Mme la présidente. L’amendement n° 131, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 284, tableau, septième ligne
Remplacer cette ligne par quatre lignes ainsi rédigées :
Déchets |
Rattrapage structurel Pôle Logistique, Extension quai de transfert Badamiers, Plateforme de compostage Badamiers |
11 millions d’euros |
Première tranche de points de collecte 500 points sur un total de 2800 |
4 millions d’euros |
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Développement de l’économie circulaire 4 Déchèteries (Tsararano, Longoni, Hamaha, Badamiers) |
12 millions d’euros |
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TOTAL |
27 millions d’euros |
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’amendement n° 131 vise à détailler les opérations incluses au sein de la programmation d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte sous le thème « Déchets ».
Monsieur le ministre, je souhaite que vous nous donniez quelques précisions au sujet des lignes budgétaires de votre amendement relatives aux déchets. Alors que le rapport annexé prévoyait 27 millions d’euros, on ne retrouve dans l’amendement que vous venez de présenter qu’un montant de 6,9 millions d’euros.
Mme la présidente. L’amendement n° 132, présenté par M. Omar Oili, Mmes Artigalas, Narassiguin et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rapport annexé, alinéa 284, tableau
Compléter ce tableau par une ligne ainsi rédigée :
TOTAL |
3176 |
La parole est à M. Saïd Omar Oili.
M. Saïd Omar Oili. L’amendement n° 132 vise à préciser la somme totale des engagements de l’État au titre de programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Monsieur le ministre, nous nous réjouissons que le Gouvernement ait déposé l’amendement n° 155 rectifié bis, qui tend à apporter des précisions utiles quant à la ventilation des investissements prioritaires et au calendrier de leur mise en œuvre. En outre, ces crédits, dont le montant était initialement fixé à 3,2 milliards d’euros, sont portés à 4 milliards d’euros.
Pour autant, le travail n’est pas achevé. Vous l’avez indiqué, la commission a ajouté au rapport annexé l’obligation pour le Gouvernement de déposer une programmation annuelle des investissements avant la fin de cette année.
Une telle programmation suppose des arbitrages interministériels, qui prennent un peu de temps. Vous nous apportez aujourd’hui de premiers éléments de réponse, de nature à conforter la confiance que les Mahorais peuvent avoir à l’égard de l’État. Nous attendons avec impatience la programmation annuelle d’ici à la fin de 2025.
La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 155 rectifié bis. En revanche, elle émet un avis défavorable sur les amendements nos 131 et 132, qui deviendraient sans objet si l’amendement du Gouvernement était adopté.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Le Gouvernement a déposé l’amendement n° 155 rectifié bis afin de préciser les engagements de l’État au titre des programmes d’investissements prioritaires dans les infrastructures et politiques publiques essentielles à Mayotte.
Cet amendement vise à reprendre les crédits inscrits dans le contrat de convergence et de transformation signé avec le département de Mayotte en 2024, et ceux qui ont été attribués dans le cadre de différents plans d’action ministériels ou interministériels.
Monsieur le sénateur Omar Oili, pour répondre à votre question sur les crédits relatifs aux déchets, à ce stade, nous portons à 6,9 millions d’euros les autorisations d’engagement sur la période 2025-2029. Ces crédits contribueront au rattrapage structurel et au développement de l’économie circulaire, au développement du réseau de déchèteries, à la mise en place d’un observatoire des déchets et d’un centre de gestion multifilières, ainsi qu’à la réalisation d’unités de recyclage et de valorisation des déchets, et de structures réalisant des démarches de réemploi et de réutilisation.
La différence que vous évoquez vient des fonds européens, qui soutiendront la réalisation de ces projets. Comme nous l’indiquons, les évaluations des dommages et des besoins seront confirmées et affinées en lien avec les ministères concernés, notamment par la mission interministérielle de reconstruction et de refondation de Mayotte.
Votre amendement n° 131 vise à fixer des objectifs à des projets précis, mais il est important de recueillir auparavant l’avis des acteurs locaux, en particulier des collectivités. Les montants mériteraient par ailleurs d’être précisés afin d’identifier l’origine des crédits.
Le Gouvernement demande donc le retrait des amendements nos 131 et 132 ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Je m’exprime sous le contrôle des rapporteurs pour avis de la commission des finances, laquelle n’a pas pu examiner l’amendement n° 155 rectifié bis, alors que ses dispositions la concernent au premier chef, au regard des montants en question.
Monsieur le ministre, nous nous demandons quelle est l’origine des différentes sommes que vous nous exposez. Ces crédits sont-ils fléchés sur les budgets des divers ministères concernés par ces différentes politiques ? Seront-ils au contraire pré-engagés sur le budget des outre-mer des futurs exercices budgétaires ? Dans quelle mesure seront-ils prélevés sur les budgets des fonds de cohésion du budget européen, alors même que le nouveau cadre financier pluriannuel, qui couvre une partie de la période de programmation de la présente loi, n’est toujours pas défini ?
Nous avons bien compris comment les 4 milliards d’euros de dépenses seront ventilés, mais nous souhaiterions disposer d’informations sur l’origine de ces crédits dans le cadre budgétaire contraint que nous connaissons.
Mme la présidente. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Dans ce débat sur le financement, j’ai presque envie d’applaudir notre ministre des outre-mer.
D’un côté, monsieur le ministre, je suis tentée de vous remercier, par solidarité avec les Mahorais, mais, de l’autre, je ne peux m’empêcher de penser qu’il faudrait peut-être un grand cyclone en Polynésie pour obtenir ce que nous réclamons depuis tant d’années, lors de l’examen de chaque loi de finances. Enfin, trêve de plaisanterie…
Mes chers collègues, je vous le demande en connaissance de cause : j’ai religieusement écouté nos débats, mais je ne sais pas de quoi le lendemain des programmations annoncées sera fait, car elles supposent des investissements lourds sur plusieurs exercices. Si d’ici à l’année prochaine un nouveau ministre des outre-mer devait être nommé, la parole de l’État continuera-t-elle d’être tenue ?
Nous avons tellement eu l’habitude qu’un ministre des outre-mer jette la copie de son prédécesseur lors de son entrée en fonction pour proposer la sienne… Au nom des Mahorais, je voudrais avoir l’assurance que les mesures que nous votons aujourd’hui ne seront pas défaites demain.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Les 4 milliards d’euros correspondent à des crédits contractualisés dans le contrat de convergence et de transformation signé avec Mayotte. Les montants présentés sont rattachés aux budgets des ministères concernés, par exemple au programme 123 du ministère des outre-mer. Dans le cas des déchets, l’accompagnement de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) sera également recherché. Les choses doivent être suffisamment claires pour les membres de la commission des finances du Sénat : ces crédits sont liés aux divers programmes des ministères.
Madame la sénatrice de la Polynésie française, je connais évidemment la nature du débat. En responsabilité, tant pour la Nouvelle-Calédonie que pour Mayotte, j’essaie de m’assurer que nos engagements soient pérennisés, quels que soient les aléas et l’instabilité que connaît la vie politique, à l’exception du Sénat.
Pour cette raison, je me suis attaché à convaincre le Premier ministre qu’une mission interministérielle lancée par le ministère des outre-mer permettrait d’engager le travail dans la durée.
En ce qui concerne Mayotte, la mission du général Facon, à laquelle Mme la sénatrice Ramia est associée, permet ainsi d’engager un travail de longue haleine.
Pour la Nouvelle-Calédonie, sous l’autorité du Premier ministre, un dispositif de même type, rattaché à mon ministère, a été créé : il bénéficie de 3 milliards d’euros en 2024, soit un peu moins du double des crédits alloués chaque année par l’État à ce territoire du Pacifique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l’amendement que je viens de vous présenter vise à sortir des effets d’annonce que l’on a connus par le passé à Mayotte et, j’y insiste, à s’engager dans la durée. Ne souhaitons pas d’autres cyclones : ces mesures fortes étaient attendues, au-delà de Chido, par les élus et les Mahorais.
Madame la sénatrice, je vous invite à faire campagne pour que je reste ministre d’État chargé des outre-mer, non pas pour mon propre plaisir (Sourires.), mais pour que vous puissiez directement me rappeler l’engagement de l’État envers les territoires des outre-mer, qui doivent tous constituer une priorité pour l’État – nous aurons l’occasion d’en discuter de nouveau en Polynésie dans quelques semaines.
Au travers de votre humour, il y a une part de vérité : il faut rappeler à chacun ses engagements, et chacun doit assumer ses responsabilités. C’est vrai tant pour les élus que pour les acteurs économiques et sociaux.
La Nation fait un effort, logique et cohérent, pour Mayotte, territoire dévasté par un cyclone, qui avait déjà pris beaucoup de retard en dépit de la promesse d’égalité républicaine attendue depuis la départementalisation. Elle doit être capable de le mener à son terme, et je remercie le Premier ministre d’avoir fait des arbitrages en ce sens. Nous avons tous une obligation de résultat, partout : j’y veillerai, tant que j’assurerai ces responsabilités.
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 131 et 132 n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 110, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rapport annexé, après l’alinéa 293
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… La création d’une cour d’appel à Mayotte
Le Gouvernement s’engage à créer une cour d’appel à Mayotte dans les 5 prochaines années.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Les habitants de Mayotte, les élus locaux et les professionnels de la justice réclament la création d’une cour d’appel à Mayotte, aujourd’hui seulement dotée d’une chambre d’appel.
Actuellement, la chambre d’appel de Mamoudzou réexamine certaines affaires jugées par le tribunal judiciaire de la même ville pour lesquelles un appel a été déposé. Toutefois, nombreuses sont les exceptions. Par exemple, les appels des décisions des juges d’instruction et des juges des libertés et de la détention sont portés devant la chambre d’instruction de la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion.
Or les besoins réels en la matière sont très nombreux. À ces manquements concernant le fonctionnement de l’institution judiciaire, nous pouvons ajouter l’examen de nombreux dossiers d’état civil pour des milliers de Mahorais.
De plus, la population de l’archipel ne cesse de croître. La distance géographique avec Saint-Denis de La Réunion impose la création d’une cour d’appel sur le territoire même de Mayotte.
Cet amendement vise à inscrire dans le rapport annexé l’objectif de créer cette juridiction dans les cinq prochaines années.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. L’amendement tend à créer une cour d’appel à Mayotte dans un délai de cinq ans. Ainsi que nous l’avons précédemment avancé, la commission a considéré qu’il n’était pas souhaitable de multiplier des engagements non financés dans le rapport annexé, dépourvu de portée normative.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de l’article 1er et du rapport annexé, modifié.
(L’article 1er et le rapport annexé sont adoptés.)
Article 1er bis (nouveau)
Jusqu’au 31 décembre 2030, le représentant de l’État à Mayotte dirige l’action de l’ensemble des services et des établissements publics de l’État ayant un champ d’action territorial à Mayotte, qui sont placés pour emploi sous son autorité.
Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. L’article 1er bis s’insère dans le titre I du projet de loi, qui fixe les objectifs de l’action de l’État pour Mayotte. S’appuyant sur un article de la Lopmi, il vise à placer l’ensemble des services déconcentrés de l’État et de ses établissements publics sous l’autorité du préfet de Mayotte.
À la suite des conséquences dramatiques du passage du cyclone Chido, cette mesure a déjà été mise en place le 14 décembre 2024, pour trois mois, jusqu’en mars 2025. Elle a permis au préfet de diriger l’ensemble des services de l’État, y compris les forces armées, l’agence régionale de santé (ARS), les services des douanes, du rectorat ou de l’académie de Mayotte pour les faire participer à la reconstruction et à la gestion des conséquences immédiates de la crise.
Les rapporteurs de la commission des lois ont rappelé les dimensions multiples de cette crise et les nombreux défis, démographiques, migratoires, sécuritaires, économiques et sociaux qui se posent. La tâche est immense.
L’article 1er bis permet de garantir la continuité et la cohérence de l’action de l’État, pour que celui-ci parle d’une seule voix aux divers interlocuteurs sur le territoire, jusqu’au 31 décembre 2030.
Le groupe Les Indépendants soutiendra cette mesure d’efficacité.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 64 est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 120 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 64.
M. Saïd Omar Oili. Pour parvenir à la reconstruction de Mayotte, la gouvernance constitue un enjeu central. Les élus locaux et les citoyens doivent identifier leur interlocuteur et les chaînes de responsabilité.
De ce point de vue, la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte a prévu de transformer l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte en un établissement public chargé de coordonner les travaux de reconstruction.
Cet établissement est chargé de la conception et de la réalisation de certains travaux d’aménagements ou de reconstruction de l’habitat, des équipements et des infrastructures publiques et privées sur l’archipel de Mayotte, tout en assurant la coordination de ces travaux.
L’article 1er bis, intégré dans le projet de loi sur l’initiative des deux rapporteurs de la commission des lois, prévoit de placer sous l’autorité du préfet l’ensemble des services déconcentrés et des établissements publics de l’État ayant un champ d’action territorial sur l’archipel, et ce jusqu’au 31 décembre 2030.
Alors que l’établissement public créé par la loi d’urgence visait à unifier la gouvernance de la reconstruction, cet article 1er bis, qui donne autorité au préfet sur l’ensemble des services et des établissements publics de l’État, jette le trouble.
Monsieur le ministre, pouvez-vous clarifier la position du Gouvernement en ce qui concerne la gouvernance mise en œuvre pour reconstruire Mayotte ? Les Mahorais et les élus locaux doivent, je le redis, identifier leur interlocuteur : il y va de la bonne gouvernance lors de la reconstruction de Mayotte, et donc de la réussite de ce projet.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 120.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis, qui prolonge jusqu’en 2031 le dispositif confiant au préfet l’autorité sur l’ensemble des services de l’État à Mayotte.
En temps de crise, conférer certains pouvoirs au préfet peut être utile, mais par définition ce dispositif dérogatoire au droit commun doit être borné dans le temps. Il nous paraît déraisonnable de poursuivre cette dérogation pendant six années supplémentaires, car cela pourrait poser de nombreux problèmes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Je remercie M. Laménie du soutien qu’il apporte à l’amendement proposé par Mme Canayer et moi-même. La commission émet évidemment un avis défavorable sur les amendements identiques nos 64 et 120, qui visent à supprimer une mesure qu’elle a introduite.
Madame Vogel, je ne peux qu’être d’accord avec vous : il faut limiter les pouvoirs du préfet sur les autres administrations à la période de crise, mais le fait est que nous en sommes toujours, à Mayotte, en période de crise. C’est là que porte notre divergence d’appréciation : nous considérons que, au-delà de la crise paroxystique, la situation demeure extrêmement difficile, ce qui nécessite, pour que l’État parle d’une seule voix et ait davantage de capacité à agir, l’unité de commandement de l’État et une capacité de coordination.
Certes, la mesure ne doit pas être illimitée dans le temps : nous l’avons ainsi bornée au 31 décembre 2030, à la fin de la période de refondation de Mayotte. Les pouvoirs exceptionnels du préfet, dérogatoires au droit commun, sont bien limités dans le temps. Il est pour nous absolument indispensable de mieux organiser l’État et de donner à l’État local la capacité d’intervenir dans tous les champs de l’action publique.
Monsieur Omar Oili, je laisserai M. le ministre vous apporter des précisions sur l’organisation de la gouvernance. Notre collègue Salama Ramia présentera à la suite de cette discussion un amendement visant à exclure l’Établissement public de reconstruction et de refondation de Mayotte (EP2R) de la tutelle du préfet, car il ne s’agit évidemment pas de revenir sur les mesures que nous avons adoptées lors de la création de cet établissement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Je le rappelle, cet article ne faisait pas partie du projet de loi déposé par le Gouvernement. Ce sont les rapporteurs de la commission des lois du Sénat qui ont proposé de l’ajouter, ce que je trouve pertinent et utile, car, pour être efficace, le travail de reconstruction de Mayotte nécessite une synergie et la coordination de tous les acteurs territoriaux.
Le préfet, représentant chacune des administrations de l’État et chacun des membres du Gouvernement, a vocation à assurer la coordination entre les ministères et les différents partenaires participant à la reconstruction de Mayotte.
La mission interministérielle menée à mes côtés par le général Facon et, sur place, le préfet Bieuville travaillent dans une très bonne synergie – une partie de l’équipe du général, dont lui-même, se rend d’ailleurs à Mayotte ce soir – pour rendre le travail interministériel le plus efficace possible.
La légitimité du préfet et sa vision d’ensemble des enjeux et des priorités justifient que l’ensemble des services déconcentrés et des établissements publics de l’État soient placés sous son autorité pour une durée limitée, le temps de la reconstruction, jusqu’à la fin de 2030. Il s’agit de gagner de l’efficacité et du temps. Cette mesure est permise par l’article 27 de la Lopmi ; mise en œuvre à Mayotte au moment du passage de Chido, elle avait alors bien fonctionné.
Les modalités d’application de l’article seront prévues par un décret pris en Conseil d’État, la loi n’ayant pas vocation à se prononcer sur des mesures organisationnelles a priori basées sur le bon sens et le savoir-faire des autorités préfectorales, dans un souci d’efficacité.
Pour ce qui concerne les rapports entre l’État et les élus, nous continuerons dans la même exigence de concertation. Nous avons déjà beaucoup discuté ici même de la gouvernance de l’établissement public en question. Pour que les choses soient tout à fait claires, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 48 que la sénatrice Ramia présentera dans un instant, car l’EP2R doit obéir aux règles que nous avons fixées avec les élus.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, j’étais à Mayotte il y a deux semaines. En rencontrant un membre de l’équipe de M. Facon, je lui ai demandé si je pouvais discuter avec elle de la situation des pêcheurs à Mayotte. Ma surprise a été grande : mon interlocutrice m’a indiqué que, avant de me répondre, elle devait demander au préfet si celui-ci l’y autorisait.
Évidemment, nous nous demandons qui est aux commandes de l’avion. Est-ce M. Facon ou le préfet ? Monsieur le ministre, reconnaissez qu’il est facile de s’y perdre : à qui doit-on s’adresser pour aborder les problèmes liés à la reconstruction de notre île ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Monsieur le sénateur, ce n’est pas de votre niveau. (M. Saïd Omar Oili proteste.) Vous avez peut-être eu cette discussion, mais je suis là ! Le préfet et le général Facon sont joignables ; vous pouvez également vous adresser à votre collègue Mme Ramia, qui participe à la mission interministérielle.
Nous nous connaissons depuis un certain temps et je vous respecte énormément. Nous présentons un deuxième projet de loi, après le projet de loi d’urgence pour Mayotte. Je comprends vos interrogations, les désaccords et la méfiance qui peut exister vis-à-vis de la parole de l’État, mais je suis attentivement le dossier de Mayotte, une sénatrice assure le suivi de la mission interministérielle – croyez-moi, elle est exigeante et très présente –, le général Facon et son équipe sont à votre disposition, et le préfet agit sur place pour coordonner le travail interministériel.
Moi-même, je rencontre régulièrement les sénateurs de Mayotte – je suis à leur disposition – et les deux députées mahoraises ; je dînerai ce soir, pendant la suspension, avec le président du conseil départemental de Mayotte ; et j’ai eu, ainsi que mon équipe, un nombre important d’échanges, sur place et en visioconférence, avec les élus.
Il peut toujours arriver que quelqu’un n’ait pas très bien compris comment fonctionne telle ou telle administration. Mais les règles sont claires, vous savez qui pilote l’avion et nous allons essayer d’avancer ainsi. Ne nous perdons pas dans ce genre de détail, je ne peux pas croire qu’une telle intervention vienne de vous, monsieur le sénateur !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64 et 120.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 48, présenté par Mme Ramia, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l’exclusion de l’établissement public créé en application de l’article 1er de la loi n° 2025-176 du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte
La parole est à Mme Salama Ramia.
Mme Salama Ramia. Comme l’a voulu le Parlement, la gouvernance du futur établissement public chargé de la reconstruction de Mayotte sera collégialement assurée par les collectivités territoriales du département. Le conseil d’administration de cet établissement sera présidé par le président du conseil départemental de Mayotte et assurera une représentation forte des collectivités concernées par les projets d’aménagement.
Si le préfet doit bien assurer un contrôle administratif, comme les différentes autorités de tutelle de l’État, et peut librement siéger au conseil d’administration, il convient qu’il ne dispose pas d’une autorité hiérarchique ou fonctionnelle sur l’établissement.
Le présent amendement tend donc à modifier l’article 1er bis en ce sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Bitz, rapporteur. Je remercie Mme Ramia de sa vigilance. Nous n’avions pas vu ce point lors du dépôt de notre amendement en vue de l’établissement du texte en commission ; il n’était pas dans nos intentions de bouleverser la gouvernance de l’établissement public placé sous la présidence du président du conseil départemental.
L’avis est évidemment favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er bis, modifié.
(L’article 1er bis est adopté.)
TITRE II
LUTTER CONTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE ET L’HABITAT ILLÉGAL
Chapitre Ier
Durcir les conditions d’accès au séjour en les adaptant à la situation particulière de Mayotte
Article 2
L’article L. 441-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un 1° AA ainsi rédigé :
« 1° AA Au 2° de l’article L. 412-2, les références : “L. 423-7,” et “L. 423-23,” sont supprimées ; »
2° Le 8° bis est complété par les mots : « et, à la fin, les mots : “, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1” sont supprimés » ;
2° bis (nouveau) Le 8° ter est ainsi rédigé :
« 8° ter L’article L. 423-8 est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, après les mots : “371-2 du code civil,”, sont insérés les mots : “depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins trois ans” ;
« b) Le second alinéa est supprimé ; »
3° Après le 8° ter, il est inséré un 8° quater ainsi rédigé :
« 8° quater Au premier alinéa de l’article L. 423-10, les mots : “en France et titulaire depuis au moins trois années” sont remplacés par les mots : “régulièrement et de manière ininterrompue en France depuis au moins cinq années et titulaire” ; »
4° Il est ajouté un 16° ainsi rédigé :
« 16° Au premier alinéa de l’article L. 423-23, après le mot : “étranger”, sont insérés les mots : “résidant habituellement depuis au moins sept ans à Mayotte,” et, à la fin, les mots : “, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1” sont supprimés. »