Présidence de M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Après l'article 18 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
Après l'article 18 (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2 de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2026 (projet n° 122, rapport n° 131, avis n° 126).

Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du titre Ier de la troisième partie, l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 18.

TROISIÈME PARTIE (SUITE)

Dispositions relatives aux dépenses pour l'exercice 2026

TITRE Ier (SUITE)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
Article 18 bis (nouveau)

Après l'article 18 (suite)

M. le président. L'amendement n° 1338 rectifié bis, présenté par Mme Bourcier, MM. Chasseing et Capus, Mme Bessin-Guérin, M. Brault, Mme L. Darcos, MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc et Médevielle, Mme Paoli-Gagin, MM. Pellevat, Rochette, Verzelen, L. Vogel et Wattebled, Mme Sollogoub et M. Levi, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 861-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 1° est abrogé ;

2° Le 2° est ainsi modifié :

a) Après le mot : « financière », sont insérés les mots : « déterminée par décret » ;

b) Les mots : « comprises entre le plafond mentionné au 1° et ce même plafond majoré de 35 % » sont remplacés par les mots : « inférieures à un plafond déterminé par décret ».

La parole est à Mme Laure Darcos.

Mme Laure Darcos. Le présent amendement vise à supprimer la gratuité de la complémentaire santé solidaire (C2S), anciennement couverture maladie universelle (CMU). Voyez, je vous réveille dès le matin !

Mis en place en 2019, ce dispositif compte aujourd'hui près de 7,7 millions de bénéficiaires, dont 6 millions à titre gratuit.

La C2S joue un rôle essentiel dans l'accès aux soins des plus fragiles, évitant un renoncement susceptible d'entraîner des dépenses de santé plus importantes.

Cependant, sa gratuité totale n'est plus acceptable au regard du principe d'équité, indispensable à la pérennité de notre système de santé, a fortiori dans un contexte budgétaire particulièrement dégradé.

Le présent amendement vise donc à instaurer une participation financière de tous les bénéficiaires, proportionnelle à leurs revenus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie. La commission a soutenu l'introduction de la complémentaire santé solidaire gratuite et a, depuis lors, accueilli favorablement toutes les modifications visant à en étendre la portée.

Cette garantie est en effet indispensable pour assurer l'accessibilité financière des soins de 6 millions d'assurés parmi les plus précaires ; ses effets sur le recours aux soins sont d'ailleurs documentés.

Ces assurés pourraient peiner à s'acquitter de la contribution d'une C2S payante qui, bien que plus modique qu'une complémentaire de marché, représente tout de même 360 euros par an pour les seniors.

En outre, adopter cet amendement reviendrait à renoncer à l'ensemble de la politique mise en œuvre pour favoriser le recours aux droits. À titre d'exemple, l'attribution automatique de la C2S aux nouveaux allocataires du revenu de solidarité active (RSA) deviendrait impossible si ces derniers devaient payer pour y accéder.

Vous le constatez, cette mesure emporterait des effets de bord.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. Le système actuel repose sur une distinction : soit les revenus sont inférieurs à 862 euros et la couverture est gratuite, soit ils sont supérieurs à ce montant mensuel et il est alors demandé une participation au bénéficiaire.

Je rappelle que ce dispositif a été conçu pour éviter le non-recours aux soins. Dès lors, il ne me semble pas justifié de rendre le paiement obligatoire pour tous.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. En effet, cela nous réveille ce matin ! Le premier amendement vise tout simplement à supprimer la gratuité de l'ex-CMU.

Ainsi, lorsqu'il faut rechercher des économies ou limiter les dépenses, il apparaît tout à fait normal à beaucoup d'entre vous de cibler celles et ceux qui ont le moins. Madame la ministre, vous l'avez rappelé : pour bénéficier de la C2S, il faut percevoir à peine 861 euros par mois.

Ce montant est-il trop élevé pour qu'il soit ainsi demandé à ceux qui le perçoivent de participer ? Quel scandale !

Tout au long de ces derniers jours, nous avons proposé nombre de taxes et de contributions nouvelles pour trouver des recettes auprès de celles et de ceux qui ont beaucoup, voire beaucoup plus que les autres. Vous les avez rejetées ; c'est votre choix, dont acte. Nous avons exprimé notre désaccord, dont acte également.

Et ce matin, vous osez dire : puisqu'il faut trouver des économies, supprimons cette gratuité ! Ils sont trop nombreux, ces pauvres ! Ils sont trop aidés, ces pauvres !

Que nous proposerez-vous encore dans les jours à venir en faisant argument de la difficulté à résorber le déficit de la sécurité sociale ? Il faudra encore aller chercher de l'argent chez ceux qui n'en ont pas !

Vous l'avez compris, nous nous opposerons à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je serai brève : quelqu'un, ici, imagine-t-il ce que signifie vivre avec 862 euros par mois ? Parfois, nous devrions essayer de partager la vie des gens.

J'estime que nos collègues du groupe Les Indépendants s'honoreraient à admettre que cet amendement était une erreur, qu'ils ne se souvenaient plus du seuil ou qu'ils se sont trompés.

En somme, je leur suggère de le retirer et de présenter leurs excuses aux personnes disposant de moins de 862 euros de ressources par mois pour cette proposition, qui n'était qu'une erreur.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Je m'interroge toujours sur l'utilité de ce type d'amendement. Vise-t-il à empêcher les personnes les plus pauvres de se soigner ? Il est bien établi que la précarité financière réduit le recours aux soins.

Imposer un paiement supplémentaire à ces publics revient à ignorer que leur quotidien constitue déjà une épreuve et que tout est compliqué pour eux. Lorsqu'un malade doit se déplacer, tout devient difficile ; si l'on y ajoute des démarches administratives et une contribution financière, le renoncement est inévitable. L'objectif est-il qu'une partie de la population ne se soigne pas ?

Avez-vous finalement envie de payer davantage ? En effet, ceux qui ne se soignent pas voient leur pathologie s'aggraver. Or, puisque nous sommes tout de même en démocratie, nous prenons en charge les urgences vitales et accueillons à l'hôpital ceux qui sont sur le point de mourir : la facture est alors bien plus lourde.

S'agit-il de payer plus in fine, ou sommes-nous face à une absence totale de réflexion ? Agitez-vous des chiffons rouges pour faire semblant de proposer des économies ?

Je rejoins Mme Rossignol : cet amendement est complètement scandaleux. Je forme le vœu que nous l'oubliions rapidement.

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Quel drôle de début de matinée !

Notre rôle, à la commission des affaires sociales comme au Parlement, consiste avant tout à privilégier la prévention.

Hier, j'ai indiqué que l'amendement du Gouvernement relatif aux chirurgiens-dentistes me mettait mal à l'aise. Certes, d'abord parce que personne n'aime aller chez le dentiste, mais surtout parce que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à renoncer à le consulter.

En supprimant cette gratuité, nous rendons-nous compte que les personnes les plus démunies, celles qui sont le plus en difficulté, n'iront plus chez le médecin ? Mesurons-nous que c'est la prévention qui est ici en cause ?

Refuser d'aider ces publics revient en outre à prendre le risque de transmettre des maladies à ceux qui ne sont pas dans le besoin, nous-mêmes y compris.

Il arrive un moment où je me demande tout bêtement s'il ne faudrait pas instaurer, pour tout élu de la République, un stage d'un mois au Samu social, ou ailleurs. Je suis effondré.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.

Mme Laure Darcos. Je vous avais prévenus que je vous réveillerais ce matin… Vous le savez, de temps en temps, la solidarité avec l'ensemble de son groupe est de mise.

Le groupe Les Indépendants passe son temps à soutenir que le tout-gratuit est compliqué à maintenir et que chacun doit prendre conscience des réalités.

Je vous livre une anecdote personnelle.

J'ai passé un scanner cette semaine. Une dame me précédait ; bénéficiaire de la CMU, elle subissait cet examen pour la troisième fois de la semaine. Elle ne comprenait pas pourquoi elle n'avait pas le droit d'en passer encore un, simplement parce qu'elle n'était pas satisfaite du diagnostic.

Mme Laurence Rossignol. Il faut une ordonnance pour ça !

Mme Laure Darcos. Il s'agit simplement d'affirmer que même ces personnes-là doivent prendre conscience du coût de la santé.

Bien évidemment, je ne souhaite absolument pas empêcher quiconque de se faire soigner ; par conséquent, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 1338 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 159 rectifié septies, présenté par Mmes Guidez, Vermeillet et Jacquemet, MM. Delahaye et Dhersin, Mmes Sollogoub, Bourguignon, Antoine, Loisier, Perrot et Billon et M. Hingray, est ainsi libellé :

Après l'article 18 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À compter du 1er janvier 2026, les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques ne donnent plus lieu à remboursement, ni à participation financière de l'assurance maladie.

II. – Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement d'appel a suscité de vives réactions, non seulement chez les psychologues, mais aussi de la part de nombreux parents et associations.

C'est précisément parce que je défends des soins de qualité et que je fais confiance aux psychologues ainsi qu'aux psychiatres que je l'ai déposé. Il s'agit d'alerter sur le danger que peut représenter la psychanalyse dans le champ des troubles du neurodéveloppement (TND) ou du handicap, alors même que ne doivent être promues que les approches recommandées.

Vous le savez, je m'investis sur ce sujet depuis cinq ans maintenant.

Toutes les associations représentant les personnes souffrant de TND ou de handicap souhaitent ardemment soulever la question de la psychanalyse. Pour les TND, et en particulier pour l'autisme, la Haute Autorité de santé (HAS) écarte, depuis 2012, les approches psychanalytiques, soulignant l'absence de données quant à leur efficacité.

Nous devons entendre la parole des victimes de la psychanalyse dans le champ de l'autisme, ces personnes dont le trouble a été nié ou dont les parents ont été culpabilisés.

Pour autant, restreindre le présent amendement aux seuls TND aurait eu pour conséquence d'exclure les patients non encore diagnostiqués, pour qui ces approches occasionnent une perte de temps précieux.

S'agissant des autres troubles, notamment psychiatriques et psychiques, le débat est, il est vrai, plus ouvert. Une méta-analyse de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) de 2004, examinant près de mille travaux, concluait cependant à une moindre efficacité de la psychanalyse par rapport aux approches cognitivo-comportementales, plus modernes, plus brèves, moins coûteuses et mieux évaluées scientifiquement.

Cet amendement s'inscrit donc dans la logique du Gouvernement consistant à recentrer les prises en charge vers les soins les plus efficients, considérant que le service médical rendu de la psychanalyse ne repose pas sur un consensus scientifique.

À ce titre, je me réjouis que nous puissions ouvrir ce débat, dans un pays où l'omniprésence psychanalytique fait encore figure d'exception, à l'égal seulement de certains États d'Amérique du Sud.

Pour autant, cette proposition ne cherche pas à interdire la psychanalyse, elle n'empêche personne d'y recourir et ne remet nullement en cause la liberté de pratique des professionnels.

Mon amendement vise uniquement à replacer l'utilisation de l'argent public sur le terrain des preuves.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. S'il convient de rappeler que la psychanalyse n'est pas censée, en tant que telle, faire l'objet d'une prise en charge par l'assurance maladie obligatoire, certains psychologues conventionnés ou certains psychiatres y sont également formés et orientent leur exercice en ce sens. De plus, des psychanalystes peuvent exercer dans des structures financées par l'assurance maladie.

Toutefois, cet amendement présente des fragilités opérationnelles : il sera difficile pour l'assurance maladie de déterminer quels professionnels seraient influencés, dans leurs pratiques, par la psychanalyse.

Alors que la santé mentale a été érigée cette année en grande cause nationale,…

Mme Corinne Imbert, rapporteure.… il ne faudrait surtout pas que cet amendement conduise, dans le doute, à supprimer le dispositif Mon soutien psy ou à restreindre l'accès aux soins psychiques.

La commission s'en remet à l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je tiens à rejoindre la sénatrice qui porte cet amendement concernant la psychanalyse et l'autisme. Nous disposons de données scientifiques à ce sujet et j'aime à dire que nous devons remettre la science au cœur de nos vies et de notre société.

Dès 2012, la HAS a précisé que l'autisme ne pouvait être traité par la psychanalyse, car cette méthode est inefficace, et qu'il ne devait plus être considéré comme une maladie à traiter par ce moyen.

Pour autant, vous savez que le délégué interministériel aux TND continue de travailler sur ces sujets avec la HAS et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) n'est ni le bon outil ni le bon vecteur pour la mesure que vous proposez.

Je vous suggère donc de retirer cet amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.

M. le président. Madame Guidez, l'amendement n° 159 rectifié septies est-il maintenu ?

Mme Jocelyne Guidez. Le temps nous est compté et l'on nous a invités à accélérer nos débats ; je retire donc mon amendement.

Pour autant, pour moi, le combat continue, avec les parents et les associations. Je souhaite vous faire part de ma propre histoire.

Mme Laurence Rossignol. Notre collègue fait une explication de vote sur l'amendement qu'elle vient de retirer, je peux donc en faire une également !

Mme Jocelyne Guidez. Cela remonte à trente ans, et nous en sommes toujours au même point ! (L'oratrice manifeste une intense émotion.)

Ma sœur a eu un premier enfant atteint du syndrome de Rett. Ignorant la nature du mal dont souffrait sa fille, et pour tenter de sortir de son angoisse, elle a consulté un psychologue. Or ce praticien a fait de la psychanalyse, et non de la psychologie. Ces disciplines diffèrent. Nous avons besoin de psychiatres et de psychologues.

Seulement trois questions lui furent ainsi posées : avez-vous désiré votre enfant ? aimez-vous votre enfant ? lui parlez-vous tous les jours ?

Ensuite, alors que sa fille ne saisissait pas l'objet qu'on lui tendait, le psychologue-psychanalyste lui a asséné cette réponse : « Madame, c'est parce qu'elle est en colère après vous. »

J'ai ramassé ma sœur « à la petite cuillère ».

Voilà tout ce que j'avais à vous dire ; mon combat continuera ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. L'amendement n° 159 rectifié septies est retiré.

L'amendement n° 1075 rectifié, présenté par MM. Ros, Kanner, Lozach et Ziane, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur le remboursement, par la sécurité sociale, de l'activité physique prescrite par le médecin intervenant dans la prise en charge du patient.

II. – Le rapport comporte les axes suivants :

1° Coûts : une évaluation du coût potentiel pour la sécurité sociale du remboursement de la pratique d'une activité physique prescrite à tout type de public par un professionnel de santé, lorsque cette prescription est jugée utile au maintien ou à l'amélioration de la santé physique et mentale du patient ;

2° Bénéfices : une analyse des bénéfices ainsi que des économies potentielles pour la sécurité sociale, pouvant résulter du remboursement de l'activité physique sur prescription médicale.

La parole est à M. Patrick Kanner.

M. Patrick Kanner. Après l'émotion de notre collègue Jocelyne Guidez, que nous partageons, je vous présente un amendement qui risque de paraître un peu décalé.

Il concerne l'activité physique et tend à demander un rapport. Je l'ai cosigné, mais il est présenté par notre collègue David Ros, dont je vous prie d'excuser l'absence.

L'activité physique, mes chers collègues, n'est pas un loisir : c'est un déterminant majeur de santé publique. Ses bénéfices sont incontestables, nul ne l'ignore : prévention des maladies chroniques, maintien de l'autonomie des personnes âgées, réduction des troubles anxieux et dépressifs, ou encore amélioration des capacités cardiovasculaires et musculaires. En la matière, la science est formelle et ne laisse place à aucun doute.

Malheureusement, seulement 11 % de nos concitoyens sont actifs de manière régulière, alors que 15 % des décès prématurés pourraient être évités si les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) étaient respectées.

Le coût de l'inactivité physique pour notre pays s'élève ainsi à 140 milliards d'euros par an.

Le présent amendement vise donc à solliciter un rapport d'évaluation, lequel nous permettrait notamment de vérifier un chiffre circulant en matière sportive, selon lequel chaque euro dépensé dans l'activité physique générerait une économie de 13 euros en dépenses publiques.

Ce rapport constituerait le point de départ d'une politique proactive, propre à réduire la prévalence des maladies, à diminuer les coûts supportés par la sécurité sociale et, partant, à lutter contre les inégalités.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement est en effet un peu décalé par rapport à l'amendement précédent. Nous avons tous été émus par le témoignage de notre collègue Jocelyne Guidez ; permettez-moi de lui apporter tout mon soutien.

S'agissant d'une demande de rapport, mon cher collègue, vous savez bien que l'avis de la commission sera défavorable, même si nous invitons le Gouvernement à poursuivre les travaux sur l'activité physique adaptée, laquelle est utile pour nos concitoyens.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous aurons l'occasion d'évoquer ce sujet lors de l'examen de l'article 19. Vous le savez, cet article consacré à la prévention permettra de prendre en compte les parcours d'accompagnement préventif à destination des assurés souffrant d'une pathologie à risque d'évolution vers une affection de longue durée (ALD). Ce débat y trouvera toute sa place.

S'agissant d'une demande de rapport, je sollicite le retrait de l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Depuis le début de ce débat, nous évoquons l'ensemble des filières économiques, ce qui est assez hallucinant, car tel n'est pourtant pas l'objet du PLFSS.

En revanche, lorsqu'il est question de prévention, en l'occurrence d'activités sportives et d'activités physiques adaptées, ce n'est soudainement plus le moment ; il faudrait le faire ailleurs. La sagesse commanderait donc, semble-t-il, que nous n'abordions pas ce sujet maintenant.

Celui-ci est pourtant central. L'activité physique adaptée constitue non seulement une action de prévention, évitant de nombreuses maladies, mais empêche également de sombrer dans la neurodégénérescence ; de surcroît, elle participe à la guérison du cancer. Il serait donc incroyable de ne pas en discuter maintenant.

Bien sûr, cet amendement tend à demander un rapport, mais c'est pour éviter l'écueil de l'article 40 de la Constitution. Madame la ministre, prenons ce sujet au sérieux, ici et maintenant. C'est le moment.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Je souhaite à mon tour insister sur ce point. Certes, ce débat serait peut-être plus opportun à l'article 19, mais je saisis l'occasion de cette demande de rapport pour évoquer l'activité physique adaptée, sujet que j'aborde chaque année.

Nos collègues Patrick Kanner et Anne Souyris viennent d'en souligner l'importance. L'activité physique peut diminuer les risques de récidive de 40 % à 60 % selon les cancers, en particulier ceux du côlon, du sein et de la prostate. Je me souviens d'un colloque organisé en 2021 avec l'Inserm : les spécialistes y insistaient sur son rôle thérapeutique face à la récidive.

Si les femmes pratiquaient une activité physique régulière, 25 % des cancers du sein, de l'endomètre et du côlon pourraient être évités.

En 2011, la HAS l'a reconnue comme thérapeutique non médicamenteuse ; elle peut être prescrite par les médecins généralistes depuis 2022, une mesure que nous avions inscrite dans le PLFSS.

A contrario, l'inactivité physique et la sédentarité sont largement reconnues comme facteurs de risque majeurs pour la santé et comme causes de mortalité évitables. L'OMS estime ainsi que la sédentarité constitue la cause principale de 27 % des cas de diabète.

Le recours à l'activité adaptée représente donc un investissement en faveur de la prévention, un réel potentiel d'économies à long terme, mais aussi à court terme lorsqu'il s'agit de prévention tertiaire.

Selon l'OCDE, chaque euro investi dans l'activité physique génère 1,70 euro de bénéfices économiques.

Il s'agit donc d'un traitement médical qui est source d'économies.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Mme Véronique Guillotin. Bien que convaincue des vertus de l'activité physique, qu'elle soit ordinaire ou adaptée, je voterai contre cette demande de rapport. Nous n'avons nul besoin d'un tel document. Tout le monde le sait, tout a été dit, des études paraissent quotidiennement sur les bienfaits de l'activité physique, qu'il s'agisse de prévention, de suivi post-cancer ou d'amélioration de l'état de santé.

À mon sens, le débat que nous aurons plus tard doit porter sur les limites de l'intervention de la sécurité sociale, puisque nous examinons ici son budget. Quelle doit être la part des mutuelles dans ce système ? Quelle doit être celle de la prévention, de l'apprentissage de l'activité aux tout-petits et de la lutte contre la sédentarité dès le plus jeune âge ?

Tout ne saurait être pris en charge de manière globale.

M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Alain Milon, vice-président de la commission des affaires sociales. Je comptais tenir les propos que vient de défendre Véronique Guillotin, je n'y reviens donc pas.

Des rapports sur l'activité physique, l'Académie de médecine et les sociétés savantes en ont déjà produit. Au quotidien, les médecins demandent à leurs patients de pratiquer une activité physique et leur indiquent laquelle privilégier. Je ne vois donc pas l'utilité, pour le Sénat, de reprendre les termes de ces rapports.

S'agissant d'une demande de rapport, nous nous y opposerons donc. Je rappelle en outre que l'examen de ce projet de loi nous conduira à nous prononcer sur pas moins de soixante-dix demandes du même ordre. Si nous consacrons dix minutes à chacune d'entre elles pour motiver notre refus ou la justifier, nous n'en finirons pas ! (Mme Frédérique Puissat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je rejoins les propos de Mme Guillotin.

Le remboursement s'impose, par exemple, dans le cadre du dispositif que nous avons voté il y a quelques années pour le cancer du sein. Une prise en charge est nécessaire dès lors que les études démontrent une efficacité en matière de prévention.

En prévention primaire, il est établi que tout ce qui concourt au bien-être – l'activité physique en fait partie – renforce et améliore la santé. La véritable question réside dans le dosage : quel niveau de prise en charge définir et qui doit rembourser quoi ?

Si j'ai indiqué que nous aborderons ce sujet à l'article 19, c'est parce que tel est le sens de cet article ; il ne s'agissait nullement pour moi d'échapper à ce débat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1075 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1383, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au parlement un rapport sur l'opportunité et les modalités d'une intégration de l'aide médicale d'État dans le régime général de l'assurance maladie.

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Alors que certains et certaines s'acharnent à supprimer l'aide médicale de l'État (AME) ou à la réduire comme peau de chagrin, je l'affirme haut et fort : il est temps d'intégrer ce dispositif au régime général de l'assurance maladie.

La complexité des démarches administratives et la coexistence de plusieurs dispositifs – AME, régime général de la sécurité sociale, couverture complémentaire santé – emportent des conséquences négatives sur la santé des personnes, mais également sur les plans administratif et budgétaire.

Les personnes en situation de précarité potentiellement éligibles à l'AME se heurtent en effet à de multiples obstacles pour l'ouverture et le maintien de leurs droits. Les chiffres l'illustrent clairement : le taux de non-recours à l'AME atteint 49 %.

Cette demande n'est pas loufoque, loin de là. L'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale des finances (IGF) l'ont formulée en 2010, et le Défenseur des droits a renouvelé cette recommandation en 2014. Enfin, l'Académie nationale de médecine a adopté cette position dès 2017.

De fait, retarder les soins, laisser un état de santé se dégrader ou attendre qu'une situation devienne urgente n'a rien d'économique : cela engendre des prises en charge plus lourdes, des hospitalisations plus longues et des coûts évitables, sans parler des souffrances humaines, qui, elles, ne se chiffrent pas.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement portant une demande de rapport, l'avis de la commission est, sans surprise, défavorable.

Sur le fond, sans revenir sur la pertinence de cette prestation, qui relève du projet de loi de finances (PLF), les bénéficiaires de l'AME disposent de conditions de prise en charge particulières, avec un panier de soins différent de celui de l'assurance maladie.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?