M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement tend à ouvrir la possibilité de réserver une part des marchés faisant l’objet de cette expérimentation à des biens issus du réemploi ou du recyclage à l’échelle locale.

Les acheteurs publics sont déjà soumis à des obligations d’acquisition de biens issus du réemploi, conformément à l’article 58 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (Agec), et peuvent, en utilisant des critères environnementaux, aider au développement de filières locales. L’amendement est donc satisfait.

Il appartient aux acteurs économiques et administratifs locaux de se mobiliser pour développer l’économie circulaire en outre-mer dans un cadre plus pérenne que cette expérimentation.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14.

(Larticle 14 est adopté.)

Article 14
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Après l’article 15

Article 15

À titre expérimental et pour favoriser à moyen terme l’émergence de nouveaux opérateurs locaux susceptibles d’exercer pleinement leur libre accès à la commande publique, dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour une période de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, les soumissionnaires qui ne possèdent pas la qualité de microentreprise ou de petite ou moyenne entreprise au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ou d’artisan répondant aux critères prévus aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du code de l’artisanat doivent présenter un plan de sous-traitance prévoyant le montant et les modalités de participation d’entreprises possédant cette qualité et dont le siège social est établi dans les territoires mentionnés au présent article à l’exécution du marché auquel ils postulent, pour les marchés dont le montant estimé est supérieur à 500 000 euros hors taxes. Cette expérimentation peut être conduite dans les mêmes conditions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna pour ce qui concerne les marchés passés par les services et les établissements publics de l’État.

Au plus tard trois mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer l’opportunité de ses éventuelles pérennisation et extension. Le plan de sous-traitance comporte, pour chacune des entreprises concernées, les informations figurant dans la déclaration de sous-traitance. Lorsque les soumissionnaires ne prévoient pas de sous-traiter à des microentreprises, à des petites et moyennes entreprises ou à des artisans établis dans les territoires mentionnés au présent article, le plan de sous-traitance en justifie les motifs. Ces motifs peuvent tenir notamment à l’absence de microentreprises, de petites et moyennes entreprises ou d’artisans en activité dans le secteur concerné par les prestations du marché public ou en mesure de répondre aux exigences de ce dernier.

M. le président. L’amendement n° 63, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Pour les marchés de travaux relatifs à la construction, à la réhabilitation, ou à la déconstruction de bâtiments d’une valeur supérieure à 500 000 euros hors taxes, le plan de sous-traitance peut prévoir qu’une part minimale du contrat concerne des biens, matériaux et produits issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées, valorisés sur le territoire du département, région ou collectivité d’outre-mer concerné.

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Le présent amendement vise à compléter le plan de sous-traitance prévu à l’article 15 en autorisant explicitement les soumissionnaires, dans les marchés de construction ou de travaux publics, à définir une part du marché réservée à des biens issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées produites sur le territoire concerné.

Encore une fois, l’emploi du verbe « peuvent » permet de laisser une marge d’appréciation aux soumissionnaires en fonction des différents marchés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car il est satisfait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 63.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 15.

(Larticle 15 est adopté.)

Article 15
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Article 16

Après l’article 15

M. le président. L’amendement n° 60, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le cadre des expérimentations prévues aux articles 14 et 15 de la présente loi, pour les marchés publics de travaux et services relatifs à la construction, à la réhabilitation, à la déconstruction et à l’aménagement dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices peuvent intégrer des clauses relatives à l’utilisation, la valorisation et l’incorporation de biens, matériaux et produits issus du réemploi, de la réutilisation ou de l’économie circulaire, notamment :

1° L’utilisation de matériaux de réemploi ;

2° La récupération et la valorisation sélective lors de démolitions ;

3° L’incorporation de matériaux recyclés ;

4° L’intégration d’exigences en matière d’économie circulaire dans les cahiers des charges.

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à autoriser l’intégration de clauses circulaires dans les marchés de construction et de travaux publics afin de stimuler des filières locales de réemploi, de réutilisation et de matériaux recyclés.

Cette orientation permettrait de réduire les importations coûteuses, de créer des emplois locaux non délocalisables et de diminuer la facture publique à moyen terme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Cet amendement vise à ouvrir la possibilité d’intégrer des clauses liées à l’économie circulaire dans le cadre des marchés publics relevant des expérimentations des articles 14 et 15.

Il est satisfait, car chaque acheteur public est libre, dans son cahier des charges, de définir des clauses environnementales, liées notamment au réemploi, pour l’exécution du marché public.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 60.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 57, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2113-15 du code de la commande publique est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, les acheteurs peuvent, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, réserver des marchés ou des lots aux entreprises de l’économie sociale et solidaire définies à l’article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, lorsque ces marchés ou lots portent sur :

« 1° Des prestations concourant directement à la préservation de l’environnement ;

« 2° Des prestations visant l’amélioration des conditions de vie des populations ;

« 3° Des prestations portant sur le réemploi de produits ou matériaux.

« Un décret définit les modalités d’application du présent article et les critères permettant de caractériser les prestations mentionnées aux 1° à 3° du présent article. »

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à soutenir le tissu économique local, conformément à l’intitulé du titre IV, plus particulièrement ici les structures de l’économie sociale et solidaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. En l’état actuel du droit, seuls peuvent être réservés aux entreprises de l’économie sociale et solidaire des marchés portant sur des services sociaux et autres services spécifiques, cette formule du droit de la commande publique désignant des prestations essentiellement sanitaires, sociales et administratives.

Il n’est pas possible d’étendre ce mécanisme à d’autres secteurs, même à titre expérimental, car cette disposition, qui déroge au principe de non-discrimination, découle directement de l’article 77 de la directive sur les marchés publics de 2014 dont le champ est strictement limité.

Réserver aux entreprises de l’économie sociale et solidaire d’autres marchés serait contraire au droit européen.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis, monsieur le président. Étendre la dérogation présente un risque contentieux élevé.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 57.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 15
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Après l’article 16 (début)

Article 16

Le tableau du second alinéa du 4° du I de l’article L. 950-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° La cinquième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 410-3

la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012

Article L. 410-4

la loi n° … du …

» ;

2° La sixième ligne est ainsi rédigée :

 

«

Article L. 410-5

la loi n° … du …

» ;

3° Après la même sixième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

 

«

Article L. 410-6

la loi n° … du …

» ;

4° La vingt-troisième ligne est remplacée par quatre lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 441-1

la loi n° … du …

Article L. 441-1-1

la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023

Article L. 441-1-2

la loi n° … du …

Article L. 441-2-1

l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019

» ;

5° Les vingt-quatrième et vingt-cinquième lignes sont remplacées par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 441-3

la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020

Article L. 441-3-1

la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023

Article L. 441-4

l’ordonnance n° 2021-859 du 30 juin 2021

» ;

6° La trente et unième ligne est ainsi rédigée :

 

«

Article L. 442-1

la loi n° … du …

» ;

7° La trente-cinquième ligne est ainsi rédigée :

 

«

Article L. 442-5

la loi n° … du …

» ;

8° Après la quarantième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

 

«

Article L. 443-8

la loi n° 2023-221 du 30 mars 2023

» ;

9° La soixante-troisième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 461-1

la loi n° … du …

L. 461-2

la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017

» ;

10° La quatre-vingt-douzième ligne est ainsi rédigée :

 

«

Article L. 470-1

la loi n° … du …

» ;

11° Après la même quatre-vingt-douzième ligne, est insérée une ligne ainsi rédigée :

 

«

Article L. 470-2

l’ordonnance n° 2019-698 du 3 juillet 2019

»

 – (Adopté.)

Article 16
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Après l’article 16 (fin)

Après l’article 16

M. le président. L’amendement n° 108, présenté par Mme Corbière Naminzo, M. Lahellec, Mme Margaté, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’une évaluation des effets économiques et sociaux des mesures prévues par la présente loi.

Cette évaluation porte notamment sur :

1° L’évolution des prix à la consommation des produits de première nécessité ;

2° La part des marges des distributeurs et importateurs ;

3° Les effets sur la rémunération des producteurs et le niveau d’activité des entreprises locales ;

4° Les conséquences administratives et financières pour les opérateurs économiques et les services de l’État.

Un premier rapport d’étape est transmis au Parlement dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la présente loi, puis un rapport final dans un délai de vingt-quatre mois.

La parole est à M. Alexandre Basquin.

M. Alexandre Basquin. Par cet amendement, nous demandons que soit précisé le contenu du rapport d’évaluation qui devra être réalisé à la suite de la promulgation de ce texte.

Il est nécessaire d’en évaluer les effets économiques et sociaux, en particulier sur l’évolution des prix des produits de première nécessité, sur la part des marges des distributeurs et des importateurs, sur la rémunération des producteurs et le niveau d’activité des entreprises locales, ainsi que sur les conséquences administratives et financières pour les opérateurs économiques et les services de l’État.

Cette proposition est d’ailleurs une recommandation du Conseil d’État, qui relève que les effets de certaines mesures n’ont fait l’objet que d’une évaluation sommaire.

Cette loi serait inutile si nous n’avions aucune visibilité sur ses effets et donc sur la manière de l’ajuster. Nous proposons par conséquent qu’un rapport d’étape soit transmis au Parlement dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la loi, puis un rapport final dans un délai de vingt-quatre mois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Cet amendement vise à imposer la réalisation d’une évaluation des effets économiques et sociaux de la loi dans un délai de douze mois, puis de vingt-quatre mois.

Il sera sans doute très difficile d’isoler les effets spécifiques de l’une ou l’autre des mesures contenues dans le projet de loi. Mme la ministre pourrait nous préciser ses intentions, plutôt que de renvoyer à un décret en Conseil d’État sur ce sujet.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. La proposition qui nous est faite ici correspond effectivement à une recommandation du Conseil d’État. Cela va dans le bon sens, celui de l’efficacité.

Je suis toutefois réservée sur la nécessité de prévoir, à ce stade, les éléments devant figurer dans l’évaluation. Plusieurs mesures ne produiront pas nécessairement d’effets immédiats. Une évaluation requiert du temps et les délais envisagés ne me semblent pas suffisants.

J’ajoute que le rôle du Parlement est aussi de procéder, le moment venu, à l’évaluation de l’application de la loi.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 108.

(Lamendement nest pas adopté.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Je souhaite revenir sur les débats que nous avons eus. Si ce texte nous donne l’illusion d’agir contre la vie chère, il ne prévoit rien pour véritablement contrôler, rien pour vraiment réguler, rien pour réellement sanctionner. Il traduit au contraire le souci de préserver la liberté d’entreprendre. In fine, le texte favorise le développement des oligopoles.

En matière de contrôle, rien n’est prévu pour renforcer les moyens existants. Les sanctions prévues sont peu convaincantes, chers collègues. Nos frères et sœurs en outre-mer ne verront pas leur pouvoir d’achat s’améliorer après le vote de ce texte. L’avenir pour ceux qui souffrent est toujours aussi sombre. Ce projet de loi n’est pas source d’espoir et nous avons vu ce que le manque d’espoir peut produire dans nos territoires.

Nous voulons croire que la vie chère n’est pas une fatalité économique. C’est pour cela que nous débattons ici ce soir. La vie chère n’est pas non plus une fatalité sociale. Nous ne nous résignons pas, mais nous savons, et nous persistons à vous le dire, que ce système est injuste. Les solutions sont à construire autour d’un contrôle renforcé, d’une concurrence plus juste qui permette à nos TPE et à nos PME d’exister et de se développer, et d’une meilleure intégration de nos territoires dans leur environnement régional.

Je regrette tout particulièrement que notre amendement portant sur la TVA du bouclier qualité-prix ait été déclaré irrecevable. Sachez, madame la ministre, que La Réunion, où les élus sont sensibles à la détresse des Réunionnaises et des Réunionnais, a réduit à 0 % le taux de l’octroi de mer sur les produits de première nécessité. Nous attendions que le Gouvernement fasse le même geste pour ce qui le concerne, mais il refuse d’écouter et d’accorder la même faveur, c’est-à-dire réduire le taux de la TVA à 0 % sur ces mêmes produits ciblés.

Pour lutter contre la vie chère, il eût fallu commencer par s’approcher davantage de la réalité des Françaises et des Français des outre-mer. Nous ne l’avons pas fait ce soir. Ici, on a tendance à s’identifier davantage à ceux qui sont à la tête de ces entreprises qui absorbent chaque année plus de parts de marché. Avec ce projet de loi, on ne se préoccupe pas des Ultramarins qui survivent en dessous du seuil de pauvreté. Il aurait fallu croiser leurs regards et écouter leurs difficultés pour joindre les deux bouts.

Nous aurons très vite l’occasion de faire mieux, en votant des mesures plus concrètes dans le projet de loi de finances pour 2026.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.

Mme Catherine Conconne. Je vais m’abstenir sur ce texte, comme je l’avais déjà annoncé. Je ne pourrais pas rentrer vendredi, croiser mes compatriotes et leur dire que je viens de voter quelque chose qui va changer le cours de leur vie en modifiant les prix de leur panier de courses. Ce n’est pas possible.

Comme je le dis depuis un an, la question de la vie chère est extrêmement complexe. Il est trop facile de penser qu’une loi, à elle seule, pourra régler ce problème. Désolée, mais cette loi extincteur, comme je l’ai qualifiée, ne va pas éteindre le feu de la vie chère sous nos yeux.

Cette loi extincteur n’a pas pris en compte le problème des revenus. Nous avons des revenus extrêmement bas ; les pensions de retraite sont plus faibles que dans l’Hexagone. Mme la Première ministre Élisabeth Borne et un ancien ministre du travail m’avaient promis, la main sur le cœur, que le Conseil d’orientation des retraites (COR) lancerait une mission sur le sujet. Trois ans après, ce travail n’a toujours pas été fait. La question des revenus doit être prise en compte.

Ce projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer est peut-être un début de travail, peut-être l’amorce d’une prise de conscience, mais on ne pourra pas dire, si nous l’adoptons ce soir, qu’il aura réglé un quelconque problème, ni que, dès son adoption par l’Assemblée nationale, nos compatriotes verront les prix de leur panier de courses baisser.

Je m’abstiendrai donc et, comme je l’ai dit lors de la discussion générale, je tends la main à la ministre pour que nous puissions mettre en place un véritable travail de fond, qui ne se limite pas à tout ce que j’ai pu entendre aujourd’hui comme lieux communs, comme a priori ou comme considérations erronées.

Il nous faut un travail approfondi, qui s’appuie sur des études sérieuses, pour compléter comme il se doit la réflexion sur la question de la vie chère dans ladite outre-mer. C’est une nécessité, une obligation, c’est le rôle légitime de l’État.

M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.

M. Akli Mellouli. Je partage certains des propos tenus par mes deux collègues. Nous avions déjà dit lors de la discussion générale que les éléments essentiels n’étaient pas tous pris en compte dans ce texte. Nous avons eu un débat passionné et j’espère n’avoir froissé personne. Ce débat est à la hauteur de ce que nous voulons pour les Ultramarins. Je pense que ce qui est bon pour nous est bon pour eux. Il faut que nous ayons à cœur la continuité territoriale et l’égalité réelle, y compris pour nos outre-mer.

Ce débat a permis, je crois, d’avancer. L’ancien ministre Victorin Lurel n’est peut-être pas parfait, mais il a eu raison de souligner que nous avançons par petits pas. Oui, nous avons fait des petits pas, notamment sur les produits locaux, mais aussi sur les sanctions. C’est une première d’aller aussi loin sur ce dernier point, mais c’est simplement répondre à une attente forte de nos concitoyens.

Bien sûr, nous ne réglerons pas tout ce soir. Ce projet de loi n’a pas vocation à tout résoudre ; il se concentre, comme cela a été rappelé, sur les distributeurs et les fournisseurs, et non sur la question du pouvoir d’achat réel, c’est-à-dire celle des salaires. Or, avec moins de 2 000 euros par mois, il est évidemment difficile de vivre dans les outre-mer.

J’ai toutefois un regret majeur : celui de n’avoir pas pu élargir le bouclier qualité-prix. Nous dénonçons tous l’uniformité que l’on voudrait imposer aux outre-mer, mais en refusant cet élargissement, on empêche les collectivités territoriales et les acteurs locaux de se saisir des sujets qu’ils souhaitent porter dans la négociation. C’est une entrave au bon fonctionnement de nos territoires.

Lorsque nous avons voulu ouvrir la discussion à des personnes qualifiées, cela a également été bloqué, alors même que nous avons besoin de toutes les intelligences : plus elles sont nombreuses, mieux nous construisons.

Malgré ces limites, les petits pas accomplis montrent qu’une dynamique est enclenchée. Au départ, nous envisagions de nous abstenir, mais ces avancées nous encouragent à poursuivre. Bien sûr, il faudra aller plus loin. D’ailleurs, les membres de la délégation aux outre-mer ont déposé ensemble une proposition de loi ; nous continuerons donc, je l’espère, de progresser.

Je souhaite remercier les rapporteurs et la présidente de la commission pour le travail accompli. Ce n’est pas simple d’être rapporteur, surtout lorsqu’il faut arbitrer certains points et donner un avis défavorable. La commission joue son rôle, même si nous ne sommes pas toujours d’accord. Le Gouvernement, pour sa part, a fait preuve d’une certaine ouverture et ce débat a permis d’éclaircir bien des positions.

En tout cas, nous savons désormais ce qu’il manque, et nous continuerons à nous battre pour apporter les compléments nécessaires.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Quelques mots avant que Viviane Artigalas ne s’exprime au nom de mon groupe. Je serai bref. J’ai été élu pour légiférer, pour décider et pour tenter d’avancer. Comme dit le poète, un pas, un autre pas, encore un autre pas et tenir gagné chaque pas !

C’est vrai que nous ne sommes pas tout à fait satisfaits. C’est vrai que le Gouvernement n’a pas mis un centime. Nous savons qu’il faut changer l’environnement économique, le corpus juridique. Mais nous ne sommes pas allés jusqu’au bout. Il est vrai, madame la ministre, que vous avez émis un avis favorable sur beaucoup d’amendements. La commission a fait son travail. Nous ne sommes pas toujours d’accord, mais je salue ces évolutions.

Viviane Artigalas expliquera notre position, mais nous voterons ce texte et nous continuerons le travail avec les députés. Bien sûr, des initiatives locales devront être prises par nous-mêmes et nous demanderons un accompagnement de l’État qui n’est pas toujours, pour le moment, au rendez-vous.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.

Mme Viviane Artigalas. Je vais compléter ce qu’a dit mon collègue Victorin Lurel. Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, la question de la continuité territoriale n’a pas été suffisamment prise en compte, tout comme celle des revenus. Il y a là un véritable travail à mener pour garantir justice réelle et égalité effective. Nous en sommes encore loin, je le crains.

Ce projet de loi est imparfait, il n’est pas à la hauteur de toutes les attentes. Toutefois, il contient une grande partie des articles que nous avions votés lors de l’examen, dans le cadre de notre niche parlementaire, de la proposition de loi de Victorin Lurel. À l’époque, nous avions dû nous limiter, car la durée de ces niches est très courte. Nous espérions donc que le texte du Gouvernement irait plus loin, qu’il renforcerait les mesures et les approfondirait. Cela n’a pas été le cas.

Cependant, il faut reconnaître les avancées obtenues, d’abord en commission, avec la suppression de certains irritants – je pense notamment à l’article 1er – et l’adoption de plusieurs de nos amendements. Je salue aussi le travail de concertation mené entre la commission, le Gouvernement et les différents groupes parlementaires.

Ainsi, très majoritairement, notre groupe votera ce projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.

Mme Lana Tetuanui. Quand je lis l’intitulé de ce projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer, je me dis qu’on aurait pu ajouter les mots suivants : à l’exception de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie… Cela fait dix heures que nous débattons de tout, mais il aurait suffi d’ajouter cela pour être exact.

À cette heure-ci, j’ai le sentiment qu’on nous a servi un plat sans saveur. Je le dis et j’assume mes propos.

Parler de la vie chère dans les outre-mer suppose de rappeler que cette problématique s’est considérablement aggravée après la crise de la covid. Nous sommes tous montés au créneau. Je ne parle pas ici des difficultés conjoncturelles propres aux départements d’outre-mer.

Je salue d’ailleurs l’engagement et la détermination de l’ancien ministre des outre-mer, M. Victorin Lurel, dont la conviction et la constance méritent d’être soulignées, même si, à certains moments, je me suis interrogée sur ce qui avait été accompli durant son passage au ministère… (Sourires.) Quoi qu’il en soit, comme on dit, il n’est jamais trop tard pour bien faire, n’est-ce pas, monsieur le ministre ? Des ministres des outre-mer, j’en ai vu défiler…

Les faits sont là : après la pandémie, les prix ont explosé dans l’ensemble de nos territoires ultramarins, aggravant encore les choses. Chacun, ici, est venu défendre la situation de son territoire, et je rappelle qu’en date du 26 juin dernier, l’Assemblée de la Polynésie française avait émis un avis très défavorable sur ce projet de loi. C’est dans ce contexte que je parle de ce texte comme d’un plat sans aucune saveur.