Il est pourtant interdit de transformer ne serait-ce qu’une parcelle de bâtiment existant pour créer, par exemple, une salle destinée à l’accueil de séminaires. En cas de changement d’usage, le permis de construire n’est jamais accordé !

Nous voulons aider les agriculteurs à se diversifier et, pourtant, aujourd’hui, nous les empêchons d’élargir leurs activités, en se tournant par exemple vers le tourisme. (Mme Frédérique Puissat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. La reconquête de notre souveraineté passe par un recalibrage du ZAN. Cette exigence a toute son importance dans ce texte. Il ne faut pas lâcher sur ce point !

Comme je l’indiquais tout à l’heure, madame la ministre, il y a aussi un problème de méthode. Ainsi, le Cerema, qui a procédé aux mêmes calculs que M. Duplomb, n’a pas pris en compte les constructions agricoles. Alors président d’une communauté de communes, j’ai voulu traîner cet organisme devant le tribunal administratif : il a finalement fallu attaquer le fameux volume du Sraddet consacré aux terrains constructibles pour se faire entendre. Ce fonctionnement des services de l’État est inacceptable !

Nous n’avons d’ailleurs jamais pu nous mettre d’accord sur le nombre d’hectares consommés : il y a une différence entre les 600 hectares de M. Duplomb et les 700 hectares qui ont été réellement consommés. Diviser par deux ces surfaces ne produit pas tout à fait le même résultat…

Monsieur Gontard, vous vous en êtes plaint : c’est vrai, je proteste quand vous parlez. Il faut dire que vous avez affirmé tout à l’heure que nous artificialisons chaque année l’équivalent de la superficie de l’Isère. Or ce département représente 74 000 hectares quand seuls 22 000 hectares sont consommés tous les ans… Le rythme est donc trois fois moins soutenu que ce que vous indiquez.

M. Guillaume Gontard. Je parlais des terres agricoles utiles !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 488 et 859.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 quater.

(Larticle 14 quater est adopté.)

Article 14 quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 14 quinquies (début)

Article 14 quinquies (nouveau)

I. – La section 3 du chapitre Ier du titre V du livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifiée :

1° Après l’article L. 151-6-2, il est inséré un article L. 151-6-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 151-6-3. – Les orientations d’aménagement et de programmation définissent, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durables, les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés au sein de la zone urbaine ou à urbaniser, à la charge de l’aménageur. La zone de transition est projetée de préférence en dehors des zones dévolues à l’agriculture. Il peut exceptionnellement être dérogé à cette mesure après avis favorable de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. Ces espaces de transition végétalisée respectent les obligations définies au III de l’article L. 253-8 du même code. » ;

2° Le 7° du I de l’article L. 151-7 est abrogé.

II. – Le dernier alinéa du III de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il détermine notamment les zones non résidentielles qui, en raison de la faiblesse des risques sanitaires induits par la brièveté de leur fréquentation, peuvent être exemptées des obligations prévues au présent III. »

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, sur l’article.

Mme Anne-Sophie Romagny. L’article 14 quinquies est issu de l’adoption en commission des affaires économiques de plusieurs amendements identiques cosignés par de nombreux collègues.

Il prévoit la création obligatoire, à la charge de l’aménageur, d’un espace végétalisé « au sein de la zone urbaine ou à urbaniser ». L’objectif est d’éviter de grignoter des terres agricoles face à l’urbanisation.

Il est également prévu que cet espace fasse office de zone de non-traitement, exigence qui ne s’imposera plus aux agriculteurs.

Je me réjouis que cet article ait été introduit dans le présent projet de loi d’orientation agricole. En effet, il reprend les termes de la proposition de loi visant à protéger les terres agricoles et à créer des zones végétalisées intégrant des zones de non-traitement, que j’ai déposée le 17 novembre 2023. Ce texte reprend les conclusions des travaux de celle qui m’a précédée comme sénatrice de la Marne, notre très chère Françoise Férat.

Cette mesure de bon sens et simple à mettre en œuvre permet de ne pas imposer à l’agriculteur ou au viticulteur des contraintes liées à ce nouvel urbanisme. Elle permettra d’anticiper d’éventuels conflits de voisinage et en facilitera la résolution par les maires ruraux.

Lors du congrès de l’Association nationale des élus de la vigne et du vin (Anev), réunie au Palais du Luxembourg le 9 novembre dernier sous la présidence de notre collègue Christian Klinger, j’ai présenté ce dispositif aux élus présents. Sachez qu’il a été accueilli très favorablement. Je remercie d’autant plus mes collègues de la commission des affaires économiques de l’avoir inclus dans le présent texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 263 rectifié bis est présenté par M. Bleunven, Mme Billon, M. Chasseing, Mme Jacquemet, M. Levi, Mme Perrot et MM. de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 582 rectifié bis est présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, J.M. Arnaud et Brault, Mme Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger, Fargeot et Chevalier et Mme Gacquerre.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 1 à 4

Remplacer ces alinéas par dix-huit alinéas ainsi rédigés :

Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° L’article L. 111-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés au sein de la zone urbaine ou à urbaniser, à la charge de l’aménageur. Ces espaces de transition végétalisés respectent les obligations définies au III de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime et sont réputés comme zones de non-traitement. L’espace de transition végétalisé est constitué en dehors des zones dévolues à l’agriculture. Il peut exceptionnellement être dérogé à l’obligation de constituer l’espace de transition végétalisé en dehors des zones dévolues à l’agriculture après avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du même code. Lorsqu’il est constitué sur des zones dévolues à l’agriculture, l’espace de transition constitue une servitude d’utilité publique. Les propriétaires des terrains concernés peuvent mettre en demeure la commune de procéder à l’acquisition de leur terrain, dans les conditions et délais prévus au titre III du livre II du présent code. » ;

2° Après le sixième alinéa de l’article L. 141-10, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le document d’orientation et d’objectifs peut également définir, en cohérence avec le projet d’aménagement stratégique, les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé défini au deuxième alinéa de l’article L. 111-3 du présent code. » ;

3° La section 3 du chapitre Ier du titre V du livre Ier est ainsi modifiée :

a) Après l’article L. 151-6-2, il est inséré un article L. 151-6-… ainsi rédigé :

« Art. L. 151-6-…. – Les orientations d’aménagement et de programmation définissent, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durable, les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole, quel que soit son classement, intègrent un espace de transition végétalisé défini au deuxième alinéa de l’article L. 111-3. »

b) Le 7° de l’article L. 151-7 est abrogé ;

4° Le I de l’article L. 161-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La carte communale délimite les espaces de transition végétalisés définis au deuxième alinéa de l’article L. 111-3. » ;

5° Le titre III du livre II est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa de l’article L. 230-1 est ainsi rédigé : « Les droits de délaissement prévus par les articles L. 111-3, L. 152-2, L. 311-2 ou L. 424-1, s’exercent dans les conditions prévues par le présent titre. » ;

b) Il est ajouté un article L. 230-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 230-7. – Lorsqu’un propriétaire exerce le droit de délaissement prévu par l’article L. 111-3, le prix d’acquisition défini à l’article L. 230-3 est mis à la charge exclusive de la personne dont le projet d’aménagement ou de construction nécessite la constitution d’un espace de transition végétalisé sur des zones dévolues à l’agriculture. La collectivité ou le service public qui fait l’objet de la mise en demeure informe celle-ci dès réception de la mise en demeure.

« La délivrance d’un permis de construire ou d’une décision de non-opposition à déclaration préalable dont la mise en œuvre nécessiterait la constitution d’un espace de transition végétalisé sur des zones dévolues à l’agriculture est subordonnée à la constitution préalable d’une garantie financière par le pétitionnaire. » ;

6° Après le cinquième alinéa de l’article L. 423-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les demandes ou déclarations concernent un projet qui nécessite la constitution d’espaces de transition végétalisés définis au deuxième alinéa de l’article L. 111-3, le dossier joint à ces demandes et déclarations indique le tracé projeté de ces espaces. Si, à titre dérogatoire, les demandes ou déclarations sollicitent la constitution d’espaces de transition végétalisés sur des zones dévolues à l’agriculture, le dossier justifie cette demande. Il comporte une estimation de prix qui sera mis à la charge du pétitionnaire en cas d’exercice du droit de délaissement et la garantie financière proposée en application de l’article L. 230-7. »

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 263 rectifié bis.

M. Yves Bleunven. La commission des affaires économiques a introduit cet article 14 quinquies, qui vise à créer des zones de transition entre les espaces artificialisés et les espaces agricoles.

Le présent amendement vise à renforcer ce dispositif qui répond à une demande constante de la profession agricole.

Nous proposons d’étendre l’obligation de création d’un espace de transition entre les espaces agricoles et les nouveaux espaces urbanisés à l’ensemble des communes et non pas seulement à celles qui ont un plan local d’urbanisme.

Nous proposons également de renforcer le caractère dérogatoire de la possibilité offerte de créer des zones de transition sur l’emprise agricole. Pour ce faire, nous soumettons explicitement cette dérogation à un avis conforme de la CDPENAF.

Dans le cas où, à titre dérogatoire, la zone de transition serait créée sur l’emprise agricole, nous suggérons d’ouvrir un droit de délaissement au profit du propriétaire du terrain concerné. En effet, la création de la zone de transition peut entraîner une forte perte de valeur du bien. L’équité exige que les propriétaires ruraux ne supportent pas cette perte de valeur.

Pour autant, il ne serait pas plus équitable que la commune supporte seule le coût du droit de délaissement. Il est donc proposé qu’il soit à la charge de l’aménageur. En sollicitant une dérogation, celui-ci devra également procéder à une estimation de ce montant, dans le cas où le propriétaire souhaiterait l’exercer, et apporter à la commune des garanties financières de paiement.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 582 rectifié bis.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 164 rectifié bis est présenté par MM. Pla, Montaugé et Gillé, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Michau et Stanzione, Mme Bélim, M. Bourgi et Mmes Conway-Mouret et Espagnac.

L’amendement n° 447 rectifié ter est présenté par M. D. Laurent, Mmes Imbert et Bellurot, MM. J.B. Blanc, Bouchet, Buis, Burgoa, Brault et Cabanel, Mme Chain-Larché, MM. Chatillon et Chevalier, Mme Conte Jaubert, MM. Cuypers et Duffourg, Mmes Dumont et Duranton, M. Fialaire, Mme Garnier, MM. Gremillet et Houpert, Mmes Josende et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. Lemoyne, H. Leroy et Lefèvre, Mme Malet, M. Milon, Mme Muller-Bronn, M. Panunzi, Mmes Paoli-Gagin, Perrot, Renaud-Garabedian et Richer, MM. Ruelle, Pointereau et Rojouan et Mmes Romagny, Schillinger et Ventalon.

L’amendement n° 585 rectifié est présenté par M. Pillefer, Mme Billon, M. Kern et Mme Jacquemet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 3

1° Première phrase

Supprimer les mots :

entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés

2° Deuxième et troisième phrases

Supprimer ces phrases.

La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 164 rectifié bis.

M. Sebastien Pla. La forte pression de l’urbanisation met en danger les terres agricoles et peut être une source de conflits d’usage entre les agriculteurs et les riverains.

Si la protection sanitaire de ces derniers et des utilisateurs des produits phytosanitaires est un impératif, l’agriculture ne doit pas seule en supporter le prix.

L’obligation pour les constructeurs de prévoir dans leurs projets une zone de transition répondant aux caractéristiques des zones de non-traitement est donc une avancée significative pour la protection du foncier agricole et le maintien des continuités agricoles.

Nous proposons par conséquent que les conditions dans lesquelles les projets de construction et d’aménagement situés en limite d’un espace agricole intègrent un espace de transition végétalisé non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces urbanisés au sein de la zone urbaine ou à urbaniser, à la charge de l’aménageur.

Un projet d’urbanisation situé en zone urbaine ou à urbaniser ne peut toutefois se situer simultanément sur l’emprise d’une zone agricole et en zone urbaine ou à urbaniser.

Dès lors, la mention « La zone de transition est projetée de préférence en dehors des zones dévolues à l’agriculture » est nulle et non avenue et la dérogation évoquée hors de propos.

On ne saurait accepter que les agriculteurs subissent un recul par rapport aux aménageurs. Le présent amendement a donc pour objet de clarifier la rédaction du nouvel article L. 151-6-3 du code de l’urbanisme en supprimant la possibilité de dérogation à l’obligation des constructeurs d’intégrer un espace de transition dans les nouvelles constructions, cette dérogation étant contraire à l’énoncé qui précède.

Nous avons élaboré cet amendement avec l’aide de la confédération des vignerons indépendants de France.

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour présenter l’amendement n° 447 rectifié ter.

M. Daniel Laurent. Cet amendement est identique au précédent.

Je signale simplement que nous sommes confrontés là à un problème récurrent, cause d’importants conflits entre les élus, qui favorisent l’urbanisation, et les agriculteurs, qui veulent vivre tranquillement de leur métier.

Il nous faut absolument y remédier et promouvoir, par nos amendements, le bien vivre ensemble !

M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour présenter l’amendement n° 585 rectifié.

Mme Annick Jacquemet. Il est défendu !

M. le président. L’amendement n° 952, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 3, deuxième phrase

Remplacer les mots :

La zone de transition est projetée

par les mots :

L’espace de transition végétalisé est situé

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. L’amendement n° 860, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3, deuxième phrase

Supprimer les mots :

de préférence

II. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Cet amendement vise à modifier les modalités d’intégration, dans les projets situés en limite d’un espace agricole, des espaces de transition végétalisés. Il s’agit de supprimer la mention « de préférence » dans la phrase suivante : « La zone de transition est projetée de préférence en dehors des zones dévolues à l’agriculture. »

Je souhaite en effet que les zones de transition soient projetées en dehors des zones dévolues à l’agriculture, de sorte que l’on protège la terre agricole.

Quant à la phrase suivante, « Il peut exceptionnellement être dérogé à cette mesure après avis favorable de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers », nous y sommes favorables.

L’amendement n° 954 du rapporteur a pour objet d’exiger un avis conforme de la CDPENAF ; le Gouvernement penche plutôt pour conserver l’avis favorable.

Quelle différence, par ailleurs, entre mon amendement et ce que propose le rapporteur ?

Je souhaite que les zones de transition de type parkings, parcs de jeux et autres lieux occasionnellement fréquentés par la population n’échappent plus à la protection dont bénéficieront les espaces visés à l’alinéa 3 de l’article 14 quinquies.

Il me semble important de conserver cette protection des zones non résidentielles. Ces espaces se caractérisent certes par une moindre exposition aux risques sanitaires, mais ils restent du moins fréquentés, qu’il s’agisse d’un parking, d’un parc de jeux, d’un jardin ou de toute autre zone qui, n’étant pas constituée d’habitations, n’est pas résidentielle à proprement parler. Il ne me paraît pas souhaitable, j’y insiste, que l’on exempte ces zones de la protection accordée aux zones aménagées.

Voilà la différence, mesdames, messieurs les sénateurs, entre l’amendement du Gouvernement, que je vous demande d’adopter, et les propositions du rapporteur.

M. le président. L’amendement n° 953, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 3, deuxième phrase

Supprimer les mots :

de préférence

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Il est rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 954, présenté par MM. Duplomb et Menonville, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 3, troisième phrase

Remplacer le mot :

favorable

par le mot :

conforme

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Cet amendement vise à exiger l’avis conforme de la CDPENAF pour l’obtention d’une dérogation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis : nous ne souhaitons pas revenir sur le principe en vertu duquel ces dispositions s’appliquent aux communes dotées d’un plan local d’urbanisme (PLU), et non à toutes les communes.

J’en viens aux amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié : nous voulons conserver cette possibilité de dérogation que vous proposez de supprimer, mes chers collègues. Pour la petite histoire, je fais un bref rappel à l’attention de M. Laurent : en commission des affaires économiques, nous avons accepté l’amendement que vous aviez déposé pour faire en sorte que les zones de non-traitement (ZNT) intégrées dans les projets de lotissement ou de parking situés en bordure d’un terrain agricole ne soient pas prises sur ce dernier.

À l’heure actuelle, lorsqu’un lotissement est construit, l’aménageur ne prend pas en compte la ZNT : cette ZNT s’impute donc sur les terrains agricoles attenants à ce lotissement.

Le premier progrès que nous avons fait par rapport au texte initial, c’est d’écrire que désormais l’espace de transition ne sera plus à la charge des agriculteurs : dans les communes dotées d’un PLU, mais non dans les communes sous RNU (règlement national d’urbanisme) ni même dans les communes couvertes par une carte communale, lesquelles ne voient tout de même pas beaucoup de lotissements se construire, les aménageurs devront prendre en compte, au titre de la surface de leur projet de lotissement, la bande correspondant à la ZNT.

Cela étant, force est de constater qu’il y a des endroits où cela n’est pas possible. Nous proposons donc par ailleurs qu’une dérogation à cette mesure puisse être demandée : la ZNT pourra être établie sur l’emprise agricole, mais seulement après avis conforme de la CDPENAF.

Quant à ce que vous proposez maintenant, mes chers collègues, cela revient à vouloir le beurre, l’argent du beurre, la crémière et tout ce qui va avec ! Nous avons déjà énormément avancé, en commission, en inscrivant dans le texte l’obligation pour les lotisseurs de prendre en compte la ZNT.

M. Daniel Laurent. C’est normal !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Comme je l’ai dit à propos des deux premiers amendements de cette discussion commune, il faut réserver cette obligation aux communes dotées d’un PLU et en exempter les petites communes, où se construisent peu de lotissements : l’idée n’est pas d’imposer ce genre de contraintes à chaque fois qu’une maison se construit quelque part !

Quant à revenir sur la dérogation prévue à l’alinéa 3, j’y suis défavorable, d’autant que ladite dérogation sera subordonnée, si vous votez l’amendement n° 954 de la commission, à l’avis conforme de la CDPENAF, ce qui verrouille quand même sérieusement la situation – s’il s’agit de construire sur des longueurs énormes en bordure de terrains véritablement agricoles, je ne suis pas sûr que la CDPENAF donne beaucoup d’avis conformes…

J’en viens à l’amendement n° 860 : le Gouvernement voudrait supprimer ce qu’on pourrait appeler la « dérogation parkings », c’est-à-dire exclure les parkings et autres « zones non résidentielles à très faible fréquentation » du champ de la dérogation.

A-t-on besoin de zones de non-traitement dans des espaces non résidentiels et peu fréquentés ? La commission est également défavorable à cet amendement.

En résumé, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis, sur les amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié, ainsi que sur l’amendement n° 860.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur Bleunven, madame Loisier, l’adoption de vos amendements nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis reviendrait à imposer à tout projet, y compris déposé par un particulier pour une maison individuelle, d’intégrer l’espace de transition dont il est question, ce qui n’est pas envisageable. Un droit de délaissement serait de surcroît institué, dont le coût serait à la charge de l’aménageur. Or, beaucoup d’opérations se faisant sans aménageur, un tel dispositif serait peu opérant dans de nombreux cas.

Pour ces raisons, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, je vous demande de retirer vos amendements ; à défaut, j’y serai défavorable.

Madame Jacquemet, messieurs Pla et Laurent, je souhaite comme vous éviter que les espaces de transition créés par l’article 14 quinquies ne soient pris sur les zones dévolues à l’agriculture et supprimer la dérogation s’y rapportant. C’est pourquoi le Gouvernement propose, comme le rapporteur, un amendement visant à supprimer les termes : « de préférence ».

Je demande donc le retrait des amendements nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié au profit de celui du Gouvernement.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 952 du rapporteur, il vise à remplacer les termes « zone de transition » par les termes « espace de transition végétalisé ». Ces derniers mots étant ceux inscrits à la première phrase de l’alinéa 3, il est cohérent de maintenir ce vocable dans l’ensemble de l’article : avis favorable.

J’en viens aux amendements nos 953 et 954 du rapporteur : l’article 14 quinquies, qui détermine les modalités d’institution des espaces de transition, doit être amélioré sur plusieurs points.

Tout d’abord, l’espace de transition végétalisé doit être projeté en dehors des zones dévolues à l’agriculture : l’idée est bien de préserver les zones agricoles. L’amendement n° 953 du rapporteur, de même que l’amendement n° 860 du Gouvernement, vise à éviter les dérogations en supprimant les termes : « de préférence ».

J’insiste néanmoins sur un point à propos duquel, monsieur le rapporteur, nos analyses divergent.

Vous considérez que les zones non résidentielles, c’est-à-dire où l’on ne réside pas – ni la maison ni le jardin privatif –,…

M. Laurent Duplomb, rapporteur. … peu fréquentées !

Mme Annie Genevard, ministre. … peu fréquentées – est évoquée « la faiblesse des risques sanitaires induits par la brièveté de leur fréquentation » – peuvent être exemptées de la protection instaurée au présent article.

Le Gouvernement souhaite supprimer cette possibilité d’exemption de protection que vous voulez voir s’appliquer à des zones non résidentielles qui sont malgré tout attenantes aux zones résidentielles. Songez par exemple que les zones non résidentielles situées au sein d’un lotissement sont fréquentées par les promeneurs.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. La définition que nous avons inscrite à l’article 14 quinquies est claire : non résidentiel et peu fréquenté !

Mme Annie Genevard, ministre. Et végétalisé ! Ces zones sont peut-être moins fréquentées qu’une place de marché en centre-ville, je vous l’accorde, mais elles ne sont pas non plus exemptes de toute fréquentation. Or c’est bien de l’utilisation de produits phytosanitaires et des obligations de protection afférentes que l’on parle ici !

Voilà la différence entre l’amendement du Gouvernement et ceux de la commission, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.

Mme Anne-Sophie Romagny. Madame la ministre, je suis l’auteure de la proposition de loi visant à protéger les terres agricoles et à créer des zones végétalisées intégrant des zones de non-traitement, qui est à l’origine de l’amendement adopté en commission auquel le rapporteur a fait référence.

Dans l’exposé des motifs de cette proposition de loi, j’évoque notamment les camps militaires, dont l’emprise est vaste et qui sont souvent situés à proximité de champs. On ne saurait à mon sens considérer la fréquentation d’un camp militaire comme suffisante pour empêcher le traitement phytosanitaire.

Les zones dont il est question ne sont pas des zones où l’on vit : on ne vit pas sur un parking, sauf exception liée, malheureusement, à des circonstances sociales bien particulières.

Un parking, a priori, on n’y vit pas, on n’y dort pas, on n’y mange pas ; une zone militaire, c’est pareil…

Madame la ministre, vous avez parlé des parcs et des jardins pour enfants : on peut en effet se poser la question pour ce cas d’espèce.

Mais on voit bien comment les choses se passent en milieu rural : quand le fil à linge est sorti, l’agriculteur vient vous voir avant de traiter ou de faucher ! C’est le bon sens qui prévaut dans ce genre de situations : si des gens se trouvent sur la zone de traitement, les agriculteurs font attention, on l’imagine assez aisément.

En tout état de cause, on ne peut imputer les zones de non-traitement sur des espaces où l’on ne réside pas ! Ce sont bien les espaces résidentiels qui doivent faire l’objet d’une protection spécifique.

Je ne suis pas favorable à votre amendement, madame la ministre.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Très bien ! Votons !

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je constate qu’en définitive l’usage des phytosanitaires complexifie terriblement notre droit ! (Sourires.) Il suffirait de ne pas en utiliser pour ne pas avoir besoin de telles zones de transition.

Ces zones, je le rappelle, sont perdues pour la production agricole, ce qui est bien dommage. Dans la continuité de ce que mon groupe a proposé ce soir, je suggérerais volontiers que l’on plante des haies dans ces zones, ce qui permettrait au moins d’accroître la production de biomasse : ce ne serait déjà pas si mal !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. M. Salmon ne croit pas si bien dire : c’est comme ça que ça va finir !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annie Genevard, ministre. Ce sont les « zones attenantes aux bâtiments habités » qui sont concernées : tels sont les termes exacts inscrits à l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Sans vouloir forcer le trait, mais pour la petite plaisanterie du soir, je me permets une remarque supplémentaire.

Si, comme nous sommes en train de le faire à juste titre pour protéger les terrains agricoles, on intègre les 5 ou 10 mètres de zone de non-traitement au sein du projet de lotissement, alors, s’agissant d’une distance de sécurité – vous me l’accorderez –, cette surface non habitable sera retranchée du lot qui sera vendu.

Mme Anne-Catherine Loisier. On fera une haie !

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Le coût du projet s’en trouvera accru, puisque, par définition, ce périmètre de 5 à 10 mètres autour du lotissement ne sera pas vendu. Comment finira-t-il, à votre avis ? En haie ! Et tous les riverains finiront par dire qu’ils n’en veulent plus, de cette haie, car elle leur bouche la vue !

C’est exactement ce qui se passera : comme tout terrain qui n’est pas entretenu, faute d’être fauché régulièrement, ce périmètre deviendra une haie. Et, dans une dizaine ou une quinzaine d’années, ceux qui siégeront alors dans cet hémicycle seront de nouveau saisis du problème : comment et par quels moyens supprimer les haies qui cachent la vue des riverains ? Comment redonner de l’air aux lotissements qui auront vu pousser tout autour une multitude de haies ? C’est sans fin, et tant mieux : c’est la joie du travail parlementaire !

M. Yves Bleunven. Je retire l’amendement n° 263 rectifié bis, monsieur le président !

Mme Anne-Catherine Loisier. Et moi l’amendement n° 582 rectifié bis !

M. le président. Les amendements identiques nos 263 rectifié bis et 582 rectifié bis sont retirés.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 164 rectifié bis, 447 rectifié ter et 585 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 952.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 860.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 953.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 954.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 695, présenté par MM. Gontard et Salmon, Mme Guhl, MM. Jadot, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Mellouli et Mmes Ollivier, Poncet Monge, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le I de l’article L. 151-11 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Définir des zones sur lesquelles l’utilisation de produits phytosanitaires par quelque vecteur que ce soit est encadrée ou interdite. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Il s’agit d’autoriser les collectivités locales à inclure dans leur PLU des zones sans pesticides, version plus ambitieuse des zones de non-traitement qui existent déjà.

Nous voyons plusieurs avantages à une telle disposition : protéger les espaces habités ou occupés, au premier rang desquels les écoles et les lieux de santé, préserver les aires de captage et les cours d’eau – c’est déjà possible – ou – c’est plus ambitieux – orienter conformément à nos objectifs, lors de leur transmission, la destination des parcelles agricoles.

Une telle disposition serait un outil précieux d’aménagement du territoire pour les conseils municipaux et communautaires. Plutôt que d’en passer par une loi nationale, donnons la main aux collectivités territoriales en leur permettant d’avancer de manière localisée et concertée vers la sortie des pesticides. « Concertée », j’y insiste, car, je le rappelle, les plans locaux d’urbanisme sont soumis à de très larges discussions et évaluations ; or la définition de telles zones ferait nécessairement l’objet de délibérations nourries entre l’ensemble des acteurs concernés, au premier rang desquels les agriculteurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 695.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 quinquies, modifié.

(Larticle 14 quinquies est adopté.)

Article 14 quinquies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Après l’article 14 quinquies (interruption de la discussion)

Après l’article 14 quinquies

M. le président. L’amendement n° 507 rectifié bis, présenté par Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Le Houerou, M. Lurel, Mme Blatrix Contat, MM. Ros, Temal, Bourgi, M. Weber, Pla et P. Joly, Mme Conway-Mouret, M. Michau, Mmes Monier et Canalès et M. Chantrel, est ainsi libellé :

Après l’article 14 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 181-17 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, le préfet met en demeure tout titulaire du droit d’exploitation de parcelles incultes ou manifestement sous-exploitées, et non bénéficiaire d’une mesure de soutien du ministère de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt ou du programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité, depuis au moins un an et susceptibles d’une remise en état lorsque, dans l’un ou l’autre cas, aucune raison de force majeure ne peut justifier cette situation, soit de les mettre en valeur, soit de renoncer à son droit d’exploitation. »

La parole est à Mme Marion Canalès.

Mme Marion Canalès. Permettez-moi d’aborder, au nom de mes collègues Audrey Bélim, Saïd Omar Oili et Victorin Lurel, un sujet qui concerne les outre-mer.

La problématique du foncier agricole est cruciale dans les territoires d’outre-mer du fait de leurs spécificités, et notamment de leur exiguïté et de leur topographie : 33 % de la superficie des départements et régions d’outre-mer (Drom) est destinée à l’agriculture, contre 52 % en France hexagonale.

Cette situation induit une concurrence accrue entre les différents usages du sol ; cette pression foncière plus forte se fait au détriment de l’activité agricole, dont les terres sont de plus en plus « grignotées » au profit d’autres activités : construction d’habitations, activité industrielle et commerciale.

Si ce constat devait perdurer, voilà qui rendrait impossible la réalisation des objectifs de souveraineté alimentaire des territoires ultramarins fixés par le Président de la République.

Il s’agit donc de mettre en place, pour les territoires d’outre-mer, une procédure dérogatoire destinée à encourager la mise en valeur des terres incultes : le délai applicable à la mise en demeure par le préfet des propriétaires de terres sous-exploitées serait porté de trois ans à un an en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Ma chère collègue, s’agissant de désigner une parcelle comme « abandonnée », c’est un peu court, un an ! Il peut arriver, malheureusement, qu’un épisode météorologique vous empêche de semer… Cela m’est arrivé très rarement dans ma vie – une fois, pour tout dire ! –, mais cela m’est arrivé : je n’ai pas pu labourer ma parcelle au printemps et l’ai laissée telle qu’elle était. Certes, j’ai fini par la faucher, mais elle a pu apparaître comme quasiment inculte pendant quelques mois !

Un an, ce n’est pas assez. Le délai actuellement applicable est de trois ans : cela permet de démontrer, saison après saison, que le propriétaire de la parcelle n’a pas procédé aux emblavements ou autres semis normaux. En juger sur une année, c’est beaucoup trop court ! Cela conduirait à une autre forme d’injustice : celui qui a eu un problème, une maladie par exemple, et n’a pas pu une année semer sa parcelle s’exposerait à la voir classée comme abandonnée, quand il en irait tout autrement en réalité.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement est également défavorable au raccourcissement du délai applicable au constat d’inculture en outre-mer.

Une procédure existe, à la main du préfet : elle est un des moyens les plus appropriés pour réduire le phénomène des friches. Mais elle est très encadrée. Elle est, du reste, souvent vécue comme une contrainte importante, en raison de l’atteinte qu’elle représente au droit de propriété, qui est un droit constitutionnel.

Si je comprends l’objectif, qui est d’accélérer cette procédure, une telle disposition risque de constituer une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d’entreprise, qui sont, j’y insiste, constitutionnellement garantis.

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Je ne retire pas l’amendement, considérant que mes collègues Bélim, Omar Oili et Lurel, qui représentent trois territoires ultramarins bien différents les uns des autres, connaissent parfaitement ce dossier et insistent sur la faisabilité de cette mesure.

Sans préjuger des compétences de notre collègue rapporteur sur le sujet, je maintiens que cette disposition est tenable, en tout cas pour ce qui est des territoires d’outre-mer.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 507 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, je vais lever la séance.

Nous avons examiné 179 amendements au cours de la journée ; il en reste 85 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Après l’article 14 quinquies (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture
Discussion générale

8

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 12 février 2025 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

À seize heures trente et le soir :

Désignation des dix-neuf membres de la commission d’enquête sur les coûts et les modalités effectifs de la commande publique et la mesure de leur effet d’entraînement sur l’économie française ;

Deux conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :

Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord portant création du Centre de développement des capacités cyber dans les Balkans occidentaux (C3BO) (texte de la commission n° 285, 2024-2025) ;

Projet de loi autorisant la ratification de la résolution LP.3(4) portant amendement de l’article 6 du Protocole de Londres de 1996 à la Convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières (procédure accélérée ; texte de la commission, n° 259, 2024-2025) ;

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture (texte de la commission n° 251, 2024-2025).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 12 février 2025, à zéro heure quarante.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER