M. Fabien Gay. On nous ressort le Ceta !

M. Jean-François Husson. On ne va pas refaire le match !

M. Jean-Noël Barrot, ministre. Quant à Saint-Pierre-et-Miquelon, monsieur le sénateur, je sais que le ministre d’État, ministre des outre-mer, qui est aujourd’hui en déplacement à Mayotte, aura à cœur de poursuivre le plan spécifique qui est consacré à l’archipel. Je vous invite, si vous en êtes d’accord, à prendre contact avec lui, après que je lui aurai fait part de vos attentes sur le sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

réponses française et européenne aux droits de douane américains

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Antoinette Guhl applaudit également.)

M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, les conséquences potentiellement dévastatrices des taxes annoncées par Donald Trump inquiètent à juste titre le monde économique et nos compatriotes.

Selon les économistes, la stratégie de négociation « zéro pour zéro » de la Commission européenne sera préjudiciable aux intérêts de la France et de nos filières les plus exposées : l’aéronautique, l’automobile, les vins et spiritueux notamment.

Une telle réponse profitera avant tout à l’Allemagne et à l’Italie compte tenu de leurs excédents commerciaux.

Alors, quelles options nous reste-t-il ?

Le président américain ne reviendra pas sur sa décision. Taxer les banques américaines et les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – n’aura aucun impact positif pour notre économie, faute d’alternatives françaises et européennes crédibles et d’investissements suffisants dans le secteur des services.

La bonne réponse consiste en une relocalisation de certaines filières et en la mise en place de droits de douane ciblés, accompagnés de ce que nous demandons depuis longtemps, une stratégie de planification industrielle qui renforcera notre souveraineté et améliorera notre balance commerciale. Elle protégera aussi le marché européen et français de l’ajustement stratégique que la Chine, après la fermeture du marché américain, ne va pas manquer d’opérer pour déverser ses surcapacités sur le vieux continent.

Allez-vous défendre cette stratégie auprès de la Commission européenne, seule entité capable de protéger les Français et de permettre à la France et à l’Europe de reprendre en main leur destin économique ?

Pour une fois, soyons des pionniers en envisageant une nouvelle adaptation, et ne partons pas perdants ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Noël Barrot, ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous l’avez entendu tout à l’heure de la bouche du ministre de l’économie et des finances, nous allons évidemment veiller à ce que les décisions qui ont été prises et dont nous considérons qu’elles vont appauvrir les États-Unis, leurs classes moyennes, leurs entreprises, ainsi que leurs partenaires, au premier rang desquels l’Europe, puissent être revues, sans quoi nous n’aurions d’autre choix que de riposter en mobilisant l’ensemble des instruments qui sont à notre disposition.

Je pense naturellement aux droits de douane, tels que ceux qui ont été adoptés ce matin au niveau européen – un taux de 25 % sur l’équivalent de 22 milliards d’euros d’exportations américaines vers l’Europe –, mais aussi à des mesures non tarifaires. Vous avez cité les services ; or la Commission européenne dispose, depuis 2023, d’instruments qui permettent, lorsque les intérêts européens sont en jeu, de s’en prendre, si je puis dire, ou, en tout cas, de restreindre l’accès de certaines sociétés extra-européennes aux marchés publics et l’accès de certains services au marché unique européen.

Mais vous avez raison de rappeler que nous ne devons pas nous contenter de répondre à l’administration américaine. Nous devons nous poser des questions sur nous-mêmes. Nous nous apercevrons alors que le marché unique n’a sans doute jamais été aussi important pour permettre à nos entreprises de se diversifier.

Les barrières qui se dressent entre les pays de l’Union européenne représenteraient des droits de douane d’environ 45 %. Si nous levons ces barrières, si nous approfondissons le marché unique, nous compenserons une partie de l’impact des droits de douane extravagants instaurés par l’administration Trump.

Puisque, comme vous l’avez dit, nous entrons dans une période de guerre commerciale, nous devons nous y préparer en gagnant en compétitivité et en retirant la chape de plomb qui empêche les entreprises françaises de livrer bataille à armes égales avec leurs concurrents étrangers sur les marchés internationaux.

À cet égard, les annonces faites par la Commission européenne ces derniers mois vont dans le bon sens. Désormais, il convient d’accélérer pour être en mesure non pas seulement de défendre nos intérêts, mais aussi, dans cette période de tension commerciale, de gagner des parts de marché. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour la réplique.

M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le ministre, que cela soit dit, les Français n’ont pas à assumer les conséquences budgétaires du diktat américain, alors même que nos grands groupes veulent continuer, au mépris de tout patriotisme économique, d’investir aux États-Unis pour contourner les droits de douane ! Ce faisant, ils refusent explicitement de soutenir notre économie et font preuve d’une indifférence totale aux inquiétudes des Français face à la crise qui s’annonce.

Nous attendons du Gouvernement qu’il prenne les mesures nécessaires pour éviter l’effondrement de certaines filières et faire en sorte que le pouvoir d’achat des Français ne soit pas une nouvelle fois amputé par des hausses de prix. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST. – M. Fabien Gay applaudit également.)

situation en nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

M. Robert Wienie Xowie. Monsieur le Premier ministre, en adoptant une approche nouvelle, vous avez permis à l’ensemble des partenaires, dont le représentant du peuple colonisé, le FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste), d’amorcer une première phase de discussion. L’émergence d’un accord gagnant-gagnant pour nos compatriotes est attendue avec fébrilité, dans un pays que la crise a mis à genoux.

Vous avez énoncé clairement et avec force que l’accord de Nouméa constituait le socle intangible sur lequel la négociation devrait se fonder. Vous avez également confirmé à maintes reprises que le droit à l’autodétermination du peuple colonisé, le peuple kanak, était garanti par la Constitution. Ce faisant, vous avez posé un cadre et des bases de discussion pour que les partenaires aboutissent à un compromis solide.

Toutefois, une inconnue demeure, monsieur le Premier ministre : l’accès vers la décolonisation. Permettez-moi de citer un proverbe nemi du nord de la Nouvelle-Calédonie, la région du député Tjibaou : « Tu saurais où se trouve la porte si tu avais aidé à construire la case ! »

La trajectoire politique d’émancipation et d’évolution institutionnelle engagée depuis 1983 doit nous conduire à une évolution significative, au-delà de l’accord de Nouméa.

Pour achever la parenthèse coloniale en Kanaky-Nouvelle-Calédonie, le processus engagé devra envisager le transfert des compétences régaliennes et indiquer un calendrier selon lequel notre droit à l’autodétermination pourra s’exercer.

Monsieur le Premier ministre, comment aboutir à une sortie de la décolonisation, ainsi que le prévoit l’accord de Nouméa, si la seule perspective est de décoloniser dans la France ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. François Bayrou, Premier ministre. Monsieur le sénateur Xowie, vous l’avez rappelé, dès son installation, le Gouvernement a décidé, sous l’autorité de Manuel Valls, ministre d’État chargé de l’outre-mer, de faire reprendre le dialogue en Nouvelle-Calédonie, qui était devenu très difficile après les événements que vous savez.

Dès le 29 janvier, j’ai écrit à toutes les formations politiques – vous avez lu le texte, vous en avez cité des passages – pour leur proposer d’ouvrir des discussions afin de trouver un accord politique susceptible de sortir le territoire du marasme dans lequel il se trouve depuis les émeutes de mai 2024.

Manuel Valls a accumulé beaucoup d’expérience et le travail qu’il conduit avec les Calédoniens offrira, j’en suis persuadé, des perspectives importantes aux habitants de la Nouvelle-Calédonie. Ceux-ci sont évidemment en première ligne.

Dès le mois de février, des réunions se sont tenues, à Paris, puis à Nouméa, où le ministre d’État s’est rendu à deux reprises. Un premier document d’orientation a été mis sur la table, puis un projet d’accord, dont toutes les parties ont commencé à discuter le 31 mars dernier.

Je considère que nous avançons collectivement, pas à pas, selon une méthode que j’ai voulue respectueuse de chacun et qui s’intègre dans une histoire marquée par les accords de Matignon-Oudinot, puis de Nouméa.

La question de l’autodétermination est évidemment centrale. Elle a été rappelée par tous les aspects du droit : elle est reconnue par les textes internationaux, dont la Charte des Nations unies, mais aussi par notre Constitution, en son article 53. Ce droit a été très souvent rappelé en tant que principe, mais les conditions de son exercice sont au cœur des discussions.

Je rappelle que trois référendums se sont déroulés. Si le troisième a donné lieu à de nombreuses discussions, ils ont tous trois conclu à une réponse négative. Conformément aux accords de Nouméa, les partis se retrouvent « pour examiner la situation ainsi créée ». Les options sont sur la table, vous les connaissez, et je sais votre aspiration à une souveraineté pleine et entière de la Nouvelle-Calédonie.

Le ministre d’État a déjà annoncé qu’il reviendrait à Nouméa à la fin du mois d’avril pour poursuivre ces discussions. Je souhaite qu’un accord soit trouvé et je le crois possible, car il est essentiel pour l’avenir des Calédoniens.

J’ai la conviction, et je suis sûr que vous la partagez, monsieur le sénateur, que sans un accord de ce type, le territoire ne pourra pas se rétablir. Nous, le Gouvernement, le devons à l’ensemble des Calédoniens, et les représentants des Calédoniens le doivent à leurs concitoyens.

L’État affirme donc qu’il se tient aux côtés des Calédoniens, aujourd’hui comme demain, quelle que soit la forme que nous trouverons collectivement – et dont nous savons tous qu’elle sera forcément originale, comme elle l’a toujours été – pour ce pays qui retient, depuis si longtemps, notre attention, notre engagement, et, si vous me permettez de le dire, notre affection. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Loïc Hervé applaudit également.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas un pays…

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour la réplique.

M. Robert Wienie Xowie. L’État a la responsabilité de la décolonisation ; nous serons attentifs à cela. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Akli Mellouli applaudit également.)

avancées sur le statut de l’élu

M. le président. La parole est à M. Ludovic Haye, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Ludovic Haye. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce lundi, une tribune du président de l’Association des petites villes de France (APVF), Christophe Bouillon, cosignée par un collectif d’élus locaux et nationaux est parue dans le journal Le Monde pour appeler à rendre plus attractif le statut des élus.

Le constat est tristement connu : les violences contre les élus se multiplient et les démissions s’accélèrent. Selon une étude du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) publiée hier soir, près d’un maire sur deux ne se représentera pas en 2026. En zone rurale, ce chiffre s’élève à deux sur trois, contre seulement un sur quatre en zone urbaine : voilà un révélateur brutal de la fracture territoriale qui s’installe progressivement.

Pourtant, l’engagement des élus ne faiblit pas. Souvent au prix de leur vie personnelle ou professionnelle, ceux-ci ont fait le choix altruiste de servir les autres, de servir la République.

Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il est temps de reconnaître pleinement cet engagement, de le sécuriser et de le valoriser. Le fait de revoir le statut de l’élu revient à accorder non pas un privilège, mais une juste reconnaissance à celles et à ceux qui font vivre nos communes, nos intercommunalités et nos territoires. Nous le leur devons.

Les élus attendent des propositions concrètes. Ils souhaitent pouvoir aménager leur temps de travail pour exercer leur mandat au service des autres, de l’intérêt général et du bien commun. Ils appellent à un renforcement de leur sécurité et à un durcissement des sanctions envers celles et ceux qui s’en prennent à eux. Ils demandent une reconnaissance plus juste de leur engagement par le biais d’une indemnisation digne et d’une adaptation cohérente du calcul de leur retraite pour qu’il tienne compte de leur choix de faire primer leur engagement citoyen sur leur carrière professionnelle.

Nous avons tenté de répondre au mieux à ces enjeux en adoptant en mars 2024 une proposition de loi d’origine sénatoriale, sur laquelle, madame la ministre, je connais votre engagement. Mais cette proposition de loi reste en suspens. Depuis, une autre proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale et Éric Woerth a remis au Président de la République son rapport sur la décentralisation. Ces textes pourraient utilement s’enrichir les uns les autres.

Madame la ministre, en cette période clé de constitution des listes électorales, à quelle date cette proposition de loi sera-t-elle inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ? Quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il y intégrer pour envoyer un message fort et clair à nos élus locaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Ludovic Haye, je vous remercie de cette question, qui est bel est bien d’actualité.

En effet, il y a un peu plus d’un an, votre assemblée a adopté à l’unanimité une proposition de loi portant création d’un statut de l’élu local. Je veux remercier le Premier ministre et François Rebsamen de leur engagement pour faire prospérer ce texte.

Vous l’avez rappelé, bon nombre d’élus, d’associations d’élus et de parlementaires ne cessent de réclamer, de manière très positive, que ce texte aboutisse.

Les élus locaux sont les sentinelles de la République des faiseurs. Chacun connaît l’importance de leur mission et la fragilité de l’engagement.

Sous l’autorité du Premier ministre, le Gouvernement entend faire prospérer cette proposition de loi sénatoriale, qui sera enrichie, comme vous l’appelez de vos vœux, monsieur le sénateur, des travaux de l’Assemblée nationale, d’Éric Woerth, mais aussi de Boris Ravignon et de Christian Vigouroux.

Nous sommes d’accord sur l’exigence de faciliter d’urgence l’engagement des élus et de sécuriser l’exercice, mais aussi la fin de leur mandat. Aussi le Premier ministre et le Gouvernement entendent-ils faire prospérer ce texte d’ici à la fin de la session parlementaire, car il est, me semble-t-il, temps de conclure ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

professeur empêché de faire cours à l’université lumière-lyon-ii

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Madame la ministre d’État, le 19 février dernier, à Lyon, un collectif radical a pris d’assaut la salle H.103 de l’université Lumière-Lyon II. Depuis, les provocations se multiplient : blocages, occupations, prières en plein campus, invectives publiques contre une direction accusée de racisme et d’islamophobie…

Le 1er avril, un nouveau cap a été franchi : quinze militants cagoulés ont violemment interrompu le cours du professeur Fabrice Balanche en l’injuriant, le menaçant et le traitant de sioniste et de génocidaire.

Certes, vous avez affiché votre soutien. Pourtant, la salle est toujours occupée. Les intimidations continuent. L’idéologie qui y est professée est antifrançaise, radicale et violente !

Madame la ministre d’État, nous voyons nos universités devenir des zones de non-droit. Est-ce tolérable ? Est-ce acceptable ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mme Laure Darcos applaudit également.)

M. Michel Savin. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Max Brisson, mon message est clair : fermeté absolue et soutien total à l’université Lumière-Lyon II et à ses enseignants !

Il est inacceptable d’empêcher un cours de se tenir. Il est intolérable que des individus masqués et cagoulés prennent à partie et menacent un professeur en l’obligeant à quitter son amphithéâtre. Aussi, Philippe Baptiste et moi-même ne laisserons rien passer.

L’université est le creuset de la démocratie. C’est un espace de liberté d’expression, dans le cadre régi par la loi, où les débats doivent pouvoir se tenir de façon respectueuse. C’est dans cette logique que je défendrai toujours les libertés académiques et la liberté d’expression.

Vous le savez, l’université a immédiatement réagi en accordant la protection fonctionnelle au professeur concerné et en faisant un signalement au procureur de la République.

M. Stéphane Ravier. Demi-mesures !

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. Une information judiciaire est ouverte et j’ai demandé que mon ministère se constitue partie civile dans cette affaire.

Philippe Baptiste et moi-même défendrons toujours la liberté d’enseigner ; nous serons toujours aux côtés de nos professeurs. J’affirme une nouvelle fois devant vous notre totale fermeté et notre soutien. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Vous condamnez de nouveau cette agression ; fort bien ! Samedi, Jean-Michel Blanquer vous a lancé un appel à agir. Interrompre un cours est une attaque frontale contre les libertés académiques, et celui du professeur Balanche n’a pas été interrompu par hasard. Il a été ciblé : ciblé pour ses travaux sur le Moyen-Orient ; ciblé parce qu’il refuse de céder à l’intimidation intellectuelle.

Des idéologues gauchistes et islamistes l’ont pris pour cible, comme ils l’ont fait hier avec Gilles Kepel, Bernard Rougier ou Florence Bergeaud-Blackler. Jusqu’à quand laisserons-nous faire ?

Madame la ministre, il faut agir maintenant, fermement, clairement, courageusement ! Vous devez exiger l’évacuation des locaux et l’exclusion des agresseurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Alain Cazabonne et Aymeric Durox applaudissent également.) Vous devez vous porter partie civile, comme vous venez de vous y engager.

Le ministère de l’intérieur protège ses policiers ; il est temps que le ministère de l’enseignement supérieur protège ses professeurs ! Car sans liberté académique, il n’y a plus d’université ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

rapport parlementaire sur la protection de l’enfance

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marion Canalès. Madame la ministre, hier, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance a rendu un rapport très attendu. Au total, en deux ans, 1 800 pages de rapports ont été publiées, 450 préconisations ont été formulées, des procès ont eu lieu, des travailleurs sociaux ont alerté, des enfants ont témoigné. D’autres ne le peuvent plus.

Personne ne peut ignorer l’état de la protection de l’enfance et le sort des 400 000 enfants accompagnés, parfois, protégés, mais pas toujours. L’écart entre ce qui est dit et su et la réalité de l’action est immense. Quand les lois déjà adoptées se traduiront-elles enfin par des décrets, pour certaines, et dans les faits, pour les autres ?

Seulement 30 % des enfants bénéficient du bilan de santé global, pourtant prévu par la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 et par la loi relative à la protection des enfants de 2022.

Quand obtiendrons-nous enfin une loi pluriannuelle des moyens alloués à la protection de l’enfance pour tracer de vraies perspectives ? Qu’avez-vous fait du rapport sur le travail social ? Ne pas renforcer les métiers du lien, c’est creuser le gouffre de la protection de l’enfance. Aujourd’hui, il faut agir !

Chacun de ces 400 000 enfants est une figure républicaine à l’égard de laquelle notre responsabilité est immense. Ces enfants tiennent, parfois sous les coups, souvent sous les dominations ou le déni. Certains ne tiennent pas.

Nous leur devons une mobilisation à la hauteur de leur résistance. Pour les enfants d’aujourd’hui et de demain, peut-on sérieusement continuer de laisser le financement des solidarités dans nos départements reposer en partie sur les droits de mutation et des dynamiques de marché comme c’est actuellement le cas ?

Si je force le trait, l’offre en protection de l’enfance dans un département donné dépend du nombre d’appartements qui y sont vendus. Voilà la réalité de notre système !

Quid des enfants d’hier, qui n’ont pas trouvé la protection qui leur était due et auxquels les manquements historiques de l’État n’ont pas permis d’écrire une nouvelle page ? Prendrez-vous l’initiative de créer une commission nationale de reconnaissance de ces victimes ? ((Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – MM. Ian Brossat et Philippe Grosvalet applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Madame la sénatrice Canalès, vous abordez différents sujets dans votre question.

Vous avez évoqué le remarquable travail qui vient d’être rendu hier par la députée Isabelle Santiago, avec laquelle j’ai eu l’occasion de m’entretenir à plusieurs reprises, comme j’ai eu l’occasion de le faire avec sa collègue Perrine Goulet, qui préside la délégation aux droits des enfants à l’Assemblée nationale.

Je souhaite travailler sur plusieurs sujets liés à l’enfance, que j’ai mis en avant pas plus tard que lundi.

Tout d’abord, je souhaite que nous publiions les décrets d’application qui doivent l’être. J’ai d’ailleurs fait publier un décret d’application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite loi Taquet, il y a exactement quinze jours.

Ensuite, je discute avec les départements au sujet du financement de certaines mesures, car, comme vous le savez très bien, dès lors qu’il est question de normes d’encadrement, cela implique un financement supplémentaire. Actuellement, les départements s’engagent de façon importante sur l’aide sociale à l’enfance (ASE) et l’État les accompagne.

Aussi, j’ai établi avec Florence Dabin, vice-présidente de Départements de France et présidente du groupement d’intérêt public Enfance en danger, un plan d’action sur l’aide à l’enfance.

Premièrement, nous travaillons sur le sujet des pouponnières : nous voulons qu’aucun enfant de moins de 3 ans ne soit gardé en accueil collectif dans un délai le plus court possible.

Deuxièmement, nous souhaitons renforcer le vivier des assistants familiaux en leur permettant de travailler quand les enfants qu’ils gardent sont scolarisés.

Troisièmement, nous nous penchons sur la rémunération de ces derniers, qui est un élément important.

Quatrièmement, nous travaillons sur l’orientation professionnelle de chacun des enfants de l’ASE.

Cinquièmement, nous voulons instaurer un bilan de santé lorsqu’un enfant est dirigé vers l’aide sociale à l’enfance.

Madame la sénatrice, vous avez également fait allusion à la question des travailleurs sociaux. J’ai rendez-vous à seize heures trente avec le président du Haut Conseil du travail social (HCTS), Mathieu Klein, et le président de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss), Daniel Goldberg, précisément pour travailler sur l’ensemble de ces sujets.

Enfin, en ce qui concerne le rapport de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), le Premier ministre a arbitré : nous avons prolongé cette commission jusqu’en septembre 2026 pour qu’elle continue de travailler avec l’ensemble de ses membres sous la houlette de la haute-commissaire à l’enfance Sarah El Haïry. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.

Mme Marion Canalès. Madame la ministre, je regrette que rien dans vos annonces ne concerne les enfants qui dépendent à 100 % de l’État : je pense aux enfants qui attendent des places en institut médico-éducatif (IME). En Gironde, près de 150 d’entre eux sont pris en charge par le conseil départemental.

Comme vous avez cité la présidente de la délégation aux droits des enfants de l’Assemblée nationale, je déplore le fait que nous n’ayons pas la chance de vous auditionner dans ce cadre au Sénat. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

Mme Laurence Rossignol. Très bien !

narcotrafic dans les caraïbes

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour le groupe Les Républicains.

Mme Micheline Jacques. Monsieur le ministre de l’intérieur, en 2024, quelque 50 tonnes de cocaïne ont été saisies. C’est le résultat de la lutte intensive que nous avons engagée contre le narcotrafic sur notre territoire terrestre et maritime. Dans la nuit du 3 au 4 avril dernier, 830 kilos de cocaïne ont encore été interceptés. En Guyane, le dispositif d’interception des mules a fait diminuer radicalement les passages.

Toutefois, il faut voir dans ces prises le corollaire de l’augmentation de la production. Les chiffres sont alarmants et suscitent de vives inquiétudes pour les territoires français de la Caraïbe, qui sont particulièrement exposés en raison de leur position géographique.

Il y a deux semaines, une chaîne de télévision diffusait un reportage montrant, en Guadeloupe, un trafiquant, bracelet électronique à la cheville, poursuivre ses affaires illégales. Cela n’est pas tolérable.

À 900 kilomètres de Saint-Martin, et donc de la France, la capitale haïtienne, Port-au-Prince, est en proie à des gangs dont tout porte à croire qu’ils sont soutenus et financés par des cartels de drogue. Localement, l’inquiétude que nous partageons est de voir la ville tomber aux mains des trafiquants, ce qui offrirait un point de passage facilité à la drogue et aux armes. Aussi, nous ne pouvons pas rester inactifs.

La part des mineurs dans les rangs des gangs est évaluée à 30 %. Bien sûr, nous ne pouvons pas demander à l’armée d’intervenir contre des enfants. Toutefois, nos forces de police disposant d’une certaine expertise en matière de guérilla urbaine, comment pouvons-nous envisager d’aider Haïti pour ne pas laisser s’y créer un hub du narcotrafic ?