M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Brigitte Hybert, puisque vous avez évoqué la question de la simplification, permettez-moi de vous apporter quelques éléments concrets sur ce point.

J’ai engagé une démarche de simplification à deux niveaux : sur le plan législatif, d’une part, au travers du projet de loi de simplification de la vie économique ; sur le plan opérationnel, d’autre part, par la révision des démarches administratives existantes.

J’ai fait un bilan hier matin : 115 formulaires Cerfa ont d’ores et déjà été supprimés sur les 1 800 recensés au total, 535 relevant directement du ministère de l’économie et des finances. Cela représente 450 000 téléchargements annuels en moins pour les entreprises. C’est un allégement concret et mesurable des contraintes administratives, ce qui va dans le bon sens. (M. le président de la délégation aux entreprises sen réjouit.)

S’agissant du programme ETIncelles, lancé en 2023, il a déjà accompagné près de deux cents PME, avec un objectif affiché de cinq cents d’ici 2027. Ce programme propose un accompagnement individualisé et sur mesure pour lever les freins à la croissance des PME et les aider à devenir des ETI. Il est organisé dans un cadre souple pour permettre à une grande diversité d’entreprises d’y accéder. La direction générale des entreprises (DGE) assure une sélection à partir d’un panel représentatif, permettant de valoriser les pépites de nos territoires.

Dans votre propre département, plusieurs entreprises bénéficient déjà de cet accompagnement, telles que le groupe ABCM, Arcade Cycles, Rabaud ou Clean Sells.

Je le répète, les critères de sélection sont souples.

La dernière campagne d’appel à manifestation d’intérêt s’est close le 28 mars dernier. Le lancement de la cinquième promotion interviendra le 16 mai prochain. Je vous invite, si vous connaissez des entreprises susceptibles d’en bénéficier, à les orienter vers la DGE.

M. le président. La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Madame la ministre, les questions posées cet après-midi seront parfois redondantes. Personne ne nie ici les difficultés rencontrées par les entreprises ni ne conteste le nombre de faillites et de dépôts de bilan. Mais nul ne peut nier l’effort fait ces dernières années par les gouvernements successifs pour faire de la réindustrialisation une véritable priorité, car cet effort a porté ses fruits.

On peut dramatiser à l’extrême. La vie économique a toujours été faite d’entreprises qui se créent, et d’autres qui disparaissent. C’est la vie des entreprises. Pour autant, il est vrai qu’il y a des efforts à faire dans ce pays.

Pendant la crise sanitaire, le Gouvernement a mis en place de nombreux dispositifs exceptionnels, tels que les fonds de solidarité, les prêts garantis par l’État, les exonérations de charges. Personne ne le nie, et tout le monde les réclamait. Ces aides ont permis de préserver l’activité de centaines de milliers d’entreprises et de sauver notre économie. Elles ne sont plus à l’ordre du jour. Certaines structures déjà fragilisées rencontrent des difficultés de trésorerie et, vous l’avez dit, l’effet de rattrapage intervient aujourd’hui.

Ce sont surtout les petites entreprises les plus exposées aux potentielles hausses de droits de douane qui font face aujourd’hui à des pressions considérables.

Je pense en particulier à une entreprise sidérurgique de mon département, Valti, qui était un fleuron de la métallurgie et fabriquait des tubes en acier, notamment pour les centrales nucléaires. Une de ses usines historiques, située à Montbard, a été victime d’une liquidation judiciaire ordonnée le 4 février dernier par le tribunal de commerce de Dijon. Ce sont ainsi cent trente personnes qui risquent de se retrouver sans emploi.

C’est vrai qu’il est difficile, aujourd’hui, de trouver un repreneur. Cela marque la fin d’une époque, mais cet exemple s’inscrit, malheureusement, comme cela a été dit, parmi tant d’autres.

Par ailleurs, la guerre commerciale hasardeuse lancée par l’administration de Donald Trump engendre beaucoup d’incertitudes pour notre tissu d’entrepreneurs. Or, que ce soit dans le secteur des produits chimiques ou cosmétiques, des parfums ou de l’aéronautique comme dans le secteur viticole, nous exportons de nombreux produits issus du savoir-faire français. Si nous n’agissons pas dans ces secteurs, nous serons fortement affectés. Demain, ce seront d’autres acteurs qui prendront la place de nos entreprises et ils seront issus de groupes étrangers massivement subventionnés, parfois moins soucieux de nos standards, surtout environnementaux.

Vous avez déjà évoqué, madame la ministre, le travail qui est fait, les pistes que vous envisagez et les mesures qui ont été prises et qui portent leurs fruits.

M. le président. Il faut conclure.

M. François Patriat. Allez-vous prendre encore des mesures de simplification pour aider les entreprises à poursuivre leur activité ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur François Patriat, vous avez, à juste titre, évoqué la réindustrialisation qui débute, et j’avais moi-même eu l’occasion d’y revenir.

Je rappelle quelques chiffres : en 2024, ce sont quatre-vingt-neuf ouvertures nettes de sites industriels qui ont été enregistrées, portant à quatre cent cinquante le nombre total depuis 2022. Au-delà des défaillances d’entreprises, réelles, nous devons aussi prendre en compte cette dynamique positive.

S’agissant des droits de douane, leur évolution récente engendre de l’incertitude. Même si une suspension a été décidée par Donald Trump sur l’augmentation de 20 % initialement prévue, il ne faut pas oublier que d’autres hausses ont bien été mises en œuvre : 10 % sur de nombreux produits, 25 % sur l’acier, l’aluminium, l’automobile et leurs dérivés. Cette période de quatre-vingt-dix jours de suspension reste donc marquée par l’incertitude pour nos entreprises.

Nous devons profiter de ce moment pour construire un rapport de force, pour contraindre à la discussion, et cela doit se faire collectivement, de manière unie, à l’échelle européenne. D’ailleurs, le monde économique s’est très rapidement félicité de cette prise de position commune de l’Europe, sans initiatives isolées des États membres.

Vous avez aussi évoqué les mesures de simplification. Elles sont engagées dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Plusieurs dispositifs sont prévus pour améliorer l’accès à la commande publique, notamment en faveur des artisans ; pour faciliter aussi la vie des start-up innovantes, avec des seuils adaptés ; ou pour soutenir les commerçants. Je pense ici à la mensualisation des loyers commerciaux, en lieu et place du paiement trimestriel, ou encore à la limitation du dépôt de garantie à un mois. Ces mesures, à elles seules, représentent un gain de trésorerie de 2 milliards d’euros pour les commerçants. Enfin, des mesures spécifiques sont également prévues, toujours dans ce projet de loi, pour les TPE.

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet.

M. Philippe Grosvalet. Madame la ministre, en 2024, 67 830 procédures de défaillance d’entreprises ont été enregistrées. Tous les secteurs sont touchés, toutes nos régions. Un record, hélas !

L’année 2025 ne semble pas en voie de voir cette implacable réalité corrigée : 250 000 emplois sont menacés.

La direction d’ArcelorMittal vient d’annoncer six cents licenciements, ce qui vient encore assombrir le tableau. En Loire-Atlantique, comme sur l’ensemble des territoires concernés, c’est la stupeur. Prendre la décision de licencier six cents salariés après avoir bénéficié de 298 millions d’euros de subventions en 2023, puis s’être vu promettre des aides de 850 millions d’euros pour décarboner son activité est incompréhensible pour l’ensemble de nos concitoyens.

ArcelorMittal vient s’ajouter à l’inquiétante litanie : Michelin, Vencorex, Systovi, General Electric – encore dans mon département… Et cette liste n’est pas exhaustive.

Certes, les déclarations de l’administration Trump viennent compliquer une situation économique internationale particulièrement incertaine. Mais ces aléas ne peuvent à eux seuls expliquer la fragilisation de notre tissu économique et industriel : l’absence de vision, le manque de planification y sont pour beaucoup.

L’objectif de souveraineté industrielle ne peut pas se réduire à la distribution de subventions, sans stratégie de sauvegarde et de structuration. Il est plus que temps que l’État s’empare de ce sujet à bras-le-corps pour engager une réelle politique de développement économique et industrielle en partenariat avec nos territoires et nos représentants européens.

Ayons une pensée particulière pour tous les salariés de notre pays qui voient leur avenir et celui de leur famille plonger dans l’incertitude, sans oublier les territoires, qui ne sortent jamais indemnes de ces fermetures.

À quand, madame la ministre, une planification pour garantir à nos concitoyens, à notre République, la souveraineté économique et industrielle que nous sommes en droit d’attendre ? S’agissant d’ArcelorMittal, qu’envisagez-vous de faire ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Philippe Grosvalet, nous avons pris connaissance des annonces faites par ArcelorMittal concernant le site de Dunkerque. Certes, nous sommes dans un contexte de crise sans précédent pour la sidérurgie européenne, notamment du fait de surcapacités mondiales. Nous ne pouvons que regretter cette décision.

Dans la filière sidérurgique, les difficultés remontent à plusieurs années. La production européenne a baissé de 20 % entre 2018 et 2023 et la demande sur le marché européen s’est affaiblie en 2024, ce qui entraîne des surcapacités.

Le plan d’ArcelorMittal concerne tous les sites européens et ne vise pas uniquement et spécifiquement les sites français. ArcelorMittal soutient que ces annonces sont liées à un objectif prioritaire de restauration de la compétitivité du groupe. Aucun des sites français n’est menacé de fermeture à court terme – il est important de le rappeler et nous serons particulièrement vigilants sur ce point, comme le ministre chargé de l’industrie, Marc Ferracci, l’a clairement dit.

La France est très mobilisée au niveau européen pour obtenir des mesures fortes de protection du marché de l’acier afin de restaurer une concurrence loyale en Europe. Avec huit autres États membres, elle a d’ailleurs fait des propositions ambitieuses à la Commission, qui se sont traduites par un plan d’action présenté le 19 mars dernier et un premier renforcement des mesures de défense commerciale au 1er avril 2025. Un nouvel instrument de protection commerciale doit être proposé au plus vite par la Commission ; la France plaide pour qu’il soit le plus ambitieux possible afin de préserver l’industrie sidérurgique européenne.

L’État sera très vigilant quant à la mise en œuvre des annonces d’ArcelorMittal, notamment en matière de reclassement des salariés concernés, pour lesquels j’ai une pensée, et poursuit les discussions avec le groupe pour la confirmation rapide des projets de décarbonation sur les sites de Dunkerque et Fos-sur-Mer, auxquels l’entreprise s’est engagée.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Pierre-Antoine Levi. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur l’impact dévastateur pour les entreprises des retards de paiement, qui progressent de manière inquiétante.

Le rapport remis le 23 avril dernier par les médiateurs Frédéric Visnovsky et Pierre Pelouzet dresse un constat alarmant : les retards de paiement interentreprises ont atteint près de quatorze jours fin 2024, privant nos TPE et PME de 15 milliards d’euros de trésorerie. Cette situation est d’autant plus préoccupante que nous traversons une période de croissance ralentie : 0,9 % en 2025 selon la Banque de France.

Les chiffres sont parlants : 20 % des TPE et 9 % des PME présentent des capitaux propres négatifs, ce qui révèle une fragilité structurelle inquiétante de notre tissu économique. Dans ce contexte, les retards de paiement constituent souvent la goutte d’eau qui fait déborder le vase, menant à la défaillance.

Le rapport cite également le frein culturel, issu de la honte de l’échec, qui conduit à une situation de déni, aggravée par l’absence d’informations prévisionnelles sur la trésorerie.

De plus, les outils d’aide aux entreprises sont souvent mis en œuvre par des structures qui effraient les chefs d’entreprise, comme les tribunaux de commerce, perçus uniquement comme des instances de sanction et de liquidation – à tort.

Madame la ministre, face à cette situation, je souhaiterais connaître votre position sur trois recommandations majeures du rapport.

Premièrement, envisagez-vous de modifier le régime des sanctions pour retards de paiement, en calculant les amendes en pourcentage du chiffre d’affaires et en supprimant le plafond actuel de 2 millions d’euros, manifestement insuffisant pour dissuader les grandes entreprises ?

Deuxièmement, comment comptez-vous mettre en œuvre la création d’équipes territoriales animées au niveau régional pour fédérer les acteurs publics et privés autour de la prévention des difficultés ?

Enfin, la recommandation concernant l’information systématique des entreprises sur les dispositifs d’aides disponibles, notamment par les experts-comptables, me semble cruciale. Comment entendez-vous soutenir cette démarche, notamment pour les TPE et PME, qui n’ont pas les ressources suffisantes pour payer des prestations de conseil ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Pierre-Antoine Levi, vous évoquez un sujet important, qui est une préoccupation quotidienne des entreprises, en particulier dans les PME et les TPE, qui sont souvent en bout de chaîne.

Aujourd’hui, les retards de paiement représentent environ 15 milliards d’euros de trésorerie, qui manquent cruellement à nos PME et TPE. C’est un sujet de justice économique entre entreprises, quelle que soit leur taille.

Structurellement, deux éléments devraient nous permettre, à terme, de réduire ces délais : la mise en place progressive de la facturation électronique, qui permettra une meilleure maîtrise des délais ; l’intégration, depuis 2022, des comportements de paiement dans la cotation des entreprises réalisée par la Banque de France.

Néanmoins, vous avez raison, la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Il existe bien un dispositif de sanction, avec des amendes plafonnées à 2 millions d’euros, voire 4 millions en cas de récidive, mais force est de constater qu’il ne fonctionne pas suffisamment bien : trop d’infractions sont encore constatées.

Je veux ici saluer le travail de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur ce sujet. En 2024, onze amendes supérieures à 1 million d’euros ont été prononcées. Éric Lombard et moi-même avons d’ailleurs échangé ce matin sur ce sujet avec sa directrice, Sarah Lacoche, lors d’une visite sur un site de sa direction.

Nous avons aussi abordé ce point avec le président de la délégation sénatoriale aux entreprises, en vue de préparer un texte législatif et de le porter ensemble.

Vous soulevez aussi la question de la prévention. Oui, il faut améliorer la lisibilité du dispositif et mettre en place un guichet unique, une porte d’entrée claire pour toutes les entreprises confrontées à des difficultés, voire avant qu’elles n’en rencontrent.

Enfin, vous parlez de l’accompagnement. Là encore, je vous rejoins : il faut que nous puissions établir une charte avec les différents acteurs – chambres consulaires, organisations professionnelles, fédérations, mais aussi acteurs privés comme les experts-comptables – afin d’améliorer l’accueil.

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad.

M. Denis Bouad. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux pas participer à ce débat sans vous parler du coup dur qui a frappé le département du Gard ces derniers jours.

L’annonce de la fermeture de la verrerie de Vergèze constitue une véritable onde de choc pour tout un territoire : cent soixante-quatre familles sont aujourd’hui dans la détresse. Nous devons garder à l’esprit l’impact de ces évènements sur ces familles, qui voient du jour au lendemain leurs projets d’avenir remis en cause.

Sans repreneur dans les prochains mois, la verrerie de Vergèze devra fermer. Pourtant, 70 % de ses commandes émanent de son voisin immédiat – il suffit de traverser la route –, l’usine Perrier. Cette fermeture représenterait un non-sens écologique et une perte irréversible pour l’économie de l’ensemble du territoire.

La commune de Vergèze et l’ensemble des collectivités sont pleinement mobilisées aux côtés des salariés. Mais, aujourd’hui, un engagement fort de l’État semble indispensable pour permettre le maintien de cet outil de production.

Madame la ministre, c’est tout un territoire qui a besoin de se sentir soutenu. Nous ne pourrons pas laisser sacrifier la verrerie de Vergèze et ses salariés sur l’autel du profit et des stratégies financières. Avec 7 % de résultat, comment accepter la fermeture de ce site ?

La protection de notre souveraineté industrielle commence par la préservation des emplois industriels existants ! On ne peut pas parler de manière crédible de « réindustrialisation française » face à des salariés qui voient fermer l’usine où ils ont travaillé toute leur vie, parfois de père en fils.

Madame la ministre, comment votre gouvernement compte-t-il s’engager pour défendre le maintien de ces sites de production et de ces emplois industriels, aujourd’hui menacés, à Vergèze comme ailleurs sur le territoire national ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Denis Bouad, le cas de la verrerie de Vergèze a déjà été abordé dans le cadre d’une précédente question.

Il convient de relever la baisse structurelle de la consommation de vin, ce qui réduit d’autant les besoins en verre, et de bière, pour laquelle ce matériau est de surcroît en concurrence avec l’aluminium.

Nous regrettons évidemment qu’une telle réorganisation ait été décidée, qui plus est dans un contexte économique et financier déjà difficile, pour les raisons que je viens de rappeler.

Le Gouvernement et les services de l’État sont entièrement mobilisés ; ils le resteront autant que nécessaire. Un suivi territorial a été lancé par le préfet du Gard ; l’ensemble des acteurs économiques, sociaux et politiques du territoire y sont associés, comme c’est le cas dans ce type de situation. Je salue l’engagement de la préfecture, de la sous-préfecture, du commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises (CRP), de la direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) du Gard et d’un certain nombre d’acteurs économiques locaux, comme les agences de développement économique, notamment celle du conseil régional, ou les chambres consulaires.

Nous devons tout mettre en œuvre pour trouver un repreneur, afin que les salariés puissent retrouver un emploi. Le Gouvernement est pleinement engagé en ce sens.

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour la réplique.

M. Denis Bouad. Madame la ministre, j’entends vos arguments, mais vous ne répondez pas à ma question.

Perrier, qui est aujourd’hui le principal client de la verrerie du Languedoc, l’avait vendue voilà une dizaine d’années pour 1 euro symbolique.

Sachant que l’usine vend aujourd’hui 70 % de sa production à Perrier et les 30 % restants au secteur brassicole, je ne vois pas bien en quoi sa fermeture serait justifiée par les problèmes de la viticulture…

Peut-être faudrait-il réexaminer avec soin les aides qui sont versées.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Nédélec. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme Anne-Marie Nédélec. Madame la ministre, l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) joue un rôle essentiel d’amortisseur social en avançant le versement des créances salariales dues aux employés lorsque leur entreprise est en procédure collective. Ce mécanisme, financé par les employeurs, représente un filet de sécurité indispensable pour que les défaillances d’entreprises ne se traduisent pas par une précarisation brutale des salariés concernés.

La situation économique dans laquelle nous nous trouvons actuellement pèse fortement sur le régime, avec des montants records d’avances versées ces deux dernières années, ce qui a conduit la gouvernance à augmenter par deux fois le taux de cotisation en 2024.

À ces difficultés conjoncturelles s’ajoutent les conséquences de jurisprudences récentes de la Cour de cassation, qui ont eu pour effet d’étendre progressivement le périmètre de la garantie sur des sommes de nature indemnitaire, s’éloignant ainsi de la mission première de l’AGS : couvrir les créances relatives à la protection de la rémunération. Cela remet en cause la capacité du régime à recouvrer efficacement les fonds avancés aux salariés. Or cette capacité à recouvrer, qui est liée pour l’essentiel au statut de créancier prioritaire, est indispensable pour assurer l’équilibre financier du régime.

Madame la ministre, dans ce contexte instable, quelles garanties le Gouvernement peut-il apporter quant à la sécurisation du régime de garantie des salaires ? Ce sujet primordial pour les salariés et les entreprises de notre pays a-t-il bien été identifié par vos services et ceux des autres ministères compétents ? (M. Bruno Sido applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de lartisanat, des petites et moyennes entreprises et de léconomie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Anne-Marie Nédélec, vous avez raison, le dispositif AGS est très utile : il participe à garantir le paiement des sommes dues aux salariés, notamment lorsque l’employeur est en procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire et qu’il n’a pas les fonds disponibles pour régler les salaires.

Ce régime permet aux salariés d’obtenir le paiement, dans des délais encadrés, de sommes qui leur sont dues. Il n’a jamais fait faillite et a toujours réussi à assurer sa mission, malgré les crises.

Les situations ont été très variables, avec des creux et des vagues. En 2024, le montant des avances a atteint 2,13 milliards d’euros, son plus haut niveau depuis 2014.

Face à la dégradation de la conjoncture et à la hausse des défaillances, l’AGS a – vous l’avez souligné – relevé ses taux.

En outre, le 25 juin 2024, elle a conclu un accord avec les administrateurs et mandataires judiciaires. Les effets sur les ressources du régime sont notables. Au premier trimestre 2025, ce sont ainsi 157,6 millions d’euros qui ont été récupérés, soit une hausse de 53,2 % par rapport au premier trimestre 2024. De même, en 2024, 607 millions ont été récupérés par les administrateurs et mandataires judiciaires, soit une hausse de 72 % par rapport à 2023.

En plus des rentrées liées au taux de cotisation et des sommes récupérées par les administrateurs et mandataires judiciaires, l’AGS peut recourir à des lignes de prêt auprès des banques. Ce n’est jamais arrivé, mais c’est une piste, même si ce n’est pas celle que nous privilégions.

Le Gouvernement est très attaché à ce régime. Nous sommes vigilants et nous continuerons à suivre de près les évolutions dans les prochains mois, en lien notamment avec le ministère du travail.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Nédélec, pour la réplique.

Mme Anne-Marie Nédélec. Certes, madame la ministre, mais, compte tenu de la situation actuelle, il me paraît tout de même essentiel que l’AGS puisse se concentrer sur sa mission première. On ne peut pas tout demander aux entreprises, qui ne sont d’ailleurs pas toutes inscrites au CAC 40 !

Avant de distribuer la richesse, donnons aux entreprises les moyens de la créer !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée. Je souscris à vos remarques. Le Gouvernement est d’ailleurs très attentif au fait que l’AGS puisse assurer sa mission première : garantir le salaire en cas de défaillance de l’entreprise.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat.

M. Simon Uzenat. Je remercie M. le président de la délégation sénatoriale aux entreprises de l’organisation de ce débat.

Madame la ministre, comme l’ont souligné de nombreux collègues, les défaillances sont en hausse notable. En témoigne l’évolution du nombre de redressements ou de liquidations judiciaires prononcés par les tribunaux de commerce entre 2023 et 2024 – j’ai pu l’observer dans mon département, à Lorient comme à Vannes.

Au-delà des défaillances, c’est bien l’emploi qui est menacé. Les entreprises concernées sont principalement des PME et des ETI, de 9 et 4 999 salariés, avec une hausse de plus de 60 % en 2024 par rapport à la période de 2017-2019. Pour les TPE, l’augmentation n’est que de 16 %.

Dans l’industrie, la trésorerie et les carnets de commandes sont en baisse, quand les stocks sont en hausse. Dans le bâtiment, la crise est structurelle. Le climat est anxiogène. L’attentisme se généralise. Tout cela est, pour partie, lié au cycle électoral. Mais c’est surtout l’une des conséquences directes des coupes budgétaires que votre gouvernement, madame la ministre, a imposées aux collectivités locales.

Le Sénat a lancé une commission d’enquête sur la commande publique, sur l’initiative du groupe Les Indépendants – République et Territoires. Au bas mot, ce sont 170 milliards d’euros qui sont concernés à ce titre chaque année. En réalité, c’est sans doute beaucoup plus. Un rapport de la Cour des comptes européenne estime à près de 14 % la part de la commande publique dans le PIB sur notre continent, soit quelque 300 milliards d’euros, voire 400 milliards d’euros. C’est massif.

Pour soutenir la Fonderie de Bretagne ou pour aider les entreprises qui veulent évoluer en ETI, les collectivités, qu’il s’agisse de Lorient Agglomération ou de la région Bretagne, sont au rendez-vous. Mais, pour cela, elles ont besoin de visibilité et de moyens.

Quelles réponses leur apportez-vous, madame la ministre ?