M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour explication de vote.

Mme Florence Blatrix Contat. L'année dernière et il y a deux ans, on nous rétorquait qu'un relèvement du taux de la TSN exposerait notre pays au risque d'un remboursement, sous forme de crédit d'impôt, des recettes supplémentaires ainsi perçues. Il n'en est plus question, mais vous nous indiquez aujourd'hui, monsieur le ministre, qu'il faudrait attendre l'aboutissement des négociations menées à l'échelle de l'OCDE, qui paraissent pourtant au point mort.

J'estime pour ma part indispensable d'instaurer plus de progressivité, non seulement pour que nos finances publiques puissent profiter du rendement supplémentaire que l'on peut en attendre, mais aussi pour exempter certains acteurs français de la taxation, tout en améliorant la justice fiscale. À trop craindre les rétorsions américaines, monsieur le ministre, nous nous affaiblissons !

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je souscris aux propos de Mme Blatrix Contat. Je rappelle que notre proposition d'un taux de 15 % correspond au taux minimum universel que l'OCDE s'est donné pour objectif.

M. Roland Lescure, ministre. Cela n'a rien à voir !

M. Pascal Savoldelli. Si je me trompe, j'en prendrai acte volontiers, mais il faut comprendre nos préoccupations.

Les Gafam offrent des services à la population française, répondant à une demande réelle, mais ils localisent à l'étranger les profits qu'ils réalisent ainsi. Les dispositifs que nous proposons ne sont peut-être pas les plus justes, les plus pertinents, les plus constitutionnels ou les plus universels, mais ils visent en tout cas à remédier à cette situation, dont j'estime qu'elle devrait tous nous préoccuper, mes chers collègues, quel que soit notre groupe politique – telle est du reste la raison pour laquelle l'OCDE s'est emparée du sujet.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Il nous faut tout de même prendre acte que le monde dans lequel nous vivons n'est plus celui du multilatéralisme. S'il est évident que ce monde est traversé de rapports de force, il nous revient de peser dans ces derniers.

Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez indiqué qu'il fallait que les Gafam continuent de proposer leurs services dans notre pays. Je préférerais pour ma part que nous nous efforcions d'abord de développer des entreprises nationales proposant les mêmes services.

Google est certes formidable, mais nous, nous avons Qwant ! Dans un certain nombre de domaines, nos champions ne demandent qu'à acquérir une envergure internationale. Pensez-vous que nous y contribuerons en améliorant encore l'accueil que nous faisons aux Gafam, en leur facilitant encore la tâche ? Je ne le crois pas.

Par ailleurs, Donald Trump pratique en effet la menace, et je veux bien admettre – c'est une évidence – qu'il n'est pas simple de trouver le bon équilibre, lequel doit être déterminé à l'échelon européen. Mais faut-il céder d'emblée par crainte de nouvelles mesures de rétorsion ? Peut-être convient-il à tout le moins d'y réfléchir à l'échelle européenne.

De manière générale, depuis le début de l'examen de ce PLF, on oppose à toutes nos propositions un impératif de prudence : attention, parce que les riches pourraient partir à l'étranger ; attention, parce qu'un certain nombre d'entreprises pourraient délocaliser leur activité ; attention à toute modification de la TTF ! Mais si tel est le cas, mes chers collègues, n'hésitons pas : taxons donc les plus faibles, les milieux populaires, ceux qui, eux, ne pourront pas partir !

De tels arguments, invoquant diverses menaces, doivent à mon sens être manipulés avec une grande précaution, car les choix qui en découlent sont la cause de la colère qui s'exprime dans notre pays.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1447.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1694 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1729.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1746 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1373 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-2398.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos°I-1389, I-1500 rectifié et I-2136 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-195.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° I-909 rectifié bis, présenté par M. Fargeot, Mme Billon, MM. Longeot et Delcros, Mmes Jacques et Loisier, M. Courtial, Mme Antoine, M. Verzelen, Mme Romagny et MM. L. Hervé, Maurey et Duffourg, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Il est institué une contribution sur les revenus publicitaires et les recettes tirées de la valorisation des données des utilisateurs situés en France, due par les entreprises exploitant un service de réseau social en ligne au sens du présent article.

II. – Sont considérés comme services de réseaux sociaux en ligne les services de communication au public en ligne qui :

1° permettent aux utilisateurs, au moyen d'un compte ou d'un profil, de créer, partager, publier ou diffuser des contenus pouvant être consultés par d'autres utilisateurs ;

2° organisent des interactions sociales entre utilisateurs, notamment par la consultation, la réaction, la réponse, le commentaire, la mise en relation ou la diffusion en réseau ;

3° tirent tout ou partie de leur modèle économique de la diffusion de publicités personnalisées, ciblées ou contextualisées, ou de la collecte, du traitement, de l'analyse ou de la valorisation des données générées par ces interactions.

4° Ne relèvent pas de cette définition :

- les services d'intermédiation de vente de biens ou de services ;

- les moteurs de recherche ;

- les services pour lesquels les interactions entre utilisateurs constituent une fonctionnalité accessoire à l'activité principale.

III – La contribution est assise :

1° sur les revenus tirés de la diffusion en France de publicités personnalisées, ciblées ou contextualisées ;

2° sur les recettes provenant de la collecte, du traitement, de l'analyse, de l'exploitation ou de la monétisation des données des utilisateurs situés en France, y compris lorsqu'elles sont réalisées à des fins publicitaires, commerciales ou d'optimisation algorithmique.

Sont réputés tirés de France, pour l'application du présent III, les revenus ou recettes pour lesquels les utilisateurs dont proviennent les données, interactions, consultations ou segments publicitaires sont situés en France, appréciés notamment au regard :

– de l'adresse IP ;

– de la localisation du terminal utilisé ;

– des informations associées au compte utilisateur ;

– du ciblage géographique des publicités ;

– ou des paramètres techniques de diffusion.

IV. – Sont soumises à la contribution les entreprises réalisant un chiffre d'affaires mondial supérieur à 750 millions d'euros et un chiffre d'affaires supérieur à 25 millions d'euros en France au titre des activités mentionnées au III.

V. – Le taux de la contribution est fixé à 3 % du montant des recettes mentionnées au IV.

VI. – Un décret précise les modalités de déclaration, de liquidation, de contrôle et de recouvrement de la contribution, ainsi que les règles permettant d'identifier les utilisateurs situés en France et les recettes afférentes.

La parole est à M. Daniel Fargeot.

M. Daniel Fargeot. Je vous demande d'être attentifs, mes chers collègues, car la présente proposition diffère de celles qui viennent de nous être soumises.

Aujourd'hui, les réseaux sociaux captent massivement de la valeur en France. Qu'il s'agisse de nos données, de nos interactions ou de notre attention, ils transforment tout en revenus publicitaires, mais sans contribuer à hauteur de l'activité réelle qu'ils réalisent sur notre territoire. Cette asymétrie fiscale prend des proportions intenables.

Une part essentielle du marché français de la publicité numérique sur les réseaux sociaux étant captée par quelques acteurs mondiaux – les Gafam –, le présent amendement vise à créer une contribution de 3 % sur les revenus publicitaires diffusés en France sur les réseaux sociaux, ainsi que sur les recettes issues de la valorisation et de la monétisation des données des utilisateurs français, qui sont aujourd'hui totalement exemptes de taxes.

Ce n'est pas une seconde taxe sur les services numériques ou une double imposition que je vous propose : c'est une assiette nouvelle qui complète la TSN afin de tenir compte de la monétisation des données, de l'économie algorithmique et de la valeur créée par les comportements des utilisateurs situés en France, notamment les jeunes.

Le dispositif est ciblé, puisqu'il ne s'appliquera qu'aux acteurs dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 millions d'euros dans le monde et à 25 millions d'euros en France. Aucune PME, aucune plateforme européenne émergente ne sera donc concernée, si bien que cette taxe ne menace de destruction aucun acteur de notre économie.

Les réseaux sociaux vivent de nos données, de notre attention et de nos usages. Il serait donc, à mon sens, bien normal qu'ils contribuent proportionnellement dans notre pays, où cette valeur est créée.

N'ayons pas peur du président américain, mes chers collègues !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Nous demandons le retrait de l'amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre. Votre intention, à laquelle on ne peut que souscrire, monsieur le sénateur, est d'assurer une taxation juste du chiffre d'affaires réalisé par des entreprises qui font du profit dans de nombreux pays sans nécessairement y payer d'impôts.

La taxe que vous proposez de créer s'ajouterait toutefois à la TSN et – dans un avenir proche, je l'espère – à la taxation que nous nous efforçons d'instaurer dans le cadre du pilier 1 de l'OCDE. Pour éviter trop de complexité, je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut, j'y serais défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour explication de vote.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Tout en comprenant la complexité de la situation, je souhaite obtenir de M. le ministre des précisions supplémentaires.

La proposition de M. Fargeot vise les revenus tirés de la publicité sur les réseaux sociaux, qui se développe massivement sans faire l'objet d'aucune régulation ni taxation, tandis que les médias traditionnels – presse écrite, chaînes de télévision, etc. – voient leurs revenus publicitaires s'effondrer.

J'aimerais donc que vous vous engagiez à faire quelque chose pour remédier à cette situation, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Je n'ajouterai que quelques points à l'excellente intervention de notre collègue Marie-Claire Carrère-Gée.

Ces entreprises génèrent des revenus considérables, M. le ministre en a convenu tout à l'heure. Il me semble donc important de les assujettir à un certain nombre d'impositions pour tenir compte des externalités négatives qu'elles créent.

En effet, les effets délétères des réseaux sociaux, en particulier, et de l'économie du numérique, en général, sont largement documentés. Il est d'autant moins compréhensible que ces entreprises échappent à ce type de contribution.

Par conséquent, je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Roland Lescure, ministre. J'entends bien ce que vous dites et le sujet nous préoccupe tout autant que vous, mais prenons garde aux usines à gaz fiscales et aux repoussoirs qui risquent de susciter des réactions extrêmement fortes !

Les publicités auxquelles vous faites référence sont déjà assujetties à la TSN. Cette taxation est sans doute insuffisante ; c'est bien pour y remédier que nous travaillons, de manière multilatérale, sur le pilier 1 de l'OCDE.

Par ailleurs, madame la sénatrice, ce que vous désignez comme des externalités négatives et, plus largement, tous les enjeux, majeurs, de protection de nos enfants ne peuvent être traités par le biais de la fiscalité. Vous savez que le Président de la République a fait des propositions sur le sujet, au nombre desquelles figurent en particulier l'interdiction des réseaux sociaux pour les moins de 15 ans et l'interdiction des portables à l'école. Que vous les repreniez ou non, de nombreuses études extrêmement sérieuses montrent que la seule manière de protéger nos jeunes contre les déviances et les travers de l'économie numérique, c'est de frapper fort, non pas au portefeuille, mais à l'accessibilité.

J'y insiste donc, l'adoption de cet amendement aurait pour effet de nous compliquer la vie deux fois : d'abord, en complexifiant lourdement le système fiscal français ; ensuite – j'en suis convaincu –, en nous exposant à des rétorsions qui nous feraient regretter d'avoir voté une telle mesure.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je souscris aux propos que vient de tenir M. le ministre.

Il faut faire attention. Les sujets de préoccupation sont si nombreux, aujourd'hui, que nous avons tendance à vouloir tout résoudre par la fiscalité, en instaurant diverses taxes.

Une mesure a été votée tout à l'heure dont le caractère problématique apparaîtra clairement dès que nous aurons pesé au trébuchet les milliards d'euros qu'elle représente. Il faut donc veiller, à cet instant comme plus généralement, à ne pas ajouter au texte des dispositions qui viendraient déséquilibrer davantage, au moins momentanément, le budget.

M. le ministre vient de nous confirmer qu'un travail sur le sujet lui paraît nécessaire. En effet, nous le constatons tous, les réseaux sociaux envahissent la vie quotidienne ; je ne suis pas sûr pour autant que la taxation permette de répondre avec efficacité à ce problème.

Mes chers collègues, je vous invite donc à la plus grande retenue. Évitons de recourir à une taxe comme celle que propose notre collègue Daniel Fargeot, quand bien même, comme nous tous, je partage l'intention qui est la sienne.

M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote.

Mme Colombe Brossel. Notre collègue Marie-Do Aeschlimann a raison : la faute ne peut pas toujours incomber à tout le monde, sauf aux opérateurs et aux Gafam !

M. Roland Lescure, ministre. Ce n'est pas ce que nous avons dit.

Mme Colombe Brossel. Il y a quelques jours, la délégation aux droits des femmes, où je siège aux côtés de Mme Aeschlimann, auditionnait l'ancien ministre Adrien Taquet, qui nous a exposé les ravages que les réseaux sociaux produisent sur une partie de la jeunesse.

Monsieur le ministre, ce que vous venez de nous dire, c'est en quelque sorte que ce problème est de la responsabilité de tous. Certes, mais l'argumentation me semble trop facile : pardonnez-moi, mais serait-ce donc la faute des parents, la faute de l'école ? (M. le ministre proteste.) Hier, nous avons vu arriver une énième annonce jupitérienne : l'interdiction des portables. Cela a tellement bien marché au collège qu'on pourra désormais le faire au lycée, en demandant aux chefs d'établissement de se débrouiller, comme d'habitude…

Mais les seuls à être totalement exonérés de responsabilité seraient ceux qui permettent à ce type de publicité d'exister ; nous refuserions de leur appliquer une surtaxation !

Je m'excuse, mais quand un million d'élèves sont harcelés,…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La taxe n'y changera rien !

Mme Colombe Brossel. …quand on observe les effets délétères de la pornographie sur les jeunes et les adolescents, on ne peut pas balayer du revers de la main, comme vous venez de le faire, d'une façon un peu trop facile à mon sens, les arguments qui ont été développés par des sénatrices et sénateurs siégeant sur l'ensemble des travées de cette assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je souhaite apporter une petite précision : la publicité sur les réseaux sociaux, ce sont aussi des torrents de contrefaçon !

Nous avions instauré, certes de façon très éphémère, dans le cadre de la loi du 24 juin 2020 visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, dite loi Avia, la responsabilité des éditeurs des plateformes. C'est un sujet sur lequel il faudra revenir un jour ou l'autre, car les plateformes ne sont aujourd'hui responsables de rien, alors qu'elles brassent énormément d'argent et, surtout, qu'elles sont des vecteurs de criminalité, notamment au travers de la contrefaçon, dont vous savez à quel point elle nourrit la criminalité organisée.

Il faudra s'attaquer aux publicités pour de fausses marques, ou encore pour des médicaments contrefaits. La proposition de M. Fargeot n'est peut-être pas la bonne, elle n'intervient peut-être pas au bon moment ni dans le texte qui convient, mais elle porte tout de même sur le bon sujet.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Roland Lescure, ministre. Le sujet de société dont il est question est certes fondamental, mais je reste convaincu que ce n'est pas en recourant à la fiscalité que nous parviendrons à protéger nos enfants. L'enjeu, c'est la régulation ; c'est aussi l'utilisation des téléphones portables par nos enfants ou adolescents, dans la rue et à l'école. Je ne dis pas pour autant, madame Brossel, que l'école en est responsable !

Je vous engage à lire l'essai Génération anxieuse, dans lequel le psychologue américain Jonathan Haidt démontre que, depuis que les enfants ont libre accès aux portables et à tous les écrans, dans la rue comme ailleurs, le nombre de jeunes garçons et de jeunes filles consultant un psychiatre a explosé dans le monde entier. Certes, nous pouvons toujours dire que nous nous y prendrons « à la française », que nous taxerons et que tout se passera bien, mais la réalité est beaucoup plus complexe ! Ces enjeux dépassent largement le cadre de notre débat budgétaire ; je ne voudrais donc pas trop m'emporter, mais répéterai simplement que ce n'est pas par la fiscalité que nous réglerons ces problèmes.

Concernant les grandes entreprises du numérique, l'enjeu est de trouver une taxation juste et équitable. Si nous le faisons non pas dans un environnement multilatéral – même si je comprends bien que c'est plus difficile –, mais tout seuls, nous le paierons, nous le regretterons. Vous-mêmes, mesdames, messieurs les sénateurs, vous le regretterez ! Tous les élus de circonscriptions viticoles le regretteront. (Mme Colombe Brossel et M. Grégory Blanc protestent.) Ce n'est pas une menace et je n'ai peur de rien ; je ne fais que vous expliquer ce qui va se passer. Vous prendrez donc vos responsabilités et nous prendrons les nôtres.

Il est clair que, dans ces circonstances, ce qui s'est passé en 2018 se reproduira en 2026 ; nous en supporterons les conséquences. Il faut être conscient des effets de ce que l'on vote. Soit nous choisissons d'y aller seuls, avec les conséquences que j'ai décrites, soit nous continuons à travailler dans un cadre multilatéral pour essayer d'avancer en nous montrant plus puissants et en mettant en œuvre un vrai rapport de force.

M. Daniel Fargeot. Mais nous n'avançons pas !

M. Roland Lescure, ministre. Ce n'est pas vrai, monsieur le sénateur : des progrès ont été accomplis sur le pilier 1 et le pilier 2 de l'OCDE depuis que la France s'en est saisie.

En revanche, si nous avançons seuls, nous irons moins loin et cela fera plus mal. C'est pourquoi je vous engage à ne pas voter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-909 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.) – (Exclamations sur des travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11.

L'amendement n° I-2654 rectifié bis, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Il est institué une taxe due par tout fournisseur offrant un service d'assistance par intelligence artificielle.

II. – La taxe est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers aux opérateurs mentionnés au I en rémunération des services d'assistance par intelligence artificielle qu'ils fournissent, déduction faite du montant des dotations aux amortissements comptabilisés au cours de l'exercice clos au titre de l'année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible, lorsqu'ils sont afférents aux matériels et équipements acquis, à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, par les opérateurs pour les besoins des infrastructures et réseaux de communications électroniques établis sur le territoire national et dont la durée d'amortissement est au moins égale à dix ans.

III. – L'exigibilité de la taxe est constituée par l'encaissement du produit des abonnements et autres sommes mentionnées au II.

IV. – La taxe est calculée en appliquant un taux de 0,9 % à la fraction de l'assiette visée au II qui excède 500 000 euros.

V. – Les redevables procèdent à la liquidation de la taxe due au titre de l'année civile précédente lors du dépôt de la déclaration mentionnée au I de l'article 287 du mois de mars ou du premier trimestre de l'année civile.

VI. – La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il s'agit d'un amendement de ma collègue Monique de Marco.

Les outils d'assistance par intelligence artificielle génèrent des revenus considérables, mais n'offrent souvent aucune contribution réelle au financement des écosystèmes culturels, économiques et sociaux qu'ils utilisent pourtant massivement. Instaurer une taxe modérée sur les abonnements à ces services permettrait de rééquilibrer ce rapport.

Nous souhaitons simplement faire contribuer au financement du bien commun ceux qui bénéficient le plus des avancées technologiques. Cette contribution n'entraverait pas l'innovation ; elle garantirait au contraire qu'elle se développe de manière responsable. Autrement dit, c'est une taxe de juste partage, une mesure de solidarité numérique qui accompagnerait l'essor de l'intelligence artificielle au lieu de le freiner.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il est défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre. Même avis défavorable, pour les raisons que j'ai exposées au sujet des amendements précédents.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-2654 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° I-994 rectifié, présenté par M. Delcros et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La cinquième phrase du III de l'article 1519 H du code général des impôts est supprimée.

La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Cet amendement a pour objet la composante de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) portant sur les stations radioélectriques, ou Ifer mobile.

Pour accélérer le déploiement des réseaux de téléphonie mobile dans les zones de montagne entre 2017 et 2020, une exonération d'Ifer mobile a été mise en place au bénéfice des entreprises de télécommunications. Le réseau s'est de fait développé plus vite par la suite. En revanche, aucune limite dans le temps n'a été fixée pour cette exonération. Par conséquent, si nous ne faisons rien, elle sera éternelle. Près de dix ans plus tard, ces entreprises de télécommunications bénéficient toujours d'une exonération pour des installations réalisées en 2017.

Dans tous les autres cas, les exonérations sont limitées dans le temps. C'est le cas, par exemple, de l'exonération d'Ifer accordée pour les stations installées entre 2018 et 2022 dans les zones caractérisées par un besoin d'aménagement numérique, qui est limitée à cinq ans.

Je propose donc de mettre fin à cette exonération d'Ifer mobile, qui se fait au détriment des collectivités. Nous ne pouvons pas maintenir indéfiniment la perte de recettes qu'elle représente pour celles-ci.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, nous avons déjà évoqué ce sujet lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2025. Cette exonération concerne aujourd'hui environ 9 000 stations, sur 210 000 au total, ce qui montre que les coûts et les enjeux budgétaires sont vraiment limités.

En revanche, je partage votre interrogation, de manière plus générale, sur l'absence de bornage des dépenses fiscales. Il semble nécessaire d'évaluer le dispositif et d'envisager son extinction à terme, ce qui devrait permettre de résoudre la situation.

Je sollicite l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre. Il est vrai que le dispositif global de l'Ifer mobile est complexe et quelque peu illisible. Toutefois, supprimer immédiatement cette exonération poserait problème, y compris dans votre département, monsieur le sénateur. Au total, 9 000 stations sont exonérées d'Ifer mobile au titre de l'effort de réduction des zones blanches. Au total, les sommes ne sont effectivement pas très élevées, tandis que l'exonération constitue pour les opérateurs une incitation réelle à couvrir ces zones.

Par conséquent, même si, comme vous l'avez dit, le poids de l'Ifer mobile a augmenté de manière importante, il ne convient pas de supprimer cette exonération, qui risquerait d'entraver le déploiement des nouveaux réseaux 5G, y compris dans des territoires comme le vôtre.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. Monsieur Delcros, l'amendement n° I-994 rectifié est-il maintenu ?

M. Bernard Delcros. Je tiens à préciser que l'exonération ne devait porter que sur les installations réalisées entre 2017 et 2020. Par conséquent, je maintiens mon amendement ; cette disposition avait d'ailleurs été adoptée par le Sénat l'année dernière.

Même le montant n'est pas évalué, cette exonération d'Ifer mobile constitue une perte de recettes pour les collectivités.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je soutiens cet amendement, car la persistance de l'exonération d'Ifer mobile constitue une anomalie, dès lors qu'elle s'applique à des projets réalisés au cours de la période 2017-2020.

Je constate, monsieur le ministre, que vous n'avez pas beaucoup d'arguments. Vous nous dites : « Pas maintenant, pas tout de suite, il ne faut pas le faire comme cela. » Or nous voyons bien qu'il convient au contraire de mettre fin dès maintenant à cette exonération, car elle n'a plus lieu d'être et n'est pas du tout incitative. Nous avions d'ailleurs voté en ce sens l'an dernier. Il faut que nous avancions !

Depuis le début de nos discussions, vous nous opposez toujours la même réponse : « Ce n'est pas le moment. » Si tel est le cas, je ne comprends pas bien à quoi sert que nous débattions dans cet hémicycle.