M. Aymeric Durox. La suppression de la demi-part fiscale des veuves et des veufs, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui fut confirmée sous la présidence de François Hollande, est vécue à juste titre comme une injustice par nos aînés.
Cette mesure a provoqué une augmentation brutale de leur revenu fiscal de référence, certains d'entre eux devenant ainsi éligibles à certains impôts.
Certes, un pas a été fait avec le rétablissement de la demi-part pour les veuves d'anciens combattants, mais cet aménagement reste bien insuffisant et ne concerne qu'un nombre restreint de personnes.
Cet amendement vise par conséquent à rétablir la demi-part fiscale pour tous les veufs et toutes les veuves.
Dans le contexte actuel, il est crucial de protéger davantage ceux que la vie n'a pas épargnés. Cette avancée en matière de justice fiscale permettrait à nos aînés de vivre dans de bonnes conditions, sans être assujettis à des impôts supplémentaires.
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l'amendement n° I-1011.
M. Thierry Cozic. Cet amendement est commun aux groupes SER, CRCE-K et GEST…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Et au Rassemblement national…
M. Thierry Cozic. Nous proposons de rétablir la demi-part fiscale des veufs et des veuves.
Nous connaissons aujourd'hui les effets négatifs de la suppression progressive de la demi-part des veufs et veuves, qui a été décidée en 2008, sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Le revenu fiscal de référence des veufs et des veuves a alors connu une hausse brutale, au point que de nombreux retraités se sont retrouvés imposables ou privés d'exonérations et d'aides auxquelles ils étaient éligibles. À la douleur du deuil, l'État a donc ajouté une peine fiscale !
Le présent amendement vise à rétablir pleinement la demi-part fiscale pour l'ensemble des veufs et des veuves, et non pour une minorité seulement d'entre eux.
En effet, si les veuves d'anciens combattants ont bénéficié du rétablissement de leur demi-part, chacun peut faire le constat que ce correctif partiel reste insuffisant et laisse de côté la grande majorité des personnes concernées, notamment celles qui vivent de petites pensions et qui voient leur pouvoir d'achat s'éroder année après année.
Cet amendement n'est pas un geste comptable, c'est un rappel de notre devoir républicain envers les plus fragiles : il s'agit de refuser que le deuil devienne un impôt et de réaffirmer que notre modèle social ne doit pas abandonner ceux qui ont tant perdu.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l'amendement n° I-1428.
M. Pierre Ouzoulias. J'ajouterai deux arguments à ceux qui viennent d'être avancés.
Tout d'abord, contrairement à une fiction qui est parfois entretenue, y compris dans cette enceinte, le coût de la vie n'est pas divisé par deux lorsqu'un couple cesse d'exister. En effet, des frais fixes, qui sont importants, reposent sur le dernier survivant.
Ensuite, point important, les hommes et les femmes ne sont pas égaux face à la mort, comme vous le savez. Aujourd'hui, ce sont les femmes qui se retrouvent le plus souvent dans la situation du veuvage. Or, en moyenne, leurs pensions sont plus faibles et certaines d'entre elles connaissent de grandes difficultés matérielles.
En supprimant cette demi-part, on a ajouté encore à leur malheur et à leurs difficultés financières. Le rétablissement de ce mécanisme constituerait une mesure forte accordée à ces femmes.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l'amendement n° I-1496.
M. Thomas Dossus. Cet amendement a été très bien défendu par mes deux précédents collègues.
L'objectif est triple : neutraliser les effets fiscaux induits par la suppression de la demi-part fiscale ; assurer une meilleure prise en compte des situations particulières ; prévenir toute dégradation supplémentaire du niveau de vie des personnes isolées.
Il s'agit donc d'un amendement de justice fiscale envers nos aînés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L'avis de la commission est le même que chaque année, puisque ces amendements sont déposés régulièrement, projet de loi de finances après projet de loi de finances.
La mesure proposée s'appliquerait de manière indiscriminée sans cibler les contribuables ayant des revenus modestes.
Le droit existant comporte déjà, par ailleurs, des dispositions destinées à aider les veufs et les veuves qui vivent seuls et se retrouvent dans des situations particulières nécessitant un accompagnement. Je pense par exemple à l'attribution d'une demi-part fiscale pour les personnes vivant seules ayant supporté pendant cinq ans la charge principale d'un enfant ; je pourrais également mentionner la pension de réversion.
Des dispositifs ciblés existent donc déjà, quand la mesure ici proposée s'appliquerait sans aucune distinction de ressources.
Mes chers collègues, si vous souhaitiez procéder à un ciblage plus juste, il conviendrait de rédiger ces amendements de manière différente.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je partage l'avis du rapporteur général.
Nous débattrons à l'article 6 de la réforme de l'abattement de 10 % pour les retraités, système déjà assez favorable aux veufs.
En effet, le plafond de cet abattement, qui est fixé actuellement à 4 400 euros, est calculé par foyer, que celui-ci soit composé d'une seule personne ou d'un couple. Voilà qui constitue d'ailleurs une très grande différence avec l'abattement pour frais professionnels de 10 % dont bénéficient les actifs, car ce dernier est individualisé : dans ce cas, le montant de l'abattement est différent selon que l'on est célibataire ou que l'on vit en couple, tandis que, pour les retraités, j'y insiste, l'abattement s'applique pour le foyer dans sa globalité, que l'on soit un ou deux.
La niche fiscale que constitue la demi-part octroyée aux personnes qui ont élevé un enfant pendant au moins cinq années au cours desquelles ils vivaient seuls coûte 650 millions d'euros.
L'existence de cette niche est ailleurs assez contestée : elle est constitutive d'une situation dans laquelle certains contribuables bénéficient d'un avantage fiscal, dont ne disposent pas les autres personnes vivant seules, au seul motif qu'ils ont élevé seuls un enfant il y a de cela trente ou quarante ans. Les nombreuses évaluations qui ont été faites de ce mécanisme sont donc plutôt critiques. Mon propos n'est pas du tout de le remettre en cause, mais j'indique simplement que nous sommes parvenus à un point d'équilibre.
C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Ces amendements procèdent d'une volonté d'équité. Il est vrai que, pour les veuves et les veufs, il s'agit d'un problème bien réel.
Néanmoins, il y a quelques années – je parle sous l'autorité du rapporteur général et du président de la commission des finances –, nous avions adopté un amendement pour rétablir la demi-part fiscale des veuves du monde combattant âgées de plus de 74 ans. Il s'agissait d'un geste de solidarité et d'équité à l'égard de ces personnes isolées. Il est vrai que, comme cela a été dit, cette mesure ne concerne malheureusement qu'une partie des veuves et des veufs.
L'état de nos finances publiques est ce qu'il est. Chacun doit en tenir compte, même si nous sommes toutes et tous favorables à la solidarité et à l'équité. C'est pourquoi le groupe Les Indépendants se ralliera à la position du rapporteur général et de la ministre.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Depuis trois semaines, on entend un certain nombre de propos publics, ici et là – ils font d'ailleurs les gros titres dans la presse –, autour du mantra de la « folie fiscale ».
J'ai entendu les propos du rapporteur général et de Mme la ministre : ils nous expliquent qu'à la suite de l'adoption de différentes dispositions techniques, ces dernières années, des corrections ont été apportées. En vérité, il reste des trous dans la raquette.
Dans mon département, le Maine-et-Loire, des veuves de mineurs décédés précocement, alors qu'ils ont contribué à redresser le pays autrefois, sont victimes de la suppression de la demi-part fiscale. Elles sont non seulement touchées par les conséquences de cette réforme sur leur impôt sur le revenu, mais aussi par ses effets de bord, « en cascade », sur le quotient familial.
Nous devons apporter des réponses claires et compréhensibles à tous ceux qui, devenus veufs ou veuves, n'ont pas les moyens de se faire accompagner de fiscalistes et voient leurs revenus, quoique modestes, passer juste au-dessus du seuil, se retrouvant imposables.
Il est impératif que nous ayons un discours cohérent à ce sujet. Par ces amendements, nous vous proposons de baisser la fiscalité pour ceux qui en ont besoin : ce n'est pas un tabou !
Nous devrons par ailleurs, en adoptant par la suite d'autres amendements, appeler ceux qui ont des revenus plus élevés à contribuer à la solidarité nationale.
En l'espèce, s'il est vrai que des dispositifs ont permis de corriger à la marge la situation, nous devons néanmoins aller encore plus loin, notamment pour répondre au problème que je viens de soulever. Il est absolument scandaleux que des veuves de mineurs continuent d'être pénalisées, comme l'ont été les veuves d'anciens combattants, par une disposition qui a été adoptée il y a plus d'une quinzaine d'années !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je ne ferai qu'une observation.
Le niveau de vie moyen des veuves de plus de 75 ans est inférieur en moyenne de 11 % à celui des femmes en couple, lui-même inférieur à celui des hommes. Il ne s'agit que d'une moyenne : l'écart peut s'aggraver pour certaines d'entre elles, en fonction de leur condition sociale – et je ne parle pas de la pénibilité du travail qu'elles ont exercé.
Voilà une observation qui devrait vous inciter, mes chers collègues, à voter ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-856, I-1011, I-1428 et I-1496.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 64 :
| Nombre de votants | 345 |
| Nombre de suffrages exprimés | 343 |
| Pour l'adoption | 122 |
| Contre | 221 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-2345 est présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Ruelle et Mme Briante Guillemont.
L'amendement n° I-2416 rectifié est présenté par M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Ros, Lurel, Bourgi, Omar Oili et Temal, Mmes Blatrix Contat, Matray et Narassiguin, M. Mérillou, Mme Bélim, MM. Uzenat, Stanzione, Ziane et Tissot et Mmes Brossel et Monier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article 197 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... Par dérogation à l'article 164 A, pour le calcul du taux de l'impôt français sur l'ensemble des revenus mondiaux prévu au a du présent article, les prestations compensatoires prévues au I de l'article 199 octodecies sont admises en déduction sous les mêmes conditions et limites, lorsque ces prestations sont imposables entre les mains de leur bénéficiaire en France et que leur prise en compte n'est pas de nature à minorer l'impôt dû par le contribuable dans son État de résidence. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour présenter l'amendement n° I-2345.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Cet amendement vise à aligner le traitement fiscal de la prestation compensatoire sur celui de la pension alimentaire pour nos compatriotes établis à l'étranger.
Nous nous appuyons, pour faire cette proposition, sur plusieurs arguments juridiques solides.
Premièrement, la pension alimentaire et la prestation compensatoire procèdent d'une même logique juridique. Dans les deux cas, il s'agit d'une obligation familiale qui a été décidée et fixée par un juge. Celle-ci ne résulte pas d'un choix et n'est pas une dépense facultative.
Deuxièmement, la pension alimentaire et la prestation compensatoire procèdent également d'une même logique fiscale. Dans les deux cas, il s'agit de sommes venant en diminution du revenu disponible : le débiteur ne les conserve pas. Or la jurisprudence fiscale est constante sur ce point : un revenu n'est imposable que s'il est effectivement disponible, principe justement appliqué aux pensions alimentaires.
Traiter différemment sur le plan juridique et fiscal deux transferts obligatoires analogues semble totalement incohérent.
Notre assemblée ne découvre pas ce problème. Je souhaite rappeler à la commission que la loi de finances pour 2019 a défiscalisé les pensions alimentaires pour nos compatriotes à l'étranger. Dans le même esprit, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, j'avais défendu la défiscalisation des prestations compensatoires pour nos compatriotes à l'étranger, laquelle avait été votée par le Sénat. En mai 2020, la proposition de loi de notre collègue Bruno Retailleau relative aux Français établis hors de France, portant notamment défiscalisation des prestations compensatoires, a été adoptée par la chambre haute. Enfin, lors de la discussion des projets de loi de finances pour 2023 et pour 2025, notre collègue Yann Chantrel a présenté des amendements en ce sens, également votés par le Sénat.
Par conséquent, j'aimerais que la commission des finances examine ce problème de près.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l'amendement n° I-2416 rectifié.
Mme Florence Blatrix Contat. Il a été très bien défendu par notre collègue.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue charge la commission des finances de réfléchir plus avant à ce sujet.
Une proposition de loi votée par le Sénat a en effet posé ce principe, parmi d'autres dispositions, dont certaines ont pu être mises en œuvre par d'autres voies. Il me semble indispensable au préalable de connaître le nombre de contribuables susceptibles d'être concernés par cette mesure pour en chiffrer le coût.
Vous avez à juste titre rappelé que le PLF 2019 avait ouvert la possibilité de déduire du revenu imposable les pensions alimentaires pour les non-résidents. Gardons cependant à l'esprit que cette disposition s'apparentait plutôt à l'instauration d'un régime dérogatoire. Certes, elle est maintenant inscrite dans la loi, mais nous devons rester prudents et attendre de bénéficier d'autres éclairages pour nous prononcer en toute connaissance de cause sur l'extension de ce régime aux prestations compensatoires.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Je ne comprends pas bien votre argument, monsieur le rapporteur général. La dernière fois que cette proposition avait été soumise au débat dans notre hémicycle, vous aviez émis un avis de sagesse, arguant qu'il fallait « faire preuve de logique et de continuité dans nos votes ».
Pourquoi changez-vous de position aujourd'hui ? Si Mme la ministre nous dit qu'elle est tout à fait d'accord pour qu'une étude soit faite afin de savoir exactement de quoi nous parlons et combien cela coûterait, je retirerai peut-être mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice, le rapporteur général a bien indiqué qu'il fallait un chiffrage pour prendre la mesure de l'enjeu.
Votre amendement me pose une difficulté de principe, et je vais vous dire pourquoi.
Aujourd'hui, la France permet la déduction des prestations compensatoires versées par une personne résidente fiscale en France à un bénéficiaire habitant à l'étranger. Réciproquement, lorsque la prestation compensatoire est versée par une personne domiciliée à l'étranger à une personne habitant en France, il appartient bien à l'État de résidence du débiteur de tenir compte de cette pension selon sa législation, y compris lorsque le bénéficiaire est domicilié fiscalement en France.
Il n'y a donc pas de symétrie de traitement, car notre régime est le fruit de nos décisions nationales. Or votre proposition reviendrait au fond à « écraser » le droit des pays de résidence de ces non-résidents français, la France s'engageant auprès d'eux, où qu'ils soient dans le monde, quelle que soit la législation du pays où ils vivent, à ce que, le cas échéant, le versement de cette prestation soit exonéré.
L'arrêt Schumacher de la Cour de justice de l'Union européenne permet déjà une telle exonération dans le cadre de l'Union européenne, car nous sommes liés avec les autres États membres par des régimes de réciprocité. Cependant, il n'existe aucun cadre juridique pour étendre cette possibilité en dehors de l'Union européenne ; je ne saurais donc m'y engager. Les conventions fiscales ne le permettent pas et je ne vois pas pourquoi, d'ailleurs, nous appliquerions un tel régime, qui est susceptible – en ces matières, il faut toujours avoir l'esprit un peu tordu – de conduire à un certain nombre de fraudes ou en tout cas de situations étranges.
Madame la sénatrice, on peut toujours chiffrer cette mesure et compter le nombre de personnes concernées ; j'ai eu cette discussion avec l'une de vos collègues députées. Je lui ai expliqué que nous pourrions conduire un certain nombre de travaux à cet égard. Les parlementaires peuvent aussi tout à fait s'y atteler, dans le cadre des commissions des finances ou des commissions des affaires étrangères. Je n'y vois pas de difficulté, mais, je le répète, au-delà du chiffrage, cette proposition me pose un problème de principe : autant il existe un cadre au sein de l'Union européenne, autant, à l'extérieur de celle-ci, les conventions fiscales ne nous poussent pas à agir ainsi.
Voilà, en toute sincérité, la réponse que je peux vous donner – j'ai pris le temps de bien préciser la nature des enjeux. Je vous prie donc de bien vouloir retirer ces amendements ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-2345 et I-2416 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-640 rectifié, présenté par MM. Delahaye et Canévet, Mme Guidez, MM. Courtial, Henno et Dhersin, Mme Romagny et M. Bleunven, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 du I de l'article 197 est ainsi modifié :
a) Aux premier et deuxième alinéas, le montant : « 11 497 € » est remplacé par le montant : « 11 611 € » ;
b) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – 22 % pour la fraction supérieure à 29 315 € et inférieure ou égale à 56 569 € ; »
c) Au troisième alinéa, le montant : « 29 315 € » est remplacé par le montant : « 56 569 € ».
2° À l'article 278, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 21 % ».
II. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par une majoration du taux intermédiaire de la taxe sur la valeur ajoutée visée aux articles 278 bis, 278 quater, 278 sexies A, 279, 279-0 bis et 279-0 bis A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Il s'agit d'un amendement de fond sur l'impôt sur le revenu (IR) et sa progressivité.
Nous constatons que l'impôt sur le revenu est très progressif sur les plus bas revenus qui sont imposés, sachant que 50 % des revenus ne le sont pas.
Pour la troisième tranche, qui va de 29 000 à 83 000 euros, le taux est de 30 %, contre 11 % pour la deuxième, la première étant imposée à 0 %. L'idée est de créer un taux intermédiaire de 22 % : on passerait de 11 % à 22 %, puis de 22 % à 30 %, la bascule se faisant à 56 000 euros, soit la moitié de cette troisième tranche.
Bien entendu, afin de compenser le manque à gagner pour les finances publiques – vous savez que je suis très attaché à l'équilibre de nos comptes publics –, je propose une augmentation de la TVA.
L'augmentation de la TVA pour compenser cette baisse de l'impôt sur le revenu présente plusieurs avantages. D'abord, on observe un écart souvent assez important entre les revenus du travail et la consommation. Or nous voulons favoriser le travail : il faut qu'il paie un peu mieux. Tel est l'objet de cet amendement, qui permettra en parallèle de faire contribuer un peu davantage la consommation, et notamment les importations.
Aujourd'hui, notre taux de TVA est le quatrième plus bas d'Europe. Le taux moyen européen se situe autour de 24 % ou 25 % ; le nôtre est de 20 %, sans compter nos taux intermédiaire, réduit et particulier.
Je propose donc de porter le taux de TVA de 20 % à 21 %, en sorte de compenser, du point de vue des finances publiques, la création d'une tranche supplémentaire d'impôt sur le revenu.
Aussi mon amendement est-il budgétairement équilibré tout en favorisant le travail au détriment de la consommation. Il me semble très vertueux et j'espère que le Sénat pourra l'adopter.
M. le président. L'amendement n° I-1259, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1 du I de l'article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le montant : « 11 497 € » est remplacé par le montant : « 12 000 € » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Le taux : « 11 % » est remplacé par le taux : « 5 % » ;
b) Le montant : « 11 497 € » est remplacé par le montant : « 12 000 € » ;
c) Le montant : « 29 315 € » est remplacé par le montant : « 20 000 € » ;
3° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) Le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
b) Le montant : « 29 315 € » est remplacé par le montant : « 20 001 € » ;
c) Le montant : « 83 823 € » est remplacé par le montant : « 30 000 € » ;
4° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) Le taux : « 41 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
b) Le montant : « 83 823 € » est remplacé par le montant : « 30 001 € » ;
c) Le montant : « 180 294 € » est remplacé par le montant : « 40 000 € » ;
5° Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
a) Le taux : « 45 % » est remplacé par le taux : « 25 % » ;
b) Le montant : « 180 294 € » est remplacé par le montant : « 40 001 € » ;
c) Sont ajoutés les mots : « et inférieure ou égale à 50 000 € » ;
6° Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« – 30 % pour la fraction supérieure à 50 001 € et inférieure ou égale à 60 000 € ;
« – 35 % pour la fraction supérieure à 60 001 € et inférieure ou égale à 75 000 € ;
« – 40 % pour la fraction supérieure à 75 001 € et inférieure ou égale à 100 000 € ;
« – 45 % pour la fraction supérieure à 100 001 € et inférieure ou égale à 125 000 € ;
« – 50 % pour la fraction supérieure à 125 001 € et inférieure ou égale à 150 000 € ;
« – 55 % pour la fraction supérieure à 150 001 €. »
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Nos amendements sont en discussion commune, mais nous n'avons pas le même regard sur ces questions. Vous parlez d'augmenter la TVA ; quant à moi, je vais vous parler de progressivité de l'impôt sur le revenu. La discussion commune n'empêche pas des approches assurément différentes.
Aux yeux des sénateurs communistes, l'impôt sur le revenu devrait être l'instrument central de la démocratie fiscale. Or, aujourd'hui – Mme la ministre pourra le confirmer –, force est de constater qu'il représente 25 % des recettes fiscales et moins de 9 % des prélèvements obligatoires. La TVA, l'impôt le plus régressif, qu'un collègue vient pourtant de proposer d'augmenter de 1 point, pèse quant à elle pour 50 % des recettes.
Il y a un mythe à évacuer : on entend souvent – peut-être pas aujourd'hui : tant mieux ! – que certains ne paient pas d'impôts. Tout le monde paie des impôts, et ceux qui ont peu paient même proportionnellement davantage, via la TVA.
M. Daniel Fargeot. C'est faux !
Mme Sophie Primas. Ce n'est pas vrai !
M. Pascal Savoldelli. Je vais prendre un exemple.
Un salarié qui gagne 30 000 euros – pas par mois, je vous rassure – et un autre qui en gagne 80 000 sont imposés au même taux marginal de 30 %. Leur reste à vivre et leurs capacités contributives sont-ils pour autant comparables ? Personne ne peut le soutenir sérieusement.
Nous proposons donc une progressivité plus fine, en dix tranches, et vous pourrez faire le calcul : 26,5 millions de foyers seraient gagnants. Il est vrai que nous demanderions un effort supplémentaire à 14 % des foyers, qui concentrent la moitié des revenus, en appliquant un taux marginal de 55 % au-delà de 150 000 euros. Voilà une autre approche, évidemment, que celle qui consiste à augmenter la TVA, impôt aveugle.
M. le président. L'amendement n° I-2133, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du second alinéa de l'article 196 B, le montant : « 6 794 € » est remplacé par le montant : « 6 869 € » ;
2° Le I de l'article 197 est ainsi modifié :
a) Le 1 est ainsi modifié :
– Aux premier et deuxième alinéas, le montant : « 11 497 € » est remplacé par le montant : « 11 624 € » ;
– À la fin du deuxième et au troisième alinéas, le montant : « 29 315 € » est remplacé par le montant : « 29 638 € » ;
– À la fin du troisième et à l'avant-dernier alinéas, le montant : « 83 823 € » est remplacé par le montant : « 84 745 € » ;
– À la fin des avant-dernier et dernier alinéas, le montant : « 180 294 € » est remplacé par le montant : « 182 278 € » ;
b) Le 2 est ainsi modifié :
– Au premier alinéa, le montant : « 1 791 € » est remplacé par le montant : « 1 811 € » ;
– À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, le montant : « 4 224 € » est remplacé par le montant : « 4 270 € » ;
– À la fin du troisième alinéa, le montant : « 1 069 € » est remplacé par le montant : « 1 081 € » ;
– À la première phrase de l'avant-dernier alinéa, le montant : « 1 785 € » est remplacé par le montant : « 1 805 € » ;
– À la première phrase du dernier alinéa, le montant : « 1 993 € » est remplacé par le montant : « 2 015 € » ;
c) Le a du 4 est ainsi modifié :
– Le montant : « 889 € » est remplacé par le montant : « 899 € » ;
– Le montant : « 1 470 € » est remplacé par le montant : « 1 486 € ».
3° Le 1 du III de l'article 204 H est ainsi modifié :
a) Le tableau du a est ainsi rédigé :
»
Base mensuelle de prélèvement |
Taux proportionnel |
Inférieure à 1 638 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 1 638 € et inférieure à 1 701 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 1 701 € et inférieure à 1 811 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 1 811 € et inférieure à 1 932 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 1 932 € et inférieure à 2 065 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 2 065 € et inférieure à 2 175 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 175 € et inférieure à 2 319 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 2 319 € et inférieure à 2 744 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 2 744 € et inférieure à 3 141 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 3 141 € et inférieure à 3 538 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 3 538 € et inférieure à 3 976 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 3 976 € et inférieure à 4 699 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 4 699 € et inférieure à 5 635 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 5 635 € et inférieure à 6 951 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 6 951 € et inférieure à 8 807 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 8 807 € et inférieure à 12 024 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 12 024 € et inférieure à 16 556 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 16 556 € et inférieure à 25 991 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 25 991 € et inférieure à 54 673 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 54 673 € |
43 % |
« ;
b) Le tableau du b est ainsi rédigé :
»
Base mensuelle de prélèvement |
Taux proportionnel |
Inférieure à 1 878 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 1 878 € et inférieure à 1 993 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 1 993 € et inférieure à 2 195 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 2 195 € et inférieure à 2 397 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 2 397 € et inférieure à 2 647 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 2 647 € et inférieure à 2 791 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 791 € et inférieure à 2 887 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 2 887 € et inférieure à 3 177 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 3 177 € et inférieure à 3 928 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 3 928 € et inférieure à 5 026 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 5 026 € et inférieure à 5 708 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 5 708 € et inférieure à 6 612 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 6 612 € et inférieure à 7 922 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 7 922 € et inférieure à 8 807 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 8 807 € et inférieure à 10 009 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 10 009 € et inférieure à 13 765 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 13 765 € et inférieure à 18 289 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 18 289 € et inférieure à 27 914 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 27 914 € et inférieure à 61 014 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 61 014 € |
43 % |
« ;
c) Le tableau du c est ainsi rédigé :
»
Base mensuelle de prélèvement |
Taux proportionnel |
Inférieure à 2 012 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 2 012 € et inférieure à 2 175 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 2 175 € et inférieure à 2 424 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 2 424 € et inférieure à 2 734 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 2 734 € et inférieure à 2 839 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 2 839 € et inférieure à 2 936 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 936 € et inférieure à 3 032 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 3 032 € et inférieure à 3 369 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 3 369 € et inférieure à 4 649 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 4 649 € et inférieure à 6 016 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 6 016 € et inférieure à 6 786 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 6 786 € et inférieure à 7 874 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 7 874 € et inférieure à 8 661 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 8 661 € et inférieure à 9 597 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 9 597 € et inférieure à 11 137 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 11 137 € et inférieure à 14 983 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 14 983 € et inférieure à 18 958 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 18 958 € et inférieure à 30 543 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 30 543 € et inférieure à 64 469 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 64 469 € |
43 % |
« .
II. – Le 3° du I s'applique aux revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2026.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.