M. le président. L'amendement n° 326, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Vous connaissez notre désamour pour les agences de l'État dans leur ensemble et notamment pour les agences régionales de santé.
Depuis des années, le champ d'action des ARS ne cesse de s'étendre. Ces instances, totalement déconnectées du terrain, ne font que complexifier la gouvernance de notre système de santé. Nous proposons donc de supprimer l'alinéa 2 de cet article : en attendant la suppression des ARS, évitons au moins d'élargir leurs compétences.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L'article 20 confie aux agences régionales de santé le pilotage de la politique territoriale de vaccination, compétence que ces structures exercent aujourd'hui de concert avec l'État.
En attribuant l'intégralité de ce pilotage aux ARS, l'on renforcera l'unité et la cohérence territoriale de l'action menée en matière de vaccination.
Il me semble nécessaire de s'arrêter un tant soit peu sur la révision des conditions de financement des centres de vaccination des collectivités territoriales. C'est à ce titre, en effet, que surgissent des inquiétudes et des interrogations : les modifications apportées par le présent texte n'ont à ma connaissance pas été discutées jusqu'à présent, ou ne l'ont été que peu.
J'aimerais que le Gouvernement puisse nous éclairer sur cette question, qui concerne nombre de collectivités territoriales. En revanche, l'attribution de cette compétence globale aux ARS me semble avoir du sens. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Pour ma part, je crois à la coordination des ARS et des collectivités territoriales.
Nous avons tous pu constater, pendant la crise covid, l'implication des collectivités territoriales dans la création des centres de vaccination. Personne ne conteste leur rôle en la matière.
Parallèlement, les ARS assurent un pilotage, à l'échelle régionale, avec les professionnels libéraux et les établissements de santé. Il s'agit d'une de leurs missions.
Je suis sûre que, dans les semaines qui viennent, nous aurons l'occasion de débattre plus longuement de la place des agences régionales de santé. Je le répète, je soutiens les ARS, mais soutenir ne signifie pas refuser toute évolution.
Au sujet de ces agences, beaucoup d'élus se posent des questions légitimes, que ce soit au Parlement, dans les départements ou dans les communes. Nous devons leur donner des réponses. Nous devons introduire un certain nombre de changements, pour suivre au plus près l'évolution des maladies et de notre société en général.
Cela étant – j'en suis convaincue –, les ARS garderont un rôle tout à fait essentiel. En effet, nous avons besoin d'une liaison directe entre le ministère et les territoires sur les différents sujets sanitaires, qui plus est en cas de crise, qui relèvent du régalien.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 643 est présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 865 rectifié bis est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel, M. Roux et Mme Girardin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 4 à 6
Supprimer ces alinéas.
II. – Après l'alinéa 28
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le quatrième alinéa de l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il mentionne également la promotion de la vaccination auprès des résidents, en tenant compte des recommandations vaccinales en vigueur. »
La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter l'amendement n° 643.
Mme Corinne Imbert, rapporteur. Nous proposons de supprimer l'obligation de vaccination contre la grippe pour les résidents des Ehpad tout en renforçant la promotion de la vaccination, en l'inscrivant dans le contrat de séjour signé par chaque résident.
Tout d'abord, le taux de couverture vaccinale contre la grippe des résidents des Ehpad est déjà globalement élevé : il s'élevait à 83 % lors de la dernière épidémie de grippe, alors que celui des professionnels de santé en établissement de santé et dans les Ehpad atteint tout juste 20 %. Certes, on peut et on doit encore progresser pour assurer la vaccination des résidents. Mais la question de l'obligation vaccinale ne se pose pas dans les mêmes termes pour les professionnels de santé et pour les résidents des Ehpad.
Ensuite, l'obligation de vaccination pour ces résidents soulève des questions éthiques sensibles, notamment celle du consentement aux soins. Ce sujet est particulièrement complexe pour les personnes souffrant de troubles cognitifs, qui – on le sait – sont nombreuses dans les Ehpad.
Je le répète, la couverture vaccinale des résidents d'Ehpad est déjà bonne : parmi eux, l'obligation vaccinale pourrait susciter plus de résistances que d'adhésion. À cet égard, je n'oublie pas le rôle des familles, qui peuvent influencer les résidents.
Enfin – c'est également un des problèmes –, on ne pourrait tirer aucune conséquence concrète du refus de vaccination opposé par un résident d'Ehpad. On ne peut évidemment pas concevoir d'expulser une personne vulnérable de sa structure d'hébergement au motif qu'elle refuse de se faire vacciner.
Nous proposons donc de supprimer ces dispositions tout en ajoutant une mention relative à la promotion de la vaccination dans le contrat de séjour des résidents.
En outre, il convient selon nous de rendre obligatoire la vaccination des professionnels de santé et du personnel des Ehpad. Cette mesure constituera une barrière protectrice supplémentaire pour les résidents.
À titre personnel, je souhaite évidemment que ces personnes fragiles optent pour la vaccination et que les familles aient conscience de la responsabilité qui leur incombe quand elles refusent de faire vacciner leurs parents.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l'amendement n° 865 rectifié bis.
Mme Véronique Guillotin. Sur ce sujet, je suis en tout point d'accord avec Mme la rapporteure.
L'obligation de vacciner les résidents d'Ehpad part sans doute d'une bonne intention, mais sa mise en œuvre ne me semble pas possible. Non seulement certains résidents présentent des troubles cognitifs, mais les familles peuvent interférer dans les décisions et les sanctions sont inenvisageables : on ne peut pas sévir à l'encontre d'une personne âgée au motif qu'elle n'a pas donné son consentement à la vaccination.
Commençons par la vaccination des professionnels : il s'agit, selon moi, du premier axe d'action. D'ailleurs, peut-être le taux de vaccination des résidents montera-t-il ensuite de lui-même à 90 %.
M. le président. L'amendement n° 276 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 6
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 3111-2-1. – Les établissements mentionnés au I de l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles font connaître chaque année aux autorités de tarifications et de contrôle, les démarches engagées pour favoriser la vaccination des résidents contre la grippe, le zona et le pneumocoque. »
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Nous proposons nous aussi de remplacer l'obligation vaccinale pour les résidents d'Ehpad par l'obligation de promouvoir la vaccination.
À cet égard, il convient également d'insister sur la vaccination contre le zona et le pneumocoque, qui n'ont pas encore été évoqués.
Mon métier, en tant que pédiatre, c'était de vacciner les enfants. Nos précédentes discussions ont donc suscité en moi une certaine frustration. J'ajoute que j'ai rédigé en 2019 un rapport sur l'hésitation vaccinale, avec Cédric Villani, et participé aux différentes étapes du raisonnement relatif à la gestion de la crise covid.
J'insiste, au passage, sur le vaccin nasal pédiatrique, qui joue un rôle de prévention très efficace lorsque les petits-enfants rendent visite à leurs grands-parents ou à leurs arrière-grands-parents en Ehpad. Je regrette que cette solution ait été retoquée, alors que beaucoup de pays européens y ont recours.
M. Khalifé Khalifé. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 1576 rectifié bis, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer le mot :
résidant
par le mot :
admises
II. – Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
La vérification du statut vaccinal intervient au moment de l'admission des personnes dans les établissements mentionnés au précédent alinéa.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Madame la rapporteure, vous estimez, contrairement à Mme la ministre, qu'il ne faut pas instaurer d'obligation vaccinale pour les résidents d'Ehpad.
Tout d'abord, vous relevez que 83 % de ces personnes sont déjà vaccinées. Lorsque, sur proposition de la ministre des solidarités et de la santé de l'époque, Agnès Buzyn, nous avons institué l'obligation vaccinale contre la rougeole, c'était à peu près le taux de vaccination des enfants. Or nous avons suivi Mme Buzyn, comme, d'ailleurs, la majorité de cette assemblée. En effet, le chiffre de 83 % n'est pas satisfaisant. L'enjeu, c'est d'atteindre le taux permettant d'arrêter la circulation du virus ou de l'agent infectieux considéré ; et ce taux est bien plus élevé.
Nous sommes bien d'accord, c'est compliqué de dépasser 95 % de vaccination contre la grippe ; mais, pour la rougeole, il en va de même, et face à cette maladie l'obligation vaccinale a été efficace. On a vu chuter la circulation du virus. Une reprise a été constatée en 2024 et au début de l'année 2025, mais dans des foyers circonscrits, dans des communautés qui, pour des raisons x ou y, qui ne veulent pas de la vaccination – nous revenons, à cet égard, aux remarques formulées par Laurence Rossignol.
Bref, si l'on veut arrêter la circulation du virus de la grippe dans les Ehpad, on ne peut pas se contenter d'un taux de couverture de 83 %. Il faut donc recourir à l'obligation vaccinale.
Cela étant, vous avez raison de le souligner : même si les résidents refusent d'être vaccinés, on ne les renverra pas de leur Ehpad. Ce n'est pas humain.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement, tendant à rendre la vaccination obligatoire à l'admission. Si l'on veut bien se faire vacciner en entrant en Ehpad, c'est que l'on accepte le principe de la vaccination ; et, si l'on ne veut vraiment pas, on cherche une autre solution que l'hébergement collectif. En tout cas, on ne doit pas contribuer à la circulation du virus de la grippe.
M. le président. L'amendement n° 1577 rectifié bis, présenté par M. Jomier, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que pour l'ensemble des personnels en contact avec les résidents de ces établissements, pendant la période épidémique
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Dans la même logique que précédemment, je propose d'étendre l'obligation vaccinale à « l'ensemble des personnels en contact avec les résidents », notamment le personnel d'entretien. Comment considérer que les intéressés ne sont pas porteurs du virus, qu'ils ne peuvent pas le faire circuler ?
Il nous faut avoir pour seul guide le souci d'éviter à tout prix la contamination des résidents. Or ce n'est pas la seule affaire des médecins et des soignants. C'est collectivement que nous devons protéger de la grippe les personnes âgées résidant en Ehpad.
M. le président. L'amendement n° 853 rectifié ter, présenté par MM. Lévrier et Fouassin, Mmes Duranton et Schillinger et MM. Khalifé, Buis et Rambaud, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 28
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
.. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 311-4 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce contrat détermine la liste des maladies contre lesquelles les personnes accueillies doivent être immunisées. Le refus de la personne accueillie de se soumettre à cette obligation vaccinale, en l'absence de contre-indication médicale reconnue, entraîne le refus de son admission ou la rupture de son contrat d'hébergement. »
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. J'adhère totalement aux propos du docteur Jomier. Pour ma part, je propose d'aller un tout petit peu plus loin, car je crois au libre arbitre des personnes âgées et des membres de leurs familles.
Les nouveaux résidents des Ehpad signent, à leur arrivée, un contrat d'admission : il est assez simple d'ajouter dans ce document une liste de vaccins obligatoires à renouveler périodiquement, que ce soit tous les ans ou tous les cinq ans.
Une fois que le résident a signé un tel contrat, il n'y a plus de débat : le principe de la vaccination a été accepté au préalable.
Cette proposition me semble très simple à mettre en œuvre. Dans la même logique, les enfants qui ne sont pas vaccinés n'ont pas le droit d'entrer en crèche ou à l'école.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
M. Martin Lévrier. Pour moi, la prévention doit passer avant tout. Dans une ancienne vie, j'ai dirigé une maison de retraite de quatre-vingt-dix lits. Je peux vous dire que, lorsque la grippe arrivait dans l'établissement, c'était « panique à tous les étages », non seulement chez les malades, mais aussi et surtout parmi les autres résidents et leur entourage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L'amendement n° 276 rectifié bis tend à créer une communication annuelle aux autorités de tutelle sur ce que font les Ehpad en faveur de la vaccination. À mon avis, cette obligation serait chronophage et peut-être contreproductive. Mieux vaut opter pour l'incitation, en ajoutant une mention en ce sens dans le contrat de séjour et en sensibilisant les familles lors de l'entrée de leurs parents en Ehpad. Il s'agirait déjà d'un important progrès. Aussi, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Monsieur Jomier, les dispositions de l'amendement n° 1576 rectifié bis ne me paraissent pas opérationnelles. Vous proposez de vérifier le statut vaccinal de chaque résident au moment de son entrée en Ehpad. Prenons l'exemple d'une personne arrivant au printemps : le vaccin de l'automne précédent ne fait plus effet et, pour l'hiver suivant, le vaccin contre la grippe n'est pas encore disponible... La commission sollicite également le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Par l'amendement n° 1577 rectifié bis, vous proposez d'étendre l'obligation vaccinale à tous les personnels en contact avec les résidents de ces établissements. Or c'est la HAS qui, au printemps prochain, déterminera le champ de cette obligation ; si elle doit se limiter aux professionnels de santé ou si elle doit être étendue à l'ensemble des personnes intervenant dans les Ehpad. Attendons cet avis, qui sera certainement digne d'intérêt. Aujourd'hui, toutes les personnes exerçant dans un établissement où elles sont exposées à des risques de contamination sont invitées à se faire vacciner. La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Enfin, monsieur Lévrier, par l'amendement n° 853 rectifié ter, vous proposez de conditionner l'admission d'une personne en Ehpad à une liste de vaccinations inscrite dans le contrat de séjour…
M. Martin Lévrier. Je défendrai plus longuement ma proposition !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je ne suis pas plus convaincue par ce système que par l'obligation vaccinale pour les résidents d'Ehpad : je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, sur ce sujet, nous devons attendre de connaître l'avis de la Haute Autorité de santé : l'obligation de vaccination sera mise en œuvre si, et seulement si, cette instance estime qu'elle présente un intérêt, qu'il s'agisse des soignants ou des personnes âgées. J'y insiste, car nous disposerons à ce titre d'un certain nombre de données. Je pense notamment au taux de couverture nécessaire pour faire face au risque collectif que représentent les maladies dont il s'agit.
Pour ce qui concerne les personnes âgées, l'enjeu a été très bien résumé par M. Jomier : il s'agit de l'articulation des responsabilités collective et individuelles. Il convient d'atteindre un taux de couverture suffisant pour protéger l'ensemble d'une population. Telle est la question dont est saisie la Haute Autorité de santé.
J'ajoute que le taux de couverture de 83 % n'est qu'une moyenne nationale : certains Ehpad ne sont qu'à 30 %, faute de culture vaccinale suffisante ou parce que telle ou telle personne a persuadé la majorité des résidents qu'ils devaient refuser le vaccin.
Ce chiffre national doit aussi être pris avec des pincettes. Dans les Ehpad où le taux de vaccination est particulièrement bas, l'obligation peut avoir du sens. Je tenais à apporter ces éléments au débat.
Pour les raisons que je viens d'indiquer, je suis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
La question des sanctions a été abordée. À mon sens, il faut préserver une souplesse suffisante en s'en remettant à la concertation à l'échelle des établissements. Je me tourne notamment vers M. Lévrier : avant tout, il faut inciter très fortement les résidents à se laisser vacciner. Si l'on opte pour l'obligation, les personnes placées au plus près d'eux seront les mieux à même de leur détailler les sanctions auxquelles ils s'exposent en cas de refus.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Pour ma part, je voterai l'amendement de Mme la rapporteure. Il ne peut être question de renvoyer tel ou tel résident d'Ehpad, même si, malheureusement, il est passé au travers de la vaccination.
Cela étant, je suis d'accord avec Bernard Jomier : le contrat d'admission peut imposer la vaccination, quelle que soit la date d'entrée. Il suffit d'énoncer l'obligation de prendre part à la prochaine campagne vaccinale.
Enfin, j'estime que tout le personnel des établissements, solidairement, doit être vacciné : à cet égard, il forme un tout.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Pour notre part, nous plaidons en la matière pour une forte incitation ; mais force est de constater que nous sommes face à une difficulté.
L'obligation proposée s'appliquerait au flux et non au stock – pardonnez-moi ces termes, qui ne sont sans doute pas les plus élégants. En effet, il n'est pas question de virer les résidents actuels qui ne sont pas vaccinés…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Eh oui !
Mme Raymonde Poncet Monge. C'est une évidence. Mais n'oublions pas que le vaccin de la grippe est annuel : même si les nouveaux résidents sont vaccinés lors de leur entrée, certains d'entre eux pourront refuser le vaccin l'année suivante. Si l'on raisonne de manière dynamique, on se heurte au même problème que celui qui a été précédemment évoqué.
En outre, faut-il étendre cette obligation à tel ou tel service hospitalier, par exemple aux services de gériatrie, ainsi qu'aux longs séjours ?
En tout état de cause, l'obligation ne vaut que pour le flux et la difficulté se répétera année après année, lors du renouvellement des vaccins. Quand bien même une personne entrant en établissement accepte de signer le contrat d'admission et de se faire vacciner, que se passe-t-il si elle refuse par la suite ? Bonne chance pour trouver une solution…
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Par souci de clarté et de concision, on peut effectivement parler de stocks et de flux, même si je n'aime guère employer ces termes pour désigner des personnes…
Madame la rapporteure, c'est dès la constitution du « stock » que je propose de fixer une telle obligation. Lorsqu'il signe son contrat d'admission en Ehpad, le résident s'engage à être vacciné tous les ans. Il n'y a pas de débat : il signe ou il ne signe pas.
Madame la ministre, c'est exactement ce que l'on fait dans les crèches et les écoles. Si Mme Buzyn n'avait pas eu le courage de prendre cette décision, on en serait encore à parler de prévention. Dieu sait s'il a été compliqué à l'époque – je m'en souviens – d'instaurer des obligations assorties de sanctions. Mais sans ce travail nous devrions encore et toujours nous contenter d'essayer de convaincre, avec un succès tout relatif.
Aujourd'hui, qui convainc sur les réseaux sociaux ? Ce sont les antivax. Nous devons faire gagner la science, ce qui suppose, parfois, de se montrer directif.
Il faut s'en remettre au libre arbitre des individus en leur disant que, pour entrer en Ehpad, les résidents doivent signer un contrat impliquant une vaccination obligatoire. La date d'entrée n'est pas un sujet, puisque l'engagement vaudrait de manière générale.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour explication de vote.
Mme Laurence Muller-Bronn. Juridiquement, les Ehpad n'ont pas le même statut que les crèches. En effet, les résidents d'Ehpad sont légalement chez eux : l'Ehpad constitue leur foyer personnel et non un lieu d'accueil collectif. Or je doute que l'on puisse obliger une personne à se faire vacciner chez elle.
Bien sûr, je voterai l'amendement de Mme la rapporteure, qui tend à revenir sur cette obligation.
Je rappelle que tous les pays évolués, notamment européens, s'abstiennent d'instaurer de telles obligations sans pour autant être ravagés par les maladies infectieuses. Dans ces États comme chez nous, les affections dont il s'agit sont impliquées dans moins de 2 % des décès.
Si nous votions cet article en l'état, nous serions le seul pays européen à instaurer une obligation de vaccination contre la grippe : c'est la Haute Autorité de santé qui s'exprime ainsi. Elle évoque, à cet égard, l'inefficacité du vaccin. Elle s'est encore prononcée en octobre dernier contre cette obligation.
Le système finlandais, qui, dans ce domaine, est le plus avancé d'Europe, repose sur l'incitation et non sur l'obligation. Notre pays serait-il infecté au point de devoir prendre des décisions de ce genre ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Mes chers collègues, le bilan des extensions de l'obligation vaccinale décidées par Agnès Buzyn lorsqu'elle était ministre chargée de la santé s'est révélé, de fait, extrêmement positif. Il faut être pragmatique. Quelques personnes continuent de s'opposer à la vaccination – on ne les met pas en prison, je vous rassure –, mais la collectivité a gagné à cette responsabilisation inscrite dans la loi. (M. Martin Lévrier le confirme.)
Nous sommes exactement dans ce cas de figure : pourquoi refuserions-nous de faire de même ?
Madame la rapporteure, j'ai entendu votre remarque quant à l'époque d'admission des résidents d'Ehpad. Mais cette difficulté se traitera sans aucune difficulté par voie réglementaire : ce n'est pas un motif suffisant pour s'opposer au principe de l'obligation vaccinale. Cette mesure d'intérêt collectif est fondamentalement protectrice.
J'entends vos objections, mais il va sans dire que chaque résident d'Ehpad bénéficiera du respect qui lui est dû : aucun résident ne sera mis à la porte de son établissement.
L'histoire de la vaccination elle-même nous commande d'aller dans cette direction.
Je m'attendais plutôt à vous entendre préciser les moyens permettant, selon vous, d'étendre cette protection collective. Or, par votre amendement, vous opérez un recul. Je vous le dis avec tout le respect que j'ai pour vous : un tel renoncement ne va pas dans le sens de la santé publique.
En l'occurrence, le Gouvernement me semble avoir une position très responsable. J'appelle le Sénat à rejeter votre amendement, pour que l'on puisse mettre aux voix les amendements suivants.
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.
M. Simon Uzenat. Madame Muller-Bronn, nous sommes bien d'accord, les Ehpad sont le domicile de leurs résidents. Mais que se passe-t-il lorsqu'un de ces établissements est frappé par une épidémie de grippe ou de covid ? Vous le savez sans doute, comme nous, par le biais de votre entourage : tous les résidents sont cloîtrés dans leur chambre et n'ont donc plus accès aux espaces communs.
Mme Brigitte Bourguignon. Eh oui !
M. Simon Uzenat. C'est un drame pour ces personnes. Elles sont à un moment de leur vie où les interactions sont déjà très compliquées ; et, pendant plusieurs jours, parfois plus longtemps encore, elles se trouvent complètement isolées.
Ces mesures de prévention sont donc, bien entendu, absolument indispensables.
J'aimerais d'ailleurs profiter de l'occasion pour interpeller notre président de séance, même si cela ne relève évidemment pas de sa responsabilité personnelle, sur l'ordre d'examen des amendements.
Puisque nous sommes tous d'accord pour considérer que la représentation nationale devrait être exemplaire en matière de promotion de la vaccination, nos règles de discussion devraient prévoir que les amendements les plus avancés, les plus progressistes à cet égard soient examinés en priorité, avant ceux qui sont moins-disants.
Or, en l'occurrence, ce sont deux amendements identiques synonymes de recul très net – notre collègue Bernard Jomier l'a souligné – qui sont appelés en premier dans cette discussion commune. Je ne puis que le déplorer.
Je souhaite donc que le Sénat établisse à l'avenir une règle claire permettant de démontrer à nos concitoyens que la vaccination est bien une solution d'intérêt général.
M. le président. J'ai eu peur, cher collègue : j'ai cru que vous alliez me demander si j'étais vacciné contre la grippe ! (Sourires.) Je vous confirme que je le suis bien. (Applaudissements.)
L'ordre de présentation des amendements relève, lui, du règlement de notre Haute Assemblée. Là, il n'existe aucun vaccin. (Nouveaux sourires.)
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Que les choses soient claires : je suis évidemment favorable à titre personnel à la vaccination des personnes âgées contre la grippe. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai insisté tout à l'heure sur la responsabilité des familles, qui ont une influence sur la décision de leurs aînés. D'ailleurs, c'est peut-être elles qu'il faudrait chercher à convaincre en premier lieu. Sur ce point, il n'y a pas encore d'obligation.
D'une manière générale, une politique, axée sur la vaccination, de prévention contre la grippe est à l'œuvre dans notre pays depuis des années. Souvenez-vous de la campagne de communication qui a été menée auprès des personnes âgées, à l'origine, de 75 ans et, désormais, de 65 ans, avec un bon permettant de récupérer gratuitement un vaccin en pharmacie.
Vous le voyez, nous avons avancé pour inciter davantage de nos concitoyens à se faire vacciner contre la grippe. Notons que, dans les discussions sur les vaccins, il y a bien eu un avant et un après-covid-19.
Je remercie d'ailleurs les services de la Cnam d'avoir modifié la présentation des bons de vaccination reçus par les personnes âgées de plus de 65 ans cette année. L'an dernier, tout le monde comprenait bien qu'il fallait se faire vacciner à la fois contre la covid et contre la grippe. Cette année, beaucoup avaient l'impression qu'ils n'étaient pas obligés de se faire vacciner contre la covid…
Pour autant, la campagne de communication a touché un large public, et les taux de vaccination contre la grippe sont assez bons.
Aujourd'hui, les Ehpad sont confrontés à un manque d'adhésion, parfois même à une certaine résistance à la vaccination. Pour ma part, je crains les effets de bord. J'ai notamment entendu ce qu'a indiqué notre collègue à propos des personnes âgées prises en charge dans les établissements de santé, par exemple en gériatrie, et amenées non pas à rentrer chez elles, mais à intégrer un Ehpad.
Je vous pose la question : que fait-on lorsqu'un patient âgé souffre de troubles cognitifs ou refuse la vaccination ?