Sommaire
Présidence de Mme Sylvie Vermeillet
Mise au point au sujet d'un vote
Suite de la discussion d'un projet de loi
Direction de l'action du Gouvernement
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
Conseil et contrôle de l'État (suite)
Direction de l'action du Gouvernement (suite)
Budget annexe : Publications officielles et information administrative (suite)
Relations avec les collectivités territoriales
Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
Questions d'actualité au Gouvernement
situation de l'électricité en france
120e anniversaire de la loi sur la laïcité
projet de loi organisant une consultation des populations intéressées de la nouvelle-calédonie
dépendance européenne aux terres rares chinoises
france 2030 et financement des dépenses d'avenir
messages hostiles à la police à lyon et à marseille
situation en nouvelle-calédonie
ligne ferroviaire bordeaux-lyon
préparation de l'état à la dénatalité
conversion de la centrale de saint-avold
situation de l'industrie française et de l'entreprise brandt
maladie de charcot et parution des décrets d'application
Mise au point au sujet d'un vote
Adoption en procédure d'examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission
Suite de la discussion d'un projet de loi
Relations avec les collectivités territoriales (suite)
Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales (suite)
relations avec les collectivités territoriales
(À suivre)
Présidence de Mme Sylvie Vermeillet
vice-présidente
1
Mise au point au sujet d'un vote
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Vérien.
Mme Dominique Vérien. Le 9 décembre 2025, lors du scrutin public n° 110 portant sur l'amendement n° II-1 du rapporteur général de la commission des finances, M. Hervé Maurey souhaitait voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
2
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport général n° 139, avis nos 140 à 145).
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Pouvoirs publics
Conseil et contrôle de l'État
Direction de l'action du Gouvernement
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics », de la mission « Conseil et contrôle de l'État », de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Grégory Blanc, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la mission « Pouvoirs publics » est caractérisée par l'autonomie financière des institutions qu'elle recouvre. Cette autonomie trouve son fondement dans le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, énoncé par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
À cette fin, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf) prévoit l'existence de cette mission budgétaire. En outre, l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dispose que les crédits nécessaires à leur fonctionnement font l'objet de propositions préparées par les questeurs et arrêtées par une commission commune, puis inscrites au « projet de loi budgétaire ».
Fort de ces textes, le Conseil constitutionnel a confirmé que « les pouvoirs publics constitutionnels déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement », un principe dont je serai amené à rappeler la nécessaire application dans le cadre de l'examen des amendements déposés.
S'agissant des crédits présentés pour 2026, je n'entrerai pas dans le détail ; non seulement ce serait trop long, mais je sais que vous suivez attentivement ces sujets. J'insisterai, en revanche, sur les grandes évolutions et sur quelques points d'attention qui me semblent importants.
Tout d'abord, le gel des dotations, finalement acté en 2025 dans une logique d'exemplarité pour la Présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat, est reconduit en 2026. La dotation de l'Élysée s'élève ainsi à 122,6 millions d'euros, celle de l'Assemblée nationale à 607,6 millions d'euros et celle du Sénat à 353,5 millions d'euros.
Si ce gel, continu depuis 2024, peut, à première vue, être salué, il pose dès à présent les limites de ce que ces institutions peuvent financer à dotation constante. Un regard rétrospectif permet d'ailleurs de mesurer les enjeux : entre 2011 et 2025, le montant total des dotations de la mission a progressé de 12 % en euros courants ; mais, en neutralisant l'inflation, il a diminué en réalité d'environ 10 %.
Dans le détail, cette baisse en euros constants atteint près de 13 % pour le Sénat, 12 % pour la Présidence de la République et 8 % pour l'Assemblée nationale. Cette évolution a été rendue possible par un effort soutenu de maîtrise des dépenses.
Un effort supplémentaire devrait être effectué s'agissant des effectifs du cabinet du Président de la République, du fait de la dissolution et de la redistribution des pouvoirs. Il semble que les effectifs de ce cabinet auraient pu être diminués davantage ; or c'est l'inverse qui s'est produit.
Néanmoins, cette évolution de l'ensemble des crédits s'est également traduite par une érosion importante des réserves des trésoreries de chacune des institutions. Pour la seule année 2026, le solde budgétaire prévu s'établirait à environ - 34 millions d'euros pour l'Assemblée nationale, tandis que le prélèvement sur les disponibilités atteindrait 22 millions d'euros au Sénat.
Or, j'y insiste, la faiblesse des réserves pose des problèmes. Il appartient en effet aux pouvoirs publics de garantir la continuité du fonctionnement démocratique. En cas de crise institutionnelle, nos institutions doivent en effet pouvoir fonctionner. Aujourd'hui, la hauteur des réserves, ou plutôt leur faiblesse, interroge cette garantie.
Par ailleurs, la contrainte budgétaire pèse très fortement sur la capacité d'investissement des institutions, notamment pour la rénovation du patrimoine historique et des installations techniques qui leur sont confiés, ainsi que celles qui sont nécessaires à la transition écologique. Sans revalorisation adaptée des dotations, ces investissements devront être différés pour une part, au détriment de la préservation du patrimoine et des objectifs environnementaux, en particulier la trajectoire vers la neutralité carbone.
J'en viens aux autres institutions.
La dotation de la Cour de justice de la République (CJR) recule certes de 8,5 %, mais son activité demeure très limitée. La Chaîne parlementaire (LCP) et le Conseil constitutionnel voient, quant à eux, leurs crédits progresser respectivement de 1 % et de 11,5 %, dans un contexte, pour le Conseil, de reconstitution de son niveau de trésorerie, d'investissements, ainsi que de préparation de l'élection présidentielle de 2027.
Au total, les crédits de la mission atteignent 1,14 milliard d'euros en 2026, soit une hausse modérée de 0,2 % par rapport à 2025.
La commission des finances appelle donc à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Christian Bilhac, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient de vous présenter, au nom de la commission des finances, la mission « Conseil et contrôle de l'État », qui rassemble les crédits des juridictions administratives et financières, ainsi que du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit une baisse de 2,6 % des crédits de paiement de la mission, qui atteindraient 869,3 millions d'euros. En tenant compte de la cible d'inflation de 1,3 % annoncée par le Gouvernement, cette baisse est encore plus importante et s'élève à 3,3 %. Cette mission contribue donc fortement à l'effort de redressement des finances publiques.
Je commencerai par évoquer la situation des juridictions financières.
Leurs crédits augmentent de 3,2 % en 2026, hausse due presque exclusivement aux dépenses de personnel, notamment du fait de l'application en année pleine du nouveau régime indemnitaire des magistrats financiers. À l'inverse, les dépenses hors personnel demeurent stables, après deux années de baisse. Il faut s'en féliciter : la Cour des comptes a poursuivi un effort réel de maîtrise budgétaire, notamment grâce à la réduction des frais énergétiques et à l'optimisation des achats.
S'agissant du Cese, son budget atteint 34,1 millions d'euros en 2026, un niveau globalement stable. J'ai parfois exprimé, à titre personnel, des réserves sur les moyens consacrés à cette institution, en particulier sur l'enveloppe consacrée à la participation citoyenne. Néanmoins, le Sénat s'est toujours montré attentif à ce que le Cese, troisième assemblée constitutionnelle, dispose des ressources nécessaires à la préservation de son autonomie.
J'en viens au programme 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives ». Après une stabilisation en 2025, celui-ci connaît en 2026 une baisse marquée des crédits de paiement, de l'ordre de 5,2 %. Cette diminution tient surtout à l'achèvement d'investissements importants, dont les travaux de relogement du tribunal administratif et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) à Montreuil. Les investissements reculent mécaniquement de 56,7 %.
Les crédits de fonctionnement poursuivent, quant à eux, une trajectoire vertueuse, en léger recul. La généralisation des téléprocédures, via Télérecours, entraîne depuis plusieurs années des économies substantielles sur les frais postaux : elles pourraient atteindre près de 6 millions d'euros en 2026.
Je souhaite toutefois revenir sur la situation des effectifs. L'année dernière déjà, j'alertais sur les risques créés par le gel décidé par le Gouvernement. Le PLF pour 2026 prolonge ce gel, alors même que l'activité des juridictions administratives explose. Les recours augmentent massivement depuis trois ans : le stock des affaires a progressé de près de 30 % depuis 2019, et 2025 devrait établir un record, avec environ 40 000 requêtes supplémentaires.
Le cas du tribunal du stationnement payant (TSP) est à cet égard particulièrement préoccupant : son activité a triplé depuis 2018, sans augmentation des effectifs.
Le Conseil d'État lui-même le reconnaît, à moyens constants, absorber un tel flux sera difficile pour les juridictions administratives. Il faut donc s'attendre à un allongement des délais de jugement en 2026. Pour faire face, les juridictions administratives explorent des pistes : recours à l'intelligence artificielle (IA) et extension du recours au juge unique pour certains contentieux, par exemple.
Monsieur le ministre, ne nous y trompons pas : ces réponses ne suffiront pas. Une réflexion globale devra s'ouvrir sur les moyens à consacrer à nos juridictions administratives. Le redressement des finances publiques ne peut durablement se faire au détriment des fonctions régaliennes, piliers du pacte républicain.
Malgré ces réserves, je vous invite, au nom de la commission des finances, à adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. Vincent Capo-Canellas et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2026 pour la mission « Direction de l'action du Gouvernement », qui réunit les services du Premier ministre, ainsi que plusieurs autorités administratives indépendantes (AAI), s'élèvent à 1,283 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE), un niveau quasi constant par rapport à 2025, et à 1,060 milliard d'euros en crédits de paiement (CP), ce qui représente une hausse modérée de 3,3 %.
En 2026, la mission « Direction de l'action du Gouvernement » poursuit ainsi ses efforts de maîtrise des dépenses publiques, dans la continuité de la loi de finances initiale (LFI) pour 2025.
En particulier, les crédits hors personnel ne connaissent pas de progression par rapport à la LFI pour 2025, en dehors de ceux qui sont dédiés au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), qui augmentent de 10,2 millions d'euros, en cohérence avec la priorité budgétaire donnée aux moyens alloués à la défense dans le cadre du présent projet de loi de finances.
S'agissant des crédits de personnel, ceux-ci présentent une hausse de 23,6 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2025, pour atteindre 390,4 millions d'euros en 2026. Les crédits de titre 2 dédiés au SGDSN représentent l'essentiel de cette progression, avec une augmentation de 14,7 millions d'euros.
Dans le même sens, les efforts de maîtrise des crédits sur le programme 129, « Coordination du travail gouvernemental », se traduisent par un schéma d'emplois négatif : -7 équivalents temps plein (ETP) en 2026.
Quant aux autorités administratives indépendantes rattachées au programme 308, « Protection des droits et libertés », leur schéma d'emplois est nul en 2026.
Je souhaiterais développer plus particulièrement deux observations concernant les évolutions prévues pour les administrations et autorités rattachées à la mission en 2026.
En premier lieu, et dans la suite du rapport de contrôle de la commission des finances sur le Haut-Commissariat au plan (HCP), je voudrais souligner les économies associées à la fusion entre le HCP et France Stratégie au sein du Haut-Commissariat à la stratégie et au plan (HCSP), dont la traduction budgétaire sera effective au 1er janvier 2026.
La mise en œuvre de cette fusion devrait permettre des économies importantes, en proportion des moyens du Haut-Commissariat, avec, d'une part, une réduction des dépenses de fonctionnement du fait de la mutualisation de certaines fonctions, et, d'autre part, une diminution des effectifs, avec un schéma d'emplois négatif de 10 ETP.
À cet égard, la commission des finances propose, au travers de son amendement n° II-4, de poursuivre ce mouvement de rationalisation des instances de stratégie et de prospective, en fusionnant trois hauts conseils rattachés au HCSP.
En second lieu, les enjeux de cybersécurité et de protection des données personnelles devraient continuer à fortement mobiliser les administrations et les autorités compétentes.
De fait, la France connaît une intensification des cyberattaques, avec une hausse de 15 % entre 2023 et 2024. Dans ce contexte, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), rattachée au SGDSN, devrait de nouveau voir ses effectifs progresser, de 4 ETP en 2025 et de 8 ETP en 2026.
De même, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) a vu ses missions s'élargir grandement depuis l'entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données (RGPD) en 2018, puis, dans la période récente, avec l'adoption de nouveaux textes européens en matière de régulation des acteurs du numérique.
Le PLF pour 2026 prévoit pour la Cnil une enveloppe de 31,23 millions d'euros en AE et en CP. La hausse observée sur les crédits de personnel, de 0,95 million d'euros, résulte principalement des facteurs d'évolution automatique, la Cnil ne bénéficiant d'aucune création d'emploi, tout comme les autres AAI du programme 308.
Afin de limiter l'augmentation des crédits de la mission, résultant de la hausse des moyens alloués à la défense et à la sécurité nationale au sens large, la commission des finances propose, au travers de son amendement n° II-5, de geler en valeur les crédits de plusieurs actions budgétaires.
Avant de conclure, je voudrais dire quelques mots sur le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Ce budget annexe, géré par la direction de l'information légale et administrative (Dila), devrait connaître en 2026 un niveau de recettes de 175,3 millions d'euros, en baisse de 5 % par rapport à 2025, du fait des effets du cycle électoral sur les recettes du Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP). Compte tenu de la diminution des dépenses de 1,6 million d'euros, pour représenter 147,4 millions d'euros, la gestion du budget annexe dégagerait un nouvel excédent de 27,9 millions d'euros en 2026, proche de celui qui était prévu pour 2025.
Présentant un schéma d'emploi à zéro pour 2026, qui fait suite à une baisse de 37 % des effectifs sur la période 2014-2024, la Dila devrait poursuivre activement le déploiement de ses projets de modernisation numérique.
Au regard de ces différents éléments, la commission des finances proposera d'adopter les crédits ainsi modifiés de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », ainsi que les crédits sans modification du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Olivier Cadic, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà neuf ans que je présente le budget du programme 129, « Coordination du travail gouvernemental », et, désormais, nul n'est besoin d'expliquer son utilité : chacun a eu connaissance, ou a subi, une cyberattaque, qu'elle vise France Travail, l'Urssaf, un hôpital, ou qu'elle prenne la forme d'un faux message bancaire ou d'un faux colis.
L'objet de l'action n° 02, « Coordination de la sécurité et de la défense » entre dans le champ de compétence de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, au titre des fonctions de cybersécurité, de protection contre les ingérences numériques étrangères et de soutien aux services de renseignement, prévues par la Revue nationale stratégique (RNS) 2025.
C'est d'ailleurs parce qu'il concerne la défense et la sécurité nationale que ce projet de budget est l'un des rares à augmenter par rapport à 2025, avec 431 millions d'euros pour 2026. Seront donc confortés les moyens du SGDSN, de l'Anssi, du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) et de l'Opérateur des systèmes d'information interministériels classifiés (Osiic), ainsi que les fonds spéciaux pour le financement des actions couvertes par le secret de la défense nationale.
La commission a proposé l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Je voudrais, pour conclure, évoquer plusieurs questions restées sans réponses qui sont autant de points d'alerte.
De nouvelles stratégies nationales de cybersécurité et de lutte contre les manipulations de l'information avaient été annoncées l'an dernier. Quand nous seront-elles communiquées ? Quand seront-elles publiées ?
Les cyberattaques et les manipulations de l'information concernent toute la population. Quand disposerons-nous des retours d'expériences de l'Anssi sur les attaques massives que j'ai évoquées ?
En ma qualité de président de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, je veux évoquer le problème des points d'entrée dans le dispositif de lutte contre les cyberattaques, et surtout la manière dont l'Anssi envisage la mise en œuvre réglementaire de la directive NIS 2 (Network and Information Security).
Dans ce cadre, il est essentiel de rappeler que la norme ISO 27001, relative aux systèmes de management de la sécurité de l'information, constitue aujourd'hui un référentiel reconnu permettant de répondre aux exigences de la directive NIS 2, notamment en Belgique, où elle fait déjà office de standard de conformité. La récente attaque contre l'Urssaf montre que les administrations comme les entreprises devraient s'y conformer au plus vite pour garantir un niveau homogène de protection et de résilience.
La question centrale est de savoir en quoi d'autres obligations imposées aux entreprises et aux collectivités leur permettront d'être mieux protégées.
Il y a ici une révolution des esprits à mener au sein des services de l'État, pour que la résilience et la sécurité soient l'affaire non pas de quelques-uns, mais de tous. C'est d'ailleurs ce que tend à indiquer la publication du guide Tous responsables, que je salue, en espérant qu'y soit bientôt inscrit, parmi les numéros d'urgence, le 17Cyber, dont on fêtera le premier anniversaire dans une semaine.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, Olivier Cadic vient de présenter le cadre budgétaire et l'avis de la commission en faveur de l'adoption des crédits pour 2026 de cette mission. Je ne reviendrai donc pas sur ce point, que nous partageons.
Je commencerai par indiquer qu'il faut s'interroger sur la cohérence d'ensemble du dispositif de lutte contre les cyberattaques, avec quelques nuances au sein de la commission sur l'opposition qui peut être faite entre la notion de guichet unique, laquelle pourrait paraître idéale, et l'intérêt de susciter le foisonnement de l'offre de cybersécurité.
Il est de fait que personne ne remet en cause la compétence de l'Anssi. Toutefois, les missions et les financements de cet écosystème ne sont pas suffisamment clairs à nos yeux.
C'est une préoccupation majeure, car les différences d'approches de quantification de la cybermenace – 4 386 saisines de l'Anssi, contre 500 000 demandes d'assistance de la part de particuliers auprès de la plateforme Cybermalveillance.gouv.fr, devenue le 17Cyber – illustrent la disproportion entre le champ d'action de l'Agence et les besoins du grand public.
Les personnes victimes d'une cyberattaque sont démunies : elles cherchent une porte d'entrée. Elles peuvent la trouver avec le 17Cyber, mais seulement si celui-ci fonctionne correctement, avec les budgets afférents. C'est pour nous un point de vigilance.
À ce stade, ni les ministres de tutelle successifs ni l'Anssi n'ont présenté de schéma global sur les contours de ce qui relèvera de la compétence directe de l'Agence, et de ce qui sera partagé ou confié à d'autres entités institutionnelles, lesquelles sont très variées – peut-être trop – en nombre et en compétences : le 17Cyber, les Cert (Computer Emergency Response Team) sectoriels, les Csirt (Computer Security Incident Response Team) régionaux et les nouveaux opérateurs qui sont retenus par l'Anssi dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt pour le renforcement de l'accompagnement local aux enjeux de cybersécurité. Celui-ci est doté de 7 millions d'euros sur trois ans, ce qui n'est pas énorme.
Cette nouvelle enveloppe temporaire vient s'ajouter aux dispositifs régionaux, dont le financement reste à la charge des régions, ce qui n'assure aucune garantie de pérennité.
Les financements pourraient s'arrêter du jour au lendemain, par une simple délibération du conseil régional, alors même que l'écosystème global de cybersécurité monte en compétence et nous interdit, si j'ose dire, tout trou dans la raquette. La clarification de l'organisation et du financement de cet écosystème est une recommandation que nous reformulons tous les ans.
Je signale à cet égard deux points d'attention, parmi beaucoup d'autres.
Premièrement, la Cour des comptes s'est interrogée sur la simplification des critères de labellisation des solutions de cybersécurité pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les collectivités territoriales. Une très petite entreprise (TPE) ou une commune doivent savoir quels logiciels utiliser : une labellisation est nécessaire.
Deuxièmement, la subvention de 845 000 euros accordée par l'Anssi au groupement d'intérêt public Action contre la cybermalveillance (GIP Acyma) n'a pas varié depuis 2017, ce qui équivaut à une réduction tendancielle des moyens.
Pour conclure, je voudrais évoquer l'académie de la lutte contre les manipulations de l'information et l'adoption d'une posture de défense active contre les ingérences étrangères, voulue par notre collègue Rachid Temal, rapporteur de la commission d'enquête sénatoriale sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères, qu'il faudra coordonner avec les nouveaux outils, que nous saluons, notamment le compte de risposte (French Response) du ministère des affaires étrangères.
Au bénéfice de ces observations, mes chers collègues, nous vous proposons l'adoption des crédits pour 2026 de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », tout en restant vigilants sur les points d'alerte que j'ai évoqués. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Éric Kerrouche, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Pouvoirs publics » occupe une place singulière au sein du débat budgétaire. Les institutions qu'elle finance jouissent en effet d'une autonomie budgétaire, garantie de leur indépendance.
Le montant global de cette mission demeure modeste : un peu plus de 1,140 milliard d'euros, soit 0,25 % du budget général, et l'équivalent de 17 euros par citoyen. La démocratie représentative repose ainsi sur des moyens contenus.
Cette année encore, la Présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat ont choisi de reconduire leur dotation. Ce geste, compréhensible dans un contexte de discipline budgétaire nationale, doit cependant être appréhendé avec prudence : si un gel ponctuel peut être vertueux, un gel répété devient un signal politique aux effets cumulatifs. Il amenuise progressivement les marges de manœuvre et fragilise la capacité de nos institutions.
Je souhaite alerter une nouvelle fois, comme l'année dernière et celle d'avant, sur ce point : la sobriété ne doit pas devenir, involontairement, un affaiblissement de la démocratie représentative. La stabilité apparente masque en réalité une contrainte croissante ; pour maintenir l'équilibre budgétaire, les institutions recourent chaque année davantage à leurs réserves. Ce n'est pas soutenable à moyen terme.
Ainsi, la Présidence de la République ne parvient à rester à l'équilibre qu'en comprimant son investissement et en maîtrisant ses dépenses opérationnelles. Sa trésorerie, autrefois confortable, ne constitue plus qu'une marge de sécurité très réduite.
L'Assemblée nationale reconduit sa dotation, mais son déficit structurel atteint un niveau élevé, absorbé par des prélèvements sur disponibilités. Le Sénat, pour sa part, ne préserve son équilibre qu'en mobilisant fortement ses réserves. Si cette trajectoire devait se poursuivre en 2027 ou 2028, les prélèvements deviendraient manifestement excessifs.
C'est pourquoi je renouvelle avec insistance un appel formulé depuis plusieurs années : la création d'une dotation autonome dédiée à l'entretien du patrimoine institutionnel.
Aujourd'hui, les dépenses immobilières et écologiques sont fondues dans les crédits de fonctionnement, ce qui les expose, en période de gel, à des arbitrages défavorables. Or nos bâtiments sont un patrimoine national ; leur entretien ne saurait constituer une variable d'ajustement. (Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Olivier Cigolotti approuvent.)
Pour ce qui concerne le Conseil constitutionnel, la hausse de sa dotation est justifiée, notamment pour renforcer sa cybersécurité à l'approche des échéances électorales. Mais je souligne une difficulté récurrente : la qualité insuffisante des prévisions budgétaires transmises au Parlement, trop peu détaillées, parfois erronées, et régulièrement sous-évaluées.
Mes chers collègues, la conclusion est claire : nos institutions participent pleinement à l'effort collectif, mais leur modèle financier actuel atteint ses limites. Le gel des dotations se fait au détriment de la qualité du travail législatif, du contrôle parlementaire et de la permanence du débat démocratique.
Sous réserve de ces observations, et dans le contexte de maîtrise des finances publiques, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics » pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Guy Benarroche, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai l'honneur de vous présenter l'avis de la commission des lois sur les programmes 164 et 165, qui financent les juridictions financières et les juridictions administratives.
La commission a émis un avis favorable, mais vigilant – je le serai particulièrement pour ce qui me concerne –, à l'adoption de ces crédits.
Nous avons constaté que les crédits de paiement affectés à ces programmes apparaissaient en hausse de 3,2 % pour les juridictions financières et en baisse de 5,2 % pour les juridictions administratives. Pour ces dernières, la diminution est en partie liée au fait que la dotation pour 2025 finançait des projets immobiliers majeurs, lesquels arriveront à leur terme à compter de 2026, plutôt qu'à des coupes sèches.
Nous retenons surtout que, malgré ces évolutions en apparence contrastées, les deux programmes se caractérisent par une stabilité d'ensemble.
Cette stabilité est compréhensible pour les juridictions financières, qui ont mis en œuvre avec succès le programme « JF2025 » lancé par le Premier président Pierre Moscovici, lequel quitte son poste à la fin de l'année, et qui sont désormais dans l'attente de la détermination des nouvelles priorités de son successeur.
Ainsi, la hausse de 3,2 % des crédits est uniquement portée par les dépenses de personnel, notamment pour poursuivre la revalorisation indemnitaire des magistrats financiers, dans le cadre de la réforme, désormais ancienne, de la haute fonction publique. L'alignement complet des rémunérations n'a cependant toujours pas eu lieu : nous veillerons à ce que la réforme aboutisse aussi pour les autres corps que celui des magistrats.
En revanche, la stabilité d'ensemble du budget des juridictions administratives soulève d'énormes difficultés. En effet, dans le contexte d'accroissement tendanciel de leur activité, le fait de ne pas engager de nouveaux projets structurants, que ce soit de nature immobilière ou en termes de recrutements, constitue une forte mesure d'économie, qui semble même exagérée.
À l'exception de la Cour nationale du droit d'asile, qui a mis en œuvre sans difficulté la territorialisation que le Sénat avait votée dans le cadre de la loi du 26 janvier 2024 et qui a contribué, même si cette tendance est récente, à réduire de 15 % son stock d'affaires, l'activité des juridictions administratives suit un rythme toujours aussi soutenu, au sujet duquel nous tirons la sonnette d'alarme : nous le faisons tous les ans, mais encore plus fortement cette année.
Les juridictions administratives non spécialisées ont dépassé pour la première fois les 300 000 entrées contentieuses en 2024, avec une hausse de 7,4 %. L'année 2025 s'annonce plus inquiétante encore, puisqu'une hausse une hausse de 20 % des saisines des tribunaux administratifs est anticipée, sans aucune augmentation de personnels. En effet, les deux augmentations prévues dans le plan du ministère, c'est-à-dire 40 postes en 2024 et 40 en 2025, n'ont pas eu lieu ; elles ont été annulées ou supprimées. Et rien n'est prévu pour 2026.
Les magistrats administratifs et le personnel administratif nous l'ont dit : après quatre ans d'efforts immodérés pour essayer de rationaliser, de travailler mieux et davantage, ils ne peuvent aller plus loin sans l'aide de l'État. Or celui-ci a décidé de ne rien faire, c'est-à-dire de laisser la situation régresser encore. Je tenais à vous alerter sur ce point, monsieur le ministre.
Pour cette raison, j'émettrai personnellement un avis négatif sur ce budget.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Masset, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Direction de l'action du Gouvernement » participe, cette année encore, à l'effort budgétaire national, bien que l'évolution de ses moyens apparaisse contrastée. En dépit des réserves que je formulerai, la commission des lois a émis un avis favorable sur les crédits de cette mission.
En préambule, je précise que j'ai mené onze auditions, auxquelles a participé Mme Audrey Linkenheld, que je tiens à remercier. Qu'il s'agisse des autorités administratives indépendantes ou des services du Premier ministre, nous n'avons rencontré que des interlocuteurs pleinement investis dans leurs missions et soucieux de la préservation des finances publiques.
Je citerai l'exemple de quatre autorités représentatives de l'État : la Cnil, le Défenseur des droits, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Toutes ont été confrontées, en 2025, à une intensification de leur activité.
La HATVP a dû absorber une hausse importante des saisines préalables aux nominations, notamment celles qui concernent les cabinets ministériels. S'y ajoutent les conséquences de la dissolution de 2024 et la perspective des élections municipales de 2026.
La Cnil et l'Arcom se verront confier, l'an prochain, de nouvelles responsabilités. Ces deux instances seront sollicitées à la suite de l'adoption de textes européens structurants sur les services numériques et l'intelligence artificielle, secteurs hautement stratégiques.
Les autorités que j'ai mentionnées ont exprimé leur vive inquiétude quant au niveau des moyens alloués. Le projet de loi de finances pour 2026 ne prend pas suffisamment en compte leurs besoins réels et risque de fragiliser des équilibres déjà précaires.
La Défenseure des droits m'a ainsi alertée sur la diminution de ses crédits de fonctionnement dédiés aux systèmes d'information, qui entravera les projets de transformation numérique et obligera l'institution à se tourner vers des solutions moins coûteuses, mais aussi moins performantes et moins durables.
Nous devons absolument éviter que la France ne perde son avance dans ce domaine. Les investissements numériques d'aujourd'hui conditionnent l'efficacité et la crédibilité de nos institutions de demain.
J'exprime également un regret concernant la cybersécurité et la lutte contre les ingérences étrangères. En dépit des nouveaux moyens accordés au SGDSN, l'effort n'a pas été décliné dans les budgets des différentes entités de la mission. Pourtant, la menace cyber s'intensifie dans un contexte international tendu, tandis que les opérations d'ingérence numérique gagnent en sophistication.
Je salue enfin la gestion rigoureuse du budget de la Dila.
La commission a donc émis un avis favorable sur cette mission.
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, pour la bonne information de tous, je vous indique que 40 amendements sont à examiner sur ces missions. La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures. Nous devrions donc terminer leur examen aux alentours de douze heures trente et passer à l'examen de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de ce bloc de missions serait reportée à la fin des missions de la semaine.
En outre, la conférence des présidents, réunie le mercredi 3 décembre dernier, a décidé que, lorsque le nombre d'amendements déposés ne paraissait pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.
S'agissant des présentes missions, le nombre d'amendements à examiner rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui nous conduit à fixer les durées d'intervention à une minute.
Dans la suite de la discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Pouvoirs publics (suite)
Conseil et contrôle de l'État (suite)
Direction de l'action du Gouvernement (suite)
Budget annexe : Publications officielles et information administrative (suite)
Mme la présidente. Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Audrey Linkenheld. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Audrey Linkenheld. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il nous incombe d'examiner aujourd'hui trois missions : « Pouvoirs publics » « Conseil et contrôle de l'État » et « Direction de l'action du Gouvernement ».
Si ces missions ne sont pas les plus onéreuses pour le budget de l'État, elles sont particulièrement scrutées par les Françaises et les Français, qui attendent une exemplarité financière de nos institutions républicaines.
S'agissant en premier lieu des crédits concernant la mission « Pouvoirs publics », le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se satisfait que ses dotations soient globalement constantes, ce qui permet d'éviter que de nombreuses incompréhensions se fassent jour au sein de notre population, dans un contexte austéritaire marqué.
Cette sobriété n'efface toutefois pas certaines interrogations.
S'agissant de l'Élysée, par exemple, si le coût moyen des déplacements du Président de la République est en baisse, le nombre de déplacements augmente, au point que la dépense globale atteint encore 20 millions d'euros, bien au-dessus des niveaux de 2022.
De manière curieuse, ce sont non pas les voyages internationaux, mais, au contraire, les voyages sur le territoire national qui explosent, en augmentation de 31,5 %.
Pour l'Assemblée nationale, la dotation est constante, mais les réserves financières de cette institution pourraient être épuisées d'ici à six ans.
Pour le Sénat, les dépenses sont maîtrisées aussi, ce qui ne veut pas dire que certaines questions ne se posent pas. Des amendements ont été déposés par plusieurs collègues pour mettre en lumière les conditions salariales de nos collaborateurs.
Finalement, seuls les crédits du Conseil constitutionnel bénéficient d'une hausse appuyée, à 11,5 %. Elle s'explique notamment par l'éventualité de l'organisation d'un référendum et par la préparation de l'élection présidentielle de 2027. Ces arguments sont entendables. Mais, comme chaque année, nous déplorons la pauvreté des documents transmis au Parlement par le Conseil. Ce manque de transparence interpelle grandement et mériterait d'être rapidement corrigé.
Ces éléments étant précisés, et suivant l'avis du rapporteur pour avis Éric Kerrouche, le groupe socialiste votera en faveur de la mission « Pouvoirs Publics ».
S'agissant de la mission « Conseil et contrôle de l'État », nous sommes plus réservés.
Cette mission finance ce qui constitue l'ossature de notre État de droit : le Conseil d'État, la justice administrative, la Cour des comptes, les juridictions financières, et le Cese. Ce sont là nos contre-pouvoirs, nos arbitres, nos vigies démocratiques.
Nous saluons la hausse des budgets de la Cour des comptes et des juridictions financières. À l'heure des déficits et de l'endettement, l'expertise de ces instances est plus qu'utile.
À l'inverse, les crédits alloués au Conseil d'État et aux juridictions administratives diminuent, alors même, cela a été dit, que le nombre de contentieux augmente substantiellement et entraîne des délais de traitement des dossiers inacceptables, particulièrement dans les cours d'appel. De même, nous déplorons les moyens en légère baisse du Cese, espace pourtant utile de dialogue avec la société civile.
Ce bilan mitigé conduit le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain à s'abstenir sur l'adoption de ces crédits.
Il en sera sans doute autrement pour la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». Avec ses deux programmes « Coordination du travail gouvernemental » et « Protection des droits et libertés », cette mission traduit en actes les priorités stratégiques et organisationnelles de l'État.
Pour 2026, un peu plus d'un milliard d'euros sont prévus en autorisations d'engagement et autant en crédits de paiement, soit une augmentation de 3,3 %.
Cette hausse est bienvenue, mais elle est largement liée à celle du programme 129, en particulier à celle des moyens alloués à la coordination, d'une part, de la sécurité et de la défense, et, d'autre part, de la politique européenne, qui, ensemble, représentent près de la moitié de ce programme.
Comme M. le rapporteur pour avis Michel Masset l'a indiqué, l'évolution des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » est en réalité très contrastée.
L'augmentation des crédits et des effectifs du SGDSN est évidemment bienvenue, comme l'ont souligné Mickaël Vallet et Olivier Cadic, alors que les cybermenaces sont croissantes et les ingérences étrangères toujours plus fortes.
Toutefois, il est difficile d'entendre que cet arbitrage en faveur de notre souveraineté, notamment numérique, se fera au détriment de la protection des droits et libertés. Car tel est finalement le message de cette mission quand on compare le programme 129 et le programme 308.
Ce message antidémocratique, j'aimerais pouvoir dire qu'il ne tient qu'à l'affichage, mais si les amendements du rapporteur Szczurek de la commission des finances sont de nouveau retenus, ce sera au contraire un message d'une clarté totale !
À ce stade, les budgets alloués aux agences et autorités indépendantes chargées de garantir nos droits et libertés ne sont pas suffisants, sauf rares exceptions, alors qu'ils ont déjà été mis à rude épreuve dans le projet de loi de finances pour 2025.
La plupart des hausses ne sont que le fruit d'augmentations mécaniques, en particulier en personnels ; on constate même de nettes baisses.
D'ailleurs, les autorisations d'engagement diminuent globalement et le schéma d'emplois est nul, bien que certaines autorités voient le nombre de leurs saisines s'accroître fortement, ainsi que leurs missions, du fait même du législateur.
Au regard de ces situations et des auditions auxquelles j'ai pu participer, nous soutiendrons donc l'augmentation des crédits de la Cnil, du Défenseur des droits, de la HATVP ou de l'Arcom.
Nous déposerons aussi des amendements en faveur de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) et du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL).
Dans le même esprit, nous voulons préserver la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), dont le rôle ne peut être contesté, tant le narcotrafic fait des ravages auprès de notre jeunesse et dans notre société.
Pour financer ces renforts utiles et répondre à la demande des Français, qui veulent que les efforts soient partagés par tous en cette période de rigueur budgétaire, nous proposerons enfin de restreindre les avantages dont bénéficient les anciens Premiers ministres, qui sont de plus en plus nombreux, il faut bien le reconnaître. (Sourires.)
Pour conclure, même si nous sommes optimistes quant à l'issue de nos amendements, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain conformera certainement son vote contre les crédits alloués à la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K. – Mmes Nicole Duranton et Marie-Arlette Carlotti applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette discussion budgétaire intervient alors que vous avez perdu les élections législatives anticipées. Pourtant, vous restez en place pour appliquer la même politique !
Il n'existe pas un pays – enfin, un pays démocratique – où la force arrivée en tête des scrutins est privée de pouvoir et où les perdants continuent de diriger, comme si de rien n'était.
Pis, après deux Premiers ministres « essorés », le troisième se présente devant nous et nous appelle, sans honte, à la responsabilité, au compromis, tout en restant sourd aux revendications populaires, à la soif de justice sociale et fiscale, et en accélérant l'érosion de nos droits et liberté, faisant le lit de l'extrême droite qui toque aux portes du pouvoir et s'apprête à ramasser les lambeaux de notre République, que vous avez mise à terre.
Les missions du projet de loi de finances pour 2026 illustrent cette orientation sécuritaire : avec une hausse de 6 % des dépenses allouées à la sécurité et à la défense, l'État renforce ses outils de surveillance et de répression, quand la dotation des autorités de contrôles chute de 7 %.
Mes chers collègues, comment justifier la baisse du budget de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, alors que la surpopulation carcérale bat de tristes records, sans même parler des conditions indignes de détention dont souffrent les détenus et des conditions de travail des agents de l'administration pénitentiaire ?
Comment justifier la faiblesse de l'augmentation accordée à la Cnil ou à la Défenseure des droits, qui ne constituent même pas un pansement de premier secours vu leur charge de travail ?
Comment comprendre la chute du budget de la HATVP ? Prenons-nous la mesure du signal envoyé par l'affaiblissement de ce garde-fou démocratique, alors que nombre nos concitoyens se détournent peu à peu de nous, au moment où un ancien président de la République a été incarcéré pour un crime d'une gravité extrême ?
Pour notre part, nous considérons qu'il faut, au contraire, renforcer les contre-pouvoirs indépendants en matière éthique.
Concernant la juridiction administrative, comme chaque année, nous constatons un volume de saisines en hausse, mais des moyens qui ne suivent pas. Les délais s'allongent et les personnels sont laissés seuls pour gérer la hausse des contentieux relatifs au droit de l'urbanisme, aux libertés publiques ou au droit des étrangers.
Il en va de même pour les juridictions chargées du droit d'asile, un impératif d'humanité qui a été consacré au sortir de la Seconde Guerre mondiale.
Alors que partout des crises éclatent et contraignent des millions de personnes à prendre le chemin de l'exil, aucun budget supplémentaire n'est alloué pour faire face à l'explosion des recours. J'apporte d'ailleurs mon soutien aux salariés de la CNDA, mobilisés le 2 décembre dernier pour l'amélioration de leurs conditions de travail.
Dans cette saignée budgétaire de la fonction publique, seul le Conseil constitutionnel bénéficie d'une légère augmentation, que nous saluons, quand le budget de la Présidence de la République est stable, après une augmentation de 25 % en huit ans.
Le « deux poids, deux mesures » qui a cours dans notre pays ne peut durer. Partout s'exprime une soif de justice sociale, fiscale et environnementale, à laquelle il faudra bien répondre.
Choisir la stratégie du choc, en attisant la peur de la dette ou de la guerre pour faire passer en force un nouveau budget austéritaire n'est pas un mode de gouvernement auquel nous nous résoudrons.
Partout dans le pays, la démocratie sociale doit être renforcée, et non tuée, réprimée ou asphyxiée. C'est pourquoi, fidèles à nos convictions, nous voterons contre les crédits de ces missions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce matin trois missions dont les mouvements de crédits sont relativement stables, mais qui sont fondamentales pour notre démocratie, laquelle, vous le savez, est fragile et menacée.
Les budgets sont majoritairement gelés, et certains gels et baisses de crédits sont très préoccupants.
Comme l'année dernière, la Présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat ont décidé, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, de maintenir le gel de leurs dotations.
On peut comprendre le réflexe consistant à dire que les institutions doivent donner l'exemple dans un moment où nous cherchons des ressources. Mais il y a des endroits où cela se fait à rebours de la logique.
Nous avons en France un Parlement gravement sous-financé. Alors que l'on ne cesse de dire que le temps du Parlement est enfin venu, nous choisissons de maintenir ce sous-financement.
Mes chers collègues, j'ai passé dix ans au Parlement européen. J'aimerais vous donner un seul chiffre pour mesurer la différence entre les deux situations : les crédits pour les seuls collaborateurs des députés européens s'élèvent en 2025 à 30 769 euros par mois et par député.
Ces crédits ne sont pas un coût pour le Parlement européen ; ils sont une ressource précieuse. Ils permettent d'embaucher dans de bonnes conditions des équipes expertes, expérimentées, assez nombreuses, et d'attirer les meilleurs au service du plus important : l'intérêt général.
Ils rendent le Parlement européen fort, capable de bâtir sa propre expertise, une position de négociation indépendante vis-à-vis de la Commission et du Conseil ; bref, ils servent la démocratie. Pour tous les partis politiques qui y sont représentés, ils sont considérés comme essentiels.
Il faudra bien un jour que, en France, nous comprenions qu'il y va du respect des électeurs que de donner à ses élus les moyens de les représenter.
Concernant la mission « Direction de l'action du Gouvernement », nous tenons à alerter : de nouvelles tâches sont confiées aux autorités administratives indépendantes, quand, en parallèle, des économies leur sont imposées pour près d'un million d'euros. Or on ne peut pas faire les deux en même temps !
Comment espérer voir ces entités fondamentales, comme la HATVP ou le Défenseur des droits, assurer leurs missions essentielles, alors même que l'on réduit leurs moyens, déjà largement contraints ?
Dans le contexte géopolitique dangereux que nous connaissons, comment expliquer la coupe subie par la HATVP, alors que celle-ci indique ne pas disposer des moyens nécessaires pour assurer et renforcer ses capacités de contrôle en matière d'ingérences étrangères ?
Aussi, dans un contexte où la démocratie s'abîme et est la cible de menaces hybrides, où règne la désinformation, de véritables moyens devraient être alloués aux chaînes parlementaires.
Le Centre d'excellence européen contre les menaces hybrides à Helsinki, créé par l'Union européenne et l'Otan en 2017, est clair : pour lutter contre ces menaces, il faut renforcer les institutions démocratiques et garantir l'indépendance et la légitimité des médias. Là encore, ce n'est pas un coût : c'est la garantie de la protection de nos démocraties.
En ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l'État », enfin, nous déplorons un budget en baisse, notamment celui des juridictions administratives, malgré un nombre de saisines qui explose.
Comment espérer une réduction des délais de jugement et une réponse à l'augmentation massive des recours devant les juridictions administratives quand on baisse les budgets ? Comment tout simplement ne pas nuire à la qualité des décisions rendues et ne pas étouffer ceux qui les rendent si les effectifs sont gelés et les budgets, réduits ? C'est impossible !
Pour toutes ces raisons, notre groupe ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Audrey Linkenheld applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Guylène Pantel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les missions qui sont en débat ce matin financent ce qui fait tenir la République : les institutions qui garantissent l'équilibre démocratique, les autorités qui veillent au respect de nos règles fondamentales, le travail législatif et son contrôle, ainsi que les services publics d'information, qui rendent ce travail accessible à chacun.
Sans ces moyens, il n'y a ni stabilité institutionnelle, ni régulation indépendante, ni transparence démocratique. Ce budget n'est donc pas abstrait : il touche au cœur de notre démocratie.
Nous parlons ici de choses très concrètes : les moyens nécessaires au contrôle parlementaire et les outils qui assurent la continuité des institutions. Bref, ce qui garantit que le travail que nous devons rendre aux citoyens peut réellement être accompli.
Au nom du groupe du RDSE, je veux rappeler que nous abordons cette mission avec sérieux et sans positions préétablies. Nous n'avons pas tous la même appréciation des crédits proposés pour 2026, mais nous partageons le même objectif : trouver un équilibre crédible entre l'exigence de sobriété et la nécessité d'un fonctionnement institutionnel solide. Cette diversité d'approches exprime le sens des responsabilités qui nous anime.
Sur le premier volet, celui de la sobriété, nous savons que l'exaspération citoyenne est forte. Combien de fois n'avons-nous pas entendu : « Avant d'imposer des efforts à la société, faites-en vous-mêmes » ? Ce reproche n'est pas théorique. Il naît d'un vécu de services publics qui s'effritent, d'un pouvoir d'achat qui se dégrade.
Nos concitoyens observent le monde politique avec un regard critique, notamment face à certains avantages qui peuvent paraître disproportionnés. Reconnaître cette perception n'est ni de la démagogie ni un aveu de culpabilité ; c'est simplement avoir conscience de ce qui légitime leurs exigences.
L'amendement porté par notre collègue Henri Cabanel tend à eller dans ce sens. Il prévoit une réduction mesurée des dotations de certaines institutions, non pour affaiblir leur fonctionnement, mais pour défendre l'idée que l'effort doit être partagé pour être accepté. Et ces 26 millions d'euros d'économies parlent d'eux-mêmes : c'est l'équivalent d'environ 1 130 postes d'aides-soignantes en Ehpad, ou de 746 professeurs du secondaire, ou encore de 1 187 accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) dans nos écoles.
Le second volet, tout aussi crucial, est celui de la nécessité d'un fonctionnement institutionnel solide. Nous ne pouvons pas demander à nos institutions de contribuer à l'effort collectif, si cela se fait au prix d'une fragilisation de leur capacité à remplir leurs missions.
Les années de gel pèsent concrètement : des équipes à flux tendu, des responsabilités qui s'accumulent, des missions qui s'élargissent, tandis que les moyens et certains salaires stagnent. Cela concerne particulièrement nos assemblées, dont le travail est au centre de la vie démocratique.
Dans ce contexte, les dispositions des amendements déposés par Michel Masset, moi-même et des collègues d'autres groupes prennent tout leur sens. Il s'agit de renforcer les moyens des équipes parlementaires et des groupes politiques, pour garantir un travail législatif sérieux, un contrôle efficace et une transparence réelle à l'égard de nos concitoyens.
Il s'agit non pas d'une dépense supplémentaire pour le principe, mais d'un investissement nécessaire pour préserver le fonctionnement même de la démocratie.
Sobriété et solidité institutionnelle ne sont pas opposées. Elles se complètent. Montrer l'exemple dans la maîtrise des dépenses, tout en assurant que nos institutions restent pleinement opérationnelles, est la marque de ce que nous défendons.
Ainsi, le groupe du RDSE votera dans sa grande majorité en faveur des crédits de ces missions.
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Vérien. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Dominique Vérien. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui trois missions essentielles au fonctionnement de nos institutions : « Conseil et contrôle de l'État », « Pouvoirs publics », et « Direction de l'action du Gouvernement ». Ces missions portent des choix budgétaires importants, et il me semble utile d'en proposer une lecture à la fois lucide et constructive.
En ce qui concerne la mission « Conseil et contrôle de l'État », les institutions concernées – Conseil d'État, juridictions administratives et financières et Cese – prennent clairement leur part à l'effort budgétaire.
La baisse de 2,6 % des crédits de paiement en 2026 est principalement liée à la fin de grands projets immobiliers et à la réduction des investissements. Cela montre une capacité à rationaliser les moyens et à maîtriser la dépense.
Toutefois, cette sobriété intervient dans un contexte où les contentieux ne cessent d'augmenter. Avec un schéma d'emploi stable pour la deuxième année, le risque d'allongement des délais de jugement est bien réel pour les juridictions administratives.
La situation de la Cour nationale du droit d'asile, dont les moyens stagnent à 52 millions d'euros malgré un contentieux toujours élevé, en est l'illustration la plus visible. Dans une période où l'on veut travailler sur la question de l'immigration, ne pas donner les moyens nécessaires à la CNDA me paraît quelque peu surprenant.
Il sera donc indispensable de suivre attentivement la soutenabilité de la justice administrative si l'on veut garantir un accès effectif au droit.
Enfin, comme le note le rapporteur, la mission met en lumière un enjeu démocratique important : la lisibilité budgétaire, en particulier pour les crédits destinés à la participation citoyenne au Cese. Une identification plus claire serait utile. La démocratie participative ne peut progresser que si chacun comprend précisément ses objectifs et les moyens qui lui sont consacrés.
En ce qui concerne la mission « Pouvoirs publics », là aussi, on note une maîtrise de la dépense.
Les dotations ont certes augmenté en valeur depuis 2011, mais, en euros constants, elles reculent de près de 10 %. Le Sénat, avec la baisse de dotation la plus importante, illustre particulièrement cette démarche de responsabilité. Mais il est bon de noter que ce budget comporte aussi l'entretien d'un patrimoine immobilier, qui est exceptionnel par sa richesse historique et qui nécessite de lourds travaux de rénovation énergétique.
Cette stabilité prolongée atteint donc aujourd'hui ses limites, et ces tensions doivent être prises en considération si nous voulons continuer à moderniser nos institutions.
Enfin, en ce qui concerne la mission « Direction de l'action du Gouvernement », nous retrouvons aussi cette logique de sobriété avec une baisse d'environ 3 % sur plusieurs programmes. Le choix est clairement assumé de renforcer les moyens consacrés à la sécurité nationale. Dans un contexte international tendu, l'augmentation des crédits du SGDSN est pleinement justifiée.
En outre, la fusion entre France Stratégie et le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan va dans le sens d'une simplification bienvenue. Elle permet 12 % d'économies, améliorant la mutualisation des fonctions prospectives publiques.
Enfin, les moyens de l'Anssi sont renforcés, alors que les cyberattaques ont augmenté de 15 % en 2024 et que le 17Cyber a été lancé depuis bientôt un an, malheureusement sans grande publicité. Ses effectifs progressent encore en 2026 pour répondre aux nouvelles obligations européennes. C'est indispensable si l'on veut garantir la sécurité numérique de l'État.
Pour terminer, la situation des autorités administratives indépendantes mérite une attention particulière. Si la rationalisation de la dépense les concerne elles aussi, un paradoxe demeure : elles voient leurs moyens gelés – certains voudraient même les diminuer –, alors que les missions qui leur sont confiées s'élargissent.
Les économies attendues représentent une baisse de 2,4 % des dépenses de fonctionnement, tandis que les dépenses de personnel augmentent mécaniquement, même si aucun poste n'est créé. La HATVP nous alerte sur le manque d'experts pour contrôler les risques d'ingérence étrangère, tandis que le Défenseur des droits continue de recourir à près de quatre-vingts stagiaires chaque année pour répondre aux demandes. De telles situations ne sont clairement pas tenables à long terme.
Le nombre de missions confiées à ces autorités augmentera encore en 2026 : elles devront assurer l'application du Digital Services Act, organiser les prochains états généraux de la bioéthique ou renforcer les exigences en matière de cybersécurité. Toutefois, aucun renfort budgétaire n'accompagne ces évolutions. Tôt ou tard, il faudra tirer les conséquences de la montée en charge de ces institutions.
Je le sais, certains considèrent que le Défenseur des droits constitue une dépenses inutiles. Il s'agit pourtant d'un aiguillon indispensable, parfois exigeant, souvent dérangeant, mais toujours utile pour rappeler que l'action publique doit rester à hauteur d'homme.
Mes chers collègues, son rôle n'est pas de compliquer la vie des institutions, mais de nous pousser à faire mieux, de corriger ce qui doit l'être et de garantir à chaque citoyen qu'il peut faire valoir ses droits. Au regard de l'ensemble des missions qui lui sont confiées, son budget n'est pas un luxe ; son coût est même modeste comparé aux injustices qu'il permet d'éviter.
En définitive, l'ensemble formé par ces trois missions est cohérent : il présente de réels efforts de rationalisation et de modernisation de l'action publique. Certes, des fragilités demeurent, qu'il s'agisse de pressions contentieuses, de besoins d'investissement ou de contraintes qui pèsent sur les autorités indépendantes, mais ces réserves ne remettent pas en cause l'équilibre général du texte.
Le budget de ces missions, responsable, est globalement satisfaisant. Le groupe Union Centriste votera donc en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Brault. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Jean-Luc Brault. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « Faites ce que je dis, pas ce que je fais ». Quel politique n'a jamais été ainsi interpellé sur le terrain ?
L'examen de ces trois missions nous offre l'occasion de mettre à mal cette parole populaire, trop souvent bien fondée, et les rumeurs sur les salons dorés de nos institutions. Mes chers collègues, saisissons donc l'occasion de faire nous-mêmes ce que nous disons, avant de demander à chacun de faire, comme nous le répétons avec gravité chaque jour, des économies et des efforts.
En résumé, les trois missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l'État » et « Direction de l'action du Gouvernement » distribuent les crédits nécessaires au fonctionnement de notre État de droit : il s'agit des sommes allouées aux pouvoirs publics, aux organes chargés de leur contrôle et aux autorités administratives indépendantes qui s'assurent qu'un certain nombre de libertés individuelles sont respectées.
Bref, l'examen de ces missions nous offre l'occasion de se poser la question du train de vie de nos institutions, en particulier du Sénat. Je tiens à remercier l'ensemble de nos rapporteurs de la qualité de leurs travaux et de la clarté de leurs présentations.
La mission « Pouvoirs publics » regroupe les programmes « Présidence de la République », « Assemblée nationale », « Sénat », « Conseil constitutionnel, « Cour de justice de la République » et « La Chaîne parlementaire ». Le coût annuel de fonctionnement de cette mission est inférieur à 17 euros par Français.
Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit le gel des crédits de la présidence de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat. Ce n'est pas sérieux : on ne peut pas dire à chacun qu'il faut faire un effort et ne pas en faire nous-mêmes !
Rappelons-le, parmi ces institutions, le Sénat a connu la plus forte baisse de crédits – de 12,8 % depuis 2011. La situation est trop grave, et nous devons accentuer nos efforts. Le groupe Les Indépendants proposera donc une diminution de 2 % des crédits de chacune de ces institutions pour 2026. C'est un minimum.
La mission « Conseil et contrôle de l'État » rassemble les crédits du Conseil d'État, de la Cour des comptes et du Cese. Nous proposons de lui demander le même effort, avec une baisse de 2 % de ses crédits.
Il n'est pas question de demander à ces institutions de faire moins, bien au contraire. La discipline budgétaire doit permettre de faire mieux, c'est-à-dire d'être plus efficace, de traquer toute gabegie, de puiser dans les ressources mal utilisées et de valoriser toutes celles qui peuvent l'être, comme dans une entreprise – ce n'est pas un gros mot, au contraire. (M. Éric Kerrouche soupire.)
La mission « Direction de l'action du Gouvernement » est quant à elle comme toujours disparate et singulière. Elle réunit les services du Premier ministre ainsi que plusieurs autorités administratives indépendantes.
L'effort budgétaire s'y poursuit, et les crédits se structurent autour du renforcement des moyens de cybersécurité et de la prévention des ingérences étrangères : c'est l'essentiel.
Enfin, reconnaissons que la gestion très rigoureuse du budget annexe « Publications officielles et information administrative » par la direction de l'information légale et administrative constitue un exemple à suivre.
En guise de conclusion, mes chers collègues, permettez au chef d'entreprise toujours présent auprès de ses pairs que je suis d'apporter un dernier commentaire : la France fonce droit dans le mur. Nous dépensons toujours plus en prétendant faire des économies ; cela ne tient plus !
Un pays ne se pilote pas en dépensant des milliards d'euros supplémentaires ; quand il manque déjà d'air, on le sauve en disant la vérité et en prenant des décisions courageuses. Il est temps de freiner, de redresser la trajectoire et de redevenir responsable. (M. Marc Laménie applaudit.)
M. Vincent Delahaye. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Di Folco. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Di Folco. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, malgré l'importance des trois missions que nous examinons, la diversité des sujets abordés et des structures concernées me conduit à ne pas revenir en détail sur l'ensemble de leurs crédits. Je me contenterai de soulever quelques points saillants.
En premier lieu, les évolutions de la mission « Pouvoirs publics » sont limitées. Et en tout état de cause, le principe d'autonomie financière des pouvoirs constitutionnels conduit ces derniers à définir leur financement.
Ainsi la hausse des crédits de la mission n'est-elle que de 0,2 %, dans la lignée de la grande stabilité des financements de ces institutions depuis plusieurs années. En particulier, les crédits des assemblées parlementaires et de la présidence de la République demeureront identiques en 2026.
Corrigée de l'inflation, cette évolution signifie que le poids réel de ces financements a diminué ces dernières années. Je tiens à noter que le Sénat réalise la baisse la plus prononcée de ses crédits, sa dotation ayant diminué de 12,8 % en termes réels entre 2011 et 2025.
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
Mme Catherine Di Folco. Nous saluons évidemment cette contribution à la maîtrise des comptes publics, indispensable dans le contexte budgétaire actuel. Il serait incompréhensible pour nos concitoyens que les pouvoirs constitutionnels ne donnent pas l'exemple.
Cependant, ainsi que nous le constatons tous les jours dans les locaux du Sénat, les assemblées parlementaires ne se résument pas à un appareil politique et administratif ; elles comprennent également un important patrimoine historique, architectural et foncier – n'est-ce pas, monsieur le questeur Lefèvre ? L'entretien de celui-ci a jusqu'ici été assuré par l'optimisation des moyens existants et en puisant largement dans les réserves financières des assemblées. Or, celles-ci ne sont pas illimitées : tôt ou tard, il sera indispensable de faire des choix budgétaires.
Au sein de la mission « Pouvoirs publics », je note la persistance du poids des loyers des locaux de la Cour de justice de la République rue de Constantine, qui représentent plus de la moitié des crédits du programme dédié. Cette situation, déjà signalée durant les précédents exercices budgétaires, doit inciter l'institution à explorer les pistes de réduction de ses charges locatives dès que possible, au plus tard à l'échéance du bail.
La mission « Conseil et contrôle de l'État » regroupe trois programmes assurant respectivement le financement des programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives », « Conseil économique, social et environnemental » et « Cour des comptes et autres juridictions financières ».
Les crédits de paiement de cette mission sont en légère diminution de 2,6 %. L'essentiel de cette baisse est lié au programme 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives », qui comprend la majorité des crédits de la mission.
Cette évolution est notamment due à l'achèvement d'importants investissements immobiliers et informatiques. La diminution des dépenses de fonctionnement y contribue également, la juridiction ayant réalisé des gains d'efficience dans la durée, notamment grâce à l'emploi de l'application Télérecours.
En parallèle, les dépenses de personnel du programme 165 suivent une progression contrôlée. Alors que ces dépenses avaient fortement augmenté ces dernières années en raison de la refonte de la grille indiciaire des magistrats administratifs, leur hausse pour 2026 sera limitée à 5,5 millions d'euros et liée au glissement vieillesse-technicité. Il conviendra de demeurer vigilant et de poursuivre les efforts d'optimisation de l'usage des crédits, afin d'éviter que les délais de jugement ne dérapent devant la hausse notable des recours enregistrés.
Pour ce qui concerne le Cese, à la suite du rapporteur, je m'interroge sur l'absence de ventilation détaillée des crédits, qui ne permet pas d'identifier aisément les sommes affectées à la participation citoyenne dont le Conseil a la charge depuis 2021, au détriment de la bonne information du législateur.
Enfin, les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », consacrée notamment au Premier ministre et aux organes qui lui sont rattachés, sont légèrement en hausse de 3 %. Cette augmentation est essentiellement due à l'investissement de moyens supplémentaires pour nos outils de défense et de cybersécurité, notamment un renfort de personnels pour le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.
Nous saluons tout particulièrement cet effort essentiel alors que le monde pose à la sécurité de notre pays des défis toujours plus grands. Un tel effort nous permettra de nous rapprocher des objectifs de la revue nationale stratégique 2025.
En parallèle, les crédits des diverses autorités administratives indépendantes du programme 308 font l'objet d'une hausse relativement contenue, pour inciter à la poursuite de gains d'efficacité partout où cela est possible. Cela a d'ailleurs été le cas pour certains organismes du programme 129, comme l'illustre la fusion du Haut-Commissariat à la stratégie et au plan et de France Stratégie, commencée alors que Michel Barnier était Premier ministre.
Quant au budget annexe « Publications officielles et information administrative », la gestion rigoureuse de la Dila et les transformations des dernières années ont porté leurs fruits. Nous nous réjouissons qu'un excédent solide soit ainsi produit.
Pour conclure, le groupe Les Républicains approuve les trajectoires globales de ces trois missions ; il votera donc ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Fouassin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Stéphane Fouassin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Pouvoirs publics » est singulière, car elle touche au cœur même de nos institutions : elle regroupe en effet les crédits alloués à la présidence de la République, aux deux assemblées parlementaires, au Conseil constitutionnel et à la Cour de justice de la République.
Chacun le sait, cette mission porte une responsabilité particulière : assurer la continuité de nos institutions, préserver leur bon fonctionnement, garantir la séparation des pouvoirs et la solidité de notre République. C'est précisément dans cet esprit de maîtrise budgétaire que le budget de la présidence de la République est reconduit à 126 millions d'euros pour la troisième année consécutive.
Le budget du Parlement pour 2026 reste stable, à hauteur de 961 millions d'euros. Mes chers collègues, j'appelle votre attention sur le budget du Sénat, fixé à 382 millions d'euros dans le contexte particulier du renouvellement triennal. Il doit permettre la poursuite des grands chantiers immobiliers indispensables à la sécurité, à la modernisation et à la transition écologique de notre institution.
Le Conseil constitutionnel, pour sa part, voit ses crédits augmenter de 11 %. Une telle évolution, loin d'être anodine, répond à des besoins précis. Il s'agit à la fois de renforcer les capacités d'investissement du Conseil, notamment dans les domaines de la cybersécurité et du développement durable, mais également de préparer de manière fiable et sécurisée l'élection présidentielle de 2027.
Le budget de la Cour de justice de la République pour 2026 s'inscrit dans une dynamique de réduction maîtrisée des dépenses, avec une enveloppe en baisse de 8,5 %. Cette diminution, loin de fragiliser la capacité opérationnelle de l'institution, traduit une démarche de modernisation, d'optimisation et de responsabilisation dans l'usage des moyens publics, dans un contexte où la sobriété budgétaire est une exigence que nous partageons tous, mes chers collègues.
En ce qui concerne la mission « Direction de l'action du Gouvernement », une légère hausse des crédits est demandée, afin notamment d'optimiser la qualité du travail et des services du Premier ministre en matière de coordination et de suivi de l'application des textes législatifs nationaux et européens. Il s'agit également de renforcer les moyens des services de renseignements dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la coordination de la politique de sécurité et de défense nationale.
Enfin, même si les crédits de paiement de la mission « Conseil et contrôle de l'État » sont en baisse, ils permettront de poursuivre les objectifs suivants : renforcement du lien entre l'État et la société civile grâce au Cese ; modernisation et ouverture des juridictions financières ; consolidation de la performance et de la qualité de la justice administrative.
Les crédits de ces trois missions et de leurs programmes illustrent le fait que chaque euro engagé doit être mobilisé avec discernement, transparence et exigence. Par conséquent, mes chers collègues, en votant en faveur des différents budgets de ces missions, le groupe RDPI souhaite réaffirmer son attachement à un État efficace et modéré dans ses moyens, mais pleinement opérationnel.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Laurent Panifous, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons les crédits de ces trois missions un contexte difficile, qui impose de grands efforts de maîtrise de la dépense publique. Je tiens tout d'abord à vous remercier de vos propositions et de la qualité de vos travaux.
Maîtriser la dépense publique n'est jamais un exercice facile ; cela requiert des choix forts, courageux et essentiels pour l'avenir de nos finances publiques.
M. Éric Kerrouche. Nous sommes d'accord !
M. Laurent Panifous, ministre délégué. La responsabilité du Gouvernement est de tracer une voie d'équilibre entre une réalité qui s'impose à nous, celle du redressement de nos finances publiques, et les moyens d'une action publique plus efficace, ciblée et exemplaire.
À cet égard, les trois missions et le budget annexe que nous examinons, bien qu'ils abordent des sujets très divers, sont indispensables au bon fonctionnement de l'État de droit. Ces crédits visent à garantir aux pouvoirs publics, aux organes chargés de leur contrôle, ainsi qu'aux autorités indépendantes qui veillent au respect des libertés individuelles, les moyens nécessaires à leur action.
Ces diverses entités doivent observer un devoir d'exemplarité dans la conduite de leur exercice budgétaire. Je me réjouis d'ailleurs que le bilan de leur exécution budgétaire 2025 aille en ce sens.
La mission « Pouvoirs publics » a pour particularité de regrouper les crédits de plusieurs institutions qui bénéficient d'une autonomie financière en raison du principe de la séparation des pouvoirs. Conformément à l'usage, je m'abstiendrai de toute observation relative aux budgets de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui relèvent de la responsabilité de chaque assemblée.
Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit une légère diminution des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État ». Seuls les crédits de titre 2 du Conseil d'État et de la Cour des comptes, c'est-à-dire ceux qui sont liés à la masse salariale, font l'objet d'une hausse modérée, afin de poursuivre la revalorisation indemnitaire accordée aux magistrats. Cette mesure est nécessaire pour permettre à ces institutions si essentielles de continuer d'être attractives et de recruter.
Le budget de fonctionnement et d'investissement de la mission connaît une baisse de 20 %, traduisant l'achèvement progressif des grands programmes d'investissement immobilier des juridictions administratives et l'effort engagé de rationalisation des dépenses.
Entre 2024 et 2025, le budget du Conseil économique, social et environnemental a été réduit. Hors dépenses de personnel, ses dépenses de fonctionnement ont ainsi diminué de 26 %. En 2026, une nouvelle baisse de 6 % de ses crédits est prévue. Ainsi, entre 2024 et 2026, son enveloppe de fonctionnement aura reculé de près de 30 %. À son échelle, le Cese contribue donc de manière significative à l'effort collectif de maîtrise des finances publiques.
À périmètre courant, les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » s'élèvent à un peu plus d'un milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Là aussi, dans un souci d'exemplarité, le projet de budget traduit un effort notable de maîtrise des dépenses publiques.
En dehors des crédits dédiés à la défense et à la sécurité nationale, les dépenses de fonctionnement de la plupart des entités dont le budget relève du Premier ministre n'augmenteront pas en 2026 et seront gelées à leur niveau de la loi de finances initiale pour 2025. Ces évolutions s'inscrivent dans la continuité des efforts budgétaires déjà réalisés sur cette mission depuis 2024.
Le Gouvernement a par ailleurs choisi d'augmenter de manière ciblée les emplois et les crédits liés aux enjeux de défense et de sécurité.
Le budget du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) augmente ainsi de 25 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2025, 10,2 millions supplémentaires étant consacrés aux dépenses d'investissement et de fonctionnement, ainsi qu'à la création de 18 équivalents temps plein en 2026. Cet effort finement défini vient accompagner l'effort de la Nation en matière de défense.
Dans un souci de maîtrise des emplois publics, la création d'emplois dont bénéficie le SGDSN est compensée par la suppression de 25 emplois dans les services du Premier ministre et parmi les institutions comprises dans le programme « Coordination du travail gouvernemental ».
La suppression de 10 équivalents temps plein au sein du Haut-Commissariat à la stratégie et au plan est notamment permise par la rationalisation et la mutualisation des besoins produites par la fusion de cette institution avec France Stratégie. Au sein du service d'information du Gouvernement, une baisse de 5 équivalents temps plein est prévue dans un souci de rationalisation des dépenses de communication du Gouvernement. Quant à l'Institut national du service public, une baisse de 10 équivalents temps plein est prévue dans le cadre de la réforme de la formation de l'encadrement supérieur de l'État.
Après des années de croissance, les moyens des autorités administratives et publiques indépendantes du programme 308 sont gelés dans ce budget. Aucune création d'emploi n'est prévue les concernant.
Enfin, les crédits du budget annexe « Publications officielles et information administrative » pour 2026 s'élèvent à 145,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 147,4 millions d'euros en crédits de paiement, en diminution de 1,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025 pour ce qui concerne les crédits de paiement.
Les dépenses de personnel du budget annexé diminuent de 1 million d'euros par rapport à la loi de finances pour 2025, le schéma d'emploi restant stable en 2026 après avoir connu plusieurs années de baisse importante.
La réduction des effectifs de la Société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels permet de poursuivre la baisse de sa dotation de 500 000 euros. Les efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement sont maintenus, des économies étant prévues sur l'ensemble des composantes du budget annexé.
Le schéma directeur informatique de la Dila permet à cette dernière de maîtriser l'augmentation importante de ses dépenses d'investissement, destinées à la poursuite de projets numériques structurants, notamment au développement des nouveaux outils de production normative.
En parallèle, les recettes prévisionnelles de la Dila en 2026 s'établissent à 175,3 millions d'euros, en diminution de 3 % depuis 2025. Cette baisse s'explique notamment par le tassement des encaissements régulièrement observé l'année de la tenue des élections municipales. En dépit de ces évolutions, le solde du budget annexe est tout de même positif, dégageant un excédent de 27,9 millions d'euros.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je me tiens à votre disposition pour vous fournir des précisions dans le cadre de l'examen des amendements déposés sur ces missions et ce budget annexe.
Pouvoirs publics
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Pouvoirs publics |
1 140 179 221 |
1 140 179 221 |
Présidence de la République |
122 563 852 |
122 563 852 |
Assemblée nationale |
607 647 569 |
607 647 569 |
Sénat |
353 470 900 |
353 470 900 |
La Chaîne parlementaire |
35 596 900 |
35 596 900 |
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
0 |
0 |
Conseil constitutionnel |
20 000 000 |
20 000 000 |
Haute Cour |
0 |
0 |
Cour de justice de la République |
900 000 |
900 000 |
Mme la présidente. Je suis saisie de dix amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1466 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Gold, Laouedj, Masset et Roux, Mme Pantel et M. Bilhac, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
3 000 000 |
3 000 000 |
||
Assemblée nationale |
15 000 000 |
15 000 000 |
||
Sénat |
8 000 000 |
8 000 000 |
||
La Chaîne parlementaire |
||||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
||||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
||||
TOTAL |
26 000 000 |
26 000 000 |
||
SOLDE |
-26 000 000 |
-26 000 000 |
||
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Afin de contribuer à l'effort national de maîtrise de la dépense publique, cet amendement de portée symbolique vise à réduire de 2,5 % les budgets de la présidence de la République, de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il est en effet indispensable que les institutions nationales fassent preuve d'exemplarité, alors que des arbitrages exigeants sont demandés à l'ensemble des acteurs publics.
Une telle démarche apparaît d'autant plus légitime que les collectivités territoriales, qui assurent pourtant une grande partie de l'investissement public et des services de proximité, sont de nouveau fortement sollicitées dans ce projet de loi de finances.
Une telle réduction, qui ne remettrait pas en cause le fonctionnement des institutions, enverrait un signal de responsabilité budgétaire et de solidarité : à chacun de ses échelons, le pouvoir politique doit contribuer au redressement des finances publiques.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1133 rectifié, présenté par M. Brault, Mmes Bessin-Guérin et Bourcier, MM. Capus, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. Grand et Laménie, Mme Lermytte, MM. V. Louault, A. Marc et Médevielle, Mme Paoli-Gagin et MM. Pellevat, Rochette, Verzelen, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
2 451 277 |
2 451 277 |
||
Assemblée nationale |
12 152 951 |
12 152 951 |
||
Sénat |
7 069 418 |
7 069 418 |
||
La Chaîne parlementaire |
711 938 |
711 938 |
||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
400 000 |
400 000 |
||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
18 000 |
18 000 |
||
TOTAL |
22 803 584 |
22 803 584 |
||
SOLDE |
-22 803 584 |
-22 803 584 |
||
La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Je considère cet amendement comme défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-1536 rectifié bis est présenté par MM. Cambier et Delahaye, Mmes Romagny, Sollogoub, Gacquerre et Guidez et MM. Maurey, Bonneau, J.B. Blanc, J. M. Arnaud, Naturel et Bleunven.
L'amendement n° II-1740 rectifié bis est présenté par MM. Canévet, Longeot, Menonville, Folliot, Mizzon et Duffourg.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
||||
Assemblée nationale |
||||
Sénat |
||||
La Chaîne parlementaire |
||||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
2 070 000 |
2 070 000 |
||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
||||
TOTAL |
2 070 000 |
2 070 000 |
||
SOLDE |
-2 070 000 |
-2 070 000 |
||
La parole est à M. Guislain Cambier, pour présenter l'amendement n° II-1536 rectifié bis.
M. Guislain Cambier. Cet amendement, que nous espérons non seulement symbolique, mais aussi efficace, vise à remédier à la situation de nos finances publiques, qui sont exsangues.
La présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat n'ont pas sollicité de hausse de leurs dotations entre 2025 et 2026. Il serait bienvenu que le Conseil constitutionnel participe lui aussi à l'effort. Or celui-ci demande une hausse de ses crédits de 11,54 %. Bien qu'il doive anticiper le déroulement de la prochaine élection présidentielle, une telle augmentation semble d'autant plus disproportionnée que ses motivations ne nous ont pas été précisées.
Nous proposons donc de geler la dotation du Conseil constitutionnel par rapport à son niveau de l'année dernière.
M. Vincent Delahaye. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l'amendement n° II-1740 rectifié bis.
M. Michel Canévet. La situation actuelle exige un effort collectif ; il n'est pas justifié que le budget du Conseil constitutionnel augmente de manière aussi importante.
M. Vincent Delahaye. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° II-1726 rectifié bis, présenté par Mme Pantel, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Laouedj, Masset, Roux et Bilhac, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
7 000 000 |
7 000 000 |
||
Assemblée nationale |
4 000 000 |
4 000 000 |
||
Sénat |
3 000 000 |
3 000 000 |
||
La Chaîne parlementaire |
||||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
||||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
||||
TOTAL |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Guylène Pantel.
Mme Guylène Pantel. Du fait de l'intensification de l'activité législative, de l'extension des missions de contrôle et de la complexification croissante de la production normative, une pression soutenue s'exerce sur les équipes parlementaires, tant pour les collaborateurs qui assistent directement les élus que pour ceux qui sont rattachés aux groupes politiques.
Leur charge de travail s'est fortement accrue, sans que les moyens humains à leur disposition aient évolué au même rythme. Par cet amendement qui se veut avant tout d'appel, nous proposons d'ajuster les crédits de la mission « Pouvoirs publics » en majorant ceux du Parlement.
Il s'agit non pas d'accroître les moyens individuels des élus ou de revaloriser leurs indemnités, mais uniquement de renforcer les équipes qui accompagnent au quotidien les parlementaires. Leur appui technique, juridique et analytique est en effet indispensable à l'exercice des missions constitutionnelles du Parlement.
L'adoption de cet amendement permettrait de consolider ces équipes en améliorant la qualité du travail législatif et du contrôle des politiques publiques. En adaptant les ressources aux besoins réels, elle garantirait d'accroître encore la rigueur et l'efficacité du travail parlementaire.
Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-1125 rectifié est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
L'amendement n° II-1617 rectifié quinquies est présenté par MM. Chantrel et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kanner et Kerrouche, Mme Narassiguin, M. Roiron, Mmes Artigalas, Bélim, Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mmes Briquet et Canalès, M. Cardon, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Cozic, Mme Daniel, MM. Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, MM. Fagnen, Fichet, Gillé, Jacquin, Jeansannetas et P. Joly, Mme Le Houerou, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel et Marie, Mme Matray, MM. Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Omar Oili, Ouizille et Pla, Mme Poumirol, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Ros, Mme Rossignol et MM. Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber et Ziane.
L'amendement n° II-1639 est présenté par M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L'amendement n° II-1697 rectifié bis est présenté par M. Masset, Mme Pantel, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Laouedj, Roux et Bilhac.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Assemblée nationale |
||||
Sénat |
4 500 000 |
4 500 000 |
||
La Chaîne parlementaire |
||||
Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
500 000 |
500 000 |
||
TOTAL |
4 500 000 |
4 500 000 |
4 500 000 |
4 500 000 |
SOLDE |
0 |
|||
La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l'amendement n° II-1125 rectifié.
Mme Mélanie Vogel. Mes chers collègues, cet amendement vise à revaloriser les salaires de nos collaborateurs.
Nous le répétons souvent, les parlementaires n'ont sans doute jamais autant travaillé qu'en ce moment, alors que les compromis se construisent au Parlement. Cela implique inévitablement une charge de travail plus lourde pour les équipes de collaborateurs.
Je le dis très clairement : les crédits à notre disposition pour payer nos collaborateurs sont indignes. (Mme Christine Lavarde et M. Antoine Lefèvre protestent.) Nos équipes sont soit en sous-effectif, soit mal payées, soit les deux.
Nous en connaissons les conséquences en matière de conditions de travail : il suffit d'aller faire un tour au cabinet médical du Sénat pour savoir que les burn-out et l'épuisement sont de mise dans notre assemblée. (Mme Christine Lavarde et M. Jean-François Rapin protestent.)
Nous demandons donc d'augmenter les salaires de nos collaborateurs, qui sont plus diplômés qu'auparavant et travaillent davantage. Il y va de la dignité du travail que nous effectuons dans notre institution. (Mme Patricia Schillinger et M. Guy Benarroche applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l'amendement n° II-1617 rectifié quinquies.
M. Pierre-Alain Roiron. Nos collaborateurs subissent une grande injustice : ces dernières années, leur salaire n'a augmenté que de 6 %, quand l'inflation augmentait de plus du double.
Il semble légitime de réviser leur rémunération, à la fois pour permettre au Parlement de réaliser le travail toujours plus important qui lui est demandé ces derniers temps et pour répondre aux demandes des territoires pour lesquels nous devons agir au quotidien.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l'amendement n° II-1639.
M. Fabien Gay. La défense de cet amendement me fournit l'occasion de saluer l'ensemble des agents et des membres de l'administration de notre institution : ils nous permettent de faire fonctionner la vie démocratique de notre pays, souvent au détriment de leur vie de famille et de leur vie personnelle, comme nombre de fonctionnaires si souvent stigmatisés. Qu'ils en soient toutes et tous remerciés.
Nos équipes de collaborateurs et de collaboratrices font partie de ces personnes. Nous, hommes et femmes politiques, ne sommes pas seuls : nous avons des militants à nos côtés, un groupe parlementaire. Nous pouvons compter sur des équipes qui sont indispensables à notre action de parlementaires et d'élus, qu'il s'agisse de notre travail législatif, de nos tâches en circonscription ou de notre communication, par exemple pour répondre aux courriers que nous recevons.
La question se pose partout : l'inflation met en difficulté tous les salariés de notre pays, et l'enveloppe budgétaire est contrainte.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Fabien Gay. Nous proposons donc 4,5 millions d'euros de plus pour nos collaborateurs. Mes chers collègues, il me semble que nous pouvons nous accorder sur cette proposition.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l'amendement n° II-1697 rectifié bis.
M. Michel Masset. Je me joins à mes collègues pour demander la revalorisation des moyens du Parlement. Afin que celui-ci puisse assurer son expertise, nous proposons, à l'image de ce qui est prévu au Parlement européen en particulier, de prévoir l'emploi de collaborateurs scientifiques.
Nous proposons donc que les parlementaires français reçoivent une enveloppe destinée au recrutement occasionnel d'enseignants-chercheurs, pour que le Parlement français ne fasse plus figure de parent pauvre en la matière.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1915, présenté par Mme O. Richard, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
|
Présidence de la République |
||||
Assemblée nationale |
||||
Sénat |
1 |
1 |
||
La Chaîne parlementaire |
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Indemnités des représentants français au Parlement européen |
||||
Conseil constitutionnel |
||||
Haute Cour |
||||
Cour de justice de la République |
1 |
1 |
||
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Olivia Richard.
Mme Olivia Richard. Ayant été collaboratrice parlementaire pendant vingt-trois ans, je ne suis pas tout à fait neutre : je sais quel est l'investissement de nos équipes au service de nos mandats. Nos collaborateurs sont notre bras armé : sans eux, nous ne pouvons pas nous acquitter de nos missions. L'importance de notre rôle constitutionnel se mesure aux moyens dont nous disposons pour l'exercer.
Mes chers collègues, songez que, aux États-Unis, un sénateur a cinquante collaborateurs parlementaires… Je tenais donc à ouvrir ce débat : nous avons besoin, pour travailler, d'équipes renforcées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Grégory Blanc, rapporteur spécial. Je remercie nos collègues du dépôt de ces amendements : ainsi un débat peut-il avoir lieu sur cette mission.
Certains demandent plus de crédits, d'autres moins. Je demanderai, quant à moi, le retrait de l'ensemble de ces amendements. Je m'en explique.
Je formulerai un rappel, tout d'abord : en vertu du principe d'autonomie budgétaire des pouvoirs publics constitutionnels issu de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, reconnu pour les assemblées par l'ordonnance du 17 novembre 1958 et consacré par la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), chaque institution fixe elle-même son budget.
Constitutionnellement parlant, donc, exception faite de celui du Sénat, que nous pourrions décider d'amender, nous n'avons pas la main sur le budget des institutions. Or aucun amendement visant spécifiquement la dotation du Sénat n'a été déposé.
Pour ce qui concerne les amendements de réduction des crédits, ensuite, je veux souligner que l'ensemble de nos institutions connaissent aujourd'hui des problèmes de trésorerie. Toutes évoluent dans des bâtiments relevant du patrimoine historique, des palais dorés qui ne sont pas toujours fonctionnels et qui ne répondent pas aux exigences de notre trajectoire de neutralité carbone. Ce constat nécessite un certain nombre d'investissements, qui ne sont pas financés.
Les trésoreries de nos institutions sont aujourd'hui insuffisantes pour que soit garantie la continuité de leur activité. C'est particulièrement vrai pour la présidence de la République.
Les crédits du Conseil constitutionnel sont visés par plusieurs amendements. Mes chers collègues, je demande chaque année, à son propos, des éléments plus précis, et la comptabilité analytique du Conseil constitutionnel mérite sans doute d'être modernisée.
Mme Audrey Linkenheld. Ça, c'est sûr !
M. Grégory Blanc, rapporteur spécial. Mais nous pouvons faire fond, malgré tout, sur un certain nombre de données : compte tenu d'une réduction des effectifs, la masse salariale du Conseil constitutionnel va diminuer de 12,5 % en 2026 par rapport à l'exercice précédent.
L'augmentation de l'enveloppe est principalement liée à la préparation de l'organisation présidentielle de 2027 et à la nécessité d'investir dans la sécurisation des systèmes informatiques et la modernisation du siège de l'institution. Je vous invite à vous y rendre, mes chers collègues : vous y constaterez de visu que le bâtiment a bien besoin de tels investissements.
Quant à la Cour de justice de la République, qui n'est visée qu'« en creux » par les amendements déposés, sa dotation s'élève à un peu moins de 1 million d'euros, mais aucun procès n'a été organisé en 2025 et un seul dossier est en cours d'instruction. La question d'une réduction de son budget peut donc en effet se poser.
J'en viens enfin au Sénat et aux crédits alloués à la rémunération des collaborateurs parlementaires. Je rappelle la faiblesse de la dotation du Sénat. Je rappelle également, puisqu'un article est paru dans la presse à ce sujet, l'étanchéité des différentes enveloppes : l'enveloppe consacrée au fonctionnement de l'institution est parfaitement étanche par rapport aux caisses de sécurité sociale et de retraite des sénateurs comme des agents de la maison.
Il est essentiel de le souligner : il n'existe aucune fongibilité entre ces différentes ressources ; l'argent des caisses de retraite et de sécurité sociale ne sert en aucun cas à éponger le déficit annuel de fonctionnement de notre institution.
MM. Olivier Cigolotti et Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. Grégory Blanc, rapporteur spécial. Nous avons des réserves, cela a été dit, mais elles sont insuffisantes pour entretenir le patrimoine – certains ici s'en sont rendu compte – comme pour accroître la rémunération des collaborateurs.
Ce gel ne pourra sans doute pas durer. En tout état de cause, il n'est pas possible, pour financer les augmentations de crédits demandées, de ponctionner les budgets d'autres institutions, car une telle pratique ne serait pas conforme à la Constitution.
C'est pourquoi je persiste à demander le retrait de ces amendements – à défaut, je l'ai dit, l'avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Laurent Panifous, ministre délégué. D'une manière générale, je redis que, conformément à un usage bien établi, le Gouvernement s'abstiendra de commenter les dotations budgétaires des assemblées.
Pour ce qui est de l'amendement n° II-1466 rectifié bis du sénateur Cabanel, je tiens à préciser que les institutions concernées ont vu pour la deuxième année consécutive leur dotation gelée, ce qui, au regard de leur activité, représente un effort certain.
Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut être favorable à une baisse des crédits de la présidence de la République.
Pour ce qui est de l'amendement n° 1133 rectifié du sénateur Brault, je souscris pleinement à la volonté affichée de maîtrise des dépenses publiques. Toutefois, il me semble nécessaire, à cet égard, de faire preuve de pragmatisme : cette maîtrise ne saurait être forfaitaire.
La réduction proposée serait par exemple bien plus difficile à supporter pour La Chaîne parlementaire que pour les autres institutions concernées. Je suis convaincu que les meilleurs efforts budgétaires, les plus efficaces, sont ceux qui sont précisément ciblés, fondés sur une étude approfondie des bilans budgétaires des institutions dont nous parlons.
Pour cette raison, le Gouvernement ne peut qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
J'en viens aux amendements identiques nos II-1536 rectifié bis et II-1740 rectifié bis des sénateurs Cambier et Canévet : la dotation budgétaire du Conseil constitutionnel pour 2026 est certes en hausse de 11,5 %, soit 2,1 millions d'euros, par rapport à l'exercice précédent.
Une telle évolution peut sembler importante, mais il convient de souligner que le Conseil constitutionnel ne dispose que d'une faible réserve de précaution.
Cette augmentation est par ailleurs nécessaire pour accompagner plusieurs priorités stratégiques, à savoir le financement d'investissements liés à la cybersécurité, à la sécurité et au plan de développement durable du Conseil, ainsi qu'à la préparation de l'élection présidentielle de 2027. Un plan de continuité informatique doit notamment être mis en place. Il ne semble pas opportun de brider ces investissements hautement stratégiques pour notre État de droit.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Pour ce qui est de l'amendement n° II-1726 rectifié bis de la sénatrice Pantel et des amendements identiques nos II-1125 rectifié, 1617 rectifié quinquies, II-1639 et II-1697 rectifié bis de la sénatrice Vogel et des sénateurs Roiron, Gay et Masset, je souligne de nouveau que la présidence de la République connaît pour la deuxième année consécutive un gel de sa dotation globale.
L'inscription de ce budget dans la norme « zéro valeur » s'est traduite, dans le projet de loi de finances pour 2025, par une baisse des dépenses de fonctionnement, hors activité présidentielle, et par une légère diminution des dépenses d'investissement, ramenées à la hauteur de l'exécution 2023.
Concernant les activités présidentielles proprement dites, leur exécution budgétaire sera conforme à l'enveloppe réservée, malgré une forte activité justifiée par les événements internationaux, le coût moyen par déplacement poursuivant sa tendance à la baisse.
Quant au plafond d'emplois de la présidence de la République, il demeure inchangé depuis sa formalisation en 2019. La présidence a lancé depuis 2025 des travaux de refonte de son schéma d'emplois afin de prendre en compte les récentes évolutions organisationnelles et l'exercice de nouvelles missions. Ces travaux doivent mener à une rationalisation des effectifs.
Derechef, pour l'ensemble de ces raisons, l'avis du Gouvernement est défavorable sur ces cinq amendements.
Je dirai quelques mots, enfin, de l'amendement d'appel n° II-1915 de la sénatrice Richard : madame la sénatrice, je comprends parfaitement les motivations de votre démarche, qui est justifiée par le souci de tenir compte de la situation des collaborateurs parlementaires du Sénat.
Toutefois, pour les raisons précédemment indiquées, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée pour ce qui concerne les dotations des assemblées parlementaires.
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous indique qu'il y a 40 amendements à examiner sur les missions « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l'État » et « Direction de l'action du Gouvernement ». Si nous dépassions douze heures trente, la suite de l'examen de ces missions serait reportée à la fin de semaine. J'invite donc chacun à faire preuve de concision.
La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour explication de vote.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Je me joins à la demande de revalorisation des rémunérations des collaborateurs, en ajoutant aux arguments déjà exposés que le travail parlementaire se complexifie techniquement parlant.
L'augmentation du volume de travail liée à l'explosion des réseaux sociaux et des communications digitales pose un problème structurel : il va nous falloir revoir, y compris sur le plan statutaire, les contrats de nos collaborateurs.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je souhaite expliquer le vote de notre groupe sur les quatre premiers amendements de cette discussion commune, qui visent à réduire ou à geler les dotations allouées au Sénat, à l'Assemblée nationale ou au Conseil constitutionnel.
Je veux dire combien les efforts de réorganisation et de limitation des dépenses qui ont d'ores et déjà été demandés à ces différentes institutions me semblent importants.
Or il est crucial que ces outils indispensables au fonctionnement de notre République et de notre démocratie ne soient pas contraints de se mettre eux-mêmes en difficulté dans l'exercice de leurs missions. Je sais très bien, en particulier, qu'un certain nombre de personnalités politiques – il n'y en a pas ici – souhaitent la disparition du Conseil constitutionnel. Nous comprenons les raisons politiques d'une telle position, mais, quoi qu'il en soit, l'asphyxie financière n'est pas la bonne méthode.
Nous voterons donc contre ces amendements gel ou de diminution de crédits.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Deux chiffres : 17 euros par an et par Français, 0,25 % du budget de l'État. C'est ce que représentent les crédits de la mission « Pouvoirs publics ». La course à la démagogie à laquelle certains se prêtent volontiers revient à affaiblir le cœur de la démocratie. C'est pourquoi les amendements que vient d'évoquer mon collègue sont inopérants.
Cette observation vaut y compris pour les crédits du Conseil constitutionnel : sachant qu'une guerre hybride est en train d'être livrée à notre pays, si les investissements nécessaires ne sont pas faits l'année prochaine, notre démocratie pourrait s'en trouver affaiblie dans la perspective de l'élection présidentielle de 2027. Mes chers collègues, je nous invite donc à faire un peu attention aux conséquences de nos décisions !
J'en viens aux crédits alloués à la rémunération des collaborateurs. Bien entendu, il faudrait faire un effort à cet égard, mais, conformément à la règle « zéro valeur », nous fonctionnons à budget constant : une augmentation de cette enveloppe est donc impossible. Cela dit, il est nécessaire qu'à l'avenir nous réfléchissions différemment au fonctionnement de nos institutions, sur le plan patrimonial notamment.
En tout état de cause, les mesures faciles, à l'emporte-pièce, dont l'effet serait d'affaiblir la démocratie, ne sont pas des solutions.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. J'ai bien entendu les arguments de mes collègues : il serait démagogique de demander la baisse des crédits de la présidence de la République et des assemblées. Je l'ai dit : il s'agit d'une proposition symbolique à mettre en regard des efforts que nous demandons aux collectivités territoriales.
J'ai entendu ce que vous avez dit, monsieur le rapporteur spécial, sur la nécessité d'entretenir notre patrimoine, mais, comparées au budget global du Sénat, les dépenses d'investissement afférentes ne représentent pas une somme importante : 15 millions à 20 millions d'euros tout au plus.
Une réflexion doit être menée, en tout cas, sur une meilleure répartition de l'effort budgétaire : notre contribution devrait être comparable à celle que consentent nos collectivités territoriales.
Je retire néanmoins mon amendement, monsieur le président.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1466 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Il est vrai que, à constater l'évolution des crédits de certains programmes, on peut s'interroger sur les priorités du Gouvernement.
La dotation budgétaire du Conseil constitutionnel augmente de 11,5 %, celle de la Cour des comptes et autres juridictions financières de 3,2 % ; quant aux crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », ils sont en hausse de 3 %...
Il faut savoir que le Sénat, lui, a baissé sa dotation de 13 % en quinze ans : c'est notre assemblée qui, de toutes les institutions, a fait le plus d'efforts. Voici ce qu'il en est du budget du Conseil constitutionnel sur la même période : +3,4 millions d'euros, soit +31 % ! Toutes les institutions devraient faire des efforts : toutes doivent montrer le chemin.
Si toutes avaient suivi le Sénat, je peux vous dire que nos comptes publics seraient en bien meilleur état ! Il n'y aurait pas de question à se poser et nous passerions sans doute moins de temps sur des amendements visant à grignoter par-ci par-là 3 millions ou 4 millions d'euros ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je veux réagir à la demande de crédits supplémentaires pour nos collaborateurs : évidemment, ceux-ci sont un bien extrêmement précieux, et nous devons faire extrêmement attention à eux d'un point de vue tant salarial que comportemental. Qui sont les employeurs de nos collaborateurs ? Nous, et personne d'autre !
Je constate moi aussi l'inflation d'amendements et la complexité croissante de notre travail. Néanmoins, j'y insiste, nous sommes les employeurs de nos collaborateurs. J'entends parler de burn-out, mais c'est à nous de faire attention à la responsabilité que nous avons à leur égard ! (Marques d'approbation sur les travées du groupe GEST.) C'est à nous de leur attribuer, si nous le jugeons opportun, des temps partiels, mi-temps, tiers temps, voire quart temps.
Il ne tient qu'à nous de mieux payer nos collaborateurs – cela suppose parfois de les recruter en moindre quantité – et de faire attention à eux et aux conditions d'exécution de leurs tâches.
Je ne voterai donc pas ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Luc Brault. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° II-1133 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1536 rectifié bis et II-1740 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1726 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1125 rectifié, II-1617 rectifié quinquies, II-1639 et II-1697 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme Olivia Richard. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° II-1915 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Pouvoirs publics », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
conseil et contrôle de l'état
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Conseil et contrôle de l'État |
836 611 043 |
869 273 423 |
Conseil d'État et autres juridictions administratives |
537 937 237 |
567 956 821 |
dont titre 2 |
462 581 368 |
462 581 368 |
Conseil économique, social et environnemental |
34 149 438 |
34 149 438 |
dont titre 2 |
27 791 045 |
27 791 045 |
Cour des comptes et autres juridictions financières |
264 524 368 |
267 167 164 |
dont titre 2 |
242 247 396 |
242 247 396 |
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1135 rectifié, présenté par M. Brault, Mmes Bessin-Guérin et Bourcier, MM. Capus, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, MM. Grand et Laménie, Mme Lermytte, MM. V. Louault, A. Marc et Médevielle, Mme Paoli-Gagin et MM. Pellevat, Rochette, Verzelen, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
11 359 136 |
11 359 136 |
||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
682 989 |
682 989 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
5 343 343 |
5 343 343 |
||
TOTAL |
17 385 468 |
17 385 468 |
||
SOLDE |
- 17 385 468 |
- 17 385 468 |
||
La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-67 rectifié bis est présenté par MM. Verzelen, A. Marc, Chevalier, Brault et Chasseing, Mmes Bourcier et Bessin-Guérin et M. Rochette.
L'amendement n° II-794 rectifié est présenté par Mme V. Boyer, M. Klinger, Mmes de Cidrac, Evren et Bellurot, M. Panunzi, Mmes Dumont, Noël, Pluchet et Imbert, M. Anglars, Mme Muller-Bronn, MM. Piednoir, Sido, H. Leroy et Naturel, Mmes Bellamy, Di Folco, Berthet et Belrhiti et M. Le Rudulier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
||||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
||||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
SOLDE |
- 5 000 000 |
- 5 000 000 |
||
La parole est à M. Cédric Chevalier, pour présenter l'amendement n° II-67 rectifié bis.
M. Cédric Chevalier. Il défendu également.
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l'amendement n° II-794 rectifié.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement a pour objet les crédits du Conseil économique, social et environnemental – nous en avons parlé tout à l'heure.
Nous proposons que l'État continue de financer cette institution consultative, mais sur un périmètre rationalisé, conforme au rôle réel du Cese et à l'usage effectif qui est fait de ses travaux.
Le Cese bénéficie, dans le projet de loi de finances pour 2026, d'une dotation de 34 millions d'euros. Ce montant apparaît particulièrement élevé au regard de la réduction des effectifs intervenue en application de la réforme organique du 15 janvier 2021, qui a fait passer le nombre de membres du Cese de 233 à 175. Malgré cette baisse, le coût annuel de l'institution demeure important, tandis que son utilité institutionnelle et son impact démocratique restent discutés, notamment en raison de sa très faible notoriété.
Les productions du Cese ne semblent pas à la hauteur de l'ambition d'une institution parfois qualifiée de « troisième chambre ». Il n'a publié que dix-sept avis, résolutions ou rapports en 2022, trente et un en 2023, douze entre le 1er janvier et le 31 août 2024. De surcroît, la majorité de ces travaux sont réalisés en autosaisine, signe d'un faible recours des pouvoirs publics à ses analyses.
Dans ce contexte, nous proposons de réduire de 5 millions d'euros les crédits de l'action n° 04, « Travaux consultatifs » du programme 126, « Conseil économique, social et environnemental ».
Mme la présidente. L'amendement n° II-1735 rectifié, présenté par MM. Canévet, Folliot, Menonville, Duffourg, Delahaye, Longeot, Maurey, Cambier et Mizzon, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
||||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
||||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
4 000 000 |
4 000 000 |
||
TOTAL |
4 000 000 |
4 000 000 |
||
SOLDE |
- 4 000 000 |
- 4 000 000 |
||
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Cet amendement est analogue à celui que j'ai présenté tout à l'heure, dans le cadre de l'examen de la mission précédente, pour demander que les crédits du Conseil constitutionnel n'augmentent pas ou n'augmentent que très modérément.
Je constate que d'autres institutions, la Cour des comptes et autres juridictions financières, voient leur budget croître de façon significative. Dans le contexte budgétaire extrêmement contraint que nous connaissons, il paraît nécessaire que, au plus haut niveau de l'État, l'exemplarité soit de mise.
C'est pourquoi je propose un amendement de réduction de crédits de 4 millions d'euros.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1769, présenté par M. G. Blanc, Mme M. Vogel, M. Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
||||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. J'irai à rebours de mon collègue Canévet.
Nous venons de parler de l'équilibre des pouvoirs et des besoins du Parlement en matière de compétences et d'expertise.
Dans d'autres pays que le nôtre, il existe des instances chargées de produire une contre-expertise sur les questions budgétaires. C'est dans cet esprit, d'ailleurs, que le législateur a créé, en 2012, le Haut Conseil des finances publiques. Or on voit bien aujourd'hui que les moyens de cet organe sont limités : ses avis pourraient être plus étayés.
Cet amendement vise par conséquent à renforcer les moyens du Haut Conseil des finances publiques et, partant, l'expertise produite au bénéfice des parlementaires.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1852, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
||||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement a pour objet de rétablir le plan de recrutement prévu au titre de la programmation pluriannuelle 2023-2027 pour les juridictions administratives, à savoir la création de vingt-cinq postes de magistrats et de quinze postes de greffiers chaque année tant en 2024 qu'en 2025.
Ce schéma d'emplois avait été décidé et budgété, mais les recrutements n'ont pas eu lieu. Ils ont été au mieux retardés, peut-être annulés – nous ne le savons pas précisément –, alors même que, ces dernières années, le flux d'affaires a crû de 8 % par an dans ces juridictions, ce qui justifiait, d'ailleurs, les créations de postes qui avaient été prévues. Cette année, l'augmentation avoisine même les 20 % !
On arrive donc au bout des possibilités du personnel des juridictions administratives s'agissant de traiter les dossiers en respectant les normes et les indicateurs de performance qui leur sont imposés.
Ce que nous demandons aujourd'hui au Gouvernement et au ministre, c'est de nous dire ce qu'il en est de ces créations de postes, qui étaient déjà budgétées. Où en sommes-nous, monsieur le ministre ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bilhac, rapporteur spécial. Les amendements nos II-1135 rectifié de Jean-Luc Brault et II-1735 rectifié de Michel Canévet sont des amendements de rabot. Les mesures proposées ne sont ni très ciblées ni très étayées ; elles mettraient en difficulté les juridictions financières, qui sont déjà mises à contribution.
Quant aux amendements identiques n° II-67 rectifié bis de Cédric Chevalier et II-794 rectifié de Valérie Boyer, ils visent à réduire les crédits du Cese de 5 millions d'euros, soit, tout de même, 78 % de baisse : c'est une saignée. J'en demanderai le retrait, car notre assemblée s'est toujours montrée très prudente quant à l'autonomie de la troisième chambre qu'est le Cese.
L'amendement n° II-1769 de Grégory Blanc a pour objet d'augmenter de 6 millions d'euros les crédits du Haut Conseil des finances publiques. Le budget du HCFP, qui est de 1,5 million d'euros, serait multiplié par 7,5 ; cela me semble un peu disproportionné.
L'amendement n° II-1852 de Guy Benarroche vise quant à lui à renforcer les moyens des juridictions administratives. Je vous rejoins, mon cher collègue : il faudrait les renforcer. Une réflexion plus large doit être engagée, car on ne peut pas dans le même temps demander à ces juridictions de respecter des délais d'instruction raisonnables et ne pas leur donner les moyens dont elles ont besoin pour ce faire.
Je demande donc, au nom de la commission, le retrait de l'ensemble de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Laurent Panifous, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ces amendements, qui traduisent une fois de plus votre souci d'une gestion saine et efficace des deniers publics.
Si l'effort de maîtrise des dépenses publiques doit bien entendu être partagé par toutes les entités publiques, je ne suis cependant pas persuadé que les économies budgétaires ici proposées soient compatibles avec la bonne marche des institutions concernées.
À titre d'exemple, le budget du Conseil d'État et des autres juridictions administratives diminue de 5,2 % pour 2026. Le budget de fonctionnement et d'investissement du programme 165, hors dépenses de personnel, connaît une baisse significative de 25,8 % en crédits de paiement, ce qui traduit l'achèvement progressif des grands programmes d'investissement immobilier des juridictions administratives et un effort sans précédent de diminution des dépenses de fonctionnement courant.
Cet effort est d'autant plus remarquable que, après avoir déjà fortement crû en 2023 et 2024, l'activité des tribunaux administratifs a connu une hausse sans précédent en 2025 – le nombre de requêtes enregistrées a augmenté de près de 18 %, comme l'a rappelé le sénateur Benarroche. À cet égard, la réduction de 11 millions d'euros proposée par les auteurs de l'amendement n° II-1135 rectifié serait tout simplement insoutenable et contreviendrait au bon fonctionnement de nos juridictions administratives.
Par ailleurs, les juridictions financières ont pleinement contribué à la maîtrise des dépenses de l'État entre 2023 et 2025, via une baisse des crédits de fonctionnement, un sous-financement du dispositif de glissement vieillesse technicité et une réduction des effectifs.
Le projet de loi de finances pour 2026 prolonge déjà cette trajectoire exigeante : baisse du plafond d'emplois de 18 équivalents temps plein, économie de 1,2 million d'euros sur la masse salariale, diminution de 3 millions d'euros de l'enveloppe destinée au rattrapage indemnitaire des magistrats financiers. L'année 2026 sera une année blanche pour ce qui est des crédits de fonctionnement, après la baisse cumulée de près de 12 % déjà enregistrée depuis 2023.
Une diminution supplémentaire de 5,34 millions d'euros aurait pour conséquence de mettre en difficulté la Cour des comptes et les chambres régionales dans l'exercice de leurs missions, marquées notamment par la montée en puissance du nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics.
J'en viens au Conseil économique, social et environnemental, dont les crédits seraient fortement touchés par l'adoption des amendements nos II-67 rectifié bis et II-794 rectifié : considérant que cette institution, dont l'existence et le rôle sont inscrits dans la Constitution, a déjà largement participé aux efforts demandés en matière de maîtrise des dépenses publiques, le Gouvernement ne souhaite pas aller plus loin.
D'une manière générale, mesdames, messieurs les sénateurs, les économies que vous proposez ne permettraient pas à ces institutions de poursuivre leur mission dans de bonnes conditions.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'avis du Gouvernement est défavorable sur l'ensemble de ces amendements en discussion commune.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. À titre personnel, je suis pour la suppression du Conseil économique, social et environnemental.
Mme Valérie Boyer. Nous aussi !
M. Laurent Somon. Oui !
M. Vincent Delahaye. Cela étant, le Cese étant une institution constitutionnelle, il serait difficile de le supprimer.
Néanmoins, la Constitution ne prévoit pas de budget particulier pour cet organe. On peut donc lui demander des efforts supplémentaires, compte tenu de sa contribution au débat public et de ce qu'il apporte à nos travaux.
Dans ces conditions, je suis partisan de voter les amendements de diminution du budget du Cese.
MM. Jean-Luc Brault et Cédric Chevalier. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je vais retirer mon amendement, qui était un amendement d'appel.
Je veux simplement souligner que les crédits supplémentaires que nous demandons pour les juridictions financières – 6 millions d'euros – correspondent peu ou prou à ce qu'il faudrait allouer au Haut Conseil des finances publiques pour qu'il puisse faire ce que nous voudrions qu'il fasse, à savoir émettre à notre intention un avis éclairé et étayé en amont de l'examen du projet de loi de finances initiale, mais aussi en cours d'exécution budgétaire. La Cour des comptes, elle, émet des avis a posteriori, dans le cadre du contrôle budgétaire.
Nous devons nous contenter aujourd'hui d'une vision macroéconomique, sans aucune visibilité précise sur ce qui motive chaque année, ministère par ministère, les gels, surgels et annulations de crédits décidés en cours de gestion. Nous avons besoin d'appréhender plus finement la manière dont les crédits sont, ou non, effectivement consommés. C'est là, précisément, le rôle du Haut Conseil des finances publiques tel qu'il a été conçu. Il nous faut, en France, une institution de ce type en ordre de marche, telle qu'il en existe dans d'autres démocraties.
Je retire donc l'amendement n° II-1769, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1769 est retiré.
La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. J'ai bien entendu les explications du Gouvernement, notamment ce qu'a dit le ministre à propos des juridictions administratives.
Il est fréquent désormais que des recours intempestifs aient pour effet de geler des projets dont la concrétisation serait pourtant largement bénéfique à l'économie de notre pays. Il est temps que le Gouvernement propose des mesures tendant à limiter ces recours excessifs qui gangrènent l'activité des juridictions administratives, ce qui est particulièrement inadmissible. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Pour ce qui concerne la Cour des comptes, je propose non pas de supprimer ni même de réduire les crédits qui lui sont alloués, mais de modérer autant que possible la hausse qui est prévue, et cela pour une raison très simple : il faut que, au plus haut niveau de l'État, on soit exemplaire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour explication de vote.
Mme Laurence Muller-Bronn. Je soutiendrai l'amendement de ma collègue Valérie Boyer, qui a pour objet une baisse de 15 % du budget du Cese. Une telle diminution resterait soutenable : la réforme de 2021 ayant conduit à une baisse du nombre de membres de l'institution, une réduction des crédits semble tout à fait rationnelle.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je réponds à mon collègue Michel Canévet.
En tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, je visite tous les ans, partout en France, des tribunaux administratifs. Les problèmes sont partout les mêmes : il est rare qu'ils soient liés à des recours sans fondement. Cela arrive, très minoritairement, mais une grande partie des problèmes constatés sont liés à la simple application normale de la loi en vigueur et à la difficulté de garantir aux justiciables des délais de jugement normaux.
On observe par ailleurs un volume important de contentieux relevant du droit des étrangers et du droit d'asile. Pourquoi ? Tout simplement parce que, faute de personnel suffisant, les préfectures se montrent incapables de respecter les délais légaux régissant l'accès aux rendez-vous pour le renouvellement des documents officiels.
Il en résulte des contentieux qui sont pris en charge par la justice administrative, alors que ce ne devrait pas être le cas ! La justice administrative sert ainsi de secrétariat des préfectures, en raison de l'insuffisance de personnel au sein de ces dernières.
L'approche consistant à considérer que l'encombrement des tribunaux administratifs relèverait de certaines catégories d'affaires ne permet pas d'apporter une réponse satisfaisante. Ces phénomènes doivent être pleinement pris en compte et correctement traités !
Mme la présidente. Monsieur Brault, l'amendement n° II-1135 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Luc Brault. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1135 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-67 rectifié bis et II-794 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme Valérie Boyer. Bravo !
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos II-1769 et II-1852 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° II-1735 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme du temps imparti pour l'examen de ces missions.
Il nous reste 24 amendements à examiner.
Dès lors, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission est reportée au samedi 13 décembre 2025, après l'examen de la suite de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Relations avec les collectivités territoriales
Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 72, 73, 74, 75, 76 et 77) et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
La parole est à Mme la rapporteure spéciale.
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représentent qu'une petite partie des transferts financiers de l'État aux collectivités. Ils s'élèvent à 3,9 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) dans le projet de loi de finances pour 2026, quand les transferts de l'État sont estimés à près de 108 milliards d'euros, et même 155 milliards d'euros au sens large si l'on inclut les fractions compensatrices de TVA.
S'agissant tout d'abord des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », après plusieurs années de stabilité, les autorisations d'engagement (AE) connaissent une baisse de 152 millions d'euros en 2026, qui peut être intégralement imputée au programme 119. Celui-ci représente plus de 90 % des crédits de la mission et porte les dotations de soutien à l'investissement local, ainsi que les dotations de décentralisation.
La baisse est bien moindre, toutefois, s'agissant des crédits de paiement, avec une diminution qui se limite à 31 millions d'euros en 2026.
Comment expliquer ces évolutions ? S'agissant du programme 119, la mesure principale est la création à l'article 74 du présent projet de loi de finances d'un fonds d'investissement pour les territoires (FIT).
Ce fonds est issu de la fusion de trois dotations d'investissement portées par le programme 119 : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation politique de la ville (DPV). Cette fusion avait été annoncée par le Roquelaure de la simplification mené par le Gouvernement en avril 2025 et visait à assurer « une plus grande lisibilité des critères d'attribution ». Nous sommes assez loin du compte !
En vingt-cinq alinéas et sur deux pages, le Gouvernement nous propose une nouvelle architecture, en revoyant les collectivités éligibles, les modalités de répartition et la gouvernance des dotations de soutien à l'investissement des collectivités territoriales.
Certes, le Sénat a mis en avant par le passé un besoin de simplification de ces dotations, mais il s'agissait avant tout, à court terme, d'un indispensable travail administratif d'harmonisation des procédures et des calendriers. À l'inverse, sur le plan budgétaire, une dotation comme la DETR suscite l'unanimité, et la valeur des financements qu'elle apporte aux zones rurales est reconnue de tous.
Si ce dispositif devait évoluer, il nécessiterait des échanges prolongés avec le Sénat et les associations d'élus, ainsi que des partages de simulations pour identifier et analyser les effets redistributifs, ce qui n'a pas été fait en l'espèce.
En toute logique, l'ensemble des associations d'élus demandent la suppression de ce dispositif. C'est pourquoi la commission des finances présentera l'amendement n° II-22, qui vise à supprimer l'article 74.
Sur le plan budgétaire, les autorisations d'engagement consacrées aux trois dotations qui composent le FIT sont en baisse de 200 millions d'euros, soit une diminution de 12 %. Le Gouvernement s'appuie toutefois sur le cycle électoral, en notant que les investissements connaissent naturellement une baisse en année d'élection municipale. Les communes éligibles à la DETR et à la DPV seraient préservées, et la baisse porterait sur la DSIL.
Il convient par ailleurs de noter que, contrairement aux autorisations d'engagement, les crédits de paiement du programme 119 sont en hausse, avec notamment une augmentation de 59 millions d'euros pour les trois dotations du FIT. Cette hausse vise à tenir compte des importants restes à payer pour ne pas assécher l'investissement des collectivités.
Quant aux crédits du programme 122, qui concernent essentiellement les aides destinées à soutenir les collectivités faisant face à des situations exceptionnelles, ils sont grandement affectés par l'article 73 du projet de loi de finances pour 2026, qui étend le bénéfice de dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques ou géologiques (DSE) aux collectivités d'outre-mer.
Pour mémoire, la DSEC permet aujourd'hui d'indemniser les collectivités de métropole lorsqu'elles sont touchées par de tels événements. Les collectivités d'outre-mer pouvaient, quant à elles, s'appuyer sur le fonds de secours pour l'outre-mer (FSOM), qui couvre cependant un périmètre plus large, puisqu'il peut aussi indemniser des particuliers, des entreprises à caractère artisanal ou familial et des exploitations agricoles.
Ce fonds présente toutefois plusieurs limites.
Tout d'abord, il est dépourvu de base légale puisqu'il repose sur une circulaire du 11 juillet 2012 du ministre délégué chargé du budget et du ministre des outre-mer.
Ensuite, le Sénat a pointé par le passé des insuffisances s'agissant des modalités d'indemnisation et des délais de mobilisation.
Sur le plan budgétaire, ce projet de loi de finances prévoit pour 2026 le transfert de 5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 2 millions d'euros en crédits de paiement depuis le programme 123, « Conditions de vie outre-mer », de la mission « Outre-mer », vers le programme 122, dans l'enveloppe de la DSEC proposée pour 2026 sur ce même programme. Celle-ci est fortement rehaussée, passant de 30 millions d'euros en 2025 à 70 millions d'euros cette année, afin de tenir compte de l'intensification de l'aléa climatique sur l'ensemble du territoire français.
Si d'aventure les crédits de la DSEC devaient se révéler insuffisants en cas de catastrophe d'ampleur remarquable survenant en outre-mer ou en métropole, je rappelle que les redéploiements en gestion, des dégels de réserve et, en dernier recours, des crédits de virement, de transferts ou des ouvertures de crédits permettent d'ajuster en cours d'année les montants de cette dotation.
Autrement dit, le présent article ne change rien au fait que la France soutiendra financièrement ses collectivités en cas de catastrophe naturelle, en métropole comme en outre-mer. Nous vous proposons donc de voter l'article 73 sans modification.
Quant au programme 122, dans son ensemble, malgré cette hausse substantielle des crédits de la DSEC, les autorisations d'engagement proposées pour 2026 sont stables, s'élevant à 250 millions d'euros, et les crédits de paiement sont en forte baisse, passant de 350 millions d'euros à 256 millions d'euros.
Cette diminution reflète notamment le versement en 2025 d'une dotation de continuité territoriale exceptionnelle en faveur de la Corse. Le Gouvernement a déposé un amendement pour renouveler cette dotation en 2026.
Quelles conclusions tirer sur le niveau des crédits de la mission ? La commission a voté les crédits de la mission, acceptant la baisse proposée comme un moindre mal, une mesure dont l'impact sera amorti par le cycle électoral. À titre personnel, toutefois, comme l'ensemble de mon groupe, je ne puis que déplorer le sort général réservé aux collectivités territoriales par ce projet de loi de finances.
J'en viens, enfin, aux comptes de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », qui voient juste transiter le produit des impositions locales versées mensuellement.
Comme pour les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les crédits de ce concours financier ont été votés par la commission. À titre personnel, je maintiendrai mon opposition à leur sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je poursuis, après ma collègue Isabelle Briquet, la présentation de cette mission, qui est celle de notre bien commun, garantissant nos services publics de proximité et nos investissements d'avenir. C'est pourquoi, malgré le contexte que nous connaissons, nous avons cherché à garantir la capacité d'agir de nos collectivités.
Nous avons déjà présenté les articles 73 et 74, qui concernaient la réforme de la DSEC et la création du FIT. Il me reste à vous parler des articles 72 à 77.
L'article 72 porte diverses mesures en lien avec la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) en 2026. En premier lieu, il vise à prévoir une hausse de 290 millions d'euros des composantes péréquatrices de la DGF, dont 150 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité rurale (DSR) et 140 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité urbaine (DSU).
Si le maintien du montant global de la DGF, proposé à l'article 31 du présent projet de loi de finances, implique que cette hausse soit intégralement financée par les collectivités territoriales, nous n'avons pas souhaité revenir sur cette progression. Nous souhaitons en effet encourager la trajectoire d'augmentation de la péréquation et, singulièrement, l'effort particulier en faveur des communes rurales dont témoigne la progression de la DSR.
Nous appelons également de nos vœux une réforme de plus grande ampleur des modalités de répartition de la DGF, à laquelle nous travaillons dans notre rapport de contrôle budgétaire et qui doit nous aider à préparer une réforme structurelle indispensable.
De nombreux amendements ont été déposés sur cet article et sur la DGF en général. Ils ont reçu, pour la plupart, un avis défavorable en raison des effets redistributifs importants qui peuvent exister entre collectivités.
Nous émettrons toutefois un avis favorable sur l'amendement du Gouvernement qui tend à revenir sur la création de la DGF des régions, que nous avons votée, ainsi que sur les amendements qui visent à assurer la neutralisation financière de la réforme de l'effort fiscal à hauteur de 60 % en 2026, afin d'atténuer le choc que représenterait le retour à la trajectoire initialement prévue pour l'application de cette réforme.
J'en viens à l'article 77, qui tend à prévoir le versement en 2026 des sommes affectées au fonds de sauvegarde des départements, y compris l'abondement de l'État prévu par l'article 33 du présent projet de loi de finances.
En première partie, nous avons fait passer cet abondement de 300 millions à 600 millions d'euros, ce dont je me félicite. L'article 77 restreint toutefois le bénéfice de ce fonds aux départements dont l'indice de fragilité sociale est supérieur à 95 % de la moyenne, alors que ce seuil était fixé à 80 % de la moyenne en 2024.
Seule une trentaine de départements pourraient ainsi en bénéficier, alors qu'une soixantaine d'entre eux en auraient besoin.
C'est pourquoi nous avons proposé, au niveau de la commission des finances, un élargissement qui nous conduira, bien sûr, à émettre un avis favorable sur les amendements identiques nos II-25 rectifié, II-176 rectifié ter, II-1052 rectifié, II-1560 et II-1853 rectifié bis.
J'en viens enfin au dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), qui fait l'objet des articles 75 et 76.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2025, le Sénat a adopté, sur l'initiative de notre commission, ce dispositif de lissage conjoncturel. Il s'agissait de traduire l'engagement de la Haute Assemblée en faveur d'une contribution des collectivités au redressement des comptes publics, tout en marquant notre rejet du fonds de réserve que proposait alors le Gouvernement, qui était brutal et inabouti.
Comme vous le savez, le Dilico fonctionne en prélevant des contributions une année, puis en les reversant par tiers les trois années suivantes, ce qui a produit des effets sur l'évolution des dépenses des collectivités en 2025 – nous l'avons vu lors de l'examen du projet de loi de fin de gestion. Une incertitude demeurait jusqu'ici sur l'effectivité de ces reversements.
L'article 75 vise à assurer le reversement des sommes prélevées au titre du Dilico en 2025. C'est pourquoi nous nous opposerons, bien sûr, à tous les amendements qui tendent à supprimer cet article. Le Dilico adopté en 2025 a conduit au prélèvement d'un montant total de 1 milliard d'euros, qui sera rendu aux collectivités. Il est essentiel de tenir cette parole.
L'article 76, lui, vise à créer un Dilico 2 pour un montant total de 2 milliards d'euros, répartis à hauteur de 700 millions d'euros pour les communes, de 500 millions pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), de 280 millions d'euros pour les départements et de 500 millions pour les régions. Il tend également à modifier les modalités de reversement par rapport au Dilico initial.
Il est en particulier prévu de distinguer plusieurs scénarios de reversement en fonction de l'évolution des dépenses des collectivités, scénarios qui pourraient, dans de très nombreux cas, se traduire par le non-reversement des sommes prélevées au titre du Dilico 2. Le mécanisme d'épargne forcée qui était au cœur de l'acceptabilité du Dilico proposé par le Sénat serait ainsi dévoyé.
De nombreux amendements ont été déposés pour supprimer le Dilico 2 proposé par le Gouvernement. Non seulement je comprends leur motivation, mais je la partage.
C'est pourquoi je proposerai de remplacer le Dilico 2, bien mal nommé, par le Dilico que nous avons adopté l'année dernière, en ramenant la contribution pour 2026 à 890 millions d'euros, en limitant l'effort des départements et en exonérant les communes de tout prélèvement pour l'année prochaine, tout en maintenant une contribution différenciée des trois blocs.
J'appellerai donc au retrait des amendements de suppression au profit de celui de la commission, dont les dispositions constituent un compromis acceptable et permettront d'atteindre l'objectif d'effort de 2 milliards d'euros fixé par le président Larcher ; celui-ci, pour ne pas être trop confiscatoire, est centré sur l'épargne forcée et la trésorerie.
Si nous montrons un front uni, mes chers collègues, ni le Gouvernement ni l'Assemblée nationale ne pourront revenir sur le compromis que nous aurons trouvé ici. Je me permets d'y insister, pour que nous ayons des votes responsables, se traduisant par des décisions effectives.
En conclusion, la commission vous invite à adopter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales », ainsi que les articles 72, 73, 75, 76 et 77 modifiés par les amendements que nous vous soumettrons.
Nous vous proposons, en revanche, comme l'a rappelé ma collègue, de supprimer l'article 74, qui fusionne les dotations d'investissement aux collectivités territoriales, pour sauvegarder la DETR à laquelle nous sommes tous attachés. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Isabelle Florennes et M. Marc Laménie applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette année encore, l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s'inscrit dans le contexte difficile que chacun connaît.
Alors que les collectivités sont appelées à contribuer à l'effort collectif de redressement de nos comptes publics, la position de la commission des lois demeure stable et constante : cette contribution doit être juste, proportionnée et équitablement répartie entre les différentes strates de collectivités locales.
À cet égard, nous ne pouvons que saluer les évolutions obtenues ces derniers jours sur un certain nombre de dispositifs. Je songe, en particulier, au financement d'une partie des conséquences de la loi portant création d'un statut de l'élu local, récemment votée par le Parlement.
Dans ce contexte, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » demeurent globalement stables, en dépit d'une réduction du soutien à l'investissement local à hauteur de 200 millions d'euros, justifiée selon le Gouvernement par le cycle électoral de l'année 2026. Cette baisse paraît conjoncturelle. Nous veillerons à ce que ces crédits soient rétablis dans les prochaines lois de finances.
La commission des lois s'est en revanche fermement opposée au regroupement des différentes dotations de soutien à l'investissement du bloc communal – DETR, DSIL et DPV –au sein du nouveau fonds d'investissement pour les territoires. En effet, cette réforme nous semble prématurée. Elle risquerait, en l'état, de pénaliser les territoires ruraux. Je vous présenterai donc un amendement de suppression de l'article 74, conformément à ce qui a été annoncé par nos collègues de la commission des finances.
Nous avons par ailleurs des raisons de nous réjouir. Comme nous l'appelions de nos vœux, l'enveloppe consacrée à la DSEC progresse de 40 millions d'euros, ce qui constitue un signal positif pour l'accompagnement des collectivités territoriales confrontées à une multiplication des risques climatiques. Cette évolution paraît satisfaisante, même si elle peut, à mon sens, être renforcée en cours d'année compte tenu des difficultés auxquelles sont confrontés nos territoires.
Mes chers collègues, je terminerai en évoquant les deux amendements proposés par la commission aux articles 76 et 77. Je précise qu'ils sont issus d'un travail mené en concertation avec la commission des finances.
D'une part, nous proposons de transformer le fameux Delico 2 du Gouvernement en un mécanisme d'épargne collective avec un reversement automatique des sommes prélevées, étalé sur trois ans. Ce prélèvement sera ramené de 2 milliards d'euros à 890 millions d'euros en exonérant les communes, par ailleurs fortement sollicitées dans le cadre de ce projet de loi de finances, ainsi que les départements les plus fragiles.
D'autre part, la commission vous proposera d'adopter un amendement visant à mettre en œuvre l'abondement, à hauteur de 600 millions d'euros, des fonds de sauvegarde des départements, en élargissant ses conditions d'attribution de façon à pouvoir accompagner les soixante départements les plus fragiles.
Je tiens également à indiquer une difficulté dans le calcul du sous-critère « voirie » de la DSR. Il faudra, à un moment ou à un autre, y revenir.
Au bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption des trois amendements que je viens d'évoquer, la commission des lois a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, j'indique, pour la bonne information de tous, que 175 amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à huit heures trente.
Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission sera reportée à la fin des missions de la semaine.
En outre, la conférence des présidents réunie mercredi 3 décembre a décidé que, lorsque le nombre d'amendements déposés ne paraît pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.
S'agissant de la présente mission, le nombre d'amendements à examiner, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui, nous conduit à devoir observer un rythme de 25 amendements par heure, ce qui paraît à ce stade possible.
Compte tenu, de surcroît, de l'importance du sujet abordé, nous pourrions donc fixer les temps de parole à deux minutes, en conservant la possibilité, en cours de discussion, conformément à la décision de la conférence des présidents, de passer les durées d'intervention à une minute, si cela nous permet d'éviter le report.
Dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, lors du 107e congrès des maires, un constat clair et préoccupant s'est imposé : la crise de l'engagement démocratique, l'essoufflement des élus locaux, la lassitude citoyenne et l'affaiblissement des leviers d'action des collectivités.
Une parole lucide s'est exprimée : la France doute, les territoires se sentent dépossédés, la démocratie locale s'abîme sous le poids d'une austérité imposée.
Cette alerte collective a pourtant été immédiatement étouffée dans le débat public par une déclaration du chef d'état-major des armées projetant le pays dans l'hypothèse glaçante d'un conflit majeur à venir.
Dans ce contexte, je refuse de céder à deux dynamiques que je considère comme dangereuses : la militarisation croissante des budgets publics et la recentralisation par les moyens financiers.
Ces deux tendances, bien qu'elles soient distinctes, se renforcent mutuellement et structurent profondément ce projet de loi de finances pour 2026. Elles traduisent une orientation politique où le pouvoir se resserre, où l'État central reprend la main et où les territoires se voient retirer la capacité d'action, les marges de manœuvre et la confiance institutionnelle.
À quelques mois des élections municipales, le Gouvernement aurait dû choisir d'ouvrir l'espace démocratique, de restaurer la confiance, de redonner souffle au pacte républicain. Or, selon notre groupe, c'est l'inverse qui s'opère, avec une nouvelle dégradation d'un pacte déjà fragilisé.
Cette recentralisation n'est pas nouvelle. Depuis 2017, elle se concrétise à travers la nationalisation progressive du financement local. L'affectation d'une part croissante de TVA – désormais 52 milliards d'euros, soit la moitié des transferts financiers de l'État vers les collectivités – découle de la suppression de 35 milliards d'euros d'impôts locaux.
Loin d'accroître l'autonomie des collectivités, cette évolution a renforcé leur dépendance à des ressources volatiles, vulnérables, à des arbitrages nationaux qui s'imposent à elles, mais se font sans elles. Chaque année, les mécanismes d'écrêtement les fragilisent davantage.
Dans ce cadre déjà contraint, le Gouvernement prévoit pour 2026 une reprise massive : 7,5 milliards d'euros prélevés sur les finances locales. La droite sénatoriale prétend assouplir la contrainte, mais en conserve de fait l'architecture. L'austérité n'est pas réduite, elle est simplement déplacée vers les usagers des services publics, vers les territoires les plus fragiles, vers celles et ceux qui incarnent au quotidien la solidarité et la continuité de ce service public.
Les collectivités subissent un véritable « effet sécateur ». En 2024, leurs charges augmentent de 4,1 %, tandis que leurs recettes ne progressent que de 2,8 %. Cette divergence contraint les exécutifs à s'endetter davantage, à puiser dans leur épargne, dont la Cour des comptes constate une baisse de 10 %, ou à reporter, voire à annuler, des projets d'investissement pourtant essentiels.
À cela s'ajoutent le renchérissement du coût des biens et des services du « panier du maire » et, surtout, l'explosion des prix des assurances, qui augmentent de 20,7 % en un an. Cette crise de l'assurabilité frappe d'abord les collectivités les plus exposées, tandis que les modèles actuariels des assurances privées renforcent les inégalités territoriales.
C'est précisément dans ce contexte de tension que le Gouvernement introduit deux réformes accentuant la recentralisation : le FIT et le Dilico 2.
Le FIT, présenté comme une fusion technique, se traduit immédiatement par une amputation de 200 millions d'euros et par un renforcement du pouvoir préfectoral dans la sélection des projets : moins de moyens, davantage de verticalité !
Le Dilico 2, quant à lui, franchit un cap encore plus grave. Alors que le Dilico 1 était déjà jugé injuste, sa nouvelle version triple la contribution des collectivités, portant l'effort à 2 milliards d'euros, dont 720 millions pour les seules communes.
Seuls 80 % des montants pourraient être restitués, et uniquement si les collectivités respectent des trajectoires définies nationalement, loin, donc, des réalités territoriales. Beaucoup ne reverront jamais les sommes prélevées. Les collectivités se transforment en banques pour l'État.
Le dispositif devient ainsi un mécanisme de sanctions conditionnelles rappelant les anciens contrats de Cahors. Le groupe CRCE-K y voit un outil de discipline budgétaire plutôt qu'un instrument d'accompagnement du développement des territoires. Comme nous l'avions fait l'an dernier, nous demandons donc l'abrogation du Dilico 1 et demanderons cette année la suppression du Dilico 2.
En conclusion, je souhaite m'appuyer sur les travaux qui font référence, notamment ceux de la commission Mauroy. Une République qui centralise est une République qui s'épuise. Une République qui décentralise est une République qui respire. Le choix est donc clair : poursuivre la décentralisation ou organiser son recul silencieux.
Notre groupe, pour sa part, s'opposera à ce recentrage qui réduit l'air, l'autonomie et les moyens des collectivités. À l'inverse des rapporteurs de cette mission, nous ne défendons pas l'idée selon laquelle les collectivités doivent contribuer à l'effort de réduction de la dépense publique. Nous affirmons, au contraire, que l'État doit se tenir à leurs côtés.
En conséquence, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Guy Benarroche applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en tant que membres de la chambre des territoires, nous prêtons, comme Mme la ministre, une attention particulière au budget des collectivités territoriales.
Celles-ci sont de plus en plus dépossédées de leurs leviers fiscaux. Leur autonomie fiscale est de plus en plus limitée, et c'est finalement leur libre administration qui est mise à mal. En quinze ans, trois taxes locales ont disparu.
Les gouvernements successifs n'ont de cesse de faire peser sur les collectivités la responsabilité d'une dette qui ne peut pas leur être imputée !
Quand on sait que la dette locale ne représente que 7,9 % de la dette publique, personne ne peut se satisfaire des demandes disproportionnées contenues dans ce budget, qui est à l'image de la copie examinée l'an dernier.
Par ailleurs, j'ai souvent rappelé, au nom de mon groupe, un problème inhérent à cette mission budgétaire : le soutien de l'État aux collectivités n'est pas réduit à la seule mission RCT. Il se traduit également dans d'autres dispositions du projet de loi de finances. Ainsi, les crédits de cette mission représentent seulement 2,5 % du total des transferts financiers aux collectivités. Un budget global dédié aux collectivités territoriales devrait être élaboré, pour la clarté et la sincérité budgétaire.
La création d'une loi de financement des collectivités territoriales faisait ainsi partie des mesures défendues par le candidat écologiste Yannick Jadot lors de l'élection présidentielle. Elle aurait le mérite d'orienter l'approfondissement de la décentralisation vers un triple objectif : plus de démocratie, plus de justice territoriale, plus d'écologie.
Sans visibilité, les capacités d'agir de nos échelons locaux sont réduites.
Ce PLF, techniquement, est susceptible d'entraîner une dégradation de la capacité d'autofinancement et, par conséquent, une chute de l'investissement des collectivités territoriales.
Or les collectivités territoriales représentent deux tiers des investissements civils. Dans le rapport d'information Engager et réussir la transition environnementale de sa collectivité, que nous avait confié Mme la ministre, alors présidente de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, et que j'ai signé avec mes collègues Laurent Burgoa et Pascal Martin, nous montrions que ces investissements rapportaient financièrement à la fois aux collectivités et à l'État.
Selon l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) « au moins 12 milliards d'euros d'investissements climat devraient être réalisés par les collectivités chaque année, soit presque 20 % de leur budget d'investissement. »
Or ce budget ne laisse pas la moindre place à une réponse dans ce domaine, que ce soit au sein de cette mission ou dans d'autres. Ainsi, le fonds vert, rattaché à la mission « Écologie, développement et mobilité durables », a subi 68 % de baisses de crédits en trois ans, ce qui nous empêchera de répondre aux défis climatiques.
Le montant de la dotation de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques augmente, mais en apparence seulement : en effet, cette hausse est liée à l'intégration, dans son périmètre, des collectivités d'outre-mer.
Mon groupe ne cesse de le rappeler : les collectivités territoriales ont besoin de moyens en amont pour mieux répondre aux défis liés au changement climatique. Cela réduirait non seulement les besoins nécessaires à la suite de la survenue d'un événement climatique, mais aussi les aléas. Malheureusement, la prévention n'est une priorité que sur les travées du groupe écologiste – et je le regrette.
Autre élément notable de cette mission, la DGF est en baisse, puisque son niveau reste identique à celui de 2025.
Soulignons également l'absence de compensation durable par l'État de ressources fiscales supprimées et de prévision de financement du statut de l'élu local, adopté définitivement avant-hier par l'Assemblée nationale – je me réjouis de cette avancée et il sera nécessaire d'affecter des ressources à la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux, dite dotation particulière « élu local » (DPEL) : c'est ce que proposeront les rapporteurs.
Je m'arrêterai enfin sur les deux points qui cristallisent notre opposition : il s'agit de la création d'une dotation unique – le fonds investissement pour les territoires – et du Dilico. Ces deux mécanismes sont délétères pour nos collectivités.
Le premier brouille la lecture des besoins auxquels nous voulons répondre. Au mieux, ce dispositif entraînera une concurrence entre les territoires. Par ailleurs, le FIT priverait les collectivités territoriales de 200 millions d'euros. Le FIT, c'est donc moins de moyens, réunis en une seule enveloppe, qui nécessiteront en outre des capacités d'ingénierie dont peu de communes disposent.
Quant au second, nous étions déjà opposés à sa première version, instaurée dans le PLF pour 2025. Pour 2026, le Dilico est modifié : le montant est augmenté et son reversement, conditionné, s'étalera sur une durée plus longue. Pour nous, cette coupe budgétaire est non pas une épargne forcée, mais un dispositif usurier. Nous nous opposerons donc bien entendu au Dilico 2.
Pour conclure, nous regrettons cette année encore l'abandon des collectivités par un État qui rend leur survie de plus en plus aléatoire.
L'État demande aux collectivités de réaliser à sa place un effort qu'il ne fait plus, en leur confiant des moyens toujours plus réduits. Cela ne pourra pas fonctionner, car vous ne permettez pas aux collectivités de jouer leur rôle.
Mme la présidente. Il faut conclure, cher collègue.
M. Guy Benarroche. Vous asséchez les ressources propres des collectivités et supprimez les leviers fiscaux dont elles disposent.
Aussi, nous nous opposerons à ce budget.
Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour examiner le dernier budget des deux quinquennats d'Emmanuel Macron.
Pour nos collectivités comme pour la décentralisation, ces dix ans de macronisme, c'est une décennie perdue. Au-delà des chiffres et des comptes, nous savions le désintérêt profond du pouvoir macroniste à l'égard de nos territoires.
Aucune expérience de terrain, peu d'élus locaux à la tête de l'État : pendant dix ans, les collectivités ont été le parent pauvre de toutes les politiques publiques.
Or notre modèle, qui compte quatre, voire cinq strates, selon les territoires, est aujourd'hui insoutenable.
D'un côté, les technostructures territoriales accumulent financements et personnels et aggravent les déficits.
De l'autre, les collectivités de proximité et du quotidien que sont les communes et les départements ont été profondément dévalorisées, dans leurs compétences comme dans leurs financements.
La strate départementale est d'ailleurs en état de quasi-faillite – mais que fait le Gouvernement ? Un fonds d'urgence et quelques recentralisations de RSA, mais aucune réforme d'ampleur. Pourtant, les scandales s'accumulent : je pense notamment à l'aide sociale à l'enfance (ASE). Et la bien maigre loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi 3DS, seul texte adopté sur la décentralisation depuis 2017, n'a pas démontré le moindre effet : elle n'a pas même été appliquée.
La seule fois où nos collectivités ont été appelées à agir et soutenues pour le faire, ce fut durant le covid-19. Cette crise a révélé quelles strates étaient véritablement efficaces.
Plus d'« intercos » ni de régions, mais des communes et des départements qui organisaient la solidarité et la vaccination.
Plus d'État plus pointilleux, mais un pouvoir aux côtés de nos collectivités, qui leur laissait toute la latitude nécessaire pour agir au bénéfice de nos compatriotes.
Le premier acte du quinquennat a consisté en la suppression de la taxe d'habitation. Cette décision a déstabilisé les recettes de fonctionnement des budgets communaux et a provoqué le récent scandale de l'augmentation de la taxe foncière, dont les communes attendent depuis cinquante ans une véritable mise à jour sur des bases réelles et non artificielles.
Le dernier acte intègre un projet d'unification des différentes dotations d'investissement à destination de nos collectivités. Sur le principe, comment s'y opposer ? Elle devrait être synonyme de lisibilité, de simplicité et de clarté du dispositif. Mais, ultime insulte pour nos collectivités, son montant final est inférieur au total des différents fonds et dotations unifiés ! Après les ressources de fonctionnement, le Gouvernement s'attaque aux recettes d'investissement.
Ce choix est d'autant plus nocif que les collectivités représentent 70 % de l'investissement public. Ainsi, 1 euro investi par nos collectivités, c'est 1 euro de croissance dans nos territoires, 1 euro de salaire, 1 euro de développement.
Nous devons faire des économies sur certaines strates territoriales, en particulier sur les régions et les EPCI ; mais s'attaquer aux investissements des collectivités, c'est poursuivre la spirale de décroissance économique et d'abandon de nos territoires les plus reculés, notamment en milieu rural.
Pour nos communes, ces dix ans ne furent qu'une décennie de mépris. Notre modèle de décentralisation est à l'arrêt et un budget aussi inégal ne réglera pas les difficultés.
Je profite de cette tribune pour appeler nos concitoyens à se saisir du scrutin municipal à venir pour faire passer un vrai message : celui du respect pour nos communes et d'une décentralisation au plus proche des besoins, loin des carcans financiers.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Yves Roux. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, selon la formule de la présidente Carrère, à laquelle tout sénateur de la montagne ne peut qu'être sensible, on sait qu'un randonneur ne s'épuise jamais d'un seul coup. Tant que le sentier est régulier, il avance, il compense, il s'adapte malgré la pente. Mais si le sac s'alourdit et que l'effort n'est plus partagé, il perd ses forces et finit par ralentir, jusqu'à ce que ses jambes lâchent.
De la même manière, nos collectivités sont courageuses et endurantes, mais pas inépuisables. Or ce projet de loi de finances ne semble pas les délester.
Je parle avec l'expérience d'un élu issu d'un département rural, où la commune est souvent le premier lieu de cohésion et d'accès au service public.
Or, cette année encore, c'est un sentiment de lassitude qui domine chez nos élus locaux : celui d'être appelés, une fois de plus, à faire des efforts auxquels l'État ne consent pas pour lui-même.
Une fois encore cette année, il est demandé aux collectivités une contribution évaluée à plusieurs milliards d'euros. Cet effort est disproportionné au regard de la responsabilité réelle des collectivités dans le déficit public, et alors même que leur pouvoir d'investissement est ô combien important pour toute notre économie.
Plutôt que cet écart inacceptable, nos concitoyens attendent de l'État qu'il montre l'exemple avant d'exiger un effort supplémentaire des collectivités, qui, pour beaucoup, ont déjà rationalisé leur fonctionnement.
Plus encore, dans ce contexte très contraint, ce projet de loi de finances instaure une réforme d'ampleur avec la création du fonds d'investissement pour les territoires. L'intention affichée est celle de la simplification et de la rationalisation. Mais, au-delà des mots, la fusion de la DETR, de la DSIL et de la DPV s'accompagne d'une baisse de crédits et d'un élargissement du périmètre des communes éligibles, ce qui a pour effet mécanique de diluer l'effort historiquement dédié aux territoires ruraux.
Dans nos communes rurales, la DETR représente non seulement un outil de soutien à l'investissement, mais aussi bien souvent le principal levier pour engager la rénovation d'une école, la modernisation d'un équipement sportif ou l'amélioration d'un réseau d'eau potable. Aussi, sa dilution dans un dispositif nouveau, sans garanties robustes sur son niveau ni sur son ciblage, soulève des inquiétudes. Et même si l'on nous promet la même compensation, à l'euro près – comme l'État s'y était engagé au moment de la suppression de la taxe d'habitation –, ces inquiétudes sont légitimes.
Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements, mais le groupe RDSE défendra la suppression de ce nouveau fond.
J'en viens maintenant au Dilico 2, qui constitue un autre point de préoccupation majeure. Le dispositif initialement proposé s'apparente davantage à un outil de contrainte qu'à un véritable filet de sécurité. Il élargit le nombre de collectivités mises à contribution, double le montant en jeu et conditionne le reversement à des critères que les élus locaux ne maîtrisent pas. Une telle architecture ne peut que fragiliser la liberté d'action des collectivités et éroder encore davantage le lien de confiance avec l'État.
L'approche plus mesurée proposée par la commission va dans le bon sens. Elle rétablit une logique conjoncturelle et non punitive, sécurise les reversements et limite la portée du dispositif. Le RDSE est ouvert à ce travail de rééquilibrage.
Ces deux exemples soulèvent en réalité une question politique beaucoup plus large : celle du modèle de décentralisation que nous voulons pour notre pays. Le gel de la DGF, l'encadrement toujours plus serré des dépenses locales, les transferts de charges insuffisamment compensés et, désormais, la remise en cause des instruments d'investissement du bloc communal témoignent d'une tendance persistante à restreindre les marges de manœuvre des élus locaux.
Dans nos territoires ruraux, où les effectifs sont comptés, où l'ingénierie est rare et où les délais de réalisation sont plus longs, cette recentralisation silencieuse est particulièrement dommageable.
Pourtant, ce sont les collectivités qui réalisent près des deux tiers de l'investissement public dans notre pays. Ce sont elles qui mettent en œuvre la transition écologique, soutiennent la revitalisation commerciale, entretiennent les voiries et assurent le quotidien de nos concitoyens, du plus jeune jusqu'au grand âge. En les fragilisant, c'est toute la dynamique locale qui s'affaiblit, au risque d'accentuer les fractures territoriales et sociales.
Pour conclure, nous venons tout juste d'adopter une proposition de loi importante sur le statut de l'élu local, par laquelle nous reconnaissons l'exigence, la charge et, parfois, la solitude de celles et ceux qui font vivre nos communes. Nous avons affirmé, ensemble, que l'échelon local mérite soutien, respect et considération. Mais dans le même mouvement, le budget qui nous est présenté fragilise ces mêmes élus, en réduisant leurs marges de manœuvre, en alourdissant leurs charges et en comprimant leurs capacités d'action.
Mes chers collègues, le groupe RDSE est naturellement favorable à la maîtrise de la dépense publique. Nous entendons la nécessité d'un effort partagé, mais celui-ci doit être proportionné. Notre position dépendra du sort réservé aux amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Sophie Patru. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Agnès Canayer applaudit également.)
Mme Anne-Sophie Patru. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2026 s'inscrit dans un contexte budgétaire exigeant, où l'impératif de redressement des comptes publics appelle à la responsabilité collective.
À cet égard, le groupe Union Centriste salue l'effort du Gouvernement pour maîtriser la dépense publique. Je rappelle cependant que les collectivités territoriales, qui ne représentent que 7,9 % de la dette publique, doivent être associées à ces économies de manière équilibrée et juste, comme l'a rappelé le président du Sénat au congrès des maires.
Nos communes, nos intercommunalités, nos départements et nos régions jouent un rôle essentiel : ils assurent 58 % de l'investissement public et sont le premier maillon de la cohésion territoriale et de l'action publique.
Je salue, à ce titre, le travail exigeant et équilibré de nos rapporteurs Stéphane Sautarel, Isabelle Briquet et Jean-Michel Arnaud, dont les propositions complètent la copie initiale du Gouvernement en apportant davantage de lisibilité et de justice territoriale.
Concernant les crédits de la mission et les principales mesures qu'elle contient, la création du désormais bien connu fonds d'investissement pour les territoires, qui regrouperait la DETR, la DSIL et la DPV, représentera une avancée à condition d'améliorer la lisibilité ainsi que l'efficacité de la gestion des dotations. Cependant, il est crucial que cette réforme ne pénalise pas les communes rurales, qui ont besoin de stabilité pour préparer leurs projets d'avenir. Aussi, la commission des lois a jugé cette réforme peut-être un peu prématurée : sans doute devrions-nous remettre l'ouvrage sur le métier.
Le Dilico, qui désigne le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales, est désormais un acronyme bien connu des élus. Après sa création l'an dernier, ici même, en lieu et place du fonds de réserve un peu trop brutal initialement proposé, ne perdons pas de vue que son application doit rester proportionnée et transparente. L'article 75 prévoit, conformément à la parole du Gouvernement, le reversement du tiers de la contribution de l'année 2025 : nous le saluons.
La position de la commission des finances sur le Dilico nous paraît proportionnée et juste : ses modifications portent à 2 milliards d'euros les économies réalisées grâce à ce dispositif, ainsi que s'y était engagé le président du Sénat. La commission a ainsi exonéré intégralement les communes de Dilico pour 2026 et a divisé par deux l'effort des EPCI et des départements. Cette position est soutenue par le groupe Union Centriste, car elle concilie rigueur budgétaire et confiance dans les territoires.
La situation des départements est particulièrement préoccupante. Alors que les dépenses sociales progressent et que leurs recettes diminuent, une soixantaine d'entre eux pourraient se trouver en difficulté en 2026.
L'abondement du fonds de sauvegarde à hauteur de 300 millions d'euros, tel que le prévoit l'article 77, est bienvenu. Cependant, la commission et l'Assemblée des départements de France (ADF) suggèrent de renforcer ce fonds de 600 millions d'euros supplémentaires : cette mesure est attendue, alors que les politiques sociales assurées par le département sont cruciales, dans la période actuelle, pour garantir la continuité de services publics essentiels pour nos concitoyens. La définition de leurs critères d'éligibilité sera là aussi essentielle au bon fonctionnement de ce fonds.
Par ailleurs, le texte annoncé par le Gouvernement sur la décentralisation doit être aussi l'occasion de réfléchir à l'autonomie financière des départements, aujourd'hui très restreinte.
Enfin, nous saluons les avancées du projet de loi de finances en matière de péréquation : je pense notamment à l'augmentation de la dotation de solidarité rurale et de la dotation de solidarité urbaine, ainsi qu'au maintien de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales (DSCAR). Ces mesures vont dans le sens d'une plus grande équité entre les territoires.
Pour conclure, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » représente toujours un symbole fort pour le Sénat, d'autant plus dans le contexte actuel.
Le groupe Union Centriste sera particulièrement vigilant au respect d'un seul objectif. Madame la ministre, je ne doute pas que vous le connaissiez et que vous le partagiez : il s'agit du maintien de la capacité d'investissement des collectivités, qui est un levier essentiel pour la croissance et l'emploi local.
Tel sera le sens de nos votes sur cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l'aune de l'annonce par le Premier ministre d'un nouvel acte de décentralisation, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et ceux du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » sont examinés avec une attention toute particulière. Les enjeux auxquels ils touchent sont en effet au cœur du travail quotidien de nos élus locaux.
Aux termes du projet de loi de finances, les transferts de l'État aux collectivités territoriales représenteraient 108 milliards d'euros en crédits de paiement pour l'année 2026. Ce montant avoisine 155 milliards d'euros si l'on y intègre les fractions compensatrices de TVA accordées en contrepartie des réformes fiscales.
La dilution de la DETR comme la reconduction du Dilico sont autant de sujets cruciaux pour nos territoires, et leurs implications sont très concrètes.
C'est donc avec une attention toute particulière que nous examinons, chaque année, ces dispositifs aux conséquences majeures.
Leurs effets se feront sentir dans nos territoires d'outre-mer, tout d'abord, puisque le projet de loi de finances prévoit de les faire bénéficier de la DSEC, dont les moyens augmenteraient. Pour rappel, ce dispositif permet de protéger les collectivités locales des risques climatiques et géologiques.
L'extension de la DSEC aux territoires ultramarins répond aux limites du fonds de secours pour les outre-mer, qui souffrait d'insuffisances, eu égard à ses modalités d'indemnisation et à ses délais d'intervention.
Il est inacceptable que nos compatriotes ultramarins ne bénéficient pas des mêmes protections que leurs concitoyens de l'Hexagone. C'est pour cette raison que le groupe Les Indépendants accueille favorablement une telle évolution.
Ensuite, cette année, les finances des collectivités locales feraient l'objet d'une véritable révolution. En effet, l'article 74 du projet de loi de finances crée un fonds d'investissement pour les territoires. Celui-ci est issu de la fusion de trois dotations d'investissement qui rythment le quotidien de nos élus locaux : il s'agit de la dotation de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements, de la dotation politique à la ville et de la dotation d'équipement des territoires ruraux.
L'intégration de la DETR au sein du FIT suscite d'ailleurs d'importantes questions, voire de douloureuses incompréhensions. Et pour cause ! Au fil des années, cette dotation a largement fait ses preuves. Or sa dilution au sein du fonds d'investissement pour les territoires se fera au détriment des collectivités rurales.
C'est pour cette raison que nous soutenons l'amendement des rapporteurs spéciaux visant à supprimer l'article 74. La création d'un fonds unique est une perspective louable à terme. Mais, en l'état actuel, ses contours et ses implications nous semblent comporter trop d'incertitudes, alors que nos élus locaux ont besoin de clarté et de confiance. En outre, si nous sommes pleinement favorables à une réduction des dépenses, nous ne soutenons pas les hausses de contributions lorsque leurs retombées nous paraissent inefficaces.
C'est pourtant bien le cas du Dilico 2 dans la version initiale du projet de loi de finances. Le montant prélevé passe de 1 milliard en 2025 à 2 milliards d'euros en 2026. En outre, la charge pèse essentiellement sur les communes – à hauteur de 720 millions d'euros –, alors que la contribution du bloc communal prévue dans le Dilico 1 s'élevait à 500 millions d'euros, répartis à parts égales entre les communes et les EPCI.
Par ailleurs, le Gouvernement prévoit d'importantes modifications sur les modalités de reversement du Dilico, qui tranchent avec l'esprit initial du dispositif, pourtant instauré par le Sénat. Ainsi, seulement 80 % des sommes prélevées au titre du Dilico 2 reviendraient aux collectivités contributrices, contre 90 % dans la première version.
De plus, le reversement s'étalerait sur une période de cinq ans au lieu de trois, et le risque de non-reversement apparaît substantiel, tant les conditions pour en bénéficier sont désormais restreintes.
Le groupe Les Indépendants partage l'analyse des rapporteurs spéciaux et pour avis sur ce sujet.
Pour ma part, je soutiendrai l'amendement présenté par M. Sautarel sur le Dilico 2. Il vise à abaisser le montant des contributions de 2 milliards à 890 millions d'euros et à préciser que les reversements se feront sur trois ans. En outre, il tend à revenir sur la répartition du montant total entre les collectivités : les communes seraient exonérées, tandis que la charge imputée aux intercommunalités et aux départements serait divisée par deux.
La ligne du groupe Les Indépendants est très claire : la baisse des dépenses est notre priorité. Néanmoins, pour obtenir des résultats satisfaisants, il est essentiel de prendre en compte les réalités du terrain. En effet, pour reprendre les mots du général de Gaulle, « on ne fait pas de politique autrement que sur des réalités ».
Les collectivités locales sont au cœur de notre pacte républicain. Ce sont elles qui font vivre la République sur l'ensemble de notre territoire. Les maires, notamment, sont reconnus pour leur saine gestion des finances. Soyons donc à leurs côtés et surtout, faisons-leur confiance ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Excellent !
Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Agnès Canayer. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'autonomie financière des collectivités territoriales, consacrée par la Constitution, est la pierre angulaire de la décentralisation.
Encore faut-il que celles-ci disposent réellement des moyens d'assumer le principe de libre administration. Les crédits de la mission que nous examinons aujourd'hui irriguent l'action publique locale – celle qui se voit et qui se vit.
Pourtant, la réalité est autre. Notre modèle fiscal local n'a pas cessé d'être grignoté. Aux baisses des dotations s'ajoutent des ponctions nouvelles et des dépenses toujours plus contraintes : c'est l'effet ciseaux.
Si la nécessaire résorption de la dette française impose à tous des efforts, y compris aux collectivités territoriales, nous ne pouvons leur demander plus qu'elles ne peuvent le supporter, au risque de freiner l'investissement local. En effet, les collectivités ne sont pas responsables de la dérive de nos finances publiques. Elles ne contribuent qu'à hauteur de 7 % de la dette, tout en assurant près de 60 % de l'investissement public.
En parallèle, les dépenses des collectivités flambent. C'est particulièrement le cas des départements, qui financent la solidarité nationale, par exemple au travers de la protection de l'enfance. Ainsi, les placements judiciaires d'enfants, la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA), l'accompagnement des enfants placés en situation de handicap et le prix des traitements onéreux s'imposent aux départements sans qu'ils disposent de marges de manœuvre.
En 2026, près d'une soixantaine de départements seront dans une situation critique en 2026, alors qu'ils n'étaient que quatorze en 2024.
Redresser les comptes publics en fragilisant la solidarité nationale, notamment vis-à-vis des enfants, est un mauvais calcul. Seule la prévention nous permettra de faire des économies à long terme et de préparer la société de demain.
Aussi, l'amendement de la commission qui tend à rehausser à hauteur de 600 millions d'euros le fonds de sauvegarde pour les départements est le bienvenu.
Par ailleurs, nous partageons l'objectif de responsabilité du Dilico, initialement instauré par le Sénat. Cependant, de notre point de vue, son calibrage actuel cible trop fortement le bloc communal et les départements, sans aucune garantie de restitution pour les collectivités, contrairement à la promesse de l'État.
Nous soutiendrons donc les amendements de notre rapporteur Stéphane Sautarel visant à recalibrer ce dispositif. En effet, le rôle du bloc communal est essentiel pour mutualiser les compétences, maintenir l'ingénierie locale et accompagner les petites communes.
Fragiliser les intercommunalités revient à ébranler tout le tissu économique local, la solidarité intercommunale et les projets structurants. C'est finalement s'attaquer aux liens de proximité, alors même que les élus locaux construisent les écoles, les maisons de santé ou encore les réseaux d'eau.
Certes, la situation financière du pays exige des efforts et les collectivités territoriales doivent y prendre leur part, alors même qu'un nouveau chantier de décentralisation doit s'ouvrir au printemps prochain.
Toutefois, décentraliser, ce n'est pas déléguer des compétences sans affecter de ressources ; ce n'est pas transférer des charges sans octroyer de marge de manœuvre ; ce n'est pas ajouter des normes sans donner davantage de libertés.
Madame la ministre, nous nous félicitons du « méga-décret » de simplification tant attendu, dont vous avez annoncé hier la publication à venir.
Décentraliser, c'est accompagner, faire confiance, clarifier et stabiliser ; c'est donner aux collectivités locales la capacité d'agir et de trouver des solutions.
Madame la ministre, notre responsabilité est double : il nous faut défendre l'équilibre des finances publiques, certes, mais aussi l'action publique locale. Sans collectivités fortes, nous ne saurons renouer la confiance avec nos concitoyens ni soutenir l'engagement des élus locaux.
Notre groupe votera les crédits de cette mission, modifiés et améliorés par les amendements de notre rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La discussion générale sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales » reprendra à l'issue de la séance de questions d'actualité au Gouvernement.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
3
Questions d'actualité au Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.
J'excuse l'absence de M. le Premier ministre, qui est à l'Assemblée nationale pour la déclaration du Gouvernement sur la stratégie de défense nationale.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, mais aussi les membres du Gouvernement, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu'il s'agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.
120 ans de la loi de 1905
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mmes Guylène Pantel et Dominique Vérien, MM. Michel Masset et Louis Vogel applaudissent également.)
M. Thani Mohamed Soilihi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, hier, nous avons commémoré les 120 ans de la loi de séparation des Églises et de l'État, texte fondateur du principe de laïcité à la française. Pilier de notre République, la laïcité garantit à chacun la liberté de conscience, le libre exercice des cultes dans le respect de l'ordre public ainsi que la neutralité de l'État.
Ce principe est aujourd'hui fragilisé non seulement par des obscurantismes violents, bien sûr, mais aussi par des instrumentalisations politiques, qui détournent la laïcité de sa vocation universaliste pour en faire un outil de stigmatisation.
Dans ce contexte, l'école publique, à laquelle nous ne pouvons penser sans rendre hommage à Samuel Paty et Dominique Bernard, victimes de l'obscurantisme, ainsi qu'à tous les enseignants, qui réalisent un travail inestimable, reste le premier rempart contre les replis identitaires.
Face aux tensions autour des signes religieux, du rôle de l'école, de l'expression des croyances dans l'espace public ou des pressions que subissent les agents de l'État, comment le Gouvernement entend-il renforcer une pédagogie républicaine de la laïcité, fidèle à l'esprit de 1905, protéger les enseignants et les agents publics, et accueillir toutes les initiatives qui chercheraient à clarifier et à consolider ce principe fondamental ?
La laïcité ne constitue pas un héritage figé ; c'est un équilibre vivant, mais, nous le voyons tous les jours, fragile. En somme, monsieur le ministre, comment comptez-vous le préserver tout en répondant aux défis d'une société plurielle ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE. – MM. Jean-Luc Brault et Louis Vogel ainsi que Mme Marie-Claire Carrère-Gée applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous avez évidemment raison de souligner l'importance du principe de laïcité dans notre République. Issue de la loi de 1905, dite de séparation des Églises et de l'État, la laïcité garantit la liberté de conscience, la liberté de culte et le libre exercice de celui-ci en toute sécurité.
Vous avez raison aussi de souligner que, malheureusement, même s'il s'agit d'un principe intangible de notre République, celui-ci est souvent attaqué. Il est régulièrement instrumentalisé, vous l'avez dit, et présenté comme un outil dirigé contre une religion. Il est parfois relativisé. D'aucuns souhaiteraient obtenir quelques accommodements dans le cadre du service public pour rendre son organisation compatible avec l'exercice des cultes. Ce n'est pas possible, car un principe sous-tend la laïcité : la neutralité.
Que faisons-nous pour protéger la laïcité ? Telle est bien la question qui se pose.
Monsieur le sénateur, nous protégeons ce principe par des mesures législatives.
C'est ce qui a été fait en 2004, avec la loi encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics.
C'est aussi ce qui a été fait en 2021, avec la loi confortant le respect des principes de la République. Ce texte a notamment créé le « déféré laïcité », lequel permet aux préfets de contester un acte d'une collectivité locale. Il a en outre instauré le délit « de séparatisme », en vue de poursuivre les personnes faisant pression sur des agents du service public pour obtenir un accommodement ou un aménagement du principe de laïcité. Dans ce cadre, nous avons établi 820 constats de délit depuis 2021.
Vous avez raison, il faut sans doute faire encore plus. C'est pourquoi, hier, répondant à une question du député socialiste Jérôme Guedj, j'ai annoncé à l'Assemblée nationale la réunion, au cours de l'année 2026, du comité interministériel de la laïcité et la désignation d'une mission parlementaire pour aborder cette thématique dans sa globalité.
Soyez certain, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est profondément attaché à la défense de la laïcité, et tout particulièrement le ministre de l'intérieur, qui est le garant de la correcte application de la loi de 1905. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe RDSE.)
situation de l'électricité en france
M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Vincent Louault. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'énergie.
Hier, monsieur le ministre, Réseau de transport d'électricité (RTE) présentait son rapport prévisionnel 2025-2035, révélant au passage une trajectoire de consommation qui stagne.
Aujourd'hui, ma question est simple. Le nucléaire est l'un de nos fleurons industriels français. Pouvez-vous nous expliquer en quoi votre trajectoire, notamment la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), ne va pas asphyxier toute la filière ?
Demain, j'attendrai avec impatience le rapport des conclusions d'EDF sur la modulation du nucléaire. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – MM. Aymeric Durox et Fabien Gay applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur Louault, RTE a en effet publié une actualisation de ses prévisions de demande pour les années à venir. Celles-ci montrent ainsi que, à ce stade, l'électrification est en retrait par rapport à nos espérances et à nos attentes. Ce mouvement se généralise d'ailleurs à l'échelle mondiale. Si la tendance à l'électrification existe, elle reste insuffisante pour aller vers la décarbonation.
Au demeurant, réjouissons-nous collectivement que l'électricité produite en France soit aujourd'hui assez largement disponible, car c'est ce qui nous permet d'avoir une des électricités les moins chères d'Europe. Les ménages comme les industries paient 40 % de moins qu'en Allemagne. S'il convient de soutenir ces dynamiques, sachons nous en féliciter.
Vous me demandez si nous souhaitons asphyxier quelque filière que ce soit. Bien au contraire, nous entendons donner de l'air, de la perspective et une vision à toutes les filières qui permettront de développer l'industrie et l'énergie en France, pour offrir une énergie décarbonée, abondante et bon marché.
Pour ce faire, nous continuons de marcher sur nos deux jambes.
La première, c'est le nucléaire. Depuis le discours qu'a tenu à Belfort le Président de la République, nous entendons engager la filière dans des investissements d'importance, avec le lancement, pour commencer, de six réacteurs pressurisés européens de deuxième génération (EPR2), à Penly, au Bugey et à Gravelines, suivis sans doute, dans la foulée, de huit réacteurs supplémentaires. Cela soulève des enjeux de financement – précisons qu'au moins la moitié sera financée par un grand prêt public – et de recrutement.
La seconde, ce sont les énergies renouvelables (EnR). Nous en avons besoin, tant il est vrai qu'elles se révèlent plus flexibles et disponibles à court terme, bien que posant des défis d'équilibre du réseau qu'il nous faut intégrer.
En somme, nous avons une vision stratégique globale, que nous aurons l'occasion de présenter, le Premier ministre m'ayant chargé de lui faire des propositions sur la programmation pluriannuelle de l'énergie.
Mme Sophie Primas. Il y a un texte !
M. Roland Lescure, ministre. Il l'a annoncé, les décisions seront prises avant Noël ; vous aurez donc de nos nouvelles très prochainement. (M. François Patriat et Mme Patricia Schillinger applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour la réplique.
M. Vincent Louault. Monsieur le ministre, je vous remercie de vos réponses et de l'attention que vous me portez au quotidien, vous et votre cabinet.
Pour la bonne compréhension de tous, je précise que, lorsque l'Allemagne investit et produit davantage d'EnR, elle consomme moins de charbon et moins de gaz : non seulement la méthode fonctionne, mais c'est utile. Si la France s'entête à faire comme l'Allemagne, ce n'est pas une centrale à charbon que l'on fermera, mais c'est bien une centrale nucléaire : non seulement la méthode ne fonctionne pas du tout, mais c'est parfaitement inutile.
Je vous demande, non pas, bien sûr, de réviser l'ambition finale de décarbonation, vous l'avez très bien expliqué, mais de bien mesurer la dose et la rapidité auxquelles il convient d'augmenter nos capacités de production intermittente.
Si vous ne le faites pas, cela aura deux conséquences.
La première conséquence est l'explosion des coûts de réseau et, partant, des factures d'électricité des Français et de leurs impôts. En effet, les contributions aux charges de service public de l'électricité, évoquées lors de l'examen du budget et qui s'élèvent à 13 milliards d'euros, continueront d'augmenter. À titre de comparaison, mes chers collègues, 13 milliards d'euros, c'est deux fois la politique agricole commune ; les agriculteurs apprécieront… C'est aussi l'équivalent d'un porte-avions, qui coûte 10 milliards d'euros, tous les ans.
M. Guy Benarroche. Ou d'un EPR 2 !
M. Vincent Louault. La seconde conséquence, et c'est là que je crains l'asphyxie de la filière, tient au fait que l'ajout continu d'intermittence, qui, finalement, ne servira à rien, provoquera la nécessaire modulation de notre parc nucléaire. Cette modulation, qui s'établissait autour de 15 térawattheures depuis vingt ans, atteint déjà 30 térawattheures aujourd'hui. Imaginez si vous ajoutez 30, 40 ou 50 térawattheures d'intermittence : il faudra purement et simplement arrêter les centrales une partie de l'année. Nous finirons par asphyxier EDF, qui, au passage, ne pourra plus financer ses investissements.
Ma crainte aujourd'hui…
M. le président. Il faut conclure !
M. Vincent Louault. … n'est pas l'asphyxie de toute la filière du nucléaire ; c'est sa destruction programmée. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Aymeric Durox applaudit également.)
120e anniversaire de la loi sur la laïcité
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Nathalie Delattre. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
En tant que présidente du Parti radical et sénatrice du groupe RDSE, je ne pouvais laisser passer cette date du 10 décembre sans évoquer celle d'hier, qui a marqué le 120e anniversaire de la loi du 9 décembre 1905, qui a fait entrer la laïcité en droit et en République.
Cet hymne à la liberté repose sur deux piliers : la séparation des Églises et de l'État, et la liberté de conscience. Comme le disait le radical Buisson, « la laïcité n'est pas une opinion, mais la liberté d'en avoir une ». Ces propos furent complétés par Jaurès, ainsi que vous l'avez rappelé, monsieur le président, lors du colloque organisé hier soir au Sénat ; Jaurès déclarait : « La loi protège la foi aussi longtemps que la foi ne veut pas faire la loi. »
Pourtant, la laïcité court aujourd'hui un grand danger. Elle est menacée dans les lieux de vie les plus sensibles de notre quotidien – l'école, les associations, notamment sportives, l'entreprise ou l'hôpital – par la montée des identitarismes, par les tensions entre liberté individuelle et revendications communautaires, ainsi que par la visibilité des radicalités religieuses.
Ce phénomène survient dans une période de fragilisation du lien civique, en particulier chez les plus jeunes. Pour beaucoup, la loi de 1905 apparaît comme une loi liberticide, par l'effet de méthodes de désinformation tous azimuts.
Quelles actions comptez-vous mener, monsieur le ministre, pour que l'ordre républicain laïque continue de vivre pleinement ?
Pour notre part, nous, radicaux, agissons au quotidien. Moi-même, je déposerai dès que possible ma proposition de loi visant à inscrire le mot « laïcité » sur les frontons de nos mairies.
En attendant, un autre geste symbolique pourrait se concrétiser : la modification du Grand Sceau de la République. Aujourd'hui, il proclame une République démocratique, une et indivisible. Il est cependant incomplet, puisque, en 1958, notre Constitution a affirmé clairement : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Le Grand Sceau accuse donc soixante-dix ans de retard.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Nathalie Delattre. Ce 120e anniversaire est le moment idéal pour aligner nos symboles sur nos principes et pour adosser nos principes à une communication moderne,…
M. le président. Concluez !
Mme Nathalie Delattre. … mais surtout massive sur les réseaux sociaux. À l'heure de l'intelligence artificielle, nous pouvons le faire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. François Patriat et Xavier Iacovelli applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, le Parti républicain, radical et radical-socialiste, dit Parti radical, que vous présidez, a, comme bien d'autres, contribué à fonder la laïcité dans notre pays. Dans le prolongement de ma réponse précédente, je veux souligner combien nous avons à l'esprit la nécessité absolue de protéger la laïcité. Des lois ont été adoptées en 2004 et en 2021 ; nous les appliquons et veillons à leur strict respect, notamment en matière de neutralité dans les services publics.
Pour ce faire, nous disposons d'un certain nombre d'outils : le délit de séparatisme, le déféré laïcité, que j'ai mentionnés, ainsi que toutes les actions menées depuis lors dans les services publics pour développer la formation en ce domaine. Tous les agents publics sont désormais formés ; des référents laïcité ont été mis en place pour nous alerter systématiquement et répondre très fermement à toutes les entorses faites à la neutralité des services publics. Il s'agit d'un point extrêmement important, sur lequel nous sommes très vigilants.
Cela n'est sans doute pas suffisant, comme je le disais à l'instant et hier également à l'Assemblée nationale. Le comité interministériel de la laïcité se réunira en 2026 et une mission parlementaire sera mise en place pour expertiser la mise en œuvre du principe de laïcité aujourd'hui en France et pour évaluer la nécessité ou non de faire évoluer des dispositions législatives. Sur ce point, évidemment, nous ne nous interdisons rien.
Vous avez raison de souligner les attaques que subit la laïcité. Il faut savoir nommer les choses : nous faisons face à un islamisme politique qui, souvent, n'hésite pas à revendiquer la supériorité de la loi religieuse sur les lois de la République. Il en découle des demandes d'exemption, voire d'aménagement des règles des services publics. Tout cela n'est pas acceptable. S'il faut passer par des dispositions législatives pour protéger la laïcité, le Gouvernement le fera.
Telles sont les réponses, madame la sénatrice, que je tenais à vous apporter sur ce sujet éminemment important. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE. – M. Stéphane Demilly applaudit également.)
situation à mayotte
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Saïd Omar Oili. Ma question s'adresse à Mme la ministre des outre-mer.
Madame la ministre, un an après le cyclone Chido, qui a dévasté notre archipel, vous allez, dans les prochains jours, vous rendre à Mayotte. Vous y entendrez les élus et la population, de manière unanime, se plaindre des « engagements de papier » du Gouvernement.
Toutefois, je souhaite vous alerter sur le risque naturel qui pèse sur notre territoire ultramarin. À la suite du cyclone Chido, je m'étais exprimé sur les failles constatées dans la gestion de la crise, liées à la gouvernance de celle-ci, à la mise à l'écart des élus et à l'incapacité de déterminer le nombre de victimes.
Le retour d'expérience, dit « retex », constitue une méthode d'évaluation des politiques publiques. Dans la mesure où nos territoires ultramarins seront fortement affectés à l'avenir par des crises majeures, le retex du Gouvernement sur le cyclone Chido est essentiel pour en tirer les enseignements.
Afin de protéger la population contre de tels événements, il importe de sensibiliser les habitants de nos territoires aux risques encourus. J'ai pu constater que, en Guadeloupe, voilà quelques jours, un exercice d'évacuation a été mené après une éruption de la Soufrière. À La Réunion, 450 personnes ont assisté à une rencontre organisée pour préparer la saison cyclonique 2025-2026. Mais rien n'a été prévu à Mayotte : voilà qui est paradoxal, surtout après Chido.
Ma question est simple, madame la ministre : le Gouvernement a-t-il élaboré un retex sur Chido ? Pourquoi la population de Mayotte n'a-t-elle pas fait l'objet d'une sensibilisation à la veille de la saison cyclonique ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mmes Cathy Apourceau-Poly et Solanges Nadille, MM. Guy Benarroche et Marc Laménie applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Omar Oili, le retour d'expérience est une pratique courante et importante dans les outre-mer, puisque, chaque année, en amont du début de la saison cyclonique, nos territoires se préparent à répondre en cas de crise.
Après la survenance de l'une des catastrophes naturelles les plus intenses de son histoire récente, il est fondamental que Mayotte, tout comme nous tous collectivement, tire les leçons de ce qui s'est passé, qu'il s'agisse de la phase de préparation ou de la gestion de crise.
Au niveau national, la direction générale de la sécurité civile et le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale ont réalisé leur retex. Au niveau zonal, le préfet de La Réunion, en sa qualité de préfet de zone, a organisé à la fin du mois de novembre un séminaire, Cyclonex, consacré notamment au retour d'expérience sur Chido.
La préfecture de Mayotte procède quant à elle à un retour d'expérience local, avec l'appui de la mission interministérielle chargée de la reconstruction et de la refondation, qui synthétise actuellement les nombreuses contributions collectées. Ce document, qui se nourrira des travaux conduits aux niveaux national et zonal, sera remis prochainement au préfet de Mayotte.
Au-delà du retex, l'enjeu réside dans l'organisation de la réponse de sécurité civile (Orsec). Sur la base de la synthèse de la mission, la préfecture de Mayotte est en train de finaliser l'adaptation des plans. À l'instar des actions menées dans les autres territoires des outre-mer, je demanderai au préfet d'organiser dans les prochains jours une présentation consacrée au déroulement de la saison cyclonique, en présence notamment des collectivités. Je veillerai à ce qu'un temps de préparation collective soit ainsi organisé chaque année.
Conformément aux dispositions de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, un bilan des plans de secours prévus sera transmis au comité de suivi avant le 1er mars de l'année prochaine. L'enjeu est aujourd'hui de développer une véritable culture du risque associant l'ensemble du territoire ; l'État pourra ainsi apporter son appui aux communes dans l'adaptation de leur plan communal de sauvegarde.
Vous l'avez compris, monsieur le sénateur, nous souhaitons activer tous les leviers pour assurer la sécurité de nos compatriotes. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour la réplique.
M. Saïd Omar Oili. Madame la ministre, le retex sur Chido sera-t-il transmis aux parlementaires ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
projet de loi organisant une consultation des populations intéressées de la nouvelle-calédonie
M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
M. Robert Wienie Xowie. Madame la ministre des outre-mer, ma question porte sur la méthode à marche forcée adoptée par l'État, avec l'organisation d'une consultation anticipée sur le projet d'accord de Bougival et l'examen, au début du mois de janvier au Sénat, d'un projet de loi destiné à la convoquer.
Alors que l'accord de Bougival n'a pas été validé par les bases du FLNKS, que le congrès s'est prononcé le 8 décembre sans majorité – 19 voix pour, 19 abstentions et 14 voix contre – et que votre affirmation selon laquelle cette consultation serait « voulue par les forces politiques locales » est démentie par ce vote, vous choisissez pourtant d'avancer.
Le Parlement avait reporté les provinciales pour « poursuivre la discussion en vue d'un accord consensuel », reconnaissant que Bougival n'était pas finalisé. Vous avez vous-même indiqué qu'il fallait « apporter des éclaircissements, des précisions, des compléments ». Or la mission que vous avez dépêchée sur place n'a rien permis de clarifier ; la consultation porterait toujours sur le texte publié au Journal officiel sans aucun des compléments attendus.
À cette situation s'ajoutent une base juridique contestée, un calendrier inversé par rapport aux précédents accords et l'absence de consensus local, y compris parmi les signataires de Bougival, comme le montrent les abstentions de l'Union nationale pour l'indépendance (UNI), de l'Éveil océanien et de Calédonie ensemble, qui ont affirmé leur opposition à l'organisation de la consultation anticipée.
Madame la ministre, dans ces conditions, face à un projet incomplet, non validé, juridiquement incertain et politiquement clivant, face à l'opposition du FLNKS, le Gouvernement entend-il maintenir, revoir cette consultation anticipée ou y renoncer ? Dans chacun de ces scénarios, sur quelles bases politiques, juridiques et démocratiques justifieriez-vous votre décision, sachant qu'une consultation risquerait d'aggraver la crise et de creuser les divisions ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Xowie, il n'y a pas de méthode à marche forcée, pour reprendre votre expression. Depuis que je suis aux responsabilités, et même avant moi, la méthode est la même : celle du dialogue et du respect. Nous nous efforçons de trouver un chemin commun pour les Calédoniens.
Avoir envisagé la consultation des Calédoniens, c'est la définition même de ce que l'on appelle un exercice démocratique. Donner la parole à ceux qui sont concernés pour qu'ils se prononcent sur un accord n'est pas un passage en force. Recueillir l'avis du congrès de Nouvelle-Calédonie, c'est aussi une démarche démocratique.
Comme vous l'avez rappelé, le congrès s'est donc prononcé le 8 décembre à une majorité de 19 voix pour, 14 contre et 19 abstentions. Le paysage politique est dispersé, je ne dis pas le contraire.
Le Gouvernement analyse actuellement les contributions écrites de chaque formation politique, annexées à l'avis rendu par le congrès. Il poursuit les concertations avec l'ensemble des parties prenantes pour déterminer la suite à donner au processus. Tous ceux que nous avons entendus, notamment au travers de ce vote du congrès, ont exprimé une volonté commune d'avancer et de poursuivre dans cette voie. Vous l'aviez vous-même souligné à l'occasion de la réunion du groupe de contact ; nous partageons cette analyse : un chemin existe.
Je l'ai indiqué, le Gouvernement prendra le temps nécessaire pour analyser la situation et maintenir un cadre d'échanges disponible et respectueux, comme il l'a toujours fait. Cette démarche est conforme à l'esprit du courrier que j'avais moi-même adressé à chacun des membres des formations politiques avant qu'ils ne se prononcent le 8 décembre. Je leur avais notamment précisé que l'État accompagnerait toutes les demandes d'échanges et de travaux formulées et que nous resterions pleinement mobilisés pour poursuivre les voies de discussion avec l'ensemble des acteurs.
Dans le même temps, nous sommes soucieux de donner de la visibilité aux Calédoniens. Vous l'avez constaté, nous avons avancé sur le volet économique et sur la situation de la Nouvelle-Calédonie avec un plan ambitieux. Là aussi, nous sommes à l'écoute de nos partenaires.
C'est donc cette même méthode qui continuera à nous guider dans les prochains jours, monsieur le sénateur, pour dessiner, avec les forces politiques locales, la suite de ce processus.
M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour la réplique.
M. Robert Wienie Xowie. Madame la ministre, vous demandez au peuple de se prononcer sur un texte inachevé, juridiquement contesté et qui ne fait pas consensus localement, alors même que sa voix lui a été retirée du fait du report des provinciales le mois dernier.
Vous nous donnez des leçons de démocratie. Vous annoncez votre volonté de donner la voix aux Calédoniens. Quel comble pour un gouvernement qui se refuse à écouter la parole de son propre peuple ! Cessons d'entretenir le flou démocratique ; organisons les élections provinciales ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie.
La semaine dernière, monsieur le ministre, le Président de la République était en déplacement à Pékin. Un sentiment prévaut : nos relations diplomatico-économiques se tendent très sérieusement.
J'évoquerai un seul exemple, dont on ne mesure pas l'onde de choc qu'il a provoquée : la décision de Pékin d'imposer de nouvelles licences d'exportation pour les terres rares. Cette mesure administrative a affolé de nombreux industriels. La Commission européenne elle-même se trouve saturée d'appels de dirigeants particulièrement paniqués. Cette vulnérabilité n'est pas qu'économique, elle est multisectorielle.
Je citerai quelques cas concrets, monsieur le ministre.
Sans ces métaux stratégiques, pas d'Airbus A350, dont les alliages spéciaux contiennent du scandium. Sans ces métaux, pas d'éolienne offshore à Saint-Nazaire, dont les turbines nécessitent des aimants permanents. Sans ces métaux, pas de batteries pour les usines automobiles de Dunkerque ou de Douvrin. Sans ces métaux, pas de radar ni de système de guidage pour les forces armées. Sans ces métaux, pas de scanner hospitalier ni de réseau de télécommunication avancé. J'arrête là ma litanie, mais ces quelques exemples emblématiques nous montrent bien la gravité du sujet.
La Commission européenne l'a bien compris, un peu tardivement selon moi, et passe enfin à l'offensive, en annonçant la création d'un centre européen des matières premières critiques, prévu, me semble-t-il, pour 2026. Le commissaire européen Stéphane Séjourné a ainsi déclaré : « Le coût de l'indépendance est élevé, mais il est bien plus faible que celui de la dépendance. »
Monsieur le ministre, la France saisira-t-elle pleinement la dynamique européenne pour sortir de cette dépendance et garantir, enfin, sa souveraineté minérale et industrielle ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Vincent Louault et Louis Vogel applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur Demilly, vous l'avez dit, le Président de la République était en Chine la semaine dernière et j'ai eu l'honneur de l'accompagner. Nous avons notamment signifié aux autorités chinoises que le contrôle des exportations ne nous semblait pas constituer une arme adéquate dans le contexte des tensions commerciales actuelles. Si un tel contrôle existe depuis longtemps, il doit rester cantonné aux enjeux de défense, notamment la lutte contre la prolifération nucléaire.
Au regard de ce qui est sur le point de devenir une arme comme une autre, propre à contribuer aux tensions commerciales, notre réponse se décline en trois temps.
D'abord, à court terme, face aux mesures prises par la Chine pour contrôler les exportations, certaines ayant été suspendues pour un an à la suite des discussions avec les États-Unis, tandis que d'autres s'appliquent depuis le mois d'avril, nous devons aider les entreprises à obtenir les licences dont elles ont besoin.
Par conséquent, j'invite celles qui cherchent des licences d'exportation de terres rares à nous contacter. Le service économique sur place leur apporte ce soutien : 300 licences ont d'ores et déjà été obtenues. Nous poursuivrons cet accompagnement.
Ensuite, à moyen terme, il est temps de diversifier nos approvisionnements, faute de quoi cette solution n'est pas viable.
C'est ce que nous faisons avec les Européens, dans le cadre du nouveau plan RESourceEU. C'est ce que nous faisons avec les autres pays du G7 « Énergie », qui s'est réuni, j'étais présent, à Toronto. Nous déployons un plan de collaboration non seulement avec les pays du G7, mais avec des partenaires historiques producteurs de matériaux de base en général et de terres rares en particulier, avec lesquels nous nouons nos partenariats sur le terrain. Des accords ont déjà été signés entre des entreprises canadiennes et des entreprises françaises ; il convient de les multiplier.
Enfin, quel que soit le terme envisagé, il importe d'assurer le bon fonctionnement du marché. En effet, des producteurs chinois, pour ne pas les citer, ont tendance à faire baisser très fortement les prix sur le marché pour évincer les concurrents et les faire disparaître. Il s'agit donc d'un enjeu de contrôle et de régulation du marché ; nous souhaitons le traiter au sein du G7.
Vous l'avez compris, monsieur le sénateur, nous faisons feu de tout bois sur ce dossier compliqué, marqué par des dépendances aujourd'hui bien trop importantes, mais qui représente un enjeu majeur de la révolution technologique à l'œuvre. Nous poursuivons donc nos efforts. (MM. François Patriat, Thani Mohamed Soilihi et Michel Masset applaudissent.)
france 2030 et financement des dépenses d'avenir
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Thomas Dossus. Ma question s'adresse au ministre de l'économie.
Elle portera sur le projet de loi de finances en cours d'examen. Celui-ci tourne le dos à l'avenir. Tout ce qui nous permettrait de faire face aux crises y est sacrifié ou comprimé.
L'écologie, et notamment le fonds vert, est ainsi devenue une variable d'ajustement budgétaire. La France ne respecte plus ses objectifs en matière de climat, d'adaptation ou de protection de la biodiversité.
Dans un monde qui fait face à de nombreuses crises, la solidarité internationale est de nouveau sacrifiée. Il en va de même pour la voix de la France.
Le budget de la recherche n'est pas à la hauteur de la trajectoire prévue dans la loi de programmation : l'écart est d'un demi-milliard d'euros – excusez du peu !
Le budget de l'armée passe devant celui de l'éducation – tout un symbole !
Ces contractions et ces baisses budgétaires résultent, disons-le clairement, de vos choix, monsieur le ministre, mais aussi des votes de la droite et du centre au Sénat, puisque la majorité sénatoriale a choisi d'amplifier la crise des caisses vides, en nous privant de 8 milliards d'euros de recettes supplémentaires. On renonce aux recettes, on coupe dans les dépenses : finalement, la France s'affaiblit et l'inquiétude quant à l'avenir grandit.
Le sort réservé au budget du plan France 2030, un budget consacré à l'innovation, est à la fois le symbole et le symptôme de cette situation.
Ce programme d'investissements d'avenir devait, pour reprendre les mots de Michel Rocard, nous aider à nous extraire de la « tyrannie du court terme », en sanctuarisant 54 milliards d'euros, sur plusieurs années, pour notre avenir industriel et écologique.
Tout n'est pas parfait dans ce programme. On peut parfois regretter son émiettement ou son manque de pilotage. En tant qu'écologiste, je suis moi-même assez dubitatif sur un certain nombre de projets soutenus ; mais France 2030 est vital pour nos filières industrielles, pour la décarbonation, pour la recherche et pour tous les territoires.
Pourtant, certains ici prévoient de mettre un coup d'arrêt brutal, l'année prochaine, à tout nouveau projet dans le cadre de France 2030, comme si nous pouvions mettre en pause la décarbonation de l'industrie, la recherche dans les énergies propres ou la santé…
Je rappelle que vous avez déjà opéré une ponction de 1,6 milliard d'euros sur la trésorerie des opérateurs en fin d'année.
Monsieur le ministre, face à cette approche purement comptable, la recherche et l'innovation ont-elles encore un avenir dans ce pays ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur, comme je le disais tout à l'heure, nous rentrons juste de Chine, où l'innovation et les investissements dans le progrès technologique n'attendent pas, non plus que les investissements dans la décarbonation, même si l'on peut observer certaines contradictions, puisque le pays ouvre à la fois des centrales à charbon et investit, comme jamais auparavant, dans le nucléaire et les énergies renouvelables.
Il me semble donc qu'il est extrêmement important que nous continuions à investir. Mais, nous devons aussi redresser les comptes, car c'est une nécessité absolue : l'enjeu est d'y parvenir, en évitant d'étouffer l'économie.
Dans tous les cas, il convient de continuer à investir dans l'innovation et dans les technologies du futur, de manière que la France conserve l'avance qu'elle a dans un certain nombre de technologies, telles que l'ordinateur quantique, par exemple – la France possède des équipes d'une grande compétence en ce domaine.
Nous devons aussi poursuivre l'effort de décarbonation de notre industrie. Nous avons lancé, dans ce domaine, plusieurs projets concrets : je pense en particulier à la vallée de la batterie autour de Dunkerque, où nous avons pris des engagements pour aider les entreprises qui sont en train d'investir, de créer des emplois, mais aussi des filières d'avenir en France.
Je suis donc convaincu qu'il faut continuer à soutenir ces filières. Or, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, c'est justement l'objet du plan France 2030.
Si les parlementaires ont des interrogations sur la manière dont ce programme est exécuté, rien ne leur interdit d'exercer leurs prérogatives de contrôle. J'y insiste, je suis convaincu que nous devons continuer à investir dans les secteurs d'avenir.
La mission « Investir pour la France de 2030 » a participé à l'effort budgétaire, en reversant au budget général – et non au ministère de l'économie ! – les excédents de trésorerie qui n'étaient pas indispensables.
En revanche, des engagements ont été pris pour 2026, à hauteur de 500 millions d'euros au moins, que nous devons, à mon avis, continuer à honorer, pour soutenir la réalisation de projets très importants comme la construction de la gigafactory du groupe Verkor, ou pour aider la filière automobile, qui fait aujourd'hui face à des défis particuliers.
Le message est clair : il faut continuer à investir. Vous débattrez au Sénat des crédits de cette mission dans quelques jours, en présence de mon collègue Sébastien Martin.
Je vous engage non seulement à faire preuve de rigueur en matière budgétaire, certes, mais aussi à ne pas oublier les investissements d'avenir, et notamment le plan France 2030, qui constitue, selon moi, un beau programme qu'il faut continuer à déployer.
messages hostiles à la police à lyon et à marseille
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François-Noël Buffet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Samedi dernier à Lyon, lors de la fête des Lumières, cette fête traditionnelle qui a lieu autour du 8 décembre, des messages ouvertement hostiles aux forces de l'ordre ont été projetés dans l'espace public, affirmant notamment : « La police blesse et tue. »
Le même jour, à Marseille, lors d'un meeting, M. Sébastien Delogu, député et candidat du parti La France insoumise (LFI) aux prochaines élections municipales, a repris publiquement le slogan « La police tue ».
Ces mises en scène et ces propos sont non seulement scandaleux et répréhensibles, mais ils sont aussi profondément insultants, et surtout irresponsables et dangereux.
Ils mettent littéralement une cible dans le dos des membres de nos forces de l'ordre qui, chaque jour, risquent leur vie pour protéger la nôtre.
Dans ces conditions, l'extrême gauche cherche à attiser les tensions et à déstabiliser le système. Celle-ci n'a, en réalité, qu'une seule ambition : la destruction de notre République.
Mme Marie-Arlette Carlotti. Vous préparez une alliance avec l'extrême droite !
M. François-Noël Buffet. Ces discours de haine n'ont pas leur place dans notre démocratie !
J'ai donc trois questions, monsieur le ministre.
À Lyon, une plainte a été déposée. Pouvez-vous nous confirmer qu'il en sera de même à Marseille, compte tenu des propos qui ont été tenus ?
Ensuite, à Villeurbanne, dans l'agglomération lyonnaise, un rassemblement susceptible de porter le même type de message doit se tenir très prochainement. Est-il encore opportun de le maintenir ? On peut se poser la question.
Enfin, les Soulèvements de la Terre ont revendiqué les actes lyonnais. Quelle action le Gouvernement compte-t-il entreprendre contre ce mouvement, qui a d'ailleurs déjà fait l'objet d'une procédure de dissolution, sans suite malheureusement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Je souscris évidemment, vous l'imaginez bien, monsieur le sénateur, à l'intégralité de vos propos.
Ces messages, tels que « La police tue », sont odieux et ils sont fréquemment repris, comme nous l'avons constaté à la fête des Lumières à Lyon ou dans un meeting à Marseille.
Je tiens tout d'abord à apporter, au nom du Gouvernement et, je n'en doute pas, de l'intégralité des sénateurs, un soutien sans faille à nos forces de sécurité intérieure, qui nous protègent.
Pourquoi ces messages sont-ils terribles ?
D'abord, parce qu'ils font référence à des actions de police, qui sont parfois en cours de jugement ou qui, souvent, ont déjà été jugées, les policiers ayant été mis hors de cause, car ils avaient fait un usage proportionné de la force.
Ceux qui tiennent ces propos s'inscrivent en réalité dans une démarche de négation de la police ; ce sont des partisans du désordre, et il faut les nommer comme tels.
Ensuite, ces messages sont graves parce qu'ils laissent entendre aux jeunes de notre pays que la police leur en veut, les stigmatise et que, si elle les contrôle, par exemple, c'est en raison de leur origine ou de leur quartier. Voilà une insinuation extrêmement grave, qui constitue une atteinte directe à notre cohésion nationale.
Alors, que fait le Gouvernement ? Je vais répondre très clairement à votre question.
Dans les deux cas, que ce soit pour les incidents survenus lors de la fête des Lumières à Lyon ou, évidemment, pour les propos tenus à Marseille dans le cadre d'un meeting, les préfets, à ma demande, ont déposé plainte en application de l'article 40 du code de procédure pénale. La justice sera donc saisie. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Dans le cadre du festival que vous évoquez, monsieur le sénateur, et qui doit se tenir à Villeurbanne, vont se produire des groupes qui tiennent le même genre de propos. Nous le savons, c'est documenté. La préfète du Rhône va donc purement et simplement interdire ces concerts. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Enfin, chaque fois que des propos comme ceux-ci sont tenus – des propos qui incitent à la haine, à la discrimination ou à la violence –, nous documentons les faits et nous préparons des dossiers de dissolution de la structure en cause. Aucune d'entre elles n'est au-dessus des lois. Celles que vous avez citées, monsieur le sénateur, font évidemment l'objet, comme d'autres, d'un examen très attentif par les services du ministère de l'intérieur – vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur le sénateur, compte tenu des fonctions que vous avez occupées. (Applaudissements sur les travées du groups Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et SER. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
situation en nouvelle-calédonie
M. le président. La parole est à M. Georges Naturel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Bitz applaudit également.)
M. Georges Naturel. Madame la ministre des outre-mer, le congrès de la Nouvelle-Calédonie vient de rendre son avis sur le projet de loi organisant une consultation des populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie sur l'accord de Bougival, qui inverse le calendrier initialement prévu.
Cet avis révèle de profondes divisions.
Des non-indépendantistes sont favorables à l'organisation d'une consultation, tout en appelant pour certains l'État à reprendre le dialogue ; ils ont recueilli 19 voix.
D'autres mouvements, indépendantistes et non-indépendantistes, se sont abstenus, ce qui représente également 19 voix. Ils soutiennent l'accord, mais demandent des compléments pour retrouver le consensus perdu.
Enfin, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) a voté contre, par 14 voix, tout en appelant à entreprendre toutes les démarches encore possibles pour rapprocher les positions et rechercher une solution partagée.
Lors des accords précédents, la consultation n'avait jamais eu pour objet de contourner une formation hostile ni de se substituer au consensus : elle visait à consacrer ce dernier démocratiquement. C'est ce chemin qu'il nous faut reprendre.
De plus, cette consultation anticipée ne répond ni à la lettre de l'accord de Bougival ni à l'esprit de la loi du 6 novembre 2025 visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, qui visait à permettre « la poursuite de la discussion en vue d'un accord consensuel ».
Madame la ministre, vous avez écrit aux membres du congrès le jour du vote : « Quelle que soit l'orientation retenue, l'État restera mobilisé pour poursuivre, avec l'ensemble des partenaires, les voies de discussion qui vous paraîtraient devoir être engagées. » Il est urgent de donner corps à cet engagement.
Ma question est donc la suivante : quelle suite entendez-vous donner concrètement à ce projet de loi ? Ne serait-il pas plus opportun que l'État renoue le fil du dialogue et tente de nouveau de faire émerger un consensus, alors que notre pays continue de s'enfoncer dans un chaos économique et social ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Olivier Bitz et Rachid Temal et Mme Corinne Narassiguin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Mme Naïma Moutchou, ministre des outre-mer. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a émis un avis favorable, mais partagé, sur ce projet de loi relatif à l'organisation d'une consultation anticipée.
Dans ce contexte, le Gouvernement souhaite poursuivre les discussions avec les forces politiques locales qui veulent avancer. Ce processus ne sera pas défini de manière unilatérale.
Le dialogue entre les acteurs locaux, nous le savons, est essentiel pour construire l'avenir de la Nouvelle-Calédonie. Il nourrira les travaux du Parlement par la suite – le Sénat y aura évidemment toute sa place, comme cela a toujours été le cas.
J'en profite d'ailleurs pour saluer l'engagement constant de tous ceux qui s'investissent sur ce sujet – je pense notamment à M. le président du Sénat et aux présidents des groupes parlementaires, à travers le groupe de contact.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire, et je veux insister sur ce point, monsieur le sénateur, car je sais qu'il vous préoccupe également, le temps économique ne peut pas être suspendu au temps institutionnel. Il faut que nous puissions avancer sur deux jambes.
La situation exige des réponses immédiates. Je vous rejoins pleinement sur la nécessité d'assurer la stabilité économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie.
Le 4 décembre dernier, le Premier ministre a adressé un courrier à l'ensemble des forces politiques pour détailler les engagements massifs de l'État dans le cadre du pacte de refondation que nous voulons mettre en place pour la Nouvelle-Calédonie.
Pa railleurs, lors de l'examen des crédits de la mission « Outre-mer », auquel vous avez participé, monsieur le sénateur, le Sénat a adopté un certain nombre d'amendements, qui permettront de dessiner l'avenir et les modalités de la reconstruction de ce territoire. Nous avons ainsi évoqué les investissements dans le nickel, le soutien à l'investissement des entreprises, grâce au choc fiscal que nous souhaitons mettre en œuvre, la garantie émeutes et l'insertion des jeunes. J'avais d'ailleurs déjà eu l'occasion de discuter avec vous de ces sujets, monsieur le sénateur.
En conclusion, pour être claire, le Gouvernement sera pleinement au rendez-vous sur le plan économique. Pour le reste, le dialogue se poursuit. La situation est donc évolutive : il n'y a ni enlisement ni instabilité. Évidemment, l'avenir de ce territoire demeure notre priorité commune. Je ne souhaite pas préjuger du résultat des discussions en cours, mais je vous le dis : les échanges se poursuivent avec les forces politiques pour dessiner la suite, et il y en a eu encore aujourd'hui. (M. François Patriat applaudit.)
ligne ferroviaire bordeaux-lyon
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Jacques Lozach. Ma question s'adresse à M. le ministre des transports.
Le 27 novembre dernier, la SNCF annonçait la mise en service d'une ligne de TGV Ouigo entre Bordeaux et Lyon en 2027, dont le parcours contournera totalement le Massif central, puisqu'il passera au nord, par la gare de Massy, dans l'Essonne.
Le message ainsi adressé par l'État aux millions d'habitants d'une quinzaine de départements est proprement désastreux, car il est synonyme d'abandon. Il soulève un tollé général.
Cette décision bafoue le bon sens, accentue la fracture ferroviaire, incite à prendre la voiture et s'inscrit en contradiction avec les impératifs d'un développement durable et d'un aménagement équilibré du territoire.
Il s'agit d'une caricature de recentralisation des mobilités, au moment même où le Premier ministre entend lancer un grand acte de décentralisation.
Il existe pourtant une autre option : la restauration de la liaison transversale, directe et historique entre les deux capitales régionales, qui a été supprimée entre 2012 et 2014, du fait d'un manque d'entretien, parce que le matériel roulant était obsolète et que le temps de parcours était interminable.
Or il nous paraît indispensable de pouvoir relier entre elles des métropoles sans passer systématiquement par Paris. Notre espace central a vocation à contribuer pleinement à la réindustrialisation du pays, à la transition écologique et à l'attractivité de la France.
Monsieur le ministre, allez-vous remettre en cause le funeste projet de la SNCF et lancer rapidement une étude sur la faisabilité d'une liaison Bordeaux-Lyon par le Massif central, avec comme objectif de créer une ligne de trains d'équilibre du territoire (TET), sur le modèle de la transversale Nantes-Lyon ?
Êtes-vous prêt à inscrire dans la prochaine loi-cadre pour les transports un volet consacré à la réhabilitation des transversales ferroviaires ?
Enfin, entendez-vous réunir rapidement l'ensemble des élus locaux et des parlementaires concernés, afin de bâtir une feuille de route commune pour rétablir une véritable continuité ferroviaire entre l'est et l'ouest dans notre pays ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – MM. Pierre Barros, Éric Gold et Jean-Marc Boyer applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des transports.
M. Philippe Tabarot, ministre des transports. Monsieur le sénateur, je suis prêt à rencontrer tous les élus qui souhaitent aborder ce sujet.
Permettez-moi simplement de vous répondre avec franchise et, je l'espère, pragmatisme, sur cette annonce de la SNCF, qui a donné lieu à des réactions parfois un peu simplistes.
Rappelons d'abord les faits. Comme vous l'avez dit, la ligne Bordeaux-Lyon via le Massif central n'est plus exploitée depuis 2014 ; elle est donc fermée depuis plus de dix ans. Le temps de parcours était déjà, à l'époque, de plus de sept heures et trente minutes. Elle était la plus subventionnée de France, enregistrant plus de 100 millions d'euros de pertes par an, car elle était malheureusement très peu fréquentée.
La SNCF proposera une nouvelle offre de TGV Ouigo en 2027 – en service librement organisé, je le précise –, qui reliera Bordeaux à Lyon en cinq heures, tandis que les gares d'Angoulême, de Poitiers et de Saint-Pierre-des-Corps seront desservies. Cette solution s'appuiera sur l'infrastructure déjà existante.
À court terme, nous ne pouvons malheureusement pas relancer une ligne Bordeaux-Lyon via le Massif central, et ce, pour deux raisons objectives que vous connaissez : l'état dégradé de l'infrastructure ferroviaire et l'absence de matériel roulant TET disponible.
Un passage direct par le Massif central nécessiterait en outre des investissements colossaux : une électrification complète de la ligne, une mise au gabarit des tunnels pour permettre le passage des rames modernes, une réfection de portions entières de la voie.
Notre priorité est la modernisation et la régénération du réseau existant, et votre territoire de la Creuse, monsieur le sénateur, en bénéficie directement. Je rappelle que les lignes Paris-Clermont et Paris-Limoges constituent les deux chantiers les plus importants du réseau ferré national : près de 3 milliards d'euros seront investis sur ces deux lignes et l'achat des 28 rames Oxygène, qui circuleront en 2027, coûte plus de 800 millions d'euros.
Il s'agit d'un investissement sans précédent pour ces territoires, alors que nous n'oublions pas les lignes de desserte fine du territoire, qui restent prioritaires.
Enfin, nous restons attentifs aux possibilités d'améliorer la desserte du Massif central : je pense par exemple au projet de mine de lithium dans l'Allier.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Philippe Tabarot, ministre. Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, nous n'abandonnons rien ni personne. (M. François Patriat applaudit.)
réponse à la crise viticole
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Laurent. Madame la ministre de l'agriculture, le 15 novembre dernier, des milliers de viticulteurs ont manifesté dans les rues de Béziers pour alerter sur les conséquences de la profonde crise que traverse la viticulture française. La situation est urgente et les viticulteurs sont à bout.
Cette crise vient de loin : elle est le fruit de chocs conjoncturels et d'évolutions structurelles que la filière n'a bien souvent pas voulu voir.
C'est le constat que je dresse, avec mes collègues Henri Cabanel et Sébastien Pla, dans le rapport La viticulture, une filière d'avenir : l'urgence de l'union ! rédigé au nom de la commission des affaires économiques du Sénat, et que celle-ci a adopté à l'unanimité en novembre dernier.
Nous formulons vingt-trois recommandations importantes, qui visent à cibler les problèmes. Nous proposons notamment d'organiser des assises de la viticulture, afin non pas d'apporter des réponses de court terme à une crise ayant déjà coûté à l'État, à fonds perdu, plus de 1 milliard d'euros, mais bien de réfléchir à une stratégie de long terme, fondée sur le rétablissement du dialogue entre l'amont et l'aval de la filière.
Madame la ministre, je salue vos récentes annonces, notamment le déblocage d'une enveloppe de 130 millions d'euros pour financer un dispositif d'arrachage des vignes, alors même que nous traversons une crise des finances publiques. Mais ces fonds, nous le savons bien, ne régleront en rien la crise structurelle de la filière. Ils serviront tout au plus à passer le prochain salon de l'agriculture et à offrir un court répit à la filière.
Ma question est donc la suivante : quelle est la stratégie de long terme du Gouvernement pour la viticulture française ? Comptez-vous organiser des assises de la viticulture ?
Madame la ministre, la viticulture est dans une profonde détresse. Nous vous demandons, en vous appuyant sur notre rapport, d'avoir le courage politique d'apporter les réformes indispensables. Il y a urgence ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains – M. Henri Cabanel et Mme Gisèle Jourda applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire.
Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. La viticulture française traverse en effet, dans certaines régions, une crise très grave, qui est profonde et ancienne.
Vous avez rappelé l'engagement de l'État, et vous avez eu raison : il a été très impliqué, sans pour autant pouvoir peser efficacement sur les problèmes structurels que connaît ce secteur d'activité, qui a, j'y insiste, toute son attention.
Vous avez rappelé les manifestations importantes qui ont eu lieu à Béziers et qui m'ont amenée à me rendre sur le terrain très rapidement pour rencontrer les professionnels. Le Président de la République était également présent.
Vous évoquez l'engagement de l'État à hauteur de 130 millions d'euros pour financer l'arrachage de vignes.
Pourquoi arracher des vignes, mesdames, messieurs les sénateurs ?
Arracher, c'est enlever du potentiel de production. Une partie du problème tient précisément à la surproduction. Celle-ci est liée à la déconsommation et cela aboutit évidemment à une impasse pour la viticulture française.
L'arrachage est donc une mesure structurelle, qui sera, à mon sens, tout à fait utile. Pour autant, on ne peut pas s'en satisfaire complètement.
Vous avez certainement raison de dire, monsieur le sénateur, que des mesures de long terme sont nécessaires pour apporter des réponses appropriées, sinon nous serons obligés de « remettre au pot » chaque année, et pas seulement pour passer le salon de l'agriculture.
L'arrachage, j'y insiste, a néanmoins pour objet de traiter une partie du problème de façon durable.
Vous m'avez remis, il y a quelques jours, au ministère, le rapport que vous avez rédigé avec vos collègues Sebastien Pla et Henri Cabanel, que je veux saluer également. J'y apporte une très grande attention. En outre, je veux vous remercier pour le sérieux de votre travail et aussi pour le courage que vous avez eu d'émettre certaines propositions.
Comme je vous l'ai indiqué, pour que les préconisations de ce rapport soient acceptées, il faut absolument qu'elles soient partagées par l'ensemble de la profession. (Applaudissements sur des travées du RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent, pour la réplique.
M. Daniel Laurent. Merci, madame la ministre, pour cette réponse. Je vous sais engagée aux côtés de la filière – nous n'avons aucun doute à cet égard.
Je le redis néanmoins et je vous alerte collectivement : sans véritable stratégie, l'avenir de la filière continuera de s'assombrir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Gisèle Jourda et Marie-Pierre Monier ainsi que MM. Henri Cabanel et Hervé Gillé applaudissent également.)
préparation de l'état à la dénatalité
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour le groupe Union Centriste.
Mme Jocelyne Guidez. Ma question s'adressait à M. le ministre délégué chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État. J'imagine que c'est Mme la ministre chargée du handicap qui me répondra.
La semaine dernière, la Cour des comptes a publié son rapport Démographie et finances publiques. Elle souligne l'ampleur du basculement démographique en cours : sous l'effet d'une dénatalité plus rapide que prévu et d'un vieillissement inéluctable, le ratio de dépendance s'accroît.
Notre pays compte désormais moins de naissances que de décès. Cette dynamique implique une baisse de la population active et aura des effets sur toutes nos politiques en matière de croissance, d'éducation, de retraite, de santé et, par conséquent, sur la maîtrise de nos finances publiques.
Je ne donnerai qu'un seul exemple : la dépense publique par tête est deux fois plus élevée pour les plus de 65 ans, tandis que leur part dans la population devrait passer de 22 % à 30 % d'ici à 2070.
Ce qui est plus frappant encore, c'est que notre administration ne semble pas suffisamment anticiper le choc démographique qui s'annonce et ses conséquences.
La Cour des comptes souligne ainsi que les enjeux démographiques ne représentent que 0,05 % des occurrences dans les documents de programmation budgétaire pluriannuelle.
De même, la fragmentation et la mauvaise articulation entre les administrations sur ce sujet compliquent l'analyse des recompositions démographiques. L'action publique reste figée dans une forme de myopie face au temps long. Les dernières prévisions démographiques de l'Insee datent de 2021 et les comptes de transferts nationaux n'ont plus été actualisés depuis 2018.
Madame la ministre, ma question ne porte pas sur les leviers d'action pour relancer la natalité, comme nous en avons l'habitude, mais sur le niveau de préparation de l'État. Le Gouvernement et notre administration ont-ils pris conscience du phénomène de dénatalité ? Comment notre fonction publique s'organise-t-elle pour anticiper et répondre en urgence à ses conséquences dans tous les domaines ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée de l'autonomie et des personnes handicapées. Madame la sénatrice, vous interrogez le Gouvernement sur la manière dont il entend prendre en compte l'impact de la baisse profonde de la natalité dans l'ensemble des champs d'action de la fonction publique.
Nous commençons déjà à ressentir la traduction de ce phénomène, notamment dans nos écoles, mais le ministre de l'éducation nationale serait mieux placé que moi pour en parler. Cela nous conduit à réaménager l'organisation au sein des écoles, par exemple en réduisant le nombre d'élèves par classe ou en améliorant l'accueil des enfants en situation de handicap.
Cette situation se transforme donc, dans certains cas, en opportunité, mais elle doit nous amener à nous projeter davantage, notamment pour nous préparer à ses conséquences dans les collèges, dans les lycées, mais aussi, en effet, à l'évolution du ratio entre les actifs et les inactifs.
Pour autant, j'indique, avant de revenir plus en détail sur la question de la prise en compte du vieillissement de la population, que le Gouvernement ne baisse pas les bras.
Il souhaite relancer et renforcer la natalité. J'attire votre attention sur les mesures en ce sens qui figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.
Celui-ci prévoit ainsi que chaque Français recevra un message personnalisé pour l'informer sur sa santé reproductive. Un congé supplémentaire de naissance, très attendu par les futurs parents, sera créé – c'est très important et il s'agit sans doute de la mesure phare de ce projet de loi. Je pourrais également citer l'évolution du complément de libre choix du mode de garde ou encore différentes mesures de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans tous les métiers de l'humain.
En ce qui concerne le vieillissement de la population, je voudrais aussi vous informer que je présenterai, d'ici au début du mois de janvier, un plan Grand Âge. Celui-ci visera à apprécier les impacts de cette évolution pour les personnes en perte d'autonomie, afin de définir les réponses adaptées à leurs besoins ainsi que les mesures de financement nécessaires. En effet, cette évolution réinterroge complètement la solidarité intergénérationnelle et intragénérationnelle dans notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour la réplique.
Mme Jocelyne Guidez. Je vous remercie, madame la ministre, pour votre réponse, mais je suis désolée, je n'attendais pas cette réponse à ma question…
Je regrette cependant que, comme à notre habitude, nous regardions passer le train… Il serait grand temps d'agir sur ce sujet, car il convient vraiment de préparer des réponses pour faire face à cette situation. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
conversion de la centrale de saint-avold
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Ma question porte sur la conversion de la centrale Émile-Huchet de Saint-Avold, en Moselle.
En avril, la loi visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement, dite loi Saint-Avold, que j'ai défendue avec mon collègue Khalifé Khalifé, a fait l'objet d'un large consensus au Parlement, puisque les deux chambres l'ont adoptée à l'unanimité.
Cette loi vise, dans le cadre du mécanisme de capacité, à convertir les centrales à charbon pour qu'elles utilisent des combustibles moins émetteurs.
Votre administration, monsieur le ministre, a présenté le projet de décret relatif à ce mécanisme, qui vise à garantir la sécurité d'approvisionnement en électricité, notamment en hiver. Or celui-ci soulève des inquiétudes quant à la conversion effective de notre centrale.
Lors de l'examen de la proposition de loi, les centrales au fioul avaient été exclues du dispositif. Le ministre Marc Ferracci s'y était lui-même engagé, afin d'éviter un « effet d'aubaine », selon ses propres termes.
Pourtant, votre projet de décret réintègre ces dernières. S'il était publié en l'état, cela reviendrait à subventionner pendant quinze ans des centrales partiellement converties à l'utilisation de combustibles moins émetteurs, mais qui bénéficieraient d'une rémunération pour l'intégralité de leur capacité de production, malgré tout très carbonée.
Cette disposition, contraire à la volonté du Parlement, menace la centrale de Saint-Avold. En effet, les quelques volumes soumis aux enchères seront captés de manière indue par les centrales au fioul, ce qui ne laissera plus de place à notre centrale, dont le projet de décarbonation vise, lui, à supprimer l'intégralité du fioul et du charbon.
Enfin, le mécanisme proposé présente une autre limite : il ne distingue pas les services rendus au système par les actifs pilotables sans contrainte de stock. Réseau de transport d'électricité (RTE) estime ainsi que nous avons besoin de disposer d'une capacité pilotable. Le mécanisme proposé ne répond donc pas aux besoins réels du réseau.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer, d'une part, que les centrales au fioul seront bien exclues du dispositif, comme s'y était engagé votre prédécesseur et, d'autre part, que les actifs pilotables sans contrainte de stock seront bien pris en compte ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Madame la sénatrice, vous l'avez dit, la centrale thermique de Saint-Avold, dont la puissance est de 600 mégawatts, doit être convertie, puisque nous souhaitons ensemble – je suis certain que nous sommes tous d'accord sur ce point – sortir du charbon d'ici à 2027.
Cela suppose de trouver une solution et chaque acteur doit jouer son rôle.
Le Parlement a joué le sien, puisqu'il a adopté, à l'unanimité des deux chambres, une loi qui permet à la centrale de Saint-Avold d'accéder, une fois convertie, au mécanisme de capacité. Je tiens d'ailleurs à vous remercier, madame la sénatrice, ainsi que vos collègues parlementaires. Vous avez donc fait votre travail.
L'État doit faire le sien et nous le ferons. Je travaille justement sur ce mécanisme de capacité : il doit évidemment respecter la loi, mais aussi les directives européennes qui s'appuient sur le principe de neutralité technologique. C'est cet équilibre que nous devons trouver.
J'entends vos interrogations et je m'efforcerai d'y répondre dans les semaines qui viennent dans le cadre de la finalisation de ce dispositif. Nous devons éviter de remplacer un problème par un autre, c'est-à-dire du charbon par du fioul, tout en nous assurant que le mécanisme de capacité est efficace.
Il faut aussi que l'entreprise fasse sa part du travail. C'est bien elle qui prend la décision de reconversion. Elle doit naturellement avoir des précisions sur le mécanisme de capacité et il est de notre ressort de les lui apporter, mais il lui revient de trouver un modèle économique qui permettra à la fois d'utiliser ce mécanisme et d'organiser la transition de la centrale.
Voilà tout ce que nous devons faire dans les semaines qui viennent. Évidemment, l'État sera au rendez-vous pour nous assurer que nous y arrivions.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.
Mme Catherine Belrhiti. Merci, monsieur le ministre. Nous avons besoin de l'assurance que la centrale de Saint-Avold sera convertie, comme les deux chambres du Parlement l'ont décidé à l'unanimité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation de l'industrie française et de l'entreprise brandt
M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Christophe Chaillou. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
En janvier dernier, l'entreprise Brandt fêtait ses 100 ans. Dernier grand acteur du secteur de l'électroménager à concevoir et fabriquer ses produits sur le sol français, fleuron de l'innovation, Brandt est au cœur du quotidien des Français avec des marques connues : Vedette, Sauter, De Dietrich. C'est une entreprise qui continuait à faire rayonner le savoir-faire français à l'international.
C'était une entreprise profondément ancrée dans nos territoires, d'Aizenay à Lyon, en passant par Lesquin et La Roche-sur-Yon, des sites qui ont été frappés par de précédentes restructurations.
Brandt, aujourd'hui, ce sont 750 emplois directs dans des sites de production majeurs en région Centre-Val de Loire, à Saint-Ouen, près de Vendôme, et surtout dans ma commune, Saint-Jean-de-la-Ruelle dans le Loiret. Ce dernier site héberge un pôle de recherche et d'innovation particulièrement important. À ces sites industriels s'ajoutent le service après-vente de Cergy-Pontoise et le siège social de Rueil-Malmaison.
La menace d'une liquidation du groupe, à la suite de l'annonce de son placement en redressement judiciaire et faute d'offres de reprise industrielle, est source d'une très profonde inquiétude.
Ce serait un drame non seulement pour les salariés et leurs familles, mais aussi un renoncement inacceptable dans un contexte où la réindustrialisation de la France est considérée par nous tous comme une priorité.
Face à cette situation, les salariés défendent un projet de reprise en coopérative (Scop). Les collectivités territoriales sont largement mobilisées autour du président de région, François Bonneau, avec le soutien de la préfète, du président de la métropole, des élus locaux. La région Île-de-France vient de rejoindre ce mouvement.
Le ministre délégué en charge de l'industrie est venu sur place témoigner de son soutien et engager l'État. Depuis, il s'est mobilisé pour trouver des solutions.
La décision est imminente, d'ici demain. Ma question est donc très claire, monsieur le ministre : êtes-vous en mesure de nous confirmer qu'aujourd'hui le tour de table financier, qui fait largement appel aux pouvoirs publics, est bouclé et que cela permettra, avec le soutien de l'État, la concrétisation de ce projet de Scop et donc la sauvegarde de l'emploi de ce fleuron industriel national ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur, c'est une décision de justice, non du Gouvernement, qui déterminera, dans les heures qui viennent, si le projet de reprise conçu par les salariés est viable.
M. Hervé Gillé. Oui, mais le tour de table ?
M. Roland Lescure, ministre. Ce dossier m'en rappelle un autre que vous connaissez bien, monsieur le sénateur, car il se situe également dans votre département : Duralex.
Lorsqu'une entreprise industrielle est chère au cœur des Français, avec des marques connues qui vendent des produits du quotidien, nous devons tout faire pour essayer de la conserver sur notre territoire.
Pour autant, le secteur de ce qu'on appelle les produits blancs – électroménager, etc. – subit une concurrence très vive et massive de la part de produits qui viennent de l'étranger et un certain nombre de sites ont déjà dû fermer.
Je vous remercie d'avoir cité le ministre délégué chargé de l'industrie, Sébastien Martin, car, vous le reconnaîtrez, il n'a pas ménagé ses efforts pour trouver des repreneurs, mais nous n'en avons pas trouvé.
Devant cette situation, une personnalité qui souhaite organiser une reprise par les salariés nous a proposé un projet de Scop qui ne permettrait sans doute pas de sauver l'ensemble des salariés, mais tout de même une grande moitié d'entre eux, soit 370. J'en profite pour vous dire que, pour les autres, nous nous engagerons à les accompagner dans leurs reconversions.
Pour ma part, j'espère que cela fonctionnera. En effet, j'ai rarement vu, sauf peut-être pour Duralex, une telle mobilisation d'élus locaux…
M. Hervé Gillé. Et de l'État ?
M. Roland Lescure, ministre. … et de l'État. J'espère que vous reconnaîtrez que l'État est au rendez-vous (M. Christophe Chaillou marque son approbation.), car nous nous sommes engagés à apporter un appui financier à ce projet de reprise.
J'espère donc vivement que ce projet sera un succès. C'est la justice qui en décidera et nous croisons les doigts. C'est une question d'heures ; j'espère que nous y arriverons.
maladie de charcot et parution des décrets d'application
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Mouton, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Pierre Mouton. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Il y a un peu plus d'un an, le 15 octobre 2024, notre collègue Gilbert Bouchet, dans un témoignage émouvant, mais avec la force du combattant, a présenté dans notre hémicycle une proposition de loi pour améliorer la prise en charge de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), maladie évolutive grave dont il était lui-même atteint depuis peu.
Soyons clairs, la loi du 17 février 2025, adoptée à l'unanimité du Parlement et reprenant chacune de ses propositions, a résonné pour les quelque 8 000 patients et leurs familles comme un espoir. Non pas l'espoir de survivre à un mal au pronostic fatal, mais l'espérance, simplement, d'avoir une fin de vie plus digne et d'être mieux accompagnés.
Dix mois plus tard, tous restent en attente de la publication de la liste des pathologies d'évolution rapide causant ces handicaps sévères et irréversibles, liste sans laquelle la procédure accélérée dérogatoire devant la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) et l'accès à une prestation de compensation du handicap (PCH) sans critère d'âge ne peuvent être mis en œuvre.
Cette loi, madame la ministre, ne doit pas devenir un texte de plus qui dort sur une étagère. Elle doit être appliquée immédiatement, intégralement et sans hésitation, avec une prise en charge par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) via les départements.
La SLA, elle, n'attend pas. Le temps de la maladie court plus vite que le temps administratif. Les patients comme leurs proches sont démunis face à la brutalité d'un mal redoutable qui paralyse, asphyxie et entraîne une dépendance rapide et majeure.
L'application de cette loi ne sera ni un geste symbolique ni une mesure technique. Elle sera un choix politique : celui de reconnaître que, face à une maladie qui ne laisse aucun répit, l'humanité est plus forte.
Madame la ministre, quand allez-vous publier la liste des pathologies concernées par la loi du 18 février 2025 ? (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée de l'autonomie et des personnes handicapées. Madame la sénatrice, permettez-moi tout d'abord de rendre un hommage ému à la mémoire du sénateur Bouchet et d'y associer l'ensemble du Gouvernement.
Comme pour vous, les décrets d'application de cette loi sont extrêmement importants pour le Gouvernement et je peux vous assurer que les projets ne dorment ni sur un bureau ni dans un tiroir. Ils sont en ce moment même soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes et ils devraient pouvoir être publiés très prochainement, au terme des procédures qui doivent être suivies dans de tels cas. Mon objectif est de les publier dès le mois de janvier.
Il est vrai que tout cela est un peu long. Il faut dire que la proposition de loi embrasse, au-delà de la SLA, un champ de maladies assez vaste.
Pour répondre à la promesse faite au sénateur Bouchet, le Gouvernement a donc fait le choix de préparer immédiatement les textes relatifs à la SLA, afin qu'il n'y ait pas de délai supplémentaire – chacun mesure bien à quel point tout délai peut être considéré comme très long – et pour les publier au plus vite – en janvier, je le disais.
En parallèle, nous avons saisi la Haute Autorité de santé (HAS) pour qu'elle définisse l'ensemble du périmètre des pathologies concernées. Nous devons en effet préciser les critères afin de ne laisser aucune pathologie de côté. Ces travaux sont en cours et, dès que la HAS aura rendu son avis, j'aurai à cœur, avec Stéphanie Rist, de préparer les décrets d'application.
D'ores et déjà, ce sont 1 400 personnes par an qui pourront bénéficier, parmi les 6 000 personnes touchées par la SLA, de la levée de la barrière d'âge que permet la loi du sénateur Bouchet. Grâce à ces premiers décrets, l'héritage que nous laisse le sénateur pourra commencer à prendre forme. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
mise à mal de la biodiversité
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Sonia de La Provôté. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de la transition écologique, mais aussi à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
Quelle ne fut pas la surprise des élus du Calvados en mai dernier, lorsqu'ils ont découvert le contenu d'un arrêté préfectoral de dérogation pris en vue de l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté (ZAC) en pleine friche industrielle !
Cet arrêté autorise l'opérateur public à « détruire, altérer, dégrader des aires de repos ou sites de reproduction et à perturber, capturer ou détruire des spécimens d'espèces protégées sur le périmètre de la ZAC ».
Oui, mes chers collègues, vous avez bien entendu : porter un projet sur une vaste friche industrielle vieille de 20 ans, c'est se voir octroyer un permis de tuer des espèces protégées !
Cet arrêté est fondé sur l'article R. 122-13 du code de l'environnement dans le cadre de la compensation environnementale et du fameux triptyque « éviter, réduire, compenser ».
Pour le dire simplement, friche polluée égale sobriété foncière : c'est bien, mais c'est mal aussi. Pourquoi ? Pour que les élus comprennent bien, tout est clairement expliqué dans l'arrêté : pour compenser, renaturer un vaste rond-point peut faire l'affaire. Bienvenue en absurdie ! Ou le bon sens loin de chez nous…
Monsieur le ministre, la façon dont cet arrêté est rédigé ressemble à un coup de règle en fer sur les doigts des élus qui croyaient bien faire. Si la qualité des sols, la biodiversité et la sobriété foncière sont absolument vitales et essentielles, porter des projets utiles à l'emploi, à la souveraineté, au logement et aux mobilités est aussi essentiel – vous en conviendrez.
J'ai donc deux questions, monsieur le ministre.
Envisagez-vous d'alléger les procédures et les contraintes pour les projets portant sur les friches ? C'est déjà long, coûteux, complexe. Que l'État soit facilitateur et pragmatique !
Au moment d'un possible nouveau pacte entre l'État et les élus locaux, serait-il possible de changer de paradigme, d'engager un dialogue respectueux, à la fois pour soutenir et conseiller les élus locaux, à la place de ces écrits comminatoires, trop souvent péremptoires, leur signifiant qu'ils seraient soit irresponsables, soit au mieux ignorants des enjeux environnementaux dans leurs projets ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition écologique.
M. Mathieu Lefèvre, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité et des négociations internationales sur le climat et la nature, chargé de la transition écologique. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question et de votre rappel l'engagement des élus locaux en faveur de la protection de la biodiversité. Ils sont en effet les premiers agents de la transition écologique et de la protection de la biodiversité, à l'heure où celle-ci est en déclin, que ce soit en France ou dans le monde.
Vous avez raison de souligner l'importance du régime européen de protection des certaines espèces qui, dans le droit existant, permet des dérogations pour des motifs économiques et sociaux, ce que chacun comprend parfaitement.
Vous avez évoqué en particulier les projets de réhabilitation de friches industrielles. Il arrive que, sur une telle friche, la nature reprenne ses droits, comme on dit, et qu'il soit, par conséquent, nécessaire de recourir à une dérogation pour pouvoir la réhabiliter.
Vous m'avez posé deux questions.
Le Gouvernement envisage-t-il d'alléger les procédures pour la réhabilitation des friches, sans rien renier de nos objectifs environnementaux communs ? La réponse est oui. Faisons-le en concertation, tout en ayant à l'esprit qu'il s'agit de droit communautaire.
Je réponds également par l'affirmative à votre deuxième question. Il est évident que, si les élus locaux sont les premiers agents de la transition écologique, les mesures relatives à cette dernière ne doivent pas simplement leur être notifiées par arrêté. Ils doivent non seulement avoir leur mot à dire, mais aussi pouvoir agir sur l'ensemble de ces mesures. En l'espèce, je suis à votre disposition pour que nous puissions échanger sur ce dossier avec le préfet de votre département. (M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Alain Marc.)
PRÉSIDENCE DE M. Alain Marc
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. Mes chers collègues, j'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Félix Leyzour, qui fut sénateur des Côtes-d'Armor de 1989 à 1997.
5
Mise au point au sujet d'un vote
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Patru.
Mme Anne-Sophie Patru. Lors du scrutin n° 110 sur l'amendement n° II-1 présenté par M. Jean-François Husson, au nom de la commission des finances, sur les crédits de la mission « Aide publique au développement », M. Guislain Cambier souhaitait voter pour.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
6
Conventions internationales
Adoption en procédure d'examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission
M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen de deux projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l'approbation de conventions internationales.
Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d'examen simplifié.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
projet de loi autorisant la ratification de plusieurs conventions-cadres relatives aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés, aux contrôles en cours de route et aux gares communes ou d'échange
Article 1er
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et la République fédérale d'Allemagne relative aux bureaux de contrôles nationaux juxtaposés et aux gares communes ou d'échange à la frontière franco-allemande, signée à Paris le 18 avril 1958, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
Article 2
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et la Confédération suisse relative aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés et aux contrôles en cours de route (ensemble un protocole final et deux échanges de lettres), signée à Berne le 28 septembre 1960, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
Article 3
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et le Royaume de Belgique relative aux contrôles à la frontière franco-belge et aux gares communes et d'échange, signée à Bruxelles le 30 mars 1962, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
Article 4
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et la République italienne relative aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés et aux contrôles en cours de route (ensemble un protocole final), signée à Rome le 11 octobre 1963, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
Article 5
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et le Grand-Duché de Luxembourg relative aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés et aux contrôles en cours de route, signée à Luxembourg le 21 mai 1964, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
Article 6
(Non modifié)
La ratification de la convention-cadre entre la République française et le Royaume d'Espagne relative aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés et aux contrôles en cours de route (ensemble un protocole final et un échange de lettres), signée à Madrid le 7 juillet 1965, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée (projet n° 853 [2024-2025], texte de la commission n° 183, rapport n° 182).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l'adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement du monténégro relatif à la coopération dans le domaine de la défense
Article unique
(Non modifié)
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Monténégro relatif à la coopération dans le domaine de la défense, signé à Paris le 3 avril 2024, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi (projet n° 857 [2024-2025], texte de la commission n° 159, rapport n° 158).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l'adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
7
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
Motion d'ordre
M. le président. Sur proposition du président de la commission des finances, nous pourrions, en application de l'article 46 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, procéder à l'examen séparé de certains amendements portant sur les crédits des missions « Santé », « Culture », « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Justice » et « Économie ».
Il n'y a pas d'opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Relations avec les collectivités territoriales (suite)
Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales (suite)
M. le président. Nous reprenons l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Buis. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Bernard Buis. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'année dernière, je débutais mon intervention sur la nature des relations entre l'État et les collectivités territoriales avec la question de savoir si elles étaient fraternelles et je répondais être convaincu qu'elles devraient l'être davantage. Un an plus tard, est-ce vraiment le cas ?
Si la réponse à cette question n'est pas évidente, ce qui est une certitude en revanche, c'est que les collectivités vont encore une fois contribuer à l'effort de redressement des finances publiques. Notre groupe n'y est pas opposé tant que cela reste contenu et justifié.
S'agissant de la dotation globale de fonctionnement (DGF), principal concours financier de l'État aux collectivités, force est de constater qu'elle est gelée à son niveau de 2025. Compte tenu de l'inflation anticipée à 1,1 %, cela correspond à une baisse en volume d'environ 300 millions d'euros.
Toutes proportions gardées, le montant global de la DGF représente 32,57 milliards d'euros. Par conséquent, l'effort demandé se concentre bien sur le soutien aux investissements.
À ce titre, le Gouvernement souhaite proposer une fusion des différentes dotations. Adieu DETR, DPV et DSIL, souvent indispensables pour la mise en place de projets et pourtant pas assez citées par les acteurs, lors des inaugurations notamment. Reconnaissons en même temps que, avec la multiplication de ces acronymes, il y a de quoi y perdre son latin.
Madame la ministre, le groupe RDPI soutient la volonté du Gouvernement de simplifier et de rendre lisible le soutien de l'État aux investissements locaux.
Cependant, la dotation d'équipement des territoires ruraux mérite, à nos yeux, de conserver une place à part entière.
La logique de simplification, avancée pour justifier la création du nouveau fonds d'investissement pour les territoires (FIT), pourrait, en pratique, favoriser une concentration des financements au bénéfice des territoires disposant des capacités d'ingénierie les plus solides pour répondre aux appels à projets, au premier rang desquels figurent les villes et les métropoles.
Notre groupe considère qu'une telle orientation serait de nature à raviver les inquiétudes exprimées de longue date par les maires des petites communes rurales, qui sont mobilisés contre le phénomène de captation progressive de la DETR par les collectivités plus urbaines.
Il a pu être constaté que des villes préfectures ou sous-préfectures de départements très ruraux peuvent, en toute légalité, bénéficier des crédits de la DETR en raison de leur appartenance à des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) composés majoritairement de petites communes rurales éligibles.
Nous avons donc déposé un amendement visant à supprimer l'article 74 du PLF et nous aurons l'occasion de revenir sur les raisons le justifiant.
Dans le même esprit, nous souhaitons maintenir le volet « collectivités territoriales » du fonds de secours pour les outre-mer dans sa configuration actuelle, contrairement à ce qui est envisagé à l'article 73.
La fusion proposée risquerait de réduire la lisibilité budgétaire et la capacité de suivi des crédits spécifiquement destinés à l'outre-mer et au territoire métropolitain. En intégrant ces financements dans une enveloppe nationale plus large, comment identifier facilement la part réellement consacrée à chacun ?
Dans un contexte où la différenciation territoriale est pourtant essentielle, le maintien d'un dispositif autonome répond également à un impératif de cohérence administrative et financière.
Notre groupe est bien placé pour le savoir. Les collectivités d'outre-mer font face à des vulnérabilités structurelles liées à leur exposition aux risques naturels majeurs, à leur isolement géographique et à leurs contraintes économiques.
Toutes ces caractéristiques justifient un traitement spécifique reposant sur un outil budgétaire clairement identifié et adapté à leurs besoins. Autant de raisons qui justifient le maintien du volet « collectivités territoriales » du fonds de secours pour les outre-mer, sans l'évolution envisagée dans le projet de loi de finances.
Par ailleurs, au-delà des efforts demandés en matière d'investissement, nous pouvons observer une tentative d'économie supplémentaire sur les recettes fiscales des collectivités.
Là encore, notre groupe proposera de modifier le texte s'agissant du dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales. Ce fameux Dilico, instauré en 2025 pour faire contribuer les collectivités à l'effort national de redressement des finances publiques, pourrait, selon l'article 76 du projet de loi de finances, être reconduit en 2026 avec un montant global doublé à 2 milliards d'euros. Cet effort serait réparti entre les communes à hauteur de 720 millions d'euros, les EPCI à fiscalité propre pour 500 millions, les départements pour 280 millions et les régions pour 500 millions.
Face à l'élargissement du nombre de contributeurs, y compris de nombreuses communes moyennes et rurales, notre groupe ne peut rester impassible. Ce qui pouvait être justifié pourrait clairement s'apparenter à une résurgence des contrats de Cahors. Or une telle ponction priverait les collectivités de marges de manœuvre qui sont nécessaires pour l'investissement local, alors qu'elles subissent déjà le gel de la DGF, la réduction des dotations spécifiques et la hausse de leurs charges obligatoires.
Vous le savez, madame la ministre, nous soutenons le Gouvernement, mais notre boussole reste et demeure l'autonomie de nos collectivités. Notre groupe défendra donc des amendements dans l'intérêt de nos collectivités hexagonales et ultramarines, en responsabilité, avec la conscience qui incombe à un législateur attentif et fidèle aux territoires.
Pour conclure, madame la ministre, nous attendons avec impatience l'année 2026, qui marquera, je nous le souhaite,…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Une hausse de la DGF ! (Sourires.)
M. Bernard Buis. … une date importante dans les actes successifs de décentralisation et une nouvelle étape dans l'évolution des relations entre l'État et les collectivités.
Notre groupe se positionnera en fin de séance, en fonction des amendements qui seront retenus, pour voter ou non ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Pierre-Alain Roiron. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quelques semaines, le Premier ministre annonçait vouloir engager très prochainement un grand acte de décentralisation, un acte fondateur d'une relation nouvelle entre l'État et les élus locaux, de clarification et de liberté.
Ces mots ont, à juste titre, résonné dans nos territoires. L'expression a son poids. Un pareil projet évoque nécessairement 1982 : la rupture avec la tutelle préfectorale, le transfert de compétences réelles accompagné de moyens concrets, la promesse – tenue – d'une République décentralisée. Nous avons donc écouté avec attention. Puis est venu le projet de loi de finances pour 2026…
Il faut reconnaître au Gouvernement un certain talent : annoncer simultanément la liberté locale, tout en la contraignant financièrement. Cela relève d'une virtuosité politique dont peu peuvent se prévaloir.
Au-delà de la forme, nous devons le dire, le budget relève d'une arithmétique singulière. Les collectivités portent moins de 8 % de la dette publique, elles assurent 58 % de l'investissement public, mais elles devraient assumer entre 15 % et 25 % de l'effort budgétaire national.
On pourrait y voir une erreur de calcul. Non, il s'agit d'un choix politique, un choix aussi discutable sur le plan de l'équité qu'il est contre-productif sur le plan économique. En bridant l'investissement local, on asphyxie l'un des seuls leviers de développement qui soutient tant bien que mal le dynamisme de nos territoires.
Manifestement, les amendements déposés par nos différents rapporteurs attestent du manque de calibrage du texte initial. Je reconnais et salue la rigueur des travaux menés en amont de l'examen du texte en séance.
Commençons par ce qui ne change pas.
La dotation globale de fonctionnement est stable, nous dit-on. Hélas, l'inflation, elle, ne l'est pas. Avec une prévision à 1,1 %, on obtiendrait en fait une baisse en volume de 300 millions d'euros. C'est donc une stabilité en trompe-l'œil, d'autant plus que, dans de nombreuses petites villes, cette DGF est déjà intégralement absorbée par le premier dispositif de lissage conjoncturel.
Saluons l'adoption de l'amendement, notamment porté par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui a permis de préserver la fraction de TVA affectée aux régions. La remplacer par une dotation figée aurait encore aggravé leur situation, alors que les régions supportent déjà 21,2 % de l'effort pour seulement 12 % des produits.
Sur la péréquation, la progression est bienvenue, mais elle s'inscrit dans une enveloppe fermée. Les associations d'élus nous alertent toutes : près de la moitié des communes verront leur dotation diminuer.
Alors même que les marges locales s'amenuisent, le Gouvernement a choisi de remodeler les outils d'investissement, en fusionnant la DETR, la DSIL et la DPV. Une fois n'est pas coutume, sous couvert d'une simplification effectivement demandée par nombre d'élus, l'enveloppe est diluée de 200 millions d'euros.
Surtout, cette enveloppe fait disparaître une garantie essentielle. La DETR constituait une enveloppe sanctuarisée pour les communes rurales, un socle connu, anticipable, inscrit dans une stratégie pluriannuelle. Ce fameux FIT efface ce repère et ouvre la porte à une redistribution plus volatile, plus discrétionnaire.
Au moment même où l'on parle de décentralisation, on renforce de façon considérable le pouvoir des préfets sur l'investissement local, tout en sacrifiant la différenciation territoriale. Là encore, nous saluons la sagesse des rapporteurs, qui ont proposé la suppression de ce dispositif.
Les départements, quant à eux, atteignent un point de rupture et subissent un effet ciseau redoutable : alors que les droits de mutation s'effondrent avec le marché immobilier, les allocations individuelles de solidarité représentent désormais un tiers de leurs dépenses, mais elles ne sont compensées qu'à hauteur de 43,4 % par l'État. Soixante départements sont en situation critique à l'approche de 2026, contre quatorze en 2024. Il ne s'agit plus là d'une crise conjoncturelle. Même des départements jusqu'ici préservés basculent. Pour la première fois de son histoire, mon département, l'Indre-et-Loire, présentera cette année une épargne nette négative.
Face à cette situation, le texte initial proposait un fonds de sauvegarde aux critères d'éligibilité si restrictifs que seulement la moitié des départements en difficulté y auraient eu accès. Certes, le fonds a été doublé, mais il ne suffira pas à compenser le déséquilibre structurel du financement des compétences sociales. On ne peut pas continuer à faire reposer des dépenses rigides et dynamiques sur des recettes cycliques et instables. La Cour des comptes partage cette analyse.
La logique de recentralisation est par ailleurs plus que jamais déployée via le Dilico 2, même corrigé. Il faut rappeler la genèse de ce dispositif de lissage : il s'agissait d'une initiative sénatoriale conçue comme ultime paravent face à l'ampleur de l'effort exigé par le gouvernement de Michel Barnier. Ce qui devait être exceptionnel et ponctuel en 2025 devient permanent et confiscatoire.
Les commissions ont apporté des correctifs importants. La subordination aux performances moyennes d'une strate constituait en effet une régression politique : une collectivité bien gérée aurait pu être sanctionnée du fait des comportements d'autres collectivités. C'est précisément le contraire de la libre administration.
On ne peut que regretter que les régions et les intercommunalités, acteurs majeurs du maintien de l'industrie et de la réindustrialisation, soient parmi les plus sollicitées. Notre Haute Assemblée doit une nouvelle fois rectifier une mesure inadaptée aux réalités territoriales. Cependant, ces ajustements, si nécessaires soient-ils, ne corrigent pas le vice originel du dispositif. C'est bien de cela qu'il s'agit, mes chers collègues : le Dilico 2 ressuscite les contrats de Cahors voulus par le gouvernement d'Édouard Philippe.
Cette seconde version aggrave la logique de Cahors sur tous les plans : davantage de collectivités touchées ; sanctions collectives et non pas individuelles ; dépenses globales visées. « Cahors » a été chassé par la porte, Dilico 2 le fait revenir par la fenêtre.
Ainsi se dessine un tableau d'ensemble : un budget qui réduit les marges d'autonomie et qui, paradoxalement, sera à l'origine de plus de dette locale que de redressement national.
En comprimant les dotations, en retardant le FCTVA, en alourdissant encore les versements à la CNRACL, en divisant de nouveau par deux le fonds vert, on contraint artificiellement les collectivités à l'emprunt pour financer des investissements essentiels. Les territoires, déjà fragilisés, sont encore plus affaiblis. C'est rigoureusement l'inverse du but affiché.
Malgré les corrections de la commission des finances, la nature profonde de ce projet de loi de finances reste inchangée : un budget qui demande trop aux collectivités locales et qui transforme le partenariat en subordination.
Pour toutes ces raisons, et conformément à la position de mon groupe, à ce stade, nous ne voterons pas les crédits de cette mission, non pas par volonté d'opposition systématique, mais par esprit de responsabilité envers les territoires que nous représentons et envers les millions de nos citoyens qui comptent sur leurs élus locaux pour maintenir les services publics, pour investir dans la transition écologique,…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Pierre-Alain Roiron. … et surtout par fidélité à un principe simple : on ne redresse pas un pays en affaiblissant ceux qui le tiennent debout ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Bernard Delcros. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, s'il nous paraît légitime que les collectivités contribuent, cette année encore, à l'effort national de redressement des comptes publics, cette contribution doit être proportionnée, juste et limitée dans le temps. Il ne sera pas possible de continuer à réduire chaque année un peu plus les moyens des collectivités. Nous arrivons au bout de cet exercice et les collectivités devront rapidement retrouver de la stabilité et de la prévisibilité pour leurs ressources. Les élus qui débuteront un nouveau mandat en mars prochain auront besoin d'y voir clair.
Concernant cette mission, au-delà du Dilico et d'autres dispositions dont nous reparlerons au cours des débats, je voudrais revenir sur trois points plus particulièrement.
Le premier point concerne les variables d'ajustement. Elles sont réduites cette année encore à hauteur de 527 millions d'euros. Je rappelle que les variables d'ajustement sont non pas une dotation « cadeau », mais une simple compensation de suppressions de fiscalité locale. Autrement dit, il s'agit de compenser des pertes de recettes fiscales pour les collectivités.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Eh oui !
M. Bernard Delcros. Diminuer les variables d'ajustement, c'est renoncer à une compensation due. C'est d'ailleurs pour cela que notre délégation aux collectivités territoriales a engagé un travail sur ce sujet, qui est pour nous central dans notre quête de stabilité des ressources des collectivités.
Deuxième point, que plusieurs orateurs ont évoqué : l'article 74 du projet de loi de finances prévoit la création d'un fonds d'investissement pour les territoires (FIT), qui regrouperait la DETR, la DSIL et la dotation politique de la ville. Cette fusion, sous couvert de simplification, reviendrait à supprimer, madame la ministre, la DETR, un soutien indispensable de l'État aux territoires, bien connu et apprécié de tous les élus locaux. (M. Rémy Pointereau acquiesce.)
M. Loïc Hervé. Bien sûr !
M. Bernard Delcros. Je rappelle que, derrière les investissements engagés par les élus, il y a des services aux habitants, l'amélioration de leur cadre de vie, mais aussi le maintien de l'emploi, de l'artisanat et des entreprises partout en France. Nous allons donc rétablir la DETR !
Quant à la simplification, madame la ministre, elle pourrait très bien passer par une départementalisation de la DSIL, un dossier unique et simplifié (M. Laurent Burgoa et Mme Sophie Primas applaudissent.), et par des délais d'instruction réduits pour permettre aux élus de connaître le montant de leurs subventions avant de voter leur budget. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Enfin, je souhaite vous alerter, mes chers collègues, sur une mesure entérinée l'année dernière, contre l'avis du Sénat, et qui n'est pas sans conséquence sur le montant de la dotation de solidarité rurale (DSR) perçue par les communes. Pour le calcul de la fraction péréquation de la DSR, la loi de finances pour 2025 a ainsi remplacé le critère relatif à la longueur de la voirie classée dans le domaine communal par un autre critère reposant lui aussi sur la longueur de la voirie, mais définie en Conseil d'État à partir des données de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). Les résultats ne se sont pas fait attendre : beaucoup de communes ont vu leur dotation de solidarité rurale (DSR) diminuer injustement. Je rappelle que le critère de longueur de la voirie ne pèse pas moins de 30 % dans le calcul de la fraction péréquation de la DSR.
Sans revenir sur la mesure de l'année dernière, nous défendrons un amendement afin que la longueur de voirie retenue pour le calcul de la DSR ne puisse en aucun cas être inférieure à la longueur de la voirie classée dans le domaine public communal. (M. Jean-Michel Arnaud et Mme Nadine Bellurot applaudissent.)
Nous allons bien évidemment revenir sur tous ces sujets qui concernent les collectivités. Je ne veux cependant pas conclure sans redire ici qu'affaiblir les collectivités, c'est affaiblir le pays. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Jeanne Bellamy. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Jeanne Bellamy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » joue un rôle essentiel. Elle retrace les financements que l'État accorde à nos collectivités pour supporter leurs dépenses de fonctionnement, appuyer leurs investissements locaux et compenser les transferts de charges liés à la décentralisation. La France fait face à une situation budgétaire intenable, qui exige un effort collectif pour redresser nos comptes publics.
Les collectivités locales doivent, elles aussi, y contribuer, mais cet effort doit rester juste et proportionné. En juillet dernier, François Bayrou, alors Premier ministre, avait fixé le montant de cet effort à 5,4 milliards d'euros ; le présent budget le ramène à 4,6 milliards d'euros. C'est certes une baisse, mais le montant de cette contribution demeure considérable pour nos collectivités, dont les ressources sont déjà atrophiées.
Cet effort budgétaire est non pas un simple ajustement comptable, mais un désengagement progressif de l'État envers les territoires.
L'effort demandé aujourd'hui conduira à moins de places en crèches, moins de bus pour les écoliers, moins d'entretien des routes, moins de soutien aux associations culturelles et sportives. Sacrifier les services publics de proximité revient à se tirer une balle dans le pied. Alors, c'est non !
Comment demander à nos élus locaux de faire toujours plus avec toujours moins ?
Le budget qui nous est soumis n'est pas acceptable.
Je salue cependant le travail de la commission des finances et des rapporteurs spéciaux. Il est indispensable de ramener l'effort demandé aux collectivités à 2 milliards d'euros et de sauver les départements en abondant le fonds de sauvegarde.
Néanmoins, la péréquation, tant verticale qu'horizontale, demeure insuffisante. Les communes rurales, les petites villes et les zones périurbaines continuent d'être délaissées, sans qu'aucun mécanisme d'équilibre véritable soit mis en place pour garantir un développement harmonieux sur l'ensemble du territoire français.
Les écarts de ressources entre collectivités se creusent, créant une France à plusieurs vitesses, où certains territoires peuvent investir quand d'autres peinent à assurer les services de base. Cette injustice territoriale est inacceptable. Les territoires méritent de vrais moyens pour innover, créer des emplois et assurer une vitalité économique partagée.
Donner des moyens aux territoires, c'est faire confiance à la décentralisation et à nos élus. Ce n'est pas une dépense ; c'est un investissement pour notre avenir commun.
Comme le disait un ancien Premier ministre,…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Lequel ?
Mme Marie-Jeanne Bellamy. … « La France est forte quand c'est une force qui va et qui sait où elle va. » Où allons-nous, madame la ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sylviane Noël. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » revêt cette année une importance particulière : il s'agit du dernier budget d'un cycle municipal particulièrement éprouvant pour nos collectivités locales.
Elles ont traversé la pandémie, absorbé l'inflation, maintenu les services publics essentiels, soutenu l'économie locale, protégé les plus fragiles, mis en œuvre les obligations croissantes liées à la transition énergétique, au logement, à la sécurité, au zéro artificialisation nette (ZAN), que sais-je encore ? Pendant ce temps, les moyens, eux, n'ont pas suivi. Les dotations stagnent voire diminuent. Les dépenses contraintes explosent.
Ce projet de budget pour l'année 2026 impose aux collectivités un effort inédit : 4,6 milliards d'euros selon le Gouvernement, mais plus de 7 milliards d'euros selon les associations d'élus locaux.
Le fonds vert subit une nouvelle coupe de 500 millions d'euros, après avoir déjà été divisé par deux en 2025.
La DGF, gelée à son niveau de 2025, subit, en réalité, une baisse en euros constants. Le FCTVA voit son périmètre considérablement réduit et son calendrier remis en cause. Le Dilico a doublé par rapport à 2025 et portera la ponction totale à 2 milliards d'euros, amputant considérablement le budget de 4 000 collectivités concernées, dont de très petites communes.
Ce dispositif représente une contrainte majeure sur les budgets locaux, limitant leur autonomie financière sans garantie claire en retour. Pis encore, le Gouvernement prévoit un étalement des remboursements sur cinq ans au lieu de trois ans, ainsi qu'une subordination de ce remboursement à l'évolution des dépenses réelles de fonctionnement et d'investissement : on atteint là des sommets d'hypocrisie consistant, pour un État inconséquent dans sa gestion budgétaire, à donner des leçons et même à sanctionner les collectivités locales qui, elles, votent des budgets en équilibre et savent globalement maîtriser leur endettement.
Ce Dilico n'est qu'une énième atteinte à la libre administration des collectivités territoriales. (M. Olivier Paccaud acquiesce.) Je n'ai donc pas hésité à déposer un amendement pour le supprimer tout simplement, même si je salue le travail engagé par la commission des finances du Sénat, qui a su réduire de moitié l'effort demandé aux collectivités.
Avant de conclure, je souhaite également évoquer la réforme calamiteuse de la taxe d'aménagement (TA), qui a engendré un désordre indescriptible dans le recouvrement de cette taxe, mettant à mal la trésorerie des communes et des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Quelle n'est pas notre colère de devoir subir cette réforme improvisée aux conséquences désastreuses, avec des millions d'euros non encaissés, parfois depuis 2022, faisant craindre la prescription fiscale. Là encore, si je salue les quelques mesures adoptées la semaine dernière par le Sénat, je regrette amèrement que l'on maintienne un dispositif non opérant.
Malgré les belles promesses d'une amélioration à venir, je crains, hélas ! de me retrouver dans un an à la même place pour dénoncer les mêmes manquements, sans qu'aucune amélioration soit intervenue.
Je le dis avec force, en dépit des aménagements que le Sénat saura y apporter, cette mission est une potion amère pour les collectivités, qui, je le rappelle, assument l'essentiel des services publics de nos concitoyens et sont à l'origine de 70 % de la commande publique. Aussi, je forme le vœu sincère que ce débat soit non pas une formalité budgétaire, mais un tournant politique. Parce qu'une République forte est une République qui se tient debout aux côtés de ses territoires, et pas face à eux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, j'interviens sur cette mission. Chaque fois, je fais le rêve de pouvoir enfin me réjouir de l'amélioration des relations entre l'État et nos collectivités. Ce ne sera, hélas, pas encore pour cette année…
Pour la deuxième année consécutive, le texte qui nous est proposé demande aux collectivités une contribution, que je qualifierai de disproportionnée,…
M. Olivier Paccaud. Léonine !
M. Rémy Pointereau. … au redressement des comptes publics. Certes, les crédits de la mission sont stables, mais cette stabilité résulte d'une baisse ponctuelle des dotations d'investissement.
Oui, les collectivités doivent participer à l'effort national, encore faut-il que cet effort soit juste et proportionné. Tel n'est pas le cas aujourd'hui.
Comment demander à des acteurs qui réalisent 70 % de l'investissement public de contribuer à plus de 15 % de l'effort financier, soit 4,6 milliards d'euros ? Alors même que la DGF est gelée, ce qui représente, avec l'inflation, une baisse de 300 millions d'euros, les collectivités subissent toujours la non-compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) sur les locaux industriels, ce qui ampute leurs budgets de 1,2 milliard d'euros supplémentaires.
Je pourrais évoquer également la situation très tendue de nombreux départements ruraux : à l'instar de ce que nous avons fait pour les communes, nous aurions dû supprimer le Dilico qui s'applique à eux, en tout cas pour les plus fragiles.
La chambre des territoires ne peut accepter une contribution aussi excessive. Je rappelle, comme l'ont souligné nos rapporteurs, que les collectivités ne sont pas responsables de la crise des finances publiques. Elles doivent, pour leur part, présenter des budgets en équilibre, ce qui n'est pas le cas pour l'État.
C'est pourquoi nous proposons de réduire cet effort dans des proportions compatibles avec la poursuite de l'investissement local, en particulier dans les territoires ruraux.
J'en viens enfin à l'article 74 et à la création du fonds d'investissement pour les territoires (FIT), fusion de la DETR, de la DSIL et de la DPV. Le Gouvernement le justifie par un souci de simplification. Permettez-moi d'en douter !
Cette fusion pénalisera la ruralité. Le rapport de notre collègue Jean-Michel Arnaud le démontre clairement : 3 269 communes et 217 EPCI sortiraient du dispositif, et aucun mécanisme ne garantit le maintien des équilibres actuels. (M. Jean-Michel Arnaud approuve.) Je ne vois donc pas la plus-value de cette réforme, alors que, comme vous, madame la ministre, je suis un fervent partisan de la simplification, un sujet que nous évoquions encore hier au second Roquelaure de la simplification, que vous avez organisé. Pour autant, je ne suis pas favorable à une simplification qui se ferait au détriment de nos territoires ruraux ou qui risquerait de réduire les moyens consacrés à l'investissement local.
Ma collègue Nadine Bellurot et moi-même proposerons donc un amendement tendant à la suppression de cette fusion, afin de conserver une réelle lisibilité pour les territoires ruraux. Je sais pouvoir compter sur vous sur votre soutien fort, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également.)
Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais essayer d'être aussi brève que possible pour que nous ayons du temps pour débattre. Je ne répondrai donc pas à chacun de vous individuellement dès maintenant, mais je le ferai au moment de l'examen des amendements.
Je voudrais simplement rappeler le début de l'histoire. Si je suis d'accord avec beaucoup de ce qui a été dit, il est important que nous nous remémorions le premier épisode du scénario. Le budget proposé doit prendre en compte une dette de 3 400 milliards d'euros. Il est évident qu'un tel niveau d'endettement incite davantage à la frugalité qu'à la prodigalité. Dans un tel cadre, il est clair que le niveau de dépenses est heurté de plein fouet.
Notre dette augmente de 12 millions d'euros par heure, ce qui fait toujours un peu peur. L'objectif que nous avons construit ensemble est de ramener le déficit à 5,4 % du PIB en 2025 – il me semble que nous allons y arriver –, autour de 5 % en 2026 et à 3 % en 2029.
Vous êtes conscients de la nécessité de ce redressement, qui est indispensable pour notre souveraineté, mais aussi pour préserver tous les services publics assurés par nos collectivités. Vous les avez évoqués de manière très juste et ils nous tiennent tous à cœur. Ce budget n'est donc pas un budget de facilité ; c'est un budget de responsabilité, de vérité, mais aussi de solidarité.
Vous ne serez peut-être pas d'accord avec cette affirmation, mais nous avons essayé de préserver la capacité de fonctionnement des collectivités. Je me rappelle avoir connu en 2015, alors que j'étais maire, un soudain trou d'air en matière de DGF, parce que le gouvernement d'alors l'avait baissée de plus de 30 %. Par ailleurs, la DGF n'est plus indexée sur l'inflation depuis François Baroin, qui est toujours un grand maire et qui fut un grand ministre.
Vous le savez et je le sais, les collectivités sont amenées à contribuer. Chacun reconnaît pourtant qu'elles ne sont pas responsables de la part la plus importante de la dette. Il faut savoir les ménager, mais, en même temps, lorsque nous faisons le choix de porter le fonds de sauvegarde pour les départements à 600 millions d'euros, cela contribue à creuser la dette.
La mission « Relations avec les collectivités territoriales » représente un peu moins de 4 milliards d'euros, alors que l'ensemble des transferts de l'État vers les collectivités s'élève à 155 milliards d'euros.
Il y a deux priorités pour la mission.
D'abord, au risque de vous faire rire, voire hurler, je répète que nous avons souhaité préserver l'investissement local.
M. Olivier Paccaud. 200 millions d'euros en moins !
Mme Françoise Gatel, ministre. Vous l'avez rappelé, les collectivités portent 70 % de l'investissement local, mais nous savons que, dans les années électorales, l'effort d'investissement est moins important. La dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), dont vous parlez tous, s'élèvera ainsi à 1 milliard d'euros, avec ou ans le fonds d'intervention pour les territoires (FIT).
Nous partageons l'objectif de soutenir les territoires ruraux. Je rappelle que la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales (DSCAR) est portée à 110 millions d'euros, alors qu'elle était à peine de 42 millions en 2023. La dotation de solidarité rurale (DSR) augmente de 150 millions d'euros. La dotation globale de fonctionnement (DGF), en revanche, est stabilisée après trois années de hausse.
Il y a des questions sur le Dilico. Je réserve mes arguments pour la discussion des amendements. Je précise juste que le Gouvernement émettra un avis favorable sur deux points.
Il est favorable au remboursement sur trois ans et il accepte l'annulation de ces clauses, que d'aucuns appellent « clauses de Cahors », bref, de ces clauses contraignantes.
M. Loïc Hervé. C'est un bon début !
Mme Françoise Gatel, ministre. Je vous remercie de noter les grands efforts que nous faisons. Et ne me dites pas que c'est un minimum.
M. Olivier Paccaud. C'est tout bonnement un retour aux règles initiales !
Mme Françoise Gatel, ministre. Quant aux régions, je sais, et je peux le comprendre, qu'elles ne sont pas vraiment favorables au remplacement de la part de TVA qu'elles perçoivent par une dotation. Nous partageons ce point de vue et souhaitons que les régions puissent conserver une part de ressources dynamiques.
Sur le Dilico, je ne peux m'empêcher d'évoquer la situation des départements, car elle va de pair avec celle des régions. Les départements perçoivent aujourd'hui des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui font le yoyo : ils ont beaucoup augmenté pendant certaines années, puis ils ont baissé et ils commencent à remonter d'environ 15 %. Nous donnerons des chiffres plus précis.
Il n'empêche qu'il nous semble essentiel d'adhérer à ce que vous proposez, c'est-à-dire une réforme globale des finances locales. En effet, on ne peut pas se contenter, à chaque projet de loi de finances, de se répandre en suggestions et en récriminations sous la forme d'amendements, qui sont certes tout à fait pertinents, mais qui viennent déséquilibrer, sans étude d'impact, un édifice très fragile.
J'invite donc le Sénat à poursuivre son travail de diagnostic sur ce qui ne fonctionne pas dans les finances locales et à faire œuvre de proposition. Je pense comme vous que les collectivités ont besoin de stabilité, de lisibilité et de prévisibilité. C'est pourquoi un travail de fond doit être mené d'une manière collective et courageuse, car je sais combien il est difficile de conduire jusqu'à leur terme les révolutions en matière de finances locales.
Je ne serai pas plus longue, car nous avons besoin de temps pour débattre des amendements. Je vous en rends même un peu : c'est aussi un acte positif du Gouvernement. Je vous remercie de le souligner. (Sourires.) Je ne doute pas que nous saurons ensemble construire une copie responsable. Même s'il nous arrive d'avoir des points de vue un peu différents, je forme le vœu que nos discussions se déroulent dans le respect des uns et des autres. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nadine Bellurot et M. Loïc Hervé applaudissent également.)
M. le président. Le temps, c'est parfois de l'argent, madame la ministre !
Organisation des travaux
M. le président. Mes chers collègues, pour la bonne information de tous, je rappelle que 177 amendements sont à examiner sur cette mission. La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à huit heures trente. Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission sera reportée à la fin des missions de la semaine.
Sur cette mission, le nombre d'amendements à examiner, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui, nous conduit à devoir observer un rythme de 25 amendements par heure, ce qui paraît à ce stade possible avec la durée habituelle des interventions. Compte tenu, de surcroît, de l'importance du sujet abordé, nous pourrions donc fixer les temps de parole à deux minutes, en gardant la possibilité, en cours de discussion, et conformément à la décision de la conférence des présidents, de passer à une minute afin d'éviter un report. J'en appelle donc à la responsabilité de chacun.
relations avec les collectivités territoriales
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
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Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Relations avec les collectivités territoriales |
3 761 265 818 |
3 931 902 178 |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
3 511 126 769 |
3 675 597 351 |
Concours spécifiques et administration |
250 139 049 |
256 304 827 |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1951, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
– |
+ |
– |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
|
|
|
Concours spécifiques et administration |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
TOTAL |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
SOLDE |
+50 000 000 |
+50 000 000 |
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La parole est à Mme la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. Il s'agit d'un amendement qui est en quelque sorte une manifestation de soutien de l'État à la collectivité de Corse. Afin de l'accompagner pour faire face à la hausse des coûts des dessertes maritimes entre l'île et le continent, nous proposons une augmentation de la dotation de continuité territoriale de 50 millions d'euros, ce qui portera l'enveloppe totale de cette dotation à 237 millions d'euros en 2026. C'était une demande forte des élus et des parlementaires de Corse. Nous avons entendu cet appel et nous avons pris cet engagement auprès de la collectivité de Corse.
Nous préférons inscrire cette dotation budgétaire au programme 122 « Concours spécifiques et administration », plutôt que de retenir la solution d'un prélèvement sur les recettes, qui avait été retenue lors de l'examen de la première partie de ce PLF.
M. le président. L'amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Parigi, Kern et Levi et Mmes Devésa et Saint-Pé, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
60 000 000 |
|
60 000 000 |
|
Concours spécifiques et administration |
|
60 000 000 |
|
60 000 000 |
TOTAL |
60 000 000 |
60 000 000 |
60 000 000 |
60 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.
M. Paul Toussaint Parigi. Je comprends parfaitement le souci de rigueur budgétaire, mais les faits sont têtus. Depuis le gel de la dotation de continuité territoriale (DCT) en 2009, la collectivité de Corse a compensé seule le surcoût non abondé par des rallonges budgétaires successives et se trouve aujourd'hui au bout de ses capacités financières.
C'est pourquoi, en première partie du projet de loi de finances, le Sénat, que je remercie chaleureusement, a voté à une très large majorité, par scrutin public, un abondement de 60 millions d'euros, indexé sur l'inflation. L'Assemblée nationale avait fait de même.
Madame la ministre, vous proposez aujourd'hui de ramener cette enveloppe à 50 millions d'euros. Ce recul est une incohérence politique que personne ici ne peut ignorer. Le Premier ministre a déclaré vouloir, pour cet exercice budgétaire, laisser la parole au Parlement. Or le Parlement s'est exprimé deux fois clairement. Madame la ministre, il me semble cohérent, juste et respectueux du vote exprimé démocratiquement de ne pas revenir sur l'équilibre trouvé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances. La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° II-1951 du Gouvernement, étant donné qu'il s'agit de reconduire le même dispositif que l'année dernière.
Par conséquent, la commission demande à notre collègue Parigi de bien vouloir retirer son amendement, d'autant que nous avons voté une autre mesure en première partie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. J'ai bien entendu votre argument, tout à fait légitime, monsieur le sénateur. Je rappelle que la DCT augmente assez régulièrement. Nous avions ainsi augmenté son montant de 30 millions d'euros, puis de 40 millions d'euros. Nous l'augmentons aujourd'hui de 50 millions d'euros.
Il est vrai que le Sénat a voté un abondement de 60 millions d'euros en première partie, mais le Gouvernement a annoncé il y a déjà deux semaines qu'il augmenterait de 50 millions d'euros le montant de cette dotation.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Toussaint Parigi, l'amendement n° II-91 rectifié est-il maintenu ?
M. Paul Toussaint Parigi. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1951.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° II-91 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° II-1954 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
– |
+ |
– |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
19 368 394 |
|
19 368 394 |
|
Concours spécifiques et administration |
|
|
||
TOTAL |
19 368 394 |
|
19 368 394 |
|
SOLDE |
+19 368 394 |
+19 368 394 |
||
La parole est à Mme la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. Cet amendement vise à abonder en autorisations d'engagement et en crédits de paiement le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » pour financer le versement aux maires, comme le Premier ministre s'y était engagé, de l'indemnité visant à reconnaître leur fonction d'agent de l'État.
Le Premier ministre a annoncé lors du congrès des maires de France qu'une indemnité de 500 euros serait versée à chaque maire, sans condition. Pour que les maires puissent bénéficier de 500 euros nets, nous proposons de créer une ligne de crédit de 19,3 millions d'euros. Cette indemnité prendra la forme d'un versement aux communes d'un montant légèrement supérieur à 500 euros, qui leur permettra de s'acquitter de la CSG et de la CRDS. La commune versera ensuite à chaque maire cette indemnité de 500 euros nets.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial de la commission des finances. Je trouve que cette discussion commence bien puisque nous émettons sur cet amendement du Gouvernement, comme sur le précédent, un avis favorable.
Le Premier ministre s'était en effet engagé devant les maires à prendre cette mesure, que l'on ne peut que saluer, même si nous aurions sans doute préféré la voir figurer dans le texte initial. L'essentiel est que la fonction d'agent de l'État des maires, qui est certainement l'une de leurs plus anciennes fonctions, soit prise en compte. Je ne sais plus si elle remonte à la Révolution ou à l'Empire, mais, en tout cas, elle date.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement vise à mettre en œuvre l'engagement pris par le Premier ministre devant les maires de France de leur octroyer une indemnité de 500 euros.
D'après les retours que j'ai, cette indemnité ne suscite pas un enthousiasme délirant. Les maires ne demandent pas l'aumône, ils n'attendent pas après 500 euros. Ils exercent leurs missions avec engagement, sans rien demander. Je tenais à vous faire part de ce que j'ai entendu sur le terrain, madame la ministre.
Je voterai cet amendement, bien sûr, mais je pense que ce que veulent avant tout les maires, c'est pouvoir faire, pouvoir agir et disposer de moyens pour cela. Ils veulent qu'on leur simplifie la vie au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.
M. Simon Uzenat. Nous voterons également cet amendement, car plus, c'est toujours mieux que moins, mais il faut entendre – et je sais que vous avez l'ouïe fine, madame la ministre – les propos de nos élus dans les différents territoires.
Certains élus considèrent que cette indemnité de 500 euros pourrait être une forme de provocation au regard des tâches qu'ils accomplissent et des responsabilités qu'ils assument au nom de l'État. Le mot « aumône » est un peu plus poli que celui qu'ils emploient parfois lorsqu'ils parlent de cette indemnité. Nous devons les entendre.
Ce qu'ils réclament, c'est vrai, c'est du pouvoir d'agir – nous avons eu l'occasion d'en discuter lors de l'examen de la loi portant création d'un statut de l'élu local –, mais également une juste reconnaissance. Certes, on observe une progression du niveau de leurs indemnités, mais celui-ci est bien loin d'atteindre ce que les uns et les autres mériteraient au regard du temps qu'ils consacrent à l'exercice de leur mandat.
Nous voterons donc cet amendement, mais la Nation doit se mobiliser et se montrer à la hauteur des sacrifices consentis par nos élus locaux, qui réclament bien plus que cette aumône symbolique.
M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, pour explication de vote.
M. Pierre Barros. Je suis assez mitigé, car le retour que nous avons du terrain n'est pas si simple à analyser.
Il est effectivement important de reconnaître l'engagement et le travail des élus locaux, notamment des maires, dans l'ensemble des territoires, ainsi que leur fonction d'agent de l'État, mais, excusez-moi, ils ne sont pas aussi les collaborateurs du Premier ministre ! Cette pratique managériale de reconnaissance en fin d'année ressemble à d'autres pratiques, dans d'autres endroits, et ne me semble pas tout à fait adaptée.
Pour manifester notre reconnaissance aux élus locaux que sont les maires, nous pourrions leur permettre d'élaborer des budgets équilibrés, de produire de nouveaux services et d'organiser des services publics cohérents avec les besoins des habitants. Faciliter ainsi leur quotidien serait une belle reconnaissance pour nos élus locaux.
Je suis donc très embarrassé par cet amendement du Gouvernement et par ce positionnement quasi managérial, qui ne me semble pas du tout adapté.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. Je souhaite à mon tour faire part de mes doutes sur cette indemnité de 500 euros, que personne n'a demandée ni imaginée. Cette indemnité de 41,66 euros mensuels sera versée aux maires au titre de leur fonction d'agent de l'État.
Or la priorité est que l'augmentation des indemnités prévues dans la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local – devenue aujourd'hui loi de la République – soit assumée et intégrée dans la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux (DPEL). Il s'agit de valoriser le travail des maires en cohérence avec ce que nous avons adopté à la quasi-unanimité dans ce texte.
Une participation de l'État est nécessaire, au titre de la solidarité nationale, pour que cette augmentation ne soit pas uniquement à la charge des collectivités locales. Une partie de ces 500 euros serait utile pour financer les dispositions de la loi portant création d'un statut de l'élu local.
Cet effet de manche du Premier ministre lors du congrès des maires de France était à tout le moins inopportun. Il a été à mon sens très mal perçu par les élus. Le Sénat doit rejeter cette aumône. (MM. Loïc Hervé et David Margueritte applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Dans le cadre des travaux que j'avais effectués avec Françoise Gatel lorsqu'elle était sénatrice, nous nous étions mis d'accord sur le fait qu'il fallait prendre en compte le travail effectué par les maires dans le cadre du dédoublement fonctionnel pour l'État.
La loi portant création d'un statut de l'élu local prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement estimant la quantité de travail effectivement fournie par les maires au titre de leur fonction d'agent de l'État.
Sans doute aurait-il donc fallu attendre la remise de ce rapport avant de décider de cette indemnité, qui, d'une certaine façon, reste au milieu du gué et tombe mal. En effet, nous n'avons pas de données objectives sur le temps que les maires consacrent à leurs activités en tant qu'agents de l'État. Nous avons l'impression qu'un dédommagement uniforme a été prévu et qu'il n'est pas adapté à toutes les situations. Au mieux cette indemnité est-elle maladroite.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je vais redire ce qu'ont dit tous mes collègues ici, dont je partage totalement le point de vue.
D'un côté, il y a les dispositions prévues dans la loi portant création d'un statut de l'élu local, en particulier la valorisation de la DPEL, qui est essentielle et répond aux souhaits des élus locaux.
D'autre part, il y a la mise en place de cette sorte de prime de fin d'année annoncée par le Premier ministre, sans que l'on sache d'ailleurs ce qui l'a justifiée ni pourquoi son montant est de 500 euros et le même pour tout le monde.
Cette prime ne correspond à rien de précis, comme M. Kerrouche l'a expliqué à l'instant. Elle ne s'appuie sur aucune norme, ne répond à aucun critère. Elle est perçue non pas comme une sorte – comment dire ? – d'aumône, mais comme une prime destinée à faire en sorte que les gens ne soient pas trop mécontents.
Quand on discute avec les maires aujourd'hui, on se rend compte que le but n'est pas atteint. Cette mesure coûte de l'argent, mais elle n'est pas justifiée, en tout cas sous cette forme. Nous n'allons pas nous y opposer naturellement, car il appartient aux maires de décider. Reste que cette indemnité, qui ne nous paraît pas très cohérente, nous étonne.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement est à tout le moins très maladroit. Il tend à proposer l'instauration – je ne sais comment l'appeler – d'une prime de Noël, qui semble tomber du ciel. Certes, nous sommes en période de Noël, mais cette prime ne répond clairement pas aux attentes des maires et des élus locaux.
Notons que le montant de cette prime est le même pour tout le monde. Or je peux vous dire que ce n'est pas tout à fait la même chose d'être le maire d'une grande ville ayant des services municipaux et celui d'une commune de 200 habitants sans aucun service, ce qui suppose un engagement quasi quotidiennement. C'est une véritable problématique.
Ce que veulent les maires de communes rurales, c'est que l'on réponde à cette problématique – tel est l'objet de la loi portant création d'un statut de l'élu local –, qu'on les accompagne dans leurs missions, qu'on les aide à engager des travaux, à trouver des financements et de l'ingénierie.
Alors que les maires passent la moitié de leur temps, souvent seuls, à remplir des demandes de subventions, à monter des dossiers et des projets, ils attendent de l'État un accompagnement. C'est cela qui leur manque aujourd'hui.
Le petit geste de 500 euros pour Noël qu'a annoncé le Premier ministre dans un courrier, c'est très bien, mais il n'est franchement pas à la hauteur ; il est même un peu humiliant.
M. le président. La parole est à M. David Margueritte, pour explication de vote.
M. David Margueritte. Madame la ministre, vous êtes en permanence sur les territoires et vous connaissez parfaitement les préoccupations des élus. Vous ne pouvez donc pas ignorer le décalage complet entre la mesure annoncée par le Premier ministre et la préoccupation des élus locaux. Je comprends qu'il ne doit pas être simple pour vous de devoir défendre ce genre de mesure.
Je suis d'accord avec ce qu'ont dit mes collègues, que j'ai également entendu dire sur le terrain. Au mieux, les élus ont parlé d'« aumône ». On a entendu ce terme dans nos départements respectifs. Au pire, ils ont parlé de provocation au regard de l'enjeu.
Franchement, madame la ministre, au moment où les élus locaux ont le sentiment, parfois légitime, d'être pointés du doigt et perçus comme les responsables de la dette publique, alors que ce n'est pas le cas, qu'ils gèrent leur commune du mieux qu'ils peuvent, qu'ils votent des budgets à l'équilibre, qu'ils investissent, qu'ils portent leurs projets jusqu'au bout de leur mandat, ils voient en cette prime une opération de communication. Vous n'ignorez pas qu'elle a été accueillie avec fraîcheur lors du congrès des maires de France.
Les maires ont quitté le congrès en se demandant : « Mais qu'est-ce que c'est que cette affaire ? » Ils étaient venus parler de la parole de l'État sur les bases industrielles – nous avons eu l'occasion d'en parler ensemble, madame la ministre –, du Dilico et on leur a présenté une prime de fin d'année de 500 euros. Une telle prime n'est pas une reconnaissance du travail qu'ils accomplissent.
Dans le contexte actuel, alors que l'État ne tient pas parole et que les collectivités territoriales sont suspectées d'être responsables du déficit public, alors qu'elles n'y sont pour rien, la question de la rémunération des élus est un véritable sujet, qui mérite mieux que cela.
Je tenais à m'associer aux propos de mes collègues, car il me semble que nous partageons le même sentiment sur toutes les travées et que nous avons exactement les mêmes retours du terrain. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Baptiste Lemoyne et Henri Cabanel applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Mizzon. J'ai moi aussi été très surpris, comme tout le monde d'ailleurs, par l'annonce de cette prime.
Je me demande si le Premier ministre ne s'est pas trompé. Les élus municipaux ont une autre conception de leur rôle. Leur octroyer une telle prime peut donner à penser qu'il a voulu acheter l'adhésion de certains d'entre eux. On peut même y voir un certain mépris pour les élus locaux, qui méritent une autre forme de considération…
M. Jean-Michel Arnaud. Très juste !
M. Jean-Marie Mizzon. C'est enfin une maladresse. En voulant peut-être bien faire, le Premier ministre s'est mal comporté.
Je voterai néanmoins cet amendement.
Mme Françoise Gatel, ministre. Et voilà !
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Je ne sais pas si ce texte fait partie de votre cabinet de curiosités, madame la ministre – c'est une private joke. (Mme la ministre sourit.)
J'étais présent au congrès des maires de France quand cette prime a été annoncée. Je confirme ce qu'a dit notre collègue Margueritte : elle a été accueillie avec perplexité.
M. Olivier Paccaud. Les maires ont ri jaune !
M. Patrick Kanner. Pour ce qui nous concerne, mes collègues l'ont dit précédemment, nous voterons cet amendement avec un enthousiasme modéré.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Comme le PLFSS !
M. Patrick Kanner. Ce qui me gêne le plus, madame la ministre, c'est que vous savez bien que celles et ceux qui ne voteraient pas cet amendement seraient piégés. Nous sommes collectivement pris au piège !
Cet amendement constitue en outre une aberration. J'ai eu l'honneur d'être adjoint au maire de Lille pendant vingt-cinq ans, auprès de Pierre Mauroy durant deux mandats, puis de Martine Aubry durant deux autres mandats. Très honnêtement, les fonctions d'agent de l'État dont il est ici question sont essentiellement exercées par des adjoints : ils célèbrent les mariages dans la semaine et le samedi, assurent les gardes de nuit pour les placements d'office, etc. Or vous n'avez pas l'intention d'indemniser tous les adjoints au maire, je l'ai bien compris.
Votre amendement, madame la ministre – excusez-moi de le dire un peu brutalement –, est donc mal conçu. Nous le voterons, parce que c'est une nécessité de fait.
Mme Françoise Gatel, ministre. Ah !
M. Patrick Kanner. Vous souriez, car vous voyez bien que le piège est en train de se refermer. Je le regrette et j'espère que, au cours de nos débats, nous aurons d'autres motifs de satisfaction.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Je voterai évidemment cet amendement, mais je trouve tout de même assez curieux que l'on attribue la même indemnité de 500 euros à tous les élus – je partage les observations de mes collègues à cet égard –, que leur commune compte 100 000, 200 000 ou 300 000 habitants. Une telle mesure n'a pas beaucoup de sens. Une indemnité d'un montant modeste peut avoir du sens dans une petite commune, mais ne plus en avoir dans une commune de plus grande taille.
Si j'interviens, madame la ministre, c'est pour dire que le pire serait que nous votions cette prime de 500 euros sans mettre en œuvre la revalorisation, votée à l'unanimité au Sénat, des indemnités des maires des petites communes. Ce serait très mal perçu dans les territoires. Très franchement, la priorité des priorités, c'est cette revalorisation. (M. Jean-Michel Arnaud et Mme Ghislaine Senée applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je poserai deux questions sur cette prime, qui est entourée de flou.
Nous le savons, à l'issue de l'examen des crédits de la mission cet après-midi, la situation de nombreuses collectivités sera concrètement très dégradée. Ainsi, les dispositions votées sur les valeurs locatives foncières des bâtiments et terrains industriels dégraderont l'épargne des collectivités, comme un certain nombre d'autres mesures.
Dans ce contexte, les élus subiront des pressions pour diminuer le niveau des indemnités dans de nombreuses communes à l'issue des élections municipales. C'est ce qui va se passer concrètement au mois de mars, certains de nos collègues en ont parlé lors de l'examen de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local. Certaines indemnités seront peut-être augmentées, notamment dans les petites communes, mais dans bien d'autres s'exercera une pression à la baisse.
Une prime de Noël de 500 euros pour les maires, et seulement les maires, nous est aujourd'hui proposée.
Mme Françoise Gatel, ministre. Mais ce n'est pas une prime de Noël !
M. Grégory Blanc. Ma première question est la suivante : l'État verse une prime de 500 euros, soit une quarantaine d'euros par mois, aux maires dans le cadre du dédoublement fonctionnel, mais avez-vous procédé à une évaluation pécuniaire du travail effectué par les maires au titre de leurs fonctions d'agent de l'État ? Si oui, que représente-t-elle ?
Ma deuxième question est la suivante : une prime de Noël est versée, très bien. Va-t-elle perdurer ? C'est une question que se posent un certain nombre de maires. Nous devons connaître la portée de cette innovation.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. Vous avez le droit, et je le respecte totalement, de dire ce que vous dites, et sans doute avez-vous raison.
J'étais aussi présente au congrès des maires lorsque le Premier ministre a annoncé cette indemnité, lors d'un après-midi d'ailleurs assez calme : les maires l'ont applaudi… (Exclamations ironiques.)
M. Loïc Hervé. Parce qu'ils sont polis !
Mme Françoise Gatel, ministre. Je voulais que vous connaissiez la fin de la séquence.
Rien n'est obligatoire, monsieur le sénateur Loïc Hervé, pas même de voter cette prime. Si elle embarrasse, si elle gêne, chacun est libre, en son âme et conscience, de ne pas la voter, mais je vous le dis franchement : l'excès peut être caricatural.
Monsieur le sénateur Blanc, cette indemnité n'est pas une prime de Noël. Je n'ai jamais entendu le Premier ministre dire qu'elle serait versée à Noël. Nous pourrions faire le choix, si vous êtes républicain comme moi, de la verser le 14 juillet ; peut-être cela vous conviendrait-il mieux ? En tout état de cause, il s'agit d'une indemnité annuelle destinée à reconnaître la qualité d'agent de l'État du maire.
J'entends votre question : « Mais pourquoi donne-t-on la même somme au maire d'une commune de 100 habitants et à celui d'une commune de 600 000 habitants ? » Vous imaginez si l'on devait passer dix après-midi à trouver le juste montant, à nous demander s'il est trop faible ou excessif ? Nous ne nous en sortirions pas !
Très sincèrement, je vous sais profondément républicain, monsieur Mizzon, mais insinuer que le Premier ministre aurait acheté le congrès des maires en instaurant une prime de 500 euros n'est pas du niveau de cette assemblée.
M. Olivier Paccaud. Il l'a annoncée le jour du congrès des maires.
Mme Françoise Gatel, ministre. Quelques jours après sa prise de fonctions, le Premier ministre a pris la peine d'écrire à tous les maires, vous le savez sans doute. Il a reconnu leur engagement et indiqué qu'il souhaitait que la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local puisse aboutir avant les élections municipales, ce qui a été le cas. Je tiens d'ailleurs à vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, car je sais la manière dont le Sénat a travaillé sur ce sujet. Il a reconnu dans ce courrier, que vous avez dû tous lire, que le maire exerce des fonctions en tant qu'agent de l'État.
À partir de là, il y a deux solutions. Soit on considère que le maire est un agent de l'État et on le « fonctionnarise » pendant la durée de son mandat, comme c'est le cas en Allemagne et en Pologne. Soit on considère, et c'est le choix qu'a fait la France, et nous tenons beaucoup à ce modèle, qu'être maire est un engagement citoyen, que tout citoyen doit pouvoir être maire.
En plus de la protection fonctionnelle et du statut de l'élu que nous avons mis en place, nous sommes en train de travailler sur la simplification. Nombre d'entre vous étaient d'ailleurs présents hier au Roquelaure de la simplification. Nous travaillons sur la déconcentration et sur la différenciation, sur tous les leviers susceptibles de faciliter le travail du maire.
Vous habituellement si sages et raisonnables, je vous trouve excessifs lorsque vous dites que le Premier ministre aurait besoin d'acheter les élus locaux. Sébastien Lecornu a été maire et président d'un conseil départemental. Alors qu'il agit aujourd'hui en matière de simplification, de décentralisation, vous trouvez que ce n'est pas assez, que ce n'est pas bien. Vous êtes libres de le penser, mais sincèrement, il faut faire attention à ce que l'on dit.
J'ai moi aussi entendu des maires parler d'aumône, mais j'en ai entendu d'autres dire que cette prime était la reconnaissance de leur rôle en tant qu'agent de l'État et qu'ils étaient satisfaits de la revalorisation des indemnités. Et vous savez que je ne rapporte pas des propos que je n'ai pas entendus.
Vous voterez en votre âme et conscience. Pour ma part, je ne retirerai pas mon amendement, vous l'imaginez bien. Je ne viens pas faire l'aumône, et non, cet amendement n'est pas le début d'un cabinet de curiosités, monsieur Kanner. J'en présenterai beaucoup moins que vous ne l'avez fait jadis ! Beaucoup savent ici de quoi nous parlons…
Il s'agit d'une contribution…
M. Olivier Paccaud. C'est de la générosité intéressée !
Mme Françoise Gatel, ministre. Non, ce n'est pas de la générosité, c'est une contribution. (Protestations sur diverses travées.)
M. le président. Mes chers collègues, seule Mme la ministre a la parole.
M. Olivier Paccaud. Elle parle depuis cinq minutes !
Mme Françoise Gatel, ministre. Les maires restent libres et font ce qu'ils veulent. Je rappelle que cette indemnité ne crée pas un lien de dépendance entre le maire et l'État, car le Gouvernement ne choisit pas les maires. Ils sont élus par nos concitoyens et peuvent dire très librement ce qu'ils pensent.
Je rappelle que cette indemnité sera versée à la commune, qui la reversera ensuite au maire, qui est le représentant de l'État dans la commune, même s'il délègue certaines compétences.
Quoi qu'il en soit, je vous remercie de l'intérêt dont vous avez témoigné à l'occasion de cette discussion.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1954 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1952, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
– |
+ |
– |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
7 169 027 |
|
7 169 027 |
|
Concours spécifiques et administration |
618 691 |
|
618 691 |
|
TOTAL |
7 787 718 |
|
7 787 718 |
|
SOLDE |
+7 787 718 |
+7 787 718 |
||
La parole est à Mme la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. Cet amendement vise à procéder à divers ajustements des compensations financières versées aux collectivités territoriales ou à leurs groupements via la dotation générale de décentralisation (DGD) dont les crédits relèvent du programme 119, ou via la dotation générale de compensation (DGC) pour certaines collectivités d'outre-mer à statut particulier dont les crédits relèvent du programme 122, pour un montant de 7,787 millions d'euros.
Je rappelle, car nous avons beaucoup de questions sur ce sujet, qu'avec ce montant, l'État tiendra parole concernant les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi), que les régions nous ont demandé de rétablir, les formations sanitaires et les indemnités des stagiaires en formation professionnelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur ces ajustements de dotation générale de décentralisation et de dotation générale de compensation, qui sont constitutionnellement dus.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1952.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1743 rectifié, présenté par MM. Canévet, Mizzon, Menonville, Cambier, Folliot, Longeot, Delahaye et Duffourg, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
|
|
|
|
TOTAL |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
SOLDE |
- 10 000 000 |
- 10 000 000 |
||
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de cet amendement qui vise à raboter des dotations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Je porte le même regard sur cet amendement tendant à raboter les dotations aux collectivités.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1743 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques.
L'amendement n° II-35 rectifié quater est présenté par Mme Noël, MM. Pellevat et J.B. Blanc, Mme V. Boyer, MM. Panunzi, Genet et H. Leroy et Mmes Goy-Chavent et Bellurot.
L'amendement n° II-738 rectifié ter est présenté par MM. Menonville, Henno et Fargeot, Mme Gacquerre, MM. Pillefer et Dhersin, Mmes Jacquemet, Sollogoub et Housseau, MM. Levi et Duffourg, Mme Saint-Pé, M. Hingray, Mme Bourguignon, M. Bleunven et Mmes Morin-Desailly et Antoine.
L'amendement n° II-1094 rectifié bis est présenté par Mme Lassarade, M. Cambon, Mmes Malet, Berthet, Richer et Bellamy, M. Pointereau et Mme Imbert.
L'amendement n° II-1409 rectifié bis est présenté par Mmes N. Delattre et M. Carrère, MM. Cabanel, Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Laouedj, Masset, Roux et Bilhac.
L'amendement n° II-1698 rectifié bis est présenté par M. Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Fagnen, Mme S. Robert, M. Bourgi, Mme Le Houerou, M. Michau, Mmes G. Jourda et Poumirol, MM. Pla, Temal, Chaillou, Devinaz et Gillé, Mme Matray, MM. Tissot, Omar Oili et Redon-Sarrazy, Mmes Brossel et Artigalas, M. M. Weber, Mme Bélim et MM. Mérillou, Roiron, Vayssouze-Faure et Cozic.
L'amendement n° II-1772 rectifié bis est présenté par MM. Uzenat et P. Joly et Mme Conconne.
L'amendement n° II-1857 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
270 000 000 |
|
270 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
270 000 000 |
|
270 000 000 |
|
TOTAL |
270 000 000 |
270 000 000 |
270 000 000 |
270 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Sylviane Noël, pour présenter l'amendement n° II-35 rectifié quater.
Mme Sylviane Noël. Je reviens sur un sujet dont nous avons déjà largement débattu la semaine dernière, sur lequel je suis mobilisée depuis près de deux ans. Il s'agit du transfert de la liquidation des taxes d'urbanisme vers la direction générale des finances publiques (DGFiP), qui a entraîné un désordre indescriptible dans le recouvrement de la taxe d'aménagement pour toutes les communes. Cela a mis à mal la trésorerie de ces dernières, ainsi que celle des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE).
Ainsi, pour la seule année 2024, le reversement moyen de la part départementale de la taxe d'aménagement (TA) a chuté de 40 %. Dans un communiqué du 29 janvier 2025, le ministère de l'économie et des finances reconnaissait des difficultés et affirmait que les sommes seraient recouvrées rapidement. Or, à ce jour, ni le calendrier ni le montant desdits recouvrements ne sont précisés.
Les missions des collectivités et des CAUE ne doivent, bien sûr, pas être mises en danger par cette réforme improvisée et calamiteuse. Tel est donc le sens de cet amendement, qui vise à compenser auprès des départements la perte de recettes et à leur permettre de soutenir concrètement les CAUE.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l'amendement n° II-738 rectifié ter.
M. Franck Menonville. Cet amendement est identique au précédent. Il s'agit de corriger les effets néfastes de cette réforme fiscale, qui pénalise lourdement les CAUE, dont l'action est essentielle pour nos territoires.
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l'amendement n° II-1094 rectifié bis.
Mme Martine Berthet. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l'amendement n° II-1409 rectifié bis.
M. Henri Cabanel. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l'amendement n° II-1698 rectifié bis.
M. Franck Montaugé. L'affaiblissement financier des départements et les graves dysfonctionnements de la gestion de la taxe d'aménagement par l'État remettent en question l'existence même de certains CAUE et diminuent les pouvoirs d'intervention des autres au service des communes et des populations, qu'il s'agisse de projets d'aménagement de l'espace public, de transition écologique ou d'amélioration de la qualité du cadre de vie.
Or rien, absolument rien, au regard des missions exercées, ne justifie la disparition annoncée des CAUE. En acceptant d'affecter 270 millions d'euros à leur soutien, nous redonnerions un peu de visibilité et d'espérance aux communes, aux départements et aux CAUE eux-mêmes.
Fait important, en première partie du projet de loi de finances, l'amendement n° I-1173 des rapporteurs spéciaux Sautarel et Briquet, que le Sénat a adopté et qui porte sur le même sujet, comporte une erreur rédactionnelle. En effet, sont exclus du dispositif les conseils départementaux, donc, de fait, les CAUE, ce qui est loin d'être un détail.
L'amendement que je vous propose, s'il était adopté, permettrait donc d'éviter de parier sur une correction hypothétique en commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour présenter l'amendement n° II-1772 rectifié bis.
M. Simon Uzenat. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l'amendement n° II-1857.
M. Guy Benarroche. Défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Comme vous le savez tous, nous avons récemment mené un contrôle flash sur le sujet, ayant donné lieu à un rapport d'information intitulé Les dysfonctionnements dans la collecte de la taxe d'aménagement et leurs conséquences financières pour les collectivités territoriales et les CAUE. Toutes les difficultés concernant le recouvrement de la taxe d'aménagement sont donc bien identifiées. En conséquence, nous avons présenté trois amendements à la première partie du projet de loi de finances, qui ont été adoptés.
Toutefois, nous sommes conscients de la difficulté, mentionnée par Franck Montaugé, l'un d'entre eux n'étant qu'à moitié opérant. Or, ce dernier n'est pas le moindre, puisqu'il s'agit d'avances qui permettraient de pallier les difficultés, le temps que le mécanisme de recouvrement soit pleinement fonctionnel. Sur ce point, je prends l'engagement de corriger cette difficulté, qui n'est pas insurmontable. Les services s'y emploient, de manière que cet amendement soit pleinement opérant.
Nous vous proposons donc le retrait de l'ensemble de ces amendements, puisque, comme je l'ai dit, nos trois amendements ont été adoptés en première partie. En outre, nous devons tenir compte du fait que le fonds de sauvegarde a été doublé pour les départements. Vous en conviendrez, cela leur donne une bouffée d'air et leur permettra d'aider certains CAUE.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. J'entends ce que vous dites, madame Noël. Nous ne contestons pas le fait que le dispositif ne fonctionne pas.
M. Loïc Hervé. Nous sommes bien d'accord !
Mme Françoise Gatel, ministre. Actuellement, nous avons résorbé 75 % du stock à reverser. Nous savons, en outre, que le produit enregistre une baisse de l'ordre de 25 %, compte tenu de la dégringolade de la production de logements.
Je rappelle que la réforme intègre le décalage. En effet, auparavant, la taxe d'aménagement était payée en tout ou partie au moment du dépôt du permis ; maintenant, elle l'est à l'achèvement des travaux. Cela implique donc un report du versement et un risque, notamment de la part des particuliers, qui pourraient oublier de s'en acquitter. J'invite donc le Sénat à se pencher à nouveau sur cette dotation.
En tout état de cause, compte tenu de ce que vous avez voté en première partie, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai le même avis que Mme la rapporteure spéciale. Même si le Gouvernement était défavorable aux amendements alors adoptés, je considère qu'il est inutile d'adopter deux fois la même disposition.
M. le président. Madame Noël, l'amendement n° II-34 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Sylviane Noël. Si les amendements votés la semaine dernière permettent de répondre en partie à cette exigence de recouvrement, je veux bien retirer mon amendement.
En revanche, madame la ministre, il est temps de revenir sur le véritable problème posé par cette taxe, qui ne tient pas seulement au transfert de son produit à la DGFiP. En effet, c'est le fait générateur qui doit être repensé : auparavant, le versement était automatique, car il était déclenché à la délivrance de l'autorisation d'urbanisme, alors que désormais, il faut attendre l'achèvement du chantier. Voilà ce qui crée un véritable désordre. Il faut que vous vous y atteliez rapidement.
M. le président. Madame Berthet, l'amendement n° II-1094 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Martine Berthet. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos II-34 rectifié quater et II-1094 rectifié bis sont retirés.
La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je souscris pleinement aux propos de ma collègue Noël. Le problème n'est pas seulement celui d'une administration défaillante, dont je ne doute pas qu'il va se résorber. Il s'agit bien d'une question de fond, qui porte sur les ressources nécessaires à l'accomplissement de missions fondamentales pour les territoires, pour les communes et pour les populations.
J'ai entendu les propos de Mme la rapporteure spéciale ; l'affaire n'en demeure pas moins fondamentale, donc nous maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. En effet, il est important de maintenir ces amendements. Pourquoi ?
En premier lieu, parce que le fonds de sauvegarde, à l'époque où il a été négocié, ne tenait compte ni du décalage du paiement pour les CAUE ni, surtout, de la réduction de l'enveloppe. C'est donc une charge supplémentaire qui va peser sur ledit fonds de sauvegarde, diminuant d'autant l'effet de celui-ci pour les départements en difficulté.
En second lieu, parce que lorsque l'on opère tel un décalage temporel, parfaitement prévisible par la direction générale des finances publiques, on sait très bien qu'il y aura trois années de portage à effectuer avant que les procédures de recouvrement puissent opérer correctement. L'État est donc responsable de ne pas avoir anticipé ce besoin, ce qui doit être parfaitement assumé.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Garcimore disait : « Des fois ça marche, des fois ça marche pas. » (Sourires.)
Quand on remplace un dispositif qui fonctionne, même avec des imperfections, par quelque chose qui ne marche pas, la meilleure des manières est de revenir au premier système.
Nous avons eu, dans cet hémicycle, droit à des explications complètement lunaires et technocratiques de la part de vos collègues du Gouvernement, madame la ministre, notamment à Bercy. Il s'agissait de donner les raisons objectives pour lesquelles la perception ne fonctionnait plus.
Revenons-en au système antérieur, qui était opérationnel. « Des fois ça marche, des fois ça marche pas ! » (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Je souhaitais simplement apporter deux informations complémentaires à nos collègues, avant de procéder au vote.
Premièrement, je rappelle que ce sujet a été traité en première partie, puisqu'il s'agit d'un prélèvement sur recettes (PSR), d'une manière qui permet de répondre à la problématique, même s'il subsiste un sujet de fond qui appelle à une concertation, afin de résoudre le problème du fait générateur et de la surface taxable, au-delà de l'urgence.
Deuxièmement, si l'un de ces amendements était voté, il opérerait un prélèvement sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements ». Or, puisqu'il n'est pas possible de ponctionner la dotation générale de décentralisation (DGD), cela signifie que l'on siphonnerait les dotations d'investissement des collectivités. Je vous engage donc, mes chers collègues, à vous en tenir à ce qui a été voté en première partie.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-738 rectifié ter, II-1409 rectifié bis, II-1698 rectifié bis, II-1772 rectifié bis et II-1857.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° II-1469, présenté par MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
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Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
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200 000 000 |
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200 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
200 000 000 |
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200 000 000 |
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TOTAL |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. Cet amendement tend à remédier à la non-compensation de la suppression de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les logements sociaux, qui touche de nombreuses communes de banlieue. Celles-ci ayant une forte proportion d'habitat social, l'État s'était engagé à neutraliser les pertes de recettes correspondantes. Cela représente 1 milliard d'euros à l'échelle du pays, alors que la compensation ne s'élève qu'à 40 millions d'euros. Je le redis : 40 millions d'euros versés à ces communes pour 1 milliard d'euros de manque à gagner.
Dans ces villes, on voit peu de pavillons. Parfois, il n'y a que du logement social et les habitants connaissent, de surcroît, plus de difficultés que la moyenne. Dans ces conditions, il est évident que, sans compensation, même si nous mettons en œuvre toutes les politiques de la ville, toutes les dotations, tous les dispositifs d'accompagnement, si l'on ne s'attaque pas au problème à la racine, cela ne marchera pas.
Dans ma commune, dont le budget de fonctionnement atteint 19 millions d'euros, le manque à gagner est de 1 million d'euros. La politique de la ville, que d'aucuns considèrent comme un jackpot, apporte un peu plus de 100 000 euros seulement. J'y insiste : 1 million d'euros de manque à gagner, pour 100 000 euros au titre de la politique de la ville.
Ainsi, cet amendement tend à prévoir 200 millions d'euros pour que l'État tienne sa promesse d'il y a quelques années. Bien évidemment, n'étant pas naïf, je suis conscient du fait qu'un amendement où est inscrit un tel montant, dans la situation que nous connaissons, ne sera pas adopté, vu l'orientation de la majorité sénatoriale.
Toutefois, si nous ne posons pas clairement les termes du débat, si nous ne les inscrivons pas dans la durée, nous continuerons de reproduire le scénario de la première partie, avec, par exemple, le prélèvement sur recettes destiné à compenser la baisse des valeurs locatives des établissements industriels (PSR VLEI). Au final, cette spirale sans fin risque d'affaiblir certaines communes davantage que d'autres, notamment les communes de banlieue.
Cet amendement a été travaillé avec l'association des maires Ville & Banlieue de France.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. La question que soulève notre collègue est parfaitement légitime. Simplement, elle doit être traitée en première partie, et non au cours de l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
En effet, la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties a subi de nombreuses évolutions depuis 2009, avec une minoration jusqu'à 2017, puis, en 2022, une nouvelle prise en charge. Cependant, cette dernière ne couvre pas intégralement les exonérations, comme l'a rappelé notre collègue. Le dispositif est en vigueur jusqu'au 30 juin 2026.
Si votre amendement était adopté, son gage, qui concerne le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », conduirait à une baisse des dotations d'investissement, sauf si le Gouvernement devait le lever.
La commission des finances a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Monsieur le sénateur Grégory Blanc, je comprends votre question, à laquelle l'État a déjà apporté des réponses. Ainsi, les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties font historiquement bien l'objet d'une compensation. Nous avons même adopté des correctifs dans les lois de finances, entre 2009 et 2017. Cela représente, aujourd'hui, un peu plus de 45 millions d'euros.
Je rappelle que le Gouvernement est même allé au-delà de la compensation des seules diminutions de recettes induites par des allégements fiscaux additionnels, en aidant les communes et les EPCI qui subissent une perte soudaine de revenu liée à cette taxe.
Considérons qu'il s'agit d'un amendement d'appel et de réflexion en vue de la réforme des finances locales, j'émets, comme M. le rapporteur spécial, une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Il ne s'agit pas d'un amendement de première partie. En effet, si tel était le cas, cela signifierait que nous considérerions que le logement social ne devrait plus être encouragé au travers d'exonérations de taxe foncière. Or, au regard de la réalité du budget, il s'agit, aujourd'hui, de la principale source de soutien au logement social.
Cet amendement vise à affirmer que l'État doit assumer ses responsabilités. Certes, sur la période qui s'étend de 2021 à 2026, des compensations ont été mises sur la table. En revanche, pour les logements sociaux construits précédemment, comme vous l'avez dit vous-même, madame la ministre, et comme Bercy le reconnaît de manière très claire, seuls 40 millions d'euros ont été versés sur le milliard d'euros qui aurait dû l'être. Ces chiffres sont factuels.
Il me semble donc nécessaire d'avancer sur ce sujet, qui contribue à des déséquilibres graves au niveau de nos territoires entre les communes plus aisées et celles qui accueillent du logement social.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1469.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1862, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
85 000 000 |
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85 000 000 |
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Concours spécifiques et administration |
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85 000 000 |
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85 000 000 |
TOTAL |
85 000 000 |
85 000 000 |
85 000 000 |
85 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement vise à assurer la compensation intégrale par l'État des dépenses engagées par les départements au titre de l'extension de la revalorisation salariale Ségur aux personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) privés à but non lucratif relevant de leur compétence, tels que les foyers de l'enfance, les établissements d'hébergement pour personnes handicapées ou âgées et les services d'accompagnement social et éducatif.
Nous entendons ainsi répondre à la demande unanime des départements et des acteurs du secteur social et médico-social, qui alertent depuis plusieurs mois sur l'insuffisance des compensations versées par l'État dans le cadre du Ségur pour tous. En effet, il n'est prévu, à ce jour, qu'une prise en charge de 50 % du surcoût qui pèse sur les départements, dont le montant est de 170 millions d'euros.
La situation des départements est parfois difficile, comme la chambre régionale des comptes d'Occitanie le rappelait. Les ressources des départements suivent un modèle cyclique, sensible aux retournements de conjoncture économique et inadapté au financement de leurs compétences sociales obligatoires.
Aussi, au travers de cet amendement, les membres du groupe écologiste entendent obliger l'État à assumer le coût de ses décisions et à tenir ses promesses, particulièrement lorsque sont concernés les services sociaux et médico-sociaux.
Le prélèvement de 85 millions d'euros sur le programme 122 « Concours spécifiques et administration » a pour seul objet de satisfaire aux règles de recevabilité financière. Nous demandons donc au Gouvernement de lever le gage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Cet amendement a pour objet la compensation intégrale de l'extension du Ségur au secteur médico-social.
Un arrêté ministériel a été publié en juin 2024, qui vise à agréer certains accords de travail dans le secteur sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif. Ces accords étendent la prime Ségur à environ 112 000 salariés qui en étaient auparavant exclus. L'association Départements de France estime ce coût à 170 millions d'euros pour les collectivités qu'elle représente.
En avril dernier, cette association et le Gouvernement sont parvenus à un compromis aux termes duquel, dès 2025, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) apportera un soutien pérenne aux départements à hauteur de 85 millions d'euros, soit la moitié du coût estimé. Cet accord a été inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.
J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Monsieur le sénateur Benarroche, je vous donne rendez-vous vendredi pour décider de la réponse à votre question, puisque les 85 millions d'euros dont vous parlez ont été inscrits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, tel qu'il vient d'être voté à l'Assemblée nationale et qu'il sera soumis à votre suffrage vendredi.
Ainsi, si le PLFSS est voté, les 85 millions d'euros seront pourvus. Il s'agit donc d'une demande de retrait, votre amendement étant satisfait, sous réserve de votre vote de vendredi.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1862.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1861, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
22 000 000 |
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22 000 000 |
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Concours spécifiques et administration |
|
22 000 000 |
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22 000 000 |
TOTAL |
22 000 000 |
22 000 000 |
22 000 000 |
22 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement vise à compenser les financements non perçus par les établissements associatifs de formation en travail social au titre des revalorisations salariales Ségur, annoncées en 2024, mais non versées à ce jour.
J'ignore si j'obtiendrai satisfaction grâce au projet de loi de financement de la sécurité sociale en ce qui concerne mon amendement. Cependant, si cela peut se faire dès aujourd'hui, c'est encore mieux.
Les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaitent alerter sur les fortes inquiétudes exprimées par les organismes gestionnaires d'établissements sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif, représentés, entre autres, par Nexem, principale organisation professionnelle du secteur, concernant l'application effective du Ségur pour tous.
Ainsi, en 2024, le plan Ségur prévoyait des revalorisations salariales, notamment au travers d'une prime Ségur, qui devait s'appliquer à l'ensemble des professionnels de la branche. Cette obligation s'applique donc aussi aux organismes gestionnaires d'établissements sociaux et médico-sociaux. Or cette prime, décidée par l'État, n'est toujours pas appliquée dans les ESMS, qui n'ont pas reçu les compensations adéquates. Certaines régions ont indiqué ne pas disposer des fonds nécessaires.
Le secteur médico-social peine à devenir attractif et certaines associations qui œuvrent dans ce domaine éprouvent des difficultés à faire fonctionner leurs structures, qui accueillent et accompagnent un public vulnérable. Aussi notre groupe entend-il, avec cet amendement, relever les crédits octroyés, afin que les régions puissent compenser les surcoûts liés à la prime Ségur, à hauteur de 22 millions d'euros.
Ce prélèvement est opéré sur le programme 122 « Concours spécifiques et administration ». Toutefois, nous demanderons au Gouvernement de lever ce gage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Le sujet de cet amendement est le même que celui du précédent, concernant, cette fois, les régions. Cela relève également du projet de loi de financement de la sécurité sociale, même si ce dernier, sur ce point précis, ne nous semble pas aussi satisfaisant.
Toujours est-il que cette problématique ne peut être traitée dans le cadre du présent projet de loi de finances. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Ce point très important n'a juridiquement pas sa place dans le présent texte. En effet, il relève soit de la mission « Santé », soit du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Comme je l'ai dit, l'État s'est engagé à respecter la parole donnée aux régions pour la formation dans les Ifsi. Par conséquent, j'émets une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1861.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1858, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
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Concours spécifiques et administration |
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50 000 000 |
|
50 000 000 |
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Lors de l'annonce du plan France Ruralité, le 15 juin 2023, le Gouvernement soulignait l'importance de mieux rémunérer les aménités rurales, notamment par une hausse de la dotation biodiversité, ainsi portée à 100 millions d'euros.
Or ce sujet est emblématique de la différence entre les discours et les moyens qui les suivent. Si le Gouvernement de l'époque, quatre Premiers ministres s'étant succédé depuis, avait alors déclaré vouloir mieux rémunérer les aménités rurales, malheureusement, aujourd'hui, l'enveloppe n'est que de 110 millions d'euros.
Cela est étrange, car le rapport sur le financement de la stratégie nationale biodiversité 2030 (SNB), publié en 2022, estimait les besoins à 689,5 millions d'euros. La biodiversité et sa protection doivent être au cœur des politiques de transition environnementale que peuvent et doivent mettre en œuvre nos collectivités, ce qu'elles font parfois, malgré la carence de l'État.
Il n'y a pas si longtemps, le Sénat, au travers du rapport Engager et réussir la transition environnementale de sa collectivité, dont Laurent Burgoa, Pascal Martin et moi-même sommes les auteurs, rendu au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, a mis l'accent sur ce besoin d'accès à des fonds pour implémenter les politiques de transition environnementale.
Les membres de mon groupe souhaitent donc, avec cet amendement, permettre au Gouvernement de mieux tenir ses promesses, pour une fois, en matière de biodiversité et de ruralité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous connaissez l'engagement du Sénat, mais aussi celui de la commission des finances, en faveur de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales (DSCAR). En effet, l'année dernière, j'avais même proposé de renforcer les moyens qui y étaient alloués, grâce à une rallonge de 10 millions d'euros portant ladite dotation à 110 millions d'euros.
Je souligne que les moyens accordés ont été multipliés par plus de vingt depuis 2019, puisqu'ils sont passés de 5 millions d'euros à 100 millions, puis 110 millions d'euros.
La hausse demandée constitue une nouvelle demande substantielle, même si nous comprenons l'esprit et la finalité qui la sous-tendent. C'est la raison pour laquelle je sollicite l'avis du Gouvernement, notamment sur son intention de lever ou non le gage de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Ce sujet est important, personne ne conteste votre propos.
Je rappelle qu'il existe, pour un montant initial de 5 millions d'euros, une dotation consacrée à la biodiversité. Dans le cadre des contrats de ruralité, créés par le Gouvernement, ont été prévues les aménités rurales, qui tendent à faire valoir les apports de la ruralité en matière de biodiversité, d'entretien d'espaces, etc.
Ainsi, cette dotation vise à reconnaître les apports de la ruralité, sujet sur lequel Michaël Weber, président de la Fédération des Parcs naturels régionaux de France, que je suis très heureuse de saluer, pourra confirmer ou infirmer mon propos. Son montant, passé de 5 millions d'euros à 40 millions d'euros en 2023, a été porté à 110 millions d'euros par l'État. Vous voyez donc que notre effort est significatif.
Or ce financement, qui correspond aux aménités rurales, a pour objet de compenser, d'aider des communes qui subissent des contraintes, même si celles-ci sont positives, puisqu'elles découlent de l'appartenance, soit au réseau Natura 2000, soit à un parc naturel régional (PNR). Il s'agit donc d'accompagner les 9 000 collectivités concernées, pour qu'elles puissent respecter leurs engagements.
Le maintien de la dotation à 110 millions d'euros est un effort significatif consenti par l'État dans le cadre d'un budget frugal. Cela étant, les critères d'éligibilité aux aménités rurales peuvent soulever des interrogations. Aujourd'hui, comme je l'ai mentionné, sont concernées les communes qui ont fait le choix d'être en zone Natura 2000 ou d'être membres d'un PNR. On pourrait envisager de rendre éligibles un plus grand nombre de communes.
À ce stade, nous ne pouvons pas bouleverser l'équilibre actuel. Je vous invite cependant à pousser la réflexion dans le cadre de vos travaux sur la réforme des finances locales. L'amendement est satisfait : demande de retrait.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1858.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1771 rectifié, présenté par MM. Uzenat, Bourgi et Gillé, Mmes Le Houerou et Bélim, MM. Mérillou et Pla, Mme Bonnefoy, MM. Tissot, P. Joly et M. Weber, Mmes Poumirol et Conconne et M. Chaillou, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
3 500 000 |
|
3 500 000 |
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Concours spécifiques et administration |
|
3 500 000 |
|
3 500 000 |
TOTAL |
3 500 000 |
3 500 000 |
3 500 000 |
3 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Simon Uzenat.
M. Simon Uzenat. Madame la ministre, cet amendement ne vise pas à un bouleversement. Il s'agit d'un abondement de 3,5 millions d'euros à la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales, afin de permettre à cent quarante-six communes de quarante départements, écartées du dispositif par la loi de finances pour 2024, d'en bénéficier.
En effet, la plupart d'entre elles sont soit membres d'un parc naturel régional – je salue à mon tour le président national de la fédération de ces parcs –, soit concernées par une zone de protection forte. Elles assument donc des charges de centralité écologique, madame la ministre. Bien évidemment, il s'agit d'une très bonne chose, pour elles comme pour leur territoire, mais cela appelle le retour du soutien de l'État.
Un rapport sénatorial a confirmé l'importance dudit soutien, notamment en matière de protection de l'environnement. Par conséquent, nous devons assurer une cohérence entre les engagements que nous attendons des élus locaux et les moyens que l'État met sur la table.
Tel est l'objet de cet amendement. Je rappelle que le montant que nous proposons, de 3,5 millions d'euros, permettra à 146 communes de bénéficier d'une aide à laquelle elles peuvent justement prétendre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Cet amendement, déjà déposé l'année dernière, me semble-t-il, vise à opérer un rattrapage au profit de communes qui bénéficiaient précédemment de la dotation biodiversité et qui ne bénéficient plus de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales à la suite des modifications qui ont été introduites.
Il introduit de la complexité en se référant à l'ancienne dotation et fige une situation. Aussi la commission des finances y est-elle défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Il s'agit d'un dispositif. Pour entrer dans un dispositif, il faut répondre à des conditions ; quand on n'y répond plus, on en sort. Cela peut être douloureux, mais c'est la règle.
Je rappelle que nous sommes passés à 9 000 communes bénéficiaires, soit une augmentation de 3 000. Il n'est pas possible d'agir de manière rétroactive.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.
M. Michaël Weber. Comme vous l'avez très justement dit, madame la ministre, la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales est la poursuite de la dotation biodiversité, qui avait été mise en place, je le rappelle, par Joël Giraud…
M. Jean-Michel Arnaud. Très bien !
M. Michaël Weber. … à la suite d'une non-compensation de la taxe foncière sur les propriétés non bâties dans les espaces protégés, notamment dans les zones Natura 2000.
Il est bon de rappeler l'histoire, car le titre et sans doute les attentes qui ont été suscitées par cette dotation ont quelque peu évolué. Cela jette probablement le trouble sur son devenir.
Bénéficier de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales est en effet une forme de fierté. Les communes concernées répondent à un certain nombre de contraintes : soit parce qu'elles s'engagent en faveur de l'environnement, au travers d'une réserve naturelle ou d'une zone Natura 2000, soit parce qu'elles appartiennent à un parc naturel régional, elles multiplient les efforts en matière de biodiversité.
Cette dotation vise en effet à faire effet de levier dans ce domaine et vous savez que la Fédération des parcs naturels régionaux de France y est très attachée.
Comme le disait mon collègue Simon Uzenat, certaines communes sont en effet dans une forme d'incompréhension : elles ont été bénéficiaires de la dotation et ne le sont plus en raison d'une évolution des critères.
Il me semble que l'adoption de cet amendement permettrait de régler cette petite injustice, en attendant de trouver un moyen pour que l'ensemble des communes, ne serait-ce que par un montant plancher, soient reconnues pour leur classement ou leur contribution à l'effort en faveur de la biodiversité.
M. le président. Mes chers collègues, je vous remercie de veiller à ne pas trop allonger les débats. À ce rythme, nous ne parviendrons pas à voter les crédits de la mission dans les temps impartis.
La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.
M. Simon Uzenat. Je serai bref. Madame la ministre, il ne s'agit pas de rétroactivité. Mon propos visait à rappeler que les collectivités dont nous parlons ont bénéficié d'une aide par le passé.
Sauf à considérer qu'une telle aide était illégitime,…
Mme Françoise Gatel, ministre. Je n'ai pas dit cela !
M. Simon Uzenat. Il n'y a donc pas de problème à demander que ces communes puissent être aidées de nouveau. En effet, elles se sont engagées en faveur de la biodiversité.
Dans mon département, la commune de Séné, située dans un parc naturel régional, possède une réserve nationale sur son territoire. Cela implique de très lourdes responsabilités.
Madame la ministre, l'État doit être au rendez-vous. Vous évoquez un élargissement à de nouvelles communes. Nous en sommes très heureux, puisque nous avons voté l'augmentation de l'enveloppe de cette dotation. Il n'y a pas de raison néanmoins que les communes qui étaient à juste titre accompagnées jusqu'ici ne le soient plus.
Nous ne proposons nullement une rétroactivité ; nous demandons simplement que, à compter de 2026, l'État soit aussi à leurs côtés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1771 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1739 rectifié, présenté par MM. Canévet, Mizzon, Longeot, Menonville, Cambier, Duffourg et Folliot, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
1 000 000 |
|
1 000 000 |
|
Concours spécifiques et administration |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Cet amendement vise à intégrer dans le dispositif des « aménités rurales » le périmètre de protection des captages d'eau A. Pour les territoires concernés, il s'agit d'une contrainte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Cet amendement tend à prévoir implicitement un élargissement de la dotation et pose à cet égard des difficultés de financement.
Par ailleurs, sa rédaction ne prévoit pas de modifier le code général des collectivités territoriales (CGCT), ce qui le rend inopérant. Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Même avis, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Canévet, l'amendement n° II-1739 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Canévet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-1739 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-1860, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
Concours spécifiques et administration |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires vise à augmenter les crédits de soutien à l'investissement des communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) afin de préserver leur capacité d'investissement.
Les collectivités territoriales sont les premiers investisseurs publics et représentent 58 % de l'ensemble des investissements.
Cette capacité à investir est essentielle pour répondre au mieux, et surtout au plus vite, aux défis auxquels nous faisons face.
Pour le seul défi climatique, les investissements nécessaires s'élèvent à 21 milliards d'euros à l'horizon de 2030. Nous connaissons les problèmes d'obsolescence de certains équipements et les conséquences catastrophiques que peuvent entraîner les sous-financements chroniques. Nous le constatons par exemple sur certains réseaux d'eau.
Les collectivités sont responsables et s'attellent à résoudre ces difficultés. Elles ne peuvent le faire cependant qu'avec une vision pluriannuelle. Or cette visibilité manque cruellement.
Par cet amendement, notre groupe entend renforcer les crédits des concours financiers qui peuvent être accordés aux EPCI.
Nous prélevons les crédits correspondants sur le programme 122 « Concours spécifiques et administration » pour des raisons de recevabilité de l'amendement, mais nous appelons le Gouvernement à lever le gage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. La commission émet malheureusement un avis défavorable sur cet amendement.
Comme cela a été rappelé, les dotations d'investissement en faveur des collectivités affichent une baisse de 200 millions d'euros.
La hausse de 58 millions d'euros des crédits de paiement par rapport à 2025 doit permettre de financer les restes à payer. Vous avez certainement reçu, comme moi, des alertes de votre département sur le manque de fonds disponibles : il faut donc faire en sorte de financer les projets déjà en cours.
Enfin, un dernier argument plaide en défaveur de cet amendement : en l'absence de levée du gage, son adoption entraînerait une baisse de la dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques ou géologiques (DSEC).
Je maintiens donc à regret cet avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1860.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1447 rectifié, présenté par M. Pla, Mmes Artigalas et Bélim, MM. Bouad et Bourgi, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic et Gillé, Mmes Harribey, G. Jourda, Le Houerou et Matray, MM. Mérillou et Michau, Mme Poumirol et MM. Roiron, Tissot, Uzenat, Vayssouze-Faure et M. Weber, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
30 000 000 |
|
30 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
30 000 000 |
|
30 000 000 |
|
TOTAL |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Pierre-Alain Roiron.
M. Pierre-Alain Roiron. Cet amendement fait suite aux incendies qui ont durement touché notre pays cet été.
Il tend à créer un fonds de soutien exceptionnel pour accompagner les collectivités victimes de telles catastrophes, qui ont de lourdes conséquences sur les territoires concernés et posent de nombreuses difficultés en matière d'environnement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Le premier cosignataire de cet amendement est Sebastien Pla, sénateur de l'Aude, un département particulièrement sinistré cet été.
Toutefois, la question est plus large : il s'agit, par cet amendement, de garantir, après mobilisation des différents financements, un reste à charge égal à zéro pour les travaux de reconstruction qui incombent aux collectivités touchées par un sinistre.
Le chiffrage proposé semble peu étayé et la commission n'a pas été en mesure de le confirmer. L'étendue des dépenses non assurables engagées par les collectivités et ne pouvant être couvertes par programme 122 « Concours spécifiques et administration » est en effet difficile à apprécier.
Toutefois, au regard de la pertinence du sujet, la commission sollicite l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Ma réponse me permettra de faire le lien avec de prochains amendements qui concernent l'outre-mer et que certains d'entre vous ont évoqués.
Il est ici question de catastrophes naturelles, qui peuvent être liées ou non au changement climatique. Nous ne pouvons pas créer un fonds spécifique pour les incendies, mais notre intervention est multiple.
Premièrement, nous avons effectué un gros travail sur les assurances, celles des collectivités en particulier, afin de réduire le nombre d'appels d'offres infructueux.
Deuxièmement, nous portons la DSEC de 30 millions d'euros à 70 millions d'euros et nous changeons les critères d'attribution pour rendre les communes plus facilement éligibles en cas d'événement important.
Troisièmement, en cas de catastrophes extrêmes telles que des cyclones ou de grands incendies, des fonds d'intervention spécifiques complètent l'accompagnement de l'État.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.
M. Hervé Gillé. Madame la ministre, ayant connu les incendies de 2022 en Gironde, je peux témoigner que les dotations ou interventions exceptionnelles de l'État interviennent toujours avec un décalage de temps relativement important.
La question de l'agilité d'intervention est fondamentale pour les communes concernées. Au-delà des dommages causés directement par l'incendie, il est très important, par exemple, pour les petites communes rurales, de rétablir rapidement, après les multiples passages des convois de sapeurs-pompiers, une voirie en bon état.
J'insiste donc sur la légitimité de cet amendement.
M. le président. Quel est donc l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1447 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1150, présenté par Mme Espagnac, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
18 828 000 |
|
18 828 000 |
|
Concours spécifiques et administration |
|
18 828 000 |
|
18 828 000 |
TOTAL |
18 828 000 |
18 828 000 |
18 828 000 |
18 828 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. Remettre en cause la DETR, nous y reviendrons, c'est affaiblir la solidarité nationale envers nos communes rurales. C'est ignorer la diversité de nos territoires et envoyer à la ruralité un signal d'abandon que nous ne pouvons pas accepter.
Nos élus locaux demandent de la stabilité et de la visibilité. Par cet amendement, je souhaite alerter sur la baisse très préoccupante des moyens alloués aux investissements locaux.
En 2025, l'enveloppe de la DETR s'élevait à 1,6 milliard d'euros. En 2026, le projet de loi de finances prévoit une enveloppe de 1,4 milliard d'euros, soit une baisse de 12 %. Ce désengagement aura, dès 2026, des conséquences très concrètes pour nos collectivités.
Mes chers collègues, je vous alerte de nouveau : si le FIT devait être supprimé, comme je l'espère, la DETR n'atteindrait même pas le niveau de l'an dernier. Il y aurait non pas une augmentation, mais une baisse de la dotation.
C'est la raison pour laquelle je défends la revalorisation de la DETR, au moins à hauteur de l'inflation prévisionnelle. Soutenir l'investissement local, c'est soutenir nos territoires et leurs habitants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Comme tout à l'heure pour notre collègue Benarroche, j'aurais aimé émettre un avis favorable à votre amendement.
Je vois et j'entends les soutiens qui s'expriment ici ou là… (Sourires.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Sagesse !
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Malgré les très fortes contraintes financières que nous connaissons, l'enveloppe de la DETR a toutefois été maintenue dans ce projet de loi de finances, comme dans la loi de finances précédente.
La baisse des crédits est concentrée non pas sur la DETR, mais sur la DSIL, ce qui est certes regrettable.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Madame la sénatrice, vous proposez là de créer un nouveau FIT en additionnant la DETR et la DSIL…(Mme Frédérique Espagnac le conteste.)
Loin de supprimer l'enveloppe de la DETR, l'État la maintient, au contraire, à hauteur de 1 milliard d'euros.
Je rappelle par ailleurs que nous avons choisi de faire porter les efforts sur l'investissement, compte tenu de la période électorale.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Il s'agit ni plus ni moins de revaloriser l'enveloppe au niveau de l'inflation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Arnaud. Madame la ministre, j'aimerais obtenir des précisions.
Un effort de 200 millions d'euros est proposé pour tenir compte du cycle électoral municipal qui a lieu tous les six ans. Disposez-vous de chiffres sur les cycles précédents de 2020 et de 2014 ? Nous pourrions ainsi vérifier – c'est un point essentiel – qu'une baisse significative dans la programmation des crédits intervient bien à ce moment-là.
Par ailleurs, pouvez-vous nous indiquer la manière dont la DSIL sera répartie dans chaque département ? À ce jour, elle est attribuée par décision du préfet de région, via le secrétaire général pour les affaires régionales, selon des critères qui doivent être objectivés.
Dans une période où les commissions départementales se réunissent, il s'agit de garantir un niveau de DSIL adéquat. Je souhaite que la moyenne des trois dernières années soit le point de référence.
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Nous reviendrons ultérieurement sur ce sujet lorsque nous évoquerons le FIT.
Madame la ministre, l'immense majorité des élus, ruraux comme urbains, se seraient bien passés de votre générosité très intéressée de 19 millions d'euros. Ils auraient préféré qu'il n'y ait pas 200 millions d'euros de baisse de crédits, que ce soit sur la DSIL ou sur la DETR.
Mme Françoise Gatel, ministre. Il ne fallait pas voter en ce sens !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1150.
(L'amendement n'est pas adopté. – Marques de déception sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1687 rectifié ter, présenté par Mmes Jacquemet et Saint-Pé, MM. Courtial, Menonville, Mizzon et Bleunven et Mmes Housseau, Romagny, Devésa, Gacquerre et Antoine, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds Protection sociale complémentaire
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
18 000 000 |
|
18 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
|
|
|
|
Fonds Protection sociale complémentaire |
18 000 000 |
|
18 000 000 |
|
TOTAL |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Annick Jacquemet.
Mme Annick Jacquemet. La réforme de la protection sociale complémentaire (PSC) dans la fonction publique territoriale franchit en 2025 une étape essentielle.
Après l'ordonnance du 17 février 2021, qui prévoit l'obligation pour les employeurs territoriaux de financer au moins 50 % d'un montant de référence de la complémentaire santé de leurs agents à compter du 1er janvier 2026, une proposition de loi visant à sécuriser et à achever la mise en œuvre de cette réforme pour le volet prévoyance a été adoptée au Sénat en juillet 2025, puis adoptée à l'unanimité par la commission des lois de l'Assemblée nationale en novembre 2025.
Au cours de ces travaux, plusieurs parlementaires, toutes sensibilités confondues, ont souligné un point central : la réussite de la réforme dépend en partie de sa soutenabilité financière pour les collectivités, en particulier les plus petites d'entre elles.
La montée en charge de la participation obligatoire en santé et en prévoyance constitue une dépense nouvelle importante pour les communes rurales, qui disposent déjà de marges de manœuvre budgétaires limitées. La mise en œuvre de la réforme demeure une source de préoccupation sur le terrain.
C'est pour répondre à cette inquiétude que j'ai déposé le présent amendement pour la troisième année consécutive. L'objectif est de créer un fonds spécifique pour aider les communes de moins de 2 000 habitants à financer leur part obligatoire de PSC.
Ce dispositif constitue un levier concret d'accompagnement de la réforme, cohérent avec les travaux parlementaires récents et répondant directement aux alertes exprimées par les élus locaux, notamment par ceux de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), sur la soutenabilité financière des petites communes.
Un décret viendra préciser les modalités d'attribution du fonds aux communes concernées.
M. le président. L'amendement n° II-1831 rectifié bis, présenté par M. Delcros, Mmes Billon et Vermeillet, MM. Levi, Longeot, Laugier, Cambier, Menonville et Dhersin, Mmes Saint-Pé et Devésa, M. Courtial, Mmes Perrot, Sollogoub, Antoine, Patru et Gacquerre et M. Hingray, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds Protection sociale complémentaire
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
|
|
|
Concours spécifiques et administration |
|
18 000 000 |
|
18 000 000 |
Fonds Protection sociale complémentaire |
18 000 000 |
|
18 000 000 |
|
TOTAL |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. La réforme de la protection sociale complémentaire en matière de couverture santé et de prévoyance crée, notamment pour les petites communes, une charge supplémentaire que cet amendement vise à compenser.
On parle beaucoup de la contribution des collectivités au redressement des finances publiques, mais de nombreuses mesures entraînent des charges supplémentaires sans pour autant contribuer à cet objectif.
Nous avons longuement évoqué la question des cotisations CNRACL lors de l'examen de la première partie de ce texte. Si l'on y ajoute la réforme de la PSC, ce sont près de 5 milliards d'euros au total en année pleine qui sont à la charge des collectivités. (Mme Cécile Cukierman s'exclame.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. Il s'agit là, mes chers collègues, de deux variantes du même amendement, dont l'enjeu financier est de 18 millions d'euros, mais qui sont gagées d'une manière différente.
Je comprends et je partage l'objectif de leurs auteurs. Toutefois, cette question devrait plutôt trouver des réponses dans la réflexion autour de la simplification et de la libre administration des collectivités, en particulier en matière de gestion des ressources humaines.
C'est la raison pour laquelle nous privilégions les crédits qui accompagnent les collectivités dans leur engagement et dans leur investissement. Je demande donc le retrait de ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. Ces amendements me donnent l'occasion de saluer le travail d'Isabelle Florennes et de Catherine Di Folco, respectivement auteure et rapporteur de la proposition de loi relative à la protection sociale complémentaire des agents publics territoriaux, qui sera d'ailleurs examinée demain à l'Assemblée nationale.
Monsieur Delcros, il s'agit certes d'une dépense obligatoire, mais il y a une nuance : celle-ci n'est pas imposée par l'État. Elle résulte d'un accord libre, négocié entre les partenaires sociaux, c'est-à-dire entre les employeurs et les représentants des agents publics.
Évitons de créer une nouvelle concurrence entre grandes et petites collectivités ou encore entre les communes de moins de 2 000 habitants et celles qui se situent juste au-dessus de cette limite.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour explication de vote.
M. Pierre-Alain Roiron. Comme l'a dit le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation Bernard Delcros, il s'agit effectivement d'une nouvelle charge pour les communes.
Or, madame la ministre l'indiquait, nous sommes dans une enveloppe normée, ce qui pose question.
Mme Françoise Gatel, ministre. Mais l'État n'en est pas à l'origine !
M. Pierre-Alain Roiron. Il faut évidemment parler de la CNRACL et des nouvelles obligations qui incombent aux collectivités locales en tant qu'employeurs.
Nous soutenons ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, nous n'avons pas quatre heures pour répondre à cette éternelle question : qu'est-ce que la liberté ?
J'ai bien écouté vos arguments. Certes, la mesure n'a pas été imposée par l'État, mais vous dites vous-même qu'il faut empêcher la mise en concurrence des communes.
Les plus petites d'entre elles sont donc libres de ne pas mettre en place la protection sociale complémentaire et, de ce fait, d'accepter de voir piller leurs ressources humaines par les plus grandes.
Reconnaissez que les notions de liberté et de choix prêtent dès lors à discussion. Toutefois, le temps m'étant compté, je n'ouvrirai pas ce grand débat philosophique.
Nous voterons ces amendements. Je regrette sincèrement que leurs auteurs n'aient pas été plus offensifs lorsque nous avons débattu de la CNRACL lors de l'examen des deux derniers projets de loi de financement de la sécurité sociale.
On ne peut pas s'émouvoir, simplement au moment du vote des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », de l'augmentation des dépenses et des charges qui pèsent sur les communes quand ces difficultés sont le fruit de votes précédents.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Je rectifie mon amendement pour le rendre identique à l'amendement n° II-1687 rectifié ter.
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° II-1831 rectifié ter, dont le libellé est identique à celui de l'amendement n° II-1687 rectifié ter.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1687 rectifié ter et II-1831 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.
M. Patrick Kanner. Mon rappel au règlement est fondé sur l'article 32 de notre règlement.
Je comprends que la présidence veuille aller vite. Toutefois, il serait bon, lors des mises aux voix, que l'on appelle aussi les abstentions. Or ce n'est jamais le cas.
Certains de nos collègues peuvent hésiter entre le pour et le contre, et choisir au bout du compte ce vote révolutionnaire qu'est l'abstention. (Sourires.)
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
État B (suite)
M. le président. L'amendement n° II-1859, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
Concours spécifiques et administration |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires vise à consacrer 10 millions d'euros de crédits au soutien des centres de santé sexuelle.
Lieux d'écoute, d'information, de prévention et d'accompagnement en accès libre pour tout public et tous âges, les centres de santé sexuelle jouent un rôle indispensable.
Or beaucoup d'entre eux rencontrent des difficultés liées à la baisse progressive de leur financement public. Un tel désengagement de l'État a des conséquences très préoccupantes en matière d'accès aux droits et aux soins en santé sexuelle, ainsi qu'en matière d'éducation à la vie affective et sexuelle.
Il fait craindre un recul de la prévention des violences sexistes, sexuelles et conjugales et de la prise en charge des personnes victimes.
Comme chaque année, nous avons marqué le 1er décembre dernier la journée mondiale de lutte contre le sida. Ce temps fort ne doit pas être seulement l'occasion d'arborer un ruban rouge ; il nous rappelle combien l'éducation aux enjeux de la vie affective et sexuelle est essentielle dans notre société.
Les centres de santé sexuelle répondent à cette mission. Or ces lieux d'écoute, de prévention et d'accompagnement sont victimes de coupes budgétaires.
Bien conscients du rôle que jouent les centres de santé sexuelle pour la santé de nos concitoyens, ainsi que dans la lutte contre les violences sexuelles et conjugales, nous souhaitons donc les réarmer financièrement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. Mon cher collègue, vous avez rappelé le rôle très important des centres de santé sexuelle, qui dépendent des services de la protection maternelle et infantile (PMI).
Pour autant… (Sourires.) – vous allez me dire, il y a toujours un « mais » –, la question du financement de ces centres doit être traitée dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et de la mission « Santé » du présent projet de loi de finances.
Par ailleurs, comme cela vient d'être rappelé, il n'est pas souhaitable que les collectivités supportent une nouvelle charge insuffisamment compensée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Gatel, ministre. L'État n'est pas inactif dans ce domaine, puisqu'il déploie déjà des programmes consacrés à la santé sexuelle. Nous avons aussi des enjeux en matière de santé mentale.
Sans vouloir vous contrarier, monsieur le sénateur, je rappelle que l'État prévoit, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, 130 millions d'euros pour soutenir 2 000 maisons France Santé, mobiles ou fixes, qui sont invitées à développer un certain nombre d'outils de prévention, y compris dans ce domaine.
C'est donc une demande de retrait ; à défaut j'émettrai un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je souscris entièrement aux propos de Mme la ministre et de Mme la rapporteure spéciale. En l'occurrence, nous demandons de la part de l'État un concours financier de 10 millions d'euros pour que les communes puissent les affecter aux centres de santé sexuelle.
Il n'y a rien d'incompatible avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui d'ailleurs ne prévoit rien de tel. Si l'idée vous plaît, adoptez-la !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Mme la rapporteure spéciale et Mme la ministre renvoient systématiquement au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Or, dans le cadre de l'examen de ce texte, nous avons longuement discuté de ces questions et tous les amendements que nous avons proposés pour accompagner ce type de structures ont été rejetés. Certains n'ont même pas passé le filtre de l'article 40 de la Constitution. Cela pose donc question.
Quant à votre remarque, madame la ministre, selon laquelle la demande pourrait s'intégrer dans les 130 millions d'euros proposés pour les maisons France Santé, permettez-moi d'être dubitative, voire interrogative.
Vous incluez beaucoup de choses dans le périmètre de ces maisons. Je ne suis pas sûre que cela réponde véritablement aux besoins des territoires et des collectivités locales.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1859.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(À suivre)


