Mme Patricia Schillinger. Merci, monsieur le ministre !

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Bitz. (Applaudissements.)

M. Olivier Bitz. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant tout, je remercie très sincèrement les membres du groupe CRCE – Kanaky d’avoir demandé l’inscription d’un tel débat à l’ordre du jour. Ces discussions nous permettent en effet de donner un coup de projecteur sur l’engagement de 200 000 de nos concitoyens au sein des associations agréées de sécurité civile.

Ces bénévoles jouent un rôle fondamental aux côtés des quelque 250 000 sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, des 13 000 militaires de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) et du bataillon des marins-pompiers de Marseille et des 1 500 civils et militaires relevant des moyens nationaux de la sécurité civile.

Tous autant qu’ils sont, avec leurs missions et leurs statuts respectifs, ces femmes et ces hommes assurent notre sécurité civile. Ils agissent également à l’international, et les missions de coopération qu’ils mènent font honneur à notre pays.

Dans ce dispositif, les bénévoles de la sécurité civile ne sont pas forcément les plus visibles. Ils jouent pourtant un rôle très important au quotidien sur notre territoire, que ce soit à l’occasion de missions d’assistance, notamment sur la voie publique, ou des manifestations, petites ou grandes – on l’a vu lors des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris –, dont ils permettent le bon déroulement. Ils concourent à la surveillance de nos plages comme aux sauvetages en mer. De même, nous savons leur implication dans la diffusion des gestes de premiers secours.

Ces bénévoles jouent également un rôle fondamental en période de crise, qu’il s’agisse d’événements météorologiques, d’incendies, d’actes terroristes, d’accidents de toute nature ou encore de crises sanitaires.

Chaque fois, les bénévoles de la sécurité civile ont répondu présents et répondent présents. Nous avons besoin aujourd’hui de leur engagement. Nous en aurons besoin davantage encore demain, avec l’augmentation des risques en tout genre.

La pression opérationnelle s’accentue sur toutes les branches de la sécurité civile : dès lors, on peut redouter que les difficultés du secteur sanitaire ne se reportent non seulement sur les sapeurs-pompiers – c’est déjà le cas aujourd’hui –, mais aussi sur les membres des associations agréées. Il faut reconnaître que leur intervention coûte bien moins cher que celle des autres forces de sécurité civile… En s’appuyant chaque fois que c’est possible sur la compétence de ces bénévoles, de ces citoyens engagés, on agit donc aussi dans l’intérêt de nos finances publiques : ce modèle économique fait largement appel au bénévolat et à la générosité du public, parallèlement à la facturation de prestations.

La question du financement des associations doit être posée, car – nous le savons bien – notre modèle traditionnel doit évoluer.

À l’heure actuelle, l’engagement financier de l’État et des collectivités territoriales reste relativement modeste. De plus, chacun sait que nous sommes entrés dans une crise de l’engagement, tous domaines confondus. S’agissant des bénévoles de la sécurité civile, nous devons nous emparer de ce sujet afin de susciter davantage d’engagements pérennes. Ils représentent, finalement, ce qu’il y a de plus beau dans la citoyenneté.

La loi Matras de 2021 a permis une première avancée, mais il faut à l’évidence aller plus loin, grâce à des mesures on ne peut plus concrètes.

Monsieur le ministre, j’appelle à ce propos votre attention sur une autre forme de reconnaissance : la bonification pour la retraite de nos sapeurs-pompiers volontaires, votée par les deux assemblées. Le décret d’application de cette mesure tarde en effet à venir… Plus largement, il convient que les dispositions adoptées par le Parlement soient réellement mises en œuvre.

Ce rappel étant formulé, j’en reviens aux bénévoles de la sécurité civile.

Je tiens à saluer le travail réalisé par notre collègue député Yannick Chenevard, présent ce soir dans nos tribunes. Éminemment transpartisane, sa proposition de loi a été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. Elle vise à reconnaître le bénévolat de sécurité civile et va manifestement dans le bon sens.

Il s’agit notamment de reconnaître l’engagement du bénévole, en facilitant ses absences dans la sphère professionnelle, et celui de son employeur, en valorisant sa participation. Si les employés bénévoles sont les acteurs directs de ces actions, nous ne devons pas ignorer le rôle et le soutien que peut apporter leur employeur.

Dans cette perspective, la création d’un label « employeur partenaire des associations agréées de sécurité civile » permettrait de reconnaître l’engagement des employeurs, qui doivent par ailleurs trouver une forme de compensation plus concrète.

Le droit à la formation constitue également, à l’instar de la retraite, une question importante pour ces bénévoles.

Je forme le vœu que le Sénat se saisisse au plus vite de ces enjeux, en inscrivant à son ordre du jour la proposition de loi de Yannick Chenevard. Ce texte pourra d’ailleurs être utilement enrichi par les conclusions du Beauvau de la sécurité civile. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur Bitz, le budget global de la sécurité civile s’établit à 6,8 milliards d’euros ; la participation de l’État, pour être tout à fait précis, est quant à elle de 831 millions d’euros. Je tenais à rappeler ces chiffres, car notre débat doit être parfaitement transparent.

Vous m’interrogez au sujet du décret relatif à la retraite des sapeurs-pompiers. Les travaux interministériels engagés à ce titre reprennent actuellement, dans le cadre du débat national relatif aux retraites, et le ministère de l’intérieur entend valoriser la durée de l’engagement pour le calcul de la retraite. C’est un chantier assez technique et complexe, mais tel est le principe que nous retenons.

Enfin, vous avez cité à votre tour la proposition de loi de M. Chenevard, que l’Assemblée nationale a votée à l’unanimité et dont on attend l’inscription à l’ordre du jour du Sénat.

Pour le Gouvernement, ce texte est une source d’inspiration sur au moins quatre points : libérer les bénévoles de leur activité professionnelle, créer un label « employeur partenaire des associations agréées de sécurité civile » – c’est un sujet important –, faciliter les autorisations d’absence et mobiliser le compte personnel de formation. Ce sont là autant de sujets que nous souhaitons prendre en compte dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec. (Applaudissements.)

M. Gérard Lahellec. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon tour, je salue l’initiative de Jean-Pierre Corbisez, qui, en sollicitant l’organisation de ce débat, a souhaité appeler notre attention sur le bénévolat de sécurité civile.

Les bénévoles concernés œuvrent aux côtés des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, des personnels des services de l’État et des militaires, que nous ne saurions oublier. Je me dois de les saluer, en les remerciant toutes et tous de leur engagement.

Les 250 000 bénévoles des associations agréées de sécurité civile contribuent à assurer la sécurité des habitants de notre pays.

Bien sûr, nous saluons tous ici le travail de ces bénévoles. Toutefois, permettez-moi de pointer d’emblée une forme de contradiction dans ce domaine : alors même que, dans le débat politique national, on affiche la sécurité comme une priorité, le budget que l’État alloue à la sécurité civile a encore baissé cette année. Du fait de cette réduction de moyens, notre sécurité repose davantage encore sur le travail des associations agréées.

Dans le même temps, les événements climatiques dramatiques se multiplient, accentuant nos besoins de sécurité civile, et diverses politiques, comme la « régulation des urgences » mise en œuvre dans nos hôpitaux, ont pour effet de transférer aux sapeurs-pompiers une part croissante des transports sanitaires. Par voie de conséquence, l’ensemble de la chaîne de sécurité se trouve déstabilisée.

Or les associations agréées de sécurité civile sont aujourd’hui fragilisées. Elles peinent à se financer, à recruter et à fidéliser leurs bénévoles. C’est la raison pour laquelle je salue à mon tour l’initiative de M. Chenevard, dont la proposition de loi a déjà été adoptée par l’Assemblée nationale.

Dans le sillage de M. Corbisez, je saisis l’occasion de ce débat pour aborder les modalités d’un tel renforcement législatif. Il ne s’agit pas, en effet, de donner un blanc-seing à qui que ce soit : c’est là tout l’intérêt de la discussion de ce soir, que l’ordre du jour de demain nous permettra de prolonger.

Si, comme je le souhaite, la proposition de loi de M. Chenevard est inscrite à l’ordre du jour du Sénat, il faudra nous assurer de soutenir correctement et justement ces associations et ces bénévoles.

La première mise en garde que je souhaite émettre a trait au financement.

Le modèle actuel de financement du bénévolat de la sécurité civile présente des fragilités structurelles : nous ne pouvons répondre aux problèmes qu’il subit actuellement par des allègements d’impôt pour quelques employeurs de salariés bénévoles et pour les donateurs. Il faut bel et bien recourir à la solidarité nationale. Cette dernière doit jouer pleinement son rôle, notamment par le biais du budget de l’État.

Nous regrettons à ce titre que le fonds de garantie des associations agréées de sécurité civile ait été supprimé par l’Assemblée nationale. Ces structures auraient pu être financées par ce biais, par exemple grâce à une contribution des assurés assise sur les contrats d’assurance habitation.

Notre sécurité commune ne peut reposer sur les dons de particuliers, relevant par définition de choix individuels. La situation alarmante où se trouve le financement du bénévolat de sécurité civile doit être gérée avec sérieux et le plus consciencieusement possible.

Cette logique vaut non seulement pour les enjeux financiers auxquels le bénévolat de sécurité civile fait aujourd’hui face, mais aussi pour les enjeux humains. Les associations de sécurité civile peinent à recruter et à fidéliser. On ne peut faire peser cette responsabilité sur des salariés isolés.

Ensuite, cette proposition de loi favorise les dons de congés entre salariés, au profit de ceux qui assument des missions de bénévolat de sécurité civile. Permettez-moi, à cet égard, d’exprimer quelques réserves. À première vue, une telle marque de générosité peut paraître gratifiante ; toutefois, elle pourrait également avoir un effet négatif sur l’engagement bénévole lui-même.

De surcroît, il ne me paraît pas juste de faire reposer le bénévolat de sécurité civile sur la solidarité individuelle. Non seulement cette ressource serait aléatoire, mais elle pourrait aller de pair avec une forme de culpabilisation des salariés.

Mes chers collègues, de toute évidence, il est urgent d’agir pour le bénévolat de sécurité civile ; mais agissons bien. L’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour de notre assemblée nous donnera l’occasion de le faire. Je souhaite qu’elle soit vite soumise à notre examen ! (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, vous appelez notre attention sur le financement global de ce dispositif, dont on connaît la fragilité.

Dans une certaine mesure, les bénévoles de la sécurité civile seront sans doute appelés à faire aussi bien avec moins de moyens, notamment par le biais de mutualisations. Dans certains domaines, il semble possible de gagner en efficacité financière. Quelques pistes ont d’ores et déjà été identifiées : il faut encore les travailler et évaluer les solutions envisagées, car, évidemment, il ne faudrait pas remettre en cause la qualité du service rendu. (M. Gérard Lahellec acquiesce.)

On peut également penser à des ressources supplémentaires. À ce titre, vous avez évoqué la piste assurantielle : c’est une idée qui circule en ce moment et que l’on ne saurait écarter d’un revers de manche. Elle mérite d’être analysée et expertisée. D’autres pistes encore peuvent être étudiées.

Vous le constatez, le panel de solutions est assez étendu.

Pour en revenir à l’objet même du débat de ce soir, ne perdons pas de vue cet enjeu : on ne saurait faire de nos bénévoles des professionnels. On perdrait dès lors tout le sens de leur engagement,…

M. Gérard Lahellec. C’est vrai !

M. François-Noël Buffet, ministre. … éminemment personnel, au service de la collectivité et de nos concitoyens. Ces valeurs doivent à tout prix être préservées.

Cela étant, un certain nombre d’avancées pratiques pourraient être de nature à faciliter la vie des bénévoles.

Enfin, n’oublions pas que les associations – je ne sais pas si elles le font toutes – peuvent facturer des heures de formation. Elles disposent à cet égard de sources de revenus à même de compléter le soutien financier que leur apportent les collectivités territoriales.

Cette variété des ressources est une autre particularité de notre système de sécurité civile ; sans doute va-t-il falloir y mettre un peu d’ordre…

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et RDSE.)

M. Grégory Blanc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie à mon tour le groupe CRCE-K d’avoir inscrit ce débat à l’ordre du jour de nos travaux.

Oui, il faut intégrer les dispositions de la proposition de loi Chenevard au Beauvau de la sécurité civile. Vous venez d’exposer votre position à cet égard, monsieur le ministre, je n’y reviens donc pas.

Le 8 mai 2024, Parnay, paisible petite commune rurale de Maine-et-Loire, voit 10 000 « raveurs » débarquer pour une free party sauvage.

Parce que le territoire est complètement dépassé et non outillé, la préfecture s’organise, publie un arrêté d’interdiction et mobilise les premières forces de sécurité civile de l’État : services de la préfecture, gendarmerie, pompiers, procureur. Par ailleurs, elle réquisitionne en urgence les associations agréées de sécurité civile.

Le bilan humain de ces quatre jours de fête est lourd : 250 prises en charge par la sécurité civile, 4 gendarmes blessés et, surtout, 1 décès parmi les raveurs.

Pour la protection civile de Maine-et-Loire, mobilisée en urgence par le préfet, cela se traduit par de lourdes conséquences financières liées au déploiement d’un poste médical et d’un poste de commandement mobile, à l’utilisation de nombreux matériels de secours et d’un quad, ainsi qu’à la présence d’une soixantaine de secouristes jour et nuit. À cela s’ajoute la mobilisation des protections civiles des départements voisins.

Concrètement, le reste à charge s’élève à plus de 25 000 euros pour l’association. Ce constat met en avant deux problèmes.

D’une part, en termes de trésorerie : l’association attend toujours le remboursement des 6 000 euros avancés pour ses frais indemnisables. On le sait, en la matière, les remboursements sont souvent plus que tardifs.

D’autre part, en termes d’économie générale de ces structures : les associations agréées de sécurité civile n’arrivent plus à maintenir un équilibre financier pour assurer leurs missions.

Ce constat doit nous conduire à privilégier trois axes.

Premier axe, l’activité de formation du public au secourisme doit être renforcée. Il nous faut réfléchir à un grand plan visant à renforcer l’éducation des Français aux gestes de premiers secours. Pour rappel, seulement 40 % de nos concitoyens y sont formés, contre 80 % des Allemands. Nous avons besoin de ces associations pour garantir une meilleure sécurisation de la population.

Deuxième axe, l’activité de secourisme lors d’événements publics autorisés doit être facturée auprès de l’organisateur de l’événement. À ce titre, nous devons nous demander comment mieux accompagner les associations agréées de sécurité civile, car celles-ci n’ont pas toujours les compétences nécessaires pour identifier en amont les outils qu’il leur faudra déployer ni pour établir la facturation la plus juste. Ce n’est pas le moindre des enjeux pour ces structures.

Troisième axe, les mobilisations en urgence par les autorités pour des missions de secours doivent être mieux appréhendées. La mobilisation matérielle et humaine n’est pas indemnisée à hauteur de l’effort déployé. L’État doit compenser ces interventions et se doter d’un fonds solide à cet effet : il y a urgence !

Aujourd’hui, les recettes des formations et des prestations de service de secourisme ne permettent pas d’assurer les achats d’équipements et les investissements nécessaires aux activités des associations agréées de protection civile, en particulier celles qui font l’objet de réquisitions préfectorales.

À titre d’illustration, selon la Fédération nationale de protection civile, si les recettes moyennes d’une association sont de 150 000 euros, celle-ci ne dispose d’un excédent disponible moyen de 15 000 euros que si la mécanique de formation est au rendez-vous. Ce n’était pas le cas lors des années covid, qui ne sont pas si anciennes. Pour certaines associations, les déficits accumulés alors ne sont toujours pas résorbés.

Regardons devant nous.

Le dérèglement climatique accentuera les mobilisations d’urgence. Les mégafeux de forêt, comme ceux qui se sont produits de manière inédite dans mon département à l’été 2022, sont, hélas ! appelés à se multiplier. Idem pour les inondations, les tempêtes, etc. Il nous faut nous préparer à un monde qui va très vite connaître une hausse des températures de 2 degrés Celsius, avec un horizon à + 4 degrés. Je rappelle que nous venons de franchir le seuil de + 1,5 degré.

Le système financier actuel a déjà conduit de nombreuses associations à la dissolution. Il faut donc engager des réformes structurelles. Nous avons besoin d’une meilleure coordination, d’une meilleure opérationnalité, donc d’un meilleur système de financement.

Je ne peux m’empêcher de souligner que la loi de finances pour 2025 prévoit, au sein de la mission « Sécurités », une hausse des crédits de l’action « Police des étrangers et sûreté des transports internationaux » en même temps qu’une baisse de ceux du programme « Sécurité civile ». Selon nous, la priorité devrait être le secours aux victimes plutôt que la chasse aux étrangers. Cela relève du bon sens, mais c’est l’inverse qui a été décidé…

Encourager les bénévoles de ces associations et leur accorder une reconnaissance méritée passe d’abord par un véritable cadre pour assurer les mobilisations d’urgence. C’est la première des priorités. Ce faisant, nous devons assurer aux bénévoles que l’État est au rendez-vous et les remercier de leur engagement.

Monsieur le ministre, nous attendons de vous des annonces et des mesures. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER, CRCE-K et RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, je formulerai trois observations.

Oui, nous devons faire des réformes structurelles pour améliorer l’organisation de la sécurité civile. Nous en avons parfaitement conscience.

D’un point de vue budgétaire, dans le cadre du pacte capacitaire, la sécurité civile a bénéficié d’investissements lourds, ce qui a permis aux Sdis d’être dotés d’un matériel de qualité adapté aux enjeux du jour. Par ailleurs, l’État a financé l’achat de huit avions Dash. Par conséquent, les efforts nécessaires ont été consentis.

Il faut toutefois admettre que le budget 2025 prévoit un rééquilibrage en faveur de la police nationale, qui avait besoin de matériel. Cela ne signifie pas que les crédits du programme « Sécurité civile » n’augmenteront pas demain. Il faut en particulier mener une réflexion sur le renouvellement de notre flotte d’aéronefs de type canadair, qui doit avoir lieu à l’horizon 2030-2031, soit dans un délai assez court, et qui nécessitera la mobilisation de fonds importants.

J’en viens à la formation aux premiers secours, qui constitue l’axe n° 5 du Beauvau de la sécurité civile. Il convient de former aux premiers éléments de secours dès l’école primaire, c’est-à-dire dès le plus jeune âge, et de poursuivre dans cette voie via le dispositif « Tous préparés, mieux protégés », qui est de nature à favoriser la préparation de l’ensemble de la population aux risques et aux aléas. Il s’agit d’un outil parmi d’autres, qui n’a pas vocation à apporter seul la solution, mais qui s’inscrit dans un ensemble. Plus tôt on sensibilisera les jeunes, plus on aura de chances d’atteindre, comme en Allemagne, le taux de 80 % de la population en mesure de prodiguer les premiers secours.

Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour la réplique.

M. Grégory Blanc. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Oui, grâce au pacte capacitaire, les moyens des pompiers ont augmenté. Reste que nous attendons tous ici un pacte capacitaire pour les inondations. Il n’est pas financé, il n’est même pas dans les perspectives ; or, de notre point de vue, il y a urgence !

M. François-Noël Buffet, ministre. Bien sûr !

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et RDSE.)

M. Hussein Bourgi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au nom de mes collègues du groupe SER, je salue le groupe CRCE-K d’avoir permis l’inscription de ce débat à l’ordre du jour de nos travaux.

Ce débat nous donne en effet l’occasion d’évoquer, pour mieux le louer, la singularité et l’originalité du modèle de sécurité civile à la française. En effet, si la France peut s’enorgueillir de compter un corps de 255 000 sapeurs-pompiers, il convient de relever que 212 000 d’entre eux sont des sapeurs-pompiers volontaires et 43 000 des sapeurs-pompiers professionnels.

Ce soir, il s’agit de mettre à l’honneur ces 255 000 femmes et hommes qui s’engagent pour sauver des vies, pour lutter contre les incendies et pour faire face aux inondations.

Ce débat nous donne aussi l’occasion de saluer l’engagement des centaines de milliers de bénévoles qui participent au déploiement de nos forces de sécurité civile pour porter secours et assistance à celles et ceux qui sont confrontés à un accident ou à un incendie. Je veux bien sûr parler des 200 000 bénévoles engagés dans les associations agréées de sécurité civile, des bénévoles des comités communaux feux de forêt, des bénévoles de la Société nationale de sauvetage en mer, qui œuvrent sur nos côtes, notamment au large du littoral héraultais.

Ces femmes et ces hommes forcent l’admiration pour le dévouement, le don de soi et l’abnégation dont ils font preuve. Collaborateurs occasionnels du service public, ils sont des relais, des sentinelles, des gardiens et des acteurs à part entière de la sécurité civile partout sur le territoire national. Cet engagement appelle de la part des pouvoirs publics des compliments et des éloges. Il appelle aussi et surtout des actes pour répondre aux enjeux auxquels ce secteur du bénévolat est confronté.

L’enjeu de la formation est essentiel. Sur 200 000 bénévoles, 70 000 sont formés, équipés et encadrés dans les associations agréées de sécurité civile. Ce noyau dur constitue une bonne base. Comment les pouvoirs publics peuvent-ils œuvrer pour que l’on passe à 100 000 bénévoles formés dans les prochaines années ?

Se former, c’est être en mesure d’accomplir les bons gestes en intervention, tout en se protégeant soi-même.

Se former, c’est monter en compétence et obtenir une meilleure reconnaissance de la part des différents acteurs institutionnels comme de la part des employeurs.

L’enjeu de la montée en compétences suppose que les associations agréées de sécurité civile disposent des moyens financiers nécessaires à leur existence, à l’amélioration des qualifications et à une augmentation de leurs équipements, notamment les applications mobiles.

Monsieur le ministre, comme vous le savez, ces mesures, qui sont autant de réponses, sont au cœur de la proposition de loi visant à reconnaître le bénévolat de sécurité civile de notre collègue député Yannick Chenevard, présent ce soir dans nos tribunes – je salue son travail.

Ce texte, voté à l’Assemblée nationale, a été transmis au Sénat le 27 mars 2024. Le Gouvernement envisage-t-il de l’inscrire à l’ordre du jour des travaux de la Haute Assemblée d’ici, au mieux, à la fin de cette session parlementaire, au pire, à la fin de l’année civile ?

L’enjeu du rapprochement et de l’intégration opérationnelle des associations agréées de sécurité civile et des Sdis est tout aussi prégnant. Tout en préservant la distinction entre les bénévoles de sécurité civile et les sapeurs-pompiers volontaires, il convient de faire partager aux uns et aux autres une culture commune, d’un point de vue tant déontologique qu’opérationnel, lors des interventions.

Monsieur le ministre, ce débat me donne aussi l’occasion d’insister sur les défis auxquels notre sécurité civile à la française doit faire face.

Le premier défi concerne la directive européenne sur le temps de travail.

Ce texte reste une épée de Damoclès qui inquiète et trouble la sérénité des soldats du feu. Monsieur le ministre, quelles indications pouvez-vous nous donner quant à l’adoption d’une directive spécifique visant à protéger l’engagement bénévole et volontaire dans le domaine de la protection civile ?

Le deuxième défi concerne le renouvellement et la massification de nos forces de sécurité civile.

Nous devons y parvenir pour faire face au vieillissement de la population, donc à l’augmentation constante des interventions pour secours à personne à domicile – à la suite d’accidents domestiques ou de chutes – ou sur la voie publique. Je rappelle que les missions de secours d’urgence aux personnes représentent 84 % des missions réalisées par les sapeurs-pompiers au quotidien.

À la réalité démographique liée à la pyramide des âges s’ajoute une réalité climatique, l’augmentation des inondations et des épisodes méditerranéens ou cévenols, sans parler des cyclones auxquels nos compatriotes ultramarins doivent de plus en plus faire face.

Comment répondre à la crise des vocations, notamment dans le monde rural ? Comment recruter et conforter le maillage territorial pour renforcer la proximité des services de sécurité civile et garantir une réponse rapide et efficace des urgences ?

Alors que les différents acteurs publics s’étaient accordés pour sanctuariser le maillage territorial des Sdis, plus de 2 000 centres de secours ont disparu depuis dix ans. C’est regrettable, c’est même fâcheux, car cela se traduit non seulement par une dégradation de la couverture opérationnelle, singulièrement dans le monde rural et les territoires de montagne, mais aussi par la fermeture de points de recrutement de sapeurs-pompiers volontaires et celle de postes avancés pour informer et sensibiliser les populations aux gestes qui sauvent.

Le troisième défi a trait à la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires pendant leur activité professionnelle.

Le quatrième défi consiste à faire face à la montée de l’insécurité et des agressions que subissent nos forces de sécurité civile.