Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Si beaucoup de choses ont été faites, c'est seulement parce qu'un scandale a éclaté. Le problème est que l'on rebondit de scandale en scandale : après les Ehpad, il y a eu les crèches !

Certes, des contrôles ont été réalisés, notamment par l'Igas. Mais les mécanismes qu'il s'agit de contrer sont puissants, et les grands groupes sont très agiles. Nous parlions la semaine dernière de la fraude, qui se redéploie et se reconfigure en permanence : c'est la même chose dans tous les domaines !

Cinq groupes font aujourd'hui des profits énormes…

M. Olivier Rietmann. Les salauds !

Mme Raymonde Poncet Monge. … et vous ne vous demandez pas d'où viennent ces profits. Je l'ai dit : si vous ne vous posez pas la question, c'est que vous ne cherchez pas la réponse !

La disposition que nous vous soumettons figurait déjà dans la contribution que j'avais fait inscrire, au nom du groupe écologiste, dans le rapport d'information de notre commission des affaires sociales sur l'affaire Orpea : vous y trouverez des propositions que j'avais élaborées, à l'époque, avec un expert anglais.

Je peux d'ores et déjà vous annoncer qu'un scandale éclatera dans les cliniques privées psychiatriques.

Le moment venu, vous réagirez, je n'en doute pas !

Quant au secteur sanitaire, je n'en parle même pas, vu les profits que réalisent les grands groupes du secteur. Mais, là encore, vous refusez de poser cette question simple : d'où viennent ces profits ?

Vous refusez d'instaurer les mécanismes qui permettraient d'enrayer ou d'entraver la réalisation de profits scandaleux par ces grands groupes privés, dont les dirigeants se gavent, quand les professionnels qu'ils emploient doivent se contenter de salaires indignes ! Cette situation est insupportable. (M. Olivier Rietmann manifeste son agacement.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1342 rectifié et 1731 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 55 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 114
Contre 230

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente. L'amendement n° 1739 rectifié, présenté par Mmes Lubin, Le Houerou et Conconne, M. Kanner, Mmes Féret et Canalès, MM. Jomier et Fichet, Mmes Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 313-7 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Les autorisations des établissements et services à caractère expérimental mentionnés au 12° du I de l'article L. 312-1 sont accordées pour une durée déterminée, qui ne peut excéder cinq ans. Elles peuvent être renouvelées sur la base des résultats positifs d'une évaluation, dans la limite d'une durée totale de dix ans. À l'issue de cette période expérimentale et sous réserve d'une nouvelle évaluation positive, l'établissement ou le service peut être autorisé dans les mêmes conditions et pour la durée prévue au I de l'article L. 313-1. »

 

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Nous voulons, par cet amendement, sortir de l'impasse juridique dans laquelle se trouvent les structures médico-sociales pour personnes handicapées ou pour personnes âgées qui bénéficient actuellement d'un statut expérimental, au sens du code de l'action sociale et des familles.

Ces structures sont en effet autorisées par les conseils départementaux et les agences régionales de santé, à la suite d'appels à projets, pour une durée maximale de dix ans.

Nous proposons d'autoriser les établissements et services à caractère expérimental à se prévaloir du I de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles, afin qu'ils puissent bénéficier d'un renouvellement de leur autorisation pour une durée de quinze ans, sans renoncer à leur statut expérimental.

Les expérimentations en matière sociale et médico-sociale jouent un rôle déterminant dans le cadre de l'innovation territoriale et de la transformation de l'offre, lesquelles sont nécessaires pour améliorer la réponse aux besoins des personnes concernées et de leurs aidants.

Les autorités de contrôle et de tarification, agences régionales de santé et départements, ont recours au statut de structure expérimentale lorsqu'elles ne trouvent pas d'autre catégorie d'établissements ou de services médico-sociaux adéquate.

Dans les faits, l'attribution de ce statut dérogatoire, permise par les textes, s'avère très fréquemment une impasse au terme des dix ans d'expérimentation, car ces structures innovantes, une fois leur pertinence constatée, n'ont d'autre sort que de basculer dans une autre catégorie, alors même qu'elles n'entrent pas dans le cadre normatif existant.

Parmi les belles expériences qui n'entrent pas dans les cases juridiques en vigueur, on peut ainsi citer Les bobos à la ferme, les maisons de répit, les résidences de répit partagé, les Maisons de Vincent et, bien entendu, dans mon territoire, le Village landais Alzheimer Henri-Emmanuelli.

L'assouplissement et la clarification que nous proposons sont donc nécessaires pour permettre à ces structures, lorsqu'elles ont donné toute satisfaction au bout de dix ans, de garder leur statut expérimental pendant une nouvelle période de quinze ans, durée d'autorisation de droit commun pour tous les ESMS de France.

Il s'agit aussi d'éviter qu'elles ne perdent leur spécificité, leur caractère innovant, sans pour autant devoir, pour chaque cas particulier, créer dans le code de l'action sociale et des familles de nouvelles catégories d'établissements, car la simplification, en cette matière comme dans d'autres, est souhaitable et souhaitée.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. La commission avait initialement émis une demande de retrait, mais, ma chère collègue, quelques subtilités m'avaient échappé et vous avez bien voulu nous apporter des explications complémentaires.

Je partage, comme sans doute tous nos collègues, votre volonté de faciliter la pérennisation des structures expérimentales qui ont fait leurs preuves.

La difficulté est, comme vous l'avez très bien expliqué, qu'au bout de dix ans leur statut expérimental prend fin sans que rien soit prévu : ces établissements ne peuvent être agréés, faute d'entrer dans les critères. Or, par définition, s'agissant d'une expérimentation, il n'y a pas de critères ! On tourne donc en rond, si je puis dire.

Au nombre de ces expérimentations mises en œuvre selon des modalités innovantes, on compte notamment le Village landais Alzheimer, dont vous nous avez souvent parlé en commission, ma chère collègue.

Nous devons encourager ces initiatives, qui nous montrent l'une des voies à suivre pour transformer le secteur médico-social en accord avec les souhaits des personnes accompagnées.

La commission n'ayant pas pu réexaminer son avis, c'est à titre personnel que je vous invite, mes chers collègues, à voter massivement pour cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Je remercie Mme la sénatrice Lubin pour cet amendement qui, s'il est adopté, permettra en effet à certaines structures qui n'entrent dans aucune case de continuer à bénéficier de leur statut expérimental, statut ô combien nécessaire, comme vous l'avez souligné, pour accompagner la transformation de l'offre dans le secteur médico-social.

Le Gouvernement émet donc, comme Mme la rapporteure, un avis favorable sur cet amendement. (Très bien ! sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Madame la rapporteure, madame la ministre, je vous remercie de nous avoir entendus, car l'adoption de cet amendement représente un nouveau souffle non seulement pour notre Village landais Alzheimer, mais aussi pour toutes les structures – j'en ai cité certaines, mais il en existe bien d'autres – qui apportent des réponses novatrices en matière d'accueil des personnes dépendantes, qu'elles soient âgées ou en situation de handicap. De belles choses, de beaux projets, émergent un peu partout dans notre pays.

En votant cet amendement – présumant d'une issue heureuse, j'en remercie par avance mes collègues –, nous donnerons une bouffée d'air pur à toutes ces structures, et nous permettrons leur pérennisation.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1739 rectifié.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.) – (Applaudissements.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 36.

L'amendement n° 1751, présenté par Mmes Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 2324-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2324-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2324-3-…. – I. – Dans des conditions fixées par décret après avis du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge, les établissements et services relevant du présent chapitre transmettent périodiquement à la Caisse nationale des allocations familiales des informations relatives à leur capacité d'accueil, permanente et temporaire, le nombre, le niveau de qualifications et la masse salariale des personnels affectés à l'accueil.

« II. – Sont également fixées par décret après avis du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge les modalités de publication, par la Caisse nationale des allocations familiales, d'indicateurs applicables aux établissements et aux services relevant du présent chapitre, dans un format clair et accessible aux familles. Ces indicateurs portent notamment sur l'activité et le fonctionnement de ces établissements et de ces services, y compris en termes budgétaires. Ils portent également sur l'adéquation entre les besoins quantitatifs et qualitatifs de personnels et les personnels effectivement recrutés et affectés, ainsi que sur le taux annuel de rotation de ces personnels. Ces indicateurs portent par ailleurs sur la qualité de l'accueil, notamment sur la proportion de repas servis respectant les dispositions de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

« III. – Après une mise en demeure dont la durée ne peut être inférieure à trois mois, la Caisse nationale des allocations familiales peut suspendre les financements alloués aux établissements et les services relevant du présent chapitre ne respectant pas les I et II du présent article. »

La parole est à Mme Marion Canalès.

Mme Marion Canalès. La qualité et la sécurité de la prise en charge sont au cœur des priorités de notre système d'accueil des jeunes enfants. Reste à traduire en actes cet objectif, qui est largement partagé dans notre hémicycle.

À cette fin, une évolution partielle du mode de financement des établissements d'accueil pourrait constituer un levier d'amélioration continue.

L'idée que nous vous soumettons, mes chers collègues, consiste à calquer dans le domaine de la petite enfance un dispositif qui existe déjà dans les établissements de santé, à savoir le mécanisme d'incitation financière à l'amélioration de la qualité (Ifaq), dont nous avons déjà discuté à l'occasion de débats précédents.

Ainsi conviendrait-il, sur le modèle de l'Ifaq, de produire des indicateurs relatifs à la qualité de la prise en charge des enfants, à la qualité de vie au travail et à la prévention de la maltraitance.

Ces indicateurs permettraient à la CAF de vérifier que les groupes se conforment à leurs obligations de qualité, comme l'ARS le fait pour les établissements de santé. Si tel n'était pas le cas, la CAF pourrait, après avertissement, suspendre provisoirement les financements accordés aux établissements concernés, jusqu'à leur mise en conformité.

Vous le voyez, chers collègues de la majorité sénatoriale, l'objectif n'est pas de taxer. Ce n'est pas le levier fiscal que nous vous proposons d'activer – celui-ci, nous l'avons compris, n'est guère incitatif. Notre objectif est simplement d'améliorer la qualité de la prise en charge des jeunes enfants dans les crèches.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Je regrette de devoir briser la belle unanimité qui s'est exprimée à propos de l'amendement précédent.

La question de la qualité mérite d'être posée, nous ne le nions pas. Laurence Muller-Bronn, Émilienne Poumirol et moi-même avons d'ailleurs pu le vérifier en élaborant notre rapport d'information Pour un contrôle des crèches au service de la qualité de l'accueil des enfants.

La commission considère cependant qu'il ne serait pas opportun d'adopter un tel amendement, car le financement des crèches relève d'un circuit financier indépendant de la publication d'indicateurs, lesquels nécessitent, au demeurant, la production d'une nomenclature précise et un travail d'expertise – il y va de l'objectivité des mesures.

Si cette discussion a le mérite d'ouvrir le débat, les mesures proposées ne relèvent pas du financement de la sécurité sociale ; elles devraient plutôt faire l'objet d'une proposition de loi spécifique.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. La loi du 18 décembre 2023 pour le plein emploi a d'ores et déjà prévu que les établissements d'accueil du jeune enfant font l'objet tous les cinq ans d'une évaluation et qu'ils publient des indicateurs relatifs à leur activité et à leur fonctionnement.

Il est également possible d'aller jusqu'à supprimer l'autorisation accordée à l'établissement en cas de non-respect de ses obligations, ce qui suspend les versements de la CAF. Votre amendement est donc satisfait, madame la sénatrice : demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Qu'un texte prévoie déjà l'obligation de publier des indicateurs, je l'entends, madame la ministre.

Cela étant, des auditions organisées par nos collègues Henno, Poumirol et Muller-Bronn dans le cadre de la préparation de leur rapport ressort une forte demande de production d'indicateurs clés – j'y insiste –, dont la mobilisation permettrait à nos CAF locales d'adresser des demandes précises aux établissements.

Je pense par exemple à la mesure du taux d'encadrement dans les pouponnières de la protection de l'enfance, qui sont sous tension : le décret pris récemment pour améliorer l'accueil des enfants de moins de trois dans ces établissements était très attendu.

Notre amendement vise, quant à lui, les établissements d'accueil du jeune enfant. La mesure que nous proposons n'est absolument pas coercitive. Il s'agit simplement de prévoir la mise en place d'indicateurs clés, afin que les CAF puissent repérer les difficultés et, le cas échéant, avertir les établissements concernés, avant éventuellement de suspendre les financements accordés.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1751.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1331, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l'application de l'article 42 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 et de l'article 83 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Ce rapport identifie les sous-financements rencontrés par les établissements de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale privée à but non lucratif sur l'ensemble du territoire, dans le cadre de l'extension de la prime Ségur pour leurs salariés.

Il identifie également les acteurs n'ayant pas rempli leurs obligations de financement vis-à-vis de ces établissements et quantifie le montant de ce sous-financement.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Voilà une nouvelle demande de rapport – son destin ne fait aucun doute… Comme le problème évoqué perdure, nous sommes condamnés à y revenir chaque année.

Positif dans son principe, le déploiement du Ségur de la santé continue de poser des problèmes de financement à la sécurité sociale, mais aussi aux établissements médico-sociaux à but non lucratif, qui doivent obligatoirement le mettre en œuvre – ils appliquent le droit du travail : c'est bien.

Les mesures du Ségur ont été décidées, vous le savez, sans financement : cela se traduit, pour les comptes sociaux, par 13 milliards d'euros de dépenses non financées.

Les établissements non lucratifs subissent eux aussi la non-compensation des revalorisations salariales issues de l'accord. En raison de leur caractère non lucratif, ils ne peuvent générer les marges supplémentaires nécessaires au financement de ces mesures ; ils ont en conséquence particulièrement besoin de compensations financières.

Il est paradoxal que la mise en œuvre d'une mesure aussi positive que la prime Ségur aboutisse à mettre en difficulté les établissements et services sociaux et médico-sociaux non lucratifs. L'octroi de cette revalorisation a été une victoire, mais il s'agit en définitive d'une victoire amère, qui commence à se retourner contre les établissements. Il importe donc de régler enfin la question de la compensation.

Mes chers collègues, j'appelle votre attention sur la dernière enquête réalisée par Axess, la confédération des employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social privé non lucratif, qui révèle que plus de huit structures sur dix n'ont reçu soit aucun financement soit, pour beaucoup d'entre elles, une part seulement des montants attendus pour financer les revalorisations liées au Ségur. Si, dans certains cas, la situation commence à s'améliorer, il n'y aura aucun règlement rétroactif pour combler les déficits de 2024 et de 2025.

Cette situation met en péril nos comptes sociaux ainsi que ces établissements eux-mêmes.

Faisant écho aux demandes des acteurs du médico-social non lucratif, nous appelons donc le Gouvernement à dresser une fois pour toutes un état des lieux des difficultés rencontrées.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. Je ne minore pas l'importance du sujet ; nous allons bientôt débattre de la compensation des revalorisations salariales du Ségur, objet de l'article 37.

En attendant, s'agissant d'une demande de rapport, vous connaissez déjà ma réponse, ma chère collègue : avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Par cet amendement, vous souhaitez que le Gouvernement remette un rapport sur l'application de l'article 42 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 et de l'article 83 de la LFSS pour 2023.

Or l'application de l'article 42 de la LFSS 2022 a déjà fait l'objet d'un rapport remis au Parlement, en application de l'article 83 de la LFSS 2023.

Votre amendement est donc satisfait, madame la sénatrice ; je vous invite à le retirer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. J'entends ce que vous dites, madame la ministre, mais je ne parle pas de 2022. Je pense à tous ces établissements qui, après plusieurs années d'attente, vont peut-être bénéficier enfin d'une compensation un peu plus satisfaisante de la prime Ségur, mais qui, pour solde de tout compte, conserveront un passif au titre des années 2023 et 2024, exercices pour lesquels, leur dit-on, il n'y aura aucune compensation.

C'est sur ce point que je demande une étude actualisée.

Si vous faites faire une telle étude, vous constaterez par ailleurs qu'il y a des trous dans la raquette du Ségur. Comme je le dis à chaque examen du budget de la sécurité sociale, la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile, la BAD, n'est toujours pas éligible au Ségur, au motif que, ne relevant pas de la branche autonomie, elle n'est pas prise en compte dans son objectif global de dépenses (OGD).

Je réitère donc ma demande, dont vous me dites qu'elle est satisfaite, d'un rapport actualisé sur cette question.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1331.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1242, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :

Après l'article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2026, un rapport évaluant l'application des dispositions issues de l'article 44 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 relatives aux revalorisations salariales dans le cadre du Ségur de la santé, au regard de leur mise en œuvre dans les établissements et services médico-sociaux relevant de la branche autonomie.

Ce rapport analyse notamment les effets de ces revalorisations sur les dépenses de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), les écarts de rémunération constatés entre les personnels des établissements publics et ceux des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) relevant d'employeurs associatifs et les incidences éventuelles sur l'attractivité des métiers et la qualité de la prise en charge à domicile.

La parole est à M. Aymeric Durox.

M. Aymeric Durox. L'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a permis de traduire dans les comptes sociaux les revalorisations salariales du Ségur de la santé.

Toutefois, les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) qui relèvent d'employeurs associatifs n'en bénéficient pas pleinement, ce qui crée des écarts de rémunération notables au sein de la branche autonomie, financée par la CNSA.

Par cet amendement, nous demandons un rapport au Gouvernement sur l'application concrète d'une disposition existante, inscrite à l'article 44 de la LFSS pour 2022, et sur ses effets financiers pour la CNSA, dans un objectif d'équité et d'efficacité de la dépense publique.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. Le sujet est d'importance : il existe une distorsion de prise en charge de la prime Ségur, ce qui crée des effets indésirables ou collatéraux. En effet, certaines structures, les Ssiad en particulier, ont du mal à recruter, car, à qualification égale, les personnels préféreront exercer dans des établissements où ils pourront bénéficier du Ségur.

Vous connaissez toutefois la position de la commission à l'égard des demandes de rapport : avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Vous demandez un rapport sur l'application des dispositions de l'article 44 de la LFSS pour 2022 relatives au financement de la prime Ségur dans les Ssiad associatifs.

Je précise, tout d'abord, que l'article 44 de la LFSS pour 2022 porte en réalité sur les règles de financement des Ssiad ; c'est bien l'article 43 qui porte sur le financement du Ségur, notamment dans ces services.

Sur le fond, votre demande d'un rapport sur les oubliés du Ségur est satisfaite. Un rapport a déjà été remis au Parlement par le Gouvernement, en application de l'article 83 de la LFSS pour 2023.

Par ailleurs, les annexes au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 contiennent des éléments d'éclairage supplémentaires sur le coût des revalorisations salariales.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1242.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 948, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation de la mise en œuvre de l'article 62 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Ce rapport évalue notamment la possibilité d'instaurer une obligation, pour tout établissement d'hébergement pour personnes âgées défini au 6° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, d'avoir un nombre minimal de places habilitées à l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il s'agit de demander une évaluation de la possibilité et de l'opportunité d'instaurer l'obligation, pour tout établissement d'hébergement pour personnes âgées – y compris, donc, ceux du privé à but lucratif –, de disposer d'un nombre minimal de places, déterminé par décret, habilitées à l'aide sociale à l'hébergement (ASH) des personnes âgées.

En effet, les personnes éligibles à l'ASH doivent choisir un établissement qui dispose de places habilitées à recevoir des bénéficiaires de cette aide sociale.

Or, comme le montre la Drees dans une note de 2025, les Ehpad des grands groupes offrent peu de places habilitées à l'ASH : 19 % seulement de leurs places sont habilitées, et cette proportion n'est que de 25 % si l'on considère l'ensemble des établissements privés lucratifs.

Il y a là l'un des mécanismes explicatifs du différentiel de profitabilité, que j'évoquais précédemment, entre ces grands groupes et les autres structures.

Par comparaison, en effet, les Ehpad privés non lucratifs et les Ehpad publics offrent respectivement 84 % et 93 % de places habilitées à l'ASH.

C'est pourquoi nous demandons ce rapport. En instaurant une obligation, qui s'appliquerait y compris aux Ehpad des grands groupes privés, de disposer d'un nombre minimal de places habilitées à l'aide sociale à l'hébergement, nous taririons l'une des sources de la profitabilité indigne, ou du moins excessive, de certains groupes.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur. Alain Milon rappelait, voilà quelques jours, que ce PLFSS contient soixante-dix demandes de rapport.

La commission ne dérogera pas à ses habitudes en la matière : avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?