Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 400 rectifié bis est présenté par Mmes Lassarade et Richer, MM. Panunzi et H. Leroy, Mme de La Provôté, MM. Lefèvre et Naturel, Mme Malet, MM. Burgoa et Houpert, Mme Aeschlimann, MM. D. Laurent, Anglars, Cambon et Genet, Mmes Bonfanti-Dossat et Di Folco et MM. de Nicolaÿ, Duplomb et J.M. Boyer.
L'amendement n° 473 rectifié bis est présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, MM. Sol et Somon et Mme Micouleau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 19 et 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l'amendement n° 400 rectifié bis.
Mme Florence Lassarade. En cas de non-conclusion, dans un délai limité, d'un avenant à l'accord conventionnel relatif aux maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) ou à l'accord conventionnel interprofessionnel destiné à développer l'exercice coordonné et les communautés France Santé, les alinéas 19 et 21 précisent que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale peuvent en fixer unilatéralement le contenu par arrêté.
Je propose de supprimer ces dispositions. Une telle mesure reviendrait à substituer l'autorité administrative au dialogue conventionnel, alors que ce dialogue constitue un fondement essentiel du système de santé libéral et du partenariat entre l'État, l'assurance maladie et les représentants des professionnels de santé.
Le cadre conventionnel repose sur la négociation, la coresponsabilité et la recherche d'un équilibre entre les acteurs. Une intervention des ministres, dans un délai particulièrement court, en lieu et place de cette négociation, altérerait la portée du processus conventionnel, fragiliserait la confiance entre les parties et créerait un précédent contraire aux principes de la démocratie sanitaire.
Réaffirmer la nécessité de préserver la primauté du dialogue conventionnel, c'est contribuer à garantir la légitimité, la stabilité et l'appropriation collective des dispositifs d'organisation des soins de premier recours.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Sol, pour présenter l'amendement n° 473 rectifié bis.
M. Jean Sol. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 470 rectifié, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Remplacer le mot :
communautés
par le mot :
structures
La parole est à M. Jean Sol.
M. Jean Sol. Il s'agit d'un amendement de cohérence, étant donné que nous proposons de supprimer la disposition rebaptisant les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) communautés France Santé.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 250 rectifié est présenté par Mme Muller-Bronn, MM. Pointereau, Genet et Rapin, Mmes Di Folco et Evren, MM. Panunzi et D. Laurent et Mme Ventalon.
L'amendement n° 1504 rectifié ter est présenté par MM. Séné, de Nicolaÿ, Klinger, Somon et Anglars et Mmes Schalck, Drexler et Aeschlimann.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
L'amendement n° 250 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l'amendement n° 1504 rectifié ter.
M. Laurent Somon. Cet amendement vise à rétablir l'obligation de négociation avec les organisations représentatives des professionnels de santé, en supprimant la possibilité laissée au Gouvernement d'adopter un amendement aux accords conventionnels interprofessionnels (ACI) par simple arrêté.
Mme la présidente. L'amendement n° 1196, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly et Silvani, M. Corbisez et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
six
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à étendre de deux à six mois le délai au terme duquel doivent aboutir les négociations conventionnelles.
Madame la ministre, cette longue discussion commune, qui touche à près tous les alinéas de cet article, montre que ce travail n'est ni fait ni à faire, comme on dirait chez moi. Si j'étais un peu plus provocatrice encore, je dirais même que cela fait un peu cher le panneau France Santé ! (Rires sur les travées du groupe GEST. – Mmes Laure Darcos et Florence Lassarade sourient.)
C'est tout de même un peu de cela qu'il s'agit. (Mme la ministre le conteste.) Vous dites non, madame la ministre. Sans doute allez-vous essayer de me convaincre qu'il s'agit de l'idée du siècle pour améliorer l'accès aux soins dans notre pays, mais pour l'instant je suis loin d'en être convaincue !
Je pense même que les 150 millions d'euros que le Gouvernement envisage de consacrer à ce dispositif par le biais du présent texte seraient beaucoup mieux employés pour aider les collectivités territoriales à créer des centres de santé publique (CSP), pour améliorer l'accueil des docteurs juniors, dont il a été beaucoup question cette après-midi, ou encore pour créer des postes de professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH) et de chef de clinique, que les collectivités territoriales financent parfois elles-mêmes pour assurer la formation dans nos centres hospitaliers universitaires (CHU).
Ce faisant, nous donnerions des moyens à des dispositifs existants dont nous savons qu'ils fonctionnent déjà. En outre, nous éviterions des effets d'aubaine que nous connaissons également : dans la jungle des aides publiques données sous forme d'incitations, nous savons qu'un certain nombre de dispositifs ne fonctionnent pas.
Enfin, cet article contrevient à plusieurs principes que vous défendez vous-même, comme la liberté d'exercice, la liberté de s'organiser ou encore le fait d'être en phase avec les besoins du territoire et de ne pas répondre à une injonction d'ordre national.
Vraiment, je pense que ce gadget ne convainc personne !
Mme la présidente. L'amendement n° 291 rectifié bis, présenté par MM. Milon et Khalifé, Mme Deseyne, M. Sol, Mme Lassarade, M. Somon, Mme Micouleau, M. Burgoa et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :
Alinéas 24 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean Sol.
M. Jean Sol. Dans sa rédaction actuelle, cet article précise que les accords conventionnels relatifs aux maisons de santé pluriprofessionnelles seront désormais signés par les seules organisations reconnues représentatives de ces structures au niveau national, ce qui revient à écarter les syndicats professionnels du processus de négociation.
Derrière l'apparente volonté de mieux organiser le dialogue avec les maisons de santé pluriprofessionnelles, les alinéas 24 à 27 me semblent profondément dangereux pour l'architecture conventionnelle. Une entité comme AVECSanté ne représente les maisons de santé pluriprofessionnelles qu'en tant que structures juridiques. Lui laisser la capacité de conclure seule des accords conventionnels revient à évincer les représentants légitimes des professionnels de santé libéraux qui y exercent.
Cette mesure, en apparence technique, trahit une volonté claire : modifier les règles de la négociation conventionnelle en limitant le rôle des organisations représentatives des professionnels de santé dans la définition des politiques de santé. Elle aggrave le risque de démantèlement progressif du dispositif conventionnel, qui est un pilier de notre pacte social de santé.
Cet amendement vise ainsi à préserver la capacité des organisations représentatives de professionnels de santé libéraux de négocier l'ACI relatif aux MSP en conservant les règles de signature actuelles.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les amendements présentés sont tous incompatibles avec l'amendement n° 659 de la commission et l'amendement identique n° 797 rectifié quater de Mme Guillotin : la commission y est donc défavorable. Cela étant, je tiens à apporter quelques précisions.
L'amendement n° 1564 rectifié tend à supprimer les dispositions relatives aux communautés France Santé, mais en conservant la mise en place du réseau France Santé. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 1505 rectifié ter vise à renommer les CPTS « CPTS-réseau France Santé », ce qui satisferait la fédération des CPTS, et surtout à créer un comité départemental d'animation du réseau France Santé. Or il ne paraît pas utile de créer encore un nouveau comité. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Les amendements nos 1064 et 1263 rectifié ont pour objet de renommer les CPTS « communautés territoriales France Santé ». La dénomination qui conviendrait le mieux aux CPTS serait sans doute « CPTS-réseau France Santé », même si cet intitulé est un peu long. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Les amendements identiques nos 476 rectifié, 1195 et 1565 rectifié bis visent à supprimer la participation obligatoire des centres de santé et des MSP aux communautés France Santé. L'amendement de la commission tend précisément à supprimer cette disposition. La commission demande donc le retrait de ces trois amendements identiques ; à défaut, l'avis serait défavorable.
L'amendement n° 1399 vise à réserver le label France Santé aux seules structures non lucratives. À mon sens, nous avons besoin de l'ensemble des structures de soins pour améliorer l'accès aux soins dans un territoire donné. Il ne me paraît donc pas pertinent d'exclure a priori certaines structures. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 1400 tend à imposer la désignation d'un référent handicap au sein de chaque structure labellisée. Pour rappel, nous ne savons même pas précisément quelles structures seront éligibles au label France Santé. Après m'être entretenue avec Mme la ministre, j'ai cru comprendre que même une pharmacie travaillant avec une infirmière pourrait obtenir ce label : il serait difficile de nommer un référent handicap en pareil cas. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 453 rectifié vise à inclure les prestataires de santé à domicile dans le réseau France Santé, disposition incompatible avec l'amendement de la commission. Je précise que la loi ne reconnaît que les prestataires de services et les distributeurs de matériel. Il n'est donc pas pertinent de prévoir, via le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), une modification des compétences de ces prestataires. En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement rédactionnel n° 470. L'amendement de la commission tend, en effet, à supprimer l'ensemble des dispositions visées.
Les amendements identiques nos 400 rectifié bis et 473 rectifié bis, ainsi que l'amendement n° 1504 rectifié ter, tendent à supprimer la possibilité pour les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale de définir le contenu des accords conventionnels relatifs au réseau France Santé et aux communautés France Santé. Sur le fond, ils vont dans le bon sens, mais ils sont incompatibles avec l'amendement de la commission. Aussi, la commission demande leur retrait. À défaut, l'avis serait défavorable.
Enfin, l'amendement n° 1196 vise à allonger le délai laissé aux partenaires conventionnels pour signer un accord. Dans l'esprit, j'y suis favorable, mais ses dispositions sont incompatibles avec l'amendement de la commission, de même que celles de l'amendement n° 291 rectifié bis. Nous émettons, de ce fait, un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs – je me tourne en particulier vers vous, monsieur Milon –, j'ai bon espoir de vous convaincre, car, avec cet article, nous proposons un véritable outil d'aménagement du territoire, et je sais combien votre assemblée est sensible à cet enjeu.
Bien sûr, je comprends les critiques. Cette mesure a été annoncée rapidement, et j'ai moi-même eu un mouvement de surprise en en prenant connaissance. Mais j'en ai ensuite mesuré tout l'intérêt, que je vais m'efforcer de vous démontrer.
Il s'agit de répondre à tous nos concitoyens qui se sentent abandonnés parce qu'ils n'ont pas accès aux soins. Bien sûr, France Santé ne va pas créer des médecins ex nihilo, j'en conviens, mais le dispositif peut améliorer sensiblement l'accès aux soins.
Ce n'est pas, comme beaucoup d'entre vous le prétendent, « un truc en plus », une structure de plus ou un dispositif de plus. Je tiens à insister sur ce point.
Avec France Santé, nous allons mener un triple travail, et nous allons d'ailleurs le faire ensemble.
Premièrement, nous allons donner de la visibilité aux structures apparues ces dernières années pour améliorer l'accès aux soins – je pense aux maisons de santé, aux centres de santé ou encore aux bus de santé. Souvent, nos concitoyens ne savent même pas qu'elles existent. Certains d'entre eux ignorent l'existence des CPTS, qui assurent un accès aux soins non programmés.
Le premier objectif de France Santé, c'est donc de rendre lisible l'offre de soins. Cela passe en effet par un logo, mais pas seulement. Dans cette assemblée, vous connaissez l'efficacité des maisons France Services. Vous savez que, lorsqu'ils poussent la porte de l'un de ces établissements, nos concitoyens obtiennent une réponse à leur demande : il en sera de même avec les communautés France Santé. Monsieur Jomier, on ne peut pas dire que les maisons France Services suivent une logique de centralisation.
Nous n'inventons donc rien de nouveau. Simplement, nous rendons visible ce que les professionnels ont fait, sans créer une nouvelle structure.
Mme Céline Brulin. C'est bien ce que je dis : cela fait cher le logo !
Mme Stéphanie Rist, ministre. Pour que nos concitoyens ne se sentent pas abandonnés, pour que, de ce fait, ils ne se tournent pas vers les extrêmes, le logo peut avoir son importance, dès lors qu'il améliore la visibilité de l'offre.
Deuxièmement, nous allons consolider les structures existantes. Les maisons de santé, les centres de santé, les bus de santé qui seront labellisés s'en trouveront renforcés : ils auront accès à un financement de 50 000 euros en moyenne. Le budget pour 2026 contient une enveloppe de 150 millions d'euros à cet effet.
Monsieur Jomier, pour vous répondre, l'objectif de 5 000 structures labellisées vaut pour 2027. Les 150 millions d'euros pour 2026 doivent nous permettre de labelliser 2 000 premières structures. La volonté du Gouvernement est d'en labelliser un maximum, et tant mieux si nous dépassons l'objectif ! Le cas échéant, nous adapterons le financement. L'important est que nos concitoyens disposent d'une offre de soins à côté de chez eux.
Troisièmement et enfin, nous voulons créer des structures là où il n'y a rien. Il existe encore des territoires où, malgré l'organisation des professionnels, l'on n'a toujours pas accès à un médecin dans un délai de 48 heures, où il n'y a ni CPTS ni maison de santé.
Là où c'est le cas, France Santé doit allouer de nouveaux financements pour encourager la création d'un noyau de coopération qui attirera ensuite des médecins.
J'ai donné l'exemple de la pharmacie, parce que c'est le seul endroit où les habitants de certains territoires peuvent avoir rapidement accès à un professionnel de santé. Si le financement dont nous parlons permet de créer, dans cette pharmacie, des téléconsultations avec une infirmière travaillant dans un village voisin, nous apportons un début de réponse à la demande d'accès aux soins de nos concitoyens. Cela pourra servir de base à la création d'une CPTS, puis inciter des médecins à venir s'installer. Par cet intermédiaire, nous parviendrons à créer de l'accès aux soins.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je précise que le dispositif sera piloté par les départements, par les élus des territoires. Cet outil sera à leur disposition dans une logique d'aménagement du territoire, pour améliorer la visibilité de l'offre existante et accroître l'accès aux soins.
Il est vrai que certains amendements adoptés par l'Assemblée nationale visent à imposer une contrainte. Pour ma part, je suis favorable à plusieurs de vos amendements tendant à revenir sur ces dispositions.
Ce n'est pas le ministère qui accordera le label à telle ou telle structure. Nous avons fait en sorte que le cahier des charges soit très souple, car il faut pouvoir s'adapter aux territoires. La structure doit être en mesure d'attribuer un rendez-vous à un médecin conventionné en secteur 1 sous 48 heures et compter au moins un infirmier. Autrement dit, il faut une coopération.
Dès lors qu'elles rempliront ce cahier des charges, toutes les structures qui le souhaitent pourront être labellisées. J'ajoute qu'aucune CPTS n'aura l'obligation d'être labellisée France Santé. Je ne suis d'ailleurs pas fermée à l'idée de renoncer à l'appellation de communauté France Santé, si cela nous permet d'avancer. Honnêtement, si nous pouvons améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens, je ne m'obstinerai pas sur le nom des CPTS.
Nous sommes prêts à accepter des évolutions, qu'il s'agisse du nom ou des contraintes éventuelles. En tout état de cause, nous ne créons pas un énième dispositif, nous n'instaurons pas d'obligation, nous mettons à disposition des professionnels et des élus un outil pour améliorer l'accès aux soins dans leur territoire.
Je sais que des modifications peuvent être apportées au sujet des négociations. C'est l'objet de certains de vos amendements. En effet, nous avons prévu deux modes de financement : le recours au fonds d'intervention régional (FIR) et la négociation avec les professionnels des maisons de santé.
Dans le cas où la négociation n'aboutirait pas, je suis prête à soutenir des amendements visant à revenir à une signature de l'accord négocié avec les syndicats par le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam). Je suis prête à retirer du texte cette partie relative au financement.
Si nous avons prévu que le financement puisse découler des négociations conventionnelles, c'est parce que c'était une demande des maisons de santé elles-mêmes. S'il doit reposer à 100 % sur le FIR, soit : mais je ne crois pas que ce soit ce que souhaitent les professionnels.
En somme, je suis d'accord avec tout ce qui a été dit : ce n'est pas un dispositif en plus ; nous consolidons les structures qui ont besoin d'un tel soutien en leur apportant un financement pour recruter une secrétaire ou un infirmier supplémentaire, ou encore pour louer des bureaux.
Par exemple, le responsable d'une maison de santé m'a dit qu'il avait besoin d'un bureau pour accueillir un docteur junior ou un interne supplémentaire. Ce financement servira à cela. Nous laissons la main aux élus des territoires et aux professionnels !
Les difficultés d'accès aux soins sont une réalité, qui provoque beaucoup d'angoisses. Je connais trop les conséquences de ces difficultés – c'est l'engagement de ma vie – pour chercher aujourd'hui à vous vendre un gadget auquel je ne crois pas.
Si nous nous mettons à la place des professionnels, France Santé ne change rien. C'est un financement supplémentaire qui leur permettra de consolider leur structure en recrutant un infirmier ou une secrétaire et de continuer de proposer des rendez-vous médicaux dans les 48 heures.
Là où il n'y a rien, France Santé pourra créer un mouvement vers l'accès aux soins.
Quant aux patients et à leurs familles, ils auront une meilleure idée des structures existantes. Quand votre mère sort de l'hôpital à la suite d'un accident vasculaire cérébral (AVC), vous ne savez pas forcément vers quel professionnel vous tourner : vous saurez plus facilement quelle porte pousser pour obtenir une réponse à vos questions.
Enfin, les élus départementaux disposeront d'un outil d'aménagement du territoire, car ce sont eux, avec les élus communaux, qui savent où implanter ces maisons France Santé.
Je ne comprendrais pas que vous n'adoptiez pas cet outil, qui n'oblige à rien et ne retire rien.
Pour les raisons que je viens d'indiquer, le Gouvernement est défavorable à tous ces amendements, à l'exception des amendements identiques nos 476 rectifié, 1195 et 1565 rectifié bis, qui visent à supprimer l'adhésion obligatoire aux CPTS ; de l'amendement n° 291 rectifié bis, qui tend à revenir aux modalités de signature par le directeur de la Cnam ; et aux amendements identiques nos 400 rectifié bis et 473 rectifié bis, qui visent à supprimer la négociation sous contrainte. Ces amendements reçoivent, eux, un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Mme la ministre m'a convaincu : non seulement France Santé ne fera pas doublon avec les CPTS, mais ce dispositif apportera un financement supplémentaire, et permettra d'impliquer les élus. Pour ma part, je suis donc plutôt favorable à cet article, à condition que l'agence régionale de santé (ARS) demande à France Santé de bien vouloir mettre en place les soins non programmés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Madame la ministre, j'ai hésité à déposer un amendement et j'ai bien fait d'attendre de vous avoir entendue. Je suis tentée de dire, finalement, tout ça pour ça ! (M. Olivier Rietmann renchérit.)
Nous nous sommes tous émus des annonces gouvernementales. Nous sommes montés au créneau. Or les éléments que vous venez de nous donner relèvent avant tout de l'effet d'annonce.
Je comprends bien que vous n'allez pas inventer des médecins du jour au lendemain pour les installer un peu partout. Vous dites que votre objectif est d'apporter de la visibilité en matière d'accès aux soins. Mais lorsqu'on habite dans un désert médical, on n'a pas besoin d'un panneau France Santé pour savoir où se situe un cabinet, une MSP ou un centre de santé. Cela ne répondra pas à la demande d'accès aux soins.
En revanche, la consolidation de structures existantes par la labellisation me semble intéressante. Car, en réalité, cet article n'apporte rien de nouveau, sinon un label, à des MSP, à des centres de santé et à des cabinets médicaux qui existent déjà.
Mme Annie Le Houerou. Parfaitement !
Mme Émilienne Poumirol. Je pense en particulier aux MSP et aux centres de santé : par définition, ces structures pluriprofessionnelles effectuent un travail de coordination. Le fait de travailler en équipe, sur la base d'un projet de territoire, me semble être l'avenir de la médecine. Mais l'ARS finance déjà ces structures. Les 50 000 euros s'ajouteront-ils à ces aides ?
Enfin, vous dites vouloir favoriser la création d'une offre là où il n'y a rien ; mais, là où il n'y a rien, vous ne parviendrez pas à trouver le moindre médecin. Je le répète, la Cour des comptes nous a appris la semaine dernière qu'il existait quatorze aides à l'installation différentes, dont l'efficacité est quasiment nulle. Cela coûte 200 à 210 millions d'euros par an, et cela n'apporte rien.
Mme la présidente. Il faut conclure, chère collègue.
Mme Émilienne Poumirol. Je ne vois pas comment vous comptez créer de nouveaux centres.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, j'entends vos explications, mais nous ne pouvons pas décorréler l'annonce de la création de France Santé de tout ce qui a été dit sur la santé par le Gouvernement ces derniers temps. À Albi, le Premier ministre a dit beaucoup de choses !
Vous ne pouvez pas déconnecter la transformation des CPTS en communautés France Santé du projet de départementalisation, voire de dépeçage des ARS. Personne n'y comprend rien !
Au total, onze de vos prédécesseurs ont signé une tribune commune pour dire que ce travail était… Je ne répéterai pas l'expression de Mme Brulin, mais, je vous le dis très sincèrement, les acteurs sont décontenancés.
Certes, vous leur annoncez qu'ils obtiendront 50 000 euros : certains sont tentés de les prendre. Mais cette distribution de 130 millions d'euros, sans créer aucune offre, est tout de même problématique – vous l'avez d'ailleurs admis vous-même.
Par ses annonces, M. le Premier ministre a ouvert des pistes intéressantes, qui méritent d'être discutées. L'acte de décentralisation en matière de santé mérite que l'État et les collectivités territoriales s'en saisissent dans le cadre d'un véritable échange.
Vous avez fait preuve de courage en mettant ce dossier sur la table. Mais ne commencez pas en créant France Santé via le PLFSS ; cette espèce de « truc » n'a vocation qu'à assurer un financement.
Tout le monde le sait ici, les représentants des ARS envoient des textos à des élus locaux ou même à des structures pour leur dire : « Nous savons ce qui s'est décidé à Paris, vous aurez tant de fois 50 000 euros, qui voulez-vous financer ? »
Madame la ministre, vous avez lancé une mécanique qui n'a pas de sens. (Mme Annie Le Houerou acquiesce.) Arrêtons-la et réfléchissons ensemble, d'autant que, je le répète, M. le Premier ministre a ouvert des pistes intéressantes.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. J'aimerais partir d'un autre postulat, si vous le permettez : la santé relève du régalien, du moins jusqu'à présent. Parler de décentralisation revient à changer de paradigme, et je ne suis pas sûr qu'il faille le faire.
J'ajoute un second postulat sur lequel nous serons sans doute tous d'accord : les aides que déploient localement les collectivités territoriales partent toutes d'une bonne intention – il n'est pas question de porter un jugement à ce titre –, mais elles ont souvent provoqué des problèmes incommensurables entre communes, de commune à établissement public de coopération intercommunale (EPCI), d'EPCI à EPCI ou de département à département. En effet, ces aides partent dans tous les sens...
Dans un récent rapport demandé par la commission des affaires sociales, la Cour des comptes pointe, de manière très intéressante, 200 millions d'euros d'aides d'État dont la pertinence est impossible à connaître. Autrement dit, ces aides sont sûrement utiles, mais l'on ne sait pas à quoi... Et, pour les aides des collectivités territoriales, on nous dit de même : « On ne sait pas, messieurs-dames ! » Il y a tout de même un problème.
Il faudrait aborder ce système en suivant, dans un premier temps, une logique de déconcentration, et non de décentralisation.
Les maisons France Santé sont aussi à la main des territoires. Pour construire de premiers schémas, on pourrait se fonder sur l'existant, notamment sur les structures créées par les territoires. Cette logique ascendante me semble la plus intelligente. Elle permettrait de construire un ensemble beaucoup plus cohérent que ce que l'on nous propose aujourd'hui, même si l'on ne fait pas merveille séance tenante.
Je ne crois pas au coup de baguette magique. En revanche, je vois bien le résultat auquel nous sommes parvenus grâce aux maisons France Services qui – ne l'oubliez pas – ont elles aussi été décriées sur ces travées, dès leur création, alors qu'elles sont désormais d'une efficacité incroyable. (Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
Nous devons partir des territoires, j'en suis convaincu, mais dans une logique de déconcentration et non de décentralisation, quand il s'agit du domaine régalien.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, j'entends vos propositions. Vous parlez de visibilisation, de consolidation, de créations de postes. Pour ma part, je vous réponds : « Formidable ! » Face à la désertification, nous devons défendre le maillage territorial.
Toutefois, je m'interroge : on nous propose un label, mais sans que nous ne sachions rien de plus, comme s'il n'y avait rien derrière.
Qu'allons-nous visibiliser ? Les pharmacies ? Mais sont-elles vraiment des lieux de soins ? Si l'on a une pharmacie à une demi-heure de chez soi, faut-il considérer que l'on pourra être soigné ? Est-il bien raisonnable de prétendre que c'est la même chose d'habiter près d'une pharmacie, d'un hôpital ou d'une maison de santé ?
Vous parlez d'un label. Dans le cas des maisons France Services, ou bien de France Travail, le label est clairement identifiable, car il renvoie à un service qui se décline partout de la même manière. Mais, en l'occurrence, nous ne savons pas de quoi l'on parle. Comment peut-on voter de tels crédits ?
Vous n'avez pas répondu au sujet des établissements lucratifs et non lucratifs. Or ce point a toute son importance : on ne peut pas accepter que l'argent public finance n'importe quoi.
Paris dénombre 200 centres de santé. Parmi eux, les centres solidaires sont en train de mourir. Si les centres publics perdurent, c'est grâce au soutien de la mairie. En revanche, les centres de santé privés se portent très bien : j'espère que ce n'est pas à eux que le label est destiné...
Comment pouvez-vous croire que les parlementaires que nous sommes accepteront de voter cette mesure dans de telles conditions, au petit bonheur la chance ? Ce n'est pas responsable. Il aurait fallu présenter un projet de loi dédié : alors, nous aurions pu débattre.