M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, garantir une solution d'assurance à nos communes : tel est l'objet de cette proposition de loi de notre collègue Jean-François Husson, que nous examinons ce 11 juin et qui fait suite à la mission d'information relative aux problèmes assurantiels des collectivités territoriales.
Il s'agit d'un texte très attendu par les élus locaux, et je salue d'ores et déjà le travail de notre rapporteure, Marie-Carole Ciuntu.
Dans mon département des Alpes-Maritimes comme partout en France, de plus en plus de communes se heurtent à des difficultés pour assurer leurs biens. Pis, certaines d'entre elles, comme Breil-sur-Roya, dévastée après les tempêtes Alex et Aline, se retrouvent sans assurance. Et, cerise sur le gâteau, quand le bureau central de tarification oblige des assureurs à se partager les risques d'une commune, le montant de la cotisation est multiplié par huit et 99 % des sinistres habituels cessent d'être pris en charge.
En réaction à cette situation ubuesque, le maire de Breil-sur-Roya avait pris un arrêté pour interdire les catastrophes naturelles sur sa commune. Par ce geste purement symbolique, il souhaitait mettre en lumière l'impuissance des communes face au système français des assurances.
Dans un très bon rapport, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité dresse quant à elle un état des lieux précis et formule des propositions pertinentes sur ce sujet crucial pour nos territoires, dans un contexte marqué notamment par la multiplication des événements climatiques.
Je me réjouis que le Sénat prenne ses responsabilités et mesure pleinement la gravité de la situation, ainsi que la nécessité d'accompagner nos maires au quotidien.
Forte de ces travaux empiriques, notre chambre a su identifier les failles du système assurantiel et avancer des solutions concrètes.
Cette proposition de loi vise ainsi à conforter la concurrence sur le marché de l'assurance privée des collectivités territoriales. Elle tend aussi à rééquilibrer les relations entre les assureurs et les collectivités. Enfin, elle ambitionne d'assurer une couverture de l'ensemble des risques, en particulier des risques liés aux émeutes.
Il s'agit de mesures de bon sens, documentées grâce au travail de fond qui a été mené, reposant en particulier sur la consultation des élus locaux.
Cette proposition de loi représente une première étape pour simplifier les procédures et renforcer la sécurité des biens et des personnes. Les membres du groupe Les Républicains voteront bien sûr en faveur de cette avancée législative. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos collectivités locales font face à des difficultés croissantes dans leurs relations avec les compagnies d'assurance : résiliations unilatérales, hausses brutales des cotisations en cours de contrat, absence de réponse aux appels d'offres, attente d'indemnisation, etc.
Cette situation inacceptable suscite une inquiétude légitime chez nos élus locaux, qui nous interpellent. Sans assurance, une commune est paralysée : elle ne peut avoir d'école ; elle ne peut seulement pas disposer d'une salle ; toute vie locale est dès lors impossible.
Assurer une collectivité territoriale, ce n'est pas simplement signer un contrat : c'est garantir qu'un maire peut décider et agir.
Cette proposition de loi vise à soutenir nos élus locaux en réaffirmant un principe essentiel : la libre administration des collectivités territoriales, rendue possible par un cadre assurant une plus grande stabilité financière. C'est un texte sérieux et nécessaire, qui répond à une réalité que nous connaissons tous – je l'observe tout particulièrement dans mon département de la Mayenne.
Je tiens donc à saluer les auteurs de cette proposition de loi.
Le désengagement des assureurs n'est pas un phénomène nouveau, mais il s'est aggravé au cours des dernières années, accentué par la hausse de la sinistralité et les émeutes de 2023.
L'enquête menée en 2024 par la mission d'information de la commission des finances du Sénat est édifiante : au total, 60 % des collectivités territoriales déclarent au moins un problème majeur avec leur assureur, et le chiffre grimpe à 90 % pour les collectivités territoriales de plus de 10 000 habitants.
Les compagnies d'assurance, elles, invoquent l'effet cumulé des crises sanitaire, climatique, bien sûr, et sécuritaire pour expliquer leurs décisions. Mais les événements récents, notamment les émeutes, ne sauraient à eux seuls justifier une remise en cause du droit des collectivités territoriales à être assurées.
En réalité, ces crises ont surtout mis en lumière un mal bien plus ancien : le marché est atrophié, verrouillé et dysfonctionnel. Dans les années 2010, la guerre des prix lancée par des assureurs européens venus casser les tarifs avant de se retirer a profondément déséquilibré le secteur.
En résulte une situation de quasi-monopole. Aujourd'hui, deux acteurs tiennent l'essentiel du marché, et nos communes, elles, se trouvent pieds et poings liés. Ce n'est pas acceptable.
Nos élus n'ont plus de marge de négociation. Or ce n'est pas aux collectivités territoriales de subir les conséquences d'un marché défaillant, qu'aucune autorité n'a su réguler.
Face à cette situation, le présent texte apporte des réponses concrètes : encadrement des résiliations, création d'un fonds prudentiel mutualisé, accompagnement des collectivités territoriales par un médiateur ou encore effort de responsabilisation, avec la généralisation des franchises. Ce sont là des mesures pragmatiques et équilibrées, qui, sans ajouter de la complexité, apportent de la prévisibilité et de la sécurité. Ce texte ne contraint pas : il protège.
Garantir l'accès à l'assurance, c'est garantir à nos communes une véritable capacité d'agir. En conséquence, les membres du groupe Les Républicains voteront cette proposition de loi avec conviction. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP. – M. Michel Masset applaudit également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à garantir une solution d'assurance à l'ensemble des collectivités territoriales
Chapitre Ier
Conforter la concurrence sur le marché de l'assurance des collectivités territoriales
Article 1er
Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Après le III de l'article L. 612-1, il est inséré un III bis ainsi rédigé :
« III bis. – Dans l'accomplissement de ses missions, pour le secteur de l'assurance, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution prend en compte l'objectif d'assurabilité des collectivités territoriales. » ;
2° À l'article L. 612-30, après le mot : « bénéficiaires, », sont insérés les mots : « qu'il s'agisse de personnes physiques ou de personnes morales, y compris les collectivités territoriales, ».
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
Avant le dernier alinéa de l'article L. 614-1 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité est également chargé de suivre l'évolution des pratiques des entreprises d'assurance en matière de tarifs pour les services offerts à leurs clients personnes morales de droit public, notamment les collectivités territoriales. – (Adopté.)
Chapitre II
Rééquilibrer les relations entre les assureurs et les collectivités territoriales
Article 3
I. – Le code des assurances est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Le chapitre Ier du titre II du livre Ier est complété par un article L. 121-18 ainsi rédigé :
« Art. L. 121-18. – Une collectivité territoriale peut avoir recours au dispositif de médiation mentionné à l'article L. 612-1 du code la consommation en vue de la résolution amiable d'un litige qui l'oppose à son assureur.
« Après deux procédures infructueuses, une collectivité territoriale peut bénéficier d'un accompagnement dans sa recherche d'assurance, dans des conditions précisées par décret. »
II. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par Mme Ciuntu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Après le mot :
territoriale
insérer les mots :
ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure. Cet amendement vise simplement à étendre le dispositif de médiation aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
I. – Après l'article L. 121-1 du code des assurances, il est inséré un article L. 121-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 121-1-1. – Les contrats d'assurance souscrits par les collectivités territoriales et leurs groupements et garantissant les dommages à leurs biens prévoient que les indemnisations résultant de cette garantie sont soumises à une franchise dont les caractéristiques sont définies par décret. »
II. – Le I s'applique aux contrats souscrits six mois à compter de la publication de la présente loi et, pour les autres contrats, lors de la conclusion du premier avenant consécutif à l'échéance de ce même délai.
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. En imposant une participation minimale à l'assuré, la franchise vise à décourager les réclamations de faible montant, dont le traitement engendre des coûts de gestion.
Ce mécanisme permet ainsi, dans une certaine mesure, d'optimiser la rentabilité économique des contrats d'assurance, en réduisant la sinistralité apparente et en améliorant la maîtrise des charges pour les compagnies.
Toutefois, cette forme de rationalité économique soulève à nos yeux de sérieuses interrogations, dès lors qu'elle est appliquée de manière uniforme aux collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, à vous entendre, la franchise responsabilise l'assuré. Mais les collectivités territoriales ne sont pas des acteurs comme les autres : elles sont investies d'une mission d'intérêt général et soumises à des contraintes budgétaires.
L'imposition systématique d'une franchise revient à faire peser sur les budgets locaux une part croissante des charges liées aux petits sinistres – notre collègue Bernard Delcros a d'ailleurs évoqué ce point parmi ses réserves de vigilance. Ces dépenses contraintes en fonds propres entrent nécessairement en concurrence avec d'autres priorités, parmi lesquelles l'entretien du patrimoine, les services publics de proximité ainsi que les politiques sociales et environnementales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure. À condition d'être bien calibrée par les textes réglementaires, une telle franchise est de nature à responsabiliser les collectivités territoriales tout en améliorant l'indemnisation. Ce point n'a pas été contesté lors des travaux menés par la commission des finances.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Lombard, ministre. Monsieur le sénateur, j'abonde dans le sens de Mme la rapporteure.
Selon moi, la franchise est un bon outil d'assurance. En effet, elle responsabilise l'assuré, qui, de ce fait, renonce à déclarer tous les petits sinistres survenant et le montant de la prime baisse en conséquence.
La franchise nous apparaît, au total, comme un élément tout à fait sain du nouvel équilibre que nous voulons instaurer. Le Gouvernement est donc lui aussi défavorable à votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Si je comprends bien, le Sénat s'apprête à voter une franchise obligatoire applicable aux collectivités territoriales, ce qui revient à dire que certaines d'entre elles ont une gestion irresponsable ! Chacun se prononcera en connaissance de cause…
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. G. Blanc, Mme Senée, MM. Dossus, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le décret mentionné au premier alinéa fixe également un plafond au-delà duquel la franchise ne peut être portée. »
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. Pour notre part, nous proposons tout simplement de plafonner les franchises, afin de préserver une certaine équité entre les territoires tout en garantissant un équilibre entre couverture assurantielle et soutenabilité financière pour les collectivités territoriales.
Ce constat a été rappelé lors de la discussion générale : pour un certain nombre de petites collectivités, le risque de sortie du système assurantiel est désormais réel, compte tenu de l'atrophie du marché.
Nous devons avoir à l'esprit les différents termes du débat. Selon Mme la rapporteure et M. le ministre, la franchise doit devenir consubstantielle de l'assurance des collectivités territoriales : pourquoi pas ? Mais, en parallèle, nous devons être en mesure de mieux réguler le marché. C'est le travail non seulement du Parlement, mais aussi du Gouvernement et de l'administration.
C'est pourquoi, au travers de cet amendement, nous souhaitons instaurer un plafond en demandant au Gouvernement de prendre les mesures réglementaires qui s'imposent.
Dans ce domaine, on ne peut pas laisser les assureurs jouer au yoyo – passez-moi l'expression. Il est trop facile de proposer de faibles franchises afin de décrocher des contrats, puis, deux ou trois ans plus tard, de les relever fortement afin de maximiser les profits. Une compagnie d'assurance est une entreprise à but lucratif, et c'est tout à fait normal ; mais, de notre côté, nous devons être capables de réguler ce marché afin de garantir une véritable équité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure. Notre intention n'est pas de rigidifier davantage encore le marché de l'assurance privée des collectivités territoriales. En ce sens, nous ne sommes pas favorables à un plafonnement systématique des franchises : nous optons volontairement pour une rédaction ouverte afin de laisser des marges de manœuvre au Gouvernement.
M. Jean-François Husson. Quelle élégance ! (Sourires.)
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Lombard, ministre. Monsieur le sénateur, au sujet des catastrophes naturelles, je tiens à vous rassurer : un décret et un arrêté fixant un plafond pour les petites collectivités territoriales sont sur le point d'être signés.
Cela étant, nous ne sommes pas favorables à la systématisation de cette démarche. Ce constat a été rappelé à plusieurs reprises au cours de la discussion générale : du fait de tarifs sans doute trop bas au regard des risques encourus, ce secteur est actuellement en situation de duopole. Il faut donc faire revenir d'autres assureurs pour que la concurrence puisse jouer. Or le plafonnement des franchises prive les assureurs d'un outil de gestion leur permettant de proposer des offres intéressantes, d'autant que les collectivités territoriales sont protégées par le code des marchés publics.
Plus la concurrence sera réactivée dans ce domaine, grâce aux travaux que nous sommes en train de mener ensemble, plus les offres, demain, seront nombreuses. Dès lors, les collectivités territoriales pourront plus facilement refuser l'offre d'un assureur proposant selon elle une franchise trop élevée. Elles pourraient, de même, refuser tel ou tel avenant soumis en cours de contrat.
Il faut avant tout laisser la concurrence se développer dans le secteur. Aussi, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Madame la rapporteure, monsieur le ministre, j'ai entendu vos arguments. Nous avons là, manifestement, un désaccord idéologique.
De notre point de vue, la « main invisible » ne suffira pas à revivifier le marché. Bien sûr, il y faudrait une dizaine, une quinzaine, voire une vingtaine d'acteurs pour que les prix soient mieux ajustés. Mais, à cette fin, il faut que la puissance publique intervienne massivement.
Ces dispositions valent pour la décennie à venir, du fait de l'augmentation prévue des températures : nous n'avons pas le temps de laisser le marché revenir de lui-même à une situation normale, reposant sur une forme d'autorégulation. Sans une action résolue de la puissance publique, nous n'y arriverons pas. Nous aboutirons donc à un marché à plusieurs vitesses selon les territoires, ce qui n'est pas acceptable.
Mes chers collègues, je maintiens mon amendement et je vous invite à le voter massivement.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Briquet. Les franchises peuvent effectivement poser difficulté – je l'ai souligné lors de la discussion générale – et M. Blanc a le mérite de proposer une solution face aux risques de dérive. Pour notre part, nous voterons son amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je ne partage pas le point de vue de Grégory Blanc sur cet amendement, soutenu par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et certainement par d'autres encore.
Je le dis d'emblée, je ne suis pas un adepte de la franchise. Toutefois, la franchise à l'entrée, c'est-à-dire la part restant supportée par les assurés, quels qu'ils soient, a le mérite d'éviter des déclarations parfois intempestives, jamais suivies d'effet.
Un assureur est attentif à la fréquence, au montant et à l'origine des sinistres. Or la fréquence est bien plus déterminante pour le coût qu'on ne l'imagine, même lorsqu'il n'y a aucune déclaration. Les assureurs mutualisent les coûts, contrairement à l'État, qui peut tout reporter à demain. Ils doivent équilibrer leurs comptes.
Les collectivités comprennent bien cette mécanique. En réponse à mon questionnaire, celles de mon département de Meurthe-et-Moselle m'ont indiqué avoir subi des hausses de tarifs comprises entre 30 % et 250 %.
Les seuils de franchise ont un effet bloquant. Je ne sais pas comment chacun, ici, le négocierait. Dans le Val-de-Marne ou ailleurs, quand les assureurs fixent un plancher à 2,5 millions d'euros et un plafond à 5 millions d'euros, la collectivité est paralysée et n'a plus le choix.
Selon moi, le marché va retrouver un équilibre. D'ailleurs, certains assureurs reviennent déjà, même s'ils se méfient encore des plus grandes collectivités. En effet, il n'est que de voir la manière dont les services de ces dernières s'organisent…
Dans ce contexte, il faut non pas dénoncer la main invisible du marché, mais se tenir aux côtés des opérateurs, avec les collectivités, pour voir comment le marché va se réorganiser et surtout se rééquilibrer.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous vivons un moment de clarification, ce qui est tout à fait légitime.
Comme il le reconnaît lui-même, toute l'argumentation du rapporteur général de la commission des finances, qui pilote cette proposition de loi, c'est : le marché, le marché, rien que le marché. Voilà qui est clair et respectable.
Cela étant, monsieur le ministre, vous avez mentionné des décrets et arrêtés, qui ont tout de même trait à un texte législatif, sur le plafond concernant les petites collectivités en matière de catastrophes naturelles. Nous aurions aimé être informés en amont plutôt qu'au cours de l'examen du texte…
Nous ne doutons pas de la sincérité et de la véracité de vos propos. Mais pourquoi seulement les petites collectivités ? Votre approche est sûrement basée sur leurs capacités financières. Cependant, il y a un écueil sur les catastrophes naturelles comme sur le reste : une très petite collectivité, au budget très faible, peut être confrontée à une catastrophe naturelle énorme, tout comme une collectivité dotée, à vos yeux, d'importantes capacités financières…
M. Grégory Blanc. Comme les départements !
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vous propose de suivre un autre raisonnement, raison pour laquelle nous allons le soutenir : le plafond est possible à tous les niveaux, même s'il doit être progressif.
On ne peut se contenter d'un plafond pour les seules petites collectivités en cas de catastrophe naturelle. Toutes n'ont pas le même patrimoine, toutes ne rencontrent pas les mêmes problèmes : coulées de boue, incendies, émeutes, etc. Attention à ne pas trop prendre le sujet par le bas, car cela conduirait à créer des discriminations territoriales.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Chaque amendement a son importance et que l'on peut comprendre, voire faire siens les avis de nos collègues sur celui que nous examinons.
Les franchises, objet de l'article 4, ont été abordées au cours des travaux de la mission d'information sur les problèmes assurantiels des collectivités territoriales. Ainsi, les travaux de la commission retiennent le fait que 27 % des collectivités territoriales ont vu leurs franchises augmenter.
L'article 4 concerne, en outre, les petits risques : comment cette notion est-elle interprétée ?
Madame la rapporteure, monsieur Husson, monsieur le ministre, vous avez rappelé vos arguments : je m'y rallierai. Pour autant, il convient de respecter les auteurs de ces amendements, alors que les sujets dont nous parlons sont extrêmement compliqués d'une collectivité territoriale à l'autre, y compris pour les villages, soumis à des risques de différentes natures.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Lombard, ministre. Je voudrais répondre à M. le sénateur Savoldelli, qui m'a piqué au vif. (Sourires.)
J'en viens parfois à me demander si M. le Premier ministre ne m'a pas nommé à ces responsabilités parce que je suis un ancien assureur – je confesse ce péché…
L'assurance, c'est d'abord la mutualisation du risque, quel que soit le type de société qui en est chargée. La base du métier d'assureur est ainsi de veiller à ce que les primes couvrent, en premier lieu, les sinistres, qui représentent la majeure partie de leur montant et, en second lieu, dans des proportions diverses, les frais de gestion et le profit revenant aux mutualistes ou aux actionnaires.
Dans cet exercice, ce qui est pris d'un côté – à savoir la franchise – se retrouve nécessaire dans l'autre, que cela se traduise par la nature de la couverture des risques, catastrophes naturelles ou émeutes, dont nous parlerons ultérieurement, ou par l'ajustement du tarif.
Nous en avons discuté avec Jean-François Husson en préparant ce débat : la franchise a un rôle de protection de l'ensemble des assurés, même si, pour préserver les petites collectivités et par solidarité envers celles-ci, nous avons entendu fixer un plafond.
Pour conclure, le marché est aujourd'hui tenu par deux mutuelles, Groupama et la SMACL, qui a été reprise par la Maif. Il serait bon pour le marché que des sociétés anonymes d'assurance les rejoignent, de sorte qu'une concurrence plus large bénéficie aux assurés.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par Mme Ciuntu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le mot :
six
par le mot :
douze
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marie-Carole Ciuntu, rapporteure. Cet amendement vise à repousser le délai d'application de l'article 4 de six à douze mois.
Une durée de six mois apparaît en effet insuffisante pour publier le décret prévu par cet article et permettre aux assureurs de vérifier que l'intégralité des contrats passés avec les collectivités satisfont aux conditions de l'encadrement qui aura été décidé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 8 rectifié ter, présenté par M. Bilhac, Mme Briante Guillemont et M. Masset, est ainsi libellé :
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux articles L. 2113-10 et L. 2113-11 du code de la commande publique, le marché public de l'assurance des collectivités territoriales doit faire l'objet d'un marché unique pour les contrats d'assurance responsabilité civile, les contrats d'assurance dommages aux biens, les contrats d'assurance civile automobile et les contrats mentionnés à l'article L. 827-4 du code de la fonction publique.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Cet amendement est semblable à l'amendement n° 7 rectifié ter, auquel il ajoute l'assurance du risque statutaire, domaine dans lequel un grand nombre de collectivités locales peinent à se couvrir.
Or c'est cette assurance statutaire qui permet à la collectivité de percevoir, de la part de sa compagnie d'assurances, les salaires des agents en situation d'arrêt maladie ou d'accident du travail, ainsi que de remplacer les agents absents. En effet, ces remplacements statutaires sont particulièrement difficiles à mettre en œuvre pour les collectivités les plus petites, qui n'en ont pas les moyens hors assurance.
Cet amendement vise donc à supprimer la possibilité d'allotissement et à prévoir l'assurance statutaire dans l'offre d'assurance proposée aux collectivités locales.
M. le président. L'amendement n° 7 rectifié ter, présenté par M. Bilhac, Mme Briante Guillemont et M. Masset, est ainsi libellé :
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux articles L. 2113-10 et L. 2113-11 du code de la commande publique, le marché public de l'assurance des collectivités territoriales doit faire l'objet d'un marché unique pour les contrats d'assurance responsabilité civile, les contrats d'assurance dommages aux biens et les contrats d'assurance civile automobile.
La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Le problème assurantiel des collectivités locales concerne essentiellement les dommages aux biens. Actuellement, celles-ci procèdent à des allotissements en séparant les assurances pour responsabilité civile de celles qui concernent la flotte automobile et les dommages aux biens.
Cet amendement tend donc à supprimer la possibilité d'allotissement et à la remplacer par une assurance unique englobant ces trois risques.