Ma question est simple, madame la ministre : le Gouvernement a-t-il élaboré un retex sur Chido ? Pourquoi la population de Mayotte n'a-t-elle pas fait l'objet d'une sensibilisation à la veille de la saison cyclonique ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Cathy Apourceau-Poly et Solanges Nadille, MM. Guy Benarroche et Marc Laménie applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Omar Oili, le retour d'expérience est une pratique courante et importante dans les outre-mer, puisque, chaque année, en amont du début de la saison cyclonique, nos territoires se préparent à répondre en cas de crise.

Après la survenance de l'une des catastrophes naturelles les plus intenses de son histoire récente, il est fondamental que Mayotte, tout comme nous tous collectivement, tire les leçons de ce qui s'est passé, qu'il s'agisse de la phase de préparation ou de la gestion de crise.

Au niveau national, la direction générale de la sécurité civile et le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale ont réalisé leur retex. Au niveau zonal, le préfet de La Réunion, en sa qualité de préfet de zone, a organisé à la fin du mois de novembre un séminaire, Cyclonex, consacré notamment au retour d'expérience sur Chido.

La préfecture de Mayotte procède quant à elle à un retour d'expérience local, avec l'appui de la mission interministérielle chargée de la reconstruction et de la refondation, qui synthétise actuellement les nombreuses contributions collectées. Ce document, qui se nourrira des travaux conduits aux niveaux national et zonal, sera remis prochainement au préfet de Mayotte.

Au-delà du retex, l'enjeu réside dans l'organisation de la réponse de sécurité civile (Orsec). Sur la base de la synthèse de la mission, la préfecture de Mayotte est en train de finaliser l'adaptation des plans. À l'instar des actions menées dans les autres territoires des outre-mer, je demanderai au préfet d'organiser dans les prochains jours une présentation consacrée au déroulement de la saison cyclonique, en présence notamment des collectivités. Je veillerai à ce qu'un temps de préparation collective soit ainsi organisé chaque année.

Conformément aux dispositions de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, un bilan des plans de secours prévus sera transmis au comité de suivi avant le 1er mars de l'année prochaine. L'enjeu est aujourd'hui de développer une véritable culture du risque associant l'ensemble du territoire ; l'État pourra ainsi apporter son appui aux communes dans l'adaptation de leur plan communal de sauvegarde.

Vous l'avez compris, monsieur le sénateur, nous souhaitons activer tous les leviers pour assurer la sécurité de nos compatriotes. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour la réplique.

M. Saïd Omar Oili. Madame la ministre, le retex sur Chido sera-t-il transmis aux parlementaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

projet de loi organisant une consultation des populations intéressées de la nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

M. Robert Wienie Xowie. Madame la ministre des outre-mer, ma question porte sur la méthode à marche forcée adoptée par l'État, avec l'organisation d'une consultation anticipée sur le projet d'accord de Bougival et l'examen, au début du mois de janvier au Sénat, d'un projet de loi destiné à la convoquer.

Alors que l'accord de Bougival n'a pas été validé par les bases du FLNKS, que le congrès s'est prononcé le 8 décembre sans majorité – 19 voix pour, 19 abstentions et 14 voix contre – et que votre affirmation selon laquelle cette consultation serait « voulue par les forces politiques locales » est démentie par ce vote, vous choisissez pourtant d'avancer.

Le Parlement avait reporté les provinciales pour « poursuivre la discussion en vue d'un accord consensuel », reconnaissant que Bougival n'était pas finalisé. Vous avez vous-même indiqué qu'il fallait « apporter des éclaircissements, des précisions, des compléments ». Or la mission que vous avez dépêchée sur place n'a rien permis de clarifier ; la consultation porterait toujours sur le texte publié au Journal officiel sans aucun des compléments attendus.

À cette situation s'ajoutent une base juridique contestée, un calendrier inversé par rapport aux précédents accords et l'absence de consensus local, y compris parmi les signataires de Bougival, comme le montrent les abstentions de l'Union nationale pour l'indépendance (UNI), de l'Éveil océanien et de Calédonie ensemble, qui ont affirmé leur opposition à l'organisation de la consultation anticipée.

Madame la ministre, dans ces conditions, face à un projet incomplet, non validé, juridiquement incertain et politiquement clivant, face à l'opposition du FLNKS, le Gouvernement entend-il maintenir, revoir cette consultation anticipée ou y renoncer ? Dans chacun de ces scénarios, sur quelles bases politiques, juridiques et démocratiques justifieriez-vous votre décision, sachant qu'une consultation risquerait d'aggraver la crise et de creuser les divisions ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Xowie, il n'y a pas de méthode à marche forcée, pour reprendre votre expression. Depuis que je suis aux responsabilités, et même avant moi, la méthode est la même : celle du dialogue et du respect. Nous nous efforçons de trouver un chemin commun pour les Calédoniens.

Avoir envisagé la consultation des Calédoniens, c'est la définition même de ce que l'on appelle un exercice démocratique. Donner la parole à ceux qui sont concernés pour qu'ils se prononcent sur un accord n'est pas un passage en force. Recueillir l'avis du congrès de Nouvelle-Calédonie, c'est aussi une démarche démocratique.

Comme vous l'avez rappelé, le congrès s'est donc prononcé le 8 décembre à une majorité de 19 voix pour, 14 contre et 19 abstentions. Le paysage politique est dispersé, je ne dis pas le contraire.

Le Gouvernement analyse actuellement les contributions écrites de chaque formation politique, annexées à l'avis rendu par le congrès. Il poursuit les concertations avec l'ensemble des parties prenantes pour déterminer la suite à donner au processus. Tous ceux que nous avons entendus, notamment au travers de ce vote du congrès, ont exprimé une volonté commune d'avancer et de poursuivre dans cette voie. Vous l'aviez vous-même souligné à l'occasion de la réunion du groupe de contact ; nous partageons cette analyse : un chemin existe.

Je l'ai indiqué, le Gouvernement prendra le temps nécessaire pour analyser la situation et maintenir un cadre d'échanges disponible et respectueux, comme il l'a toujours fait. Cette démarche est conforme à l'esprit du courrier que j'avais moi-même adressé à chacun des membres des formations politiques avant qu'ils ne se prononcent le 8 décembre. Je leur avais notamment précisé que l'État accompagnerait toutes les demandes d'échanges et de travaux formulées et que nous resterions pleinement mobilisés pour poursuivre les voies de discussion avec l'ensemble des acteurs.

Dans le même temps, nous sommes soucieux de donner de la visibilité aux Calédoniens. Vous l'avez constaté, nous avons avancé sur le volet économique et sur la situation de la Nouvelle-Calédonie avec un plan ambitieux. Là aussi, nous sommes à l'écoute de nos partenaires.

C'est donc cette même méthode qui continuera à nous guider dans les prochains jours, monsieur le sénateur, pour dessiner, avec les forces politiques locales, la suite de ce processus.

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour la réplique.

M. Robert Wienie Xowie. Madame la ministre, vous demandez au peuple de se prononcer sur un texte inachevé, juridiquement contesté et qui ne fait pas consensus localement, alors même que sa voix lui a été retirée du fait du report des provinciales le mois dernier.

Vous nous donnez des leçons de démocratie. Vous annoncez votre volonté de donner la voix aux Calédoniens. Quel comble pour un gouvernement qui se refuse à écouter la parole de son propre peuple ! Cessons d'entretenir le flou démocratique ; organisons les élections provinciales ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !

dépendance européenne aux terres rares chinoises

M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Stéphane Demilly. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie.

La semaine dernière, monsieur le ministre, le Président de la République était en déplacement à Pékin. Un sentiment prévaut : nos relations diplomatico-économiques se tendent très sérieusement.

J'évoquerai un seul exemple, dont on ne mesure pas l'onde de choc qu'il a provoquée : la décision de Pékin d'imposer de nouvelles licences d'exportation pour les terres rares. Cette mesure administrative a affolé de nombreux industriels. La Commission européenne elle-même se trouve saturée d'appels de dirigeants particulièrement paniqués. Cette vulnérabilité n'est pas qu'économique, elle est multisectorielle.

Je citerai quelques cas concrets, monsieur le ministre.

Sans ces métaux stratégiques, pas d'Airbus A350, dont les alliages spéciaux contiennent du scandium. Sans ces métaux, pas d'éolienne offshore à Saint-Nazaire, dont les turbines nécessitent des aimants permanents. Sans ces métaux, pas de batteries pour les usines automobiles de Dunkerque ou de Douvrin. Sans ces métaux, pas de radar ni de système de guidage pour les forces armées. Sans ces métaux, pas de scanner hospitalier ni de réseau de télécommunication avancé. J'arrête là ma litanie, mais ces quelques exemples emblématiques nous montrent bien la gravité du sujet.

La Commission européenne l'a bien compris, un peu tardivement selon moi, et passe enfin à l'offensive, en annonçant la création d'un centre européen des matières premières critiques, prévu, me semble-t-il, pour 2026. Le commissaire européen Stéphane Séjourné a ainsi déclaré : « Le coût de l'indépendance est élevé, mais il est bien plus faible que celui de la dépendance. »

Monsieur le ministre, la France saisira-t-elle pleinement la dynamique européenne pour sortir de cette dépendance et garantir, enfin, sa souveraineté minérale et industrielle ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Vincent Louault et Louis Vogel applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur Demilly, vous l'avez dit, le Président de la République était en Chine la semaine dernière et j'ai eu l'honneur de l'accompagner. Nous avons notamment signifié aux autorités chinoises que le contrôle des exportations ne nous semblait pas constituer une arme adéquate dans le contexte des tensions commerciales actuelles. Si un tel contrôle existe depuis longtemps, il doit rester cantonné aux enjeux de défense, notamment la lutte contre la prolifération nucléaire.

Au regard de ce qui est sur le point de devenir une arme comme une autre, propre à contribuer aux tensions commerciales, notre réponse se décline en trois temps.

D'abord, à court terme, face aux mesures prises par la Chine pour contrôler les exportations, certaines ayant été suspendues pour un an à la suite des discussions avec les États-Unis, tandis que d'autres s'appliquent depuis le mois d'avril, nous devons aider les entreprises à obtenir les licences dont elles ont besoin.

Par conséquent, j'invite celles qui cherchent des licences d'exportation de terres rares à nous contacter. Le service économique sur place leur apporte ce soutien : 300 licences ont d'ores et déjà été obtenues. Nous poursuivrons cet accompagnement.

Ensuite, à moyen terme, il est temps de diversifier nos approvisionnements, faute de quoi cette solution n'est pas viable.

C'est ce que nous faisons avec les Européens, dans le cadre du nouveau plan RESourceEU. C'est ce que nous faisons avec les autres pays du G7 « Énergie », qui s'est réuni, j'étais présent, à Toronto. Nous déployons un plan de collaboration non seulement avec les pays du G7, mais avec des partenaires historiques producteurs de matériaux de base en général et de terres rares en particulier, avec lesquels nous nouons nos partenariats sur le terrain. Des accords ont déjà été signés entre des entreprises canadiennes et des entreprises françaises ; il convient de les multiplier.

Enfin, quel que soit le terme envisagé, il importe d'assurer le bon fonctionnement du marché. En effet, des producteurs chinois, pour ne pas les citer, ont tendance à faire baisser très fortement les prix sur le marché pour évincer les concurrents et les faire disparaître. Il s'agit donc d'un enjeu de contrôle et de régulation du marché ; nous souhaitons le traiter au sein du G7.

Vous l'avez compris, monsieur le sénateur, nous faisons feu de tout bois sur ce dossier compliqué, marqué par des dépendances aujourd'hui bien trop importantes, mais qui représente un enjeu majeur de la révolution technologique à l'œuvre. Nous poursuivons donc nos efforts. (MM. François Patriat, Thani Mohamed Soilihi et Michel Masset applaudissent.)

france 2030 et financement des dépenses d'avenir

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Thomas Dossus. Ma question s'adresse au ministre de l'économie.

Elle portera sur le projet de loi de finances en cours d'examen. Celui-ci tourne le dos à l'avenir. Tout ce qui nous permettrait de faire face aux crises y est sacrifié ou comprimé.

L'écologie, et notamment le fonds vert, est ainsi devenue une variable d'ajustement budgétaire. La France ne respecte plus ses objectifs en matière de climat, d'adaptation ou de protection de la biodiversité.

Dans un monde qui fait face à de nombreuses crises, la solidarité internationale est de nouveau sacrifiée. Il en va de même pour la voix de la France.

Le budget de la recherche n'est pas à la hauteur de la trajectoire prévue dans la loi de programmation : l'écart est d'un demi-milliard d'euros – excusez du peu !

Le budget de l'armée passe devant celui de l'éducation – tout un symbole !

Ces contractions et ces baisses budgétaires résultent, disons-le clairement, de vos choix, monsieur le ministre, mais aussi des votes de la droite et du centre au Sénat, puisque la majorité sénatoriale a choisi d'amplifier la crise des caisses vides, en nous privant de 8 milliards d'euros de recettes supplémentaires. On renonce aux recettes, on coupe dans les dépenses : finalement, la France s'affaiblit et l'inquiétude quant à l'avenir grandit.

Le sort réservé au budget du plan France 2030, un budget consacré à l'innovation, est à la fois le symbole et le symptôme de cette situation.

Ce programme d'investissements d'avenir devait, pour reprendre les mots de Michel Rocard, nous aider à nous extraire de la « tyrannie du court terme », en sanctuarisant 54 milliards d'euros, sur plusieurs années, pour notre avenir industriel et écologique.

Tout n'est pas parfait dans ce programme. On peut parfois regretter son émiettement ou son manque de pilotage. En tant qu'écologiste, je suis moi-même assez dubitatif sur un certain nombre de projets soutenus ; mais France 2030 est vital pour nos filières industrielles, pour la décarbonation, pour la recherche et pour tous les territoires.

Pourtant, certains ici prévoient de mettre un coup d'arrêt brutal, l'année prochaine, à tout nouveau projet dans le cadre de France 2030, comme si nous pouvions mettre en pause la décarbonation de l'industrie, la recherche dans les énergies propres ou la santé…

Je rappelle que vous avez déjà opéré une ponction de 1,6 milliard d'euros sur la trésorerie des opérateurs en fin d'année.

Monsieur le ministre, face à cette approche purement comptable, la recherche et l'innovation ont-elles encore un avenir dans ce pays ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.

M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur, comme je le disais tout à l'heure, nous rentrons juste de Chine, où l'innovation et les investissements dans le progrès technologique n'attendent pas, non plus que les investissements dans la décarbonation, même si l'on peut observer certaines contradictions, puisque le pays ouvre à la fois des centrales à charbon et investit, comme jamais auparavant, dans le nucléaire et les énergies renouvelables.

Il me semble donc qu'il est extrêmement important que nous continuions à investir. Mais, nous devons aussi redresser les comptes, car c'est une nécessité absolue : l'enjeu est d'y parvenir, en évitant d'étouffer l'économie.

Dans tous les cas, il convient de continuer à investir dans l'innovation et dans les technologies du futur, de manière que la France conserve l'avance qu'elle a dans un certain nombre de technologies, telles que l'ordinateur quantique, par exemple – la France possède des équipes d'une grande compétence en ce domaine.

Nous devons aussi poursuivre l'effort de décarbonation de notre industrie. Nous avons lancé, dans ce domaine, plusieurs projets concrets : je pense en particulier à la vallée de la batterie autour de Dunkerque, où nous avons pris des engagements pour aider les entreprises qui sont en train d'investir, de créer des emplois, mais aussi des filières d'avenir en France.

Je suis donc convaincu qu'il faut continuer à soutenir ces filières. Or, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, c'est justement l'objet du plan France 2030.

Si les parlementaires ont des interrogations sur la manière dont ce programme est exécuté, rien ne leur interdit d'exercer leurs prérogatives de contrôle. J'y insiste, je suis convaincu que nous devons continuer à investir dans les secteurs d'avenir.

La mission « Investir pour la France de 2030 » a participé à l'effort budgétaire, en reversant au budget général – et non au ministère de l'économie ! – les excédents de trésorerie qui n'étaient pas indispensables.

En revanche, des engagements ont été pris pour 2026, à hauteur de 500 millions d'euros au moins, que nous devons, à mon avis, continuer à honorer, pour soutenir la réalisation de projets très importants comme la construction de la gigafactory du groupe Verkor, ou pour aider la filière automobile, qui fait aujourd'hui face à des défis particuliers.

Le message est clair : il faut continuer à investir. Vous débattrez au Sénat des crédits de cette mission dans quelques jours, en présence de mon collègue Sébastien Martin.

Je vous engage non seulement à faire preuve de rigueur en matière budgétaire, certes, mais aussi à ne pas oublier les investissements d'avenir, et notamment le plan France 2030, qui constitue, selon moi, un beau programme qu'il faut continuer à déployer.

messages hostiles à la police à lyon et à marseille

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François-Noël Buffet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Samedi dernier à Lyon, lors de la fête des Lumières, cette fête traditionnelle qui a lieu autour du 8 décembre, des messages ouvertement hostiles aux forces de l'ordre ont été projetés dans l'espace public, affirmant notamment : « La police blesse et tue. »

Le même jour, à Marseille, lors d'un meeting, M. Sébastien Delogu, député et candidat du parti La France insoumise (LFI) aux prochaines élections municipales, a repris publiquement le slogan « La police tue ».

Ces mises en scène et ces propos sont non seulement scandaleux et répréhensibles, mais ils sont aussi profondément insultants, et surtout irresponsables et dangereux.

Ils mettent littéralement une cible dans le dos des membres de nos forces de l'ordre qui, chaque jour, risquent leur vie pour protéger la nôtre.

Dans ces conditions, l'extrême gauche cherche à attiser les tensions et à déstabiliser le système. Celle-ci n'a, en réalité, qu'une seule ambition : la destruction de notre République.

Mme Marie-Arlette Carlotti. Vous préparez une alliance avec l'extrême droite !

M. François-Noël Buffet. Ces discours de haine n'ont pas leur place dans notre démocratie !

J'ai donc trois questions, monsieur le ministre.

À Lyon, une plainte a été déposée. Pouvez-vous nous confirmer qu'il en sera de même à Marseille, compte tenu des propos qui ont été tenus ?

Ensuite, à Villeurbanne, dans l'agglomération lyonnaise, un rassemblement susceptible de porter le même type de message doit se tenir très prochainement. Est-il encore opportun de le maintenir ? On peut se poser la question.

Enfin, les Soulèvements de la Terre ont revendiqué les actes lyonnais. Quelle action le Gouvernement compte-t-il entreprendre contre ce mouvement, qui a d'ailleurs déjà fait l'objet d'une procédure de dissolution, sans suite malheureusement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Je souscris évidemment, vous l'imaginez bien, monsieur le sénateur, à l'intégralité de vos propos.

Ces messages, tels que « La police tue », sont odieux et ils sont fréquemment repris, comme nous l'avons constaté à la fête des Lumières à Lyon ou dans un meeting à Marseille.

Je tiens tout d'abord à apporter, au nom du Gouvernement et, je n'en doute pas, de l'intégralité des sénateurs, un soutien sans faille à nos forces de sécurité intérieure, qui nous protègent.

Pourquoi ces messages sont-ils terribles ?

D'abord, parce qu'ils font référence à des actions de police, qui sont parfois en cours de jugement ou qui, souvent, ont déjà été jugées, les policiers ayant été mis hors de cause, car ils avaient fait un usage proportionné de la force.

Ceux qui tiennent ces propos s'inscrivent en réalité dans une démarche de négation de la police ; ce sont des partisans du désordre, et il faut les nommer comme tels.

Ensuite, ces messages sont graves parce qu'ils laissent entendre aux jeunes de notre pays que la police leur en veut, les stigmatise et que, si elle les contrôle, par exemple, c'est en raison de leur origine ou de leur quartier. Voilà une insinuation extrêmement grave, qui constitue une atteinte directe à notre cohésion nationale.

Alors, que fait le Gouvernement ? Je vais répondre très clairement à votre question.

Dans les deux cas, que ce soit pour les incidents survenus lors de la fête des Lumières à Lyon ou, évidemment, pour les propos tenus à Marseille dans le cadre d'un meeting, les préfets, à ma demande, ont déposé plainte en application de l'article 40 du code de procédure pénale. La justice sera donc saisie. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Dans le cadre du festival que vous évoquez, monsieur le sénateur, et qui doit se tenir à Villeurbanne, vont se produire des groupes qui tiennent le même genre de propos. Nous le savons, c'est documenté. La préfète du Rhône va donc purement et simplement interdire ces concerts. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Enfin, chaque fois que des propos comme ceux-ci sont tenus – des propos qui incitent à la haine, à la discrimination ou à la violence –, nous documentons les faits et nous préparons des dossiers de dissolution de la structure en cause. Aucune d'entre elles n'est au-dessus des lois. Celles que vous avez citées, monsieur le sénateur, font évidemment l'objet, comme d'autres, d'un examen très attentif par les services du ministère de l'intérieur – vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur le sénateur, compte tenu des fonctions que vous avez occupées. (Applaudissements sur les travées du groups Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)

situation en nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Bitz applaudit également.)

M. Georges Naturel. Madame la ministre des outre-mer, le congrès de la Nouvelle-Calédonie vient de rendre son avis sur le projet de loi organisant une consultation des populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie sur l'accord de Bougival, qui inverse le calendrier initialement prévu.

Cet avis révèle de profondes divisions.

Des non-indépendantistes sont favorables à l'organisation d'une consultation, tout en appelant pour certains l'État à reprendre le dialogue ; ils ont recueilli 19 voix.

D'autres mouvements, indépendantistes et non-indépendantistes, se sont abstenus, ce qui représente également 19 voix. Ils soutiennent l'accord, mais demandent des compléments pour retrouver le consensus perdu.

Enfin, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) a voté contre, par 14 voix, tout en appelant à entreprendre toutes les démarches encore possibles pour rapprocher les positions et rechercher une solution partagée.

Lors des accords précédents, la consultation n'avait jamais eu pour objet de contourner une formation hostile ni de se substituer au consensus : elle visait à consacrer ce dernier démocratiquement. C'est ce chemin qu'il nous faut reprendre.

De plus, cette consultation anticipée ne répond ni à la lettre de l'accord de Bougival ni à l'esprit de la loi du 6 novembre 2025 visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, qui visait à permettre « la poursuite de la discussion en vue d'un accord consensuel ».

Madame la ministre, vous avez écrit aux membres du congrès le jour du vote : « Quelle que soit l'orientation retenue, l'État restera mobilisé pour poursuivre, avec l'ensemble des partenaires, les voies de discussion qui vous paraîtraient devoir être engagées. » Il est urgent de donner corps à cet engagement.

Ma question est donc la suivante : quelle suite entendez-vous donner concrètement à ce projet de loi ? Ne serait-il pas plus opportun que l'État renoue le fil du dialogue et tente de nouveau de faire émerger un consensus, alors que notre pays continue de s'enfoncer dans un chaos économique et social ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Olivier Bitz et Rachid Temal et Mme Corinne Narassiguin applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a émis un avis favorable, mais partagé, sur ce projet de loi relatif à l'organisation d'une consultation anticipée.

Dans ce contexte, le Gouvernement souhaite poursuivre les discussions avec les forces politiques locales qui veulent avancer. Ce processus ne sera pas défini de manière unilatérale.

Le dialogue entre les acteurs locaux, nous le savons, est essentiel pour construire l'avenir de la Nouvelle-Calédonie. Il nourrira les travaux du Parlement par la suite – le Sénat y aura évidemment toute sa place, comme cela a toujours été le cas.

J'en profite d'ailleurs pour saluer l'engagement constant de tous ceux qui s'investissent sur ce sujet – je pense notamment à M. le président du Sénat et aux présidents des groupes parlementaires, à travers le groupe de contact.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire, et je veux insister sur ce point, monsieur le sénateur, car je sais qu'il vous préoccupe également, le temps économique ne peut pas être suspendu au temps institutionnel. Il faut que nous puissions avancer sur deux jambes.

La situation exige des réponses immédiates. Je vous rejoins pleinement sur la nécessité d'assurer la stabilité économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie.

Le 4 décembre dernier, le Premier ministre a adressé un courrier à l'ensemble des forces politiques pour détailler les engagements massifs de l'État dans le cadre du pacte de refondation que nous voulons mettre en place pour la Nouvelle-Calédonie.

Pa railleurs, lors de l'examen des crédits de la mission « Outre-mer », auquel vous avez participé, monsieur le sénateur, le Sénat a adopté un certain nombre d'amendements, qui permettront de dessiner l'avenir et les modalités de la reconstruction de ce territoire. Nous avons ainsi évoqué les investissements dans le nickel, le soutien à l'investissement des entreprises, grâce au choc fiscal que nous souhaitons mettre en œuvre, la garantie émeutes et l'insertion des jeunes. J'avais d'ailleurs déjà eu l'occasion de discuter avec vous de ces sujets, monsieur le sénateur.

En conclusion, pour être claire, le Gouvernement sera pleinement au rendez-vous sur le plan économique. Pour le reste, le dialogue se poursuit. La situation est donc évolutive : il n'y a ni enlisement ni instabilité. Évidemment, l'avenir de ce territoire demeure notre priorité commune. Je ne souhaite pas préjuger du résultat des discussions en cours, mais je vous le dis : les échanges se poursuivent avec les forces politiques pour dessiner la suite, et il y en a eu encore aujourd'hui. (M. François Patriat applaudit.)