M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour la réplique.
Mme Sylvie Robert. Monsieur le ministre, je me réjouis qu'il y ait une réflexion au sein du ministère de la culture sur l'avenir des écoles d'art territoriales.
Si j'ai posé cette question, c'est qu'il y a urgence aujourd'hui, une véritable urgence. Je pense qu'au-delà du budget des collectivités et des choix qu'elles sont amenées à faire, en partie à cause des décisions de l'État, c'est un chantier d'ensemble qu'il nous faudra lancer. Je suivrai l'avancée de ce dossier avec attention.
gouvernance et financement du mont-saint-michel
M. le président. La parole est à M. Sébastien Fagnen, auteur de la question n° 741, adressée à Mme la ministre de la culture.
M. Sébastien Fagnen. Monsieur le ministre, il est nécessaire que le Gouvernement s'empare sans tarder du dossier de la gouvernance et du financement du Mont-Saint-Michel, à la suite des recommandations récemment formulées par la Cour des comptes.
Le Mont-Saint-Michel, joyau inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, constitue un site emblématique et représente un moteur touristique majeur pour le département de la Manche, la Normandie et la Bretagne.
Pourtant, sa gestion demeure marquée par une organisation fragmentée entre plusieurs opérateurs publics aux compétences partagées, qui freine la mise en œuvre d'une stratégie cohérente de préservation, de valorisation et d'accueil du public.
L'établissement public du Mont-Saint-Michel, d'une part, et le Centre des monuments nationaux, d'autre part, se partagent aujourd'hui des responsabilités imbriquées. Il en résulte une perte d'efficacité administrative et financière, ainsi qu'une difficulté à définir des priorités communes pour la gestion du site et de sa baie.
À cela s'ajoute une situation budgétaire fragile, aggravée par la baisse des subventions de l'État et de la collectivité régionale, alors que les besoins en investissements pour la conservation, la transition écologique, les infrastructures d'accès et la qualité des services ne cessent de croître.
Les recommandations de la Cour des comptes appellent à clarifier les responsabilités, à simplifier la gouvernance et à assurer un financement stable et pérenne, proportionné à la valeur patrimoniale et économique du site.
Monsieur le ministre, quelle impulsion le ministère entend-il donner à la nécessaire réforme de la gouvernance du Mont-Saint-Michel ? Quelles mesures compte-t-il prendre pour garantir la cohérence de son pilotage et la sécurisation durable de son financement, afin que ce haut lieu de la culture rayonne pleinement ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, je vous répondrai au nom de ma collègue ministre de la culture.
En 2019, le Gouvernement a créé l'établissement public du Mont-Saint-Michel afin d'assurer son rayonnement national et international, en lien avec les collectivités – comme vous l'avez souligné, il s'agit d'un monument exceptionnel. Il s'agissait de régler la question, en suspens depuis des années, de la coordination du site du Mont-Saint-Michel et de sa baie, mais également de la gestion des ouvrages hydrauliques destinés à favoriser le rétablissement du caractère maritime du site.
Les missions de l'établissement sont relatives à l'entretien, à la gestion et au fonctionnement des équipements hydrauliques, à la gestion des navettes et des parkings, au pilotage d'un projet global de développement économique et touristique de la baie, et à la coordination des questions de sécurité.
L'établissement public a mis à profit ses premières années d'existence pour créer les outils nécessaires à son administration et à sa gestion. Il a efficacement repris à son compte la gestion des équipements hydrauliques, de la passerelle et des parcs de stationnement hérités du syndicat mixte. Il en tire des ressources financières substantielles qui lui permettent d'entretenir les ouvrages hydrauliques, mais aussi de participer à l'amélioration de l'accueil des touristes et au rayonnement culturel du site.
De son côté, le Centre des monuments nationaux assure à la fois la conservation et la restauration de l'abbaye du Mont-Saint-Michel et de ses remparts, l'ouverture au public du monument, et propose une offre culturelle et commerciale aux visiteurs, au travers de deux boutiques.
Le rapport d'observations de la Cour des comptes sur l'établissement public du Mont-Saint-Michel, rendu public en juillet 2025, préconise certaines évolutions dans l'organisation de la gouvernance globale du site, qui remettent en partie en cause le rôle du Centre des monuments nationaux.
Si le ministère de la culture étudie les préconisations de la Cour, il réaffirme son attachement au principe de péréquation, qui est au cœur du fonctionnement du Centre des monuments nationaux, affectataire de l'abbaye. Dans un contexte budgétaire tendu, et au vu du désengagement financier de certaines collectivités, les marges de manœuvre sont étroites.
La question de la gouvernance de l'établissement public, de son périmètre d'intervention et de son équilibre financier, au regard des investissements à engager, reste à l'étude et doit déboucher sur une solution pérenne, prenant en compte la globalité des sujets et la pluralité des contributeurs financiers.
M. le président. La parole est à M. Sébastien Fagnen, pour la réplique.
M. Sébastien Fagnen. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Il y a nécessité à agir urgemment sur cette question, puisqu'une partie des partenariats vont prochainement prendre fin et qu'aujourd'hui les doutes profonds soulevés par la Cour des comptes sur le caractère bicéphale de la gouvernance du Mont-Saint-Michel demeurent. Une coordination bien plus approfondie qu'elle ne l'est aujourd'hui est nécessaire.
Nous restons bien évidemment ouverts à toute réflexion d'ampleur sur le système de péréquation que garantit le Centre des monuments nationaux. Il me semble qu'il est possible, dans le cadre d'un dialogue territorial concerté, que chacun puisse avoir voix au chapitre et qu'il est envisageable de trouver un modèle idoine.
incohérences entre le code rural et le code de l'urbanisme concernant les abris pour animaux
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 800, adressée à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
Mme Agnès Canayer. Monsieur le ministre, les injonctions contradictoires font le quotidien des maires et les placent trop souvent dans des situations inconfortables, voire ingérables, les obligeant à tordre plus que de raison les règles pour répondre à des demandes de bon sens.
C'est le cas, monsieur le ministre, de la construction d'abris en zone agricole pour les particuliers qui détiennent des animaux pour leur loisir. En effet, le code rural et de la pêche maritime impose la mise à l'abri des animaux au titre du bien-être animal, pour les protéger des variations climatiques – et je peux vous dire qu'en Seine-Maritime elles sont nombreuses !
De son côté, le code de l'urbanisme réserve la possibilité de construire ces abris, dans les zones agricoles ou naturelles, aux seuls agriculteurs, excluant ainsi les particuliers qui détiennent des animaux pour leur simple loisir.
Que fait-on lorsqu'on est propriétaire d'un cheval, d'un âne ou d'un mouton pour son propre plaisir ?
Le ministère de l'aménagement du territoire nous a indiqué qu'un travail de concertation était engagé à ce sujet, depuis dix-huit mois, avec le ministère de l'agriculture. Or on ne voit toujours pas poindre de solution durable et satisfaisante.
Proposer aux collectivités locales de recourir, lorsqu'elles disposent d'un plan local d'urbanisme (PLU) ou d'un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), à une dérogation via la création de zones dérogatoires pour autoriser les abris est, à mes yeux, une réponse temporaire, mais insatisfaisante sur le long terme : les maires doivent en effet gérer au cas par cas, sans visibilité, et faire en sorte de s'y retrouver dans un dédale de règles d'urbanisme extrêmement complexes.
Monsieur le ministre, ma question est simple : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour mettre fin à cette situation, qui place les maires dans des positions souvent difficiles ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, vous soulignez avec raison les difficultés qu'il y a à concilier l'obligation de garantir le bien-être animal, prévue par le code rural et de la pêche maritime, et les règles du code de l'urbanisme qui encadrent strictement les constructions en zone agricole ou naturelle.
Le Gouvernement est pleinement conscient de cette situation, qui concerne à la fois les particuliers détenteurs d'animaux et les maires chargés d'appliquer la réglementation.
C'est pourquoi un travail de concertation a été engagé entre les ministères concernés afin d'améliorer l'articulation entre les deux codes. Même si nous y travaillons, ces échanges n'ont, à ce stade, pas permis de dégager une solution nationale satisfaisante : une dérogation généralisée ferait courir un risque réel de « cabanisation » des zones agricoles, au détriment de la préservation du foncier rural. Une évolution législative ne peut donc être envisagée pour l'instant.
Pour autant, des outils existent. Dans les communes dotées d'un PLU ou d'un PLUi, l'article R. 151-13 du code de l'urbanisme permet d'autoriser, dans les secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées, les fameux Stecal, des constructions telles que les abris pour animaux détenus à titre de loisir – je peux vous dire, ayant moi-même longtemps siégé au sein d'une commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), que ce genre de demande nous était régulièrement soumise. Cet instrument offre une souplesse réelle, tout en préservant la vocation agricole des sols.
Dans les communes dotées d'une carte communale, certaines constructions annexes peuvent également être autorisées sur des terrains bâtis.
Le Gouvernement demeure mobilisé pour clarifier le cadre applicable, mais il est essentiel que tout détenteur ou futur détenteur d'animal anticipe son projet et s'assure de sa compatibilité avec les règles locales d'urbanisme.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.
Mme Agnès Canayer. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le ministre. Je précise que peuvent s'ajouter à la réglementation déjà citée des règles relatives à la préservation au littoral – c'est le cas dans mon territoire –, qui viennent encore complexifier la donne pour les maires.
Une clarification nette et précise est donc absolument nécessaire, de sorte que les maires puissent se fonder sur des règles stables pour prendre les décisions qui s'imposeront à leurs administrés.
pétition des élus de la loire pour sauver l'action publique de proximité
M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, auteur de la question n° 790, adressée à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
M. Hervé Reynaud. Monsieur le ministre, le département de la Loire traverse une crise budgétaire sans précédent – et, malheureusement, ce n'est pas le seul.
Sous l'impulsion de son président, Georges Ziegler, et dans le cadre d'une démarche collective, des élus locaux et nationaux ont adressé une pétition au Président de la République. Cette pétition est l'expression d'une mobilisation tout autant sans précédent dans notre département.
Nous y dénonçons la situation intenable dans laquelle se trouvent les départements français, confrontés à un effet ciseaux dramatique : effondrement des recettes, d'une part ; explosion des dépenses, notamment sociales, d'autre part.
Le département de la Loire n'a ainsi plus aucune marge de manœuvre. Les excédents de trésorerie que nous avions provisionnés sont épuisés ; les budgets de fonctionnement contraints et les dépenses obligatoires absorbent une part toujours plus importante de notre trésorerie.
Toute la capacité d'action publique locale du territoire est menacée : aides aux communes ; soutien au monde associatif ; actions en faveur de la ruralité et de la transition écologique.
Aussi, les élus demandent une refonte urgente du modèle de financement des départements, une prise en charge par l'État des dépenses sociales obligatoires relevant de la solidarité nationale, et la garantie de l'autonomie financière des collectivités locales, principe constitutionnel essentiel à la vitalité démocratique des territoires.
Monsieur le ministre, il n'est plus possible que la solidarité nationale repose sur les seules épaules des collectivités locales, sans les compensations requises. Allez-vous enfin vous engager dans une véritable trajectoire de décentralisation, afin de défendre l'action publique de proximité, pilier de la cohésion de nos territoires ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous attirez l'attention du Gouvernement sur les tensions financières que subit le département de la Loire. Plus globalement, nombre de départements connaissent des difficultés du fait de la baisse du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), ainsi que de la progression des dépenses sociales.
Pour répondre à cette question, je rappelle que l'État a consenti dès 2024, puis en 2025, un effort important : la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a apporté un concours de plus de 200 millions d'euros pour stabiliser la couverture des dépenses ; en outre, la possibilité a été donnée aux départements d'augmenter temporairement les DMTO de 4,5 % à 5 % – plus des trois quarts d'entre eux s'en sont saisis ; enfin, les dispositifs de compensation liés au transfert des allocations individuelles de solidarité ont été maintenus.
Lors des assises des départements de France à Albi, auxquelles vous assistiez certainement, le Premier ministre a annoncé des mesures complémentaires qui figureraient dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026. Il s'agit notamment du doublement du fonds de sauvegarde, qui sera porté à 600 millions d'euros, et du plafonnement de la contribution au dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico) pour les départements les mieux dotés. De plus, un travail sur la création d'une allocation sociale unique va être lancé afin de stabiliser le financement des politiques sociales.
Le Premier ministre a également indiqué qu'il ne serait pas illogique que les départements puissent percevoir, à terme, une part de la contribution sociale généralisée (CSG). Ces réflexions sont engagées dans le cadre de la conférence financière des territoires.
Enfin, le Gouvernement a réaffirmé son engagement en faveur d'un nouvel acte de décentralisation aux fins de renforcer la lisibilité et l'efficacité de l'action publique et, je le souligne, de conforter la place des départements.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est mobilisé pour accompagner les départements dans l'exercice de leurs missions. Nous y travaillons tous.
M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, pour la réplique.
M. Hervé Reynaud. La pétition que j'ai mentionnée porte la voix des territoires, qu'ils soient ruraux ou urbains, et des élus de terrain. Elle porte la voix d'une République décentralisée et solidaire, que nous voulons préserver.
Dans mon département, 84 % des maires m'ont dit qu'ils n'auraient pas pu réaliser leurs projets communaux sans l'aide du département.
Vous êtes venu dans la Loire en décembre 2023 à l'occasion de l'assemblée générale de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), à laquelle j'assistais également. Vous avez pu voir dans quelle mesure ces territoires avaient besoin de l'effet levier qu'offrent les aides départementales.
Nous appelons à l'aide, car nous ne pourrons pas aller plus loin dans cette démarche. Nous comptons sur vous : les départements suffoquent ; il faut maintenant les aider !
nouvelle nomenclature des communes rurales et urbaines
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, auteure de la question n° 755, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité.
Mme Anne-Sophie Romagny. Monsieur le ministre, au mois de mai 2025, la définition des communes rurales a été modifiée. Sont désormais considérées comme telles, en métropole, les communes caractérisées comme peu denses ou très peu denses selon la grille de densité élaborée par l'Insee.
Or cette classification repose exclusivement sur une mesure statistique de densité. Elle ne tient pas compte des critères géographiques, socio-économiques ou fonctionnels, qui sont pourtant fondamentaux pour qualifier le caractère urbain ou rural d'un territoire.
Ainsi, plusieurs communes marnaises qui sont à l'évidence rurales, tant par leur cadre de vie et leur tissu économique que par leur environnement agricole ou viticole, sont à présent classées parmi les communes urbaines. Je pense notamment à Hautvillers et Champillon, qui relèvent désormais de la catégorie « ceinture urbaine », ou encore à Boult-sur-Suippe et Isles-sur-Suippe, qui figurent dans la catégorie « urbain intermédiaire ».
À l'inverse, des communes de 5 000 habitants situées à cinq minutes de Reims ont été requalifiées en communes rurales. C'est à n'y rien comprendre !
Monsieur le ministre, vous connaissez comme moi très bien la ruralité. En revanche, il faudrait très certainement que les agents de l'Insee découvrent la campagne ! Au-delà de l'anomalie que constitue l'assimilation de villages à des centres urbains simplement parce qu'ils sont denses, je crains que l'Insee ne considère bientôt qu'il ne reste plus une seule commune rurale sur notre territoire, ce qui est particulièrement paradoxal à l'heure de l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN) !
Les maires de ces vingt-deux communes marnaises souhaitent savoir si cette recatégorisation aura des répercussions sur les dotations de soutien à l'investissement des collectivités locales. Ces communes seront-elles toujours éligibles à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et à la dotation de solidarité rurale (DSR) ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Michel Fournier, ministre délégué auprès de la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, vous interrogez le Gouvernement sur les conséquences de la nouvelle grille de densité de l'Insee, qui est utilisée pour apprécier la ruralité d'une commune au sens du code général des collectivités territoriales.
Cette grille se fonde sur une méthodologie européenne, qui a vocation à servir de référentiel objectif pour déterminer le caractère rural d'une commune. Je précise qu'elle ne se limite pas à la densité moyenne de population : elle tient également compte de la présence éventuelle de zones concentrant un grand nombre d'habitants sur une petite superficie. Ainsi, plus la population est nombreuse et concentrée, plus la commune est considérée comme dense.
Un changement de classement de l'Insee emporte, il faut bien le dire, peu de conséquences sur les concours financiers de l'État. L'éligibilité à la dotation de solidarité rurale n'est pas affectée. En effet, les critères d'attribution de la DSR reposent non pas sur la densité d'une commune, mais sur sa taille démographique – moins de 10 000 habitants –, sur ses ressources et, pour ce qui concerne la fraction destinée aux bourgs-centres, sur ses charges de centralité.
Si une révision des critères de classement utilisés n'est pas envisagée pour l'instant, il serait tout de même souhaitable d'étudier la possibilité d'ajouter un critère supplémentaire fondé sur la superficie des communes rurales. Une meilleure prise en compte de cette donnée présenterait l'avantage de valoriser les bienfaits qu'apportent la forêt, l'eau, la terre et l'alimentation au pays tout entier. Je suis, bien entendu, prêt à mener cette réflexion.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour la réplique.
Mme Anne-Sophie Romagny. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos propos rassurants.
Toutefois, les fonds européens ou les appels à projets des régions prennent très souvent en considération le critère de la ruralité d'une commune au sens de l'Insee. Cette nouvelle méthode de classification peut donc avoir des répercussions financières.
Vous le dites vous-même, la densité n'est pas un critère satisfaisant. Dès lors, pourquoi l'Insee continue-t-il de s'y référer ? Pourquoi ne pas utiliser le nombre d'habitants, combiné à d'autres critères ? Cette classification est source d'interprétations variables, donc d'erreurs qui ne sont pas sans conséquence.
La question se pose également pour les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou la gestion des cimetières. En France, nous sommes tout de même les champions du monde de la complexité inutile !
Monsieur le ministre, il serait bienvenu que vous adressiez aux maires un courrier rassurant.
situation de l'hébergement d'urgence dans le calvados
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, auteure de la question n° 750, adressée à M. le ministre de la ville et du logement.
Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre, l'hébergement d'urgence représente une solution temporaire pour répondre aux besoins immédiats de personnes en situation de détresse ou de grande précarité, qui sont souvent à la rue. Il fournit un toit provisoire à tous ceux qui sont dans l'incapacité d'accéder au logement classique dans l'immédiat.
Je rappelle que l'hébergement est un droit inconditionnel et qu'il est contraire aux droits de l'homme de laisser une personne à la rue, quels que soient son âge, son genre, son statut administratif ou les raisons qui l'ont conduite à une telle situation.
Dans mon département du Calvados, plus de 1 000 appels en moyenne sont adressés chaque semaine au 115, le numéro d'urgence utilisé par tous ceux qui sont sans logement et en grande difficulté sociale. Malheureusement, certaines demandes de mise à l'abri ne trouvent pas de réponse, car l'hébergement d'urgence est saturé, qu'il s'agisse de l'hébergement généraliste, de l'hébergement des demandeurs d'asile ou de celui des réfugiés.
Des ménages ou des femmes seules avec des enfants de moins de trois ans, des femmes enceintes, ou encore des personnes victimes de violences se retrouvent ainsi régulièrement sans solution. Ce n'est pas admissible !
La résiliation par le ministère du logement, en avril 2024, du marché d'hébergement d'urgence et d'accompagnement social dans le Calvados a provoqué la perte de 500 places. Si 159 places ont été recréées dans la foulée, il en manque encore de nombreuses, a fortiori dans un contexte où les demandes d'hébergement sont en hausse et les moyens alloués insuffisants. En outre, le coût d'une place est plus élevé que par le passé.
L'hébergement d'urgence doit s'inscrire dans un véritable parcours vers le logement et préserver la dignité des personnes hébergées. Nous devons à celles et ceux qui, chaque jour, vivent l'exclusion dans leur chair de respecter cette exigence.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour augmenter, dans les meilleurs délais, le nombre de places d'hébergement d'urgence dans le département du Calvados ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement. Madame la sénatrice Féret, rien qu'au cours de la dernière semaine du mois de septembre, 28 000 personnes ont sollicité le 115 pour une mise à l'abri, dont 8 000 mineurs et 3 700 personnes jusqu'alors inconnues du dispositif. Vous avez raison de rappeler la gravité de la situation.
En effet, la situation sociale et économique est très préoccupante. Face à l'urgence, l'État mobilise cette année plus de 3 milliards d'euros pour ouvrir, chaque soir, près de 203 000 places d'hébergement sur l'ensemble du territoire. Ce parc est stable depuis quatre ans, mais les tensions restent très fortes, y compris en Normandie. La situation du Calvados fait à ce titre l'objet d'un suivi tout particulier.
En février 2024, le contrôle du centre de la Feuilleraie, à Mondeville, a révélé des dysfonctionnements majeurs, notamment en matière de sécurité. C'est pourquoi le ministère avait alors relogé les 150 personnes présentes et fermé l'établissement, ce qui a entraîné la fermeture progressive de 500 places à l'été 2024.
Un plan de reconstitution de l'offre a été immédiatement lancé afin de pallier ces difficultés. Conduit à l'échelle régionale en lien étroit avec les préfets, ce plan a déjà permis de recréer en 2025 près de 300 places dans les trois départements de l'ancienne Basse-Normandie – le Calvados, la Manche et l'Orne.
D'autres mesures sont engagées pour 2026 afin de consolider durablement l'hébergement d'urgence dans la région. Ce travail mobilise l'ensemble des acteurs – services de l'État, associations et opérateurs – pour identifier des sites adaptés, bâtir des projets sociaux solides et financer des solutions réellement adaptées aux bénéficiaires.
L'objectif reste constant : répondre à l'urgence, tout en garantissant des conditions d'accueil dignes et sûres. Depuis 2018, plus de 710 000 personnes ont eu accès à un logement grâce au plan Logement d'abord, ce qui a libéré des places d'hébergement d'urgence et a permis d'améliorer l'accueil.
Le Gouvernement poursuivra évidemment ses efforts et je porterai une attention toute particulière à la reconstitution des places d'hébergement d'urgence dans le Calvados.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour la réplique.
Mme Corinne Féret. Merci de votre réponse, monsieur le ministre.
Comme vous le savez, le Sénat examine en ce moment le projet de loi de finances pour 2026. À cette occasion, le groupe socialiste défendra un amendement visant à augmenter l'enveloppe budgétaire du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». Nous comptons sur votre soutien pour le faire prospérer.
situation du quartier des lozaits à villejuif et gestion du bailleur social batigère
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, auteur de la question n° 795, adressée à M. le ministre de la ville et du logement.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur la situation du quartier des Lozaits à Villejuif, dans le Val-de-Marne, situation que vous connaissez déjà. Le bailleur Batigère y est propriétaire de 1 500 logements, de la voirie et des espaces partagés.
Or, depuis plusieurs mois, les habitants dénoncent un désengagement total de ce bailleur. Une délégation est d'ailleurs présente en tribunes, ainsi que le maire de Villejuif, mon ami Pierre Garzon. Le constat qu'ils font est le suivant : une dégradation avancée du bâti, un manque d'entretien, une absence de gestion de proximité et des travaux du quotidien non assurés. Des projets de réhabilitation lourde, pourtant nécessaires, sont repoussés à des échéances lointaines.
La situation est intenable ! Et le dialogue est rompu. Le maire vous a proposé la constitution d'un comité de pilotage pour faire face à l'urgence, mais aussi pour faire respecter les engagements pris en matière de rénovation urbaine.
Monsieur le ministre, vous n'ignorez pas que ce quartier fait l'objet d'une convention avec l'Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine). L'État y a donc une responsabilité.
La dignité des habitants est en question. Qu'avez-vous à leur répondre ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement. Monsieur le sénateur Savoldelli, permettez-moi de saluer à mon tour M. le maire de Villejuif et la délégation d'habitants ici présente.
Vous avez raison, monsieur le sénateur : comme vous-même, je connais bien le quartier des Lozaits. L'Anru a justement financé une étude visant à concevoir le désenclavement et la rénovation urbaine de ce quartier, dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), qui labellise les deux communes de Villejuif et L'Haÿ-les-Roses.
Les résultats de l'étude urbaine consacrée aux Lozaits permettront, je l'espère, au bailleur de présenter prochainement un véritable programme de travaux ambitieux afin d'assurer la rénovation, tant attendue par les habitants, de ce quartier.
Toutefois, vous avez raison de rappeler que la perspective d'un projet de rénovation urbaine globale ne saurait exonérer un bailleur social de ses obligations d'entretien, pour ce qui concerne le quotidien et les infrastructures.
Le bailleur a lancé une première réhabilitation de la tour Jean-Mermoz. C'est une bonne chose, même si je sais que la municipalité considère que le compte n'y est pas et qu'il faut aller encore plus loin. L'ambition est de faire de même pour la place Auguste-Rodin, ce qui est absolument nécessaire.
Disons-nous les choses clairement : je m'engage devant vous à veiller personnellement à ce que le bailleur engage un dialogue efficace avec la commune, de manière à ce que ses obligations en matière de gestion urbaine de proximité et d'amélioration de la vie quotidienne des habitants soient tenues.
Cela passe par des choses simples, à commencer par la gestion de l'espace extérieur, le retrait des encombrants, ou encore l'entretien des ascenseurs et des boîtes aux lettres.
Monsieur le sénateur, à Villejuif comme ailleurs, le Gouvernement veillera à ce qu'aucun bailleur ne se soustraie à ses obligations de sécurité et de salubrité des logements et des parties communes.
C'est bien pourquoi j'ai annoncé que, dans le cadre du plan logement que je souhaite lancer, nous élargirons la capacité des maires à déclencher le gel des aides personnelles au logement (APL) qui sont directement versées aux bailleurs, afin de mieux protéger les habitants. Concrètement, un maire constatant l'insalubrité d'un parc social doit pouvoir immédiatement déclencher le gel des APL, qui ne seront plus versées au bailleur social tant qu'il n'aura pas réglé le problème.