Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 95, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé
I. – Alinéa 130
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un calendrier des travaux de sécurisation de cette usine de dessalement sera élaboré avant le 1er décembre 2025 et transmis au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
II. - Après l’alinéa 133
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
Le Gouvernement s’engage à transmettre aux élus locaux l’étude de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable portant sur le retour d’expérience de la crise de l’eau à Mayotte avant le 1er juillet 2025.
Un nouveau plan Eau Mayotte sera élaboré avant le 31 décembre 2027 et son élaboration sera concertée en amont avec les élus locaux.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Cet amendement vise à apporter plusieurs précisions sur la question de l’approvisionnement en eau à Mayotte.
Il est notamment proposé d’élaborer un calendrier des travaux de sécurisation de l’usine de dessalement.
Par ailleurs, il est important qu’un nouveau plan Eau Mayotte fasse l’objet d’une concertation avec les élus locaux bien en amont, cela afin d’éviter toute rupture dans la dynamique des investissements et de déploiement de l’action de l’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Là encore, la commission n’est pas favorable à la multiplication des injonctions à l’égard du Gouvernement.
Pour cette raison, elle émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 61, présenté par Mmes Guhl et M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 131
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
Un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable sera mis en œuvre afin de garantir les principes de continuité, d’égalité et d’adaptabilité du service public.
Le stockage et la récupération des eaux de pluie seront facilités et encouragés pour les ménages, dans les conditions prévues par l’arrêté du 12 juillet 2024 relatif aux conditions sanitaires d’utilisation des eaux impropres à la consommation humaine pour des usages domestiques pris en application de l’article R. 1322-94 du code de la santé publique.
En particulier, seront encouragées les solutions et sources alternatives d’accès à l’eau (multiplication des bornes-fontaines, stockage et récupération des eaux de pluie, distribution de contenants propres, accompagnement à l’utilisation des eaux de surface) dans les zones où le service public d’eau n’est pas suffisant ou efficient.
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Cet amendement de notre collègue Antoinette Guhl vise à réaffirmer une priorité : garantir à Mayotte l’accès à l’eau potable dans le respect des grands principes du service public.
Les débats lors de l’examen de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer ont permis de montrer l’ampleur des inégalités entre Mayotte et l’Hexagone.
Réduire ces écarts passe par un renforcement des services publics. L’égalité territoriale exige un accès identique aux droits et aux services, partout sur le territoire. Or, à Mayotte, l’accès à l’eau et à l’assainissement reste très inégal, notamment dans les quartiers non raccordés.
Au travers de cet amendement, nous soulignons donc la nécessité d’un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures d’eau potable.
L’objectif est simple : garantir la continuité, l’égalité et l’adaptabilité du service public.
La continuité du service public est un principe constitutionnel, mais à Mayotte, les services d’eau sont souvent interrompus. Les tours d’eau organisent des coupures programmées, faute de production suffisante. Les bornes-fontaines sont souvent hors service. Le principe d’égalité est donc aussi en cause.
En 2023, puis après le cyclone, les distributions de bouteilles d’eau ont été inéquitables. Nombre d’entre elles ont été conditionnées à la présentation de papiers administratifs. Les personnes précaires, souvent sans documents, en ont été exclues.
Le service public doit aussi s’adapter. Face aux coupures, les habitants utilisent des sources dangereuses : pluies, rivières, puits artisanaux. Ces pratiques exposent à des risques sanitaires graves. Il faut donc développer des solutions alternatives sécurisées d’accès à l’eau et garantir que personne ne soit laissé de côté.
Cet amendement a été travaillé avec la Coalition Eau.
Mme la présidente. L’amendement n° 112, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 131
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable sera mis en œuvre afin de garantir les principes de continuité, d’égalité et d’adaptabilité du service public.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Notre amendement rejoint le précédent, puisqu’il vise aussi à établir un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable.
Il y a bien sûr un enjeu de continuité et d’égalité devant le service public, qui est indispensable, un enjeu sanitaire également, mais surtout et tout simplement un enjeu d’humanité et de respect de nos valeurs républicaines.
Nous ne pouvons pas déployer nos efforts et notre dépense publique pour empêcher, par exemple, des installations d’habitat informel si nous ne mettons pas les moyens pour développer un habitat digne, qui permette à tous les habitants de Mayotte de vivre décemment.
Cela passe évidemment par la construction des infrastructures pour accéder à l’eau courante et à l’eau potable.
Nous l’avons déjà dit et il faut le redire : 40 % des logements sont en tôle et 95 % d’entre eux sont dépourvus de toilettes, de douche ou d’eau courante.
Il y a donc une véritable crise. Quand tout fonctionne, on estime les capacités de production à 43 000 mètres cubes, voire à 44 000 mètres cubes d’eau par jour. Or la consommation est estimée en 2025 à 47 000 mètres cubes par jour. Il manque donc 3 000 à 4 000 mètres cubes, ce qui justifie notre amendement.
J’interroge chacun d’entre vous : dans quel département, dans quel territoire du continent accepterait-on que des citoyens et des citoyennes doivent créditer des cartes prépayées pour se procurer de l’eau pour leurs besoins élémentaires ?
Il est absolument nécessaire de réagir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Nous avons déjà évoqué ce sujet crucial de l’eau et nous estimons que le plan Eau Mayotte satisfait déjà très largement les demandes qui sont formulées dans les deux amendements.
Pour celles qui ne seraient pas satisfaites, nous émettons un avis défavorable, pour les raisons invoquées précédemment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Pour résoudre la crise de l’eau, qui est une réalité, le plan Eau Mayotte prévoit, sur la période 2024-2027, un financement des investissements par l’État à hauteur de 210 millions d’euros sur un total de 500 millions d’euros.
Ces nouveaux investissements concernent précisément les sixième et septième campagnes de forage, qui fourniront plus de 12 000 mètres cubes par jour, la construction de l’usine de dessalement d’Ironi Bé, qui produira 10 000 mètres cubes par jour, la construction de nouveaux réseaux et, enfin, la réparation des fuites. Comme je l’évoquais hier dans mon intervention, ce dernier point est essentiel.
Concernant l’assainissement, le système d’assainissement de Koungou est en cours de travaux et plusieurs constructions ou réhabilitations de stations d’épuration sont prévues, notamment à Mamoudzou-Sud, au centre de l’île et à Petite-Terre.
À la suite de la crise climatique liée au cyclone Chido, une mission d’inspection interministérielle a réalisé de janvier à février 2025 une évaluation des dégâts et des ajustements concernant les investissements à consentir.
Le plan Eau Mayotte prévoit également l’installation de cuves de récupération des eaux de toiture, qui doivent pouvoir être utilisées conformément au code de la santé publique. Il faudra avancer sur l’objectif « un foyer, une cuve », notamment là où l’eau n’arrive pas – mais pas seulement.
Enfin, comme je vous le disais également hier, plusieurs ministères – outre-mer, santé, écologie – ont engagé des études concernant l’usage des ressources alternatives de type fontaine atmosphérique ou unité mobile de chloration, afin d’offrir des solutions nouvelles pour garantir un accès continu à l’eau en cas de sécheresse aggravée.
Je veux vous dire les choses clairement : nous avons devant nous une période qui sera encore difficile et dont la durée dépendra notamment de la livraison de l’usine de dessalement dont nous avons déjà parlé et de la mise en place de la nouvelle retenue collinaire. En attendant, il nous faudra être très attentifs à la situation pour ne pas connaître une nouvelle crise comme celle qu’a connue Mayotte en 2023 ; pour cela, nous devrons maintenir les dispositifs qui seront nécessaires : distribution de bouteilles d’eau, unités mobiles de chloration, etc. afin d’éviter toute dégradation de la situation.
Mentionner dans le rapport annexé le stockage et la récupération des eaux de pluie, par exemple, ainsi que les solutions et sources alternatives d’accès à l’eau me semble, dans cette période, pertinent.
Je m’interroge en revanche sur l’opportunité d’évoquer un plan de rénovation et de redimensionnement des infrastructures de distribution d’eau potable, alors que le plan Eau Mayotte est en cours.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 61 et je demande le retrait de l’amendement n° 112.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, vous avez lancé une mission d’évaluation. L’inspectrice chargée de cette mission, très compétente, a réuni plusieurs fois les acteurs locaux dans un véritable souci de transparence et d’échange.
Il est évident que les acteurs de l’eau doivent être destinataires de son rapport final, parce que la politique de la ressource en eau est prioritaire et que cette compétence est largement partagée avec les collectivités locales. La transparence doit donc être une règle impérative dans ce domaine. Or nous n’avons jamais reçu ce rapport, monsieur le ministre.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur, je suis vraiment très attentif à la transparence et donc favorable, pour ceux qui ont un peu de culture soviétique, à la glasnost et à la perestroïka… (Rires.)
M. Rachid Temal. Ça s’est mal terminé !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. La chute du rideau de fer !
M. Manuel Valls, ministre d’État. J’ai l’impression que M. Kanner – je le vois opiner – connaît également ses classiques… (Sourires.)
L’inspectrice, dont vous avez salué le travail, monsieur le sénateur, est en train de terminer son rapport. Dès lors qu’il sera prêt, il n’y a aucune raison qu’il ne soit pas mis à la disposition des parlementaires.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
Mme la présidente. L’amendement n° 96, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 136
Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :
Au 31 décembre 2025 au plus tard, le Gouvernement établira une étude de faisabilité sur l’enfouissement du réseau électrique de Mayotte comprenant l’identification des installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire, le calendrier de réalisation et les modalités d’accompagnement financier. L’articulation avec les travaux pour l’installation du très haut débit devra être abordée. Cette étude est transmise au comité de suivi de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Le cyclone Chido a mis le réseau électrique de Mayotte à terre. Il apparaît donc nécessaire de rendre ce réseau plus résilient aux événements climatiques et envisager des travaux d’enfouissement d’ampleur, en ciblant les installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire : hôpitaux, pharmacies, dispensaires, écoles, mairies, etc.
Cet amendement tend donc à ce que le Gouvernement établisse une étude de faisabilité sur l’enfouissement du réseau électrique de Mayotte comprenant l’identification des installations qui nécessitent un enfouissement prioritaire, ainsi que le calendrier de réalisation et les modalités d’accompagnement financier. Cette étude devra être transmise au comité de suivi prévu par le projet de loi.
J’ajoute que, selon les recommandations des experts, l’articulation avec la mise en place du très haut débit sur Mayotte est indispensable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Après l’accès à l’eau, nous abordons ici l’accès à l’électricité, qui est également un sujet important pour Mayotte.
Le rapport annexé prévoit déjà des études de faisabilité au cas par cas pour l’enfouissement des lignes. Il est ici proposé une étude généralisée. Nous considérons que cela alourdirait les procédures.
C’est pourquoi nous émettons un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par Mme Jacques, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 154
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Cette structuration implique la création d’un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins à horizon 2027. L’État soutiendra sa mise en place, ainsi que la mise en place d’une structure préfiguratrice de ce comité.
La parole est à Mme Micheline Jacques.
Mme Micheline Jacques. Cet amendement vise à compléter le volet relatif à l’agriculture et à la pêche du rapport annexé pour prévoir que l’effort de structuration de la filière pêche implique la création d’un comité régional des pêches et des élevages marins à l’horizon 2027.
La création de ce comité est une demande tant des pêcheurs que des agriculteurs. Pour qu’un tel comité voie le jour, la filière doit atteindre un niveau de structuration suffisant. Tel est l’objet de l’actuelle association préfiguratrice, première étape indispensable pour laquelle un soutien de la part de l’ensemble des acteurs, particulièrement des services de l’État, est nécessaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Cet amendement, qui montre clairement la fine connaissance de ce territoire par la présidente Micheline Jacques, vise à créer un comité régional des pêches à Mayotte.
L’État soutient la demande des professionnels de séparer les compétences agricoles, d’une part, et la pêche et l’aquaculture, d’autre part. En effet, la structuration de la filière pêche est indispensable pour que le territoire bénéficie enfin des retombées économiques liées à la ressource halieutique de la zone économique exclusive.
Cette structuration implique la création d’un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins d’ici à 2027. L’État soutiendra sa mise en place, ainsi que celle d’une structure préfiguratrice.
Pour que ce comité soit créé, nous devrons franchir plusieurs étapes, notamment le recensement précis des pêcheurs professionnels et la poursuite de leur professionnalisation. La mise en place de ce comité doit se faire avec une véritable professionnalisation du secteur – j’y insiste. Ce travail doit être engagé dès cette année et il faudra que la profession soit au rendez-vous.
Pour ces raisons, je donne un avis favorable sur l’amendement n° 24.
Mme la présidente. L’amendement n° 123, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 157
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les recettes liées aux redevances des armateurs seychellois constituent des fonds prioritaires pour le développement de la filière pêche mahoraise.
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. Selon les éléments transmis par le ministère, il resterait 1,6 million d’euros non programmés à la fin de 2024. Depuis 2014, les montants ont été affectés exclusivement au service des affaires maritimes de Mayotte. Un rééquilibrage est nécessaire en faveur de notre flotte de pêche, qui a été durement affectée par le cyclone Chido.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous demandons l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Comme je viens de le dire, l’aide à la structuration de la filière pêche constitue une priorité pour le Gouvernement comme elle l’est pour les élus, bons connaisseurs de ce dossier.
Sur décision de la préfecture, gestionnaire des crédits, et à la lumière des besoins du territoire, les fonds pourront être orientés vers différentes actions, à savoir le contrôle des pêches et le soutien à la filière mahoraise, notamment en termes de formation.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire, il est urgent que les professionnels produisent rapidement un état des lieux sérieux et détaillé des besoins.
Par souci de cohérence, nous pourrions mentionner d’autres ressources qui doivent impérativement être mobilisées pour développer la filière, telles que les aides de minimis ou le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (Feampa).
Cet amendement va dans le bon sens et il mérite d’être soutenu. C’est pourquoi je donne un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Même avis.
Mme la présidente. L’amendement n° 117, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 159, première phrase
Après le mot :
scolaire
insérer les mots :
et au dispositif de classes itinérantes
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à mettre fin au dispositif des classes itinérantes et j’espère que nous pourrons nous rassembler sur cet objectif.
Le droit à une scolarité effective est mis à mal à Mayotte, notamment en raison du déficit important d’infrastructures scolaires – 1 200 classes font défaut –, du manque d’accès aux transports et à la restauration et des nombreux refus d’inscription scolaire par les mairies. Entre 6 000 et 10 000 enfants ne sont pas scolarisés, soit 9 % des mineurs présents à Mayotte.
Ce département est le plus jeune et le plus pauvre de France ; sans scolarisation, on ne sortira pas ces enfants de la précarité et leurs perspectives d’avenir seront durablement entravées.
Plutôt que de répondre de manière structurelle à cette carence, l’État multiplie les mesures de bricolage.
En plus du système de rotation scolaire qui concerne plus de la moitié des élèves, qui ne bénéficient que de deux jours d’enseignement par semaine, le rectorat de Mayotte a mis en place un système de classes itinérantes, qui implique la tenue de cours en dehors des locaux de l’école. En pratique, les classes itinérantes ne permettent généralement qu’une demi-journée de classe par semaine et par élève.
Cela a abouti à une condamnation de l’État en 2021, parce que cette solution ne peut pas être un substitut à une scolarisation effective et que les enfants français sont prioritaires, tandis que les enfants étrangers sont reçus environ une fois par semaine, ce qui est une atteinte au droit à l’instruction, à l’intérêt supérieur de l’enfant et au principe de non-discrimination.
Cet amendement vise à mettre fin, d’ici à la rentrée 2031, aux classes itinérantes, qui ne peuvent pas constituer, je l’ai dit, une scolarisation effective.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le taux de natalité exponentiel à Mayotte ainsi que les conséquences du cyclone Chido ont rendu la question scolaire centrale et primordiale. Le rapport annexé prévoit déjà de mettre fin au système de rotation des classes d’ici à 2031 ; cet amendement tend à y ajouter la fin des classes itinérantes, ce à quoi nous sommes plutôt favorables.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Nous aurons l’occasion de traiter de ce sujet à l’occasion d’un autre amendement, mais je veux déjà indiquer que la première réponse de l’État aux enjeux de scolarisation dans le premier degré à Mayotte consiste à créer des postes d’enseignant – c’est cela qui relève pleinement de la compétence de l’État. Ainsi, plus de 900 emplois d’enseignant du premier degré ont été créés entre 2019 et 2024 et 80 postes supplémentaires seront créés à la rentrée scolaire 2025.
Je n’ignore pas que le nombre d’écoles n’est pas à la hauteur des besoins – c’est incontestable. Je vous rappelle cependant que les constructions scolaires du premier degré relèvent de la compétence des communes, même si l’État, qui est au rendez-vous, s’est fortement mobilisé en signant, en juin 2021, une convention quadripartite avec l’AFD, l’Association des maires de France, la préfecture et le rectorat pour accompagner les communes et leur permettre de s’engager dans la construction d’écoles.
Je rappelle aussi qu’à Mayotte il existe un débat sur les constructions d’école, parce qu’elles sont parfois considérées comme une source d’« attractivité » du territoire pour l’immigration.
Le dispositif des classes itinérantes développé par le rectorat au regard de la situation exceptionnelle de Mayotte est une réponse d’urgence qui n’a pas vocation à constituer une solution pérenne. L’objectif d’une scolarisation effective de l’ensemble des enfants d’âge scolaire est partagé.
Selon les chiffres qui m’ont été fournis, 1 200 classes sont nécessaires pour sortir des rotations en 2031 pour le premier degré, 700 en collège et 800 en lycée. Je parle bien de classes ! Vous voyez donc bien l’effort qu’il faudra accomplir pour être au bon niveau si nous voulons atteindre cet objectif en 2031.
En tout cas, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 119, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 159
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
L’État agit fermement contre la non-scolarisation et la déscolarisation à Mayotte. Il fait respecter l’obligation de scolarisation de l’ensemble des enfants sur le territoire mahorais et l’application du décret n° 2020-811 du 29 juin 2020 relatif à la simplification de l’inscription scolaire.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement concerne l’obligation de scolarisation. Nous voulons lutter contre les pratiques de certains maires de refuser l’inscription de jeunes enfants qui n’ont pas la nationalité française.
L’État doit faire respecter le décret du 29 juin 2020 relatif à la simplification de l’inscription scolaire, qui liste de façon exhaustive les pièces exigées à l’appui d’une demande d’inscription.
Il se trouve que les enfants de nationalité étrangère font face à des freins administratifs au moment de l’inscription scolaire et sont victimes de pratiques discriminatoires. Les associations déplorent des exigences abusives en termes de pièces à fournir. Des maires utilisent parfois la police pour procéder à des enquêtes et vérifier l’adresse de domiciliation indiquée par la famille pour la demande d’inscription et ils refusent l’inscription de l’enfant s’il ne réside pas à l’adresse indiquée. Enfin, il arrive aussi qu’ils demandent des justificatifs d’identité pour les personnes qui hébergent des familles.
L’État doit fermement lutter contre le phénomène de refus d’inscription par les mairies, qui aggrave la situation alarmante de non-scolarisation à Mayotte et met à mal un principe fondamental en France : l’interdiction des discriminations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement vise finalement à rappeler une obligation qui est définie dans le décret du 29 juin 2020 que vous avez cité, ma chère collègue.
Le ministre nous a fait part de l’ambition qui est la sienne concernant cette question centrale, compliquée, et qui fait l’objet à Mayotte de beaucoup de contentieux. Il appartient au juge de faire respecter les règles contenues dans les dispositions réglementaires.
L’avis est donc défavorable.