Les collectivités locales doivent, elles aussi, y contribuer, mais cet effort doit rester juste et proportionné. En juillet dernier, François Bayrou, alors Premier ministre, avait fixé le montant de cet effort à 5,4 milliards d'euros ; le présent budget le ramène à 4,6 milliards d'euros. C'est certes une baisse, mais le montant de cette contribution demeure considérable pour nos collectivités, dont les ressources sont déjà atrophiées.

Cet effort budgétaire est non pas un simple ajustement comptable, mais un désengagement progressif de l'État envers les territoires.

L'effort demandé aujourd'hui conduira à moins de places en crèches, moins de bus pour les écoliers, moins d'entretien des routes, moins de soutien aux associations culturelles et sportives. Sacrifier les services publics de proximité revient à se tirer une balle dans le pied. Alors, c'est non !

Comment demander à nos élus locaux de faire toujours plus avec toujours moins ?

Le budget qui nous est soumis n'est pas acceptable.

Je salue cependant le travail de la commission des finances et des rapporteurs spéciaux. Il est indispensable de ramener l'effort demandé aux collectivités à 2 milliards d'euros et de sauver les départements en abondant le fonds de sauvegarde.

Néanmoins, la péréquation, tant verticale qu'horizontale, demeure insuffisante. Les communes rurales, les petites villes et les zones périurbaines continuent d'être délaissées, sans qu'aucun mécanisme d'équilibre véritable soit mis en place pour garantir un développement harmonieux sur l'ensemble du territoire français.

Les écarts de ressources entre collectivités se creusent, créant une France à plusieurs vitesses, où certains territoires peuvent investir quand d'autres peinent à assurer les services de base. Cette injustice territoriale est inacceptable. Les territoires méritent de vrais moyens pour innover, créer des emplois et assurer une vitalité économique partagée.

Donner des moyens aux territoires, c'est faire confiance à la décentralisation et à nos élus. Ce n'est pas une dépense ; c'est un investissement pour notre avenir commun.

Comme le disait un ancien Premier ministre,…

Mme Marie-Jeanne Bellamy. … « la France est forte quand c'est une force qui va et qui sait où elle va ». Où allons-nous, madame la ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sylviane Noël. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » revêt cette année une importance particulière : il s'agit du dernier budget d'un cycle municipal particulièrement éprouvant pour nos collectivités locales.

Elles ont traversé la pandémie, absorbé l'inflation, maintenu les services publics essentiels, soutenu l'économie locale, protégé les plus fragiles, mis en œuvre les obligations croissantes liées à la transition énergétique, au logement, à la sécurité, au zéro artificialisation nette (ZAN), que sais-je encore ? Pendant ce temps, les moyens, eux, n'ont pas suivi. Les dotations stagnent voire diminuent. Les dépenses contraintes explosent.

Ce projet de budget pour l'année 2026 impose aux collectivités un effort inédit : 4,6 milliards d'euros selon le Gouvernement, mais plus de 7 milliards d'euros selon les associations d'élus locaux.

Le fonds vert subit une nouvelle coupe de 500 millions d'euros, après avoir déjà été divisé par deux en 2025.

La DGF, gelée à son niveau de 2025, subit, en réalité, une baisse en euros constants. Le FCTVA voit son périmètre considérablement réduit et son calendrier remis en cause. Le Dilico a doublé par rapport à 2025 et portera la ponction totale à 2 milliards d'euros, amputant considérablement le budget de 4 000 collectivités concernées, dont de très petites communes.

Ce dispositif représente une contrainte majeure pour les budgets locaux, limitant leur autonomie financière sans garantie claire en retour. Pis encore, le Gouvernement prévoit un étalement des remboursements sur cinq ans au lieu de trois ans, ainsi qu'une subordination de ce remboursement à l'évolution des dépenses réelles de fonctionnement et d'investissement : on atteint là des sommets d'hypocrisie consistant, pour un État inconséquent dans sa gestion budgétaire, à donner des leçons et même à sanctionner les collectivités locales qui, elles, votent des budgets en équilibre et savent globalement maîtriser leur endettement.

Ce Dilico n'est qu'une énième atteinte à la libre administration des collectivités territoriales. (M. Olivier Paccaud acquiesce.) Je n'ai donc pas hésité à déposer un amendement pour le supprimer tout simplement, même si je salue le travail engagé par la commission des finances du Sénat, qui a su réduire de moitié l'effort demandé aux collectivités.

Avant de conclure, je souhaite également évoquer la réforme calamiteuse de la taxe d'aménagement, qui a engendré un désordre indescriptible dans le recouvrement de cette taxe, mettant à mal la trésorerie des communes et des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE). Quelle n'est pas notre colère de devoir subir cette réforme improvisée aux conséquences désastreuses, avec des millions d'euros non encaissés, parfois depuis 2022, faisant craindre la prescription fiscale. Là encore, si je salue les quelques mesures adoptées la semaine dernière par le Sénat, je regrette amèrement que l'on maintienne un dispositif non opérant.

Malgré les belles promesses d'une amélioration à venir, je crains, hélas ! de me retrouver dans un an à la même place pour dénoncer les mêmes manquements, sans qu'aucune amélioration soit intervenue.

Je le dis avec force, en dépit des aménagements que le Sénat saura y apporter, cette mission est une potion amère pour les collectivités, qui, je le rappelle, assument l'essentiel des services publics de nos concitoyens et sont à l'origine de 70 % de la commande publique. Aussi, je forme le vœu sincère que ce débat soit non pas une formalité budgétaire, mais un tournant politique. Parce qu'une République forte est une République qui se tient debout aux côtés de ses territoires, et non pas face à eux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, j'interviens sur cette mission. Chaque fois, je fais le rêve de pouvoir enfin me réjouir de l'amélioration des relations entre l'État et nos collectivités. Ce ne sera, hélas, pas encore pour cette année…

Pour la deuxième année consécutive, le texte qui nous est proposé demande aux collectivités une contribution, que je qualifierai de disproportionnée,…

M. Rémy Pointereau. … au redressement des comptes publics. Certes, les crédits de la mission sont stables, mais cette stabilité résulte d'une baisse ponctuelle des dotations d'investissement.

Oui, les collectivités doivent participer à l'effort national, encore faut-il que cet effort soit juste et proportionné. Tel n'est pas le cas aujourd'hui.

Comment demander à des acteurs qui réalisent 70 % de l'investissement public de contribuer à plus de 15 % de l'effort financier, soit 4,6 milliards d'euros ? Alors même que la DGF est gelée, ce qui représente, avec l'inflation, une baisse de 300 millions d'euros, les collectivités subissent toujours la non-compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) sur les locaux industriels, ce qui ampute leurs budgets de 1,2 milliard d'euros supplémentaires.

Je pourrais évoquer également la situation très tendue de nombreux départements ruraux : à l'instar de ce que nous avons fait pour les communes, nous aurions dû supprimer le Dilico qui s'applique à eux, en tout cas pour les plus fragiles.

La chambre des territoires ne peut accepter une contribution aussi excessive. Je rappelle, comme l'ont souligné nos rapporteurs, que les collectivités ne sont pas responsables de la crise des finances publiques. Elles doivent, pour leur part, présenter des budgets en équilibre, ce qui n'est pas le cas pour l'État.

C'est pourquoi nous proposons de réduire cet effort dans des proportions compatibles avec la poursuite de l'investissement local, en particulier dans les territoires ruraux.

J'en viens enfin à l'article 74 et à la création du fonds d'investissement pour les territoires, fusion de la DETR, de la DSIL et de la DPV. Le Gouvernement le justifie par un souci de simplification. Permettez-moi d'en douter !

Cette fusion pénalisera la ruralité. Le rapport de notre collègue Jean-Michel Arnaud le démontre clairement : 3 269 communes et 217 EPCI sortiraient du dispositif, et aucun mécanisme ne garantit le maintien des équilibres actuels. (M. Jean-Michel Arnaud le confirme.) Je ne vois donc pas la plus-value de cette réforme, alors que, comme vous, madame la ministre, je suis un fervent partisan de la simplification, un sujet que nous évoquions encore hier au second Roquelaure de la simplification, que vous avez organisé. Pour autant, je ne suis pas favorable à une simplification qui se ferait au détriment de nos territoires ruraux ou qui risquerait de réduire les moyens consacrés à l'investissement local.

Ma collègue Nadine Bellurot et moi-même proposerons donc un amendement tendant à la suppression de cette fusion, afin de conserver une réelle lisibilité pour les territoires ruraux. Je sais pouvoir compter sur votre soutien fort, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Jean-Baptiste Lemoyne applaudit également.)

Mme Françoise Gatel, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais essayer d'être aussi brève que possible pour que nous ayons du temps pour débattre. Je ne répondrai donc pas à chacun de vous individuellement dès maintenant, mais je le ferai au moment de l'examen des amendements.

Je voudrais simplement rappeler le début de l'histoire. Si je suis d'accord avec beaucoup de ce qui a été dit, il est important que nous nous remémorions le premier épisode du scénario. Le budget proposé doit prendre en compte une dette de 3 400 milliards d'euros. Il est évident qu'un tel niveau d'endettement incite davantage à la frugalité qu'à la prodigalité. Dans un tel cadre, il est clair que le niveau de dépenses est heurté de plein fouet.

Notre dette augmente de 12 millions d'euros par heure, ce qui fait toujours un peu peur. L'objectif que nous avons construit ensemble est de ramener le déficit à 5,4 % du PIB en 2025 – il me semble que nous allons y arriver –, autour de 5 % en 2026 et à 3 % en 2029.

Vous êtes conscients de la nécessité de ce redressement, qui est indispensable pour notre souveraineté, mais aussi pour préserver tous les services publics assurés par nos collectivités. Vous les avez évoqués de manière très juste et ils nous tiennent tous à cœur. Ce budget n'est donc pas un budget de facilité ; c'est un budget de responsabilité, de vérité, mais aussi de solidarité.

Vous ne serez peut-être pas d'accord avec cette affirmation, mais nous avons essayé de préserver la capacité de fonctionnement des collectivités. Je me rappelle avoir connu en 2015, alors que j'étais maire, un soudain trou d'air en matière de DGF, parce que le gouvernement d'alors l'avait baissée de plus de 30 %. Par ailleurs, la DGF n'est plus indexée sur l'inflation depuis François Baroin, qui est toujours un grand maire et qui fut un grand ministre.

Vous le savez et je le sais, les collectivités sont amenées à contribuer. Chacun reconnaît pourtant qu'elles ne sont pas responsables de la part la plus importante de la dette. Il faut savoir les ménager, mais, en même temps, lorsque nous faisons le choix de porter le fonds de sauvegarde pour les départements à 600 millions d'euros, cela contribue à creuser la dette.

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » représente un peu moins de 4 milliards d'euros, alors que l'ensemble des transferts de l'État vers les collectivités s'élève à 155 milliards d'euros.

Il y a deux priorités pour la mission.

D'abord, au risque de vous faire rire, voire hurler, je répète que nous avons souhaité préserver l'investissement local.

M. Olivier Paccaud. 200 millions d'euros en moins !

Mme Françoise Gatel, ministre. Vous l'avez rappelé, les collectivités portent 70 % de l'investissement local, mais nous savons que, dans les années électorales, l'effort d'investissement est moins important. La DETR, dont vous parlez tous, s'élèvera ainsi à 1 milliard d'euros, avec ou sans le fonds d'intervention pour les territoires.

Nous partageons l'objectif de soutenir les territoires ruraux. Je rappelle que la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales (DSCAR) est portée à 110 millions d'euros, alors qu'elle était à peine de 42 millions en 2023. La dotation de solidarité rurale augmente de 150 millions d'euros. La dotation globale de fonctionnement, en revanche, est stabilisée après trois années de hausse.

Il y a des questions sur le Dilico. Je réserve mes arguments pour la discussion des amendements. Je précise simplement que le Gouvernement émettra un avis favorable sur deux points.

Il est favorable au remboursement sur trois ans et il accepte l'annulation de ces clauses, que d'aucuns appellent « clauses de Cahors », bref, de ces clauses contraignantes.

M. Loïc Hervé. C'est un bon début !

Mme Françoise Gatel, ministre. Je vous remercie de noter les grands efforts que nous faisons. Et ne me dites pas que c'est un minimum.

M. Olivier Paccaud. C'est tout bonnement un retour aux règles initiales !

Mme Françoise Gatel, ministre. Quant aux régions, je sais, et je peux le comprendre, qu'elles ne sont pas vraiment favorables au remplacement de la part de TVA qu'elles perçoivent par une dotation. Nous partageons ce point de vue et souhaitons que les régions puissent conserver une part de ressources dynamiques.

Sur le Dilico, je ne peux m'empêcher d'évoquer la situation des départements, car elle va de pair avec celle des régions. Les départements perçoivent aujourd'hui des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui font le yoyo : ils ont beaucoup augmenté pendant certaines années, puis ils ont baissé et ils commencent à remonter d'environ 15 %. Nous donnerons des chiffres plus précis.

Il n'empêche qu'il nous semble essentiel d'adhérer à ce que vous proposez, c'est-à-dire une réforme globale des finances locales. En effet, on ne peut pas se contenter, à chaque projet de loi de finances, de se répandre en suggestions et en récriminations sous la forme d'amendements, qui sont certes tout à fait pertinents, mais qui viennent déséquilibrer, sans étude d'impact, un édifice très fragile.

J'invite donc le Sénat à poursuivre son travail de diagnostic sur ce qui ne fonctionne pas dans les finances locales et à faire œuvre de proposition. Je pense comme vous que les collectivités ont besoin de stabilité, de lisibilité et de prévisibilité. C'est pourquoi un travail de fond doit être mené d'une manière collective et courageuse, car je sais combien il est difficile de conduire jusqu'à leur terme les révolutions en matière de finances locales.

Je ne serai pas plus longue, car nous avons besoin de temps pour débattre des amendements. Je vous en rends même un peu : c'est aussi un acte positif du Gouvernement. Je vous remercie de le souligner. (Sourires.) Je ne doute pas que nous saurons ensemble construire une copie responsable. Même s'il nous arrive d'avoir des points de vue un peu différents, je forme le vœu que nos discussions se déroulent dans le respect des uns et des autres. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nadine Bellurot et M. Loïc Hervé applaudissent également.)

M. le président. Le temps, c'est parfois de l'argent, madame la ministre !

Organisation des travaux

M. le président. Mes chers collègues, pour la bonne information de tous, je rappelle que 177 amendements sont à examiner sur cette mission. La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à huit heures trente. Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission sera reportée à la fin des missions de la semaine.

Sur cette mission, le nombre d'amendements à examiner, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui, nous conduit à devoir observer un rythme de 25 amendements par heure, ce qui paraît à ce stade possible avec la durée habituelle des interventions. Compte tenu, de surcroît, de l'importance du sujet abordé, nous pourrions donc fixer les temps de parole à deux minutes, en gardant la possibilité, en cours de discussion, et conformément à la décision de la conférence des présidents, de passer à une minute afin d'éviter un report. J'en appelle donc à la responsabilité de chacun.

relations avec les collectivités territoriales

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Relations avec les collectivités territoriales

3 761 265 818

3 931 902 178

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

3 511 126 769

3 675 597 351

Concours spécifiques et administration

250 139 049

256 304 827

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1951, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

+

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

 

 

 

Concours spécifiques et administration

50 000 000

 

50 000 000

 

TOTAL

50 000 000

 

50 000 000

 

SOLDE

+50 000 000

+50 000 000

La parole est à Mme la ministre.

Mme Françoise Gatel, ministre. Il s'agit d'un amendement qui est en quelque sorte une manifestation de soutien de l'État à la collectivité de Corse. Afin de l'accompagner pour faire face à la hausse des coûts des dessertes maritimes entre l'île et le continent, nous proposons une augmentation de la dotation de continuité territoriale de 50 millions d'euros, ce qui portera l'enveloppe totale de cette dotation à 237 millions d'euros en 2026. C'était une demande forte des élus et des parlementaires de Corse. Nous avons entendu cet appel et nous avons pris cet engagement auprès de la collectivité de Corse.

Nous préférons inscrire cette dotation budgétaire au programme 122 « Concours spécifiques et administration », plutôt que de retenir la solution d'un prélèvement sur les recettes, qui avait été retenue lors de l'examen de la première partie de ce PLF.

M. le président. L'amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Parigi, Kern et Levi et Mmes Devésa et Saint-Pé, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

60 000 000

 

60 000 000

 

Concours spécifiques et administration

 

60 000 000

 

60 000 000

TOTAL

60 000 000

60 000 000

60 000 000

60 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Je comprends parfaitement le souci de rigueur budgétaire, mais les faits sont têtus. Depuis le gel de la dotation de continuité territoriale (DCT) en 2009, la collectivité de Corse a compensé seule le surcoût non abondé par des rallonges budgétaires successives et se trouve aujourd'hui au bout de ses capacités financières.

C'est pourquoi, en première partie du projet de loi de finances, le Sénat, que je remercie chaleureusement, a voté à une très large majorité, par scrutin public, un abondement de 60 millions d'euros, indexé sur l'inflation. L'Assemblée nationale avait fait de même.

Madame la ministre, vous proposez aujourd'hui de ramener cette enveloppe à 50 millions d'euros. Ce recul est une incohérence politique que personne ici ne peut ignorer. Le Premier ministre a déclaré vouloir, pour cet exercice budgétaire, laisser la parole au Parlement. Or le Parlement s'est exprimé deux fois clairement. Madame la ministre, il me semble cohérent, juste et respectueux du vote exprimé démocratiquement de ne pas revenir sur l'équilibre trouvé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances. La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° II-1951 du Gouvernement, étant donné qu'il s'agit de reconduire le même dispositif que l'année dernière.

Par conséquent, la commission demande à notre collègue Parigi de bien vouloir retirer son amendement, d'autant que nous avons voté une autre mesure en première partie.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Françoise Gatel, ministre. J'ai bien entendu votre argument, tout à fait légitime, monsieur le sénateur. Je rappelle que la DCT augmente assez régulièrement. Nous avions ainsi augmenté son montant de 30 millions d'euros, puis de 40 millions d'euros. Nous l'augmentons aujourd'hui de 50 millions d'euros.

Il est vrai que le Sénat a voté un abondement de 60 millions d'euros en première partie, mais le Gouvernement a annoncé il y a déjà deux semaines qu'il augmenterait de 50 millions d'euros le montant de cette dotation.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Toussaint Parigi, l'amendement n° II-91 rectifié est-il maintenu ?

M. Paul Toussaint Parigi. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1951.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° II-91 rectifié n'a plus d'objet.

L'amendement n° II-1954 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

+

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

 19 368 394

 

19 368 394

 

Concours spécifiques et administration

 

 

TOTAL

19 368 394

 

19 368 394

 

SOLDE

+19 368 394

+19 368 394

 

La parole est à Mme la ministre.

Mme Françoise Gatel, ministre. Cet amendement vise à abonder en autorisations d'engagement et en crédits de paiement le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » pour financer le versement aux maires, comme le Premier ministre s'y était engagé, de l'indemnité visant à reconnaître leur fonction d'agent de l'État.

Le Premier ministre a annoncé lors du congrès des maires de France qu'une indemnité de 500 euros serait versée à chaque maire, sans condition. Pour que les maires puissent bénéficier de 500 euros net, nous proposons de créer une ligne de crédit de 19,3 millions d'euros. Cette indemnité prendra la forme d'un versement aux communes d'un montant légèrement supérieur à 500 euros, qui leur permettra de s'acquitter de la CSG et de la CRDS. La commune versera ensuite à chaque maire cette indemnité de 500 euros net.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial de la commission des finances. Je trouve que cette discussion commence bien puisque nous émettons sur cet amendement du Gouvernement, comme sur le précédent, un avis favorable.

Le Premier ministre s'était en effet engagé devant les maires à prendre cette mesure, que l'on ne peut que saluer, même si nous aurions sans doute préféré la voir figurer dans le texte initial. L'essentiel est que la fonction d'agent de l'État des maires, qui est certainement l'une de leurs plus anciennes fonctions, soit prise en compte. Je ne sais plus si elle remonte à la Révolution ou à l'Empire, mais, en tout cas, elle date.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Cet amendement vise à mettre en œuvre l'engagement pris par le Premier ministre devant les maires de France de leur octroyer une indemnité de 500 euros.

D'après les commentaires qui me sont parvenus, cette indemnité ne suscite pas un enthousiasme délirant. Les maires ne demandent pas l'aumône, ils n'attendent pas après 500 euros. Ils exercent leurs missions avec engagement, sans rien demander. Je tenais à vous faire part de ce que j'ai entendu sur le terrain, madame la ministre.

Je voterai cet amendement, bien sûr, mais je pense que ce que veulent avant tout les maires, c'est pouvoir faire, pouvoir agir et disposer de moyens pour cela. Ils veulent qu'on leur simplifie la vie au quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Nous voterons également cet amendement, car plus, c'est toujours mieux que moins, mais il faut entendre – et je sais que vous avez l'ouïe fine, madame la ministre – les propos de nos élus dans les différents territoires.

Certains élus considèrent que cette indemnité de 500 euros pourrait être une forme de provocation au regard des tâches qu'ils accomplissent et des responsabilités qu'ils assument au nom de l'État. Le mot « aumône » est un peu plus poli que celui qu'ils emploient parfois lorsqu'ils parlent de cette indemnité. Nous devons les entendre.

Ce qu'ils réclament, c'est vrai, c'est du pouvoir d'agir – nous avons eu l'occasion d'en discuter lors de l'examen de la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local –, mais également une juste reconnaissance. Certes, on observe une progression du niveau de leurs indemnités, mais celui-ci est bien loin d'atteindre ce que les uns et les autres mériteraient au regard du temps qu'ils consacrent à l'exercice de leur mandat.

Nous voterons donc cet amendement, mais la Nation doit se mobiliser et se montrer à la hauteur des sacrifices consentis par nos élus locaux, qui réclament bien plus que cette aumône symbolique.

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, pour explication de vote.

M. Pierre Barros. Je suis assez mitigé, car les réactions qui nous parviennent du terrain ne sont pas si simple à analyser.

Il est effectivement important de reconnaître l'engagement et le travail des élus locaux, notamment des maires, dans l'ensemble des territoires, ainsi que leur fonction d'agent de l'État, mais, excusez-moi, ils ne sont pas aussi les collaborateurs du Premier ministre ! Cette pratique managériale de reconnaissance en fin d'année ressemble à d'autres pratiques, dans d'autres endroits, et ne me semble pas tout à fait adaptée.

Pour manifester notre reconnaissance aux élus locaux que sont les maires, nous pourrions leur permettre d'élaborer des budgets équilibrés, de produire de nouveaux services et d'organiser des services publics cohérents avec les besoins des habitants. Faciliter ainsi leur quotidien serait une belle marque de reconnaissance.

Je suis donc très embarrassé par cet amendement du Gouvernement et par ce positionnement quasi managérial, qui ne me semble pas du tout adapté.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour explication de vote.

M. Jean-Michel Arnaud. Je souhaite à mon tour faire part de mes doutes sur cette indemnité de 500 euros, que personne n'a demandée ni imaginée. Cette indemnité de 41,66 euros mensuels sera versée aux maires au titre de leur fonction d'agent de l'État.

Or la priorité est que l'augmentation des indemnités prévues dans la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local – devenue aujourd'hui loi de la République – soit assumée et intégrée dans la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux (DPEL). Il s'agit de valoriser le travail des maires en cohérence avec ce que nous avons adopté à la quasi-unanimité dans ce texte.

Une participation de l'État est nécessaire, au titre de la solidarité nationale, pour que cette augmentation ne soit pas uniquement à la charge des collectivités locales. Une partie de ces 500 euros serait utile pour financer les apports du nouveau statut de l'élu local.

Cet effet de manche du Premier ministre lors du congrès des maires de France était à tout le moins inopportun. Il a été à mon sens très mal perçu par les élus. Le Sénat doit rejeter cette aumône. (MM. Loïc Hervé et David Margueritte applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Dans le cadre des travaux que j'avais effectués avec Françoise Gatel lorsqu'elle était sénatrice, nous nous étions mis d'accord sur le fait qu'il fallait prendre en compte le travail effectué par les maires dans le cadre du dédoublement fonctionnel pour l'État.

La loi portant création d'un statut de l'élu local prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement estimant la quantité de travail effectivement fournie par les maires au titre de leur fonction d'agent de l'État.

Sans doute aurait-il donc fallu attendre la remise de ce rapport avant de décider de cette indemnité, qui, d'une certaine façon, est une demi-mesure et tombe mal. En effet, nous ne disposons pas de données objectives sur le temps que les maires consacrent à leurs activités en tant qu'agents de l'État. Nous avons l'impression qu'un dédommagement uniforme a été prévu et qu'il n'est pas adapté à toutes les situations. Au mieux cette indemnité est-elle maladroite.