M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, quel périple ! Avouons que long chemin parcouru par ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, trop inédit pour ne pas être évoqué, et hautement périlleux dans la mesure où ce texte brasse des milliards d’euros, n’a rien de beau ni de très bon. Alors que le déficit initialement prévu s’élevait à 18,3 milliards d’euros, le texte considéré comme adopté après le recours au 49.3 prévoit dorénavant un déficit d’un peu plus de 22 milliards d’euros.

C’est hélas ! une constante : chaque année, nous ne pouvons que déplorer que le déficit, qui s’établit cette année à un niveau record hors période de crise, provienne principalement de la branche maladie, comme nous nous inquiétons de son évolution pour les années suivantes et de l’augmentation de la dette.

Les mesures décidées en nouvelle lecture par le Gouvernement, qui alloue 1 milliard d’euros supplémentaires à l’hôpital, font grimper l’objectif de dépenses de la branche maladie, à l’origine fixée à 260,8 milliards d’euros. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale entérine par-là la poursuite de la dégradation du solde de la branche maladie.

Si le déficit de la branche maladie est en légère amélioration en 2025 par rapport au déficit estimé pour 2024, le solde de la branche se dégradera en effet de nouveau à partir de 2026 et jusqu’en 2028, où il atteindra 14,9 milliards d’euros.

Ce texte comporte toutefois des mesures positives. Je remercie à ce titre les ministres de leur écoute.

Je suis ravie que l’essentiel des apports du Sénat en première lecture aient été conservés : la fiscalité comportementale sur les boissons sucrées et édulcorées, ainsi que sur la publicité des jeux d’argent et de hasard, des mesures de lutte contre la fraude, diverses avancées en matière de lutte contre les pénuries de médicaments, l’utilisation du dossier médical partagé (DMA) par les professionnels de santé et même la « taxe lapin ».

Cela est d’autant plus satisfaisant que, comme vous me l’avez confirmé devant notre commission, madame la ministre, « il n’y a pas de mesures réglementaires cachées » dans ce texte.

Je me réjouis aussi de l’article introduit pour lutter contre la financiarisation de l’offre de soins, inspiré des propositions formulées à l’issue de la publication du rapport sénatorial d’information intitulé Financiarisation de loffre de soins : vers une offre publique dachat (OPA) sur la santé ?, que j’ai cosigné avec mes collègues Olivier Henno et Bernard Jomier.

La régulation des dépenses conduisant à une concentration des structures, elle ouvre une porte à la financiarisation de l’offre de soins. L’implication des partenaires conventionnels dans la protection de l’indépendance des professionnels de santé et le suivi de la répartition territoriale de l’offre de soins n’est que l’une des premières mesures que nous prenons pour lutter contre les effets de la financiarisation. J’espère que d’autres mesures suivront. À l’heure où la question de la pertinence des soins est posée, la préservation de l’indépendance des professionnels de santé est en effet un enjeu majeur.

Si le texte contient des mesures d’économie nécessaires, son contenu reste toutefois insuffisant, compte tenu de la situation financière dégradée, mais aussi des attentes des Français en matière d’accès aux soins.

Nous regrettons que ce texte demeure lacunaire quant à la réforme structurelle du financement de l’hôpital, pourtant tant attendue. La politique du sparadrap ne peut perdurer. Toutes les fédérations tirent le signal d’alarme à juste raison, puisque le déficit des hôpitaux devrait atteindre le niveau record de 3,5 milliards d’euros en fin d’année 2024.

Alors que les établissements de santé sont confrontés à une forte détérioration de leur situation financière, le risque de sous-financement chronique de ces établissements devient une réalité. Prenons garde à ne pas créer les conditions d’une crise au sein de ces établissements, mesdames, monsieur les ministres.

Je note également que l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a été marqué par des changements de prévisions budgétaires qui ont semé le doute quant à la fiabilité des projections sur lesquelles l’exécutif s’appuie pour piloter l’Ondam et sur la capacité même de celui-ci à assurer ce pilotage – ce Gouvernement n’est pas le premier, tant s’en faut, à rencontrer de telles difficultés.

L’Ondam devrait donc s’établir à 265,9 milliards d’euros, c’est-à-dire à un niveau supérieur de 2 milliards d’euros à la prévision initiale du Gouvernement et de 11 milliards d’euros au projet de loi initial pour 2024. Rien que cela ! Pour autant, nos concitoyens et les professionnels de santé ne sont pas satisfaits.

Le respect de la trajectoire ambitieuse fixée jusqu’en 2028 exigera un pilotage resserré de l’Ondam. L’Ondam est-il seulement pilotable ? C’est l’éternelle question. Il faudra pour cela nous efforcer d’améliorer l’efficience de notre système de santé, en ville comme à l’hôpital. Une telle ambition nous renverra à notre sens des responsabilités.

Non, mes chers collègues, comme c’est le cas depuis plusieurs années, les comptes cette année n’y sont pas, et ils n’y seront pas l’année prochaine si nous ne prenons pas nos responsabilités et ne retroussons pas nos manches pour dessiner des perspectives plus soutenables. Sans ces efforts qu’il nous revient d’engager collectivement, nous ne parviendrons pas à préparer notre système aux conséquences du vieillissement de la population et au développement des maladies chroniques.

Alors que la situation nous invite urgemment à faire un grand pas en avant, la politique des petits pas prévaut pour l’heure. J’espère toutefois que ces petits pas seront suffisamment nombreux pour préserver notre système, qui se veut solidaire et protecteur.

En tout état de cause, nous invitons le Gouvernement à travailler à une loi-cadre pluriannuelle, à laquelle le projet de loi de financement de la sécurité sociale s’adosserait chaque année. Celle-ci devrait faire toute sa place à la prévention et donner de la visibilité à tous les acteurs de notre système de santé.

Un tel travail exige de faire des choix certes qui peuvent être difficiles à court terme, mais qui permettront de dessiner une trajectoire d’action à moyen et long termes. Le groupe Les Républicains l’appelle de ses vœux.

Dans cette attente, je m’associe aux propos du président Mouiller quant à l’urgente nécessité d’adopter ce texte conforme.

Je remercie enfin la rapporteure générale et mes collègues rapporteurs du travail qu’ils ont accompli sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 particulièrement sportif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Jocelyne Guidez applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous voilà réunis pour débattre de nouveau du projet loi de financement de la sécurité sociale.

Nous en discutons dans un contexte désormais bien connu : nous le savons, et vous le savez, sitôt le texte adopté et transmis à l’Assemblée nationale, un 49.3 viendra entériner les orientations prises par le Gouvernement, qu’importent les votes et les débats dans notre chambre !

Alors que la situation politique est plus que jamais instable et les Français plus que jamais dégoûtés par les manœuvres d’appareil, le Sénat se distingue – je le déplore – par un soutien pléthorique à un gouvernement crypto-social-démocrate, au seul motif qu’il est « Retailleau-compatible ». Mes chers collègues, répétons-le, il s’agit d’une anomalie institutionnelle. Et, non, vous n’êtes pas revenus au pouvoir !

Notons à ce propos le soutien équivoque d’un parti socialiste qui, tout en essayant de faire oublier que sa survie électorale dépend de son degré de vassalisation à Mélenchon, tente de suivre la voie du juste milieu : faire passer ce budget sans soutenir nommément le Gouvernement. À ne pas faire de choix, on soutient toujours les pires…

Quant à ce budget, que pouvons-nous en dire ? Le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous devons examiner entérine un déficit de 22 milliards d’euros. Comme l’a rappelé le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), ce texte ne nous laisse que peu de marges de manœuvre au moment même où le chômage et une énième vague de désindustrialisation percutent notre économique moribonde.

Ce texte ne fait rien contre les totems et les tabous liés à cinquante ans de mauvaise gestion. Que prévoit-il contre les « profiteurs du haut » et les 20 milliards d’euros de fraudes aux cotisations sociales ? Rien ! Que met-il en œuvre contre les autres fraudes – je pense notamment aux cartes vitales surnuméraires, aux RSA de complaisance ou aux allocations non contributives distribuées aux étrangers ? Aucune mesure non plus…

La question n’est plus de savoir, mes chers collègues, s’il faut raboter ou optimiser les dépenses. Il importe désormais de renverser un système fiscal qui détruit nos capacités productives et empêche les Français de se projeter sereinement dans l’avenir.

Quand mettra-t-on fin aux coûteuses et inutiles agences régionales de santé (ARS), structures technocratiques déconnectées de la réalité de l’hôpital et de la médecine de ville ?

Quand reviendrons-nous sur la véritable préférence étrangère qui s’applique dans les faits, puisque 40 % des sommes versées au titre du minimum vieillesse le sont à des étrangers et qu’un demi-million de clandestins bénéficient de l’aide médicale de l’État (AME), dont le panier de soins est délirant ? Pendant ce temps, combien de Français renoncent à se soigner ou prennent peur d’aller à l’hôpital ?

M. Christopher Szczurek. Face à de tels défis, ce budget sera donc celui non pas de la rupture, mais bien de la continuité – du système comme de la faillite.

Nous n’avons plus qu’à attendre un retour aux urnes, le plus rapide possible, pour mettre en œuvre ce grand mouvement de redressement et d’espérance que les Français réclament. Soyez certains que nous serons au rendez-vous !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Catherine Vautrin, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens évidemment à remercier chacun des intervenants, mais aussi à revenir brièvement sur quelques points.

Madame la rapporteure générale, comme nombre d’orateurs sur les diverses travées de cet hémicycle, vous avez souligné l’importance du déficit. Vous avez eu raison de le faire, parce que celui-ci a atteint un niveau historiquement élevé, hors crise, de 22 milliards d’euros – il est absolument indispensable que chacun ait bien ce chiffre en tête.

Monsieur le président Mouiller, vous avez souligné que 30 % de ce déficit étaient liés aux dépenses de retraites et 70 % aux dépenses d’assurance maladie. Une telle répartition doit nous interpeller ; elle montre qu’il faut engager une réflexion sur le volet maladie de la sécurité sociale.

À cet égard, et je parle sous le contrôle du ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, nous nous intéresserons bien évidemment à la question de la pluriannualité du cadre d’analyse, un sujet à part entière, qu’il convient de trancher.

Madame Pantel, monsieur Iacovelli, vous avez vous aussi regretté l’ampleur du déficit, mais vous avez surtout mis l’accent sur l’idée que la sécurité sociale devait se concevoir comme un système à l’équilibre. À mon sens, c’est un enjeu absolument primordial.

Le Premier ministre a lui-même pour habitude de dire que cette question pose un problème moral : en effet, si ces déficits ne sont pas résorbés, nous nous en débarrasserons sur nos enfants, ce qui n’est évidemment pas acceptable.

Plusieurs orateurs ont parlé du taux d’activité dans notre pays et l’ont comparé à celui des autres pays d’Europe. Nous le savons tous, en France, le taux d’emploi, aussi bien des jeunes que des seniors, est inférieur à la moyenne européenne, ce qui constitue un problème tout à fait cardinal.

Monsieur Henno, vous avez évoqué les enjeux liés à l’enfance. On ne peut pas, d’un côté, déplorer, la main sur le cœur, les problèmes de notre démographie – vous avez parlé d’une natalité qui s’effondre – et, de l’autre, regarder ailleurs. Effectivement, les naissances baissent, et cela pour des raisons certes médicales, mais aussi sociétales, parmi lesquelles les difficultés que connaissent certains Français pour se loger ou pour faire garder leurs enfants. Ce sont des problématiques éminemment interministérielles sur lesquelles nous devons travailler.

Dans le même ordre d’idée, il nous faudra continuer à avancer sur le dossier de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et trouver des solutions pour ces 400 000 enfants, pour lesquels le moins que l’on puisse dire est que notre pays n’est pas au rendez-vous.

Madame Apourceau-Poly, permettez-moi tout d’abord de rectifier certains des chiffres que vous avez cités : la hausse de cotisation à la CNRACL atteindra non pas 2,3 milliards d’euros, mais 1,7 milliard d’euros en 2025 ; l’Ondam progressera non pas de 3,3 %, mais de 3,4 % ; enfin, le Gouvernement prévoit une inflation non pas de 1,5 %, mais de 1,4 %.

Plus encore que les chiffres, je veux insister sur l’importance de l’augmentation de l’Ondam : on parle de 9 milliards d’euros de plus qu’en 2024, ce qui correspond donc à une nette hausse.

J’ajoute que, par rapport à la version du texte élaboré par la commission mixte paritaire, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit un milliard d’euros de plus pour les hôpitaux et 200 millions d’euros de plus pour accompagner les Ehpad, qui s’ajoutent aux 100 millions d’euros qui avaient été prévus initialement.

Pour ce qui est de la « taxe lapin », deux lectures très différentes nous ont été proposées : la vôtre, madame Apourceau-Poly, d’une part ; et celle de Mme Imbert, de l’autre. Vous ne serez pas surprise si je vous dis, madame la sénatrice, que je me sens plus à l’aise avec celle de Mme Imbert,…

Mme Cathy Apourceau-Poly. Pas surprise du tout ! (Sourires.)

Mme Catherine Vautrin, ministre. … tout simplement parce que j’estime qu’il n’est pas normal de ne pas honorer un rendez-vous.

On peut avoir un empêchement, mais on doit s’excuser. C’est de l’ordre du normal, d’autant qu’une consultation non honorée crée une perte de chances pour celui ou celle qui ne peut pas avoir de rendez-vous, ainsi qu’une forme de gaspillage. Nous avons besoin d’une responsabilisation des patients.

Madame Le Houerou, puisque vous avez abordé la question des concertations avec les partenaires sociaux, je souhaite revenir sur trois acquis essentiels.

Tout d’abord, je veux évoquer l’actualité du groupe de travail sur les retraites : nous attendons la remise, mercredi prochain, du rapport de la Cour des comptes ; plusieurs réunions auront lieu par la suite.

Ensuite, j’y insiste, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une progression de l’Ondam.

Enfin, troisième acquis, nous proposons une hausse de 100 millions d’euros à 300 millions d’euros du fonds d’urgence pour les Ehpad, une augmentation que j’ai déjà mentionnée.

J’aurais pu évoquer bien d’autres sujets, comme celui du changement d’approche du Gouvernement sur la fiscalité des véhicules de fonction. On le voit, ce texte a fait l’objet d’évolutions significatives.

Par ailleurs, certains orateurs ont signalé qu’ils attendaient toujours la loi Grand Âge. Ils ont raison, mais ce n’est pas l’Arlésienne : tout comme l’enfance, dont je parlais à l’instant, le grand âge est un sujet crucial, auquel il nous faudra réfléchir dans le cadre du grand virage démographique que nous vivons.

Je sais qu’il y a, non seulement au sein de votre groupe, madame Le Houerou, mais aussi plus globalement au sein du groupe socialiste de l’Assemblée nationale et du parti socialiste, des spécialistes de cette question, que nous avons déjà reçus et avec lesquels j’ai bien l’intention de continuer à réfléchir. En effet, la transition démographique est, de mon point de vue, un sujet tout à fait transpartisan, sur lequel il doit être possible de trouver collectivement des solutions.

Pour conclure, si l’on devait retenir quelques éléments clés, j’insisterai sur l’idée que l’on peut évidemment travailler ensemble sur la question démographique dans un cadre de nature pluriannuelle : nous offririons alors à nos concitoyens une véritable perspective, afin de préparer le pays à l’horizon de 2050.

C’est un enjeu majeur, mesdames, messieurs les sénateurs. Au moment où je vous parle, le taux de fécondité des Françaises nés en 1990 s’établit à 0,86 enfant par femme… Certes, eu égard à leur horloge biologique, ces femmes peuvent espérer avoir d’autres enfants, mais on voit bien qu’il y a là un véritable enjeu de notre pays.

Démographie et taux d’emploi : telles sont les réponses les plus concrètes que nous pourrons apporter à nos concitoyens pour l’avenir, en fonction de la visibilité dont nous disposerons et de la vision que nous pourrons partager.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la bonne compréhension de tous, je veux rappeler un ou deux éléments simples.

Cette année, en 2025, eu égard aux budgets qui vont être votés, les dépenses du petit périmètre de l’État, c’est-à-dire les dépenses des ministères, vont baisser de 2 % en valeur. Il s’agit d’un effort inédit, que je tiens à saluer ici.

Si nous y intégrons l’ensemble des opérateurs, ainsi que les charges d’intérêt de la dette, la dépense publique de l’État et des administrations centrales augmentera de 0,6 % en volume cette année. Pour les collectivités locales et les administrations de sécurité sociale, cette hausse s’établira à respectivement 1,2 % et 1,6 %.

Pourquoi est-ce que je rappelle ces chiffres ? C’est tout simplement pour vous montrer, mesdames, messieurs les sénateurs, alors que vous vous apprêtez à voter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, que c’est le périmètre des dépenses sociales qui va connaître la plus forte augmentation.

Je le redis : 1,6 % de hausse pour la sécurité sociale, contre 1,2 % pour les collectivités et 0,6 % pour l’État malgré la prise en compte des charges d’intérêt de la dette. Cela signifie que notre nation continue de fournir des efforts massifs pour sa protection sociale et sa sécurité sociale.

Je me tourne désormais vers les sénatrices de gauche, notamment celles du groupe communiste : non, l’État n’organise pas le déficit de la sécurité sociale pour vous contraindre à accepter des baisses de dépenses ! Au contraire, les dépenses hospitalières continuent d’augmenter – elles s’accroîtront de 3,8 % en 2025. L’Ondam progresse également de 3,4 %. Au total, j’y insiste une nouvelle fois, les dépenses de l’ensemble du périmètre de la sécurité sociale sont en hausse de 1,6 % en volume.

Aussi, je le redis, nous n’organisons pas le déficit.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Et les 80 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. En outre, vous le savez, une très grande partie des dépenses sociales sont désormais financées par des impôts, non par des cotisations.

Prenons la TVA. La moitié du produit de cette taxe finance l’État, 20 % les collectivités et les 30 % restants la sphère sociale. Nous ne sommes donc pas en train de priver artificiellement la sécurité sociale de ressources. C’est tout l’inverse ! Depuis plusieurs années, la sphère sociale bénéficie de transferts massifs de l’État.

Voilà les quelques chiffres et notions sur lesquels je souhaitais insister. Très franchement, les 22 milliards d’euros de déficit de la sécurité sociale sont non pas une construction comptable, mais le reflet d’une très forte hausse de nos dépenses.

Mme Céline Brulin. Et les recettes ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Quant aux recettes, elles excèdent nettement le seul produit des cotisations sociales.

Il nous faut engager un débat plus global sur la manière dont nous voulons répartir l’effort entre les générations, entre les Français, entre les actifs et ceux qui ne travaillent plus et entre les sources de revenus.

Chacun d’entre nous a appelé à une discussion dans un cadre pluriannuel. Tout ne se résoudra pas l’année prochaine, mais il faudra avancer avec lucidité et honnêteté.

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Article 1er

Article liminaire

Les prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour les années 2024 et 2025 s’établissent comme suit, au sens de la comptabilité nationale :

 

(En points de produit intérieur brut)

2024

2025

Recettes

26,6

26,7

Dépenses

26,6

26,8

Solde

0,0

-0,1

M. le président. L’amendement n° 35, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. L’article liminaire expose les perspectives de recettes et de dépenses des administrations de sécurité sociale, qui reposent sur des prévisions économiques trop optimistes, voire irréalistes, avec pour seul objectif de rassurer les investisseurs, en l’occurrence les groupes propriétaires de notre dette.

Or ces prévisions se sont révélées erronées pour l’année 2024, de même qu’elles l’ont été pour l’année 2023. Cet article ne peut en aucun cas être un support de discussion valable. Nous en demandons par conséquent la suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Lors de l’examen de ce texte en première lecture, la commission a déjà émis un avis défavorable sur un amendement similaire. Aussi, je m’interroge quand je vous vois le présenter et le défendre de nouveau à l’occasion de cette nouvelle lecture, cher collègue…

Les motifs de notre opposition sont inchangés : tout d’abord, l’article liminaire est une disposition organique, ce qui en fait une obligation ; ensuite, je ne vois pas bien comment il serait possible de bâtir un budget, que ce soit pour la sécurité sociale, pour une collectivité ou même pour une association, sans disposer de prévisions.

Or tel est l’objet même de cet article, qui regroupe les prévisions des dépenses, des recettes et des soldes de l’ensemble des administrations de sécurité sociale.

Cet article liminaire est utile, pour ne pas dire indispensable. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour aller dans le même sens que Mme la rapporteure générale, je précise que l’article liminaire offre une vision globale de ce que nous connaissons du solde du régime obligatoire de sécurité sociale, du fonds de solidarité vieillesse (FSV), ainsi que des contributions affectées à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) et au régime de l’Unédic.

Il fournit donc une vision comptable intégrée à la fois de l’exercice 2024, pour le passé, donc, et de l’exercice 2025, pour ce qui concerne les prévisions.

Même si la réalité ne nous plaît pas, il est nécessaire de la rendre tangible. Cet article liminaire ne révèle pas l’intensité du volontarisme de l’exécutif. Il se contente de décrire la situation. C’est pourquoi je suis défavorable à sa suppression.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 2, tableau, dernière colonne

1° Troisième ligne

Remplacer le nombre :

26,8

par le nombre :

27

2° dernière ligne

Remplacer le nombre :

-0,1

par le nombre :

-0,3

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Lors de l’examen en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, nous avons regretté que, malgré son importance stratégique, notamment en matière de souveraineté sanitaire, nous n’ayons pas abordé la question de l’Établissement français du sang (EFS).

Face à l’absence de financement durable pour l’activité de service public de la santé de l’EFS, il avait été décidé, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, d’acter le principe d’une subvention pérenne dans le cadre de l’assurance maladie. Celle-ci devait être discutée chaque année lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Alors que, en 2024, le Gouvernement avait fixé à 100 millions d’euros le montant de cette subvention, cette dernière n’est mentionnée nulle part dans le texte ni même dans les annexes du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

Pourtant, elle est indispensable si l’on veut que l’ESF puisse assurer ses missions de service public, notamment en matière de transfusion sanguine, et si l’on veut réellement donner à cet établissement les moyens de réaliser ses ambitions et de mettre en place son plan Plasma.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chère collègue Cathy Apourceau-Poly, nous sommes unanimement d’accord pour que l’Établissement français du sang dispose des financements qui lui sont nécessaires.

Chaque année, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous sommes nombreux ici à défendre cet établissement. Pour autant, il n’est pas judicieux de prévoir un tel abondement dans cet article. Ce n’est juridiquement pas souhaitable.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Où doit-on voter cette disposition, alors ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C’est pourquoi j’avais émis en première lecture un avis défavorable sur un amendement analogue. Si nous partageons unanimement votre soutien à l’EFS, vous ne serez pas étonnée, ma chère collègue, que j’émette un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice, le Gouvernement a préparé un plan de financement ambitieux pour l’EFS. Ainsi, à la page 59 de l’annexe 2 au présent texte, il est bien prévu que, en 2025, nous augmentions de 10 % la dotation à l’EFS, ce qui représente 110 millions d’euros supplémentaires.

Il s’agit d’une hausse importante pour un établissement qui, comme vous l’avez dit, est essentiel au bon fonctionnement du système sanitaire. Je tiens ici à saluer Thibault Bazin, le rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, qui a défendu l’idée assez simple selon laquelle tous les opérateurs entrant dans le périmètre de la sécurité sociale devaient faire des efforts, à l’exception du seul Établissement français du sang (EFS).

J’ai en outre une bonne nouvelle à vous annoncer : les recettes d’activité de l’EFS dans le domaine de la délivrance des plasmas seront rehaussées d’environ 20 % en 2025 grâce à la hausse des tarifs de cession du plasma, lequel est, comme vous le savez, cédé au laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB).

Enfin, je le répète, tous les Français sont évidemment appelés à soutenir l’Établissement français du sang via leurs dons. Je tiens à rappeler – je pense que cette position est partagée unanimement et de manière transpartisane – qu’il s’agit d’un geste citoyen essentiel.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.