Enfin, nous devons mesurer la portée symbolique et pratique de ce texte sur notre attractivité économique. Les grandes entreprises, qui sont visées par cette proposition, sont aussi celles qui portent une part importante de l'investissement, de l'innovation et de la formation professionnelle dans notre pays. Elles doivent certes être tenues à l'exemplarité, mais elles doivent aussi pouvoir s'adapter, évoluer et anticiper les mutations industrielles et écologiques majeures que nous appelons de nos vœux.
Une économie moderne, ouverte et résiliente ne se construit pas dans l'injonction punitive ! Elle se construit dans le dialogue, la responsabilité partagée et la confiance entre l'État, les entreprises et les salariés.
Nous ne croyons pas que ce texte apporte des solutions concrètes aux questions de reconversion, de transition professionnelle et d'accompagnement des bassins d'emploi fragilisés. Nous pensons qu'il enferme le débat dans une logique de confrontation, alors que les défis de notre temps appellent une mobilisation commune.
Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI votera contre cette proposition de loi.
Mme la présidente. La discussion générale est close.
La commission n'ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.
proposition de loi visant à limiter le recours au licenciement économique dans les entreprises d'au moins 250 salariés
Avant l'article 1er
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin et Silvani, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 1233-3 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233-3. – Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives à une cessation d'activité ou à des difficultés économiques qui n'ont pu être surmontées par la réduction des coûts autres que salariaux ou, à des mutations technologiques indispensables à la pérennité de l'entreprise, et dès lors que l'entreprise n'a pas recours au travail intérimaire ou à la sous-traitance pour exécuter des travaux qui pourraient l'être par le ou les salariés dont le poste est supprimé.
« L'entreprise devra avoir cherché par tous moyens adaptés à sa situation d'éviter un licenciement pour motif économique, de sorte que le licenciement pour motif économique constitue le dernier recours pour assurer sa pérennité.
« L'appréciation des difficultés économiques ou des mutations technologiques s'effectue au niveau de l'entreprise si cette dernière n'appartient pas à un groupe.
« Lorsque l'entreprise appartient à un groupe, l'appréciation des difficultés économiques ou des mutations technologiques s'apprécie au niveau du secteur d'activité du groupe.
« Les situations visées au premier alinéa qui seraient artificiellement créées ainsi que celles résultant d'une attitude frauduleuse de la part de l'employeur, ne peuvent constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à revenir sur la définition des licenciements économiques. La loi Macron de 2015, la loi El Khomri de 2016 et les ordonnances Pénicaud de 2018 ont assoupli les motifs de licenciements économiques, de sorte qu'il n'a jamais été aussi facile de procéder à des licenciements massifs dans notre pays.
Au fil des réformes du droit du travail, le motif économique a perdu en précision, tandis que ses conditions de mise en œuvre ont gagné en souplesse. La dérégulation de l'économie a provoqué celle du marché du travail : les entreprises ont été incitées à recourir à des licenciements massifs pour limiter le risque de perte de parts de marché par rapport à leurs concurrents. Ils ont ainsi été amenés à considérer leurs salariés comme de simples coûts à réduire, à externaliser ou à délocaliser.
Le fait qu'une entreprise puisse, en l'absence de difficultés économiques, lancer un projet de licenciement s'il est justifié par une réorganisation nécessaire à sa sauvegarde et à sa compétitivité revient à considérer que la suppression des emplois d'aujourd'hui est légitime dès lors qu'elle assure la sauvegarde des emplois de demain.
Selon nous, il convient de revenir sur cette définition afin de limiter vraiment les licenciements économiques.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Monique Lubin, rapporteure. Cet amendement vise à redéfinir les raisons économiques du licenciement au sein du code du travail, en supprimant notamment les critères définis par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi Travail. Ces critères, notamment celui de la sauvegarde de la compétitivité, ont en effet assoupli les conditions pour recourir au licenciement économique.
En outre, cet amendement tend à supprimer le périmètre national pour apprécier les difficultés économiques ou les mutations technologiques auxquelles est confrontée une entreprise appartenant à un groupe. Un licenciement devrait ainsi être justifié au regard de la situation globale du secteur d'activité d'un groupe international.
En cohérence avec sa position sur le texte, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Toutefois, à titre personnel, j'estime que cet amendement est tout à fait bienvenu, car il s'inscrit dans l'esprit de cette proposition de loi, qui a vocation à rééquilibrer le droit du licenciement économique en faveur de la protection des emplois.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, vous proposez de supprimer les précisions apportées par la loi Travail de 2016 sur la définition du motif économique.
Or ces précisions contribuent à lever les freins à l'embauche, lorsque le chef d'une PME hésite à recruter. En effet, elles évitent que les embauches à durée déterminée se multiplient, parce qu'elles sont perçues comme la voie la plus sûre pour se prémunir contre les difficultés à rompre le contrat de travail en cas de coup dur.
Aussi ne me semble-t-il pas opportun de modifier la rédaction actuelle de cet article du code du travail, sous peine de porter atteinte à l'équilibre du droit du licenciement économique.
Je précise que, selon l'Insee, 25 % des entreprises industrielles considèrent que les difficultés de recrutement limitent leur production, alors qu'elles n'étaient que 7 % à le penser en 2006. De plus, France Stratégie a évalué les besoins prévisionnels de recrutement dans les métiers industriels à 90 000 par an sur la période 2019-2030.
Ce n'est pas en prenant ce genre de mesures que nous faciliterons les recrutements en France, en particulier dans le secteur de l'industrie.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 286 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 226 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 1er
La sous-section 1 de la section 2 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du code du travail est complétée par un article L. 1233-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1233-2-1. – Une entreprise d'au moins deux cent cinquante salariés, telle que définie au 3° de l'article D. 230-1 du code de commerce, ne peut invoquer un motif économique de licenciement au sens de l'article L. 1233-3 du présent code si, au cours du dernier exercice comptable de l'année écoulée, elle a :
« 1° Procédé à la distribution de dividendes ;
« 2° Distribué des stock-options ou actions gratuites, ou procédé à une opération de rachat d'actions ;
« 3° Réalisé un résultat net ou un résultat d'exploitation positif ;
« 4° Bénéficié des dispositifs prévus aux articles 244 quater B et 244 quater C du code général des impôts ainsi qu'à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.
« L'inspection du travail procède aux vérifications nécessaires pour l'application du 4° du présent article. »
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, sur l'article.
M. Thierry Cozic. Je voudrais revenir sur les propos qui ont été tenus pendant la discussion générale au sujet du licenciement économique.
En présentant cette proposition de loi au nom du groupe socialiste, je ne prétends pas modifier les éléments constitutifs des plans de sauvegarde de l'emploi (PSE). L'objectif est simplement de rappeler avec force qu'une entreprise ne peut pas à la fois engager un PSE et verser des dividendes.
Il est en effet contradictoire de voir des entreprises faire le choix de fermer des sites et de licencier des salariés tout en touchant des aides publiques, alors que, dans le même temps, elles sont rentables et versent des dividendes à leurs actionnaires ! Voilà pourquoi nous tenons à préciser ce critère de rentabilité.
Madame la ministre, vous avez mis en avant la situation de l'emploi. Permettez-moi de vous rappeler qu'Emmanuel Macron est au pouvoir depuis huit ans ! C'est le moment de faire le bilan de la politique de l'offre, qui était supposée ruisseler sur l'économie…
Depuis que vous êtes aux responsabilités, notre dette a augmenté de plus de 1 100 milliards d'euros pour atteindre le niveau record de 3 300 milliards. Nous avons constaté 66 000 défaillances d'entreprises l'année dernière et 400 000 emplois ont été détruits entre 2024 et 2025. Dans le même temps, 300 milliards d'euros d'aides publiques ont été versés et les dividendes explosent. Pour preuve, plus de 100 milliards d'euros ont été versés en 2024 sous forme de dividende ou de rachat d'actions.
La situation n'est pas tenable et nos concitoyens ne peuvent pas entendre que l'on s'en satisfasse ! Cette proposition de loi est de bon sens.
Mme la présidente. Il faut conclure, cher collègue !
M. Thierry Cozic. Elle permet au politique de reprendre la main sur l'économie.
J'en appelle donc à la responsabilité de l'ensemble de l'hémicycle.
Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, sur l'article.
M. Simon Uzenat. Mes chers collègues, comme je vous sais suffisamment intelligents pour lire et comprendre les textes, j'ai le sentiment, à l'issue de la discussion générale, que vous ne voulez pas comprendre cette proposition de loi. Vous nous accusez, mon groupe et moi, de défendre l'économie administrée et de vouloir interdire les licenciements. Pourtant, il n'en est nullement question dans ce texte !
Je suis frappé par la façon dont vous balayez d'un revers de main le vécu des Français qui sont confrontés à ces situations. Nous avions bien compris que le Président de la République était adepte d'une forme d'arrogance, nous craignons qu'elle ait contaminé de nombreux élus nationaux… En ce qui nous concerne, nous avons à cœur d'entendre ce que nous disent les Françaises et les Français.
Madame la ministre, nous n'avons rien contre les actionnaires ! Ils prennent des risques et ils méritent d'être rémunérés pour cela ; nous sommes tout à fait d'accord sur ce point. En ce qui concerne les petits actionnaires, évoqués par Mme Gruny, j'affirme que leur responsabilité doit être questionnée. Est-il normal que ceux qui se font bien souvent les défenseurs des entreprises françaises fassent passer leur rémunération personnelle devant la sauvegarde des emplois ?
Je rappelle que les dividendes sont globalement en hausse, voire en forte hausse. Ils ne diminuent pas. Le cas de Michelin est éclairant sur ce point.
Enfin, madame la ministre, vous pointez régulièrement, tout comme nos collègues de la droite sénatoriale, les diverses aides dont peuvent bénéficier nos concitoyens. Mais, manifestement, la question ne semble pas se poser, selon vous, pour les entreprises. Vous dites ne pas vouloir d'un État qui contraint ; en réalité, vous voulez bien d'un État qui contraint les uns, mais pas les autres !
Pour notre part, nous sommes attachés à l'égalité républicaine, qui n'est pas à géométrie variable. Ce texte y contribue. Il envoie un signal de la volonté politique qui doit être la nôtre.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 287 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 225 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 2
La sous-section 2 de la section 2 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du code du travail est complétée par un article L. 1233-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1233-3-1. – L'employeur ayant procédé à un licenciement économique jugé abusif au titre de l'article L. 1233-2 perd, pour une durée ne pouvant excéder trois ans, le bénéfice des dispositifs prévus aux articles 244 quater B et 244 quater C du code général des impôts ainsi qu'à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.
« Dans le cas où l'employeur est déjà bénéficiaire des dispositifs mentionnés au premier alinéa du présent article, il a l'obligation de rembourser l'intégralité du montant des aides perçues au cours du dernier exercice comptable précédant le licenciement économique jugé abusif au titre de l'article L. 1233-2 du présent code. »
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais mettre aux voix l'article 2.
Je vous rappelle que, si cet article n'était pas adopté, il n'y aurait pas lieu de voter sur l'ensemble de la proposition de loi dans la mesure où les deux articles qui la composent auraient été supprimés. Il n'y aurait donc pas d'explication de vote sur l'ensemble.
Dans ces conditions, quelqu'un demande-t-il la parole pour expliquer son vote sur l'article 2 ?
La parole est à M. Thierry Cozic, pour explication de vote sur l'article.
M. Thierry Cozic. Je profite donc de cette intervention à la fois pour présenter l'article 2 et pour m'exprimer de manière plus globale sur ce texte.
Cet article donne au juge, lorsqu'il a établi qu'un licenciement était abusif, le pouvoir de contraindre l'entreprise concernée à rembourser les aides publiques qu'elle aurait perçues lors du dernier exercice ou à l'empêcher d'en percevoir dans les années à venir. Cette disposition me semble importante.
Comme nous parvenons à la fin de l'examen de ce texte, je voudrais remercier le groupe socialiste d'avoir retenu cette proposition de loi pour son espace réservé. Il se trouve qu'elle percute l'actualité, mais elle découle d'un travail que j'ai engagé il y a plusieurs années et qui a vocation à se poursuivre après le vote du Sénat.
La commission d'enquête sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants que conduisent en ce moment Olivier Rietmann et Fabien Gay et que j'ai évoquée dans mon propos liminaire produira prochainement des propositions. Le texte que je défends aujourd'hui ne constitue donc que la première pierre d'un vaste édifice.
Mes chers collègues, quelles que soient nos opinions respectives, je pense qu'il nous faudra nous départir de toute lecture dogmatique. (Mme Pascale Gruny s'exclame.) Je le redis, cette proposition de loi visait simplement à interdire aux groupes – seuls eux étaient concernés – de licencier, quand ils touchent des aides publiques dans le même temps. Nos concitoyens ne comprennent pas cet état de fait, qui n'est plus supportable à l'heure où l'on demande des efforts à tout le monde.
Chacun doit faire preuve de responsabilité : le politique, le citoyen, mais aussi l'entreprise ! Ce n'est qu'ensemble que nous pourrons faire société et il est important que nous avancions collectivement sur ces questions.
Mme la présidente. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote sur l'article.
M. Simon Uzenat. Je ne veux pas disqualifier certaines propositions de loi, mais toutes n'ont pas la même ampleur. Ce soir, nous avons devant nous l'exemple même d'un texte emblématique, qui répond à une attente et témoigne d'une volonté politique. Pour être élus, nous avons tous pris des engagements devant nos électeurs, en l'occurrence les élus locaux de nos territoires et, à travers eux, nos concitoyens.
Notre mission est d'agir pour changer le cours des choses. Cela ne signifie pas raconter ou faire n'importe quoi. Du reste, on ne saurait nous soupçonner, dans cette partie de l'hémicycle, de promettre la lune. Nous agissons toujours en responsabilité, comme nous le faisons dans les collectivités dont nous avons la charge.
Madame la ministre, mes chers collègues de la droite sénatoriale, nous avons parfaitement conscience de la concurrence internationale. Chacun convient, jusqu'au plus haut niveau de l'État, qu'il est nécessaire de réagir, non seulement à l'élection de Donald Trump, mais surtout au fait que le monde évolue. Nous devons nous doter des bons outils, à l'échelle de notre pays comme de l'Union européenne.
Il est de plus en plus question de protectionnisme européen, ou tout du moins de préférence européenne. Je préside une commission d'enquête, dont le rapporteur est Dany Wattebled, sur les coûts et les modalités effectifs de la commande publique et la mesure de leur effet d'entraînement sur l'économie française et nous constatons que cette idée fait son chemin. Sur ce sujet aussi, on pourrait nous rétorquer que la concurrence internationale nous empêche d'adopter certains outils. Pourtant, nous espérons bien le faire à court et moyen terme !
Aujourd'hui, nous défendons une mesure de régulation qui doit permettre aux uns et aux autres de faire des choix en responsabilité. Nous ne sommes pas opposés à la rémunération du capital, à condition qu'elle garde des proportions raisonnables, qui permettent de préserver les outils productifs, les compétences et les emplois dans nos territoires, dont nous avons besoin.
Nous ne pouvons pas, d'un côté, appeler à la souveraineté et à l'autonomie industrielle et, de l'autre, nous livrer à cette mondialisation financière effrénée. Voilà le message que nous envoyons et nous espérons, mes chers collègues, que vous saurez l'entendre.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Messieurs les sénateurs, vous nous appelez à ne pas être dans le dogmatisme. Pour ma part, je suis plutôt connue pour avoir une parole assez libre, y compris lorsqu'il est question de dresser des bilans.
Vous avez vivement critiqué le bilan du Gouvernement en matière d'emploi. Je tiens donc à rappeler certains chiffres, qui sont – j'ai pour habitude de citer mes sources – ceux de l'Insee : 35 000 emplois industriels nets ont été créés en 2023 et 25 000 en 2024 ; entre 2019 et 2023, 1,3 million d'emplois salariés nets ont été créés.
En outre, les baromètres sur le sujet montrent que la France est la première terre d'accueil d'investissements étrangers sur le continent européen.
Il convient aussi de rappeler tout cela !
Notre politique industrielle a commencé à fonctionner non pas depuis 2017, mais depuis la loi Travail qui a été votée en 2016. Une partie du crédit vous revient donc, messieurs les sénateurs, et je vous invite à l'assumer.
Là où je ne vous rejoins pas, et j'ai déjà cité le chiffre, c'est que les contributions patronales représentent actuellement 10 % du PIB de la France – et ce taux tient compte des aides – contre 7 % en Allemagne et en moyenne dans l'Union européenne.
Nous devons faire face à plusieurs questions. Le coût du travail en est une, elle a été évoquée par certains d'entre vous : nos compatriotes comprennent de moins en moins l'écart entre le salaire super brut et le salaire net. De même, il existe un sujet autour des compétences. Nous constatons en effet que de nombreuses entreprises, notamment industrielles, peinent à recruter, y compris dans des territoires où il y a des licenciements.
Nous devons répondre à d'autres questions, souvent au niveau européen : l'énergie, les surcapacités chinoises ou encore la mise en place d'une préférence européenne dans la commande publique, etc.
Nous pouvons donc nous rejoindre sur plusieurs sujets, mais j'estime que la réponse que vous apportez aujourd'hui est une fausse bonne idée, car le problème exige une réponse de longue durée fondée sur les mesures qui ont commencé à être mises en place.
Je vous le répète, les 10 % de PIB atteints par les contributions patronales – un niveau supérieur à celui de l'Allemagne ou des pays du nord de l'Europe, des pays qui ont une tradition de cohésion sociale – doivent nous faire réfléchir.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 288 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 226 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mes chers collègues, les deux articles de la proposition de loi ayant été successivement supprimés par le Sénat, je constate qu'un vote sur l'ensemble n'est pas nécessaire.
En conséquence, la proposition de loi visant à limiter le recours au licenciement économique dans les entreprises d'au moins 250 salariés n'est pas adoptée.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Monique Lubin, rapporteure. Je tiens à remercier le secrétariat de la commission des affaires sociales pour la qualité de son travail. Il s'est montré compréhensif et disponible malgré les conditions que je lui ai infligées. (Sourires.)
Je remercie également l'ensemble de mes collègues pour la qualité de ce débat.
6
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Madame la présidente, lors du scrutin public n° 283 sur les amendements identiques nos 4 rectifié et 6 rectifié bis tendant à supprimer l'article 2 de la proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population, l'ensemble des sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires souhaitaient voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
7
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 19 mai 2025 :
À seize heures :
Projet de loi relatif au transfert à l'État des personnels enseignants de l'enseignement du premier degré dans les îles Wallis et Futuna (procédure accélérée ; texte de la commission n° 618, 2024-2025) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à aménager le code de la justice pénale des mineurs et certains dispositifs relatifs à la responsabilité parentale (texte de la commission n° 573, 2024-2025) ;
Projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 613 rectifié, 2024-2025) et projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte (procédure accélérée ; texte de la commission n° 614, 2024-2025) : discussion générale commune.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER