Sommaire
Présidence de Mme Anne Chain-Larché
Modification de l'ordre du jour
Suite de la discussion d'un projet de loi
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
Suite de la discussion d'un projet de loi
PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli
Mise au point au sujet de votes
Suite de la discussion d'un projet de loi
Médias, livre et industries culturelles
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
Médias, livre et industries culturelles (suite)
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (suite)
Mission Médias, livre et industries culturelles (suite)
médias, livre et industries culturelles
compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
Mise au point au sujet d'un vote
Suite de la discussion d'un projet de loi
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation (suite)
Engagements financiers de l'État
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État
Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux
Remboursements et dégrèvements
Engagements financiers de l'État (suite)
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État(suite)
Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux(suite)
Remboursements et dégrèvements(suite)
engagements financiers de l'état
compte d'affectation spéciale : participations financières de l'état
compte de concours financiers : accords monétaires internationaux
remboursements et dégrèvements
Présidence de Mme Anne Chain-Larché
vice-présidente
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Modification de l'ordre du jour
Mme la présidente. Mes chers collègues, en raison de l'indisponibilité de M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de l'Europe, M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes, demande le retrait de l'ordre du jour du mardi 16 décembre du débat préalable au Conseil européen des 18 et 19 décembre.
Le ministre Benjamin Haddad sera auditionné par la commission des affaires européennes le mercredi 17 décembre à seize heures trente. Cette audition sera ouverte à l'ensemble des sénateurs.
Y a-t-il des observations ?
M. Rachid Temal. Oui, madame la présidente !
Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Je comprends que les agendas des ministres soient chargés, mais une audition n'a tout de même pas la même valeur qu'un débat réunissant l'ensemble de notre assemblée en séance publique, quand bien même celui-ci n'a de débat que le nom – il ne donne d'ailleurs même pas lieu à un vote. La tenue d'un tel débat est le minimum syndical, si je puis dire !
Mme la présidente. Acte vous est donné de ces observations, mon cher collègue.
Y a-t-il d'autres observations ?…
Il en est ainsi décidé.
2
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport général n° 139, avis nos 140 à 145).
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Défense
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'examen du budget de la mission « Défense » revêt cette année un caractère particulier, en raison tant de l'ampleur de la hausse des crédits proposés que du contexte géopolitique et stratégique.
Non seulement la trajectoire de la loi du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (LPM) est respectée, mais l'effort initialement prévu, d'un montant de 3,2 milliards d'euros, est relevé de 3,5 milliards d'euros, ce qui porte les crédits à 57,1 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,7 milliards d'euros.
Ce budget revêt un caractère particulier pour une autre raison encore. Je veux parler de la manière dont le Parlement est informé des éléments qui le constituent et invité à les examiner et à les voter.
Vous ne m'en voudrez donc pas, madame la ministre, que je vous fasse part de nos interrogations ou réserves quant à la méthode du Gouvernement et à la sincérité de ce budget, même si je vous donne acte que, sur sollicitation du président de la commission des finances et de son rapporteur général, que je remercie de leur soutien, nous avons reçu hier, mais hier seulement, des éléments de réponse indispensables à la bonne compréhension de cette « surmarche » de 3,5 milliards d'euros.
Je m'arrêterai sur quatre points de vigilance.
Premièrement, la majoration des crédits, que vous justifiez par la perspective d'un projet de loi d'actualisation de la LPM, est bienvenue. En examinant de plus près la note explicative que nous avons reçue hier, je constate que vous faites une masse globale de la marche initiale de 3,2 milliards d'euros et de la surmarche de 3,5 milliards d'euros.
Ces 6,7 milliards d'euros supplémentaires contribueront certes à accélérer l'effort de réarmement et à amorcer une évolution de la programmation, mais ils permettront surtout de corriger ce que je nomme la faute originelle de la LPM, laquelle prévoyait en effet des financements insuffisants au regard des ambitions affichées. Démonstration est faite que les alertes émises depuis trois ans par le Sénat étaient justifiées.
Deuxièmement, la fin de gestion 2025 conditionne la bonne exécution du budget de l'année en cours et la sincérité des crédits prévus pour 2026. Or, entre les crédits gelés, dégelés, reportés ou annulés et les abondements finançant les surcoûts liés à notre présence militaire sur le flanc oriental ou à l'aide à l'Ukraine, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on n'y voit pas très clair. C'est tout de même près d'un milliard d'euros qui est en jeu !
Ce montant doit naturellement être considéré au regard du report de charges, qui est passé de 3,8 milliards d'euros fin 2022 à 8 milliards d'euros fin 2024, soit 24 % des crédits hors charges de personnel. Qu'en sera-t-il fin 2025 ? La perspective annoncée d'un report de charges de 8,6 milliards d'euros fin 2026, qui exploserait tous les compteurs, n'est pas pour nous rassurer. Une telle perspective interroge en effet la sincérité budgétaire, mais elle menace aussi la solidité de la base industrielle et technologique de défense (BITD), portant un coup rude au concept d'économie de guerre introduit dans la LPM.
On ne peut à la fois afficher des ambitions en loi de finances initiale et bricoler, comme ce fut le cas cette année, une fin de gestion reposant systématiquement sur le financement des surcoûts par des annulations de crédits d'autres programmes ou par des reports de charges sur l'année suivante.
Troisièmement, à l'opacité budgétaire s'ajoute une opacité relative à l'état réel de nos forces. Madame la ministre, à qui ferez-vous croire que nos adversaires attendent la présentation des indicateurs budgétaires de disponibilité des matériels et d'activités pour connaître la réalité de l'état de nos armées et leur degré de préparation ?
Vous ne pouvez pas demander au Parlement de vous allouer davantage de moyens, et, dans le même temps, restreindre son information. Le fait que, avec d'autres collègues, j'ai personnellement accès à un certain nombre d'informations ne peut être considéré comme une réponse satisfaisante, puisque nous ne pouvons pas faire état desdites informations publiquement.
Plus le budget augmente, plus l'information du Parlement doit être complète et sincère. Vous ne pouvez pas, au moment où vous demandez aux Français de faire des efforts et où vous souhaitez les sensibiliser à l'état des menaces – en témoignent les déclarations du chef d'état-major des armées devant les maires de France ou encore le kit de survie –, cacher le degré de préparation au combat, sauf à accréditer la thèse selon laquelle ces indicateurs seraient mauvais.
M. Stéphane Sautarel. Très bien !
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Quatrièmement, je ne trouve nulle trace, ni dans les présents crédits ni dans la note qui nous a été transmise hier, du service national volontaire, qui a fait l'objet d'une annonce récente du Président de la République. Quelle en est la traduction concrète dans le budget 2026 en termes d'infrastructures, d'encadrement ou de frais de fonctionnement, madame la ministre ?
En conclusion, madame la ministre, compte tenu de l'accentuation de la menace, nous adhérons à l'augmentation des crédits de la défense. Mais une augmentation ne fait pas une politique ! De ce point de vue, la réponse à la question que, avec votre prédécesseur devenu Premier ministre, vous avez posée hier aux députés – « Approuvez-vous le principe d'une augmentation du budget de la défense pour soutenir une montée en puissance plus rapide de nos forces armées dès 2026 ? » – ne saurait constituer un blanc-seing.
Pour être approuvé par le Parlement et compris par la population, l'effort de défense doit s'accompagner d'une véritable communication sur l'état des forces, notre capacité à les mobiliser et les objectifs quantitatifs et qualitatifs à atteindre.
Le Parlement est dans son rôle quand il contrôle l'action du Gouvernement : la défense n'échappe pas à ce principe constitutionnel et démocratique.
Présenter la menace sans la confronter à nos capacités de riposte, c'est prendre le risque de fonder l'effort demandé non pas sur l'adhésion raisonnée, qui serait de nature à rassembler la Nation autour de sa défense et de sa souveraineté, mais sur la peur, qui est bien souvent mauvaise conseillère.
En donnant un avis favorable au vote des crédits de la présente mission, nous faisons plus que souhaiter que vous déposiez au plus vite, devant le Parlement, une actualisation de la LPM, laquelle nous permettra de tracer une perspective crédible pour nos armées et de lever les non-dits de ce budget ; nous vous le demandons solennellement ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)
M. Pascal Allizard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », qui rassemble les moyens dédiés au renseignement, à la prospective et à l'innovation de défense, connaîtra une hausse substantielle de ses crédits en 2026. Quelque 2,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,3 milliards d'euros en crédits de paiement sont en effet prévu, en hausse respectivement de 27 % et 10,5 %.
Les moyens consacrés à l'innovation atteindront 1,4 milliard d'euros, soit une augmentation de 127 millions d'euros par rapport à 2025. Cette progression permettra d'investir dans des domaines clefs – quantique, intelligence artificielle, hypersonique, robotique, spatial – et de financer des démonstrateurs aussi majeurs que le drone sous-marin océanique, les armes à énergie dirigée, ou encore l'avion spatial Vortex.
Au-delà de ces projets d'innovation planifiée, le retour d'expérience ukrainien nous a enseigné que l'innovation devait aussi plus que jamais s'inscrire dans le temps court. Cela suppose une subsidiarité accrue des crédits au profit des forces, une simplification du code de la commande publique, une adaptation du régime de responsabilité pénale des acheteurs publics et le recours aux architectures ouvertes pour intégrer rapidement de nouvelles technologies. Nous souhaitons que ces points figurent dans la prochaine actualisation de la LPM.
Les crédits du programme 144 visent également à soutenir une BITD innovante et résiliente. Or, en dépit de la LPM, les PME, qui portent souvent les innovations de rupture, demeurent sous-représentées dans les études menées en amont.
Nos alertes successives relatives à la frilosité des investisseurs privés commencent à produire des effets. Ces avancées au plan national contrastent toutefois avec la doctrine trop restrictive de la Banque européenne d'investissement (BEI), qui continue de refuser tout financement aux entreprises produisant armes et munitions. Il convient de lever rapidement ce frein, madame la ministre, car cela envoie un mauvais signal aux investisseurs.
Enfin, au-delà des questions de financement, il semblerait que les entreprises de la BITD se voient opposer des refus d'assurance de plus en plus nombreux. Il nous faudra suivre l'évolution de cet inquiétant phénomène avec une grande vigilance.
Pour conclure, les crédits du programme 144 nous paraissent à la hauteur des enjeux. Nous estimons en effet qu'ils donneront à nos forces armées les moyens d'anticiper, d'innover et de se préparer au durcissement du contexte stratégique mondial. Nous appelons donc à l'adoption de ces crédits. (M. Bruno Rojouan applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)
Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Au bénéfice des observations que je ferai sur le volet renseignement du programme 144, je souscris à l'avis favorable que mon collègue Pascal Allizard, que je remercie, vient d'émettre sur les crédits de la présente mission.
Les deux services que ce programme finance, la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD), relatent la permanence d'un haut niveau de conflictualité, du fait du durcissement des crises tous azimuts, de la réévaluation du risque de prolifération, mais aussi de la résurgence des foyers de menace terroriste.
Ces axes d'effort du renseignement confirment les constats déjà établis par la délégation parlementaire au renseignement, dont j'ai l'honneur d'être membre et qui est présidée par notre collègue Cédric Perrin, dans son rapport d'activité pour l'année 2023-2024. Nous y évoquions en effet les défis devant lesquels les leçons tirées des conflits au Sahel ou en Ukraine, les stratégies nucléaires agressives, le retour d'expérience des jeux Olympiques de Paris 2024, ou encore le développement des menaces hybrides placent le renseignement français.
Loin de renvoyer à une réalité lointaine et diffuse, les menaces hybrides sont bien concrètes, puisque chaque citoyen peut être atteint, dans son quotidien, par des manipulations de l'information ou pâtir de la paralysie d'entreprises ou de services publics, et ce sans aucune déclaration de guerre.
Sur le plan intérieur, la DRSD est chargée de la défense des emprises militaires et des entreprises stratégiques de notre industrie de défense. Il faut sensibiliser le tissu de sous-traitants de la BITD, notamment les TPE et PME au risque d'attaques cyber et de menaces hybrides, telles que les survols de drones et les sabotages que l'on observe en Pologne et dans les États baltes frontaliers de la Biélorussie et de la Russie.
Ce contexte explique que les crédits de paiement prévus pour 2026 augmentent de 13 %, pour s'établir à 579 millions d'euros, à raison de 549 millions d'euros pour la DGSE et de 30 millions d'euros pour la DRSD.
Au total, en incluant les crédits de personnel du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », ce sont près de 1,3 milliard d'euros qui seront consacrés à la DGSE et à la DRSD.
Une attention particulière doit être accordée à la fidélisation des membres civils de leur personnel, car ils ne bénéficient pas des mêmes garanties de carrière que les militaires.
Prévu par la loi de programmation militaire 2024-2030, cet effort en faveur du renseignement a été confirmé par la revue nationale stratégique 2025. En effet, préserver l'autonomie d'appréciation de notre pays et garantir sa souveraineté décisionnelle constitue un objectif stratégique. À l'heure où la stratégie nationale de sécurité américaine ne garantit plus ni le partage de renseignement ni même une vision commune du monde, c'est même une priorité.
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis. La France est maintenant le dernier pays de l'Union européenne à conserver une capacité autonome de renseignement. La crédibilité de notre dissuasion et la confiance que nous accordent nos partenaires et alliés dépendent de notre capacité à protéger cette exception française.
Mme la présidente. Il faut vraiment conclure !
Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis. Au bénéfice de ces observations, je vous propose, mes chers collègues, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'adopter les crédits du programme 144 relatifs au renseignement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Cédric Perrin applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Olivier Cigolotti, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, depuis plusieurs années, la Nation consent des efforts considérables en faveur du renforcement de notre défense.
La progression des crédits de paiement du programme 178 « Préparation et emploi des forces », de près de 11 % en 2026 et de 50 % au cours des cinq dernières années, l'atteste.
Après des années durant lesquelles nous avons encaissé les dividendes de la paix, nous assistons donc à un vaste retour de balancier. Durant cette période rétrospectivement heureuse, nous avions, pour reprendre les mots de Raymond Aron, « oublié que l'histoire est tragique ».
Dans le contexte budgétaire actuel, cet effort doit être salué. La loi de programmation militaire a été complétée d'une surmarche de 3,5 milliards d'euros. Mme la ministre a par ailleurs annoncé que la LPM serait actualisée en début d'année 2026, ce qui, à la lumière des dernières déclarations américaines, mais aussi de l'agressivité russe, portée par un puissant courant impérialiste, se révèle de plus en plus nécessaire.
Les crédits alloués au programme 178 visent à relever ces défis. Hélas ! même avec plusieurs milliards d'euros, on ne saurait résoudre des années de sous-investissement d'un coup de baguette magique.
Les efforts consentis au profit du programme 178, cœur de la mission « Défense », si je puis dire, devront donc être menés avec constance. Il nous faut en effet créer les meilleures conditions d'entraînement des hommes et d'entretien des matériels afin de nous assurer que, le moment venu, nous serons prêts à mener des combats de haute intensité. De tels combats, que nous n'avons pas menés depuis des dizaines d'années, paraissent en effet redevenir la norme jusque sur notre continent.
Comme l'ont souligné les différents chefs d'état-major, les armées sont donc lancées dans une course contre la montre pour se tenir prêtes au choc. Elles ont ainsi mené une réflexion très structurée autour du maintien des équipements en condition opérationnelle, dont le coût représente un peu moins de la moitié des crédits du programme.
Le retour d'expérience du front ukrainien est en effet sans appel : la guerre moderne ressemble beaucoup à la guerre d'autrefois, mais elle est plus violente encore, avec des destructions de matériel et un champ de bataille dominé par des nuées de drones, où le moindre mouvement est immédiatement interprété à l'aide de l'intelligence artificielle. Telle est la nouvelle réalité.
Cette discussion budgétaire complexe ne doit pas nous faire perdre de vue l'essentiel : nous ne sommes pas les agresseurs, mais il nous faut honorer la promesse républicaine, la plus élémentaire depuis la bataille de Valmy, qu'est la défense de notre territoire et de nos intérêts stratégiques les plus vitaux.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 178. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nicole Duranton applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Michelle Gréaume, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, au milieu de ce tourbillon guerrier, je tiens à rappeler qu'en dépit de la difficulté de cette mission, notre pays doit avant tout œuvrer à la paix et à la désescalade.
En tant que rapporteure pour avis, avec Olivier Cigolotti, des crédits du programme 178, je veux donc croire que les efforts budgétaires substantiels consentis en faveur des armées constituent moins une préparation à la guerre qu'une garantie de paix et de sécurité pour nos concitoyens sur notre territoire.
Les crédits destinés à la préparation opérationnelle des forces suivent en 2026 la trajectoire prévue par la LPM, ce qui doit permettre une montée en puissance progressive des forces terrestres, aériennes et navales. Nous devons à nos soldats les meilleures conditions possible, de sorte qu'ils soient en mesure de faire face le mieux possible aux défis de la haute intensité.
Des sujets d'inquiétude bien identifiés demeurent, en particulier la reconstitution des stocks de munitions nécessaires à l'entraînement. Comme l'a rappelé le chef d'état-major des armées devant notre commission, il faut en effet tirer à l'entraînement pour être prêt le jour du combat.
L'année 2026 devrait à ce titre se révéler riche d'enseignements, puisque l'exercice interarmées de très grande ampleur nommé Orion commencera en février. Cet exercice d'entraînement constituera également une démonstration de notre détermination face à nos grands compétiteurs, lesquels doivent parfaitement mesurer notre volonté de nous défendre contre toute attaque.
Les crédits du programme 178 sont également consacrés au bien-être des troupes et à la solidité de la préparation physique et morale des soldats.
Je tiens à ce titre à souligner la réorganisation du service de santé des armées (SSA), qui doit pivoter d'une logique de guerre lointaine, avec des pertes modérées, à une logique de guerre d'attrition, dont le front ukrainien offre, hélas ! chaque jour une illustration.
Souffrant d'un manque alarmant de médecins et d'infirmiers, le SSA est toutefois confronté aux mêmes défis que la médecine civile. En dépit des efforts engagés, la situation continue de se dégrader, puisque quelque 109 postes restent à pourvoir. Il faudra du temps pour revenir à un effectif satisfaisant, en ligne avec nos objectifs.
En tout état de cause, et même si j'estime qu'il nous faudra veiller avec une vigilance toute particulière à ce que ces crédits soient mis au service de la protection de la Nation, la commission a donc émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, les crédits inscrits au programme 212 « Soutien de la politique de la défense » pour le soutien aux armées, sur lesquels porte l'avis que Marie-Arlette Carlotti et moi avons élaboré, s'élèvent en 2026 à 25,8 milliards d'euros en autorisation d'engagement et à 25,6 milliards d'euros en crédits de paiement, respectivement en hausse de 4,6 % et de 3 %.
Ces crédits servent d'abord à assurer la remontée en puissance de notre format d'armée.
Je rappelle que les schémas d'emplois fortement négatifs appliqués entre 2021 et 2023 ont creusé, en trois ans, un écart de 6,3 unités entre les cibles de recrutement et les effectifs réels. En 2024 et en 2025, l'exécution des schémas d'emplois s'est améliorée, si bien que l'on peut accueillir avec une confiance raisonnable l'objectif de création de 834 équivalents temps plein (ETP) en 2026, objectif conforme à la trajectoire de la loi de programmation.
Je regrette toutefois qu'au regard de ce contexte la surmarche budgétaire de 3,5 milliards d'euros ne concerne pas le volet ressources humaines du budget des armées. Un des enjeux de l'actualisation de la loi de programmation sera – nous l'espérons – le desserrement de l'enveloppe des dépenses de titre 2, de manière à financer concomitamment une trajectoire réaliste et des mesures d'attractivité ambitieuses.
Sur ce dernier point, la politique du ministère a déjà porté des fruits. Le niveau de recrutement est correct et les indicateurs de fidélisation s'améliorent. Les réformes indemnitaires et indiciaires récentes n'y sont pas pour rien. La refonte de la grille des officiers, mise en paiement en 2026, en est le dernier volet, très attendu.
Ne tardons pas à effectuer une évaluation complète de ces réformes, car l'inflation et la progression du Smic pourraient rattraper les indices d'entrée de grille plus rapidement que prévu, et la fiscalisation de certaines primes limiter les ambitions de soutien au pouvoir d'achat.
Quant à l'intégration d'une partie des primes dans le calcul de la pension, promise par le plan « fidélisation 360 », elle est hélas ! encore reportée.
Les crédits alloués aux infrastructures dont dépendent les conditions de vie et de travail du personnel et des familles sont encore en augmentation, ce qui est nécessaire, car il s'agit de chantiers de longue haleine. Il nous faut poursuivre les efforts pour combler le décalage entre les moyens engagés et le ressenti des militaires sur le terrain.
Le nombre de logements domaniaux disponibles étant appelé à baisser en raison des chantiers de rénovation programmés, nous resterons attentifs aux conditions de logement et de relogement en 2026.
En tout état de cause, nous saluons l'amélioration du service rendu aux familles logées, ainsi que de l'accompagnement offert aux familles de militaires à l'occasion d'une mutation, de même que les efforts de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les armées, qui ont fait l'objet d'un rapport d'inspection et d'un plan d'action ambitieux en 2024.
En conclusion, notre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de soutien aux armées du programme 212. (Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marie-Arlette Carlotti, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en cas d'affrontement majeur, nos 200 000 militaires ne pourront pas défendre le pays à eux seuls. Il faut de la masse combattante, disent les états-majors.
À la dégradation du contexte international s'ajoutent des problèmes démographiques, en particulier la baisse du nombre de naissances. Il nous faut donc réorganiser notre outil de défense pour nous orienter vers la construction d'une armée hybride : une armée de métier au statut conforté, des réservistes mieux intégrés et une cohésion nationale à renforcer.
Mon collègue Jean-Pierre Grand a rappelé les mesures de soutien aux militaires d'active qui, depuis quatre ans, ont été prises avec l'appui constant – je le souligne – de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.
J'insisterai pour ma part sur le nécessaire renforcement du lien armée-Nation.
Le premier instrument en est naturellement le renforcement de la réserve opérationnelle. La doctrine d'emploi des réservistes a été clarifiée, de sorte qu'ils sont désormais mieux intégrés à notre stratégie de défense. De meilleures pratiques de gestion ont de plus été mises en place.
En matière de recrutement, la tendance est encourageante, puisque les objectifs pour 2025 ont été dépassés dès le mois d'octobre et que les crédits destinés à la masse salariale des réservistes seront fortement revalorisés en 2026, pour atteindre 319 millions d'euros.
Afin de renforcer la résilience de la société, il convient également d'insuffler un esprit de défense à nos jeunes. L'année 2025 a vu la réforme de la Journée défense et citoyenneté (JDC), qui est devenue plus immersive, plus proche du quotidien des militaires et mieux orientée vers le recrutement potentiel.
Un lien numérique durable sera établi dès la JDC entre le ministère et la jeunesse ; il permettra, le moment venu, de solliciter les compétences nécessaires à la défense nationale.
Face à une menace potentielle, les armées ont besoin du soutien de la Nation. Il nous faut rompre avec l'idée que la guerre s'est éloignée et qu'elle ne nous concernerait plus. Nous devons parler aux Français de l'état du monde, des menaces hybrides, des risques dans l'espace et dans le cyberespace. Un grand débat national s'impose.
Dans les prochains mois, nos militaires engageront donc un débat avec la société civile. Entre une nécessaire mise en garde et des propos alarmistes, le chemin est toutefois étroit, si bien que la parole militaire doit être manipulée avec beaucoup de précautions.
Enfin, le Président de la République a proposé l'instauration d'un service militaire volontaire. Nombreux sont nos voisins qui ont tranché la question ou qui en débattent.
Le service militaire volontaire nous paraît souhaitable, dans la mesure où il contribuerait à renforcer le lien armée-Nation et offrirait aux jeunes citoyens l'opportunité de s'engager.
Afin d'éviter les écueils du service national universel (SNU), une telle initiative aurait toutefois dû être précédée d'une étude d'impact. En outre, cette annonce n'a pas été accompagnée de précisions quant aux modalités de financement de ce dispositif – je comprends que vos services estiment son coût à 116 millions d'euros, madame la ministre –, ce qui est très désagréable.
En tout état de cause, la préparation du prochain projet de loi de programmation militaire devra inclure le cadrage budgétaire précis de ce dispositif, ainsi que des éléments indiquant clairement son articulation. Nous allons donc y travailler.
Sachez toutefois que le financement du service militaire volontaire ne devra en aucun cas peser sur le soutien apporté aux militaires en activité ni sur l'amélioration des infrastructures des unités d'active.
La commission a néanmoins émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 212, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Cédric Perrin applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le budget des armées que nous examinons aujourd'hui met en œuvre la LPM 2024-2030, avec les moyens supplémentaires qui découlent des fameuses marche et surmarche, pour un montant total de 6,7 milliards d'euros ; devraient progressivement s'y ajouter les 16 milliards d'euros empruntés par la France au titre du programme européen Safe (Security Action for Europe).
Cette hausse est d'autant plus attendue que la LPM avait été calculée au plus juste. Si, en ces temps de disette budgétaire, une telle augmentation peut paraître considérable, je rappelle toutefois que le budget de la défense de notre voisin allemand augmentera de près de 32 milliards d'euros en 2026, pour atteindre 108,2 milliards d'euros.
Cette disproportion croissante des moyens entre les deux rives du Rhin est particulièrement criante concernant l'équipement des forces. Alors que les crédits de paiement du programme 146 « Équipement des forces » devraient passer de 18,69 milliards à 22,88 milliards d'euros, en augmentation de 22,4 %, le budget d'équipement de l'armée allemande devrait atteindre l'an prochain 52 milliards d'euros, répartis entre 29 contrats d'achat d'équipement.
Pour réduire l'effet de cet écart de moyens, il serait bon de clarifier nos choix et ainsi de donner de la visibilité aux acteurs tant industriels que militaires, d'autant qu'il est évident que nous ne pourrons pas tout faire en même temps.
Nous savons que le moteur T-Rex du standard F5 du Rafale, le programme Stratus, le porte-avions de nouvelle génération, ainsi que le programme Frappe longue portée terrestre (FLP-T) nécessitent des investissements importants qui ne sont pas fléchés dans le projet de loi de finances pour 2026.
Par ailleurs, des acquisitions sont prévues, parmi lesquelles on trouve de nombreux objets structurants : une frégate de défense et d'intervention (FDI), deux avions Rafale, deux avions Saab GlobalEye suédois, quatre systèmes sol-air moyenne portée terrestre de nouvelle génération (SAMPT-NG), 350 véhicules blindés Serval, ainsi que de nombreux consommables – lots de bombes AASM (armement air-sol modulaire), missiles antichars, munitions téléopérées (MTO) et drones.
Toutefois, nous avons encore du mal à comprendre quels moyens sont affectés à tel ou tel programme d'armement, notamment concernant les crédits de marche et de surmarche. Cette inquiétude est partagée par plusieurs industriels que notre commission a auditionnés : ils ont été confrontés à des arrêts de paiement en début d'année 2025, à des reports de commandes, puis à l'allongement des délais de paiement.
Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui constatent que le montant des crédits supplémentaires équivaut à celui des reports de charges, ce qui réduit à peu de chose les marges de manœuvre.
Dans ces conditions, madame la ministre, nous souhaiterions connaître les priorités du Gouvernement. Il nous semble en effet que la consultation des industriels sur l'actualisation de la LPM s'impose, alors même que les choix qui doivent être faits auront nécessairement des conséquences sur l'organisation de la BITD.
Une clarification des contrats permettrait aux industriels de s'engager plus sereinement, alors que certains d'entre eux sont actuellement obligés de financer sur leurs fonds propres le développement de nouveaux programmes, avec toute l'incertitude que cela représente en l'absence de commandes.
Madame la ministre, une large majorité vous a accordé sa confiance, hier, à l'Assemblée nationale, en apportant son soutien à la stratégie de défense nationale que vous avez présentée.
Si notre commission a adopté un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2026 du programme 146 et, plus largement, de la mission « Défense », nous considérons toutefois que des efforts doivent encore être accomplis en matière de prévisibilité, de dialogue et de priorisation. Nous espérons que les débats sur l'actualisation de LPM permettront d'avancer dans cette direction.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Hugues Saury, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir sur quelques-uns des grands programmes de ce budget.
Le lancement de la réalisation du standard F5 du Rafale est prévu en 2026, pour une date prévisionnelle de livraison du premier exemplaire en 2033. Il se pose toutefois un problème, que nous avions déjà relevé l'année dernière : la LPM ne prévoit pas de crédits pour le développement du nouveau moteur T-Rex de Safran. Si l'État a finalement contribué au financement des études en 2025, pour un peu plus de la moitié des sommes requises, le projet de loi de finances pour 2026 ne comporte pas, en l'état, de crédits à cette fin, alors que les besoins sont estimés à plusieurs dizaines de millions d'euros par le motoriste français. Un dialogue se poursuit avec l'industriel pour répartir la prise en charge de ce coût de sorte que les travaux puissent se poursuivre. Nous souhaitons vivement que ces échanges aboutissent et que nous avancions sur cet important dossier.
Le porte-avions nucléaire de nouvelle génération constitue un autre programme structurant. Le Gouvernement devrait décider, avant la fin de l'année, le lancement de sa construction, en notifiant aux industriels un premier marché portant sur l'ingénierie du bateau et la réalisation des chaudières nucléaires. Celui-ci laisserait ouvertes certaines options concernant les fonctionnalités, qui devraient être précisées dans un second marché attendu en 2028 ou 2029. Ce second marché permettrait, notamment, de doter le bâtiment d'un système de combat et d'équipements électroniques et numériques parmi les plus récents.
Nous devrons faire des choix stratégiques pour l'avenir ; il s'agit de maintenir certaines capacités, mais aussi de combler des manques devenus problématiques.
Citons à cet égard le programme Stratus, conduit par la France, le Royaume-Uni et l'Italie. La société industrielle a assuré une part importante du financement de celui-ci en 2025, et un dialogue est en cours avec la direction générale de l'armement (DGA) pour en déterminer l'équilibre économique. Ce programme est d'autant plus prioritaire qu'il constitue la pierre angulaire de la coopération en matière de défense entre la France et le Royaume-Uni, dans le cadre des accords de Lancaster House.
Citons également le système de combat aérien du futur (Scaf), qui n'a pas progressé comme il aurait fallu au cours de l'année 2025. Nous sommes en effet confrontés à un double blocage, industriel et politique, qui porte sur le rôle respectif des partenaires, mais aussi sur la possibilité d'exporter le futur avion. Nous verrons dans les prochaines semaines comment évoluera ce projet ; pour le prolonger, il faudra absolument que soient clarifiés de manière définitive les apports de chacun et la répartition des tâches. Une levée des obstacles politiques, pourtant identifiés comme des lignes rouges, est tout aussi indispensable.
Citons enfin la question des feux de profondeur. Une consultation est en cours pour développer une capacité souveraine ; un rendez-vous est prévu au printemps 2026 pour tester des démonstrateurs. Nous souhaitons que les tests du printemps prochain permettent d'établir clairement les performances et les coûts des différents systèmes qui auraient leurs partisans, afin qu'un choix éclairé soit réalisé.
Sous réserve de ces remarques, qui démontrent la persistance d'un certain flou, madame la ministre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 146 de la mission « Défense ».
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes et pour la bonne information de tous, je vous indique que dix-sept amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures trente. Nous devrons donc terminer l'examen de cette mission à treize heures, afin de commencer celui de la mission « Médias, livre et industries culturelles » à quatorze heures trente.
Défense (suite)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Guillaume Gontard. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Gisèle Jourda applaudit également.)
M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, contrairement aux autres ministères, loin de gérer la pénurie, celui des armées présente un budget porté à plus de 57 milliards d'euros, en hausse de 13 %. En y adjoignant les pensions, c'est même une enveloppe de 66 milliards d'euros.
Le budget des armées est désormais supérieur au budget de l'éducation nationale. Le symbole est d'autant plus lourd que le Président de la République, pourtant le plus jeune de notre histoire, a comme aucun autre abandonné notre jeunesse.
Du tri infâme de Parcoursup à l'abandon à la dépression d'une entière classe d'âge pendant le confinement, en passant par la destruction méthodique du service civique, rien n'a été fait pour accompagner notre jeunesse, qui est la première victime de l'explosion des inégalités et la première inquiète face au monde bientôt invivable que nous lui laisserons – rien !
Pis encore, le seul avenir que dessine le Président de la République pour toute une génération, c'est l'injonction à la procréation pour produire des soldats : c'est la guerre, l'uniforme et la soumission à l'autorité !
Cette vision réactionnaire s'est traduite par la transformation du service national universel, dont personne ne voulait, en un service national volontaire, dont nous voyons encore mal l'utilité et l'articulation avec la réserve opérationnelle. Là-dessus, le chef d'état-major est venu jeter le trouble au sein de toute la Nation, en évoquant « la perte de nos enfants », dans un discours qu'un gradé de la Grande Muette ne devrait pas tenir en République. Que de maladresses !
Mais que l'on ne se méprenne pas : nous partageons sans réserve le constat alarmant dressé par le pouvoir exécutif et le commandement militaire.
Depuis 2022, les écologistes, quand bien même ils portent le pacifisme au cœur de leur histoire, n'ont eu de cesse d'affirmer qu'aucune paix ne pourra être atteinte dans un monde régi par le rapport de force entre les empires. Nous consentons à ce rapport de force pour préserver notre sécurité, nos valeurs et nos idéaux ; ce « nous » est naturellement un « nous » européen.
Notre soutien à l'Ukraine est et demeurera sans faille. Nous ne nous sommes pas opposés à la loi de programmation militaire ni à aucune de ses déclinaisons budgétaires.
Toutefois, si notre soutien ne peut pas être plus ferme, c'est bien de votre fait, madame la ministre. En effet, l'ambition du Gouvernement pour notre armée nous semble déraisonnable au regard de nos moyens ; son articulation européenne, insuffisante. Surtout, nous sommes de plus en plus consternés par votre facilité à décaisser des milliards d'euros pour nos armées en les retirant partout ailleurs, mais aussi à appeler à la mobilisation nationale, voire à invoquer l'économie de guerre, tout en refusant, avec un dogmatisme virant à l'absurde, de faire contribuer les plus aisés de nos compatriotes.
Cela est d'autant plus incompréhensible que nos milliardaires sont de plus en plus nombreux à aller se pavaner à la Maison-Blanche, qui n'est plus une alliée, ou à laisser libre cours, sur les antennes et les ondes en leur possession, au confusionnisme prorusse.
Cet élan patriotique auquel vous appelez le pays, les milliardaires ne peuvent pas et ne doivent pas l'ignorer. Ils doivent y consentir ou tomber les masques : contribuent-ils à la défense nationale, ou préparent-ils l'arrivée au pouvoir des marionnettes de Poutine que sont les élus du Rassemblement faussement national ? (M. Joshua Hochart s'exclame.)
Madame la ministre, sans cela, vous ne pourrez pas convaincre toutes les Françaises et tous les Français de l'urgence de la situation.
Vous ne pouvez pas demander au peuple de choisir entre la défense de nos derniers services publics et la réponse à une menace qui, aussi réelle soit-elle à nos yeux, est encore endiguée à 3 000 kilomètres d'ici, entre le Dniepr et le Donbass, par l'héroïsme ukrainien. C'est une faute devant l'histoire ! En 1914, l'Union sacrée a eu pour prix la création de l'impôt sur le revenu. Personne ne comprendrait que, face à une menace de même ampleur, notre réponse ne soit pas aussi ambitieuse.
Le temps me manque pour développer autant qu'il le mérite le dernier sujet que je veux aborder ; j'y reviendrai lundi prochain, lors du débat qui suivra la déclaration du Premier ministre sur la stratégie de défense nationale.
Au regard des menaces hybrides auxquelles l'Europe doit faire face, le fonctionnement ensiloté de notre cadre budgétaire et de nos politiques publiques est particulièrement handicapant. Pour reprendre l'image du psychologue Abraham Maslow, « il est tentant, si le seul outil dont vous disposez est un marteau, de tout considérer comme un clou ».
En aucune façon notre réponse ne peut être uniquement militaire. Notre dépendance aux hydrocarbures, à l'uranium, aux engrais azotés de l'ennemi risque de nous tuer aussi certainement que la seringue d'héroïne tuera le corps dans lequel elle est logée. Renforcer notre défense tout en sabrant les budgets de la transition énergétique et agricole et en restant inactifs face au démantèlement de notre appareil industriel est totalement vain.
Voilà quatre ans que nous interpellons inlassablement le Gouvernement à ce sujet ; encore une fois, madame la ministre, nous n'obtenons pas la moindre réponse de votre part, de sorte que nous serons obligés de nous abstenir sur les crédits de la mission « Défense », que nous ne pouvons dissocier du reste du budget. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avant d'aborder les crédits de la mission « Défense » pour 2026, je veux, tout simplement, saluer nos forces armées.
Les femmes et les hommes qui portent l'uniforme servent la France avec un courage, un sang-froid et une constance qui forcent le respect. Ils n'attendent aucunement des discours ; ils attendent que la Nation tienne ses engagements. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous voterons les crédits, en augmentation, de cette mission, car leur donner les moyens d'agir n'est pas une option, mais un devoir.
Cela dit, si notre soutien aux militaires est clair, notre inquiétude sur l'orientation de la politique extérieure l'est tout autant, madame la ministre. Depuis près de dix ans, la diplomatie française, réformée et même déconstruite par la Macronie, ne mène plus vraiment la danse ; elle suit le mouvement. Là où la France pesait, arbitrait et proposait, elle se contente désormais, trop souvent, d'accompagner la stratégie d'autres puissances ou de se faire le relais de la Commission européenne, qui ne devrait pas avoir voix au chapitre. Nous ne sommes plus acteurs de plein droit, mais spectateurs d'une diplomatie qui n'est pas la nôtre.
Cette évolution n'est pas neutre ; elle nous entraîne dans une posture de plus en plus va-t-en-guerre. Le candidat Macron disait en 2017, en s'adressant aux Français : « Mme Le Pen et ses amis seront réfugiés au château de Montretout, et ce sont vous et vos enfants qui iront faire la même guerre qui en a fait tomber tant et tant ». Aujourd'hui, c'est le même Président de la République qui laisse entendre qu'il faudra que nos enfants aillent sur le front. Sa logique d'alignement finit par supplanter celle de l'équilibre, qui a pourtant été la marque de notre pays.
Pendant que notre diplomatie s'efface, on nous explique qu'une défense européenne intégrée serait la panacée. Or, à force de vouloir mutualiser, harmoniser et fédéraliser, on finit par toucher à ce qui ne se partage pas : la décision d'engager nos forces, la maîtrise de nos moyens et la souveraineté de notre dissuasion nucléaire.
Le Rassemblement national n'est pas opposé à la coopération européenne, bien au contraire, mais nous refusons qu'elle se transforme en abandon silencieux de ce qui fait la singularité et la force de notre défense. La France ne peut pas déléguer la décision de la guerre et de la paix. Elle ne peut pas non plus laisser ses intérêts vitaux se dissoudre dans un compromis technocratique à vingt-sept.
Alors oui, nous voterons ce budget, parce qu'il soutient nos armées et leurs actions, mais nous resterons vigilants et même exigeants sur la trajectoire politique qui l'accompagne. En effet, au-delà des chiffres, nous restons attachés à une idée simple : les intérêts supérieurs de la Nation doivent prévaloir, toujours.
Mme la présidente. La parole est à M. André Guiol. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et SER.)
M. André Guiol. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la France navigue aujourd'hui dans une zone de grands fonds, dans une mer où les courants contraires se multiplient et où les vents sont capricieux. Lorsque la houle moutonne et que le vent adonne, on s'assure que le gouvernail répondra parfaitement.
Mes chers collègues, c'est avec le bon sens marin de l'anticipation que le groupe RDSE aborde l'examen des crédits de la mission « Défense ».
Le contexte stratégique actuel n'est plus celui d'un horizon lointain ; il est immédiat. L'invasion de l'Ukraine, la montée des tensions en Méditerranée, la prolifération des missiles hypersoniques, l'avènement des essais de drones et les attaques hybrides visant nos infrastructures font voler en éclats les certitudes qui ont accompagné l'après-guerre froide. La France doit décider si elle entend demeurer une puissance militaire crédible ou devenir une puissance spectatrice.
Le projet de loi de finances pour 2026 traduit clairement cette exigence. La hausse de crédits qui nous est proposée, d'un montant de 6,7 milliards d'euros, permet de maintenir un modèle militaire que la plupart de nos partenaires ne possèdent plus : une armée complète, capable d'opérer dans tous les champs et dans toute la gamme de conflits. La question est donc de savoir non pas si nous dépensons davantage, mais si nous dépensons assez pour conserver l'avantage.
Trois enjeux structurent ce débat.
Le premier est celui du temps. En effet, la conflictualité se durcit beaucoup plus vite que nos cycles capacitaires. Construire un sous-marin ou un système de défense aérienne, former un pilote ou constituer une réserve opérationnelle requiert des années. La menace, quant à elle, s'exprime en semaines ou en mois. Une hausse budgétaire sans accélération de son exécution ne change pas la réalité stratégique. Si nous voulons « gagner la guerre avant la guerre », il nous faut réduire les délais de décision, raccourcir les chaînes industrielles, accélérer l'instruction et améliorer encore la disponibilité des matériels.
Le deuxième enjeu est celui de la souveraineté technologique. L'Europe parle de défense commune, mais reste profondément fragmentée. Les programmes de coopération révèlent la coexistence d'intérêts divergents. L'Allemagne raisonne selon la doctrine d'une puissance industrielle terrestre ; la France, selon une tradition de projection et de dissuasion. Ce décalage n'est pas sans lien avec les retards du système de combat aérien du futur, le Scaf, ni avec l'incertitude qui entoure le projet du char européen.
Le problème n'est donc pas seulement technique, il est aussi stratégique : peut-on bâtir une souveraineté européenne lorsque les conceptions de l'usage de la force ne convergent pas ? La France ne peut renoncer ni à son autonomie ni à son industrie.
Le troisième enjeu est celui du format. Il importe non pas tant de savoir s'il nous faut un ou plusieurs porte-avions, mais de définir quels sont les risques et quelle est la stratégie. J'en profite pour rappeler que le coût de notre dette équivaut chaque année à celui de cinq porte-avions.
Dans un monde saturé de missiles hypersoniques et de brouillages électromagnétiques, la valeur d'un grand bâtiment ne réside pas seulement dans sa capacité à projeter une puissance autonome ; elle est aussi dans sa projection et dans son intégration dans un dispositif européen. Ces critères ne sont pas anecdotiques, mais conditionnent nos investissements, notre flotte d'escorte, nos infrastructures portuaires – on le constate, aujourd'hui, sur la base navale de Toulon – et, enfin, notre diplomatie de défense.
Dans cette perspective, le projet de loi de finances pour 2026 constitue un instrument essentiel et non un aboutissement. Les crédits annoncés permettront de consolider la dissuasion, d'améliorer la disponibilité des matériels et de renforcer les capacités aériennes, navales et terrestres. La responsabilité politique consiste, ici, à reconnaître que la sécurité va au-delà d'une simple traduction budgétaire.
Sans la protection militaire de nos territoires, sans la sécurité de l'espace, de nos mers et de nos réseaux numériques, ni l'éducation, ni la santé, ni la continuité économique ne peuvent être garanties.
Les membres du RDSE voteront les crédits de la mission « Défense », parce que l'abstention ou l'hésitation auraient un coût stratégique bien supérieur. Notre but n'est pas de préparer un conflit, mais d'empêcher son déclenchement. Là sera notre véritable victoire ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Cédric Perrin applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Bonneau. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. François Bonneau. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'examen du projet de loi de finances est certes un exercice complexe, cette année comme l'année dernière, mais les menaces qui s'accumulent envers la France et l'Europe sont beaucoup plus concrètes, et nous obligent à doter nos forces armées des moyens nécessaires pour protéger nos concitoyens.
Ce qui était encore un tabou il y a quelques années fait désormais l'objet d'une prise de conscience parfaite : la France doit être prête en cas de conflit armé. Ce conflit ne serait d'ailleurs que la continuité de la guerre informationnelle et cyber que mène le Kremlin, pour ne citer que lui, à notre encontre.
En regardant plus en détail ce que financent les programmes de la mission « Défense », nous ne pouvons que saluer la surmarche de 3,5 milliards d'euros qui se traduit dans ce projet de loi de finances. Elle vient renforcer nos besoins dans des domaines aussi cruciaux que nos stocks de munitions, nos capacités spatiales et de communication, la préparation opérationnelle des forces, mais aussi nos capacités en drones.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait appelé, dès 2021, au rattrapage du retard pris par la France en matière de drones. Ces conclusions, depuis lors vérifiées par les retours d'expérience de leur usage massif en Ukraine, doivent enfin être pleinement prises en compte.
Nous tenons aussi à souligner le manque de transparence autour des dépenses concrètes que permettra cette surmarche. En effet, nous ne parvenons pas à en connaître les contours. Ce manque de transparence se retrouve aussi sur la disponibilité des matériels et l'activité des forces.
Nous comprenons que toutes ces données ne puissent être rendues publiques. Néanmoins, des indicateurs nous permettant de les mesurer étaient présents jusqu'en 2023 dans la maquette de performance du programme 178 « Préparation et emploi des forces ». La suppression de ces indicateurs, qui nous permettaient d'évaluer concrètement l'efficacité de la dotation budgétaire que nous votons, est compréhensible, mais dommageable. Leur réapparition dans le prochain projet de loi de finances serait à étudier ; ainsi, le Parlement serait en mesure d'exercer pleinement sa mission de contrôle, surtout lorsqu'il vote des budgets en hausse.
Il faut aussi évoquer les reports de charges qui s'accumulent sur le budget du ministère des armées. À la fin de 2022, ils s'élevaient à 3,88 milliards d'euros ; à la fin de 2024, ils dépassaient les 8 milliards d'euros. Si cette hausse s'explique par l'inflation et le report de crédits, ou par son utilisation comme variable d'ajustement, il nous paraît important de lancer l'alerte sur ce sujet : en effet, cette dette pèse sur la soutenabilité des dépenses de la mission « Défense ». Les intérêts moratoires dus par le ministère des armées augmentent, imposant à notre BITD une prise de risque accrue pour innover, sans aucune garantie, à long ou court terme, de produire les matériels nécessaires, ce qui fragilise sa trésorerie.
Avant de conclure, je reviendrai sur deux sujets qui me semblent primordiaux.
En premier lieu, nous attendons l'actualisation de la loi de programmation militaire. Le texte voté en 2023 était déjà ambitieux, mais il convient désormais de revoir nos ambitions à la hausse. La dégradation continue des équilibres internationaux nous l'impose ; nous ne cesserons de le répéter : l'époque des dividendes de la paix est derrière nous, n'en déplaise à certains admirateurs du Kremlin, en France ou à l'étranger. Cette actualisation, nous l'attendions pour l'automne 2025 ; elle est repoussée au premier trimestre 2026. Nous ne pouvons qu'espérer qu'elle ne sera pas victime de l'instabilité chronique qui frappe le pays.
En second lieu, il est nécessaire d'avoir une vision prospective et stratégique pour nos équipements de demain. Nous devons investir dans les systèmes du futur et dans l'intelligence artificielle, tout en sortant d'une forme de conformisme qui nous conduit à renouveler des programmes dont l'intérêt est contestable. N'achetons pas sur étagère des matériels étrangers qui ne correspondraient pas à nos besoins ! Cette vision stratégique doit aussi nous inciter à arbitrer les questions de gouvernance des grands projets d'armement qui, pour l'instant, accumulent du retard.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. François Bonneau. Face à l'ensemble de ces défis, pour reprendre les mots du général de Gaulle, « être inerte, c'est être battu ».
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand. (Mmes Marie-Arlette Carlotti et Gisèle Jourda applaudissent.)
M. Jean-Pierre Grand. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, un grand nombre de responsables politiques, de diplomates et de militaires nous alertent sur le retour de la force brute dans les relations internationales. Certains n'y voyaient qu'une hypothèse théorique, mais la réalité a balayé ces illusions. De l'Ukraine au Moyen-Orient, de la Méditerranée à l'Indo-Pacifique, nous assistons à une multiplication de signaux qui nous rappellent que la paix se maintient non pas par des déclarations, mais par la solidité de notre outil de défense.
La décision prise par les membres de l'Alliance atlantique, lors du sommet de La Haye, d'élever l'effort de défense à 3,5 % du PIB d'ici à 2035 n'est pas une posture politique, mais une nécessité. L'Europe est redevenue une zone dont la puissance militaire déterminera les grands équilibres du monde.
Le budget militaire de la France que nous examinons aujourd'hui y contribue par son changement de rythme et une hausse historique de ses crédits. Avec plus de 66 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de plus de 11 %, le budget militaire de notre Nation fait plus que respecter la trajectoire prévue : il l'accélère.
Cette accélération est rendue incontournable par l'intensité des conflits observés et par les ruptures technologiques, qui transforment les guerres et obligent notre défense à s'adapter. L'Europe est clairement menacée. Les multiples formes des agressions russes nous rappellent la permanence de cette menace. La France, seule puissance nucléaire de l'Union européenne, doit assumer son rôle particulier. Présente dans tous les milieux, qu'ils soient terrestre, maritime, aérien, spatial ou numérique, et sur tous les continents, la France dispose d'une particularité stratégique qui conforte sa singularité.
Nous avons donc le devoir de préparer nos forces, de moderniser nos capacités, d'assurer la protection de notre territoire, hexagonal et ultramarin, et de soutenir nos alliés.
Essentielle dans la prévention comme le règlement des conflits, notre diplomatie sera d'autant plus entendue et efficiente que nos forces militaires stratégiques seront redoutées.
C'est pourquoi je suis reconnaissant au chef d'état-major des armées (Cema) d'avoir réveillé les consciences populaires en s'adressant avec franchise à ceux qui les représentent le mieux aujourd'hui, les maires de France.
Le budget pour 2026 renforce nos équipements majeurs, soutient notre dissuasion et accélère des programmes que le conflit ukrainien a rendus essentiels, comme la production de munitions modernes et la généralisation des drones dans les unités.
Ce budget prend en considération les nouveaux champs de confrontation, que ce soit l'espace, le cyber, le renseignement ou les systèmes de commandement. Il consolide la montée en puissance de notre industrie de défense, sans laquelle tout effort militaire resterait théorique.
En outre, un outil de défense n'est rien sans les femmes et les hommes qui le servent. Pour la première fois depuis longtemps, les créations de postes prévues sont alignées sur ce qui a été programmé. Les mesures d'attractivité commencent à produire leurs effets. Les infrastructures d'hébergement et de soutien sont renforcées.
Il reste beaucoup à faire, notamment pour le logement ou l'accompagnement des familles, mais la direction prise est la bonne. Chaque soldat, marin ou aviateur doit se sentir soutenu et protégé par la Nation.
Une défense crédible repose aussi sur une société forte. La France n'est pas assez préservée de la montée des tentatives d'ingérence, de manipulation informationnelle ou d'opérations d'influence destinées à fracturer l'opinion ou à miner la confiance populaire dans nos institutions.
Le budget pour 2026 donne à nos services les moyens de mieux détecter et de combattre ces actions hostiles. Notre résilience dépend de la cohésion, de l'esprit civique, de la capacité de notre société à distinguer l'information fiable de la désinformation. Nous devons renforcer cette résistance intérieure et rester maîtres de nos choix.
L'augmentation du budget est salutaire, mais des interrogations subsistent, notamment sur la lisibilité de la surmarche ou sur la situation des reports de charges. Ce sont des questions légitimes, qui ne remettent toutefois pas en cause cette exigence fondamentale : le risque de guerre de haute intensité est bien là, et la France doit s'y adapter.
Ainsi, marqué par un effort important, le budget de la mission « Défense » est un investissement pour la France, pour notre sécurité et pour notre capacité à défendre nos intérêts économiques et nos valeurs universelles. Les dictateurs ont toujours théorisé leurs funestes projets : ne l'oublions pas, aujourd'hui moins que jamais.
Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, et en particulier parce que ce budget renforce concrètement notre capacité à protéger la Nation, les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront en faveur de l'adoption des crédits de la mission « Défense ». (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)
M. Cédric Perrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2026 restera dans les mémoires, à n'en pas douter, comme un exercice politique et institutionnel hors normes, mais notre pays y verra aussi un exercice de grammaire stratégique inédit, par lequel nous devons parvenir à faire concorder des temps budgétaire et militaire aujourd'hui largement désynchronisés.
En effet, c'est précisément au moment où nos finances sont au plus bas que nous devons fournir l'effort le plus résolu en matière de défense. C'est au moment où nous devons affronter les conséquences de décennies d'irresponsabilité budgétaire que la marche du monde nous astreint à restaurer des capacités militaires méthodiquement atrophiées au fil des ans.
La traduction financière de cette situation est abrupte : l'an prochain, les deux seuls postes de dépenses de l'État à connaître une hausse réellement significative seront la défense et le remboursement des intérêts de notre dette.
Naturellement, mon groupe et moi-même ne pouvons qu'être favorables à l'adoption des crédits supplémentaires proposés pour nos armées, tant ils sont nécessaires. Mais, dans le même temps, un tel niveau d'engagement de la Nation, dans un contexte budgétaire aussi dégradé, nous oblige : il doit plus que jamais nous conduire à démontrer à nos concitoyens le bien-fondé de chaque centime engagé.
À ce titre, je rappelle que les dépenses militaires sont parmi les dépenses publiques les plus performantes d'un point de vue économique.
En effet, investir un euro dans la défense, c'est gagner près de deux euros de PIB. C'est investir au profit de milliers d'entreprises, grandes ou petites, dont l'activité maille l'ensemble du territoire et fournit plus de 200 000 emplois. C'est investir dans le développement d'une recherche et dans le maintien de savoir-faire industriels qui irriguent tout notre tissu économique. En d'autres termes, investir dans la défense, c'est investir dans une croissance solide et de long terme.
Il s'agit, je l'affirme, d'une utilisation vertueuse des deniers publics, qui ne peut toutefois se suffire à elle-même. L'accès des entreprises de défense aux financements privés, en particulier bancaires, reste ainsi un sujet absolument central.
Mais, plus fondamentalement, il faut dire à nos concitoyens à quel point l'augmentation des crédits destinés à nos armées n'est pas un luxe, et encore moins une lubie. Au contraire, cela revient à regarder le monde tel qu'il est et, surtout, tel qu'il advient.
En effet, nul ne peut plus ignorer que notre monde bascule dans une nouvelle ère, marquée par le durcissement des confrontations et le recours désinhibé à la force. Sous l'effet conjugué des mutations économiques et technologiques, de l'effacement du réflexe multilatéral, des ambitions et des rivalités, les équilibres géopolitiques se redéfinissent avec une rapidité parfois déconcertante.
Dans ce contexte où logiques impériales et politiques de puissance façonnent de plus en plus l'ordre international, le premier défi qui se pose à la France et à ses partenaires européens réside, bien entendu, dans le retour de la guerre de haute intensité sur le continent et dans la poursuite de notre soutien à la résistance de l'Ukraine.
Depuis maintenant près de quatre ans, ce conflit a bouleversé toutes nos certitudes stratégiques et remis en cause tous les piliers de notre architecture de sécurité. Il a conduit la Russie à tester avec toujours plus de hardiesse nos réactions comme nos capacités, hier dans le cyberespace ou dans la sphère informationnelle, aujourd'hui avec le survol de nos espaces aériens par des avions militaires ou des drones, demain, peut-être, en se livrant à des provocations qui ne se limiteront plus aux seuls champs hybrides.
N'oublions pas, en effet, que la Russie a avant tout pour ambition de long terme de favoriser le retour aux sphères d'influence. Cette ambition repose sur le principe d'une vassalisation naturelle des faibles par les puissants. Inutile de préciser le rôle que Poutine et les siens attribuent à la Russie dans ce cadre, et celui qu'ils attribuent aux nations européennes…
Gardons à l'esprit que cette guerre a également servi de matrice au renforcement d'une alliance sino-russe qui, non contente de nous être ouvertement hostile, pourrait aboutir à une mise en concordance des appétits déclarés de Pékin en mer de Chine avec ceux de Moscou en Europe.
Or c'est précisément dans ce moment, sans doute le plus dangereux pour l'Europe depuis des décennies, que l'Alliance atlantique se fait la plus évanescente, entre menaces américaines de désengagement militaire et coups de boutoir politiques ou commerciaux portés aux pays du vieux continent. Nous ne pouvons fermer les yeux sur les nouvelles orientations politiques des États-Unis, exprimées avec brutalité dans leur stratégie nationale de sécurité parue il y a quelques jours.
Face à cet inquiétant tableau, nous n'avons d'autre choix que d'investir et d'innover pour nous tenir prêts à la guerre d'aujourd'hui, pour anticiper la guerre de demain. Ce qui se joue désormais, ce n'est pas simplement le rang de notre pays sur la scène internationale ou la défense d'intérêts plus ou moins lointains ; ce qui se joue aujourd'hui, c'est bien la sécurité des Français et la défense de notre liberté comme de notre souveraineté.
C'est pourquoi la trajectoire financière en nette hausse inscrite dans la dernière loi de programmation militaire était indispensable, même si – on ne peut que le constater aujourd'hui – elle demeure insuffisante.
En effet, lors de l'adoption de la LPM, puis lors de l'examen des projets de loi de finances qui ont suivi, nous avons été un certain nombre à expliquer que la programmation était insuffisamment dotée au regard des besoins qu'elle entendait satisfaire.
Je ne reviendrai pas sur les 13 milliards d'euros de crédits extrabudgétaires, qui sont en partie virtuels, comme nous le redoutions, mais l'exécution de la LPM a mis en exergue des limites qui vont au-delà de la chronique normale d'un début de programmation en croissance.
Entre le niveau réel de l'inflation, la charge croissante des restes à payer, le poids du lancement de grands programmes, ou encore les surcoûts imprévus de l'activité opérationnelle, d'importantes rigidités sont ainsi très vite apparues. Celles-ci se sont immédiatement traduites par une forte augmentation des reports de charge, une contrainte accrue sur les crédits consacrés à l'équipement des forces, et des commandes qui se sont fait désespérément attendre par nos industriels.
Les 6,7 milliards d'euros ajoutés au budget des armées l'an prochain permettront d'éloigner le risque de thrombose et de rétablir des marges de manœuvre qui apparaissaient de plus en plus minces : ils sont donc essentiels.
Mais un doute subsiste : s'agira-t-il, comme cela nous est présenté, d'un moyen d'accélérer et d'amplifier notre effort de réarmement, ou bien, plus modestement, de faire en sorte que la programmation budgétaire rattrape la programmation physique ?
Certes, ce projet de loi de finances permet des hausses de commandes. Elles sont réelles et importantes. Toutefois, il reste difficile de discerner les investissements qui relèvent de la trajectoire initiale de la LPM de ceux qui seront rendus possible l'année prochaine grâce à la surmarche budgétaire.
Or, madame la ministre, au vu des sommes engagées, une meilleure transparence est indispensable, autant pour accréditer la sincérité de la programmation que pour en renforcer l'acceptabilité.
En outre, malgré des déclarations au plus haut niveau concernant le nombre insuffisant de nos Rafales ou de nos frégates, je ne trouve pas, dans ce projet de loi de finances pour 2026, les premiers jalons vers l'élargissement du format de nos forces, dont nous savons qu'il demeure bien modeste au regard des enjeux.
Je salue cependant les efforts substantiels qui seront réalisés sur des segments dont les conflits récents ont montré le caractère fondamental : les drones, les munitions – notamment complexes et téléopérées –, la défense sol-air, ou encore les feux dans la profondeur.
À ce titre, l'augmentation, la diversification et la modernisation de nos capacités de frappe à distance sont effectivement d'une incontestable urgence. Mais permettez-moi de souligner que cette urgence ne doit pas nous conduire à la précipitation au moment de combler certains trous capacitaires, notamment concernant le remplacement du lance-roquettes unitaire. Dans ce domaine, suivons plutôt le sillon tracé par la LPM en cherchant une solution avant tout efficace et de préférence souveraine – comme le Sénat l'a demandé à plusieurs reprises.
Par ailleurs, l'indispensable « dronisation » de nos trois armées ne peut être dissociée de son corollaire défensif : je veux bien entendu parler de la lutte anti-drones, dont tout indique qu'elle doit devenir une priorité stratégique absolue. Ce domaine demeure néanmoins largement exploratoire ; les progrès à réaliser sont donc encore immenses. Ils ne sauraient se résumer à de simples slogans, annonçant par exemple la constitution de murs anti-drones qui n'ont absolument aucun sens…
Entendons-nous bien, la dimension européenne, puisque c'est bien d'elle qu'il s'agit, est fondamentale.
Dans son volet communautaire, qui ne cesse de s'étoffer, l'Europe doit bien sûr respecter scrupuleusement les souverainetés nationales, s'en tenir à un rôle de facilitatrice et ne pas chercher à exercer des compétences que les traités lui refusent explicitement.
En revanche, dans son volet intergouvernemental, elle peut nous permettre d'atteindre, dans certains segments, la masse, la cohérence ou la supériorité technologique indispensables pour l'emporter lors d'un affrontement majeur. Elle peut, au travers d'une préférence européenne qui reste à approfondir et à ancrer définitivement, nous permettre d'atteindre une autonomie stratégique toujours plus nécessaire.
Toutefois, la conduite de certains projets pour lesquels des sommes importantes sont mobilisées doit évoluer. Je pense bien sûr en premier lieu au système de combat aérien du futur (Scaf) et au système principal de combat terrestre (MGCS), qui sont aujourd'hui tombés dans l'ornière. Même si l'horizon de ces programmes devra, d'une manière ou d'une autre, être éclairci rapidement, ils illustrent en tout cas un impératif plus élevé, celui de repenser la méthode employée pour piloter les coopérations industrielles.
En tout état de cause, et en particulier depuis les récentes déclarations du Président de la République concernant le service national, les dotations de nos armées pour 2026 illustrent que la trajectoire financière de long terme devra être une nouvelle fois revue, puisque le service national volontaire reste à ce jour non financé. Au-delà des 6 milliards d'euros supplémentaires d'ores et déjà annoncés pour 2027, c'est donc bien une actualisation de la LPM qui devra être rapidement mise en chantier.
Il s'agit aussi d'être en cohérence avec le nouvel objectif fixé par l'Otan, celui de dépenses en matière de défense atteignant 3,5 % du PIB à l'horizon 2035. Naturellement, il s'agirait d'un nouvel effort absolument considérable. Je souhaiterais néanmoins le mettre en perspective avec les dépenses militaires réalisées durant une autre période particulièrement dangereuse pour notre continent, la guerre froide, au cours de laquelle les crédits ont globalement oscillé dans une fourchette allant de 3,5 % à 6 % du PIB.
Soulignons par ailleurs que les surcroîts d'investissements réalisés ou prévus par nombre d'autres nations, amies comme concurrentes, les placent à un niveau d'ambition comparable, voire supérieur à celui que nous évoquons.
Enfin, mes chers collègues, je ne saurais conclure mon propos sans évoquer les hommes et les femmes qui servent sous nos drapeaux, sans lesquels la puissance de nos armées se réduirait à une simple vue de l'esprit. En rejoignant nos forces, ils ont fait un choix grave, le plus noble qui soit. En conscience, ils ont accepté de risquer leur vie pour le service de la patrie.
À ceux de ses enfants qui se battent pour elle, la France se doit donc de toujours honorer sa promesse. Jamais elle ne tolérera une quelconque forme de légèreté vis-à-vis de leur engagement. Jamais elle ne pourra, comme le Kremlin le fait en Ukraine, considérer leur vie comme quantité négligeable ou réduire leur sacrifice à un simple instrument.
S'il doit demeurer indéfectible, le souci que nous avons de nos soldats ne peut nous conduire à ignorer ce qu'est la réalité de la guerre ou à blâmer ceux qui la connaissent et qui nous la rappellent.
Cette réalité, nous devons accepter que d'autres, demain, puissent chercher à nous l'imposer. Il faut donc nous y préparer, tant matériellement, en renforçant les moyens de nos armées, que moralement, en offrant à ceux qui le souhaitent – ils sont nombreux ! – un cadre adapté et pertinent pour s'engager et servir.
C'est ainsi que, dans le monde tel qu'il se dessine, nous demeurerons une puissance crédible et dissuasive, que nous demeurerons une nation libre et souveraine, que nous conjurerons le spectre de la guerre au lieu de le hâter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mmes Marie-Arlette Carlotti et Hélène Conway-Mouret applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton.
Mme Nicole Duranton. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes à un tournant de notre histoire : en témoignent la guerre en Ukraine, l'instabilité au Sahel, les conflits au Proche-Orient, la rivalité entre les grandes puissances, ou encore les actions de guerre hybride menées par la Russie sur notre propre continent, qui se traduisent par de la désinformation, des manipulations, des sabotages, ainsi que des survols de drones et des incursions aériennes.
Il nous faut regarder la réalité en face et réinvestir concrètement dans la défense de nos intérêts et la sécurité de notre pays.
Permettez-moi, avant d'aller plus loin, de saluer l'action remarquable de Sébastien Lecornu, alors ministre des armées, qui a su, avec détermination et clairvoyance, piloter ce réarmement historique. Sous son impulsion, la France a franchi un cap décisif : grâce à la mise en œuvre de la loi de programmation militaire, les crédits ont été préservés des coupes budgétaires et nos programmes d'armement ont été sécurisés. Les commandes atteignent des niveaux jamais égalés dans notre histoire récente. C'est le fruit d'un travail acharné et d'une vision stratégique assumée, travail poursuivi par notre nouvelle ministre des armées, Catherine Vautrin.
Il faut désormais un budget à la hauteur des enjeux qui nous attendent. Pendant des années, le budget de la défense était celui qui n'augmentait jamais.
Aujourd'hui, la menace est tout autour de nous : désinformation, cyberattaques, ingérences étrangères… Nous devons nous préparer pour y faire face : réarmer, produire nos munitions en masse, innover, former nos soldats, anticiper, renforcer la résilience de nos concitoyens et susciter, chez les plus jeunes, le patriotisme et l'esprit de défense !
C'est en ce sens que le Président de la République a annoncé, le 27 novembre dernier, le retour d'un service militaire volontaire, initiative que je salue vivement.
Le projet de loi de finances pour 2026 traduit très concrètement cette inflexion : la mission « Défense » voit ses crédits augmenter massivement, avec près de 7 milliards d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière.
Cette dynamique permet de tendre vers l'objectif fixé par le Président de la République : doubler le budget de la défense en une décennie. C'est un effort sans précédent depuis la fin de la guerre froide.
Comme l'ont rappelé les précédents orateurs, ce budget exceptionnel traduit des priorités claires.
La première, c'est l'équipement de nos forces. Nous allons enfin moderniser massivement notre armée de terre, avec des centaines de nouveaux blindés et des chars Leclerc rénovés, renforcer notre flotte aérienne avec de nouveaux Rafale et avions de transport, poursuivre la construction de nos sous-marins nucléaires et frégates. Les livraisons concrètes s'accélèrent, les commandes explosent. C'est un changement de rythme enfin perceptible, comme le soulignent nos rapporteurs.
La deuxième priorité, c'est la préparation opérationnelle de nos soldats. Nos forces doivent s'entraîner davantage, manœuvrer dans des conditions réalistes. Les crédits destinés à l'entraînement et à l'entretien des matériels progressent sensiblement. L'objectif est clair : passer d'une armée calibrée pour la paix à une armée préparée aux combats de haute intensité. Nos militaires doivent pouvoir compter sur du matériel disponible et des munitions en quantité suffisante. L'exercice Orion de 2026, le plus ambitieux depuis la fin de la guerre froide, témoignera de cette montée en puissance.
La troisième priorité, c'est l'innovation et le renseignement. Face aux drones, à l'intelligence artificielle, aux cyberattaques et aux menaces spatiales, nous devons investir massivement dans les technologies de rupture. Le budget de la recherche de défense bondit, permettant de financer des projets d'avenir : drones de combat, armes laser, satellites de surveillance, et bien d'autres capacités stratégiques. Parallèlement, nos services de renseignement voient leurs moyens considérablement renforcés pour faire face aux menaces hybrides et à la guerre économique et protéger notre industrie de défense.
La quatrième priorité, ce sont nos militaires et le lien avec la Nation. Recruter, fidéliser, former : voilà les maîtres mots. Les salaires et les primes augmentent, les conditions de vie s'améliorent, les logements sont rénovés, les familles de militaires sont mieux accompagnées lors des mutations. Surtout, nous reconstruisons une véritable armée de réserve : l'objectif est d'atteindre le ratio d'un réserviste pour deux militaires d'ici à 2035. C'est toute la Nation qui doit se préparer !
Cet effort budgétaire irrigue aussi directement notre tissu industriel. De la Bretagne à la Provence, de la Normandie au Grand Est, nos grandes entreprises et nos PME bénéficient de carnets de commandes pleins, et créent de ce fait des milliers d'emplois qualifiés dans nos territoires. C'est notre souveraineté industrielle et technologique que nous rebâtissons.
Le défi est certes colossal, mais il est à la hauteur d'une puissance militaire comme la nôtre.
Pour résumer, ces crédits de la mission « Défense » traduisent un effort budgétaire hors normes, à la hauteur des menaces auxquelles notre pays est confronté. Ce budget engage la France sur le temps long : il renforce nos capacités, soutient notre industrie, améliore la situation des personnels et permet de franchir une nouvelle étape dans les rapports entre la Nation et ses armées.
Notre responsabilité de législateur est triple : il importe à la fois de donner à nos armées les moyens dont elles ont besoin, de garantir la sécurité des Français, et de réaffirmer la place de la France parmi les grandes puissances militaires.
Comme l'a déclaré le chef d'état-major des armées, « il faut montrer que nous faisons cet effort, car si nous ne sommes pas capables de le faire maintenant, nous envoyons un nouveau signal de faiblesse. […] La détermination et la force morale de notre nation sont mises à l'épreuve. »
Dans cette perspective, les membres du groupe RDPI voteront en faveur de l'adoption des crédits de cette mission. Il y va de notre sécurité à tous ! Il y va de notre avenir et de celui de la France ! (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. André Guiol applaudit également.)
M. Rachid Temal. Mesdames les ministres, d'abord, permettez-moi de vous saluer au nom du Parlement, puisque c'est la première fois, ce matin au Sénat, que vous défendez le budget de vos ministères, l'Assemblée nationale vous ayant privé d'un premier examen de ces crédits… Soyez les bienvenues dans notre belle et bonne maison !
J'ai également une pensée pour les femmes et les hommes qui composent nos forces armées. Je rends hommage à leur engagement et à leur professionnalisme. Rappelons qu'ils protègent nos compatriotes, notre pays, nos valeurs, que ce soit dans l'Hexagone, dans les outre-mer, sous mandat tricolore, sous mandat de l'ONU, au titre de l'Union européenne ou dans la cadre de l'Otan – je pense à cet instant à la Roumanie, pays dans lequel nous sommes nation-cadre pour le compte de l'Alliance atlantique.
Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le budget pour 2026 de la mission « Défense » est sans doute le premier d'un nouveau cycle. En effet, nous changeons de monde : nous connaissions autrefois les deux blocs, qui incarnaient une forme d'équilibre, puis est venue l'époque des dividendes de la paix, qui a désormais pris fin. Aujourd'hui, il faut le dire clairement et le garder à l'esprit : nous sommes à l'ère du retour des empires !
Dorénavant, la France et l'Europe sont seules. Elles doivent en prendre conscience et l'assumer. Elles doivent aussi agir en conséquence, sous peine de « sortir de l'histoire ». Tel est le défi auquel notre Nation est confrontée, mesdames les ministres.
L'année 2025 marque le début d'un cycle particulier. Permettez-moi de dresser un rapide bilan de cette année si particulière, à commencer par celui de la situation outre-Atlantique.
Je pense bien sûr à l'investiture du nouveau président des États-Unis d'Amérique, en janvier dernier.
Je pense aussi aux propos du vice-président américain, tenus dès le mois de février à Munich, lequel appelait non pas à détruire l'Europe, mais à changer les régimes européens, en faisant très clairement campagne pour des partis nationalistes, qu'ils agissent en France, en Allemagne, ou en Angleterre.
Enfin et surtout, je tiens à évoquer la nouvelle stratégie de sécurité nationale américaine, publiée il y a quelques jours : celle-ci reflète une nouvelle doctrine, très simple, qui consiste à réaffirmer un camp occidental, que les États-Unis veulent naturellement dominer de tous points de vue, notamment sur le plan civilisationnel, et dans lequel il faudrait réintégrer la Russie.
Comme je le disais, la France et l'Europe sont donc seules : on peut désormais imaginer que les États-Unis se retirent, totalement ou partiellement, ou à tout le moins que leur présence s'amoindrisse au sein de la défense européenne. Il faudra assumer cette nouvelle donne, à la fois financièrement et politiquement – j'y reviendrai tout à l'heure.
C'est aussi au cours de l'année 2025 que nous avons pu observer, encore une fois, le courage du président Zelensky, de ses forces armées et de son peuple, qui sont, je le souligne, attaqués pour la seconde fois par Vladimir Poutine. À toutes celles et tous ceux qui s'interrogent sur les raisons qui justifient que l'on poursuive le combat, je répondrai que c'est parce que le président russe ne cesse, depuis 1999 et son arrivée au pouvoir, d'attaquer les pays voisins de la Russie.
N'oublions pas non plus le chantage exercé par les Américains ces derniers mois : les États-Unis ont privé l'Ukraine d'armes et bloqué ses capacités de communication et d'information, ce qui l'a rendue aveugle aux attaques de drones ou de missiles. C'est aussi cela, la réalité de la politique américaine aujourd'hui !
Il ne serait pas inutile, mesdames les ministres, que nous rediscutions de l'accord de sécurité entre la France et l'Ukraine, enjeu central d'une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat et d'un vote, qui a eu lieu dans cet hémicycle il y a quelques mois. Si nous avons approuvé cette déclaration en grande pompe, nous n'avons plus eu de nouvelle de l'accord depuis lors. Il conviendrait de remettre ce sujet sur la table.
Il serait également important, comme l'a dit le rapporteur spécial, de reparler des moyens que nous consacrerons au soutien à l'Ukraine l'an prochain. En effet, d'après tous les spécialistes, la Russie sortira renforcée de ce conflit. Or elle sera toujours proche de nous, elle se situera toujours en Europe. Nous devons donc nous poser les bonnes questions. Il s'agit non pas de pactiser avec Poutine, mais d'envisager notre avenir. Après tout, comme se plaisait à le dire Napoléon, « on a la politique de sa géographie » !
Évoquons aussi la question chinoise. Le dernier voyage du Président de la République l'a bien montré : la Chine refuse de voir son soutien à la Russie remis en question. La Chine a aujourd'hui des visées impérialistes sur Taïwan, mais aussi sur l'Indo-Pacifique, zone où nous sommes présents et où vivent certains de nos compatriotes. Il faut bien avoir cette réalité à l'esprit. La Chine a fait de la Russie son nouvel allié, voire son nouveau vassal.
Je n'oublie évidemment pas les autres principaux conflits de cette année, parmi lesquels l'affrontement entre deux puissances nucléaires, l'Inde et le Pakistan, ou celui entre deux grandes puissances, l'une dotée de l'arme nucléaire, Israël, l'autre en passe de l'obtenir, l'Iran. Cette situation géopolitique pose quantité de problèmes.
Je ne m'étendrai pas davantage, mais je pourrais également évoquer les questions de la dronisation, du départ de la France du continent africain, de la situation au Moyen-Orient et de la guerre à Gaza, du dixième anniversaire des attentats terroristes de Charlie Hebdo, du Bataclan et du Stade de France, ainsi que de la guerre au Mali et au Sahel ; en France comme ailleurs, la menace terroriste ne faiblit pas.
Ce sont autant de formes de crise auxquelles il faut bien sûr ajouter le risque climatique. À cet égard, chacun sait bien que l'échec de la dernière COP conduira, demain, à de nouveaux différends autour de la question climatique – je pense évidemment à l'enjeu de l'accès à l'eau.
Voilà la réalité du monde, mes chers collègues.
Certes, il nous reste l'Otan… De ce point de vue, chacun s'est satisfait du consensus de La Haye : seraient portées à 3,5 % du PIB les dépenses militaires stricto sensu, avec 1,5 % supplémentaire pour les autres dépenses de sécurité, au sens large – chacun y mettra ce que bon lui semble…(Sourires.)
Mais soyons honnêtes : comment pourrions-nous accepter, comme il est indiqué dans la déclaration du sommet de La Haye, de lever les obstacles qui freinent la coopération entre industries de défense américaines et européennes ? Comment, dans le même temps, pourrions-nous continuer à affirmer qu'il nous faut développer une industrie européenne de la défense ? Ce sont autant des questions qu'il nous faut nous poser. En somme, oui à l'Otan, mais restons lucides !
Quant à la coopération européenne, comme d'autres l'ont dit avant moi, l'UE peut développer des dispositifs utiles en la matière ; cependant – disons-le franchement –, la défense doit continuer de relever de la compétence des États.
Le mois de juillet dernier a été marqué par la publication de la revue nationale stratégique, voulue par le Président de la République. Certes, nous avons entendu des annonces, mais, dans ce moment de bascule, notre salut tient davantage à notre capacité à relever un quadruple défi.
Il faut tout d'abord une volonté politique. Je crois que, dans l'ensemble, celle-ci existe, sauf au sein de certains partis qui ont plutôt tendance à regarder du côté de Moscou ou de Washington, et dans certains médias qui sont aujourd'hui des agents de propagande. À ce sujet, madame la ministre, je rappelle que Dominique de Legge et moi-même avons récemment commis un rapport au nom de la commission d'enquête sur les opérations d'influences étrangères : il serait temps que nous nous dotions d'une vraie politique nationale dans ce domaine.
Le deuxième effort doit être financier : celui-ci résultera notamment du débat budgétaire que nous avons ce matin. À ce propos, je sais bien que l'on parle d'une progression du budget de l'ordre de 6,7 milliards d'euros, mais l'honnêteté commande de dire que 3,5 milliards d'euros étaient déjà budgétisés. En réalité, la hausse n'est que de 3,2 milliards d'euros – c'est déjà beaucoup, mais il est bon de dire la vérité aux Français !
Il faut aussi une véritable volonté industrielle. En la matière, nous avons besoin d'une politique ambitieuse : passer des commandes ne suffira pas ; il sera nécessaire d'agir différemment, d'inventer de nouvelles manières de produire.
Enfin, le dernier défi qui se pose à nous est celui de la résilience. En la matière, il y a beaucoup à faire. Comment y associer les Français ? En vérité, il faut éviter de les affoler ; nous devons plutôt leur expliquer que nous sommes dans le camp de la paix. Aujourd'hui, la guerre et la violence sont en effet à chercher du côté du Kremlin ou de la Maison-Blanche. La France, elle, appartient bel et bien au camp de la paix. Comme nous y invitait Jean Jaurès, il faut être pour la paix tout en étant prêt pour gagner la guerre si la France est attaquée.
Mes chers collègues, revenons-en à ce budget. Comme cela a été rappelé, les crédits de la mission « Défense » sont en hausse ; c'est une bonne chose.
Mais la question qui se pose aujourd'hui est celle de l'architecture de notre défense, qu'il faut articuler différemment.
On a beaucoup évoqué le service national volontaire ces derniers jours. Il faudra s'interroger à la fois sur son financement et sur sa complémentarité avec les militaires professionnels et les réservistes. Il faudra permettre à ces volontaires de se rendre sur les théâtres d'opérations, notamment en Roumanie, faute de quoi il ne s'agira pas de véritables militaires. C'est un sujet qui me tient à cœur.
Au-delà de notre architecture de défense, des forces capacitaires de la France, du rôle de l'Otan et de l'Union européenne, notre devoir est de nouer des accords de partenariat avec certains pays du Sud. Ne nous laissons pas enfermer dans une logique où l'Occident serait contre le reste du monde. Nous n'y gagnerions rien.
Madame la ministre, nous souhaitons que le Parlement soit mieux associé à ces questions, en séance publique comme en commission, et que vous puissiez travailler en toute transparence avec l'ensemble des groupes politiques.
Les membres du groupe SER voteront en faveur de l'adoption de ces crédits, comme nous l'avons toujours fait. Je vous rappelle que nous avons très largement participé à la revue nationale stratégique et contribué à ce que la LPM soit bonifiée.
Aujourd'hui, nous voterons ce budget, tout en espérant qu'un débat sur la stratégie de défense de notre pays puisse s'engager par la suite. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. André Guiol et Olivier Cigolotti applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous procédons ce matin à l'examen des crédits de la mission « Défense ». Leur hausse inédite témoigne du basculement historique qui est à l'œuvre.
Avec 57 milliards d'euros, dont 14 milliards d'euros exclusivement dédiés à l'armement, ce budget pour 2026 croît encore de 6,7 milliards d'euros par rapport à 2025, soit une augmentation de 13 %.
Cette accélération du réarmement – 3,2 milliards d'euros prévus dans la LPM, auxquels le Président de la République a ajouté 3,5 milliards d'euros en juillet dernier – engage la France sur une trajectoire qui devrait, d'ici à 2030, la voir consacrer 100 milliards d'euros à sa défense chaque année.
Dans le même temps, on supprime 4 000 postes d'enseignants, on coupe dans les dotations de l'État aux collectivités locales, à hauteur de 7,6 milliards d'euros, et, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, on fait payer aux malades et aux plus vulnérables un impôt épouvantable de 3,6 milliards d'euros.
Pour faire avaler ce surarmement aux travailleurs, vous n'hésitez plus à créer un climat anxiogène, inédit pour notre jeunesse, avec des références au réarmement « accéléré ». Certains chefs militaires en appellent même à « accepter le risque de perdre des enfants »…
Ces discours ne garantissent pas la sécurité des Français : ils servent l'obsession guerrière d'Emmanuel Macron, car c'est son dernier moyen d'exister dans un pays qui le rejette !
Pourtant, cette stratégie militariste ne se fonde sur aucune rationalité stratégique. Les États européens membres de l'Otan dépensent trois fois plus pour leur défense que la Russie – 454 milliards de dollars contre 141 milliards en 2024. Ils disposent de quatre fois plus de navires de guerre, de trois fois plus de chars de combat, de véhicules blindés et d'artillerie que la Russie !
La position de notre groupe reste constante. Oui, la France a besoin d'une armée dissuasive, solide et compétente, mais elle ne doit servir qu'à la stricte défense de notre territoire national, de nos infrastructures et de nos populations.
Or ce budget organise un surarmement, dans une logique de projection extérieure et d'escalade permanente au-delà des besoins réels de défense du territoire. C'est cette dérive stratégique que nous dénonçons.
Les commandes ou livraisons prévues – avions A400M, porte-avions de nouvelle génération… – montrent que ce budget prépare une armée de haute intensité et de projections.
Dans le même temps, le volet humain ne représente que 3 % de la hausse totale. Le plan Fidélisation 360 reste symbolique, et plus de 80 % des crédits nouveaux bénéficient en réalité aux industriels et non aux militaires ou à leurs familles.
Relevons ensuite que les mots « désescalade » et « stabilisation » ont disparu des documents budgétaires, ce qui témoigne de ce basculement doctrinal. En effet, la doctrine française reposait depuis trente ans sur trois piliers : dissuasion, prévention, projection. Désormais, nous ne parlons plus que de réactivité, de puissance et de résilience. Notre pays ne cherche plus à éviter les conflits : il se prépare à les mener.
Notre opposition aux crédits de cette mission est renforcée par la hausse disproportionnée de la contribution française à l'Otan, de 10 % à 25 % selon les lignes, alors même que des faits de marchés truqués au sein de l'organisation sont documentés. Peut-on encore parler de courage, si la représentation nationale n'est plus capable de demander des comptes ? L'Europe parle d'autonomie stratégique, mais c'est une chimère !
Madame la ministre, à votre vision d'une France qui s'accroche à l'Otan, dépend des États-Unis et contribue aux profits du complexe militaro-financier, notre groupe oppose celle d'une France souveraine, libérée de l'Otan, s'appuyant sur la puissance publique et tournée vers la paix, l'innovation civile plutôt que militaire, et la justice sociale.
Nous voterons contre les crédits de cette mission et nous défendrons des amendements visant à améliorer la protection des femmes et des hommes qui incarnent nos armées. C'est leurs conditions de vie que nous proposerons en premier lieu d'améliorer. De même, nous plaiderons pour une meilleure prise en compte des enjeux de santé mentale et une revalorisation des moyens du service de santé des armées.
Je terminerai par une image simple. Une nation, c'est comme un arbre : il lui faut de la sève pour grandir, et des racines pour tenir. La sève, ce sont nos services publics, nos jeunes, nos travailleurs. Les racines, ce sont notre diplomatie et notre universalisme. Aujourd'hui, le budget de cette mission gonfle le tronc ; il alourdit les branches ; mais il assèche la sève et étouffe les racines.
Un arbre comme celui-là finit par casser. Nous voulons une France forte, une France qui construit la paix et donne des perspectives de fraternité à nos enfants ! (MM. Thierry Cozic et Mickaël Vallet applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cigolotti. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit également.)
M. Olivier Cigolotti. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en complément de l'intervention de mon collègue François Bonneau, il me semble important de rappeler que l'année 2026 marque la troisième annuité de la loi de programmation militaire, dans un contexte géostratégique profondément déstabilisé par de nombreux conflits, notamment la guerre en Ukraine.
Les crédits de la mission « Défense » sont ceux qui enregistrent la plus forte progression dans le PLF 2026 ; la défense devient la première politique publique de l'État en autorisations d'engagement. Dans un contexte général où des efforts significatifs de redressement des finances publiques sont consentis, il convient de saluer cet effort important.
Comme le Président de la République l'a déjà précisé cet été, au moment de la publication de la revue nationale stratégique actualisée, nous sommes à un point de bascule : la permanence d'une menace russe aux frontières de l'Europe, le recours de plus en plus désinhibé à la force dans de nombreuses régions du monde, la remise en question de nos alliances historiques et la révolution technologique modifient en profondeur la logique du champ de bataille.
Le contexte géopolitique dégradé dans lequel nous évoluons oblige l'armée à se tenir prête, car elle pourrait être mobilisée à tout instant et endurer une violente guerre d'attrition. Aussi nos armées doivent-elles pouvoir s'appuyer sur une base industrielle et technologique de défense solide pour se fournir en équipements en nombre accru et d'une meilleure qualité.
Si notre BITD compte des groupes importants, qui ont permis à la France d'être le deuxième exportateur mondial d'armes en 2024, elle compte aussi quelque 4 500 petites et moyennes entreprises, qui produisent un chiffre d'affaires de 30 milliards d'euros. Ces entités manquent souvent de fonds propres et hésitent parfois à se tourner vers des solutions de financement extra-européennes au risque de perdre leur indépendance.
Le financement des entreprises de la BITD est un enjeu de souveraineté. Elles doivent être soutenues et protégées, car elles constituent un maillage essentiel pour notre défense comme pour nos territoires.
À ce titre, nous nous félicitons de la création du fonds Bpifrance Défense en octobre dernier. Madame la ministre, lever les obstacles au financement de la BITD doit constituer une priorité pour votre ministère.
Par ailleurs, il serait intéressant que la proposition de loi relative au financement des entreprises de la base industrielle et technologique de défense française de notre excellent collègue Pascal Allizard, qui a été votée au Sénat, soit examinée par l'Assemblée nationale.
Je m'associe à l'alerte de notre collègue Gisèle Jourda sur la baisse des moyens de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD). En effet, cet acteur majeur du renseignement et de la sécurité des entreprises voit ses effectifs passer de 1 691 équivalents temps plein (ETP) à 1 609, alors que nos entreprises ont plus que jamais besoin d'être protégées contre toutes sortes de menaces hybrides : cyberattaques, sabotages, ou encore prises de participation hostiles.
Si les grands groupes ont les moyens de lutter contre ces menaces, il nous faut préserver notre réseau de petites et de moyennes entreprises de la BITD. Elles ont besoin d'être accompagnées.
Enfin, comme le démontrent de nombreuses études économiques, les investissements de défense ne sont pas des coûts improductifs. Ils peuvent favoriser la croissance à court et moyen terme, mais aussi augmenter la productivité à long terme grâce aux technologies dites duales.
De plus, ces investissements sont une forme d'assurance contre les risques de déstabilisation, de terrorisme, voire de conflits, et contre les effets économiques qu'ils emportent. Voilà une raison de plus pour sanctuariser le budget de la défense ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC, Les Républicains et SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre des armées et des anciens combattants. Madame la présidente, messieurs les présidents de commission, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens avant tout à vous remercie de votre engagement sur la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2026.
Je tiens également à remercier la ministre déléguée Alice Rufo, qui représentera le Gouvernement dans cet hémicycle ce soir, lors de l'examen des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».
Vous l'aurez compris, le cap de ce projet de budget dépasse largement nos sensibilités : il s'agit de la défense de la nation, de la protection des Français, de la préservation de notre liberté. Vous avez été très nombreux à brosser la situation stratégique internationale. Nous tirons la même conclusion : les dividendes de la paix appartiennent au passé.
Dans le contexte actuel, nous devons être au rendez-vous, car nos partenaires comme nos compétiteurs jaugent à la fois notre endurance, notre cohésion et notre crédibilité. Chaque jour, les nations réévaluent leur propre niveau d'exposition et de préparation.
Je dirai tout de suite un mot d'un moment qui a incontestablement constitué une bascule : le déclenchement, en 2022, de la guerre en Ukraine.
L'aide que nous apportons à ce pays s'élève à plus de 3 milliards d'euros. Elle prend la forme de cessions de matériel, d'aides à la formation, ou encore d'aide au maintien en condition opérationnelle, mais aussi d'un soutien politique et stratégique.
Nous avons également envoyé des soldats en mission sur le flanc oriental de l'Europe, dans le cadre des opérations Lynx et Aigle. Ces missions impliquent des surcoûts, qui ont été couverts en fin de gestion.
M. Temal a évoqué à l'instant l'accord de sécurité signé le 17 novembre dernier par le Président de la République et le Président Zelensky. Il porte sur l'équipement de l'Ukraine à court terme, mais aussi à plus longue échéance. En effet, nous souhaitons que lorsque, comme nous l'espérons tous, un accord de paix durable aura été signé, l'Ukraine soit en mesure d'assurer durablement sa protection.
Pour ce qui concerne l'Otan, la position du Gouvernement est très claire : nous disons oui à un pilier européen de l'Otan ! Pour le dire sans détour, en matière d'acquisition de matériel, au programme Purl (Priority Ukraine Requirements Lists), je préfère le programme « Curl » ; en d'autres termes, l'argent des Européens doit aller à la base industrielle et technologique de défense européenne. L'ensemble des pays de ce futur pilier européen doivent converger sur cette question importante.
Mme Marie-Arlette Carlotti. Bravo !
Mme Catherine Vautrin, ministre. Par ailleurs, la France a refusé l'idée d'une BITD transatlantique. Ce n'est absolument pas concevable.
Le réarmement n'est pas une singularité française : c'est la norme dans tous les pays européens. Je vous épargne le catalogue, car je peux vous le dire en une phrase : tous les pays se réarment, en consentant des efforts financiers plus ou moins importants.
Les pays baltes, qui sont en première ligne au vu de leur voisinage, augmentent leur budget de défense, dans des proportions allant de 23 % à 38 %. Le voisin en question, la Russie, consacre 40 % de son budget à l'effort de guerre !
Il est fondamental que nous soyons d'accord pour affirmer que la stratégie de défense de notre pays est une compétence souveraine. La souveraineté de la Nation en dépend. La France a d'ailleurs fait des choix à cet égard, et elle est la seule à continuer de s'y tenir : je rappelle que la France est le seul pays européen à articuler une stratégie de dissuasion nucléaire, aussi bien aéroportée que navale, avec une stratégie de défense conventionnelle. Cette doctrine, dont le Président de la République est le garant, demeure inchangée depuis 1964 ; tous les exécutifs s'y sont tenus.
Rappelons aussi que notre pays est une grande puissance maritime. À ce titre, je veux réaffirmer l'importance de la protection de nos territoires ultramarins. Plusieurs mesures vous seront proposées à cet effet dans ce projet de loi de finances.
Vous êtes plusieurs à m'avoir interrogée sur nos grands projets ; certains ont mentionné le porte-avions de nouvelle génération. Concrètement, une puissance maritime doit être dotée d'un porte-avions. Il me semble important de le rappeler.
Vous le savez tous, notre pays a pris le chemin du réarmement depuis 2017. La loi de programmation militaire 2019-2025 avait une vocation de réparation. La LPM 2024-2030, qui a été conçue et défendue devant vous par celui qui est devenu Premier ministre, Sébastien Lecornu, et votée par le Parlement, a justement pour objet le réarmement.
Pourquoi cette stratégie ? Le général de Gaulle répondait déjà à cette question, à Saint-Cyr, en 1959 : « Le Gouvernement a pour raison d'être, à toute époque, la défense de l'indépendance et de l'intégrité du territoire. » Je crois, si vous me permettez cette familiarité, que cette phrase n'a pas pris une ride. Elle décrit le sens de notre engagement.
L'année 2026 sera la troisième année de mise en œuvre de la loi de programmation militaire en vigueur. La trajectoire de celle-ci a été actualisée et rehaussée à 413 milliards d'euros après que le Président de la République a pris acte, le 13 juillet dernier, de la situation internationale que vient de décrire M. Temal. C'est ce qui explique que nous proposions, dès cette année, une rallonge de 3,5 milliards d'euros.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire, mais je le répète devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs : oui, le Gouvernement présentera, dans les toutes premières semaines de l'exercice 2026, un texte pour détailler les surmarches. Cela nous donnera l'occasion de travailler ensemble sur ces sujets.
Ainsi, en additionnant budget initial et surmarche, nous aboutissons à un effort inédit de 6,7 milliards d'euros supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. Les crédits du programme 146 « Équipement des forces » sont ainsi portés à 22,9 milliards d'euros ; ceux du programme 178 « Préparation et emploi des forces », à 15,9 milliards d'euros ; ceux du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », à 2,3 milliards d'euros ; enfin, ceux du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », à 16,1 milliards d'euros.
Notre première priorité est de consolider le socle de nos capacités militaires. Cela inclut l'entraînement de nos forces, la gestion des effectifs et le renforcement de nos soutiens logistiques, que vous avez été nombreux à évoquer. Olivier Cigolotti et Michelle Gréaume l'ont bien noté dans l'avis qu'ils ont présenté : les trois armées doivent « durcir les conditions d'entraînement des hommes afin de les préparer le mieux possible » à l'éventualité d'un conflit de haute intensité.
Notre deuxième priorité est de protéger nos forces et nos territoires, ce qui passe par le développement de notre défense sol-air, par la lutte contre les drones et la lutte anti-sous-marine, et par la protection face aux menaces nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC).
La troisième priorité est d'opérer une montée en puissance de nos capacités offensives. Cela implique d'assurer à nos forces un approvisionnement suffisant en munitions, tout en développant nos capacités de frappe dans la profondeur.
Vous avez été plusieurs à mentionner notre quatrième priorité : renforcer nos capacités de renseignement. C'est un élément clé de notre stratégie, qui suppose d'investir dans des drones d'observation et dans le spatial.
J'ajoute que nous passerons pour plus de 30 milliards d'euros de commandes en 2026, hors dissuasion, pour nos grands programmes. Madame la sénatrice Conway-Mouret, les frégates, les Rafale, les drones et les blindés ne sont en aucun cas négligés. L'acquisition de tels matériels constitue pour nous un objectif majeur.
Monsieur le rapporteur spécial, comme plusieurs de vos collègues, vous m'avez interrogée sur le niveau et le détail des surmarches et sur la gestion 2025. Je rappelle à cet égard que nous n'avons procédé à aucun gel, régulation ou annulation de crédits sur l'exercice 2025. Au contraire, nous avons exécuté 1 milliard d'euros de plus que le plafond fixé en loi de finances initiale.
Le report de charges est en baisse par rapport à l'exercice 2024, il se stabilise à 20 %, et c'est exactement la même lecture pour l'exercice 2026.
Vous avez été nombreux à insister sur le montant des commandes passées par la DGA. En 2025, celle-ci aura passé pour 40 milliards d'euros de commandes et aura acquitté 24 milliards d'euros cette même année.
Comme vous, je suis élue de terrain ; comme vous, je suis préoccupée par les délais de paiement. Ce sur quoi nous devons travailler ensemble, c'est à faire en sorte que ces investissements ruissellent, notamment en veillant à accompagner les sous-traitants. En effet, les entreprises qui traitent avec la DGA mettent en avant la capacité de paiement de celle-ci, mais les sous-traitants rencontrent plus de problèmes en la matière.
Je mesure comme vous l'importance de l'activité et de l'emploi dans nos territoires, dont vous êtes ici les représentants.
Les surmarches que j'ai mentionnées nous permettront d'exécuter davantage de crédits que prévu.
Grâce à elles, nous allons accroître nos capacités offensives, en commandant des milliers de munitions supplémentaires, ce qui est incontestablement le défi de l'année 2026. Nous allons également tripler les livraisons d'obus d'artillerie de 155 millimètres et doubler les livraisons de nos missiles de croisière.
Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, nous avons parfaitement en tête la question du successeur du lance-roquettes unitaire (LRU). J'ai déjà présidé un premier comité ministériel d'investissement sur le sujet.
Il n'est pas question de brader quoi que ce soit. Nous irons au terme des essais prévus pour garantir la préservation de notre souveraineté, selon les termes que nous nous sommes fixés. Nous ne prendrons pas de décision avant ce terme à tout le moins.
De la même manière, j'ai présidé un comité ministériel d'investissement sur les missiles balistiques terrestres, qui sont extrêmement importants pour renforcer notre protection conventionnelle.
Nous acquerrons également de nouveaux systèmes de défense sol-air et nous renforcerons nos moyens de lutte anti-drones, avec des kits de protection contre les drones, des munitions téléopérées pour le char Leclerc rénové, et des brouilleurs au profit de la marine.
En outre, les surmarches nous permettront de développer nos moyens de souveraineté : nous commanderons ainsi quatre satellites pour compléter notre observation spatiale, en complément des futurs satellites Iris2.
Nous allons également pouvoir renforcer notre réserve opérationnelle. Celle-ci comptait 40 000 contrats en 2024 ; l'objectif est d'atteindre 52 000 contrats en 2026. Vous le voyez, madame Carlotti, nous ne sacrifions en rien notre stratégie en la matière.
En ce qui concerne le nouveau service national, 3 000 jeunes y auront accès en 2026, pour un coût de 100 millions d'euros : 50 millions d'euros pour l'équipement, 40 millions d'euros pour les infrastructures et 10 millions d'euros pour les soldes des volontaires.
Le budget 2026-2030 en la matière est chiffré à 2,3 milliards, dont 1 milliard d'euros pour les infrastructures. En effet, nous devrons être en mesure d'accueillir les volontaires. Ces derniers suivront un mois de formation sur le territoire national, et passeront neuf mois à se rendre utiles dans les trois armées. À l'issue de ces dix mois, ils seront versés pour cinq ans dans la réserve opérationnelle.
Il s'agit donc d'une démarche extrêmement importante pour faire de notre armée une armée hybride. Armée active, réserve opérationnelle et service national : voilà l'architecture de nos armées pour les années à venir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, au-delà de ces démarches, nous devons évidemment améliorer les conditions de vie des femmes et des hommes qui composent nos armées, après des décennies de baisses de crédits et de suppressions de postes.
En tant qu'élue locale, j'ai assisté, à une époque que je n'ai pas oubliée, aux suppressions de régiments et aux fermetures de bases militaires qui sont intervenues dans de nombreux territoires. Aujourd'hui, nous devons avoir le courage de reconnaître que les temps ont changé.
Comme l'a fait remarquer le rapporteur pour avis Jean-Pierre Grand, nous devons aller plus loin en matière de fidélisation. Ainsi, 159 millions d'euros y seront consacrés, au travers d'une augmentation de 7 % des crédits de soutien, de 10 % pour les bases de défense et de 13 % pour le commissariat des armées. Le logement est une question majeure, qui n'est pas réglée et sur laquelle je souhaite aller plus loin. Nous avons besoin de logements neufs et d'un véritable accompagnement.
Une enveloppe de 1,8 milliard d'euros sera dévolue au service de santé des armées, afin de développer les recrutements dans les écoles, mais aussi d'aligner les rémunérations sur celles de la fonction publique. Il s'agit d'un élément d'attractivité fondamental.
En ce qui concerne l'innovation, le ministère des armées travaille avec Bercy pour créer des ponts entre investissement public et investissements privés. Bpifrance propose ainsi un fonds Definvest et un fonds Innovation Défense. C'est ce qui permettra à notre base industrielle et technologique de défense de progresser.
Celle-ci représente 220 000 emplois et plus de 4 000 entreprises sur l'ensemble de nos territoires. Elle est un élément très important de notre indépendance. Nous avons été capables de relocaliser la production de poudre à canon sur notre territoire. Nous devons aller plus loin en accompagnant d'autres entreprises du secteur.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l'aurez compris, notre volonté est que la France, première armée d'Europe, soit considérée comme telle par le reste du continent, par nos alliés comme par nos compétiteurs. Ce budget n'est pas un budget de circonstances ; c'est un budget de responsabilité.
Les moyens supplémentaires que nous engageons impliquent une mobilisation totale de nos industriels pour relever nos ambitions en matière d'exportations. Il y va de notre souveraineté et de notre modèle de civilisation.
Mme la présidente. Je vous prie de conclure, madame la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre. Pour nos soldats, auxquels je redis notre attachement, pour notre indépendance et pour la France, je vous demande d'approuver les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Marie-Arlette Carlotti. Très bien !
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B.
Nous avons dix-sept amendements à examiner. Pour ce faire, nous avons jusqu'à treize heures. Je vous prie donc, mes chers collègues, de faire preuve de concision et de respecter le temps de parole qui vous est imparti.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Défense |
93 078 480 008 |
66 725 476 236 |
Environnement et prospective de la politique de défense |
2 753 690 638 |
2 293 659 614 |
Préparation et emploi des forces |
17 314 435 277 |
15 919 288 057 |
Soutien de la politique de la défense |
25 841 664 436 |
25 628 629 926 |
dont titre 2 |
23 831 227 901 |
23 831 227 901 |
Équipement des forces |
47 168 689 657 |
22 883 898 639 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-1736 rectifié bis, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet et MM. Delahaye, Menonville, Duffourg, Longeot, Mizzon et Maurey, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
|
1 700 000 000 |
|
1 700 000 000 |
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 700 000 000 |
|
1 700 000 000 |
SOLDE |
- 1 700 000 000 |
- 1 700 000 000 |
||
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Je n'aurais eu aucun d'état d'âme à soutenir une très forte augmentation des crédits consacrés à la défense si la situation de nos comptes publics n'était pas aussi dégradée.
J'appelle l'attention de l'ensemble de notre assemblée sur la situation réelle de nos comptes publics, d'autant que nous avons décidé il y a deux ans, dans un contexte géopolitique que chacun connaissait, d'une trajectoire d'évolution des dépenses militaires pour les années 2024 à 2030.
À peine deux ans après, nous sommes appelés à revoir totalement la trajectoire prévue… Cela signifie que nous avons voté il y a deux ans, dans un contexte d'imprévisibilité totale, une loi de programmation militaire qui était largement sous-estimée. Cela pose tout de même un problème d'appréhension des enjeux !
Par ailleurs, nous parlons certes de sujets militaires, mais il est tout de même étonnant que les parlementaires que nous sommes votent, le doigt sur la couture du pantalon, ce que le chef a décidé, sans aucune concertation ! Il conviendrait que nous puissions remettre en cause certaines des orientations qui ont été prises, ou, à tout le moins, que nous en discutions.
Nous devons trouver le meilleur chemin pour concilier la situation très dégradée de nos comptes publics et les besoins de notre défense, que je ne conteste pas.
Dans cette optique, je propose de diminuer de 1,7 milliard d'euros les crédits de la mission, car je considère qu'un effort supplémentaire doit être consenti pour tenir compte de la réalité de nos comptes publics.
M. Christian Cambon. C'est irresponsable…
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Monsieur Canévet, vous souhaitez que le ministère des armées participe à l'effort de réduction de la dépense publique. Il se trouve qu'il le fait depuis soixante ans, et au-delà de vos espérances.
Je vous donnerai simplement quelques chiffres : en 1960, le budget de la défense représentait 5,43 % du PIB ; en 1980, ce chiffre était tombé à 3,18 % ; enfin, à l'heure actuelle, il est à peine au-dessus de 2 %. Si nous revenions au niveau de 1980 en pourcentage de PIB, nos dépenses militaires s'élèveraient à plus de 110 milliards d'euros.
Il me semble donc que le ministère a très largement contribué à la résorption de la dépense publique, et peut-être même trop, voire beaucoup trop !
Mme Jocelyne Guidez. Tout à fait !
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Très bien !
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'ajoute que, dans le contexte actuel, les dépenses militaires de tous les autres pays augmentent. Entre 2022 et 2024, en euros constants, le budget de la défense française a augmenté de 10 %, celui de la Russie de 119 %, celui de la Pologne de 93 %, celui de l'Allemagne de 47 % et celui du Royaume-Uni de 14 %. Nous sommes donc, malheureusement, très en deçà de tous ces pays !
La commission émet donc un avis non pas défavorable, mais très défavorable sur cet amendement ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. André Guiol applaudit également.)
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Je partage complètement les arguments de M. le rapporteur spécial.
L'année prochaine sera la troisième année d'exécution de la LPM et, jusqu'à présent, les LPM ont toutes été respectées à l'euro près.
Entre 2009 et 2015, un régiment sur deux a été supprimé et 50 000 postes ont disparu. Le ministère dont j'ai la responsabilité a donc largement contribué aux efforts d'économies.
Le Gouvernement émet donc, lui aussi, un avis très défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.
M. Rachid Temal. Tout d'abord, je tiens à saluer les propos de François Bonneau lors de la discussion générale. La cohabitation au sein de son groupe ne doit pas être simple tous les jours…
Dans le monde actuel, nous pouvons avoir peur des marchés ou de la Russie, mais, en tout état de cause, il serait regrettable de réaliser dans quelques années que nous ne sommes pas suffisamment armés contre un choc potentiel parce que les dépenses ne rentraient pas parfaitement dans le tableur Excel qu'on avait préparé…
Il faut retirer cet amendement ! Ce n'est pas à la hauteur du débat que nous avons eu. Chacun mesure la gravité de la situation internationale : ce n'est pas le moment de faire des économies de bout de chandelle. Sinon, il se pourrait que l'on sabre le champagne du côté du Kremlin. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour explication de vote.
Mme Vanina Paoli-Gagin. Les membres du groupe Les Indépendants souscrivent totalement aux propos de M. le rapporteur spécial. Nous nous opposerons à cet amendement de Michel Canévet.
Mes chers collègues, si vis pacem, para bellum ! J'ai entendu des propos assez sidérants dans la discussion générale. J'ai l'impression que nous ne vivons pas tous sur la même planète…
Mme Michelle Gréaume. C'est clair !
Mme Vanina Paoli-Gagin. C'est très clair. Il faut lire les rapports de la CIA et les plans quinquennaux chinois.
Nous sommes un vieux peuple, avec une histoire séculaire. Réveillons-nous ! (MM. Claude Malhuret et Jean-Michel Arnaud applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.
M. Akli Mellouli. Je voudrais revenir sur l'expression que vous avez employée, madame Paoli-Gagin, quand vous avez dit à plusieurs collègues : « Nous ne vivons pas sur la même planète. »
On peut évidemment avoir des désaccords, par exemple sur la stratégie ou sur les enjeux. Ainsi, il a été question de souveraineté ; à cet égard, on devrait aussi aborder la question, ô combien essentielle, de la souveraineté alimentaire en cas de guerre, au regard de la dépendance de notre pays à des intrants et engrais extérieurs, ainsi qu'au gazole.
Mais avoir des désaccords n'implique pas forcément d'utiliser un tel vocabulaire vis-à-vis de ceux qui pensent différemment !
Sur le fond, les membres du groupe GEST voteront contre cet amendement. En effet, c'est sur la stratégie que nous voulons avoir un débat. Ce qui nous pose problème, ce n'est pas que les crédits de la défense augmentent ; c'est que, dans le même temps, ceux des affaires étrangères baissent. La diplomatie doit être le levier ; la défense n'est que l'outil.
Cela dit, la proposition de M. Canévet nous semble aller à l'encontre de la stratégie que nous sommes en train de développer pour mieux protéger notre territoire et nos populations.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Les membres du groupe CRCE-K voteront pour cet amendement.
J'aimerais que l'on respecte les positions de chacun, de chaque groupe. Pour ma part, je ne critique pas celles des autres. On pourrait parler des marchés truqués à l'Otan, de l'argent détourné – je vous renvoie à un article de L'Express – pour construire des villas…
Mais merci de respecter les positions de tous les membres de notre assemblée !
M. Claude Malhuret. Il y a des positions qui ne sont pas respectables !
Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, pour explication de vote.
M. Cédric Perrin. L'auteur de cet amendement est évidemment dans son bon droit ; il est même multirécidiviste en la matière…
Certes, si l'on s'en tient à un raisonnement d'expert-comptable, on peut regarder un tableau Excel et considérer que le rééquilibrage budgétaire passe par une baisse des crédits de la défense.
Mais les interventions des différents orateurs ont, me semble-t-il, clairement démontré que la défense avait déjà été largement mise à contribution.
Cette proposition ne me paraît donc pas aller dans le sens de l'histoire. J'invite chacun et chacun à relire les Mémoires de guerre du général de Gaulle, qui y écrivait notamment ceci : « L'aveuglement d'une nation qui refuse de voir monter la menace prépare toujours les défaites les plus lourdes. »
Je ne peux pas laisser dire que nous n'aurions pas discuté et que nous appliquerions les décisions du chef sans avoir jamais réfléchi aux conséquences de nos actes.
Nous sommes ici un certain nombre à siéger au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Notre quotidien, c'est d'auditionner des militaires, des responsables du ministère des armées, des chercheurs, des spécialistes de tel ou tel sujet. Or toutes nos auditions démontrent très clairement l'état de la menace à laquelle nous sommes potentiellement confrontés. Il suffit de relire la revue nationale stratégique pour comprendre que diminuer le budget des armées serait une ineptie totale.
Le sens de mon propos n'est pas de critiquer notre collègue, dont, encore une fois, je comprends la logique d'expert-comptable. Mais ce n'est absolument pas la logique qui s'impose à nous aujourd'hui.
Je ne voudrais pas que nous soyons demain mis en cause parce que nous n'aurions pas fait les bons choix aujourd'hui. Je ne voudrais pas que nous n'ayons plus que nos yeux pour pleurer le jour où – j'espère évidemment qu'il n'arrivera jamais – nous serions confrontés à des difficultés auxquelles nous n'aurions pas été préparés.
Je pense donc que cet amendement n'a pas lieu d'être. J'invite chacune et chacun à voter contre.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
MM. Rachid Temal et Christian Cambon. Retrait !
M. Michel Canévet. Je vous rassure, monsieur le président Perrin : je ne m'exprime pas du tout dans une « logique d'expert-comptable ».
Et si je suis un « multirécidiviste », c'est parce que la France a pris des engagements à l'échelon européen pour respecter une trajectoire de retour à l'équilibre de nos finances publiques.
M. Christian Cambon. Ça, c'est le travail de la commission des finances !
M. Michel Canévet. Je ne conteste absolument pas la nécessité d'un effort pour notre défense. Je demande simplement qu'il soit mesuré. Il faut avoir le courage de diminuer les dépenses publiques, afin de pouvoir respecter nos engagements auprès de l'Union européenne. (M. Patrick Kanner s'exclame.)
Je trouve toujours des gens très courageux pour augmenter les dépenses ; j'en trouve beaucoup moins pour soutenir les baisses que je propose.
M. Mickaël Vallet. On peut aussi augmenter les recettes !
M. Michel Canévet. Résultat, dans cinq ans, la charge des intérêts de la dette de la France sera peut-être tellement insoutenable que nous serons obligés de réduire l'ensemble de l'action publique, y compris dans le domaine, majeur pour l'avenir de notre pays, dont nous débattons aujourd'hui. Nous devons en avoir conscience !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1736 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-1729, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
800 000 000 |
|
800 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
800 000 000 |
|
800 000 000 |
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
800 000 000 |
800 000 000 |
800 000 000 |
800 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Je tiens à préciser d'emblée que nos collègues députés ont formulé la même demande.
Nous tenons à rappeler l'importance que nous accordons à la réserve opérationnelle. En ce sens, nous avons accueilli sans opposition, mais avec une certaine circonspection, les annonces présidentielles de retour d'un service national volontaire. Nous percevons encore mal l'articulation de celui-ci avec les dispositifs existants, notamment la réserve opérationnelle – je note cependant que vous avez abordé ce point, madame la ministre.
Nous craignons que les financements mobilisés pour le service national volontaire n'obèrent les moyens de la réserve, déjà insuffisants à nos yeux. Alors que le nombre de réservistes doit doubler d'ici à 2030, les conditions faites aux 40 000 réservistes ne sont déjà pas satisfaisantes : équipement insuffisant, retards de paiement parfois considérables, etc. Nous sommes loin du compte.
La réserve doit être revalorisée symboliquement et financièrement, et son pilotage humain doit être amélioré, en termes notamment de qualité des entraînements, de débouchés proposés aux réservistes, ainsi que de souplesse et d'agilité pour améliorer la compatibilité entre les heures de service et la vie professionnelle et familiale.
Comme l'a montré l'excellent rapport de nos collègues députés Damien Girard et Thomas Gassilloud, la réserve est indispensable pour soulager nos militaires dans le cadre de la réponse à une menace hybride, qui peut notamment prendre la forme de cyberattaques paralysant nos infrastructures, pour faire face aux catastrophes naturelles et, plus largement, pour épauler la sécurité civile.
C'est bien le sens de cet amendement, qui tend à doter la réserve de 800 millions d'euros supplémentaires. Nous jugeons cela parfaitement absorbable, notamment via le redéploiement des crédits du service national universel (SNU) et de l'opération Sentinelle, que nous souhaitons voir évoluer.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. M. Gontard a raison de vouloir soutenir la réserve opérationnelle.
Néanmoins, pour ma part, je n'ai pas noté de difficultés particulières. La réserve opérationnelle est intégrée dans les objectifs de la LPM. Si, d'aventure, des problèmes apparaissaient, il serait toujours possible le rectifier le tir, notamment lors de l'actualisation que Mme la ministre nous a annoncée.
La commission sollicite donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. J'irai dans le même sens que M. le rapporteur spécial.
Je le précise, le nombre de réservistes doit progresser de 4 400 pour atteindre 52 000 en 2026, et la norme d'activité – je connais votre attachement à cette question – va augmenter. En d'autres termes, nous allons proposer quarante-cinq jours par an par réserviste, ce qui est un élément non négligeable. Sur le titre 2, la dépense consacrée aux réservistes augmente de plus de 98 millions d'euros sur 2025 et 2026, passant de 220 millions à 318 millions d'euros, ce qui nous offre les moyens d'atteindre les objectifs.
Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l'avis serait défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1730, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco, Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
|
243 000 000 |
|
243 000 000 |
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
243 000 000 |
|
243 000 000 |
|
TOTAL |
243 000 000 |
243 000 000 |
243 000 000 |
243 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Une partie de l'avenir de l'Europe se joue en Ukraine. Plus que jamais, l'Europe doit rester actrice de ce théâtre d'opérations, dont les visées impérialistes américaines et russes tentent de l'exclure.
Nous saluons l'initiative du Président de la République et des chefs de gouvernement allemand et britannique d'associer leurs forces à celles de Volodymyr Zelensky pour trouver une issue au conflit qui ne soit pas la capitulation honteuse proposée par Donald Trump.
À l'issue de cet échange, Emmanuel Macron a déclaré qu'Européens et Ukrainiens avaient beaucoup de cartes en main, entre l'aide financière à l'Ukraine et la résistance de l'armée ukrainienne aux forces russes.
Cet amendement vise justement à accroître notre aide à l'Ukraine, qui a beaucoup décliné depuis le mois de juillet ; on relève, chaque mois, une baisse moyenne de 57 % par rapport au premier trimestre 2025. Il s'agit d'envoyer un message fort à la dictature russe et à Donald Trump : la France ne faiblira pas ; l'Europe ne faiblira pas ; l'Ukraine n'est pas à vendre à la découpe !
Dans ce moment potentiellement décisif du conflit, notre soutien militaire – cession et acheminement d'armes, maintien en condition opérationnelle et formation de soldats – doit impérativement être préservé et même renforcé, qu'il s'agisse du fonds bilatéral de soutien à l'Ukraine ou de la contribution de la France au mécanisme de la facilité européenne pour la paix.
Tel est le sens de cet amendement, qui vise à renforcer ce soutien au moyen de près d'un quart de milliard d'euros supplémentaires.
Les règles organiques relatives aux lois de finances ne nous permettent malheureusement pas de gager cet amendement sur la mobilisation des avoirs russes gelés en France, mais c'est toujours notre demande la plus ferme, d'autant que cette perspective semble effrayer Vladimir Poutine. En effet, l'ambassadeur russe à Berlin a jugé utile de menacer directement l'Allemagne et le reste de l'Europe.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. M. Gontard a tout à fait raison de manifester son soutien à l'Ukraine.
Toutefois, sur un plan pratique et opérationnel, l'aide à ce pays prend plusieurs formes et ne se concentre pas sur un seul programme. Dès lors, d'un strict point de vue technique, le transfert de crédits proposé ne me paraît pas traduire correctement les objectifs de son auteur.
De surcroît, si nous devions aller un peu plus loin en la matière, cela ne pourrait se faire qu'en lien avec nos partenaires.
C'est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir déposé cet amendement.
À mon tour d'expliquer que l'aide à l'Ukraine s'est notamment traduite par de nombreuses cessions de matériels. De ce point de vue, nous arrivons en fin de procédure. Mais nous avons aussi beaucoup travaillé sur la formation, et nous continuons à former et à maintenir en condition opérationnelle les forces ukrainiennes.
En outre, comme vous le savez, le soutien à l'Ukraine est aussi un soutien politique et diplomatique. C'est tout le sens de l'action de la coalition des volontaires, d'une part, et des initiatives du G7, d'autre part. Il ne s'agit pas que d'une question budgétaire ; cela va beaucoup plus loin.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2031, présenté par M. Ouizille, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Alexandre Ouizille.
M. Alexandre Ouizille. Nous avons adopté une loi de programmation militaire ambitieuse. Nous allons encore la rehausser à la hauteur des périls.
La LPM finance la base industrielle et technologique de défense. Or cette dernière est très souvent considérée comme ne consistant qu'en une dizaine de grands groupes. En réalité, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, la BITD comporte plus de 4 500 acteurs qui jouent un rôle très important sur tous les territoires.
Vous avez d'ailleurs établi une doctrine pour ces acteurs, que vous avez appelée la « coopétition ». Vous avez indiqué qu'ils devaient être à la fois innovants et capables de participer à notre effort de défense. Ces acteurs sont essentiels pour le ministère des armées ; plus de 85 % des prestataires sont des TPE, des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).
Cet amendement vise donc à créer un fonds pour leur permettre de s'inscrire dans cette dynamique de coopétition comme vous les y invitez. En effet, comme vous l'avez souligné, il y a des problèmes de retards de paiement. Or il est difficile de savoir comment on va innover et monter en puissance quand on a des difficultés de trésorerie. Il faut avancer en la matière pour donner sa pleine puissance à la LPM.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Indéniablement, il est toujours bon de payer ses dettes. C'est précisément l'une des raisons pour lesquelles je mène un combat pour limiter au maximum les reports de charges. Plutôt que de créer un fonds, payons nos dettes en temps et en heure !
Au demeurant, madame la ministre, nous avons voté ici, sur l'initiative de mon collègue Pascal Allizard, un excellent texte, qui attend d'être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Je ne doute qu'après l'intervention de M. Ouizille, vous allez tout faire pour qu'il le soit. (Sourires.)
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Encore une fois, le Gouvernement est extrêmement vigilant pour que les quelque 4 000 entreprises de la BITD reçoivent les paiements qui leur sont dus. Elles-mêmes mettent d'ailleurs en avant le bon lien qu'elles ont avec l'État, notamment en matière des conditions de paiement. Un travail important reste à mener en ce qui concerne la sous-traitance.
J'en viens à l'activité de financement. Depuis le « dialogue de place » lancé au mois de mars dernier, différents fonds ont été institués. Ainsi, le fonds Definvest permet d'intervenir auprès des start-up et des PME pour renforcer leur structure bilancielle ; c'est un point très important, notamment pour tous les acteurs de la production de drones. Le fonds French Tech Souveraineté permet d'avoir des participations stratégiques. Le prêt DEF'FI commence aussi à démarrer.
Vous le voyez, des réponses existent. Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
Enfin, pour répondre à votre sollicitation, monsieur le rapporteur spécial, nous demanderons d'abord l'inscription à l'ordre du jour des travaux parlementaires le texte relatif aux surmarches. Nous examinerons ensuite avec M. le ministre chargé des relations avec le Parlement comment faire en sorte que le texte auquel vous faites référence soit examiné le plus tôt possible par l'Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.
M. Alexandre Ouizille. Je remercie M. le rapporteur spécial et Mme la ministre de leurs explications, et je retire mon amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2031 est retiré.
L'amendement n° II-1102, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
TOTAL |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
50 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Je ne pense pas qu'il soit raisonnable de diminuer les crédits du programme 146 « Équipement des forces », et il ne me paraît pas nécessaire d'abonder le programme 178 « Préparation et emploi des forces », qui est déjà correctement pourvu.
L'avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, afin de nous donner toutes les chances de terminer l'examen des crédits de cette mission à treize heures, en accord avec la commission des finances, et en application de la décision de la conférence des présidents, les durées d'intervention sont désormais fixées à une minute.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-2046, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
30 000 000 |
|
30 000 000 |
Préparation et emploi des forces |
30 000 000 |
|
30 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
30 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Nous proposons de consacrer 30 millions d'euros au recrutement de 150 personnels médicaux et paramédicaux et à la modernisation des équipements dans les centres médicaux des armées.
Il s'agit d'un amendement de résilience sanitaire nationale. En effet, seulement 76 % des postes de médecins militaires sont pourvus et trois des huit hôpitaux d'instruction des armées sont en déficit chronique.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2015, présenté par MM. Mellouli, Gontard, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
3 000 000 |
|
3 000 000 |
Préparation et emploi des forces |
3 000 000 |
|
3 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Akli Mellouli.
M. Akli Mellouli. Cet amendement est un amendement de repli par rapport à celui qui vient d'être présenté par Mme Gréaume.
La LPM et les crédits prévus dans ce projet de loi de finances permettront de réduire un peu les retards pris en matière de santé, mais pas de les combler. Or les différents orateurs ont rappelé l'importance du sujet pour nos troupes et nos hommes. L'accompagnement et le soutien sont en effet essentiels, tant pour le moral que pour la qualité de vie et de service.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. De fait, le service de santé des armées n'échappe pas aux difficultés plus générales que connaissent tous les services de soins et les hôpitaux.
Pour autant, je dois à la vérité de dire qu'un effort significatif a été effectué dans le cadre de la LPM et qu'il est respecté, s'agissant tant des recrutements que de l'utilisation des crédits.
Il ne me semble donc pas indispensable d'abonder les crédits comme il est proposé dans ces deux amendements. J'invite donc leurs auteurs à les retirer, quitte à revenir sur cette question à l'occasion de l'actualisation de la LPM.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de ces deux amendements.
Comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, le Gouvernement est très attentif à cette question. Les crédits ont progressé de 1,8 milliard d'euros. Il y a une augmentation des recrutements dans les écoles et une hausse des revenus, avec un alignement sur le statut de la fonction publique hospitalière. En outre, on crée un hôpital de rôle 3 destiné à la stabilisation des blessés, ce qui est un élément absolument majeur.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2052, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Cet amendement relève de la même logique que les deux précédents. La commission en demande donc le retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° II-2047, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Équipement des forces |
|
|
||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Nous proposons par cet amendement de consacrer 5 millions d'euros au financement du recrutement de psychologues cliniciens, au déploiement des cellules d'écoute dans les bases, aux formations à la détection précoce des signaux de détresse et à la coordination avec les structures civiles.
Cet amendement d'humanité et d'efficacité opérationnelle devrait transcender les clivages.
Mme Hélène Conway-Mouret. C'est vrai !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Le recrutement des psychologues relevant du service de santé des armées, je suis conduit à émettre le même avis sur cet amendement que sur les précédents : une demande de retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Madame la sénatrice, la prise en charge médicale, paramédicale et préventive a constitué un axe majeur de nos efforts de ces dernières années. En témoignent des éléments aussi importants que la généralisation de la visite médicale de retour d'opérations extérieures (Opex), la poursuite de la formation aux premiers secours psychologiques en opération et le renforcement de la coopération avec le milieu civil.
Il faut continuer en ce sens ; je partage votre analyse, mais c'est bien ce que nous faisons. C'est pourquoi je me permets de vous demander le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2054 rectifié, présenté par M. Guiol, Mme N. Delattre, MM. Cabanel, Gold, Grosvalet, Fialaire et Masset, Mmes Guillotin et Briante Guillemont, MM. Bilhac et Daubet et Mmes Pantel et Jouve, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
12 000 000 |
|
12 000 000 |
Préparation et emploi des forces |
|
|
|
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
12 000 000 |
|
12 000 000 |
|
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. André Guiol.
M. André Guiol. Au vu du temps qui nous reste, je dirai simplement qu'il est défendu, madame la présidente !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. La commission sollicite l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Cet amendement a pour objet le financement des travaux d'aménagement de la piste d'atterrissage de la base aérienne 367 de Cayenne. Il s'agit de répondre à une problématique reconnue sur la zone concernée.
Toutefois, d'un point de vue technique, les travaux ne peuvent pas être engagés dès 2026. Des actions de coordination avec différents opérateurs doivent encore être menées. Cette étape préalable permettra de calibrer le besoin à un niveau plus équilibré et de le valider.
J'ajoute que le projet concerné relève non du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », mais des programmes 146 et 178.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
M. André Guiol. Je retire mon amendement !
Mme la présidente. L'amendement n° II-2054 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-2033, présenté par M. Ouizille, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Alexandre Ouizille.
M. Alexandre Ouizille. Cet amendement d'appel visait à susciter le débat sur notre marine nationale. Néanmoins, étant donné qu'il nous reste peu de temps pour en discuter aujourd'hui et que nous en aurons plus lors de l'examen de l'actualisation promise de la LPM, je le retire.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2033 est retiré.
L'amendement n° II-2048, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
10 000 000 |
10 000 000 |
|
Préparation et emploi des forces |
|
|
|
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
10 000 000 |
10 000 000 |
||
Équipement des forces |
|
|
||
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Selon le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM), 25 % des logements domaniaux militaires sont insalubres ou dégradés : absence d'isolation, humidité persistante, réseaux non conformes, etc. Cela a des conséquences directes sur le moral, la fidélisation et la capacité opérationnelle des unités.
Plusieurs rapports parlementaires et travaux de l'inspection générale de l'administration (IGA) ont souligné cette vétusté, qui est souvent critique dans les zones rurales, les bases aériennes et les régiments de l'Est et du Sud-Ouest, touchant particulièrement les engagés sous contrat et leurs familles.
Nous proposons donc de consacrer 10 millions d'euros à la rénovation prioritaire de logements en garnison, ce qui témoignerait de la priorité accordée à la condition des personnels militaires, à plus forte raison avec l'instauration du service national volontaire.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'avais remis voilà quelque temps un rapport sur la situation du patrimoine immobilier du ministère. C'est peut-être l'occasion pour le Gouvernement de nous faire un rapide point sur la question. Je sollicite donc son avis.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Comme nous devons terminer l'examen des crédits de cette mission à treize heures, je centrerai mon propos sur trois points.
Premièrement, la convention qui a été signée avec Nové en 2022 va arriver à une première période de bilan.
Deuxièmement, Nové ne concerne que 20 % du logement. Nous devons travailler sur tous les sujets. C'est la raison pour laquelle j'ai d'ores et déjà pris attache, notamment, avec Action Logement, afin de regarder comment nous pouvions aller plus loin. En effet, il est extrêmement important – c'est même incontestablement un élément de fidélisation – pour nos forces de savoir que les familles sont correctement logées.
Troisièmement, nous avons un problème sur l'hébergement des célibataires géographiques, qui sont de plus en plus nombreux. À cet égard, les réponses ne sont pas satisfaisantes. C'est donc un chantier en devenir.
Je partage vos préoccupations, madame la sénatrice. Je vous demande à ce stade de retirer votre amendement, mais nous reviendrons évidemment sur le sujet, à la lumière de l'excellent rapport de M. le rapporteur spécial.
3
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
Mme la présidente. Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer, dans la tribune d'honneur, une délégation de sénateurs polonais, conduite par M. Kazimierz Ujazdowski, président du groupe d'amitié Pologne-France de cette assemblée. Cette délégation est accompagnée par notre collègue Valérie Boyer, présidente du groupe d'amitié France-Pologne. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre, se lèvent.)
Cette visite d'étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi la justice et les échanges universitaires et culturels.
Après des entretiens à Paris, la délégation se rendra en Alsace – à Strasbourg, capitale de l'Europe, et à Colmar. Elle sera notamment reçue à la Cour européenne des droits de l'homme et au siège de l'Eurocorps.
Mes chers collègues, je souhaite, en notre nom à tous, la plus cordiale bienvenue à nos homologues du Sénat polonais, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Applaudissements.)
4
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances pour 2026.
Défense (suite)
ÉTAT B (suite)
Mme la présidente. Dans la suite de l'examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B, nous en sommes parvenus à l'amendement n° II-2049.
L'amendement n° II-2049, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
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Préparation et emploi des forces |
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Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
8 000 000 |
|
8 000 000 |
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Équipement des forces |
|
8 000 000 |
|
8 000 000 |
TOTAL |
8 000 000 |
8 000 000 |
8 000 000 |
8 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. D'une manière générale, lorsque des travaux sont effectués sur le patrimoine militaire, la dimension environnementale est prise en compte. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° II-2327 rectifié, présenté par M. Temal, Mmes G. Jourda et Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mme Carlotti, MM. Darras, P. Joly, Marie, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
|
|
|
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
5 000 000
5 000 000 |
|
5 000 000
5 000 000 |
|
Équipement des forces |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Il s'agit d'un amendement d'appel, déposé sur l'initiative de ma collègue Gisèle Jourda. Il nous faut protéger les emprises militaires et les entreprises stratégiques de notre BITD – c'est un enjeu d'actualité. Nous souhaitons à cette fin renforcer les crédits de la DRSD au sein du programme 212. Nous aurons ce débat plus en détail à l'occasion de l'actualisation de la LPM.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, mais il me pose tout de même un petit problème de principe. Il n'est jamais bon de prélever des crédits sur le programme 146 « Équipement des forces », qui est toujours mis à contribution. (M. Rachid Temal en convient.)
Pour cette seule raison, cher ami, je suis obligé de vous inviter à vous retirer l'amendement, alors que j'aimerais vraiment pouvoir vous donner satisfaction ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. J'ai bien entendu que nous aurions un débat sur le rôle et les missions de la DRSD, de la DGSE et de la direction du renseignement militaire (DRM). Donnons-nous donc rendez-vous pour ce débat ; en attendant, je ne doute pas que vous acceptiez de retirer cet amendement.
M. Rachid Temal. Je le retire, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° II-2327 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-1457 rectifié, présenté par MM. Le Gleut et Anglars, Mmes Bellurot et Berthet, MM. J.B. Blanc, Brisson, Bruyen et Delia, Mme Di Folco, MM. Frassa et Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet, Khalifé et H. Leroy, Mme Malet et MM. Meignen, Panunzi, Paul, Rietmann et Saury, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Préparation et emploi des forces |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
|
|
|
|
Équipement des forces |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Ronan Le Gleut.
M. Ronan Le Gleut. L'objet de cet amendement d'appel est de faciliter les travaux de recherche de l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) qui concernent spécifiquement l'équipement de nos forces et les armes de dissuasion ; il s'agit notamment de travaux portant sur les drones, sur les moyens de renseignement et de lutte contre les capacités spatiales adverses – images hyperspectrales, surveillance de la terre – et sur la cybersécurité, avec l'intelligence artificielle et la connectivité.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Le budget de l'Inria relève plutôt du programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » de la mission « Recherche et enseignement supérieur », mais rien n'interdit à cet organisme de répondre à des appels d'offres qui seraient lancés par le ministère des armées.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, mon cher collègue.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Le ministère des armées sera évidemment ravi de travailler avec l'Inria, qui est un acteur majeur de la recherche dans notre pays.
Pour le reste, comme le budget de cet institut ne relève pas de mon ministère, je laisse le ministère chargé de la recherche gérer les aspects financiers et sollicite par conséquent le retrait de cet amendement.
M. Ronan Le Gleut. Je le retire !
Mme la présidente. L'amendement n° II-1457 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-2051, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Équipement des forces |
|
|
||
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. La tolérance zéro contre les violences sexistes et sexuelles n'est pas négociable, quelle que soit l'institution. Je sais que les armées veulent progresser sur le sujet.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Je confirme que les armées veulent faire des progrès sur le sujet et que cela commence à se traduire dans les faits. Pour autant, je ne suis pas certain qu'il faille modifier les imputations budgétaires à ce stade pour aller dans ce sens.
C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. En 2024, nous avons eu 400 signalements pour des faits de violences sexistes et sexuelles contre 226 en 2023 ; on compte la même année 256 saisines du procureur au titre de l'article 40 contre 50 en 2023, 190 plaintes judiciaires par la victime contre 104 en 2023 et 70 suspensions contre 4 en 2023.
Oui, clairement oui à la libération de la parole et à la vigilance du ministère ! Simplement, ce n'est pas un enjeu budgétaire. C'est la raison pour laquelle je vous remercie de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2050, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Environnement et prospective de la politique de défense |
|
|
|
|
Préparation et emploi des forces |
|
|
|
|
Soutien de la politique de la défense dont titre 2 |
1 000 000 |
|
1 000 000 |
|
Équipement des forces |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Ce sera une demande de retrait, pour les mêmes raisons que pour l'amendement précédent.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre. Il est identique à celui de la commission, pour les mêmes raisons de fond.
Je précise qu'il existe dix-huit formations à l'égalité professionnelle au sein de l'académie des ressources humaines, où vingt et une formations à la prévention des violences sexistes et sexuelles sont également dispensées. Nous devons continuer dans la même logique.
Je vous remercie en tout cas, madame la sénatrice, de mettre en avant des faits qui sont totalement inacceptables.
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je rappelle que la commission des finances est favorable à l'adoption de ces crédits.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J'appelle en discussion l'article 68, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Défense ».
Article 68
Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validées les décisions de rejet des demandes tendant à obtenir le versement, au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2016 et le 19 avril 2023, de l'allocation spéciale prévue par le décret n° 89-755 du 18 octobre 1989 pour les ingénieurs civils de la défense ou de l'indemnité de fonctions techniques prévue par le décret n° 89-752 du 18 octobre 1989 pour les techniciens supérieurs d'études et de fabrications, en tant que leur légalité serait contestée au motif que les dispositions précitées n'ont été abrogées qu'à compter du 20 avril 2023.
Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Défense ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures,
est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Didier Mandelli.)
PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Monsieur le président, hier, lors du scrutin n° 112 sur les amendements identiques nos II-25 et II-1284, mes collègues Elsa Schalck et Nadine Bellurot souhaitaient voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin concerné.
6
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Médias, livre et industries culturelles
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » (et article additionnel après l'article 78) et du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public ».
La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour débattre des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public ».
Je commencerai mon propos par les crédits de la mission, qui s'élèvent à 707,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 690,2 millions d'euros en crédits de paiement, soit respectivement une diminution de 2,8 % et de 4,1 % par rapport à 2025.
Une grande part de cette diminution est absorbée par le soutien aux radios locales. Le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), qui aide 750 radios associatives non commerciales, bénéficiait en 2024 de 35 millions d'euros.
La baisse prévue devait être encore plus sévère que celle qui a été envisagée en 2025, avant le vote par notre assemblée d'une rallonge, conservée dans le texte final de la loi de finances pour 2025. Mais par un prompt renfort, près d'une quinzaine d'amendements visent à accroître les crédits du FSER en arrivant au port, pour des montants compris entre 2,3 millions et 18 millions d'euros.
Je pense que nous sommes tous ici très attachés au soutien aux radios locales, mais, à cet instant, je ne voudrais pas préempter le débat à venir sur ce point. Je crois d'ailleurs, madame la ministre, que vous êtes parfaitement consciente des enjeux.
Au-delà des radios, la moitié des crédits de la mission est fléchée vers le soutien à la presse écrite. Les aides à la presse diminuent de 6 % par rapport à 2025 dans la proposition du Gouvernement. L'essentiel de cette diminution devrait porter sur les aides à la modernisation des diffuseurs de presse, tandis que les aides à la distribution augmentent.
Madame la ministre, cela n'est malheureusement pas à la hauteur de la nécessaire remise à plat totale des aides à la presse ; cette remise à plat, chère à Michel Laugier, est nécessaire au vu de la transformation du secteur.
En outre, la présente mission finance l'Agence France-Presse (AFP) à hauteur de 143 millions d'euros en 2025. L'AFP a connu une situation financière très difficile au cours des dernières années. Les choses se sont quelque peu améliorées, mais cette agence a été particulièrement fragilisée cette année. De surcroît, elle doit faire face à la transformation numérique, en particulier au développement de l'intelligence artificielle (IA).
En conséquence, l'AFP a engagé un plan d'économies de 12 millions d'euros cet été, auquel l'autorité de tutelle et le Parlement devront être particulièrement vigilants.
La mission contient également une partie des crédits de l'État en faveur du livre et de la lecture. Pour 2026, l'enveloppe destinée à la Bibliothèque nationale de France (BNF) s'établit à 248,2 millions d'euros en crédits de paiement.
La BNF devrait cependant faire face à de très grandes difficultés en matière d'investissement au cours des prochaines années. En effet, le coût global de la rénovation complète de son emprise principale, devenu vétuste, est évalué entre 500 millions et 600 millions d'euros. Cela a de quoi nous interroger, sachant que ce bâtiment n'est vieux que de trente ans.
Enfin, deux autres opérateurs sont rattachés à la mission : le Centre national de la musique (CNM) et le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).
Concernant le premier, la baisse de sa dotation budgétaire est compensée par le dynamisme de ses deux taxes affectées. Le rendement de la taxe streaming, adoptée sur l'initiative de notre commission il y a deux ans, a dépassé le plafond prévu pour atteindre 20 millions d'euros.
Quant au CNC, il est financé non par des crédits budgétaires, mais par des taxes affectées. Son budget a évolué de manière quasiment incontrôlée au cours des dernières années. En effet, en dix ans, les recettes du CNC ont augmenté de 25 %, ce qui lui offre 168 millions d'euros supplémentaires. En parallèle, sur la même période, la dépense fiscale a augmenté de 275 % pour le crédit d'impôt audiovisuel et de 108 % pour le crédit d'impôt cinéma.
Enfin, les dépenses consenties au titre du fonds de soutien au CNC devraient atteindre 810,3 millions d'euros en 2026, soit 16 % de plus qu'en 2019.
L'inspection générale des finances (IGF) a déjà proposé plusieurs pistes de maîtrise des aides au cinéma. Aucune d'elles ne devrait prospérer dans l'immédiat, mais il est toujours permis de penser, madame la ministre, que ces propositions nourriront des réformes futures.
J'en viens au financement de l'audiovisuel public. Nous avons finalement adopté, en fin d'année dernière, la loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public. Celle-ci a modifié la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) de manière à permettre aux sociétés d'audiovisuel public de bénéficier de l'affectation d'un montant d'impôt d'État.
En d'autres termes, cela a pérennisé le système antérieur d'une affectation de TVA. Considérant qu'une baisse des crédits de l'audiovisuel public était légitime afin d'assurer la participation de celui-ci à l'assainissement de la situation budgétaire nationale, le Sénat a adopté, l'année dernière, un amendement visant à opérer une réduction de crédits de 80 millions d'euros.
Le montant prévu pour 2026 serait inférieur de 1,8 % au montant accordé en 2025, ce qui représente une nouvelle baisse de 70 millions d'euros. Le Sénat a validé ce montant d'économies en adoptant, en première partie, l'article 36 de ce projet de loi de finances sans modification.
France Télévisions devrait ainsi supporter 65 millions des 70 millions d'euros demandés en 2026.
Nous avons tous entendu parler du récent rapport de la Cour des comptes sur France Télévisions et des constats alarmants qui y figurent sur la situation financière de l'entreprise.
Mes chers collègues, la seule piste d'économies durables est celle d'une réorganisation générale de l'audiovisuel public français !
Nous connaissons tous ici le parcours pour le moins sinueux de la réforme de l'audiovisuel que vous défendez, madame la ministre, à partir d'une initiative de notre assemblée. Je demeure persuadé que cette réforme est impérative pour permettre à l'audiovisuel public de faire enfin face aux défis actuels.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission des finances est favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme je ne dispose que de trois minutes pour m'exprimer, je ne perdrai pas de temps et commencerai par lever un suspense insoutenable (Sourires.) : la commission des affaires étrangères est favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'audiovisuel public extérieur.
Cela dit, je peux exprimer mon mécontentement, madame la ministre, ou plus précisément mon sentiment mitigé vis-à-vis de ces crédits.
D'un côté, je me réjouis que France Médias Monde se voie octroyer 8 millions à 9 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière.
De l'autre, je suis mécontent de voir que le budget alloué à TV5 Monde reste parfaitement stable, à hauteur de 84 millions d'euros.
Pour rappel, l'audiovisuel public extérieur est sous la double tutelle du ministère de la culture et du ministère des affaires étrangères. Nombre de personnes que nous avons entendues en commission n'ont cessé de nous dire qu'une guerre informationnelle était livrée à la France et que nous devions nous défendre.
Or j'observe que des pays comme la Russie, la Turquie et la Chine accordent à leur audiovisuel public extérieur des crédits très supérieurs aux nôtres. Au total, TV5 Monde et France Médias Monde reçoivent un peu moins de 400 millions d'euros, soit environ 10 % à 15 % des budgets alloués par la Chine ou la Russie.
Comment peut-on nous demander de mener cette guerre informationnelle et d'être présents en Afrique, en Asie et en Amérique latine via l'audiovisuel public extérieur, si l'on ne nous donne pas les moyens d'accomplir ces efforts ?
Je vous le dis d'emblée, madame la ministre : je ne voudrais pas, comme l'année dernière ou celle d'avant, qu'on déshabille France Télévisions de 1 million ou 2 millions d'euros, alors que ce groupe accuse déjà une baisse de crédits, pour rehausser le budget de France Médias Monde.
En revanche, je souhaite que soit engagée une véritable réforme de l'audiovisuel public extérieur. Un accord doit être trouvé entre les deux ministères de tutelle pour que l'on puisse, grâce à l'octroi de crédits supplémentaires, mener cette guerre informationnelle avec un appareil extérieur puissant. Je n'exclue pas que cet effort repose sur les crédits du ministère des affaires étrangères.
France Médias Monde est menacée, si nous n'y prenons garde, de fermer son antenne espagnole située à Bogota. En outre, l'État refuse à TV5 Monde la rénovation de ses studios ; cela ne coûterait que 10 millions d'euros, mais cette somme manque à la chaîne.
On voit bien qu'on nous demande de faire beaucoup pour l'audiovisuel public extérieur avec des moyens trop limités, dans un contexte de compétition et de concurrence.
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées appelle à une vraie réforme de l'audiovisuel public extérieur. Il faudrait sans doute procéder à un regroupement des médias et lancer une étude sur des modes de financement différents, de sorte que l'audiovisuel public extérieur demeure puissant et puisse même se renforcer face à nos concurrents.
Par ailleurs, j'ai dit aux présidentes de France Médias Monde et de TV5 Monde qu'un peu plus de contrôle déontologique ne nuirait pas.
Je reconnais qu'un tel contrôle est difficile à mener pour France Médias Monde, qui propose ses programmes en trente langues différentes. Toutefois, je déplore les dérapages qui sont survenus, malgré l'action des directions de deux chaînes. Bref, je vous fais confiance, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Mireille Jouve, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après la présentation de la trajectoire budgétaire de France Médias Monde et de TV5 Monde par mon collègue rapporteur pour avis Roger Karoutchi, permettez-moi de revenir sur la situation de chacune de ces entreprises.
France Médias Monde est confrontée tout d'abord à un problème de financement de sa stratégie numérique. Le programme 848 « Programme incitatif de transformation », qui devait y contribuer à hauteur de 3 millions d'euros en 2026, est certes maintenu, mais il ne bénéficie d'aucune hausse de crédits. Il lui faudrait pourtant 5 millions d'euros supplémentaires d'ici à 2028.
En outre, la suspension des crédits de l'audiovisuel public américain, décidée par l'administration Trump, pourrait avoir des incidences sur une centaine de radios africaines partenaires de Radio France Internationale (RFI).
En réponse, France Médias Monde et la Deutsche Welle (DW) ont élaboré un « bouclier informationnel » pour développer des programmes de substitution aux programmes américains.
Enfin, France Médias Monde envisage de développer son hub à Bucarest afin de diffuser des programmes en moldave et de déployer des offres en arménien, en géorgien et en russe.
Quant à TV5 Monde, cette chaîne met en œuvre son plan stratégique pour les années 2025-2028, avec pour priorité une hyperdistribution ciblée et un renouvellement de ses programmes.
En outre, elle réussit à développer ses audiences en Afrique du Nord, grâce à la réception par satellite, et renforce ses liens avec le Maroc, qui pourrait envisager une adhésion. Elle est toutefois encore confrontée à des coupures de signal dans certains pays, comme le Mali et le Burkina Faso.
C'est dans ce contexte que se pose la question de l'élargissement de sa gouvernance à plusieurs pays africains. Depuis 2024, les échanges se sont intensifiés avec le Bénin, le Cameroun, le Congo, la Côte d'Ivoire, le Gabon, la République démocratique du Congo (RDC) et le Sénégal.
À contre-courant de cet élargissement, TV5 Monde est confrontée, en Europe, au risque de départ de la Suisse. En effet, le Conseil fédéral a décidé, le 19 septembre 2025, de la fin de la contribution suisse à TV5 Monde à compter de 2029.
Cela priverait la chaîne de 8 millions d'euros et réduirait de 11 % les programmes d'antenne et de 21 % les programmes disponibles sur plateforme. Ce précédent serait de nature à fragiliser le modèle de la chaîne internationale francophone.
En conclusion, le pire a sans doute été évité pour 2026 concernant les moyens de l'audiovisuel public extérieur, mais nous sommes loin de disposer, à l'avenir, de toutes les garanties nécessaires.
Comme Roger Karoutchi, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 844, 847 et 848, tout en indiquant qu'un sursaut reste indispensable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette année encore, les perspectives économiques de la presse sont plutôt sombres. Certes, l'année 2024 a été marquée par un freinage de la baisse des ventes, du fait notamment des jeux Olympiques et de l'actualité politique.
Mais la réalité est brutale : en vingt ans, les recettes que la presse tire des ventes ont diminué de moitié ; celles qu'elle tire de la publicité, des deux tiers. L'équilibre économique de la presse, garant de sa liberté, est donc menacé. Le papier, qui reste rentable, se vend de moins en moins, tandis que le numérique se développe, mais rapporte peu.
S'y ajoute une crise de l'information journalistique, concurrencée par des formes de communication numériques de plus en plus diverses et, parfois, par la désinformation.
Face à cette situation, les aides publiques restent indispensables. Or le PLF 2026 prévoit une diminution globale de 5,8 % des crédits destinés à la presse.
Au-delà des chiffres, la question est de savoir si la ventilation des aides favorise l'adaptation de la presse à ce contexte hostile. Ce n'est que partiellement le cas.
Certes, une réforme de l'aide à la distribution est engagée, ce dont nous nous félicitons. Elle passe par la fin de l'aide directe fléchée vers France Messagerie, entreprise dont les résultats confortables nous interrogent.
Surtout, un contrat de modernisation de la distribution, encourageant des mutualisations, a été proposé ; il s'accompagnerait d'un élargissement des bénéficiaires de l'aide à la distribution.
Cependant, dans ce contexte, le sort du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) est inquiétant. Alors qu'il constitue le seul outil transformatif de la presse, le PLF 2026 l'ampute de 20 %. La commission défendra donc un amendement visant à rétablir ses crédits.
L'Agence France-Presse, après avoir retrouvé son équilibre, traverse une nouvelle crise. Elle a perdu beaucoup de financements à la suite d'une conjonction d'événements défavorables, dont des ruptures brutales de contrats avec l'administration américaine et Meta. Dans ces conditions, elle est contrainte d'engager un nouveau plan d'économies.
L'année 2026 sera cruciale pour ce fleuron français de l'information. C'est la raison pour laquelle nous devons être très attentifs à la réussite de ce plan.
Enfin, la presse doit affronter deux chantiers numériques majeurs, à commencer par la négociation de nouveaux accords sur les droits voisins avec les plateformes, qui se révèle extrêmement difficile dans le contexte politique américain actuel. Ces entreprises n'attribuent spontanément aucune valeur au contenu des éditeurs ; les tribunaux les y obligeront peut-être avec le temps, mais il faut pouvoir agir rapidement.
Deuxième chantier : l'intelligence artificielle, qui dépouille de leurs contenus les éditeurs de presse. Des avancées, au besoin législatives, sont nécessaires pour y remédier : la commission de la culture et le Sénat dans sa globalité y prendront leur part.
Je veux en conclusion souligner la nécessité de préserver les crédits du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale. Les radios associatives sont essentielles à la démocratie ; on le ressent plus encore à l'approche des municipales.
Voilà pourquoi la commission de la culture a déposé un amendement visant à rétablir ces crédits au niveau de 2025. Sous le bénéfice de ces observations, elle est favorable à l'adoption des crédits de la presse pour l'année 2026.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Mme Mireille Jouve applaudit.)
M. Jérémy Bacchi, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après une année 2024 marquée par de grands succès français en salles, l'année 2025 s'achève sur une forte baisse de la fréquentation des cinémas. En effet, depuis le 1er janvier 2025, on n'a comptabilisé que 135 millions d'entrées, soit 16 % de moins qu'en 2024, ce qui traduit le taux de fréquentation le plus bas de ces vingt-cinq dernières années.
Deux éléments plaident pour l'hypothèse d'un simple trou d'air. D'une part, on note l'absence de blockbusters américains, conséquence différée de la grève des scénaristes d'Hollywood. D'autre part, côté français, aucune locomotive comparable aux succès majeurs de 2024 – je pense à Un p'tit truc en plus et au Comte de Monte-Cristo – n'a été produite en 2025.
Dans une hypothèse pessimiste, il faut tenir compte de tendances plus structurelles, comme le basculement durable du public vers les plateformes ou une prudence accrue envers les dépenses de loisirs.
La baisse de fréquentation des cinémas affecte durement les exploitants, qui étaient déjà confrontés à une hausse de charges et sont souvent endettés.
Le CNC a réagi par une augmentation de 5 millions d'euros du soutien à l'exploitation et par une avance accordée à plus de 70 petits exploitants. Cette opération a été rendue possible par la bonne santé financière de l'institution, qui ne sera pas affectée par la nouvelle ponction de 50 millions d'euros prévue dans le PLF.
Toutefois, la récurrence de ce prélèvement pourrait donner des arguments aux plateformes américaines soumises aux taxes affectées, qui aimeraient peut-être déstabiliser notre système.
Par ailleurs, j'appelle votre attention sur l'amendement relatif à la taxe sur la publicité adopté par le Sénat en première partie, qui aura pour conséquence de réduire les ressources du CNC dès 2026 et risque de produire des effets indésirables en matière d'optimisation fiscale.
En revanche, nous nous félicitons que les amendements tendant à prolonger le crédit d'impôt international aient été adoptés par notre assemblée, car cet outil a prouvé son efficacité.
Enfin, quatre sujets d'actualité seront à suivre attentivement en 2026.
Je pense en premier lieu au rachat partiel d'UGC par Canal+. On peut y voir un signal positif pour l'exploitation. Cependant, nous devons veiller, de manière générale, à ce qu'une concentration accrue n'aboutisse pas à une réduction de la diversité artistique, notamment pour les films dits « du milieu ».
Deuxièmement, la chronologie des médias est contestée devant le Conseil d'État par Netflix et Amazon, qui souhaitent avancer leurs fenêtres d'exploitation à douze mois. Espérons qu'un compromis soit trouvé pour préserver l'équilibre économique de toute la filière.
Troisièmement, la formation obligatoire des équipes de tournage aux violences sexuelles et sexistes est effective depuis le 1er février 2025 et conditionne désormais l'accès aux aides du CNC. Il s'agit d'une évolution positive, dont l'efficacité devra être évaluée à moyen terme.
Quatrièmement, face aux difficultés actuelles du cinéma d'animation français, le CNC a révisé le décret relatif aux services de médias audiovisuels à la demande (Smad), pour créer une obligation de financement des films d'animation.
En pleine période d'évaluation à Bruxelles de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA), il sera capital, madame la ministre, de soutenir avec force dès 2026 ce texte auprès des institutions européennes, car il prévoit un mécanisme vertueux de financement de la création audiovisuelle.
Compte tenu de ces éléments, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du cinéma pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les industries culturelles ont globalement retrouvé leur chiffre d'affaires d'avant-crise, mais la situation est en réalité contrastée selon les secteurs.
La presse, le cinéma et la radio restent en retrait par rapport à 2019. En revanche, les vidéos progressent fortement, grâce aux plateformes américaines. La musique enregistrée, quant à elle, prospère grâce au streaming. Enfin, le jeu vidéo, bien que dominant sur le plan du chiffre d'affaires, enregistre un léger recul. Il s'agit toutefois d'un secteur où la France reste très bien positionnée à l'échelle mondiale, notamment grâce à son crédit d'impôt.
Participant à l'effort de maîtrise des déficits, les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » sont en baisse de 2,1 %. Premier opérateur du programme par son budget, la BNF est confrontée à l'obsolescence et à la dégradation du site François-Mitterrand, qui fête ses trente ans cette année.
L'enveloppe pour conduire les travaux indispensables a été chiffrée à 600 millions d'euros. Force est de constater que les crédits inscrits au PLF ne sont pas de cet ordre de grandeur, madame la ministre !
Ainsi, quel plan d'investissement envisagez-vous pour faire face à ce défi ? Pourra-t-on éviter la fermeture du site si l'on veut réaliser ces travaux avant 2030 ?
J'en viens à la question du financement du CNM, qui, six ans après sa création, prend aujourd'hui toute sa place. Le PLF 2026 prévoit une bascule de la dotation de l'État, qui se trouve réduite de 26 millions à 20 millions d'euros, tandis que le plafond des deux taxes affectées est rehaussé de 8 millions d'euros.
Cette opération permet de maintenir le volume global des ressources du CNM, tout en limitant l'écrêtement par l'État, ce dont nous nous félicitons. Toutefois, des questions se posent sur le champ de compétences de l'opérateur, en lien avec la baisse de la dotation. Des réflexions sont-elles engagées sur ce sujet, madame la ministre ?
Enfin, je voudrais souligner que le monde de l'édition est particulièrement préoccupé par l'IA générative. Un recours en justice a été formé contre Meta pour l'utilisation d'une base de données de près de 200 000 livres piratés : des milliers de faux livres sont ainsi écrits par des IA et vendus à vil prix sur des plateformes bien connues.
Dans ce contexte, les éditeurs réclament une plus grande transparence de la part des plateformes, pour pouvoir mieux exercer leurs droits à l'échelon européen. Les choses n'évoluent pas nécessairement dans le sens que nous souhaiterions. Aussi le Sénat devra-t-il être particulièrement vigilant sur ce point au cours de l'année qui vient.
En conclusion, les crédits budgétaires du programme 334 pour 2026 contribuent à l'effort de modération des finances publiques, tout en tenant compte des grands défis du secteur.
Les opérateurs pourront poursuivre leur rôle d'animation et de soutien ; s'y adjoindront des initiatives ministérielles pertinentes dans le domaine de la ruralité et de la lecture pour la jeunesse.
Nous nous félicitons à cet égard du déblocage de 7 millions d'euros pour la Maison du dessin de presse, dont l'ouverture est confirmée pour 2027 – nous vous en remercions, madame la ministre.
Compte tenu de ces éléments, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » pour 2026.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Laure Darcos applaudit également.)
M. Cédric Vial, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui un moment de vérité pour notre audiovisuel public.
Derrière les chiffres et les tableaux budgétaires, c'est une question de cohérence, de responsabilité et de vision qui se pose à nous : quelle place, quel rôle et surtout quel avenir donnons-nous à un service public audiovisuel qui se trouve à la croisée des chemins ?
Dans une société traversée par les tensions, la rapidité de la circulation de l'information et, parfois, sa déformation, l'audiovisuel public reste un référentiel commun indispensable.
La Cour des comptes l'a rappelé dans son rapport de septembre 2025, tout en soulignant la fragilité du modèle économique de France Télévisions et la lenteur des transformations attendues. L'inspection générale des finances appelait déjà, en 2024, à une véritable culture de l'efficience. Ces constats demeurent plus que jamais d'actualité.
Les crédits qui nous sont soumis traduisent un effort significatif. En effet, après une coupe de 78 millions d'euros en 2025, une nouvelle baisse de 71 millions intervient en 2026.
À cet égard, voici la première idée forte que je souhaite défendre : l'audiovisuel doit participer à la maîtrise de la dépense publique, mais il ne peut plus subir de coupes imprévues en cours d'année.
Grâce à la loi portant réforme du financement de l'audiovisuel public, que notre Haute Assemblée a adoptée et dont j'ai eu l'honneur d'être l'auteur, les crédits que nous examinons aujourd'hui sont désormais définitifs. Ainsi, aucune coupe infrabudgétaire ne pourra venir déstabiliser les entreprises du secteur : c'est un progrès majeur pour la sécurité, la sincérité et la responsabilité.
La deuxième idée forte que je veux exprimer est tout aussi essentielle : les économies doivent reposer d'abord sur des réformes structurelles et non sur les programmes. Or, faute d'avoir anticipé certaines évolutions, France Télévisions envisagerait un plan d'économies qui pourrait peser très fortement sur la création des programmes de flux audiovisuels ou de cinéma.
Comme le rappelait Malraux, « la culture ne s'hérite pas, elle se conquiert ».
M. Laurent Lafon. Bravo !
M. Cédric Vial, rapporteur pour avis. Nous ne pouvons accepter que les économies se fassent essentiellement au détriment de ceux qui la créent. Puisque les programmes, la création, l'information et la culture sont la raison d'être de l'audiovisuel public, ce n'est pas sur eux que doit porter l'essentiel de l'effort.
Mme Catherine Morin-Desailly. Très bien !
M. Cédric Vial. Les réformes structurelles – qu'il s'agisse de moderniser le cadre social, de rapprocher les réseaux de France 3 et de France Bleu, ou de renforcer les synergies entre opérateurs – doivent désormais s'accélérer et être menées avec détermination.
Enfin, troisième idée forte : l'État doit retrouver la main, fixer un cap et définir un périmètre clair. Depuis 2019, la réforme de la gouvernance est annoncée sans jamais aboutir. Les contrats d'objectifs et de moyens (COM) manquent toujours.
Cette absence de cap fragilise les décisions des entreprises publiques, qui avancent sans visibilité sur leur organisation future ou le périmètre attendu de leurs missions. Il faudra, tôt ou tard, redéfinir les priorités et le périmètre de l'audiovisuel public. Ce débat devra être assumé lucidement et collectivement.
Pour reprendre la pensée de Paul Valéry (Ah ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.),…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Que de références !
M. Cédric Vial. … le problème de notre temps est non pas l'absence de solutions, mais l'absence de direction. Mes chers collègues, il est temps de redonner, collectivement, cette direction.
L'audiovisuel public doit contribuer, comme tout service public, à l'effort national, mais il doit le faire en s'appuyant sur trois principes : la vérité budgétaire, la priorité aux réformes structurelles et le retour d'une vision stratégique de l'État.
Parce que ces crédits pour 2026 traduisent un effort à la fois important et maîtrisé, parce qu'ils offrent, enfin, une stabilité de financement indispensable et parce qu'ils doivent inciter les entreprises publiques à engager les transformations attendues, la commission de la culture se montre favorable à leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Organisation des travaux
M. le président. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour votre bonne information, que 41 amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quinze. Compte tenu de l'organisation de la journée, nous pourrions prévoir trente minutes de discussion supplémentaire, ce qui nous ferait terminer son examen aux alentours de dix-sept heures quinze, heure à laquelle il nous faudrait passer à l'examen de la mission « Santé ».
Si nous ne pouvions y parvenir, conformément à l'organisation de nos travaux arrêtée par la conférence des présidents, et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission serait reportée à la fin des missions appelées en discussion cette semaine.
En outre, la conférence des présidents, réunie mercredi 3 décembre, a décidé que, lorsque le nombre d'amendements déposés ne paraît pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.
Concernant la présente mission, le nombre d'amendements déposés, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui, nous conduit à observer un rythme d'examen, élevé, de 38 amendements par heure.
Aussi, afin de nous donner toutes les chances de terminer aujourd'hui l'examen de cette mission, les durées d'intervention seront fixées, en application de la décision de la conférence des présidents, à une minute.
Médias, livre et industries culturelles (suite)
Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (suite)
M. le président. Dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Mission Médias, livre et industries culturelles (suite)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Fialaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Bernard Fialaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les enjeux que recouvre la mission « Médias, livre et industries culturelles », ce sont la liberté d'expression, l'accès à l'information ainsi que la démocratisation de l'accès au savoir et à la culture.
Or, pour la deuxième année consécutive, cette mission voit ses moyens diminuer : ses autorisations d'engagement reculent de près de 3 % et ses crédits de paiement baissent de plus de 4 %. Ces coupes emportent des conséquences très concrètes pour les acteurs les plus fragiles de notre paysage culturel et médiatique.
Le premier domaine à en subir les effets est celui des médias de proximité. Le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), déjà amputé de moitié l'an dernier, reste pour 2026 très loin de son niveau historique.
Les radios associatives, présentes dans nos territoires ruraux, nos quartiers et nos outre-mer, assurent pourtant des missions essentielles : information de proximité, cohésion sociale et médiation culturelle. En les privant durablement de moyens, nous fragilisons un pan entier de l'information de proximité.
Comment leur demander de se moderniser, de financer la diffusion en DAB+ ou d'offrir des emplois pérennes si leurs ressources diminuent ? Les élus du RDSE présenteront un amendement visant à rétablir un niveau de crédits cohérent avec l'exécution de 2024.
Le programme 180, dans son ensemble, recule de 6 %. Certes, la subvention à l'Agence France-Presse (AFP) progresse mécaniquement, conformément à son contrat d'objectifs et de moyens (COM), et les aides directes à la presse sont globalement maintenues. Toutefois, les structures les plus dépendantes de l'action publique que sont les radios locales ou les médias associatifs et éducatifs voient leurs marges de manœuvre se réduire encore. L'État ne peut pas saluer leur rôle dans l'éducation aux médias et la lutte contre la désinformation tout en laissant s'éroder les outils qui les soutiennent.
Je saisis cette occasion pour rappeler de nouveau la nécessité d'un véritable code de déontologie des médias, assorti d'un ordre des journalistes chargé d'en assurer le contrôle. Nous ne pouvons plus nous contenter de comités d'éthique à géométrie variable selon les rédactions. Il y va de la crédibilité de l'information et de la protection des journalistes.
De même, nous ne pouvons nous satisfaire du fait que la majeure partie de la presse nationale soit contrôlée par quelques grandes fortunes. Alors qu'outre-Atlantique le mastodonte Netflix s'apprête à absorber Warner Bros, autre mastodonte, sous réserve de l'aval de Donald Trump, la concentration des médias dans notre pays doit également nous interpeller, si nous entendons préserver le pluralisme de l'information et protéger notre démocratie.
Le secteur de la presse écrite ne subit pas de baisse directe de ses aides, mais il est confronté à un déclin structurel alarmant. Les éditeurs font face à la chute du lectorat papier, à la hausse des coûts de production, à la transition numérique, qui exige des investissements lourds, ainsi qu'à la fragilisation de la distribution : la diffusion payante a encore reculé en 2024 et en 2025.
Le programme 334, « Livre et industries culturelles », se trouve dans une situation plus nuancée. Ses crédits de paiement diminuent légèrement, mais ses autorisations d'engagement augmentent, notamment grâce à des investissements immobiliers importants au profit de la Bibliothèque nationale de France (BNF).
Les bibliothèques publiques, la BNF et le Centre national du livre (CNL) restent au cœur de la politique de lecture et de diffusion du savoir. Nous serons toutefois vigilants, compte tenu de la légère contraction de la subvention du CNL, conjuguée aux tensions pesant sur ses charges.
Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) conserve des moyens solides, soutenus par des taxes affectées qui, pour le moment du moins, demeurent dynamiques.
En revanche, le Centre national de la musique (CNM) traverse une zone de turbulences. La taxe sur le streaming musical, censée constituer l'un des piliers de son financement futur, rapporte moins que prévu. Dans le même temps, les coûts explosent dans toute la filière. Inflation, soutien aux petites scènes, production d'événements : la subvention de l'État ne compense pas ces évolutions. Dès lors, il faut compter sur le relèvement du plafond des taxes et sur un meilleur rendement.
Les crédits versés aux sociétés de l'audiovisuel public connaîtront l'an prochain une ponction de 1,8 %, largement supportée par France Télévisions et par le financement de la création. À l'évidence, il est nécessaire de réformer structurellement l'audiovisuel public, sans le privatiser, afin de favoriser la cohérence et la puissance de nos médias dans le paysage actuel.
M. Laurent Lafon. Bravo !
M. Bernard Fialaire. La confiance n'exclut pas le contrôle.
Mes chers collègues, cette mission, modestement dotée au regard d'autres politiques publiques, constitue l'armature de notre vie démocratique et culturelle. En cette période dominée par la menace de nouveaux empires, nous devons garantir aux acteurs de ce rempart démocratique une véritable visibilité financière et soutenir ceux d'entre eux qui ont besoin de notre aide. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », ainsi que le compte d'affectation spéciale (CAS) consacré au cinéma, à l'audiovisuel et à l'expression radiophonique locale. Je précise que ma collègue Catherine Morin-Desailly reviendra plus spécifiquement sur l'audiovisuel public.
Madame la ministre, ces budgets nous placent face à une question politique simple. Notre pays se dit attaché à la culture et à la liberté de la presse : acceptons-nous qu'elles deviennent des variables d'ajustement budgétaire ?
La presse, le livre, la musique, le cinéma et l'audiovisuel ne sont pas des loisirs de privilégiés. Ce sont des industries qui emploient des centaines de milliers de personnes, structurent nos territoires et garantissent notre démocratie. Avec 15 500 bibliothèques, 2 000 salles de cinéma et plus de 100 000 emplois dans le cinéma, ces secteurs composent un maillage qui fait la force de notre pays.
Je connais les contraintes budgétaires auxquelles vous faites face. Le prélèvement de 50 millions d'euros sur le CNC pour 2026, après 500 millions d'euros en 2025, s'inscrit dans un effort collectif. Nous en prenons acte.
Néanmoins – vous l'avez dit vous-même le 28 octobre dernier –, ce prélèvement ne saurait être encore accru. Il ne pourra seulement pas être réitéré après 2026.
Le CNC n'est pas une tirelire. C'est un outil de politique publique dont l'efficacité suppose de la prévisibilité. Son président a pris soin d'insister sur ce point. Nous comptons sur votre engagement pour que cette limite soit respectée.
Ne nous y trompons pas : le cinéma français, avec 180 millions d'entrées en 2024, soit le meilleur résultat européen après la crise du covid, n'est pas seulement une fierté nationale ; il s'agit d'un modèle envié, d'un secteur économique performant et d'un vecteur d'influence. Toutefois, la fréquentation a baissé de 15 % depuis le début de l'année. Ce chiffre ne laisse pas de nous inquiéter.
Plus de 300 films sont désormais produits chaque année, contre 200 il y a vingt ans ; cette diversité reflète la pluralité de notre société.
Face aux menaces pesant sur cette richesse, notre groupe et notre commission ont agi. Nous avons fait adopter collectivement la semaine dernière trois amendements importants, tendant à assurer la prorogation du crédit d'impôt international jusqu'en 2028 ; à introduire une clause de sécurité juridique pour les projets en cours ; et à assurer le doublement du plafond du crédit d'impôt pour l'animation. Ces trois mesures votées par le Sénat doivent être maintenues dans le texte final.
D'autres menaces demeurent : les sociétés pour le financement de l'industrie cinématographique et audiovisuelle (Sofica) arrivent à échéance à la fin de 2026, sans solution de remplacement ; la chronologie des médias est attaquée par les plateformes américaines ; et les 480 cinémas en régie municipale font face à une échéance critique avec les élections municipales à venir.
S'agissant du livre et de la musique, nos bibliothèques, qui constituent notre premier réseau culturel avec 7 millions d'usagers, doivent être préservées.
Le CNM voit sa subvention réduite de 27 millions à 20 millions d'euros. La baisse est certes compensée par les taxes affectées, mais cette substitution progressive, qui réduit notre contrôle parlementaire, ne doit pas devenir le prétexte d'un désengagement de l'État.
Quant à la presse, garante de notre démocratie, elle connaît de profondes transformations.
Les aides publiques garantissent l'existence d'une information indépendante sur tout le territoire. Michel Laugier l'a parfaitement exposé dans son intervention. Madame la ministre, les élus du groupe Union Centriste refusent la logique purement comptable qui sacrifierait la diversité culturelle et le pluralisme sur l'autel de la rentabilité immédiate. L'accès à la culture et à une information libre constitue non un luxe, mais une condition de la cohésion sociale et de l'égalité républicaine.
Nous voterons ces crédits, non par conviction, mais par responsabilité et par réalisme, parce que le contexte impose des contraintes ; par confiance en votre engagement personnel, mais également par vigilance.
Nous veillerons à ce que ces engagements soient respectés, à ce que nos amendements soient maintenus, et à ce que la culture et l'information ne deviennent pas durablement les variables d'ajustement des finances publiques. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Lafon. Très bien !
M. Michel Laugier. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos.
Mme Laure Darcos. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Médias, livre et industries culturelles » a chaque année une résonance particulière.
Les politiques découlant de cette mission budgétaire et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » ont des implications majeures pour l'accès à la culture et à l'information de nos concitoyens.
Ce sont elles qui contribuent à faire vivre la production, la diffusion et le pluralisme des idées et des œuvres partout dans nos territoires. Or les secteurs concernés font face depuis plusieurs années à de nombreux bouleversements : ceux du livre, de la presse écrite, de la musique, de la radio ou encore de l'audiovisuel ont été touchés hier par l'essor d'internet et le sont aujourd'hui par celui de l'intelligence artificielle.
Venons-en aux composantes de cette mission, en commençant par le programme 334, « Livre et industries culturelles ».
Le montant de ses crédits s'élève à 343,4 millions d'euros dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, en diminution par rapport à 2025.
Le secteur du livre, en particulier, a besoin d'un réel accompagnement. Or la dotation dont bénéficie le Centre national du livre est réduite de plus de 4 millions d'euros, alors que cette institution joue un rôle majeur dans le soutien à la filière. Elle sera donc contrainte de puiser dans son fonds de roulement pour absorber cette mesure de régulation budgétaire.
La Bibliothèque nationale de France se trouve elle aussi dans une situation délicate. La stabilité des moyens qui lui sont alloués est certes appréciable, mais elle ne permettra pas pour autant à l'institution d'engager la rénovation du site François-Mitterrand, qui est très dégradé et fait face à un mur d'investissement.
Afin de soutenir le secteur du livre et ses acteurs, j'ai déposé, à l'instar de notre collègue Sylvie Robert, un amendement visant à revaloriser la part du droit de prêt relevant de l'État, levier essentiel pour la rémunération des auteurs et des éditeurs. Les crédits dont il s'agit n'ont pas augmenté depuis près de vingt-deux ans, malgré l'inflation.
En outre, je tiens à m'insurger publiquement contre la pratique illégale d'une grande entreprise américaine, Amazon, qui a décidé d'exonérer de frais de livraison ses clients récupérant leurs commandes de livres dans les points de retrait installés dans les galeries marchandes des grandes surfaces. L'illégalité d'une telle pratique a été rappelée par le médiateur du livre lui-même.
J'en appelle, madame la ministre, à une action énergique contre cet acteur qui s'affranchit sans ambages de la loi française et met en difficulté nos librairies, que la loi de 2021 est pourtant censée protéger.
J'en viens à présent au cinéma, qui est en nette perte de vitesse : en 2025, la fréquentation des salles s'est révélée très décevante. C'est ainsi toute une filière qui voit son activité fragilisée. Dans ce contexte, la mise à contribution du CNC, pour participer au redressement des comptes publics en 2025 comme en 2026, est une mauvaise manière faite au cinéma.
Heureusement, nous nous sommes mobilisés en première partie de ce PLF pour reconduire jusqu'à la fin de l'année 2028 le crédit d'impôt international, lequel reste l'un des outils les plus performants pour attirer les investissements en France.
Notre mobilisation a également permis de maintenir en l'état les taxes affectées au CNC ; ces dernières ne seront pas soumises à plafonnement.
Enfin, sur l'initiative de notre collègue Cédric Vial, nous avons doublé le plafond du crédit d'impôt audiovisuel bénéficiant aux productions d'œuvres d'animation, ce qui favorisera la production de films d'animation en France et confortera la compétitivité de nos studios. Souhaitons que ces mesures de soutien au cinéma figurent dans le texte définitif.
Le programme 180, « Presse et médias », est également au cœur de cette mission. Dans le projet de loi de finances pour 2026, le montant total des aides à la presse écrite baisse de 5,8 % par rapport à 2025, s'établissant ainsi à 10,8 millions d'euros.
La diminution des crédits du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), lequel permet d'accompagner la transformation des entreprises vers le numérique, me semble être un mauvais signal ; une correction s'impose.
Nous le savons, le soutien de l'État est déterminant pour les entreprises de presse, qui font face à l'érosion continue de leur lectorat, à l'assèchement de leurs revenus publicitaires, aspirés par les grandes plateformes numériques, et à une distribution pour le moins erratique.
Au chapitre des avances à l'audiovisuel public, le montant prévu pour 2026 est également en repli. Sont particulièrement touchés France Télévisions, Radio France et l'Institut national de l'audiovisuel (INA), qui doivent contribuer à l'effort de réduction des dépenses publiques.
France Télévisions subit l'essentiel de la contraction des crédits, alors même que cette entreprise fait face depuis plusieurs années à une situation dégradée.
Mes chers collègues, l'audiovisuel public doit rester un repère, une valeur sûre. Protéger l'information avérée, c'est-à-dire vérifiée, sourcée et fiable, est devenu un défi crucial. L'enjeu n'est plus seulement d'informer : il s'agit de défendre la vérité dans un environnement saturé de contenus douteux.
Si nous soutenons le pluralisme des médias avec conviction, nous croyons par-dessus tout en la vertu pédagogique de l'information diffusée et en sa qualité. L'audiovisuel public représente, à ce titre, une force de frappe culturelle de premier ordre. On ne compte plus les émissions et séries de grande qualité, les podcasts érudits accessibles en ligne, mais encore trop souvent méconnus. On sait l'importance que les antennes publiques donnent au partage des savoirs et à la création.
Dans ce contexte, l'audiovisuel public a une responsabilité toute particulière. Il doit donc être correctement financé. Demander plus d'efforts à France Télévisions conduirait à une impasse. L'entreprise a déjà réduit sa masse salariale de façon draconienne, ses effectifs ayant baissé de 10 % en quatre ans. Les coupes supplémentaires qui lui sont demandées, ou plutôt imposées, ne seront pas sans conséquence, et je le regrette profondément.
Enfin, nous devons redoubler de vigilance face aux défis sans précédent que pose l'intelligence artificielle aux secteurs relevant de cette mission budgétaire.
À nous d'agir efficacement, en tant que législateurs, face au fléau du moissonnage des contenus culturels, qui prive les ayants droit de la juste rémunération de leur travail. Nous nous y attelons au sein de la commission de la culture.
Sous ces réserves, les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Laugier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre État est au bord de la faillite et la situation financière d'autres pays nous ramène chacun au sens des réalités.
Oui, en matière culturelle, nous sommes, dans bien des domaines, au bout du chemin.
Oui, la situation nous invite à repenser nos approches si nous voulons sauver notre modèle.
Oui, les différents pans de la culture, comme d'autres secteurs, doivent être mis à contribution pour soutenir l'effort budgétaire. Tel est le sens des prélèvements demandés à certains opérateurs ou encore de la baisse de l'enveloppe allouée à l'audiovisuel public, pour ne citer qu'eux.
Je centrerai mon intervention sur la situation de l'audiovisuel public. Mes collègues Jean-Gérard Paumier et Else Joseph se pencheront, pour leur part, sur d'autres champs de l'action culturelle.
Ces dernières semaines, l'audiovisuel public a donné lieu, au sein de notre commission, à plusieurs débats animés. Ces derniers témoignent de l'attachement que nous portons à un acteur qui, seul, peut remplir des missions de diffusion culturelle, de lien social et d'accès à l'information, notamment dans nos territoires. À cet effet, les cahiers des charges lui assignent des missions prioritaires. Ses apports à la promotion de la culture, à l'expression des territoires et à l'accès à l'information ne doivent pas être remis en cause ; nous n'y dérogerons pas.
Pour autant, une baisse des financements a été actée pour 2026, mesure que les sénateurs du groupe Les Républicains soutiennent.
Si elle s'inscrit dans une logique de contribution à la maîtrise du déficit, cette baisse ne réglera pas pour autant les maux plus profonds dont souffre notre modèle. Elle ne nous exonère pas de nous intéresser aux missions, aux cahiers des charges et aux objectifs des opérateurs culturels.
Je le dis et je le répète, le rabot n'a jamais constitué une politique. Si nous entendons préserver notre audiovisuel public, nous devons en interroger les missions, le fonctionnement, l'organisation ainsi que le coût pour la Nation, non le placer sous une cloche immunisante, comme certains de nos collègues le souhaitent.
L'absence de contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2024-2028 nous interpelle. Comment expliquer, en effet, que plus de 3,5 milliards d'euros de dotations publiques financent chaque année l'audiovisuel public sans que soit énoncé, en retour, aucun objectif, aucune trajectoire, bref, aucune exigence de performance ?
Si nous voulons préserver notre audiovisuel public, nous devons procéder à la définition des missions essentielles relevant du service public et évaluer la manière dont ces dernières sont effectivement remplies, afin de fixer un périmètre d'action et de calibrer le budget en conséquence.
Oui, si nous voulons le préserver, nous devons lui appliquer une méthode nouvelle : tout d'abord, la redéfinition des missions et des objectifs ; ensuite, la mise en place d'une nouvelle organisation et l'évaluation des coûts projetés ; enfin, l'allocation de moyens ajustés et justifiés.
C'est là, mes chers collègues, le seul moyen d'en finir avec un modèle économique qualifié de « non soutenable dans la durée » par la Cour des comptes. C'est le seul moyen de restaurer le lien de confiance, aujourd'hui effrité, qui unit chaque citoyen au service public de l'audiovisuel.
Évidemment, ce recentrage devra s'accompagner de réformes structurelles opérant une réorganisation pour donner au secteur plus de souplesse et d'habileté, plus d'efficacité et de compétitivité.
Sur ce sujet, le Sénat a déjà beaucoup travaillé, notamment au travers de la proposition de loi du président Laurent Lafon relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, visant à créer une holding. Ce texte a été adopté par le Sénat, mais nous attendons encore son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. (M. Laurent Lafon le confirme.)
Les États généraux de l'information, dont nous attendons la traduction en actes concrets, se sont également penchés sur le sujet. Nous espérons pouvoir débattre de leurs propositions par le biais d'un projet de loi. Les évolutions dont il s'agit sont souhaitables et attendues.
Attachés à la pérennité du service public, nous voterons, pour l'heure, les crédits de cette mission. Cela étant, nous continuerons d'appeler de nos vœux l'application de cette nouvelle méthode : évaluation, redéfinition, organisation, puis allocation, et non l'inverse.
Nous sommes quelque peu choqués d'entendre la présidente de France Télévisions estimer que, finalement, tout doit continuer comme avant ; qu'il s'agit simplement d'obtenir des moyens supplémentaires. Non, tout ne peut pas continuer comme avant. (M. Laurent Lafon acquiesce.)
C'est parce que nous apprécions l'audiovisuel public, parce que nous voulons le préserver, que nous entendons redéfinir ses missions et son périmètre. C'est là le seul chemin pour assurer la pérennité de notre modèle audiovisuel public. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. Mikaele Kulimoetoke. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. Mikaele Kulimoetoke. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la mission « Médias, livre et industries culturelles » couvre plusieurs enjeux : le soutien à la presse et aux médias dans leur diversité d'expression, le développement de la lecture et de la création littéraire, mais aussi la préservation des industries culturelles, qui sont une composante majeure de notre économie.
Avec 707,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 690,2 millions d'euros en crédits de paiement, la mission participe à l'effort national de maîtrise des déficits.
Nous devons poursuivre la dynamique engagée ces dernières années pour renforcer la place du livre dans la vie des Français.
Plusieurs initiatives ont été prises : l'élévation de la lecture au rang de grande cause nationale en 2022, le plan lecture et, plus récemment, les États généraux de la lecture, dont les conclusions viennent d'être présentées.
Alors que le temps de lecture des Français se réduit, donner le goût du livre dès le plus jeune âge et favoriser l'accès de tous aux bibliothèques et à la lecture doivent demeurer des priorités de nos politiques publiques.
En outre, les bibliothèques font partie de notre patrimoine culturel. À ce titre, nous éprouvons les mêmes inquiétudes que M. le rapporteur spécial quant aux financements nécessaires aux travaux de la Bibliothèque nationale de France (BNF).
J'en viens au secteur de la musique. Créé il y a seulement six ans, le Centre national de la musique (CNM) a su s'imposer comme une institution essentielle à la vitalité culturelle du pays. Cette année encore, son financement est au cœur des débats. Pour 2026, la hausse des taxes qui lui sont affectées – la taxe sur les spectacles et la taxe sur le streaming – permettra de dégager 8 millions d'euros, ce que nous saluons. Cette augmentation permet de maintenir le volume global des crédits de l'opérateur, malgré la baisse des dotations.
Néanmoins, comme l'a indiqué M. le rapporteur spécial, les craintes exprimées à ce sujet imposent une réflexion à part entière.
Quant au secteur de la presse, il connaît une crise structurelle. Les défis sont nombreux : il faut renforcer les conditions de son pluralisme et soutenir le développement de sa diffusion tout en accompagnant sa mutation technologique.
Avec 176 millions d'euros en crédits de paiement, les aides à la presse représentent plus de la moitié des financements du programme 180, « Presse et médias ».
Je tiens à saluer la hausse des crédits de l'AFP – ces derniers progressent de 4,2 millions d'euros par rapport à 2025 –, ainsi que la création d'une maison du dessin de presse, désormais confirmée pour 2027.
En revanche, le nombre d'amendements ayant pour objet le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale reflète les inquiétudes pesant sur la survie des radios associatives de nos territoires. Je rappelle qu'il en existe près de 600 dans l'Hexagone et plus de 130 dans les outre-mer.
Ces radios sont au cœur du paysage médiatique français. Leur rôle est essentiel et même crucial : elles offrent un espace de parole indispensable dans les zones rurales et les outre-mer. La diminution de plus de 19 millions d'euros des crédits alloués au soutien à l'expression radiophonique locale représente, dès lors, une réelle menace. Nous défendrons un amendement de rétablissement de ces crédits afin d'assurer leur pérennité.
Enfin, dans ce projet de loi de finances, les sociétés de l'audiovisuel public participent très largement aux efforts de redressement budgétaire. Les économies demandées, avec une contribution de l'ordre de 71 millions d'euros, représentent un défi particulier pour France Télévisions au regard de la dégradation de sa situation financière.
Si ladite contribution est nécessaire, ces sociétés ne doivent pas subir de coupes budgétaires trop importantes, lesquelles interviendraient au détriment de la qualité de l'information et des programmations.
Chacun en convient, cette situation rappelle surtout la nécessité d'engager une réforme d'ampleur du secteur, en poursuivant notamment l'examen de la proposition de loi relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle.
Mme Sonia de La Provôté. Excellente proposition de loi !
M. Mikaele Kulimoetoke. En dépit des quelques réserves que j'ai évoquées, les membres du groupe RDPI voteront les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Sylvie Robert. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la démocratie est en danger. La Ligue des droits de l'homme évoque même, au sujet de la France, une « démocratie en décrochage », sur fond d'atteintes aux libertés associatives, académiques, de création et de diffusion artistique, ainsi qu'à la liberté de la presse. En 2025, notre pays a perdu quatre places dans le classement réalisé par Reporters sans frontières (RSF).
M. Olivier Paccaud. Ce n'est pas la Corée du Nord non plus…
Mme Sylvie Robert. La confiance, autre facteur déterminant pour mesurer la vitalité démocratique d'un pays, est, elle aussi, en berne.
À titre d'illustration, la confiance dans les médias s'érode : seuls 32 % des Français estiment « que l'on peut avoir confiance dans ce que disent les médias sur les grands sujets d'actualité ».
M. Olivier Paccaud. Et Élise Lucet ?
Mme Sylvie Robert. Malgré ce constat globalement sombre, deux typologies de médias continuent d'être appréciées par nos concitoyens : l'audiovisuel public – près de sept Français sur dix en ont une bonne image – et les médias locaux. Au total, 63 % des Français déclarent avoir confiance en ces sources d'information, un chiffre qui les place juste derrière les journaux télévisés d'information.
Or, de manière paradoxale, l'audiovisuel public et les médias locaux sont particulièrement mal traités par ce budget.
Au sujet des médias de proximité, comment ne pas mentionner la quasi-division par deux des crédits alloués au FSER ? Alors que ces médias indépendants jouent un rôle essentiel, qu'il s'agisse du pluralisme, de la participation citoyenne ou de la cohésion nationale, cette coupe draconienne viendrait fragiliser les 750 stations qui maillent le territoire.
Le soutien aux médias locaux est insatisfaisant et mal calibré. Par exemple, les conditions d'accès au fonds de soutien aux médias d'information sociale de proximité (FSMISP) sont trop restrictives pour que cet instrument agisse comme un véritable levier de politique publique.
Les élus de notre groupe proposeront la création d'un fonds d'urgence temporaire en faveur des médias locaux et de proximité afin de répondre à la crise que ces derniers traversent, liée notamment à la déperdition des recettes publicitaires. En cinq ans, l'écosystème a perdu 120 à 150 millions d'euros de recettes annuelles et vingt-cinq titres de presse locale ont disparu.
Le tour de France du Président de la République témoigne de cette prise de conscience, malheureusement un peu tardive. Nous avons entendu de grandes déclarations ; désormais, nous attendons des actes. Madame la ministre, je me tourne vers vous : à quand le projet de loi issu des États généraux de l'information ?
Quant au traitement réservé à l'audiovisuel public, il est indigent et contreproductif. Il relève à mon sens de l'acharnement. On déplore 70 millions d'euros en moins pour 2026, après une baisse de 80 millions en 2025 et des annulations de crédits en cours d'année en 2024. Au total, le décrochage par rapport aux contrats d'objectifs et de moyens (COM) est terrible, puisqu'il atteint près de 300 millions d'euros.
Que doit faire l'audiovisuel public pour mériter un minimum de considération de la part de sa tutelle, un minimum de soutien budgétaire ? Depuis 2008, l'audiovisuel public a perdu 1,3 milliard d'euros en valeur réelle, soit un tiers des crédits qui lui sont octroyés via ce PLF.
Sur certaines travées, ainsi qu'au Gouvernement, le mot d'ordre est « réformer ». Je n'ai jamais nié la nécessité de réformer, mais comment l'audiovisuel public peut-il se transformer quand on sabre en permanence ses ressources ? Chers collègues, pouvez-vous enfin répondre à cette contradiction avec de véritables arguments de fond ?
À mon sens, les économies imposées cette année sont celles de trop. Cette fois-ci, comme l'a dit Jean-Raymond Hugonet, les programmes de flux et la création audiovisuelle seront affectés. Pour le dire simplement, ce budget ébranlera l'ensemble du secteur audiovisuel, des sociétés de production aux scénaristes, des documentaristes à la post-production. Or, derrière, il y a des emplois !
Le cercle vicieux est enclenché. Pour tenir son budget, France Télévisions sera obligée de revendre ses actifs ; on parle même des droits sportifs...
Alors que l'heure est à la bataille des contenus et à la lutte contre la désinformation et les ingérences étrangères, nous devrions trouver un consensus pour investir dans l'audiovisuel public. Or notre attention est happée par des débats subsidiaires, orchestrés par l'extrême droite, laquelle répète à l'envi qu'elle veut détruire l'audiovisuel public.
Réveillons-nous et retrouvons un tant soit peu de concorde : faisons de l'audiovisuel public un rempart démocratique, comme nous y invite le règlement européen sur la liberté des médias. Donnons-lui les moyens de continuer à produire des contenus diversifiés, ainsi qu'une information de qualité et de proximité. Soyons à la hauteur des enjeux colossaux qui sont devant nous.
Notre souveraineté démocratique est indissociable de notre souveraineté culturelle. En la matière, le septième art est l'un des vecteurs les plus puissants : plus que tout autre, il concourt à notre influence et à notre rayonnement international. Je rappelle que la France est le premier producteur de films en Europe, l'un des tout premiers pays représentés et récompensés dans les festivals.
Comme le démontrent parfaitement les auteurs d'une récente tribune, la politique de soutien du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) n'est pas seulement efficace ; elle est la condition d'une « réussite artistique, culturelle, économique » et – ajouterai-je – géopolitique.
Le cinéma français est bel et bien un actif stratégique. Il est d'autant plus impératif de le défendre et de le promouvoir que le raidissement américain est très net.
Face à la tentation hégémonique des plateformes et à la vision idéologico-politique d'un « effacement civilisationnel » de l'Europe, le soutien au cinéma français et européen se révèle être un acte, indispensable et résolu, de résistance démocratique et d'affirmation de notre puissance culturelle.
Ce soutien est fondé sur un modèle vertueux qui fait de la diversité sa force et sa richesse. Mais il est confronté à des assauts répétés, de plus en plus décomplexés, de la part de l'extrême droite et d'autres forces politiques encore. Certains appellent désormais à la suppression pure et simple du CNC, quand d'autres estiment que les taxes qui lui sont affectées constitueraient un coffre-fort dans lequel il serait loisible de piocher. Eh bien non !
« Supprimer ou amputer le CNC ne serait pas une économie, mais un désarmement culturel » qui minerait « la souveraineté culturelle de la France, l'excellence de son cinéma », et éloignerait « la possibilité, pour chacun, de continuer à choisir librement les histoires qu'il veut voir ». Je fais miens les termes employés par les auteurs de la tribune précitée.
Veillons à ne pas déstabiliser la fiscalité affectée au CNC et à ne pas alourdir les prélèvements sur sa trésorerie, au point de menacer son fonctionnement.
J'en viens maintenant au secteur musical. La baisse de 7 millions d'euros de la dotation accordée au Centre national de la musique (CNM), qui s'ajoute à celle de 1,3 million en 2025, fragilise ses fondations. En deux ans, ce sont près de 10 millions d'euros qui auront été enlevés au CNM, alors même que le rendement des taxes qui lui sont destinées – billetterie et streaming – aura été écrêté, et ce, malgré nos tentatives transpartisanes pour les déplafonner.
En tant que parlementaires, nous avions précisément, lors de la création du CNM, appelé l'État à respecter le contrat qui lie cet organisme à la filière musicale et à garantir dans la durée des financements cohérents avec ses missions.
Tel n'est plus le cas aujourd'hui, si bien que le CNM pourrait être obligé de rogner sur les aides transversales. Pis, le principe de solidarité, qui fonde son action, pourrait être remis en cause, au détriment de certaines esthétiques.
Bref, non seulement les missions du CNM sont menacées, mais ses principes fondamentaux eux-mêmes sont en train d'être ébranlés, au point que l'ensemble de la filière risque d'être déstabilisée. Nous ne pouvons pas l'accepter. Nous proposerons donc un amendement visant à revenir sur la diminution de ses crédits.
Vous l'aurez compris, les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s'opposent au budget de cette mission. En particulier, les crédits octroyés à l'audiovisuel public ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure du changement radical d'époque que nous vivons ; ou plutôt, il paraît incapable de mettre en cohérence ses discours et ses actes.
M. Adel Ziane. Oui !
Mme Sylvie Robert. Mais ce n'est pas une fatalité. Au Royaume-Uni, le ministre d'État de la culture, des médias et du sport, Ian Murray, a ainsi sonné le tocsin pour « sauver la BBC ». Il a répondu de manière limpide aux attaques de Reform UK, le parti d'extrême droite de Nigel Farage : « [...] Nombreux sont ceux qui souhaitent la disparition de cette chaîne. Ils préféreraient voir Fox News sur BBC One, plutôt que BBC News. Mais si nous suivons cette voie, notre Nation s'en trouvera amoindrie. Ce combat sera difficile à gagner, mais l'écosystème audiovisuel doit nous soutenir. »
Quel dommage, madame la ministre, que vous n'ayez pas fait preuve du même volontarisme politique. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – M. Jérémy Bacchi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits qui nous sont présentés aujourd'hui actent un retrait structurel de l'État du champ médiatique et culturel ; un retrait organisé, voire méthodique, qui transforme en profondeur l'écosystème public de l'information, de la création et de la diffusion culturelle en France.
Ce budget est le vecteur silencieux, mais déterminé, d'une politique revenant à considérer les médias, la culture et le livre non plus comme des biens communs, mais comme des secteurs économiques ordinaires, soumis aux seuls impératifs de rentabilité et de concurrence.
Le PLF pour 2026 réduit les crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » de 70,85 millions d'euros, soit de 1,79 % par rapport à 2025. Or dans un contexte d'inflation, même modérée, chaque euro en moins marque une perte de capacité d'action.
La trajectoire pluriannuelle est encore plus révélatrice : France Télévisions voit ses crédits baisser de 4,93 % en 2026 ; puis ces derniers diminueront de 2,54 % en 2027, et de 1,71 % en 2028. Radio France, l'Institut national de l'audiovisuel et France Médias Monde sont tous pris dans la même spirale descendante. C'est une véritable asphyxie budgétaire que vous organisez, madame la ministre !
France Télévisions perd 65 millions d'euros, Radio France 4,1 millions d'euros, l'INA 1,43 % de sa dotation, et France Médias Monde voit son budget gelé. Comment garantir la qualité et la diversité, la création et l'information quand on réduit mécaniquement la capacité de produire ?
Les premières victimes sont connues : le débat, la culture, l'éducation, la fiction et le documentaire – en résumé, tout ce qui ne se vend pas immédiatement, mais construit sur le temps long une Nation.
Pis encore, depuis 2024, aucun contrat d'objectifs et de moyens n'a été signé, en violation de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Le Gouvernement prive les opérateurs de visibilité, les place sous une dépendance totale au « robinet budgétaire ».
Une telle instabilité stratégique fragilise le service public et peut entrer en contradiction avec le droit européen sur la liberté des médias.
Cette situation n'est pas neutre, puisqu'un service public dont les règles changent chaque année est un service public vulnérable et potentiellement soumis aux pressions politiques.
Face à ces baisses, le Gouvernement prône le développement des ressources propres, ce qui signifie davantage de publicité, de coproductions privées et d'externalisations. Or cette logique est déjà à l'œuvre. France Télévisions externalise des émissions d'information et de débat, qu'elle délègue à des sociétés comme Mediawan, Banijay Entertainment ou Newen Studios, parfois détenues par des fonds internationaux. L'argent public finance ainsi des profits privés pendant que l'État se désengage. L'austérité devient, de fait, un outil de la privatisation.
Ensuite, les aides à la presse diminuent d'environ 6 %, alors même que les coûts de production – papier, énergie, distribution, etc. – explosent. Les titres les plus fragiles, ceux de la presse locale, ceux de la presse indépendante et les journaux « critiques », sont directement menacés. Dans un paysage déjà dominé par cinq méga-acteurs – LVMH, Bolloré, Dassault, Altice et le Crédit Mutuel –, toute baisse d'aide publique renforce mécaniquement la dépendance aux annonceurs et aux actionnaires tout en affaiblissant le pluralisme.
En outre, le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale subit la première baisse de ses crédits depuis une décennie, et la plus brutale de son histoire : près de 10 % en un an. Cela signifie 780 radios à financer en 2026 avec un budget en diminution ; des radios qui perdent en moyenne 3 500 à 5 000 euros, soit 3 % à 4 % de leur budget total.
Ces montants sont modestes pour l'État, mais vitaux pour ces radios qui assurent l'expression locale, la diffusion des cultures minoritaires et l'accès à l'information dans les territoires laissés à l'écart des grands médias. Affaiblir de telles antennes, c'est renforcer encore la domination des groupes privés et appauvrir la diversité culturelle.
Enfin, le PLF pour 2026 réduit, ou encadre fortement, plusieurs dépenses fiscales qui soutiennent historiquement le cinéma, l'audiovisuel et les métiers d'art.
Le crédit d'impôt cinéma baisse à moins de 7 millions d'euros et les sociétés pour le financement de l'industrie cinématographique et audiovisuelle (Sofica) sont réduites. Or ces secteurs indépendants – documentaires, artistes, cinéma d'auteur – sont précisément ceux qui n'ont ni plateforme, ni capital, ni grand groupe derrière eux.
En fragilisant la création indépendante, le PLF pour 2026 affaiblit la diversité des récits, des formes et des imaginaires. Il substitue une logique d'efficacité commerciale à une logique d'intérêt général.
Ce PLF organise ainsi une triple dynamique : une austérité, qui réduit la capacité du service public à remplir ses missions ; une mise en concurrence, qui pousse les opérateurs vers la publicité et la rentabilité ; et une concentration, qui laisse toujours plus de pouvoir à quelques groupes privés.
Nous voterons contre ces crédits, parce qu'ils affaiblissent le service public, menacent la démocratie culturelle et ouvrent la voie à une marchandisation totale de l'espace médiatique et artistique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – Mme Annie Le Houerou applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Monique de Marco. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans une émission récente du service public, des journalistes s'interrogeaient : « Sommes-nous tous drogués à l'urgence ? » En parallèle, un médecin expliquait que l'urgence conduit souvent à des erreurs d'analyse.
C'est plutôt vrai : la démocratie a besoin de temps pour fonctionner, pour permettre à l'esprit critique de se développer. Elle a besoin de médias à même de nourrir cet esprit critique.
Cette année encore, alors que nous nous apprêtons à voter les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », je ressens une grande inquiétude à l'égard du monde qui vient : un monde dominé par les médias d'opinion ; un monde où la presse indépendante est fragilisée ; un monde où les multinationales menacent les acteurs culturels, qu'il s'agisse des librairies, des cinémas ou des festivals.
Le secteur du livre se porte particulièrement mal.
Amazon cherche, par tous les moyens juridiques, à contourner la taxe sur les frais de port instaurée pour préserver nos librairies ; et, récemment, c'est TikTok qui s'est mis sur le marché de la vente en ligne de livres. Que restera-t-il, demain, de la politique du livre en France ?
Les auteurs demandent un maximum de garanties non amortissables, et les éditeurs une taxe sur les ventes de livres d'occasion. Madame la ministre, qu'attendez-vous pour nous présenter un texte qui permet les deux à la fois et contente ainsi tout le monde ?
Sur un autre sujet, je garde le souvenir de votre première intervention sur France Inter en tant que ministre de la culture. Le lendemain de votre nomination, vous parliez de votre relation affective avec le service public. Or ce dernier n'a jamais été tant fragilisé que depuis votre arrivée. Où sont donc les preuves d'amour faisant suite à cette déclaration ?
Nous avons perdu des heures à débattre, dans cet hémicycle, de la création d'une holding – une idée fixe pour certains, avec pour objectif non pas le renforcement, mais la mise au pas de l'audiovisuel public et l'affaiblissement de ses ressources.
Madame la ministre, quel sera votre bilan au service du renforcement de l'information des citoyens français ?
Il manque aujourd'hui 5 millions d'euros à l'Agence France-Presse (AFP) pour faire face à la dégradation de la couverture médiatique internationale. Laisserez-vous l'AFP remplir ses missions d'intérêt général en lui accordant les recettes dont elle a besoin ?
Quant aux suites qu'il convient de donner aux États généraux de l'information, nous les attendons toujours. On nous a promis un texte de loi, mais cette promesse n'a pas encore été tenue. Il s'agit pourtant d'un sujet transpartisan : la proposition de loi de Sylvie Robert a été soutenue ici par toutes les sensibilités politiques. (MM. Max Brisson et Olivier Paccaud le contestent.)
Ce texte est en partie écrit : pourquoi ne pas s'appuyer sur les rares initiatives parlementaires qui font consensus ?
Puisque nous parlons de sujets consensuels, j'espère que nous trouverons un terrain d'entente en faveur des radios associatives locales.
Tout le monde pourra le confirmer ici, j'ai peu de points communs avec le Président de la République... (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Max Brisson. C'est vrai !
Mme Monique de Marco. Mais depuis ces récentes déclarations, j'ai au moins celui-ci : je crois fermement que la valeur de l'information journalistique doit être restaurée et qu'une opinion doit être clairement distinguée d'une information vérifiée.
M. Olivier Paccaud. On croirait entendre Élise Lucet ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Burgoa. Bonne remarque !
Mme Monique de Marco. À celles et ceux qui craignent que leur liberté d'expression ne soit atteinte, je veux rappeler ces mots du professeur de droit public Thomas Hochmann, extraits de son ouvrage On ne peut plus rien dire..., disponible dans toutes les bonnes librairies : « Une chose est de dire que les débats sont devenus vifs, que les invectives vont plus vite, que la polarisation du champ politique et l'essor des réseaux sociaux ne favorisent pas une discussion apaisée. Mais ce constat ne traduit nul affaiblissement de la liberté d'expression. Le problème touche à autre chose : la décence, la patience, la décence de la controverse. Lorsqu'une affirmation déclenche une avalanche de réponses courroucées, ce n'est pas une restriction de la liberté d'expression qui est à l'œuvre, mais une multitude de ses usages. L'idée selon laquelle “on ne peut plus rien dire” signifie que l'on ne peut plus rien dire sans être contredit. C'est effectivement une évolution remarquable, mais elle n'a rien à voir avec un quelconque développement de la censure, sauf à confondre interdiction et contradiction. La liberté d'expression n'est pas la liberté de parler sans être contredit. »
Madame la ministre, vous qui ne manquez ni de civilité, ni de patience, ni de décence dans la controverse, soutenez-vous cette idée du Président de la République selon laquelle il faut agir pour distinguer le vrai du faux, ce venin qui fait la désinformation ? Et comment comptez-vous agir ? (Mme Colombe Brossel applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame la ministre, mes très chers collègues, les crédits de l'audiovisuel public s'élèvent à 3,878 milliards d'euros, en baisse de 71 millions d'euros, après avoir déjà diminué de 78 millions d'euros l'an dernier.
Ces choix s'inscrivent dans le cadre d'efforts auxquels tout le monde est aujourd'hui soumis, mais également dans une politique de maîtrise et de réduction budgétaire enclenchée il y a maintenant dix ans. Je rappelle qu'entre 2016 et 2023 le budget de l'audiovisuel public n'a pas augmenté, sauf en 2024, et seulement pour compenser la suppression de la contribution à l'audiovisuel public (CAP).
En dépit des efforts louables fournis par France Télévisions, qui supportera l'essentiel de la baisse prévue – le reste est réparti entre Radio France, qui engrange toujours de belles audiences, et l'INA, dont les missions sont indispensables –, la Cour des comptes souligne que les réformes structurelles nécessaires tardent, plaçant l'entreprise en situation de grande fragilité.
À la décharge des entreprises, la tutelle, qui est en l'occurrence l'État, a été ces dix dernières années velléitaire et changeante quant à la mise en œuvre, à l'ère du tout-numérique, d'une réforme globale, ambitieuse et cohérente. Cette réforme, préconisée de longue date par notre commission, doit ajuster les missions, les charges et les moyens, ainsi que le modèle économique et la gouvernance.
Demander des économies et supprimer du jour au lendemain, sans solution de substitution, la contribution à l'audiovisuel public, cela ne fait pas une politique. Il a d'ailleurs fallu que le Parlement intervienne pour assurer l'avenir du financement de l'audiovisuel public, au travers de la loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public, que j'ai défendue avec mon collègue rapporteur Cédric Vial.
En dehors de la question du financement, comme le souligne M. le rapporteur spécial, les adaptations sont lentes. Nous ne voyons encore aucune réforme stratégique aboutir, et la proposition de loi de Laurent Lafon relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, qui vise à moderniser la gouvernance de l'audiovisuel public, attend sa réinscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. De même, nous ne savons pas quand nous pourrons légiférer sur les propositions des États généraux de l'information, qui devraient contribuer à redéfinir les missions spécifiques de l'audiovisuel public.
Les réflexions se poursuivent à Bruxelles dans le prolongement du règlement sur la liberté des médias, avec le bouclier démocratique. Il nous faudra bien, comme ont su le faire les autres pays européens, réformer l'audiovisuel public de manière cohérente et en profondeur pour assurer l'avenir de ses missions spécifiques et irremplaçables : la création, l'information et l'éducation.
Lors d'une réunion à Bruxelles, lundi dernier, avec les parlementaires des États membres engagés face aux enjeux de l'intelligence artificielle, qui – on le sait – est en train de tout bouleverser, j'ai plaidé pour la stricte application du règlement sur l'IA, afin de protéger les droits d'auteur et les droits voisins. J'ai également insisté sur l'importance d'un plan stratégique de soutien, affirmé et concret, de la Commission européenne à nos entreprises.
En attendant, j'espère que le plan d'économies n'aura pas de conséquences dommageables sur le secteur de la création. À cet égard, où en sont les COM, toujours inexistants pour la prochaine période budgétaire ?
Je donnerai tout de même une note positive à ce budget sur un point : la sanctuarisation des crédits de l'audiovisuel public extérieur, qui sont même en hausse pour France Médias Monde, grâce à un apport supplémentaire de l'aide au développement, à hauteur de 10 millions d'euros. La dotation d'Arte et de TV5 Monde demeure, quant à elle, stable.
Dans un contexte de guerre hybride, qui inclut la guerre de l'information, on ne le dira jamais assez : notre audiovisuel extérieur, dans toutes ses composantes, joue un rôle majeur pour diffuser une information libre, indépendante, équilibrée et vérifiée, en français et en plusieurs langues étrangères, à l'échelle du monde, pour démystifier les infox et déjouer les manipulations.
Le contexte international n'a fait que s'aggraver au cours des derniers mois. Il est donc essentiel de conforter ces moyens, déjà largement inférieurs à ceux des concurrents à l'international, face à ceux qui, hostiles aux démocraties occidentales, à l'image de la Russie, mènent une stratégie d'influence et de désinformation particulièrement agressive à des fins de déstabilisation et de manipulation.
Les élus du groupe Union Centriste voteront le budget de l'audiovisuel public pour 2026. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Mme Else Joseph. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons en ce début d'après-midi va bien au-delà de la question des moyens financiers, qui sont certes en baisse ; elle concerne la lecture, nos bibliothèques publiques, le livre, l'avenir de notre presse ou encore l'industrie musicale.
La lecture, tout d'abord, est une véritable porte d'entrée du savoir. Le soutien à la Bibliothèque nationale de France (BNF) et à la Bibliothèque publique d'information (BPI) est maintenu. Mais qu'en est-il du volet local, où la bataille de la lecture se joue ? Je veux que l'on continue à tourner des pages, et non que l'on tourne la page du livre ! Pardonnez-moi cette métaphore... Par ailleurs, les usages de l'intelligence artificielle prennent des proportions sans cesse plus inquiétantes.
Surtout, les crédits de la mission soulèvent la question de l'avenir du pluralisme, qui doit être garanti.
D'ambitieuses réformes sont prévues, notamment pour l'AFP et les aides à la distribution, lesquelles sont en hausse. Mais la question de la survie de certains journaux est posée. Je pense notamment à la presse quotidienne régionale (PQR), sur laquelle j'interpelle, encore et toujours, le Gouvernement ! Face à la concurrence de l'océan numérique, nous avons besoin d'une presse locale forte et soutenue.
J'attire également l'attention sur l'avenir des radios locales. Je regrette que l'on soit timoré lorsqu'il s'agit de ce secteur et que l'on fasse même parfois montre d'ignorance à son égard. Ces médias, écoutés, sont des pépinières de talents, qui contribuent aussi à l'insertion de publics en difficulté.
Un amendement en faveur des radios associatives a été déposé, mais sera-t-il suffisant ? On s'inquiète de certains médias nationaux au nom du pluralisme ; or ce pluralisme a aussi son cœur battant dans nos territoires.
Il ne saurait y avoir d'ambition pour le livre sans un franc et fort soutien apporté aux auteurs, qui sont les véritables artisans du livre. Le droit d'auteur doit être respecté.
Pour rémunérer nos auteurs, on annonce une hausse de la contribution de l'État relative aux prêts dans les bibliothèques. Ce moyen sera-t-il suffisant à l'heure où le rapport des Français à la lecture se dégrade ?
S'y ajoute la concurrence que représentent les livres produits grâce à l'IA : vendus à bas prix, ces ouvrages sont fort alléchants, mais ils induisent le lecteur en erreur et créent un véritable préjudice pour nos éditeurs. Cette concurrence déloyale doit cesser. Plus que d'un cadre juridique, nous avons besoin d'actions.
Madame la ministre, comment comptez-vous réagir pour que les plateformes soient transparentes quant aux sources qui entraînent ces IA ? Il existe un règlement européen sur l'intelligence artificielle, qui détaille diverses obligations, mais ces clauses ne sont pas appliquées – le cinéma fait d'ailleurs face aux mêmes difficultés.
J'en viens à la situation de la filière musicale.
En 2025, la subvention du CNM a déjà baissé, à périmètre inchangé. Sa capacité d'intervention a donc été réduite, à rebours des engagements du ministère. La dotation continue de reculer et la hausse des plafonds ne garantit rien, compte tenu de l'enjeu que constitue le soutien à l'ensemble de la filière.
Nous avons besoin de clarté, de lisibilité et de visibilité quant à la répartition des fonds. Certaines attributions restent peu précises. À l'évidence, nous sommes parfois face à des tours de passe-passe comptables, voire à de véritables trompe-l'œil. Nous y sommes habitués ! En un sens, je peux le comprendre, car il faut faire preuve de responsabilité budgétaire pour assurer l'équilibre de nos finances publiques. Mais la gestion comptable, qui tient plutôt de l'artifice dilatoire, est dérisoire au regard du véritable enjeu : le soutien à toute la filière, et surtout la survie de toutes les musiques.
Le CNM a montré ce qu'il savait faire pendant la crise sanitaire pour assurer le sauvetage du spectacle vivant. Il doit pouvoir continuer à agir pour la musique dans nos territoires.
Nous avons besoin d'un soutien franc et massif. Entre ce que l'on nous annonce et ce que l'on voit sur le terrain, il y a parfois un véritable gouffre. Pour moi, le juge ultime est le maintien de tous nos festivals et du spectacle vivant qui animent nos territoires.
Toute question relative au CNM doit être jaugée au regard de la création et de la culture dans nos territoires.
N'abandonnons pas nos territoires et rappelons la véritable signification de la réorganisation du CNM. Dans le cas contraire, nous appliquerions un énième cautère sur une jambe de bois : la réforme serait inutile, car dépourvue de véritable sens. Or les priorités de notre action doivent être rappelées.
Madame la ministre, j'attends de votre part des réponses, et je ne doute pas que vous me les donnerez. (Mme la ministre sourit.)
Les élus du groupe Les Républicains voteront les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Gérard Paumier. Madame la ministre, vous avez dit : « Je sais ce que je dois au livre. »
Le livre, évidemment, c'est l'outil de l'ouverture à l'autre, celui qui nous permet d'accéder à l'humanité, à la citoyenneté, au respect de l'autre, et de nous ouvrir au monde. Je souscris donc pleinement à votre propos, surtout à l'heure où le rapport des Français à la lecture ne cesse de se dégrader.
Le livre et la lecture représentent la première politique culturelle du bloc communal et intercommunal, avec 16 000 bibliothèques et 60 000 bénévoles.
Dans son enquête intitulée Les Français et la lecture en 2025, le Centre national du livre fait état d'une baisse historique de la lecture en France : cette pratique culturelle est à son plus bas niveau depuis dix ans. Pis encore, 30 % des 16-19 ans déclarent ne pas lire et ne pas vouloir lire. À l'heure où le développement de l'intelligence artificielle bouleverse les métiers de l'édition, cette situation ne peut que nous interpeller.
Les réseaux sociaux, très prisés des jeunes générations, dévorent leur temps libre. Ils empiètent sur la pratique de la lecture et du sport, d'où le concept, développé aux États-Unis, d'obésité mentale et physique.
Les moins de 25 ans passent en moyenne vingt-cinq heures par semaine devant les écrans. Les États généraux de la lecture pour la jeunesse, que vous avez lancés, ont confirmé ce phénomène grâce aux 36 000 contributions recueillies, dont 6 000 émanaient de jeunes.
Leurs conclusions, dont vous avez fait état au Salon du livre et de la presse jeunesse, à Montreuil, font écho aux résultats du baromètre du CNL : entre 7 et 19 ans, les jeunes passent en moyenne dix fois plus de temps devant un écran que devant un livre. Cette étude rappelle aussi que l'accès à la lecture reste fortement marqué par les inégalités géographiques, culturelles et sociales.
Pour combattre cet état de fait, vous menez une action, que je tiens à saluer, en faveur du livre et de la lecture, au travers de votre plan culture et ruralité. Ainsi, trente-huit des cinquante-six départements ruraux de notre pays sont couverts par des contrats départementaux lecture (CDL), déployés par les directions régionales des affaires culturelles (Drac) et les départements, pour renforcer l'action des bibliothèques départementales.
Les communes et les intercommunalités font un effort particulier, avec des bibliothèques et des médiathèques en réseau dans tous les territoires et plus de 10 000 boîtes à livres installées un peu partout, contre 2 000 en 2017.
Pour contrer l'omniprésence des réseaux sociaux, notamment chez les jeunes, nous pourrions peut-être réfléchir à une évolution du cadre juridique, comme viennent de le faire l'Australie et la Suède. La technique suivra la loi si la loi est claire.
Madame la ministre, il y a toutefois quelques ombres au tableau, que je tiens à relever.
Ainsi, le fonds de roulement du Centre national du livre baisse de 4,3 millions d'euros, même si ses dépenses d'intervention en faveur des territoires ont été préservées.
Cette ponction pour 2026 peut se comprendre, car le Centre doit concourir à l'effort de redressement qui est demandé à tous ; mais elle ne saurait devenir une habitude. Sinon, l'on risque de déséquilibrer durablement le CNL, ainsi que les politiques contractuelles de l'État avec les collectivités territoriales visant à promouvoir la lecture.
Je n'oublie pas non plus la situation préoccupante de la BNF, dont le site de Tolbiac exige des travaux urgents.
J'évoquerai, enfin, la ponction annoncée sur le FSER : sur ce point, vous vous êtes montrée rassurante lors de votre audition en commission. Vous savez combien ces radios associatives sont précieuses pour nos territoires.
Si j'ai tenu à insister sur la nécessité d'apporter une réponse à l'effondrement de la lecture, c'est parce qu'il faut que nous mobilisions l'ensemble des outils à notre disposition. Il y va de la santé de nos enfants, de nos industries culturelles et de la langue française, tant la lecture contribue au développement de l'orthographe, du vocabulaire et de l'esprit critique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre de la culture. Monsieur le président, monsieur le président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, nous le savons tous, l'examen du projet de loi de finances pour 2026 s'inscrit dans un contexte budgétaire extrêmement contraint.
Le redressement de nos comptes publics est un impératif, que le Gouvernement, en toute responsabilité, s'est engagé à faire respecter. Le ministère de la culture contribue légitimement, et à sa juste mesure, à l'effort demandé à tous.
Ainsi, les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » diminuent d'environ 4 % par rapport à 2025. Je tiens toutefois à l'affirmer clairement : le Gouvernement est pleinement conscient du contexte particulièrement adverse auquel font face les acteurs de la culture.
Je pense singulièrement aux médias et à la presse : ils sont soumis à un marché publicitaire de plus en plus difficile, subissent la concurrence des grandes plateformes, comme Mme Joseph l'a rappelé, et ne parviennent pas toujours à assurer une juste rémunération de leurs contenus, comparé à ces nouveaux acteurs.
Les industries culturelles, dont la contribution à la création de valeur et au rayonnement de la France n'est plus à démontrer, doivent être préservées.
Mon action et celle du Gouvernement tout entier tiennent pleinement compte de ces enjeux. La philosophie de ce projet de budget est de répondre à la contrainte du redressement des comptes tout en préservant les priorités, par un accompagnement des secteurs culturels.
J'en veux pour preuve, tout d'abord, le programme consacré à la presse.
Dans un paysage médiatique bouleversé, nos médias traditionnels, sous toutes leurs formes, représentent plus que jamais des acteurs clefs de notre vie démocratique. L'enjeu, c'est que chacun puisse disposer d'une information pluraliste, fiable et de qualité. En outre, il convient d'assurer la qualité du débat public.
Pour préserver durablement cet élément indispensable de notre pacte démocratique, j'indique, en réponse à M. Karoutchi et à Mme Robert, que je présenterai très prochainement le texte issu des États généraux de l'information.
Ce projet de loi devra garantir les conditions de production par nos médias d'une information de qualité, fiable et indépendante, et relever l'enjeu économique dans un contexte qui – je le disais – est de plus en plus adverse.
Ces difficultés affectent particulièrement les éditeurs de presse. Les aides au pluralisme seront maintenues à hauteur de 23,2 millions d'euros. Quant à l'aide à la distribution, en baisse l'an dernier, elle augmentera de 4,5 millions d'euros. Nous pourrons ainsi accompagner la modernisation des réseaux de distribution et mettre en œuvre une réforme de l'aide visant à mieux tenir compte d'une logique industrielle.
Préserver notre presse imprimée suppose d'ajuster un outil industriel qui, en l'état actuel des ventes, est devenu trop coûteux. Le Gouvernement a ainsi déposé un amendement visant à aider les éditeurs à restructurer l'impression en accompagnant les salariés des imprimeries. Il propose de financer ce dispositif à hauteur de 5 millions d'euros pour 2026.
Monsieur le rapporteur spécial, je sais l'émoi légitime suscité par la baisse prévue de 50 % des crédits du FSER.
Les radios associatives, nous le savons tous, jouent un rôle essentiel pour le pluralisme et la communication de proximité. Je m'étais engagée devant vous à poursuivre les discussions sur ce sujet et, grâce à votre contribution à ce débat, il me semble que nous pouvons trouver aujourd'hui des solutions positives.
J'en viens au programme 334, « Livre et industries culturelles ». Dans un contexte où les réseaux sociaux prennent une place de plus en plus grande chez les jeunes – je l'évoquais précédemment –, les politiques publiques du livre et de la lecture sont une nécessité absolue.
Ce programme est doté de 343 millions d'euros. La baisse des crédits, limitée à 2 %, ne remet absolument pas en cause les grands projets évoqués par Mme Darcos : la construction du pôle de conservation de la BNF à Amiens, le relogement de la BPI durant la fermeture du centre Pompidou, ou encore la création de la maison du dessin de presse, dont les travaux viennent de s'ouvrir et se poursuivront en 2026.
Ce projet de budget ne remet pas non plus en cause notre engagement en faveur du livre et de la lecture, monsieur le sénateur Paumier. J'ai lancé, en lien avec le ministre de l'éducation nationale – vous étiez d'ailleurs présent –, les États généraux de la lecture pour la jeunesse afin d'enrayer la baisse continue du temps passé à lire.
Ces États généraux ont constitué la plus grande consultation jamais dédiée à la lecture des jeunes. Ils ont mobilisé plus de 36 000 participants partout en France, dans l'Hexagone comme dans les outre-mer, parmi lesquels plus de 6 000 jeunes.
Leurs conclusions, présentées le 1er décembre dernier, s'articulent en trois axes d'action collective : renouer avec le plaisir de lire ; faire de la lecture et des textes une présence continue dans la vie des jeunes ; faciliter et systématiser les coopérations entre les professionnels de la jeunesse. L'objectif est de réduire le temps d'écran. La sénatrice Agnès Evren entend faire de même avec sa proposition de loi.
Mme Agnès Evren. Merci de le rappeler !
Mme Rachida Dati, ministre. D'ici à la fin de l'année 2025, des contrats auront été conclus avec quatre-vingt-trois départements pour développer la lecture et enrichir les collections de nos bibliothèques rurales. Je m'y étais personnellement engagée.
En 2026, nous poursuivrons ce travail afin que tous les territoires soient couverts par un contrat départemental lecture.
J'avais également pris un engagement en faveur de l'élargissement des horaires des bibliothèques. Cette année, plus de 250 projets d'extension des heures d'ouverture ont été soutenus avec, en moyenne, neuf heures trente d'ouverture supplémentaire par semaine, ce qui a d'ailleurs augmenté de plus de 30 % la fréquentation des lieux considérés.
La politique que nous menons sur ce volet a permis d'atteindre le chiffre de près de 7 millions d'inscrits dans nos bibliothèques, ce qui constitue un record.
Plusieurs orateurs ont évoqué le Centre national de la musique, sur des tonalités sensiblement différentes. À ce titre, les plafonds des taxes affectées seront relevés de 8 millions d'euros en 2026, avec 58 millions d'euros pour la billetterie et 21 millions d'euros pour le streaming, afin que la fiscalité du secteur revienne pleinement à ceux qui la créent et compense la baisse des crédits. C'est aussi un engagement que j'avais pris devant le secteur, et il est tenu.
L'audiovisuel public est appelé à participer à l'effort collectif. De manière légitime, ce projet de budget traduit une baisse de ses financements de 71 millions d'euros : 65,3 millions d'euros pour France Télévisions, 4,1 millions d'euros pour Radio France et 1,5 million d'euros pour l'INA.
Pour ce qui est de France Médias Monde, monsieur le sénateur Karoutchi, le Quai d'Orsay apportera une contribution supplémentaire de 10 millions d'euros en 2026. (M. Roger Karoutchi le confirme.) Pour les années suivantes, nous pouvons anticiper, comme vous le suggérez, en prévoyant des modes de financement nouveaux face aux enjeux de lutte informationnelle ; les synergies entre Deutsche Welle et France Médias Monde y contribueront fortement.
J'ai également soutenu à l'échelle européenne l'initiative française d'européaniser Arte, qui deviendra Arte+. J'ai convaincu l'ensemble de mes homologues européens de l'importance de ce projet, qui a été inscrit à l'ordre du jour du Conseil européen.
Les choses sont plutôt bien parties. Cette évolution permettra de lutter contre les plateformes américaines, qui menacent l'exception culturelle française et, plus largement, européenne.
Les crédits de France Télévisions baisseront de 2,6 % en 2026 par rapport à 2025. Si nous demandons cet effort, c'est parce que tout démontre que cette société fait face à des charges devenues trop rigides au fil du temps. Il est bel et bien nécessaire de mener des réformes structurelles et d'organisation. Dans son dernier rapport, la Cour des comptes évoque elle-même des « réformes ajournées ».
Madame la sénatrice Robert, à vous entendre, je ne fais pas preuve d'assez de volontarisme politique et d'engagement.
Mme Sylvie Robert. Je n'ai jamais dit cela !
Mme Rachida Dati, ministre. Où en serions-nous si tel était le cas ! Aujourd'hui, France Télévisions réduit ses soutiens à la création audiovisuelle, car, malheureusement, la société n'a pas d'autres marges de manœuvre ; du moins n'en a-t-elle pas suffisamment.
L'ensemble des rapports parlementaires, rédigés par des auteurs de toutes les tendances politiques, soulignent que les réformes indispensables ont été trop longtemps ajournées.
M. Max Brisson. Exact !
Mme Sylvie Robert. Vous ne m'avez pas écoutée !
Mme Rachida Dati, ministre. Si ! Mais à force de promouvoir l'immobilisme (Protestations sur les travées du groupe SER.), c'est vous qui affaiblissez l'audiovisuel public. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Laurent Lafon applaudit également.)
M. Max Brisson. Absolument !
Mme Rachida Dati, ministre. Plus l'organisation de la société sera rénovée, plus il y aura des marges de manœuvre pour financer la production audiovisuelle. Il est dommage que vous n'ayez pas fait ce constat avant.
M. Max Brisson. Très bien !
Mme Rachida Dati, ministre. Je précise que je parle d'une époque où je n'étais pas ministre de la culture.
La réforme de France Télévisions est indispensable…
Mme Sylvie Robert. Cela fait des années qu'on le dit !
Mme Rachida Dati, ministre. Elle a été trop longtemps repoussée, ce qui a affaibli la société au fil du temps et, j'y insiste, réduit ses marges de manœuvre.
Étant donné la situation actuelle de la société, alourdir les économies demandées compliquerait évidemment l'équation. Faute de parvenir à ajuster ses charges de structure, France Télévisions prévoit déjà des économies importantes sur les programmes. Or l'investissement dans les programmes est aussi une contribution à notre exception culturelle et à la diversité de notre création.
À présent, prenons un peu de hauteur. Nous devons donner un cap, une vision et une plus grande efficacité à notre audiovisuel public – c'est le premier enjeu –, en menant les réformes d'organisation qui s'imposent. C'est tout le sens du volontarisme dont nous faisons preuve aujourd'hui.
Monsieur le sénateur Cédric Vial, vous avez eu raison de le rappeler : c'est sur votre initiative que le financement de l'audiovisuel public a pu être sanctuarisé,…
M. Laurent Lafon. Absolument !
Mme Rachida Dati, ministre. … sans impact de régulation ni ajustement au fil du temps. L'audiovisuel public peut vous en savoir gré.
Monsieur le président Lafon, j'insiste également sur la grande ambition que traduit votre proposition de loi, laquelle doit faire l'objet d'une dernière lecture à l'Assemblée nationale. Cette réforme est indispensable…
M. Laurent Lafon. Exactement !
Mme Rachida Dati, ministre. … pour renforcer pleinement notre audiovisuel public et lui permettre de se projeter pour faire face aux enjeux des années à venir.
Les salariés de ces sociétés ont fait le choix du service public. Il faut leur redonner du sens et de la visibilité, quant à l'avenir de notre audiovisuel public. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – MM. François Patriat et Daniel Chasseing applaudissent également.)
médias, livre et industries culturelles
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Médias, livre et industries culturelles |
707 730 023 |
690 182 793 |
Presse et médias |
347 729 711 |
346 746 799 |
Livre et industries culturelles |
360 000 312 |
343 435 994 |
M. le président. L'amendement n° II-2148, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
SOLDE |
+ 5 000 000 |
+ 5 000 000 |
||
La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. Avec cet amendement, nous entendons pérenniser la distribution de la presse imprimée, dont les volumes reculent de 10 % par an.
Le contexte imposant une véritable mutation des outils industriels, il importe d'adopter le dispositif que nous proposons : il financera, à hauteur de 5 millions d'euros pour 2026, un soutien spécifique aux salariés de plus de 59 ans des imprimeries de presse quotidienne, dans le cadre de plans de sauvegarde de l'emploi ou de ruptures conventionnelles collectives. Au total, 15 millions d'euros seront mobilisés sur trois ans.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Cet amendement tend à tirer les conséquences de l'amendement n° II-2149, visant à créer un congé spécial pour les salariés de plus de 59 ans concernés par le plan de transformation des imprimeries de presse quotidienne.
Lesdits salariés doivent bénéficier d'une allocation mensuelle versée par l'employeur, et prise en charge par l'État, égale à un pourcentage de sa rémunération. Ce pourcentage est fixé par décret et la durée de prise en charge peut s'étendre jusqu'à trente-six mois.
Plusieurs critiques peuvent être émises à l'encontre de ce dispositif.
Tout d'abord, même si l'existence d'un amendement de crédits justifie cette discussion, nous parlons pour l'essentiel du plan de transformation des entreprises de presse. Une telle mesure ne relève donc pas fondamentalement du projet de loi de finances.
Ensuite, le dispositif semble très généreux, la prise en charge d'un congé pouvant aller jusqu'à trente-six mois paraissant dérogatoire par rapport aux autres secteurs.
Enfin, j'émets des doutes quant à la solidité juridique de cet amendement. Je pense notamment au renvoi à un décret pour la fixation du pourcentage de rémunération versé par l'État.
En résumé, cet amendement devrait être déposé sur un texte non financier, et dans une rédaction plus précise. Je demande donc son retrait ; à défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2148.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos II-658 et II-664 ne sont pas soutenus.
L'amendement n° II-2043, présenté par M. Bacchi, Mme Corbière Naminzo, M. Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Réforme des aides à la presse
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
Livre et industries culturelles |
|
|
|
|
Réforme des aides à la presse |
100 000 000 |
|
100 000 000 |
|
TOTAL |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Avec cet amendement, nous voulons ouvrir un chantier devenu indispensable.
Les aides à la presse doivent être réformées en profondeur, car elles ne permettent plus de garantir le pluralisme, ce qui est pourtant leur raison d'être. Pour une grande partie, elles subventionnent des titres appartenant aux plus grands groupes, lesquels dominent déjà le paysage médiatique.
Ce système contrevient fondamentalement à l'objectif du programme 180, à savoir soutenir la diversité de l'information.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous cherchez avant tout à nous interpeller face à la concentration des médias, mais ce n'est pas l'objet d'un amendement de crédits. J'émets donc un avis défavorable, d'autant que l'adoption de telles dispositions conduirait à un quasi-doublement des aides à la presse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2043.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2044, présenté par M. Bacchi, Mme Corbière Naminzo, M. Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Par cet amendement, nous souhaitons rééquilibrer l'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale (PQR).
Cette aide, qui représente 27 millions d'euros, est pour ainsi dire captée par les seuls éditeurs. Elle ignore d'autres acteurs, pourtant indispensables à la diffusion réelle de la presse : les dépôts de presse et l'ensemble des structures qui assurent la livraison physique des journaux, y compris dans les zones difficiles d'accès.
Ces acteurs supportent des surcoûts croissants – hausse du prix du carburant, coûts logistiques, prix du papier et rémunération des livreurs, etc. Ils sont exclus d'une aide publique à laquelle ils donnent tout son sens. C'est grâce à eux que la presse quotidienne nationale continue d'être distribuée partout en France.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mme la ministre de la culture a confié à Sébastien Soriano le pilotage d'une concertation avec le secteur à partir du printemps 2024.
À l'issue de nombreux échanges, un projet de contrat de modernisation de la distribution de la presse a été transmis aux acteurs de la filière le 1er août 2025. Cet accord assure, de la part de l'État, un accompagnement social et à l'investissement des sociétés concernées. En conséquence, le projet de loi de finances renforce les aides à la diffusion à hauteur de 4,5 millions d'euros. Ces dernières représentent déjà 73 % des aides directes à la presse.
La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2044.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2020, présenté par Mme de Marco, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
2 700 000 |
|
2 700 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
2 700 000 |
|
2 700 000 |
TOTAL |
2 700 000 |
2 700 000 |
2 700 000 |
2 700 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Entre 2024 et 2026, les aides au pluralisme diminuent de plus de 10 %.
Cette coupe fragilise un secteur déjà soumis à de fortes déstabilisations – hausse des coûts de production, mutation des usages, concurrence des plateformes numériques ou encore érosion des recettes publicitaires et des abonnements.
Les aides au pluralisme, qui sont surtout dirigées vers les médias locaux, assurent un maillage territorial indispensable. Elles constituent un outil essentiel de garantie du droit de l'information, du pluralisme des opinions et du bon fonctionnement démocratique. Cet amendement d'urgence vise donc à rétablir les crédits des aides au pluralisme au niveau de 2024.
En outre, il est nécessaire de réformer le dispositif des aides à la presse, dans un contexte de concentration croissante des médias.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. La diminution des aides au pluralisme prévue pour 2026 porte intégralement sur l'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale.
Cette aide bénéficie aux quotidiens répondant à certaines conditions relatives au prix de vente, à la diffusion et au tirage moyen. Enfin, leurs recettes de publicité doivent représenter moins de 25 % de leurs recettes totales.
En l'occurrence, il ne s'agit pas spécialement de faire face à un manque de moyens. La problématique est davantage la fixation, par voie réglementaire, de la définition des titres qui ont droit à cette aide. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. M. le rapporteur spécial vient d'indiquer qu'il s'agissait là d'une question réglementaire ; l'enjeu n'en est pas moins de taille, puisqu'il s'agit du pluralisme.
Madame la ministre, j'attends que vous meniez enfin cette réforme des aides à la presse, dont nous parlons depuis trois, quatre ou cinq ans. Le dossier est antérieur à votre prise de fonctions, mais il est aujourd'hui plus urgent que jamais.
Vous nous assurez que le projet de loi consécutif aux États généraux de l'information sera présenté « prochainement » : j'aimerais que vous nous précisiez ce que cette annonce signifie – c'est la troisième ou quatrième fois que je l'entends !
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Chaque année, nous débattons de ces aides, en soulignant que la presse spécialisée et de connaissance pâtit d'un trou dans la raquette… Je déplore que nous soyons obligés de le rappeler tous les ans.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. À l'instar de mes collègues, je tiens à attirer l'attention du Gouvernement sur la situation de la presse spécialisée, notamment dans le domaine de l'agriculture, qui doit être diffusée très largement. C'est une question d'aménagement du territoire.
Cette presse spécialisée doit faire face à des hausses du coût d'acheminement particulièrement pénalisantes. Il paraît utile de prendre cet élément en compte dans le cadre du redéploiement des aides.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2020.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-474 est présenté par M. Laugier, au nom de la commission de la culture.
L'amendement n° II-1203 rectifié est présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° II-2019 est présenté par Mme de Marco, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
3 300 000 |
|
3 300 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
3 300 000 |
|
3 300 000 |
TOTAL |
3 300 000 |
3 300 000 |
3 300 000 |
3 300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-474.
M. Michel Laugier, rapporteur pour avis. Cet amendement, que la commission de la culture a choisi de présenter après l'avoir voté à l'unanimité, vise à rétablir les crédits du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) à leur niveau de 2025, ce qui implique une augmentation de 3,3 millions d'euros.
D'une part, ce fonds peut contribuer à la transition numérique des titres de presse. C'est là un impératif pour la survie de plusieurs d'entre eux, en particulier dans la presse quotidienne régionale.
D'autre part, il constitue l'un des seuls instruments à même de soutenir les acteurs qui s'engageront dans les transformations structurelles suggérées par l'inspection générale des affaires culturelles (Igac) et l'inspection générale des finances (IGF) dans leur rapport de 2023 et inscrites dans le contrat proposé par Sébastien Soriano à l'issue de sa mission de concertation, menée en 2024.
Notre amendement est gagé sur les crédits du programme 334, « Livre et industries culturelles », que nous n'avons bien sûr pas l'intention d'amputer. Je demande donc au Gouvernement la levée du gage.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l'amendement n° II-1203 rectifié.
Mme Sylvie Robert. Notre amendement est défendu, monsieur le président. Je tiens simplement à remercier M. le rapporteur pour avis de défendre lui aussi cette mesure.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour présenter l'amendement n° II-2019.
Mme Monique de Marco. Je tiens moi aussi à remercier Michel Laugier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Le montant prévu pour le FSDP, destiné à accompagner les investissements du secteur dans sa transition économique, numérique et écologique, est divisé par deux entre la loi de finances initiale pour 2025 et le projet de loi de finances pour 2026.
Une partie de ces crédits ayant été gelés en 2025, le fonds est suspendu depuis juin dernier. Il est dommage que les économies se fassent par le biais d'un instrument de modernisation, alors que les dispositifs moins incitatifs sont reconduits sans modification.
Sur ces trois amendements identiques, je m'en remets, partant, à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Je fais miens les arguments de M. le rapporteur spécial, mais je vais un peu plus loin que lui en émettant un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-474, II-1203 rectifié et II-2019.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L'amendement n° II-2006, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Malgré l'augmentation de 4,2 millions d'euros des crédits dédiés à l'AFP, en conformité avec la trajectoire prévue par le contrat d'objectifs et de moyens, plusieurs syndicats nous ont alertés quant à la situation financière particulièrement dégradée de l'Agence.
Tout d'abord, l'arrivée de Donald Trump au pouvoir a entraîné la rupture brutale des contrats entre l'AFP et l'administration américaine, d'une part, et l'US Agency for Global Media, d'autre part.
Ensuite, le démantèlement de l'Agence des États-Unis pour le développement international a eu un impact sur les médias indépendants clients de l'AFP, auparavant financés par l'aide étrangère américaine et depuis lors contraints de se désabonner.
Enfin, l'arrêt des procédures de vérification de l'information par Meta en Amérique du Nord a entraîné la fin de ses relations contractuelles avec l'AFP dans cette zone.
Ce contexte est lourd de conséquences pour le personnel de l'AFP : le Parlement doit, dès lors, accepter un réajustement du soutien public à cette agence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Le projet de loi de finances augmente déjà de 4,2 millions d'euros les crédits dédiés à l'AFP par rapport à 2025, conformément à la trajectoire fixée par le contrat d'objectifs et de moyens de l'Agence.
Ce COM prend pour base une augmentation des crédits de 7,3 millions d'euros sur la période 2024-2028.
Plus largement, l'AFP fait face à des défis structurels que 5 millions d'euros ne pourront régler. Si le développement de l'intelligence artificielle met en difficulté l'ensemble du secteur de la presse écrite, il touche encore davantage l'Agence.
Pour ces raisons, je demande le retrait de l'amendement n° II-2006. À défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. J'abonde dans le sens de M. le rapporteur spécial.
Le budget de l'AFP augmente déjà de plus de 4 millions d'euros : c'est une réalité. Nous nous sommes également conformés au contrat d'objectifs et de moyens 2024-2028. L'État respecte donc entièrement ses engagements. Au demeurant, l'AFP prévoit un budget à l'équilibre.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2006.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-662 n'est pas soutenu.
Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les six premiers sont identiques.
L'amendement n° II-53 rectifié bis est présenté par Mme Borchio Fontimp, M. C. Vial, Mme Demas, MM. H. Leroy et Brisson, Mmes Schalck, Ventalon et Aeschlimann, MM. Michallet, Belin, Genet, Sido et Mouiller, Mme V. Boyer, MM. Bonhomme, Reynaud et Favreau, Mmes Gosselin, Bellurot et Drexler, MM. Paumier et D. Laurent, Mmes Dumont et Imbert et MM. Gremillet, Paul, Bruyen, Anglars, Pointereau, Klinger, Panunzi et Delia.
L'amendement n° II-146 rectifié bis est présenté par M. Dhersin, Mmes Saint-Pé et Patru, M. Pillefer, Mme Housseau, MM. P. Martin, J.M. Arnaud et Levi, Mme Romagny, M. L. Hervé, Mme Bourguignon, M. Haye, Mme Jacquemet et M. Houpert.
L'amendement n° II-295 rectifié quater est présenté par MM. Chevalier, V. Louault, Grand, Pellevat, Laménie, Chasseing et Brault, Mme Lermytte, M. A. Marc et Mme Sollogoub.
L'amendement n° II-484 rectifié est présenté par Mme Havet, M. Lemoyne, Mme Nadille, MM. Buis et Rambaud, Mmes Cazebonne et Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Iacovelli et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L'amendement n° II-2005 rectifié est présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
L'amendement n° II-2045 est présenté par M. Bacchi, Mme Corbière Naminzo, M. Ouzoulias et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
18 000 000 |
|
18 000 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
18 000 000 |
|
18 000 000 |
TOTAL |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
18 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Cédric Vial, pour présenter l'amendement n° II-53 rectifié bis.
M. Cédric Vial. Cet amendement, déposé avec ma collègue Alexandra Borchio Fontimp et de nombreux élus du groupe Les Républicains, tend à rétablir les crédits du fonds soutien à l'expression radiophonique locale à leur niveau de 2024.
Le FSER accompagne 770 radios associatives locales, lesquelles représentent près de 2 400 emplois et des milliers de bénévoles.
Que ce soit en ville, en campagne ou encore outre-mer, ces antennes œuvrent pour l'intérêt général. Elles concourent à l'éducation des jeunes tout en créant du lien social. Leur action s'inscrit souvent dans un projet de territoire, au-delà du rôle d'information qu'elles jouent souvent localement.
Après avoir discuté avec un grand nombre de mes collègues, notamment avec les membres de la commission de la culture et M. Laugier, son rapporteur pour avis, nous souhaiterions rendre cet amendement identique à l'amendement n° II-1428 : le montant sollicité serait ainsi réduit de 18 millions à 15,7 millions d'euros.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Patru, pour présenter l'amendement n° II-146 rectifié bis.
Mme Anne-Sophie Patru. Défendu !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l'amendement n° II-295 rectifié quater.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement est également défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Mikaele Kulimoetoke, pour présenter l'amendement n° II-484 rectifié.
M. Mikaele Kulimoetoke. Cet amendement vise à rétablir les crédits du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale à leur niveau de 2024, soit 38 millions d'euros, afin de préserver les 770 radios associatives françaises, essentielles à la cohésion territoriale et sociale en outre-mer comme dans l'Hexagone.
Ces médias non lucratifs, présents dans tous les territoires urbains, ruraux et ultramarins, exercent une mission d'intérêt général. Dans les zones isolées, ils assurent l'information et l'éducation, affirment les liens sociaux et la citoyenneté.
La baisse de 44 % des crédits prévue en 2026 menacerait leur survie, mettant en péril plus de la moitié des radios et 2 400 emplois directs, ainsi que le travail de milliers de bénévoles.
L'augmentation des crédits qui leur sont alloués est, en conséquence, indispensable pour soutenir la diversité d'expression, préserver l'emploi local et aider les radios associatives à remplir leur mission d'intérêt général.
Le Sénat avait adopté des amendements similaires déposés par plusieurs groupes en janvier 2025.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour présenter l'amendement n° II-2005 rectifié.
Mme Monique de Marco. Je souhaite rectifier cet amendement pour proposer 15,7 millions d'euros de crédits supplémentaires pour le FSER, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi, pour présenter l'amendement n° II-2045.
M. Jérémy Bacchi. Je souhaite moi aussi rectifier mon amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-1202 rectifié, présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane, Bourgi, Fichet, Marie, Montaugé, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Canalès, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
16 500 000 |
|
16 500 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
16 500 000 |
|
16 500 000 |
TOTAL |
16 500 000 |
16 500 000 |
16 500 000 |
16 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Je souhaite également rectifier cet amendement pour le rendre identique à l'amendement n° II-1428 de la commission de la culture. Madame la ministre, nous vous demandons bien sûr de lever le gage !
M. le président. L'amendement n° II-2018 rectifié bis, présenté par M. Delcros, Mmes Vermeillet, Vérien, Jacquemet et Patru et MM. Buis, Chevalier et Chasseing, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
16 000 000 |
16 000 000 |
||
Livre et industries culturelles |
16 000 000 |
16 000 000 |
||
TOTAL |
16 000 000 |
16 000 000 |
16 000 000 |
16 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Anne-Sophie Patru.
Mme Anne-Sophie Patru. Monsieur le président, nous souhaitons également rectifier cet amendement et proposer une somme de 15,7 millions d'euros supplémentaires pour le FSER.
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-103 rectifié quater est présenté par Mme Billon, M. Levi, Mmes Saint-Pé et Gacquerre, M. J.M. Arnaud, Mme Perrot, MM. Dhersin et Pillefer, Mmes Sollogoub et Housseau, M. Duffourg, Mme Romagny, MM. Bonneau et Bleunven, Mme Morin-Desailly, M. Menonville, Mme Bourguignon, M. Haye et Mme de La Provôté.
L'amendement n° II-897 est présenté par M. Lahellec et Mme Le Houerou.
L'amendement n° II-1065 rectifié est présenté par Mme Devésa, MM. Capo-Canellas, Henno, Le Rudulier et Longeot et Mme Patru.
L'amendement n° II-1428 est présenté par M. Laugier, au nom de la commission de la culture.
L'amendement n° II-1691 rectifié bis est présenté par Mme M. Carrère, MM. Grosvalet et Laouedj, Mme N. Delattre, MM. Gold, Bilhac et Masset, Mme Pantel, M. Roux, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve et MM. Daubet, Cabanel et Fialaire.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
15 700 000 |
|
15 700 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
15 700 000 |
|
15 700 000 |
TOTAL |
15 700 000 |
15 700 000 |
15 700 000 |
15 700 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l'amendement n° II-103 rectifié quater.
Mme Annick Billon. Nul besoin de rectifier notre amendement, monsieur le président : nous proposons déjà d'attribuer la somme de 15,7 millions d'euros au fonds de soutien à l'expression radiophonique locale.
La baisse de 45 % prévue par le Gouvernement mettrait en péril plus de la moitié des radios et près de 80 % des emplois. Elle menacerait également les bénévoles.
Pour RCF Vendée, une telle baisse représenterait la suppression d'un équivalent temps plein travaillé (ETPT), soit un quart des effectifs. Neptune FM, radio de l'île d'Yeu, devrait tout simplement fermer.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° II-897.
Mme Annie Le Houerou. Non seulement le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale est une source d'emplois locaux garantissant la variété de l'offre médiatique et culturelle, mais les radios locales font la vitalité de nos langues régionales.
Une telle baisse de crédits menacerait celles et ceux qui soutiennent l'information de proximité et des programmes qui, par leur qualité, protègent cette richesse culturelle que sont les langues régionales.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Patru, pour présenter l'amendement n° II-1065 rectifié.
Mme Anne-Sophie Patru. Cet amendement a été déposé par ma collègue Brigitte Devésa. Je le considère comme défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l'amendement n° II-1691 rectifié bis.
Mme Maryse Carrère. Dans les Hautes-Pyrénées, les radios locales sont profondément ancrées dans la vie sociale, culturelle et démocratique. Elles assurent une information indépendante et donnent la parole aux acteurs associatifs, économiques et culturels du territoire. Elles constituent le seul média de communication quotidienne disponible pour de nombreuses communes rurales et de montagne.
La baisse de crédits voulue par le Gouvernement compromettrait non seulement la survie de ces stations, mais aussi la diversité et le pluralisme médiatique dans les territoires.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-1428.
M. Michel Laugier, rapporteur pour avis. Cet amendement, voté à l'unanimité par la commission de la culture, vise à rétablir les crédits du FSER à leur niveau de 2025, soit à 35,3 millions d'euros.
À cette fin, nous proposons le transfert de 15,7 millions d'euros du programme « Livre et industries culturelles » vers le programme « Presse et médias ». Madame la ministre, nous n'entendons pour autant pas minorer les crédits du premier : nous vous demandons de bien vouloir lever le gage.
M. le président. L'amendement n° II-127 rectifié ter, présenté par MM. Lefèvre, Cambon, H. Leroy, Khalifé, Séné et J.M. Arnaud, Mmes Lassarade et Malet, MM. Milon et de Nicolaÿ, Mme Gruny, MM. Naturel et Levi, Mme Petrus, MM. Hingray et Delia et Mme Bellurot, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
11 000 000 |
|
11 000 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
11 000 000 |
|
11 000 000 |
TOTAL |
11 000 000 |
11 000 000 |
11 000 000 |
11 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. Défendu !
M. le président. L'amendement n° II-2073, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
2 300 000 |
|
2 300 000 |
|
Livre et industries culturelles |
|
2 300 000 |
|
2 300 000 |
TOTAL |
2 300 000 |
2 300 000 |
2 300 000 |
2 300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Cet amendement vise à garantir le financement de la part complémentaire du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale destinée aux radios situées en zone rurale ou dans les territoires ultramarins.
Cette part, censée être sanctuarisée par le plan Culture et ruralité du ministère de la culture, est directement menacée par la coupe massive proposée par le Gouvernement. Elle cible plus particulièrement les radios situées dans une commune classée en zone France Ruralités Revitalisation (FRR) ou en zone de revitalisation rurale (ZRR), ainsi que les radios situées en outre-mer.
Les radios associatives sont des acteurs essentiels de l'économie sociale et solidaire (ESS). Elles emploient 2 850 salariés en France, dont 270 journalistes professionnels. A minima, il est nécessaire de rétablir la dotation spécifique de 2,3 millions d'euros destinée aux radios locales et ultramarines.
M. le président. Madame Patru, monsieur Kulimoetoke, monsieur Chasseing, souhaitez-vous également rectifier vos amendements pour les rendre identiques à celui de la commission de la culture ? (Assentiment.)
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le président, je souhaite, de même, rendre l'amendement n° II-127 rectifié ter identique à l'amendement de la commission de la culture !
M. le président. Mes chers collègues, compte tenu des rectifications opérées par plusieurs d'entre vous, je suis donc saisi des amendements nos II-53 rectifié ter, II-146 rectifié ter, II-295 rectifié quinquies, II-484 rectifié bis, II-2005 rectifié bis, II-2045 rectifié, II-1202 rectifié bis, II-2018 rectifié ter et II-127 rectifié quater, dont le libellé est strictement identique à celui de l'amendement n° II-1428.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques et sur l'amendement n° II-2073 ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Dans une assemblée parlementaire, les temps de concorde sont assez rares pour que nous sachions les savourer.
Tous, nous défendons le FSER, à ceci près que les montants initialement proposés variaient, formant une sorte de catalogue de prix. (Sourires.)
Je me réjouis de cet accord visant à rétablir une dotation égale à celle que le Sénat avait acquise de haute lutte lors de l'examen du budget pour 2025. La commission émet donc un avis favorable sur l'ensemble des amendements identiques ; et, pour l'amendement n° II-2073, elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° II-2073.
En revanche, il émet un avis favorable sur les quatorze amendements identiques. J'ai obtenu l'accord de M. le Premier ministre, lui aussi convaincu de préserver le soutien à nos radios associatives : mesdames, messieurs les sénateurs, je lève donc le gage. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP. – Mme Monique de Marco applaudit également.)
M. Max Brisson. Très bien !
M. le président. Il s'agit donc des amendements identiques nos II-53 rectifié quater, II-146 rectifié quater, II-295 rectifié sexies, II-484 rectifié ter, II-2005 rectifié ter, II-2045 rectifié bis, II-1202 rectifié ter, II-2018 rectifié quater, II-103 rectifié quinquies, II-897 rectifié, II-1065 rectifié bis, II-1691 rectifié ter, II-1428 rectifié et II-127 rectifié quinquies.
Je les mets aux voix.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2073.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1205, présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds d'urgence aux médias locaux et de proximité
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
|
|
|
Livre et industries culturelles |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Fonds d'urgence aux médias locaux et de proximité |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Je l'indiquais à la tribune, la situation financière des médias de proximité s'est dégradée. En trois ans, elles ont perdu 10 % à 20 % de leurs recettes publicitaires, soit jusqu'à 150 millions d'euros annuels.
Cette contraction de leur budget résulte de l'éviction de la publicité vers les plateformes et d'asymétries réglementaires que nous espérons traiter lors de l'examen du futur projet de loi inspiré des États généraux de l'information – madame la ministre, excusez-moi d'y revenir.
Les médias locaux, appréciés dans l'ensemble de nos territoires, bénéficient de la confiance de nos concitoyens. Malheureusement, le soutien que leur apporte l'État est mal calibré. Il est nécessaire de mieux les accompagner, car leur modèle économique est réellement fragilisé – mes chers collègues, vous pourrez le vérifier auprès des médias de proximité dans vos territoires.
À titre d'exemple, la moitié des télévisions locales ont un résultat négatif ou proche de zéro, et plus de 55 % de la presse locale est aujourd'hui en déficit. Une radio locale sur trois se déclare en cessation de paiement. Si aucune mesure d'urgence n'est prise, nous verrons ces médias de proximité disparaître peu à peu.
Par cet amendement, nous proposons la création d'un fonds d'urgence temporaire, destiné à éviter la disparition de ces médias.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Compte tenu du contexte financier, l'heure n'est pas à la création d'un fonds d'urgence.
De nombreuses aides sont déjà spécifiquement destinées à la presse quotidienne régionale. Entre 2025 et 2026, aucune d'elles ne devrait diminuer.
Il faut en revanche réfléchir au problème, plus large, de la baisse continue du lectorat, dans le prolongement des États généraux de l'information : entre 2023 et 2024, la vente au numéro de la presse quotidienne régionale s'est effondrée de 15 %.
En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1205.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-248 rectifié bis, présenté par Mme Belrhiti, MM. H. Leroy et Kern, Mmes Muller-Bronn et Aeschlimann, M. Panunzi, Mme Lassarade et MM. Genet et Delia, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Promotion de DAB+
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
|
|
|
Livre et industries culturelles |
|
600 000 |
|
600 000 |
Promotion de DAB+ |
600 000 |
|
600 000 |
|
TOTAL |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi.
M. Jean-Jacques Panunzi. Défendu !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Si le DAB+ présente de nombreux avantages, l'objet d'un amendement de crédits n'est pas de financer une association de promotion. En raison de ce problème de méthode, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Défavorable.
M. Jean-Jacques Panunzi. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° II-248 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° II-1766 rectifié est présenté par M. Gold, Mmes Jouve et Pantel, MM. Roux et Laouedj, Mmes Guillotin, Briante Guillemont et M. Carrère et MM. Daubet et Fialaire.
L'amendement n° II-2007 est présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
7 000 000 |
|
7 000 000 |
Livre et industries culturelles |
7 000 000 |
|
7 000 000 |
|
TOTAL |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l'amendement n° II-1766 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Par cet amendement, M. Gold propose de rétablir la dotation du CNM, afin que cet organisme puisse continuer de remplir ses missions.
Pour que cet amendement soit conforme aux règles de recevabilité budgétaire, nous prévoyons une réallocation des crédits entre les différents programmes de la mission.
M. le président. La parole est à Mme Monique de Marco, pour présenter l'amendement n° II-2007.
Mme Monique de Marco. Alors que le Centre national de la musique assure un suivi précis et indispensable des acteurs de la filière, elle-même confrontée à de difficiles transitions, le projet de loi de finances ampute sa dotation de 7 millions d'euros. En plus d'affecter directement le fonctionnement du CNM, une telle baisse fragiliserait la légitimité de cet établissement, qui a pourtant fait la preuve de son efficacité.
Le Gouvernement affirme que cette coupe sera compensée par le relèvement des plafonds des deux taxes affectées à son financement. Mais cette compensation paraît insuffisante, le rendement attendu des taxes étant supérieur aux nouveaux plafonds.
Plusieurs organisations de professionnels de la musique dénoncent la brutalité de la baisse de la subvention pour charges de service public. Cet amendement vise donc à revenir sur la baisse de 7 millions d'euros de la dotation budgétaire du Centre national de la musique.
M. le président. L'amendement n° II-1204, présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
6 950 000 |
|
6 950 000 |
Livre et industries culturelles |
6 950 000 |
|
6 950 000 |
|
TOTAL |
6 950 000 |
6 950 000 |
6 950 000 |
6 950 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Mes chers collègues, les deux taxes affectées au financement du Centre national de la musique et le fonctionnement même de cette institution ne posent pas des problèmes de même nature.
Ponctionner les finances de cet opérateur de près de 7 millions d'euros reviendrait à mettre en péril ses missions fondamentales. En outre, une telle baisse des crédits créerait des tensions entre les différents acteurs de la filière, lesquelles menaceraient l'ensemble de l'écosystème musical, ce qui n'est certainement pas souhaitable.
Lorsque la Haute Assemblée a décidé de créer le CNM, nous avons demandé à l'État de remplir ses obligations et de stabiliser la subvention versée pour le fonctionnement de cette institution. Ce n'est toujours pas le cas aujourd'hui ; notre amendement vise à remédier à cette situation. (Mme Catherine Morin-Desailly acquiesce.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mes chers collègues, je vous invite à faire preuve d'un peu plus de pondération au sujet du CNM, qui, au demeurant, m'est particulièrement cher. En effet, l'État a été au rendez-vous, notamment durant la crise du covid.
Le CNM n'est pas oublié : il se voit attribuer deux taxes affectées très dynamiques. Ses recettes ont augmenté de 15 millions d'euros entre 2024 et 2026. De surcroît, le 3 décembre dernier, nous avons voté en faveur du relèvement du plafond de ces taxes, pour permettre au CNM d'éviter un reversement au budget de l'État.
Si l'on observe les recettes du CNM dans leur ensemble, on constate que ses ressources publiques ne diminuent pas entre 2025 et 2026.
Le Sénat avait d'ailleurs adopté la taxe sur le streaming pour garantir l'indépendance du CNM par rapport aux subventions de l'État. Ne pas accepter la baisse de la subvention en échange, ce serait vouloir le beurre et l'argent du beurre !
La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Ce budget relève bien de 5 millions d'euros le plafond de la taxe sur les spectacles de variétés, et de 3 millions d'euros celui de la taxe sur les services de vidéo à la demande. Dès lors, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Suivant tout particulièrement le secteur des musiques de patrimoine et de création, je suis bien placée pour le savoir : le CNM accompagne le développement des musiques actuelles, mais aussi – on l'oublie souvent – celui de centaines d'ensembles indépendants et d'orchestres permanents.
Depuis l'adoption de la loi relative à la création du Centre national de la musique, le financement de cette institution n'a pas été totalement stabilisé, et une incertitude demeure en raison du plafonnement des deux taxes affectées.
Je rejoins donc Mme Robert : faisons preuve d'un minimum de prudence, en attendant de voir comment ces taxes évoluent. Mes chers collègues, nous vous alertons sur la fragilité du secteur des musiques de patrimoine et de création.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1766 rectifié et II-2007.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1204.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1690, présenté par Mmes Daniel, S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, MM. Chantrel et Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane, Bourgi, Fichet, Marie, Montaugé, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Canalès, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
1 600 000 |
|
1 600 000 |
Livre et industries culturelles |
1 600 000 |
|
1 600 000 |
|
TOTAL |
1 600 000 |
1 600 000 |
1 600 000 |
1 600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Karine Daniel.
Mme Karine Daniel. Cet amendement vise à abonder le budget du CNM à hauteur de 1,6 million d'euros.
L'année dernière, le Président de la République a décidé d'organiser la France Music Week ; cet événement a coûté environ 7 millions d'euros, dont 4,6 millions d'euros apportés par le CNM.
Alors que l'État s'était engagé à rembourser le CNM de sa contribution, le remboursement ne s'est élevé qu'à 3 millions d'euros.
Nous proposons de compenser cette opération pour le CNM. L'État doit respecter ses engagements quand il commande des opérations telles que la France Music Week. Nous connaissons les contraintes budgétaires actuelles, mais il nous semble important de réparer symboliquement cette injustice.
Madame la ministre, cet amendement nous fournit aussi l'occasion de vous demander si cette opération sera reconduite en 2026.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Pour les raisons invoquées précédemment, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Cela étant, la Cour des comptes a recommandé de rationaliser les interventions du CNM. En outre, si je puis me permettre, madame la ministre, la moindre des choses serait de franciser le nom de cet événement !
Mme Catherine Morin-Desailly. Bravo !
Mme Sophie Primas. Très bien !
Mme Sonia de La Provôté. À la française !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Pour l'organisation de cet événement, le CNM a déjà obtenu, en gestion, une compensation de 3,2 millions d'euros. Les dépenses engagées à ce titre ne portent absolument pas atteinte à son modèle économique, aux aides qui lui ont été versées en 2025 ou à celles qui le seront en 2026.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Les membres du groupe d'étude Francophonie du Sénat en discutaient encore hier : de grâce, madame la ministre, que le ministère de la culture montre l'exemple ! Le français pourrait être utilisé de manière tout à fait transparente. Or il est trop souvent battu en brèche dans notre propre pays, et en premier lieu dans les ministères et les administrations.
M. le président. La parole est à Mme Karine Daniel, pour explication de vote.
Mme Karine Daniel. Monsieur le rapporteur spécial, je vous remercie de ces précisions.
Mes chers collègues, nous pouvons tout de même nous demander dans quelle mesure un opérateur peut réellement limiter ses interventions quand la commande vient du Président de la République lui-même…
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Ça, c'est une autre affaire !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1690.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-1207 rectifié bis est présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° II-1644 rectifié est présenté par Mme L. Darcos.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
7 000 000 |
|
7 000 000 |
Livre et industries culturelles |
7 000 000 |
|
7 000 000 |
|
TOTAL |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l'amendement n° II-1207 rectifié bis.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement a pour objet de revaloriser la part du droit de prêt à la charge de l'État, calculée sur la base du nombre d'usagers inscrits en bibliothèque, laquelle n'a pas évolué depuis 2003.
Le droit de prêt a été instauré pour rémunérer les auteurs et les éditeurs en contrepartie du prêt de leurs livres en bibliothèque ; il sert surtout à financer, en partie, les cotisations de retraite complémentaire des auteurs du livre. S'il n'est pas revalorisé, il est certain que la couverture sociale des auteurs sera abaissée.
Cet amendement vise ainsi à laisser au Gouvernement la latitude budgétaire nécessaire pour augmenter la part du droit de prêt à la charge de l'État. Cette revalorisation, à laquelle a souscrit le Président de la République lors du dernier Salon du livre – mes chers collègues, plusieurs d'entre nous l'ont entendu –, serait la première depuis vingt ans. Surtout, elle permettrait un rattrapage en faveur des auteurs.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour présenter l'amendement n° II-1644 rectifié.
Mme Laure Darcos. Madame la ministre, vous étiez à nos côtés lorsque le Président de la République a pris cet engagement, lors d'une table ronde sur le livre d'occasion.
Les prêts en bibliothèque étant bien plus nombreux que les ventes de livres d'occasion, il faut revaloriser le droit de prêt, conformément à l'engagement pris par le Président de la République il y a six mois.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mes chers collègues, peut-être faut-il prendre les engagements du Président de la République, sinon avec méfiance, du moins avec du recul. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Ah !
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Quand bien même cet engagement a été pris, le droit de prêt est déterminé par la loi. Pour que cet amendement de crédits soit opérant, il faudrait modifier la loi de 2003 relative à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements identiques. À défaut, l'avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. L'engagement du Président de la République portait sur la vente de livres d'occasion. (Mme Laure Darcos proteste.)
Mme Sylvie Robert. Non, il s'agissait du droit de prêt !
Mme Rachida Dati, ministre. Le syndicat national de l'édition nous a adressé ses propres propositions, en demandant par exemple d'étudier l'instauration d'un droit voisin pour le livre d'occasion. Nous avons demandé l'avis du Conseil d'État, qui nous a indiqué que, d'un point de vue juridique, ce n'était pas faisable.
Mme Sylvie Robert. Cela n'a rien à voir !
Mme Rachida Dati, ministre. Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Madame la ministre, nous ne parlons pas du même sujet. Nous voulons simplement voir revaloriser la part du droit de prêt en bibliothèque à la charge de l'État. Nous ne parlons pas du livre d'occasion.
Le droit de prêt n'a été ni revalorisé ni indexé sur l'inflation depuis vingt ans, alors que les retraites complémentaires des auteurs sont en partie calculées sur cette base.
Peut-être me suis-je mal fait comprendre, auquel cas je m'en excuse, mais je crois que le Président de la République, lui, avait très bien compris !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. En résumé, le Président de la République a très bien compris, mais pour ma part je n'ai rien compris du tout... (Sourires et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je le dis et je le répète, c'est le livre d'occasion qui a été évoqué.
Mme Sylvie Robert. Non !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1207 rectifié bis et II-1644 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° II-1206, présenté par Mmes S. Robert et Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme Matray, MM. Ros, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
4 300 000 |
|
4 300 000 |
Livre et industries culturelles |
4 300 000 |
|
4 300 000 |
|
TOTAL |
4 300 000 |
4 300 000 |
4 300 000 |
4 300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Il convient, pour mettre les actes en cohérence avec les discours, de ne pas baisser le budget du Centre national du livre (CNL).
Jean-Gérard Paumier l'a bien expliqué à la tribune, cet organisme joue un rôle très important.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. La subvention pour charges de service public (SCSP) du Centre national du livre doit passer de 26,6 millions d'euros en 2025 à 22,4 millions d'euros en 2026.
Cette diminution ne devrait pas se traduire par une limitation des dispositifs d'intervention du CNL l'année prochaine. Dans le rapport d'information Politique de l'État en faveur de la filière du livre que j'ai publié en juillet dernier, je souligne le niveau particulièrement élevé de la trésorerie du CNL – par les temps qui courent, ce n'est pas forcément très bien vu.
Les fonds de roulement et la trésorerie du CNL restent aujourd'hui largement supérieurs à leur niveau d'avant la crise sanitaire : ils ont ainsi augmenté de 24 % par rapport à 2015. Ils demeurent élevés, représentant près d'une année de budget. Dans mon rapport, j'invite d'ailleurs le CNL à mobiliser davantage son fonds de roulement afin de financer ses dépenses.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, j'ai obtenu de Bercy que le CNL mobilise son fonds de roulement. Il n'y aura donc pas de baisse de son budget.
Le Gouvernement émet à son tour un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1206.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1648, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mmes Corbière Naminzo et Apourceau-Poly, MM. Barros, Basquin et Brossat, Mme Brulin, M. Corbisez, Mme Cukierman, MM. Gay, Gremillet, Lahellec et Savoldelli, Mmes Silvani, Margaté et Varaillas et M. Xowie, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Presse et médias |
|
1 |
|
1 |
Livre et industries culturelles |
1 |
|
1 |
|
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Jérémy Bacchi.
M. Jérémy Bacchi. Par cet amendement d'appel, notre collègue Pierre Ouzoulias nous alerte sur la situation préoccupante de la Bibliothèque nationale de France (BNF).
Malgré les nombreux investissements nécessaires à la poursuite de sa mission, la Bibliothèque nationale de France se heurte à un obstacle financier difficilement surmontable sans un engagement fort de l'État.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Force est de le constater, la BNF devra assumer de très lourds investissements au cours des prochaines années, en particulier sur son site de Tolbiac, qui a trente ans d'âge.
Si j'étais mauvaise langue, je suggérerais à la BNF de prendre attache avec la Maison de la radio. L'épure serait comprise entre 500 millions et 600 millions d'euros : ce n'est pas une paille ! Mme la ministre nous donnera sans doute un certain nombre de précisions.
La commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. La BNF peut également mobiliser son fonds de roulement pour réaliser ces investissements sans aucun impact budgétaire pour l'État.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. Jérémy Bacchi. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° II-1648 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Après l'article 78
M. le président. L'amendement n° II-2149, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 78
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué un congé d'accompagnement spécifique pour le maintien dans l'emploi, au profit des salariés en contrat à durée indéterminée, âgés de plus de cinquante-neuf ans à la date d'entrée dans le dispositif, qui rempliront les conditions pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein au plus tard à l'issue du dispositif et occupant un emploi, dont la liste est déterminée par arrêté du ministre chargé de la culture, au sein d'une entreprise de la filière des imprimeries concourant à la fabrication et à la production des titres de presse quotidienne signataire, directement ou par le biais de son organisation représentative, d'un accord avec l'État.
II. – Toute entreprise visée au I peut être autorisée à faire bénéficier les salariés mentionnés au I de ce dispositif sous réserve de proposer soit :
- Un congé de reclassement défini à l'article L. 1233-71 du code du travail d'une durée de douze mois et d'envisager de rompre le contrat de travail des salariés concernés dans le cadre d'un départ pour l'un des motifs visés à l'article L. 1233-3 du même code, ou d'un plan de sauvegarde de l'emploi défini à l'article L. 1233-61 dudit code. Ce plan doit faire l'objet d'un agrément du ministre chargé de la culture, qui tient compte des conditions d'éligibilité prévues au I, préalablement à la demande de validation ou d'homologation dans les conditions définies à l'article L. 1233-57-1 du même code dont il constitue un élément de contrôle ;
- Un congé de mobilité dans les conditions du 7° de l'article L. 1237-19-1 du même code d'une durée de douze mois et d'envisager de rompre le contrat de travail dans les conditions prévues par l'article L. 1237-18-4 du même code. L'accord portant rupture conventionnelle collective doit faire l'objet d'un agrément du ministre chargé de la culture, qui tient compte des conditions d'éligibilité prévues au I, préalablement à la demande de validation prévue à l'article L. 1237-19-3 du même code dont il constitue un élément de contrôle.
III. – Dans le cadre du dispositif prévu au troisième alinéa du II du présent article, l'employeur s'engage à maintenir en emploi les salariés non volontaires au départ pendant une durée conventionnelle définie et qui ne pourra être inférieure à douze mois.
IV. – Dans le cadre d'un congé de reclassement prévu au deuxième alinéa du II du présent article et avant son terme, les salariés qui n'ont pas retrouvé d'emploi bénéficient d'un bilan individualisé réalisé par la cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi mentionnée à l'article L. 1233-71 du même code.
V. – Les salariés mentionnés au I qui n'ont pas retrouvé d'emploi à l'expiration du congé de reclassement défini à l'article L. 1233-71 ou du congé de mobilité défini au 7° de l'article L. 1237-19-1 du code du travail et qui ne remplissent pas les conditions pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein bénéficient, à compter de cette date, du congé d'accompagnement spécifique pour le maintien dans l'emploi dans les conditions prévues au présent article.
Dans ce cas, le terme du préavis reporté en application du deuxième alinéa de l'article L. 1233-72 du même code ou la date de rupture du contrat de travail fait l'objet d'un report jusqu'à la fin du congé d'accompagnement spécifique et le contrat de travail demeure suspendu pendant la durée de ce congé.
VI. – La durée maximale du congé d'accompagnement spécifique est égale à trente-six mois.
Le salarié bénéficiaire du congé d'accompagnement spécifique à l'issue du congé de reclassement prévu au deuxième alinéa du II du présent article peut suivre les actions de formation et de validation des acquis de l'expérience définies conjointement avec l'employeur selon des modalités fixées par décret. Il bénéficie, dans ce cadre, des prestations de la cellule d'accompagnement des démarches de recherche d'emploi mentionnée à l'article L. 1233-71 du code du travail, qui est maintenue pour la durée des congés d'accompagnement spécifique octroyés en application du présent article.
VII. – Pendant la durée du congé d'accompagnement spécifique, le salarié bénéficie d'une allocation mensuelle, versée par l'employeur et prise en charge, en cas d'agrément, par l'État, égale à un pourcentage de sa rémunération mensuelle brute moyenne perçue au cours des douze derniers mois précédant le congé de reclassement ou de mobilité. Ce pourcentage est fixé par décret.
La prise en charge par l'État est limitée à une durée maximale de trente-six mois et à un montant maximal fixé par décret par an et par salarié pouvant bénéficier du congé au titre de chaque employeur. Au-delà de cette durée et du montant maximal fixé, l'employeur poursuit la prise en charge des mesures visées au présent article pour la durée du congé restant à courir.
VIII. – Le montant de l'allocation prévue au VII est revalorisé en fonction de l'évolution annuelle moyenne des salaires de l'entreprise, selon des modalités fixées par décret.
L'allocation est cessible et saisissable dans les mêmes conditions et limites que les salaires.
L'allocation n'est pas assujettie à la taxe sur les salaires, aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale, à l'exception de la contribution sociale généralisée sur les revenus de remplacement et de la contribution au remboursement de la dette sociale.
IX. – Le congé d'accompagnement spécifique peut comporter des périodes de travail durant lesquelles le congé, ainsi que le versement de l'allocation, sont suspendus. Ces périodes de travail sont effectuées pour le compte de tout employeur, à l'exception des particuliers, dans le cadre des contrats de travail à durée déterminée tels que prévus à l'article L. 1242-3 du code du travail, renouvelables une fois par dérogation aux articles L. 1243-13 et L. 1243-13-1 du même code, ou de contrats de travail temporaire tels que prévus à l'article L. 1251-7 du même code.
X. – Le congé d'accompagnement spécifique ne crée pas de droit à congés payés. Il n'est pas pris en compte dans la détermination de l'ancienneté servant de base au calcul des indemnités de rupture de contrat de travail.
Durant la période du congé d'accompagnement spécifique, le salarié bénéficie des dispositifs d'intéressement et de participation selon les conditions applicables à l'entreprise.
Le congé d'accompagnement spécifique est suspendu en cas de congé maternité, de congé de paternité et d'accueil de l'enfant ou de congé d'adoption.
En cas de maladie, le versement de l'allocation est maintenu pour la durée du congé d'accompagnement spécifique restant à courir.
Un décret prévoit :
1° Les conditions dans lesquelles le salarié peut être autorisé à s'absenter au cours du congé d'accompagnement spécifique ;
2° Les dates et modalités de versement des indemnités de rupture et de l'indemnité compensatrice au titre du reliquat des congés payés non pris.
XI. – L'employeur met fin au congé d'accompagnement spécifique :
1° A la demande du bénéficiaire ;
2° Lorsque le salarié remplit les conditions pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein ;
3° Lorsque le bénéficiaire trouve un emploi ;
4° Dans le cadre d'un congé de reclassement prévu au deuxième alinéa du II du présent article et en cas de manquement du bénéficiaire, sans motif légitime, aux engagements mentionnés au deuxième alinéa du VI.
XII. – Le 2° de l'article L. 351-3 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ou de l'allocation versée au titre du congé d'accompagnement spécifique pour le maintien dans l'emploi prévu à l'article de la loi n° du de finances pour 2026 ».
XIII. – L'ensemble des mesures définies au présent article s'inscrivent en complément et sans préjudice de celles mises en œuvre par l'employeur en application des dispositions législatives ou des stipulations conventionnelles en vigueur.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. Cet amendement vise à créer le fonds d'accompagnement social pour les salariés des imprimeries de presse quotidienne, en cohérence avec l'amendement n° II-2148, que j'ai présenté au début de l'examen des crédits de la mission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2148.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 78.
compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », figurant à l'état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Avances à l'audiovisuel public |
3 878 312 945 |
3 878 312 945 |
France Télévisions |
2 440 577 000 |
2 440 577 000 |
ARTE France |
298 114 886 |
298 114 886 |
Radio France |
648 033 908 |
648 033 908 |
France Médias Monde |
303 883 551 |
303 883 551 |
Institut national de l'audiovisuel |
103 461 144 |
103 461 144 |
TV5 Monde |
84 242 456 |
84 242 456 |
Programme de transformation |
0 |
0 |
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1733 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Delahaye, Maurey, Cambier, Duffourg, Longeot, Mizzon et Menonville et Mme Herzog, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
|
25 000 000 |
|
25 000 000 |
ARTE France |
|
|
|
|
Radio France |
|
25 000 000 |
|
25 000 000 |
France Médias Monde |
|
|
|
|
Institut national de l'audiovisuel |
|
|
|
|
TV5 Monde |
|
|
|
|
Programme de transformation |
|
|
|
|
TOTAL |
|
50 000 000 |
|
50 000 000 |
SOLDE |
- 50 000 000 |
- 50 000 000 |
||
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Cet amendement vise à tenir compte de la situation des finances publiques de notre pays.
L'ensemble des opérateurs de l'État doivent rationaliser leurs dépenses. Nous proposons donc de réduire de 25 millions d'euros les crédits octroyés à France Télévisions, d'une part, et à Radio France, d'autre part.
Ces sociétés ne sauraient être exonérées de l'effort de rigueur imposé aux services de l'État, et cet effort ne peut se traduire que par une réduction de leurs moyens.
M. le président. L'amendement n° II-2002, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
65 300 000 |
|
65 300 000 |
|
ARTE France |
|
65 300 000 |
|
65 300 000 |
Radio France |
|
|
|
|
France Médias Monde |
|
|
|
|
Institut national de l'audiovisuel |
|
|
|
|
TV5 Monde |
|
|
|
|
Programme de transformation |
|
|
|
|
TOTAL |
65 300 000 |
65 300 000 |
65 300 000 |
65 300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai d'un même mouvement cet amendement et le suivant.
M. le président. L'amendement n° II-2003, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
|
|
|
|
ARTE France |
|
4 100 000 |
|
4 100 000 |
Radio France |
4 100 000 |
|
4 100 000 |
|
France Médias Monde |
|
|
|
|
Institut national de l'audiovisuel |
|
|
|
|
TV5 Monde |
|
|
|
|
Programme de transformation |
|
|
|
|
TOTAL |
4 100 000 |
4 100 000 |
4 100 000 |
4 100 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Monique de Marco. J'irai à rebours de mon collègue Canévet.
Pour ma part, je plaide pour le rétablissement des crédits de France Télévisions et de Radio France, ainsi que de l'INA – ce sera l'objet d'un troisième amendement –, à leur niveau de 2025.
Depuis plusieurs années, l'audiovisuel public fait face à des attaques répétées, souvent menées par la droite,…
M. Max Brisson. Ah !
Mme Monique de Marco. … laquelle ne cesse d'agiter l'idée que ce service public serait coûteux, idéologique ou dépassé.
Or il y a, derrière ces caricatures, une réalité simple : moins de moyens, c'est moins d'indépendance, moins de création. (M. Roger Karoutchi manifeste sa circonspection.)
La réalité, la voici : l'audiovisuel public est affaibli méthodiquement, patiemment, presque chirurgicalement, et ce n'est pas un hasard. Depuis un certain temps déjà, une partie de la droite avance dans son combat avec une constance admirable : non pas moderniser l'audiovisuel public, mais le raboter, le contraindre et, à force de l'étouffer, démontrer qu'il ne respire plus ; non pas moderniser l'audiovisuel public – j'y insiste ! –, mais le mettre sous perfusion pour mieux clamer, demain, son inutilité.
Mes chers collègues, l'audiovisuel n'est pas un luxe. C'est un pilier de notre démocratie…
M. Olivier Rietmann. C'est fini !
Mme Monique de Marco. C'est ce qui garantit l'accès à une information non soumise aux pressions économiques. C'est ce qui permet la création de contenus français et européens de qualité, dans un paysage qui, par ailleurs, est dominé par quelques plateformes mondialisées. C'est ce qui noue, sur tout un territoire, un lien culturel, éducatif et citoyen que nul acteur privé ne saurait tisser. (M. Yannick Jadot applaudit.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Si je comprends bien, nous avons le choix entre le rabot breton et la louche girondine ! (Sourires. – M. Michel Canévet rit.)
Je rappelle que la quasi-totalité de la diminution des crédits alloués à l'audiovisuel public pour 2026 par rapport à l'exercice précédent est supportée par France Télévisions, qui verrait ses crédits baisser de 65 millions d'euros, c'est-à-dire de 2,6 %.
Cette baisse s'ajoute à une première, de 63 millions d'euros, que nous avons votée ici même l'année dernière, cher Michel Canévet.
Nous connaissons tous la situation économique fragilisée de France Télévisions. Mieux vaut s'en tenir à la proposition initiale d'économies, qui me semble réaliste au regard des enjeux auxquels cette société doit faire face.
Cela étant – je réponds cette fois à l'intervention politique de notre collègue et amie Monique de Marco –, il est évidemment indispensable de revoir le périmètre et de mener à bien une véritable réforme de l'audiovisuel public.
Je réserve donc le même accueil à ces amendements opposés, à savoir une demande de retrait. À défaut, l'avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je vais m'efforcer de rassurer Mme de Marco : nous ne voulons pas la disparition de l'audiovisuel public ! D'ailleurs, je ne voterai pas l'amendement de M. Canévet. Mais je pense aussi que l'audiovisuel public a besoin d'une réforme : nous voulons le réformer pour le préserver.
Ma chère collègue, à vous entendre, la droite voudrait la disparition de l'audiovisuel public. Ce discours ne correspond tout simplement pas à la réalité. (Mme Monique de Marco s'exclame.) Je vous redis sur tous les tons mon attachement, notre attachement, à l'audiovisuel public. Mais nous ne voulons pas le mettre sous cloche, l'immuniser contre tout changement, l'exonérer de toute réforme modifiant son périmètre et ses missions. Il doit suivre l'évolution de la société, qui est aussi celle des pratiques de consommation de la télévision et de la radio. Il faut le rendre moderne, c'est-à-dire l'adapter à la société du XXIe siècle et aux modes actuels de consommation audiovisuelle.
Autrement dit, nous sommes les meilleurs partisans de l'audiovisuel public ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Jacques Panunzi. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Nous sommes nous aussi favorables à l'audiovisuel public : nous souhaitons non pas sa disparition, mais sa réforme et sa restructuration. Or dix chaînes de télévision publique et dix stations de radio publique, c'est beaucoup trop, me semble-t-il.
M. Max Brisson. Absolument !
M. Vincent Delahaye. Si l'on concentrait les crédits alloués à ces différents médias, les moyens seraient beaucoup mieux ciblés : le service – public – rendu aux Français y gagnerait en intérêt. C'est pourquoi j'ai cosigné l'amendement de mon collègue Canévet, que je soutiens.
Pour ma part, j'estime qu'il ne faut pas concentrer les économies à tel ou tel endroit : il faut en faire partout, de façon raisonnable et en les accompagnant de réformes.
Nous parlons de ce sujet depuis des années. Cela fait quelque temps déjà que je suis sénateur ; quand j'ai commencé à siéger dans cet hémicycle, il en était déjà question. Or il ne se passe jamais rien...
M. Max Brisson. Il y a la réforme Lafon !
M. Vincent Delahaye. Il est temps qu'il se passe enfin quelque chose.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Parce que nous proposons des réductions de crédits, nous serions opposés au service public de l'information ? Mais pas du tout ! Je ne peux laisser croire une telle chose.
Je suis attaché au pluralisme de la presse et des médias. Je veux que nous nous donnions les moyens de garantir ce pluralisme. Mais je suis également attaché à ce que la situation des finances publiques de notre pays s'améliore.
Chacun, dans cet hémicycle, doit avoir conscience de l'état de dégradation avancée dans lequel se trouvent nos comptes et des risques que cette situation fait peser sur l'avenir. L'augmentation de la charge d'intérêts de la dette grèvera durablement les capacités d'action publique.
Reste que – j'y insiste – je suis attaché au pluralisme, donc à l'audiovisuel public.
M. le président. La parole est à M. Adel Ziane, pour explication de vote.
M. Adel Ziane. C'est au terme de l'examen de ces crédits que nous discutons enfin du fond : le sujet est d'une extrême importance.
J'ai entendu mes collègues exprimer leur préoccupation quant à l'état des finances publiques. Nous nous en soucions tout comme eux. Mais nous avons une autre préoccupation, quant à l'état du débat public dans notre pays.
J'ai aussi entendu mes collègues faire valoir leur droit et la nécessité de « faire le procès » de l'audiovisuel public. Ces termes, utilisés en commission, n'ont pas manqué de nous heurter.
L'état du débat public dépend notamment du sort réservé aux valeurs du pluralisme et de la liberté d'opinion ; or ces valeurs subissent une attaque en règle.
M. Durox avait déposé des amendements visant à supprimer les aides à la presse. Il n'était pas présent en séance pour les défendre…
Contrairement à ce que certains disent, nous ne sommes pas hostiles à toute réflexion sur la réforme de l'audiovisuel public. Mais la véritable question est la suivante : où voulons-nous aller ? Comment faire en sorte, avec les moyens dont nous disposons aujourd'hui, que l'audiovisuel public demeure un véritable lieu d'expression libre et un garant du pluralisme des opinions dans notre pays ?
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Chers collègues de la majorité sénatoriale, tout le monde est pour les petites lignes ferroviaires ; sauf qu'à force de réduire les budgets les trains sont en retard, les petites lignes sont dégradées et l'on finit par les fermer.
De même, tout le monde dit vouloir lutter contre le dérèglement climatique, mais on supprime tous les budgets de la transition écologique et l'on s'étonne que notre trajectoire de décarbonation ne soit pas à la hauteur de l'accord de Paris !
C'est exactement ce que vous faites avec l'audiovisuel public. À vous entendre, on a l'impression que ce service est sclérosé depuis des décennies.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Ça fait un bail, oui…
M. Yannick Jadot. Or il évolue ! J'ai regardé la série Des vivants, sur le 13-novembre et les victimes du Bataclan : c'est tout simplement magnifique.
Elle est là, la qualité du service public ! À force de l'attaquer, la réalité est que, volontairement ou non, vous faites le jeu de Bolloré ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Max Brisson. Et le rapport de la Cour des comptes ?
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Nous avons besoin d'un débat apaisé.
Je salue à cet égard la sérénité de nos discussions de cette année, qui tranchent sur celles des années précédentes : cette fois, nos échanges ont pu se tenir sur la base de chiffres stabilisés, sans les modifications successives qui avaient compliqué nos travaux l'an passé.
À l'issue du processus, un effort est demandé à l'audiovisuel public : il ne serait pas cohérent qu'il soit seul exempté des efforts que tous les autres services publics doivent consentir.
Cet effort est à la fois important et supportable. Je le dis à mes collègues centristes : 65,3 millions d'euros d'économies sur la seule dotation budgétaire de France Télévisions, ce n'est pas négligeable. Ajoutez à l'équation l'obligation faite au groupe d'absorber un déficit de 44 millions d'euros, que l'État ne prendra plus en charge cette année. L'effort net est ainsi de 109 millions d'euros, sans compter les effets du glissement vieillesse technicité (GVT) ou encore ceux de l'inflation. En définitive, il atteint presque 148 millions d'euros.
Cet effort est important, incontestablement. Il reste néanmoins maîtrisé, puisqu'il s'agit d'inciter l'audiovisuel public à engager des réformes structurelles.
De telles réformes prennent du temps. J'espère que l'effort demandé va contraindre l'audiovisuel public à les engager tout en travaillant – je le disais tout à l'heure – à la définition d'un nouveau périmètre et de nouvelles missions. La représentation nationale et le Gouvernement devront les accompagner dans cette voie.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. J'observe avec plaisir que certains de nos collègues ressentent aujourd'hui le besoin de dire qu'ils sont des défenseurs de l'audiovisuel public ; dont acte.
Nous l'avons toujours dit : le problème, c'est la méthode. Commençons par définir clairement le contenu de la réforme de l'audiovisuel public – pour ma part, j'ai toujours pris soin de préciser que je ne suis pas contre le principe d'une telle réforme –, avant de déterminer les moyens à mobiliser pour l'accompagner.
Aujourd'hui, que fait-on ? On baisse les crédits, on fragilise, on baisse encore. Que restera-t-il, en définitive ? Rien. Ce sont le pluralisme et la démocratie qui sont en jeu, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote. (M. Roger Karoutchi s'impatiente.)
Mme Colombe Brossel. Sans doute un peu frustrés par le déclenchement, cet été, du « 49.3 sénatorial » – j'ai nommé l'article 44, alinéa 3, de la Constitution – sur la réforme de l'audiovisuel public, nous ressentons le besoin de reparler de ce sujet.
Nous sommes tous d'accord sur ce point : il faut réformer, il faut avancer – nous l'avons clairement affirmé, dans l'hémicycle comme en commission. Mais de quoi s'agit-il en l'occurrence ? De réformer ou de dénigrer ?
Ces derniers mois, beaucoup de mensonges ont été proférés au sujet de l'audiovisuel public. Telle radio, par exemple, serait devenue une « radio de vieux », quand les chiffres d'audience sont sans appel : c'est bel et bien la radio du service public qui est la plus écoutée.
La meilleure façon d'affirmer son soutien à l'audiovisuel public n'est peut-être pas de passer son temps à le dénigrer sur CNews et dans le JDD… (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. La séance suivait son cours de manière assez calme, presque atone, jusqu'à ce que nous en venions à l'audiovisuel public, qui, ici comme ailleurs, attise les débats et les passions.
Mme Sylvie Robert. C'est que nous y tenons !
M. Laurent Lafon. Mes chers collègues, sur ce sujet, il faut que nous sachions nous montrer raisonnables, tous autant que nous sommes : évitons que l'audiovisuel public ne soit pris dans un étau politique, enserré dans une caricature de débat entre ceux qui se réfèrent uniquement à CNews et ceux qui n'ont que le mot « privatisation » à la bouche.
Je rappelle à mes collègues et amis centristes que l'audiovisuel public contribue bien cette année à l'effort de rétablissement des comptes publics. Dans ce projet de budget, sa dotation n'augmente ni ne stagne par rapport à l'exercice précédent : elle diminue de 71 millions d'euros, sachant que l'année dernière un effort a déjà été consenti.
Max Brisson l'a souligné avec raison, et nous serons tous d'accord sur ce point : l'audiovisuel public ne saurait se concevoir comme une réalité statique. L'environnement audiovisuel international est en profonde mutation ; il faut donc que notre audiovisuel public se réorganise, qu'il entende les critiques qui lui sont faites et qu'il se réforme. Dire cela, ce n'est pas être contre l'audiovisuel public : au contraire, c'est le soutenir.
C'est pourquoi nous défendons une réforme, celle dont j'ai moi-même pris l'initiative au nom de nombreux collègues, visant à créer une holding qui regrouperait les principales entités de l'audiovisuel public. Cette réforme – je le rappelle – est le fruit d'un travail conduit conjointement dès 2015. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. Et maintenant, votons !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Pour un peu, je me retrouverais plongé au sein de la commission de la culture, dans laquelle j'ai eu le plaisir et l'honneur de siéger pendant six ans.
Mme Sylvie Robert. Bienvenue ! (Sourires.)
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mais je suis désormais membre de la commission des finances…
J'engage ceux de mes collègues qui ne l'auraient pas fait – visiblement, certains ici sont dans ce cas – à lire le rapport de la Cour des comptes : « La situation financière n'est pas soutenable. »
Des décisions devront être prises aux environs du mois de mai ou du mois de juin prochain, car les capitaux propres de la société France Télévisions, autrement dit sa crédibilité financière, se sont effondrés en huit ans, passant de 294 millions à 179 millions d'euros.
M. Max Brisson. Absolument !
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Oui, il y a un péril ! La présidente de France Télévisions commence à le comprendre…
M. Max Brisson. Elle commence !
M. Laurent Lafon. L'accord collectif ayant été dénoncé à l'été 2025, il va devoir être renégocié, car, à l'évidence, le compte n'y est pas. (M. Patrick Kanner s'exclame.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1733 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2002.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2003.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2004, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
|
|
|
|
ARTE France |
|
1 500 000 |
|
1 500 000 |
Radio France |
|
|
|
|
France Médias Monde |
|
|
|
|
Institut national de l'audiovisuel |
1 500 000 |
|
1 500 000 |
|
TV5 Monde |
|
|
|
|
Programme de transformation |
|
|
|
|
TOTAL |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. L'Institut national de l'audiovisuel est l'entité qui subit, après France Télévisions, la plus forte diminution de ses ressources dans ce projet de loi de finances.
Je propose de maintenir les crédits de l'INA à leur niveau de 2025. Il y va de la capacité de l'institut à poursuivre les chantiers de modernisation qu'il a engagés – je pense notamment à l'utilisation de l'intelligence artificielle pour l'archivage des documents.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2004.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », figurant à l'état D.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures seize, est reprise à dix-sept heures dix-sept.)
M. le président. La séance est reprise.
Santé
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » s'élèvent pour 2026 à 1,67 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ils augmentent ainsi de près de 11 % par rapport à l'exercice précédent.
En apparence, cela fait beaucoup, mais cette augmentation est trompeuse, car elle porte exclusivement sur un programme qui sert de « boîte aux lettres » pour des crédits européens destinés au financement des investissements des hôpitaux.
Ces fonds européens, qui doivent augmenter en 2026, seront reversés à la sécurité sociale. En réalité, les crédits de la mission « Santé », hors ces financements, restent stables pour l'année 2026.
La mission « Santé » – vous le savez sans doute, mes chers collègues – a été un peu déshabillée au fil du temps. Il n'y reste plus grand-chose, sinon un budget dont l'examen nous anime toujours beaucoup : celui de l'aide médicale de l'État, l'AME, qui représente 90 % des crédits qui y sont retracés.
Pour le reste, on trouve au sein de cette mission un saupoudrage d'aides destinées à des actions de prévention, la dotation versée à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, ainsi que les crédits de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et de l'Institut national du cancer (Inca).
Les crédits affectés à l'Inca augmentent de 9,6 millions d'euros en 2026 par rapport à 2025, cette hausse étant fléchée vers le financement de la mise en œuvre du registre national des cancers. Ce montant paraît important ; la commission des finances s'est demandé s'il était bien justifié. En tout état de cause, je rappelle que ce registre a été créé sur l'initiative de notre collègue Sonia de La Provôté, que je salue, dont la proposition de loi a été adoptée à l'unanimité de notre assemblée. Un tel registre national, construit à partir des registres qui existent déjà localement, va nous aider dans la lutte contre le cancer. Je suis donc bien sûr favorable à l'augmentation des crédits de l'Inca.
J'en viens enfin, madame la ministre, aux crédits affectés aux dépenses d'aide médicale de l'État. Malheureusement, ces crédits seront cette année encore insincères. Ils ont été reconduits au même niveau que l'an dernier, soit 1,207 milliard d'euros, alors que l'exécution pour 2025 est attendue aux alentours de 1,4 milliard d'euros. Il y a donc 200 millions d'euros d'écart entre la budgétisation et l'exécution, sachant qu'une légère progression des dépenses réelles devrait encore être enregistrée en 2026.
Le code de la sécurité sociale et le code de l'action sociale et des familles indiquent très clairement que les crédits d'AME de droit commun sont pris en charge par l'État. Dès lors, je ne comprends pas cette sous-budgétisation chronique du dispositif.
En 2024, l'État a déjà contracté une dette de 185 millions d'euros à l'égard de la sécurité sociale au titre des dépenses d'aide médicale de l'État. Cette situation risque de s'aggraver en 2025 : les montants inscrits en loi de finances initiale n'ayant pas été corrigés en loi de finances de fin de gestion, cette dette pourrait s'alourdir de plus de 200 millions d'euros. Si nous laissons les crédits de l'AME en l'état, si nous ne changeons rien – pour ma part, vous l'aurez compris, je suis pour changer des choses –, nous aurons créé, à la fin de l'année 2026, une nouvelle dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale : nous aurons creusé le trou de la sécurité sociale de 670 millions d'euros supplémentaires !
Voilà qui n'est pas raisonnable : vient un moment où il faut faire face aux dépenses. L'AME couvre essentiellement les soins dispensés aux patients qui sont en situation irrégulière sur notre territoire ; s'agissant d'un guichet ouvert – ces patients doivent bien sûr être soignés –, les remboursements versés dans ce cadre sont effectués quel que soit le niveau des crédits ouverts. Il convient donc de modifier certains aspects du dispositif.
Sur ce sujet, les travaux ne manquent pas : je citerai le rapport remis au mois de décembre 2023 par Claude Evin et Patrick Stefanini, mais aussi le rapport d'information que j'ai moi-même remis, au mois de juillet 2025, au nom de la commission des finances.
Un certain nombre des recommandations que j'ai formulées ont été reprises dans des projets de décret. Madame la ministre, ces textes sont-ils toujours d'actualité ? Seront-ils ou non publiés ? Si, par exemple, on réforme les conditions d'obtention de la carte d'AME, en excluant, comme je le souhaite, l'extrait d'acte de naissance de la liste des documents d'identité valables pour la délivrance d'une telle carte, et si, comme le propose la commission des finances, on modifie le panier de soins non urgents, sans toucher au panier de soins urgents, alors seulement il deviendra possible de faire tenir les dépenses réelles dans l'enveloppe de 1,2 milliard d'euros inscrite à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2026. Dans le cas contraire, les crédits ouverts ne suffiront pas.
J'aurai l'occasion de revenir sur tous ces sujets lors de la présentation de mes amendements et en donnant l'avis de la commission sur les amendements de nos collègues. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, en remplacement de Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Mme Pascale Gruny, en remplacement de Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2026, la mission « Santé » sera de nouveau marquée par le poids de la contrainte budgétaire.
Si le montant des crédits de la mission affiche une augmentation de 12,8 %, cette évolution ne résulte en réalité que du versement des crédits européens délégués à la France pour soutenir le volet « investissement » du Ségur de la santé.
En dehors de ce mécanisme comptable, le projet de loi de finances pour 2026 reconduit quasiment à l'identique les crédits de paiement ouverts en 2025, soit 1,43 milliard d'euros.
Ce choix emporte deux conséquences. Premièrement, il inscrit dans la durée la contraction des moyens alloués à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins. Deuxièmement, il confirme la déconnexion, déjà observée en 2025, entre les crédits ouverts pour financer l'AME et la réalité des dépenses constatées.
Les dépenses d'AME ont progressé de 6 % par an en moyenne depuis 2009 et de 40 % entre 2021 et 2025. Cette année, si la réserve de précaution n'est pas dégelée, l'État aura accumulé environ 243 millions d'euros de dette nouvelle à l'égard de la sécurité sociale, soit l'équivalent de 20 % du montant des crédits consacrés à l'AME.
Ce constat doit nous inciter à définir une orientation claire : soit il existe une volonté de contenir la dépense d'AME, et cette orientation doit être soutenue par des mesures appropriées de maîtrise des dépenses, soit il convient de doter le programme de moyens suffisants pour éviter l'aggravation de la dette contractée par l'État à l'endroit de la sécurité sociale. Nous faisons le choix de la maîtrise des dépenses : c'est le sens des deux amendements déposés par Florence Lassarade au nom de la commission des affaires sociales.
Pour ce qui est du programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », notre commission a exprimé sa vive préoccupation quant à la baisse continue des crédits. Le projet de loi de finances pour 2026 confirme la réduction de 22 % entérinée dans la loi de finances pour 2025. En outre, si le Gouvernement maintient ses prévisions, le programme aura perdu plus du quart de ses financements entre 2024 et 2028.
Plusieurs acteurs souffrent de cette situation, notamment les associations, qui prolongent l'action institutionnelle et déploient une offre de prise en charge au plus près des usagers ; l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), qui connaît des difficultés pour honorer ses engagements d'indemnisation à l'égard des victimes de la Dépakine ; ou encore l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont la dotation annuelle ne permet toujours pas de couvrir les besoins de financement.
Toutefois, l'attribution à l'Inca de crédits complémentaires destinés à financer la création d'un registre national des cancers mérite d'être saluée. Ce projet, défendu par le Sénat voilà plus de deux ans déjà, doit contribuer à améliorer la prévention et à mieux adapter la prise en charge des patients. Nous serons attentifs aux conditions de sa concrétisation. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Organisation des travaux
M. le président. Avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour la bonne information de tous, que trente-sept amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quarante-cinq. Nous devrions donc terminer l'examen de cette mission aux alentours de vingt heures et passer à l'examen de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » à vingt et une heures trente.
Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents, et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission serait reportée à la fin des missions de la semaine.
Santé (suite)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Mme Guylène Pantel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd'hui d'une mission qui, en dépit d'un périmètre étroit, n'en demeure pas moins essentielle, les crédits qui y sont inscrits étant notamment destinés à des personnes en situation de grande vulnérabilité.
La mission « Santé » occupe une place particulière dans notre budget national : elle rassemble uniquement les dépenses de santé qui restent à la charge directe de l'État. Ces dépenses ont trait, pour l'essentiel, à l'aide médicale de l'État, à la sécurité sanitaire, à l'indemnisation des victimes et au financement d'interventions dans les territoires d'outre-mer.
Pour 2026, les crédits de cette mission dépassent 1,6 milliard d'euros, en hausse d'un peu plus de 10 % par rapport à 2025. Cette progression doit toutefois être lue avec prudence : elle est presque entièrement le fait du programme 379, simple dispositif transitoire destiné au reversement à l'assurance maladie de crédits européens. Exception faite de ce programme, les crédits sont quasiment stables.
Je n'entrerai pas davantage dans le détail des chiffres, car cela vient d'être fait. Ces derniers montrent que la mission « Santé » n'est pas un instrument de réforme structurelle, mais un budget de responsabilité ciblé : celui par lequel l'État assume directement la protection sanitaire, la prévention de certains risques et la prise en charge de ceux qui n'ont accès à aucun autre dispositif.
Dans cette mission, l'aide médicale de l'État occupe évidemment une place centrale. Comme l'an dernier, les rapporteurs ont déposé des amendements visant à minorer de 200 millions d'euros les crédits qui y sont alloués. Ils s'appuient sur une réforme du dispositif de prise en charge des soins non urgents, fondée sur un accord préalable permanent des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM).
Cette évolution appelle, de notre part, une appréciation prudente. Elle n'est pas anodine : elle modifierait concrètement les conditions d'accès aux soins pour un public particulièrement fragile.
Les élus du RDSE souhaitent rappeler que l'AME est aussi un instrument de santé publique. Retarder ou empêcher l'accès aux soins ne fait souvent qu'aggraver l'état des personnes concernées, tout en reportant les prises en charge vers des solutions plus coûteuses.
Avant de modifier l'équilibre de ce dispositif, il faut avoir des éléments précis, mesurés et partagés. S'il faut engager une véritable réforme du panier de soins, les professionnels de santé doivent y être associés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Voilà pourquoi la majorité d'entre nous s'opposera à ces amendements de minoration. Nous nous y opposerons, non pas par refus de débattre, mais parce qu'une telle réduction, appliquée sans garantie et sans analyse d'impact complète, créerait davantage d'incertitudes qu'elle ne résoudrait de difficultés. Nous privilégions une approche fondée sur les faits, attentive aux besoins réels et soucieuse de maintenir la stabilité d'un dispositif doté d'une fonction sanitaire indispensable.
La mission « Santé » comprend aussi le programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Notre collègue Nathalie Delattre a déposé un amendement visant à en majorer les crédits de 10 millions d'euros. L'objectif est de créer un mécanisme d'indemnisation des dommages sanitaires attribuables à l'acétate de cyprotérone et à d'autres progestatifs de synthèse. Les membres du RDSE font pleinement leur la préoccupation humaine et sanitaire qui sous-tend cet amendement.
Il ne s'agit pas seulement de crédits supplémentaires : il s'agit avant tout de reconnaître des souffrances et de réparer des préjudices avérés de manière équitable et transparente.
La mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2026 incarne l'engagement de l'État envers les plus fragiles. Dès lors, les élus du RDSE ne peuvent cautionner les réductions qui seront proposées par voie d'amendements : de telles mesures risqueraient d'aggraver les inégalités d'accès à la santé et les politiques publiques de prévention.
Les crédits de la mission recueilleront majoritairement nos suffrages, à condition qu'ils restent dans leur version initiale. La santé n'est pas une dépense : elle est un investissement collectif. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Brigitte Bourguignon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Santé », bien que modeste en crédits, est révélatrice de nos choix politiques.
La crise sanitaire nous a légué non seulement le « quoi qu'il en coûte », mais aussi un solennel « plus jamais cela ». Il est difficile d'assumer ces serments quand, comme l'a très justement rappelé Mme Gruny, les crédits consacrés à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins reculent.
La priorité affichée hier devient dès aujourd'hui une variable d'ajustement. Les financements baissent, mais les risques restent.
L'Oniam est sous-doté, l'agence de Wallis-et-Futuna évolue sans visibilité et la montée en compétence de nos soignants par la validation des acquis de l'expérience (VAE) est encore traitée comme un supplément optionnel : vaste paradoxe !
Il s'agit pourtant de la sécurité de la Nation, en l'occurrence de sa sécurité sanitaire. Les élus de notre groupe attendent donc du Gouvernement qu'il considère ces politiques comme des socles et non comme des curseurs que l'on déplace au gré des arbitrages saisonniers.
Si cette mission suscite tant de commentaires, l'aide médicale de l'État n'y est évidemment pas pour rien.
De quoi s'agit-il ? L'AME représente moins de 0,5 % des dépenses de santé – environ 0,47 %, pour être précise. La Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) estime que la fraude à l'AME concerne très exactement 0,026 % des dossiers. Peut-on qualifier cette part de marginale ? Certainement. Est-ce pour autant un motif pour renoncer aux contrôles ou fermer les yeux sur d'éventuelles dérives ? En aucun cas.
Reconnaissons-le toutefois, il est très confortable de concentrer sur l'AME des angoisses qui relèvent d'autres débats. Il est très dangereux de faire de ce dispositif fondamentalement humaniste un remède tout trouvé à l'épidémie de xénophobie.
Notre commission a rappelé des faits que l'on souligne trop rarement sur les plateaux de télévision.
Tout d'abord, la dépense moyenne par bénéficiaire de l'AME demeure inférieure à celle d'un assuré classique.
Ensuite, ce dispositif finance des soins qui protègent aussi la population générale face aux maladies infectieuses, aux affections relevant de la santé maternelle et infantile ou encore aux pathologies graves. Sans cette prise en charge, les personnes dont nous parlons finiraient aux urgences, mais à des stades bien plus avancés.
Surtout, l'AME permet de rembourser les hôpitaux et les soignants pour des soins qu'ils sont, de toute façon, juridiquement et éthiquement tenus de dispenser. Autrement dit, il ne s'agit ni d'un robinet ouvert sans contrôle ni d'un eldorado du tourisme médical, comme on le décrit trop souvent. C'est un outil de santé publique qui doit être encadré, comme les autres.
Le rapport sénatorial ne s'arrête pas à la défense du principe. Il pointe une faiblesse structurelle : la programmation insincère. En ce sens, il est précieux. En effet, les dépenses d'AME augmentent fortement et de manière continue, mais les crédits alloués restent figés. La différence se transforme en une dette de l'État – une de plus ! – envers la sécurité sociale.
Sur ce point, nous dressons le même constat : soit on décide de contenir la dépense et l'on se donne des outils pour le faire, soit on assume son niveau réel sans glisser la charge dans l'ombre des tableaux budgétaires.
Notre ligne est celle de la responsabilité. Nous appelons de nos vœux une AME assumée et mieux maîtrisée. L'atteinte de cet objectif passe par des instruments de droit commun tels que l'extension raisonnable de l'accord préalable pour des soins programmés. C'est d'ailleurs ce que la commission a proposé.
En revanche, nous refusons que cette logique de maîtrise soit un cheval de Troie pour transformer l'AME, à terme, en simple aide médicale d'urgence.
Plusieurs de nos collègues l'ont rappelé : il y a une différence nette entre le fait d'encadrer un panier de soins et celui d'organiser en creux un renoncement massif aux soins des plus précaires.
Nous connaissons parfaitement le risque auquel nous nous exposerions dès lors que cette ligne serait franchie. Loin du fantasme commode selon lequel ces patients disparaîtraient, ils réapparaissent plus tard, plus gravement atteints, dans des services d'urgence déjà saturés.
L'AME concentre l'ensemble des enjeux que cette mission nous impose de clarifier. Sommes-nous capables d'assumer nos choix, en finançant ce dispositif de manière sincère et en le contrôlant avec sérieux ? Telle est la ligne que les élus de notre groupe entendent défendre. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget de la mission « Santé » atteint 1,6 milliard d'euros, en progression de 12,8 % en crédits de paiement. En réalité, il traduit surtout une stabilité à hauteur de 1,4 milliard d'euros, si l'on ne tient pas compte de l'abondement provenant des fonds européens.
Le budget de l'AME, inscrit au programme 183, s'établit à 1,2 milliard d'euros et représente 84 % des crédits de la mission.
Le budget du programme 204 est fixé à 213 millions d'euros : il est stable par rapport à 2025, mais en retrait par rapport à 2024.
Le budget de l'Institut national du cancer (Inca) est de 41 millions d'euros, en hausse de 22 %. Cette progression devrait permettre, enfin, la mise en œuvre du registre national des cancers. Nous nous en félicitons, presque trois ans après l'adoption par notre chambre de la proposition de loi qui l'institue.
Nous ne le rappellerons jamais assez : le cancer est la première cause de mortalité en France. L'incidence de nombreux cancers augmente chaque année, et le cancer touche de plus en plus de personnes de moins de 50 ans.
La vaccination contre le papillomavirus continue d'être soutenue. Les crédits destinés aux victimes de la Dépakine et à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna restent stables, mais leur diminution antérieure soulève des difficultés.
Le programme 379 permet le remboursement à la sécurité sociale des crédits européens alloués au financement du Ségur, à hauteur de 242 millions d'euros.
Quant aux dépenses de l'AME, elles ont augmenté de 6 % entre 2009 et 2020 et de 40 % entre 2021 et 2025. Les crédits présentés pour 2026 sont stables par rapport à 2025, mais les dépenses réelles dépasseront vraisemblablement les montants inscrits dans le budget de la mission.
Je rappelle toutefois que les bénéficiaires sont remboursés quels que soient les crédits budgétés. Si ces derniers sont insuffisants, l'État s'endette d'autant envers la sécurité sociale. Cette dette cumulée est aujourd'hui estimée à 362 millions d'euros.
D'après la direction de la sécurité sociale (DSS), la prévision de dépense pour 2025 est de 1,3 milliard d'euros, quand les crédits budgétés dans cette mission s'élèvent à 1,2 milliard d'euros.
Les crédits de l'AME progressent du fait de l'augmentation du nombre de bénéficiaires : on en dénombrait 461 000 au 31 mars 2025, la hausse ayant déjà été de 20 % entre 2021 et 2023.
Au vu du contexte budgétaire, nous plaidons nous aussi pour une meilleure maîtrise des dépenses de l'AME. Serait-il possible de les réduire sans entraver l'accès aux soins ? Faut-il limiter l'accès aux soins non urgents, comme le proposent, dans leur rapport, MM. Evin et Stefanini ? Selon nous, la réponse est oui.
Cette règle, avancent certains, vaut déjà pour les prothèses, les opérations de la cataracte ou encore les implants cochléaires, soumis à accord préalable de la sécurité sociale et à une présence minimale de neuf mois sur le territoire. Il semble toutefois qu'une amélioration des contrôles soit possible, afin de contenir les dépenses de l'AME.
Personnellement, avec plusieurs collègues du groupe Les Indépendants, je soutiendrai les deux amendements de Mme la rapporteure pour avis.
Le premier amendement vise à étendre le régime d'accord préalable de l'assurance maladie à une liste de soins non urgents fixée par décret. Cette liste sera régulièrement réexaminée. Une telle mesure permettra de réduire les montants nécessaires à l'AME tout en garantissant la prise en charge des soins urgents.
Le second amendement vise, en bonne logique, à minorer de 200 millions d'euros les crédits alloués à l'AME, tout en maintenant – j'insiste sur cet impératif – la prise en charge des soins urgents. Ces crédits sont sans doute encore trop élevés, mais les personnes seront soignées, même si les dépenses d'AME excèdent le montant voté. Il n'est donc pas interdit d'essayer de mieux rationaliser les dépenses de soins urgents.
D'une manière générale, les élus de notre groupe sont prêts à soutenir certaines mesures visant à assurer une meilleure maîtrise des dépenses de l'AME, à condition qu'elles préservent l'équilibre entre humanisme, réalité sanitaire et réalité économique, et qu'elles contribuent à lutter contre les abus. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2026 porte les crédits de la mission « Santé » à 1,7 milliard d'euros, en hausse de 12 % par rapport à la loi de finances pour 2025.
Toutefois, hors programme 379, les crédits de cette mission restent quasiment stables, avec 1,430 milliard d'euros contre 1,428 milliard d'euros l'an dernier.
Le programme 183, « Protection maladie », doté de 1,2 milliard d'euros, concentre l'essentiel des crédits de la mission. Ce montant est identique à celui voté l'an passé, mais très éloigné des dépenses réelles, qui ont atteint 1,387 milliard d'euros en 2024, comme l'a souligné M. le rapporteur spécial.
Cette apparente stabilité masque une dette croissante de l'État envers la sécurité sociale : 185 millions d'euros fin 2024, près de 400 millions d'euros attendus fin 2025, ainsi que l'ont rappelé Mme Gruny et M. Delahaye. C'est la raison pour laquelle la question de l'aide médicale de l'État doit être examinée sans tabou.
En 2023, la Première ministre Élisabeth Borne s'était engagée auprès du président Larcher à faire évoluer l'AME. En septembre dernier, François Bayrou, alors Premier ministre, proposait une réforme du dispositif. Récemment encore, l'actuel Premier ministre, Sébastien Lecornu, a annoncé son intention d'en durcir l'accès. Ces annonces doivent maintenant se traduire en actes.
Il y a urgence à juguler cette dépense. Le nombre de bénéficiaires de l'AME a triplé en vingt ans, passant de 154 000 en 2004 à 465 000 aujourd'hui.
Comme l'indiquaient, dans leur rapport de 2019, l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale des affaires sociales (Igas), la migration pour soins est loin d'être un phénomène marginal, puisqu'elle concerne un quart des étrangers en situation irrégulière.
Plus récemment, Vincent Delahaye indiquait dans son propre rapport que 14 % des bénéficiaires de l'AME sont des déboutés du droit d'asile, dont plus de 5 800 signalés comme présentant un risque pour l'ordre public.
Nous savons aussi que l'AME offre un panier de soins quasi identique à celui de l'assurance maladie, gratuit, sans reste à charge ni autorisation préalable de l'administration.
Au fond, la question est la suivante : la France a-t-elle les moyens d'offrir le système le plus généreux d'Europe ? Nous gagnerions à nous inspirer de nos voisins, qui savent concilier humanité et responsabilité budgétaire.
Il est bien regrettable qu'aucune mesure budgétaire n'apparaisse dans le programme 183 pour maîtriser une dépense de guichet qui déraille structurellement.
Pourtant, il existe des pistes sérieuses pour réformer l'AME. Je songe à celles évoquées dans le rapport Evin-Stefanini et, plus récemment, dans le rapport de notre collègue Vincent Delahaye, que je viens de citer. Il est temps que l'exécutif s'en saisisse.
Dans cette perspective, je salue la proposition de la commission des affaires sociales du Sénat visant à généraliser l'accord préalable pour les soins non urgents. Cette mesure pourrait dégager jusqu'à 200 millions d'euros d'économies.
Les élus de notre groupe ne veulent ni stigmatiser les bénéficiaires de l'AME ni supprimer ce dispositif important. Ils proposent simplement de le recentrer sur les soins urgents et vitaux, la maternité et la protection des mineurs, conformément à sa philosophie d'origine. Pour ma part, j'ai déposé un amendement visant à flécher une partie des économies ainsi réalisées vers la prévention, autre priorité de cette mission, au titre du programme 204.
À cet égard, l'Institut national du cancer obtient 9,6 millions d'euros supplémentaires, dans le prolongement de la proposition de loi sénatoriale visant à créer un registre national des cancers, texte voté à l'unanimité du Parlement et dont nous avons parlé il y a encore quelques jours dans notre hémicycle.
L'Inca estimait ce projet à plus de 6 millions d'euros ; seuls 4,6 millions lui sont effectivement délégués aujourd'hui. Lesdits crédits suffiront-ils à garantir la mise en œuvre de cet outil dans de bonnes conditions ? Le cancer est la première cause de décès chez l'homme, la deuxième chez la femme. La lutte contre cette maladie doit rester une priorité nationale.
Mes chers collègues, la maîtrise de la dépense publique ne signifie pas moins de solidarité : elle est la condition pour que la solidarité puisse durer. Nonobstant les réserves que j'ai exprimées, les membres du groupe Les Républicains voteront les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour 2026, la mission « Santé » représente 1,67 milliard d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, en progression de plus de 12 % par rapport à 2025.
Cette hausse est toutefois en trompe-l'œil : elle est largement due à l'abondement européen du programme 379, de sorte que, hors reversement de la sécurité sociale, les crédits de la mission demeurent globalement stables.
Le programme 204, qui ne représente que 13 % des crédits de la mission, constitue toutefois un levier décisif en matière de prévention, de sécurité sanitaire et d'organisation de l'offre de soins. Alors que les besoins explosent – vieillissement, maladies chroniques, inégalités territoriales –, les marges de manœuvre demeurent contraintes, avec des crédits quasiment stables, voire en léger recul, après la baisse substantielle enregistrée au titre de la dernière loi de finances.
Nous nous réjouissons, bien sûr, de la hausse de 9,6 millions d'euros des crédits alloués à l'Institut national du cancer, qui porte sa dotation à près de 41,8 millions d'euros en 2026. Cette augmentation est indispensable pour mettre en œuvre le registre national des cancers, outil structurant pour mieux comprendre les causes, les inégalités et les trajectoires de prise en charge, en particulier chez les plus jeunes.
Nous tenons à rappeler l'attention particulière que nous portons à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont la situation financière demeure fragile. La hausse de ses crédits, notamment pour financer la construction d'un nouvel hôpital à Futuna afin de limiter les évacuations sanitaires vers la Nouvelle-Calédonie et l'Hexagone, va dans le bon sens. Ce choix répond aux alertes répétées quant aux besoins de ce territoire, souvent rappelées dans cet hémicycle par notre collègue Mikaele Kulimoetoke.
En outre, nous nous réjouissons du dépôt d'un amendement du Gouvernement visant à augmenter les crédits de l'action « Modernisation et offre de soins » afin de financer des créations de places en instituts de formation sanitaire et sociale.
Les élus du groupe RDPI resteront particulièrement attentifs au déploiement effectif d'une politique de prévention sur tout le territoire, y compris outre-mer, ainsi qu'à la robustesse de nos outils de sécurité sanitaire.
Le programme 183, « Protection maladie », presque intégralement consacré au financement de l'aide médicale de l'État, voit ses crédits reconduits à l'identique. Son budget représente l'essentiel de cette mission.
Au Sénat, l'AME est devenue au fil des ans et des budgets un totem politique. Nous assistons chaque année à une même surenchère, aux mêmes caricatures, aux mêmes amalgames, qui nous éloignent de ce que l'AME est réellement : un dispositif de santé publique destiné à éviter le renoncement aux soins des plus précaires, à prévenir les risques épidémiques pour l'ensemble de la population et, in fine, à éviter des hospitalisations tardives, lourdes et coûteuses.
En minorant de 200 millions d'euros les crédits de l'AME et en rigidifiant le dispositif par un accord préalable généralisé relatif aux soins dits non urgents, les amendements de la commission des finances tendent en réalité à fragiliser l'accès aux soins.
Un panier de soins encadré existe déjà pour l'AME, assorti d'une liste d'actes définis par décret et de mécanismes d'accord préalable pour certaines prestations. À quoi bon multiplier les procédures d'accord préalable, sinon pour complexifier inutilement un dispositif déjà encadré et nourrir de vieilles rengaines ?
Si débat il doit y avoir, si des économies sont à rechercher, que nos discussions portent sur l'ajustement du panier de soins ou sur des critères de santé publique, non sur une suspicion générale pesant sur des personnes parmi les plus précaires de notre pays.
Les deux décrets annoncés par Mme la ministre pour renforcer l'efficacité du dispositif d'AME et améliorer la lutte contre la fraude sans remettre en cause l'accès aux soins essentiels s'inscrivent dans une démarche à nos yeux utile. Ils participent de cet équilibre nécessaire entre impératifs sanitaires, responsabilité budgétaire et lisibilité du droit applicable, équilibre auquel le RDPI est attaché.
En cohérence avec ces réserves, les élus du groupe RDPI ont choisi de s'abstenir sur les crédits de la mission « Santé » tels qu'issus de nos travaux.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant d'aborder ce qui constitue près des trois quarts des crédits de la mission « Santé », c'est-à-dire l'aide médicale de l'État, j'évoquerai les moyens qui devraient être consacrés à la prévention.
Ils auraient dû figurer pleinement dans cette mission, mais ne sont malheureusement pas à la hauteur de ce qu'exigerait le fameux virage de la prévention, que nous soutenons, que nous accompagnons et qui est censé structurer le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.
Commençons par une remarque positive. Je me réjouis de constater que les crédits de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ont échappé à la « tronçonneuse » de la commission spéciale de l'Assemblée nationale chargée d'examiner le projet de loi de simplification de la vie économique, qui ambitionnait de supprimer absolument toutes les agences et autorités indépendantes.
L'Anses avait été mise sur la sellette, au motif que le fait de parler de sécurité sanitaire et alimentaire portait atteinte à la compétitivité agricole de la France. Mais l'Anses est toujours là, et c'est tant mieux. Nous n'avons jamais tant eu besoin d'elle, au moment où nous devons prévenir les maladies chroniques. Ses travaux et ses expertises sont indispensables, qu'il s'agisse des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS) ou de la santé au travail, qui constitue à juste titre une préoccupation de l'assurance maladie. Pour réduire les arrêts de travail, nous devons comprendre ce qui dysfonctionne en matière de santé au travail. Des crédits supplémentaires seraient nécessaires à cette fin.
Cette mission est également marquée par le manque chronique de moyens dévolus à la prévention, qu'il s'agisse, par exemple, de la prévention du VIH ou des pratiques et risques liés au chem-sex. Sur ces sujets, nous examinerons tout à l'heure des amendements de mes collègues.
J'en profite pour renouveler une proposition déjà présentée à vos prédécesseurs, madame la ministre : la création d'une agence nationale de la santé sexuelle et reproductive, qui assurerait un véritable pilotage de ces enjeux aujourd'hui dépourvus de coordination.
Consultez une agence régionale de santé (ARS) sur la pratique de l'avortement dans son ressort, vous verrez qu'il est très difficile d'obtenir les recensements. Les travaux de recherche sont dispersés. Bref, on déplore un vrai déficit d'information. Une agence nationale, sur le modèle de l'Inca, présenterait une réelle utilité.
Venons-en maintenant à l'aide médicale de l'État. Ce thème revient ici chaque année : c'est même un marronnier du projet de loi de finances et de la mission « Santé ». Il constitue une petite obsession de la majorité sénatoriale, qui, cette année encore, déposera une série d'amendements relevant davantage de l'affichage politique que de l'efficacité budgétaire et a fortiori sanitaire.
Je saisis cette occasion pour tordre le cou à un certain nombre de fantasmes liés à l'immigration. Non, l'AME ne rembourse pas de soins non essentiels : son panier de soins est déjà réduit et maîtrisé. Elle ne finance ni la procréation médicalement assistée (PMA), ni les cures thermales, ni la chirurgie esthétique. En 2023, cinq personnes ont bénéficié, à ce titre, d'un recollage d'oreilles : cinq personnes ! Pourtant, ce chiffre sert d'argument, comme s'il s'agissait là d'une pratique constante des bénéficiaires de l'AME.
L'AME finance d'abord des dépenses d'hospitalisation en obstétrique, difficiles à réduire, en dialyse et en chimiothérapie. Non, l'AME n'a pas un coût exorbitant : elle représente 0,5 % de nos dépenses de santé et évite des retards de soins autrement plus coûteux.
Non, l'AME ne coûte pas plus cher que l'absence d'AME. Les médecins ont d'ores et déjà annoncé que, par respect du serment d'Hippocrate, ils soigneront tous ceux qui en ont besoin. Restreindre l'AME revient tout simplement à accroître la dette des hôpitaux, à creuser la dette de la santé et à alourdir les dépenses futures.
Non, l'AME ne contribue pas davantage au fameux appel d'air migratoire. Au total, 50 % des personnes qui pourraient y prétendre n'ont jamais fait valoir leurs droits.
Enfin, tous les médecins – je l'ai déjà indiqué, et je le répète – sont hostiles à son durcissement. Puisqu'il faut écouter les premiers concernés, écoutons les médecins !
Comme chaque année, alors que nous pourrions débattre de nombreux sujets relevant de la prévention en matière de santé, on agite, à ce titre, un véritable chiffon rouge en direction de l'immigration. On peut s'interroger : ce discours vise-t-il à rapprocher la droite de l'extrême droite ? Il ne s'agit pas d'une suspicion de ma part : je me contente de lire les propos de Nicolas Sarkozy.
Les élus du groupe socialiste voteront donc, in fine, contre les crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Santé » s'inscrit cette année dans un contexte particulier.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 vient d'être adopté par l'Assemblée nationale. Ce texte ne revient pour ainsi dire sur aucune des exonérations de cotisations dont les effets sont pourtant plus que douteux sur l'emploi. Or, dans le même temps, les cotisations des collectivités territoriales, des hôpitaux et des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) augmentent en 2026, comme l'an dernier et probablement comme les années à venir. Nous aurons l'occasion d'y revenir à l'occasion de l'examen du PLFSS en seconde lecture, dès demain.
Les difficultés d'accès aux soins continuent de s'aggraver dans notre pays. Cette situation insupportable ne s'améliorera malheureusement pas en 2026 : les crédits de la mission « Santé » progressent uniquement en raison du programme 379, lequel n'est qu'éphémère.
Les politiques d'austérité menées depuis des années ont abîmé notre service public de santé. Elles alimentent en outre une crise future en faisant exploser le déficit des hôpitaux. Nous défendrons un amendement à ce sujet.
Au titre de la mission « Santé », les crédits destinés au pilotage de la politique de santé publique baissent de 14 %, ce qui représente 8 millions d'euros en moins en 2026.
Cette diminution fait écho aux annonces visant les agences régionales de santé. En effet, M. le Premier ministre a annoncé vouloir reporter une partie des missions des ARS vers les départements. Cette décision a fait réagir vivement onze anciens ministres de la santé – rien de moins. Pour notre part, nous y voyons un risque d'affaiblissement de la prise en charge des Français.
Nous sommes nous-mêmes souvent critiques à l'égard des agences régionales de santé. Nous sommes prêts à débattre de l'architecture la plus pertinente pour répondre aux besoins, dans une logique de proximité. Mais ce qui est annoncé ressemble davantage à un transfert de responsabilités vers des départements déjà en souffrance budgétaire ; à un transfert de missions destiné à alléger les finances de l'État, plus qu'à une réelle recherche de pilotage des politiques de santé, au plus près des besoins de nos concitoyens.
C'est d'autant plus regrettable que l'échelon local est le plus pertinent pour définir des politiques publiques en matière de santé ; mais encore faut-il se donner l'ambition de réduire les inégalités sociales et territoriales de santé, ce qui – nous le rappelons régulièrement – suppose une régulation nationale et des plans de rattrapage pour les territoires où les indicateurs de santé sont dans le rouge.
Finalement, le problème principal des ARS, c'est qu'au lieu de planifier et de piloter la santé publique, elles sont tenues d'appliquer des politiques d'austérité dans les régions.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Absolument !
Mme Céline Brulin. La mission « Santé » finance très majoritairement les dépenses de l'aide médicale de l'État.
Cette aide est instrumentalisée à des fins politiciennes, bien peu glorieuses, et souffre de contre-vérités régulièrement assénées, comme si le simple fait de les répéter allait leur donner réalité !
Rappelons donc que l'on compte 465 000 bénéficiaires de l'AME en France et que le taux de non-recours à ce dispositif s'élève à 49 % : ainsi, seule la moitié des potentiels bénéficiaires se soignent.
Aussi, la réduction du budget de l'AME entraînerait d'inévitables surcoûts de prise en charge de ces malades. Elle ferait peser une charge inconsidérée sur nos hôpitaux, qui sont déjà asphyxiés.
À nos yeux, l'aide médicale de l'État devrait être rattachée au régime général de sécurité sociale au titre de l'universalité de notre modèle. (Mme Anne Souyris manifeste son approbation.)
Je souligne, enfin, l'insuffisance des dotations de l'État à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) et au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva). Il en est de même, plus généralement, des crédits alloués à la prévention, laquelle est déjà le parent – très – pauvre du PLFSS.
Les élus de mon groupe voteront contre les crédits de la mission « Santé » pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et des travées du groupe SER.)
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, j'ai une mauvaise nouvelle pour vous…
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je commence à être habituée…
Mme Anne Souyris. En raison de votre département de résidence, vous avez une espérance de vie moindre que tous les orateurs et oratrices qui m'ont précédée à la tribune.
En France, les inégalités de santé explosent. Une récente étude européenne révèle que 44,5 % des moins diplômés se déclarent en mauvaise santé, contre 21,2 % des diplômés du supérieur, et pour cause : l'accès aux soins est toujours plus inégal et difficile, les facteurs socio-économiques se dégradent et les déterminants environnementaux de la santé ne sont pas pris en compte.
Nous attendions un budget de la santé ambitieux dans le projet de loi de finances : comme l'a dit le président de la commission, l'espoir fait vivre ! On nous l'a présenté comme en faible hausse. En fait, force est de constater qu'il stagne. Autrement dit, si l'on prend en compte l'inflation et l'augmentation des besoins, il diminue…
Le budget de la sécurité sociale, voté de justesse par l'Assemblée nationale, porte déjà le sceau de l'insuffisance. C'est pour cela que, plus que jamais, la prévention, la sécurité sanitaire, l'offre de soins et la protection maladie doivent être renforcées.
Tout d'abord, le budget de la prévention n'est relevé que de 0,98 %, après une baisse significative de 22 % l'an dernier. Rappelons-le : une diminution de la prévention entraîne systématiquement une augmentation des besoins de soins et, in fine, des coûts.
Nous devons faire de la santé environnementale une véritable priorité. Chaque semaine livre son lot de mauvaises nouvelles, confirmant l'omniprésence des polluants et leurs effets sur la santé. L'Anses a ainsi révélé, au début de ce mois, que l'acide trifluoroacétique (TFA), un résidu des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), est présent dans 92 % des eaux testées. Nous y reviendrons avec nos amendements.
Les risques liés aux PFAS sont multiples, nous le savons : cancers, atteintes de la fertilité, perturbations du développement, etc. Mes chers collègues, nous devons agir au lieu de nous contenter de regarder les trains passer ! Sans cela, ce sont les générations futures que nous risquons de sacrifier – je sais que vous êtes sensibles à cet argument.
Agir pour la prévention, afin d'accompagner et d'éduquer nos concitoyennes, est un enjeu sanitaire majeur. C'est pourquoi nous souhaitons étendre le dispositif strasbourgeois de l'ordonnance verte à d'autres territoires, pour lutter contre les perturbateurs endocriniens lors des mille premiers jours.
La déception qu'inspire cette mission est d'autant plus grande en matière de lutte contre le VIH-sida. « L'État veut-il la mort des associations de lutte contre le VIH-sida ? » C'est la question que posait l'association Actions Traitements en juillet dernier, alors que le ministère venait d'annoncer une coupe de 20 % dans les subventions des associations engagées contre le VIH.
Si la lutte contre le sida nous a appris quelque chose, c'est bien qu'il faut faire avec les malades et l'ensemble des personnes concernées. Les associations de santé communautaires suivent exactement cette démarche. Madame la ministre, voulez-vous vraiment la fin du VIH en France ? Si c'est le cas, n'hésitez surtout pas à émettre un avis favorable sur notre amendement.
Enfin, je dirai un mot de l'aide médicale de l'État. Je m'étonne de la stabilité des crédits alloués à ce dispositif, dont les dépenses augmentent mécaniquement, tant il devient difficile pour un étranger d'obtenir un simple rendez-vous en préfecture.
Ne cédons pas aux injonctions d'une droite qui s'éloigne de nos valeurs républicaines. À ce titre, les amendements des rapporteurs sont inquiétants. La réduction des paniers de soins et l'élargissement les accords préalables, comme le proposent certains, sont des mesures non seulement incompatibles avec nos principes de solidarité, mais aussi inefficaces. Tout le monde le sait, tous les rapports le soulignent : en définitive, il revient plus cher aux hôpitaux, dont la situation est déjà très complexe, de soigner en aval plutôt qu'en amont.
Le budget, tel qu'il nous est présenté, n'est pas à la hauteur des enjeux.
M. le président. Ma chère collègue, il faut conclure.
Mme Anne Souyris. En cette période de grande inquiétude collective, les crédits de cette mission ne permettront pas de mieux protéger ni de réduire les inégalités de santé.
Nos amendements en témoignent, nous suivons toujours le même cap : défendre les plus fragiles, la santé environnementale et la prévention. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Annie Le Houerou applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons cette après-midi les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2026.
Cette mission, structurée autour de trois programmes stratégiques, incarne, parallèlement au budget de la sécurité sociale, notre ambition pour un système de santé plus solide, plus innovant et plus proche des besoins des Français.
Au total, les crédits de la mission augmentent de 13 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. Ils atteignent ainsi 1,67 milliard d'euros.
Je commencerai par vous présenter le programme 204, relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins. Près de 214 millions d'euros en crédits de paiement y sont affectés, afin d'atteindre plusieurs objectifs.
Tout d'abord, il s'agit de piloter et de coordonner nos opérateurs pour renforcer l'efficacité de la prévention et de la sécurité sanitaire. L'Institut national du cancer, engagé dans la stratégie décennale de lutte contre les cancers 2021-2030, et l'Anses, chargée de l'approche « une seule santé », bénéficient en ce sens des crédits de cette mission.
Nous augmentons la dotation de l'Inca de 9,6 millions d'euros afin d'assurer le bon déploiement des registres nationaux du cancer, en cohérence avec la proposition de loi défendue avec force par votre assemblée et définitivement adoptée l'été dernier, grâce à votre mobilisation.
Ensuite, ce programme a vocation à soutenir la recherche et l'innovation.
La période actuelle exige de renforcer la recherche en santé des populations, en mobilisant les connaissances existantes et en soutenant des travaux interdisciplinaires. Le programme 204 finance, à ce titre, de nombreuses initiatives d'acteurs institutionnels et associatifs.
En outre, ce programme renforce la gestion des crises sanitaires. Cela se traduit notamment par la formation accrue des agents, l'appui au centre opérationnel de régulation et de réponse aux urgences sanitaires et sociales (Corruss), le développement des systèmes d'alerte et la constitution de stocks stratégiques européens au travers du programme RescEU, afin de répondre aux risques pandémiques et nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC).
Ce programme participe aussi à la modernisation de l'offre de soins. Je défends résolument, aux côtés du Premier ministre, la création du réseau France Santé, qui permettra à nos concitoyens de disposer d'une offre plus lisible et plus efficace.
En complément, ce programme renforce les crédits dédiés au service d'accès aux soins, qui couvre aujourd'hui 97 % de la population, ainsi que ceux alloués aux communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et à la création de 4 000 maisons de santé d'ici à 2027.
Enfin, une attention particulière est portée aux outre-mer au travers de ce programme.
À ce titre, le Gouvernement a déposé un amendement visant à augmenter les crédits du programme 204, afin de financer l'acquisition du scanner attendu à Wallis-et-Futuna et de garantir le fonctionnement de l'agence de santé de ce territoire. Ce geste concret, à la hauteur des besoins exprimés, traduit notre détermination à renforcer durablement l'accès aux soins dans nos territoires ultramarins.
Par ailleurs, pour répondre au besoin supplémentaire d'infirmiers, le Gouvernement défendra un amendement visant à augmenter les crédits de ce même programme de 215 millions d'euros, au même niveau que les années précédentes. Nous pourrons ainsi aider les régions à ouvrir de nouvelles places de formation en soins infirmiers et à réaliser les investissements nécessaires à l'accueil de ces étudiants.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement vous proposera de confirmer cette dotation budgétaire, dans le droit fil du protocole entre l'État et les régions de France. Cette méthode nous paraît préférable à l'introduction des crédits votés en première partie du PLF, contre l'avis du Gouvernement, sur la base d'une affectation de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).
J'en viens au programme 183, « Protection maladie », qui traduit l'effort de la solidarité nationale en faveur de l'accès aux soins des plus vulnérables. Il s'agit en particulier de financer le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) et l'aide médicale de l'État.
Les crédits de ce programme s'élèvent à 1,2 milliard d'euros. Ils sont reconduits aux mêmes montants depuis la loi de finances initiale pour 2024, le but étant de stabiliser ces dépenses dans le budget de l'État.
Pour mémoire, l'AME est un dispositif de santé publique essentiel, dont l'objectif est triple : humanitaire, sanitaire et budgétaire. Elle protège tout d'abord les personnes en situation de grande précarité, en leur garantissant un accès aux soins préventifs et curatifs indispensables. Elle contribue ensuite à la santé publique, en contenant la propagation de maladies contagieuses, ce qui protège l'ensemble de la population. Elle participe, enfin, d'une approche budgétaire responsable : en favorisant une prise en charge précoce, elle évite des hospitalisations tardives, plus coûteuses pour la collectivité.
Dans leur rapport sur l'AME de 2023, Claude Evin et Patrick Stefanini ont formulé plusieurs propositions pour renforcer la confiance dans ce dispositif et prévenir les abus. Je sais que votre assemblée y est légitimement très sensible.
Les travaux se poursuivent avec l'ensemble des parties prenantes. Là où des améliorations sont possibles pour lutter contre les détournements, le Gouvernement se penchera attentivement sur les propositions formulées et les mettra en œuvre le cas échéant.
J'évoquerai enfin le programme 379, qui est temporaire.
Son objectif est de permettre le reversement à la sécurité sociale des crédits européens relevant de la facilité européenne pour la reprise et la résilience (FRR). Pour mémoire, ce sont notamment 6 milliards d'euros investis sur cinq ans, destinés à financer des projets d'investissement dans nos établissements de santé et nos Ehpad, ainsi qu'à soutenir le développement et l'amélioration des outils numériques en santé.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cette mission allie les impératifs de redressement de nos finances publiques et de garantie des droits des plus vulnérables. Surtout, elle vise à accélérer la prévention, à renforcer durablement la sécurité sanitaire et à garantir, partout sur le territoire, une offre de soins de qualité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
santé
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Santé », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Santé |
1 668 771 256 |
1 672 101 236 |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins |
210 471 256 |
213 801 236 |
dont titre 2 |
700 000 |
700 000 |
Protection maladie |
1 216 300 000 |
1 216 300 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
242 000 000 |
242 000 000 |
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-2075 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
215 000 000 |
|
215 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
215 000 000 |
|
215 000 000 |
|
SOLDE |
+ 215 000 000 |
+ 215 000 000 |
||
La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement vise à augmenter de 215 millions d'euros les crédits du programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », pour financer les créations de places en instituts de formation infirmière dans les régions.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Le montant proposé par le Gouvernement, initialement de 191 millions d'euros, vient d'être porté à 215 millions d'euros.
Un protocole État-régions a été signé en 2022 pour trois ans pour soutenir la formation des infirmiers. Nous savons que c'est là un enjeu important. La formation professionnelle relève en effet de la compétence des régions.
Le protocole étant arrivé à son terme, le Gouvernement et les régions demandent la poursuite du cofinancement.
Madame la ministre, cette disposition a été votée en première partie du PLF, malgré un avis défavorable du Gouvernement. Ainsi, 214 millions d'euros de TICPE ont été affectés aux régions à ce titre. Si votre amendement était voté, le versement de l'État aux régions figurerait donc deux fois dans le texte du Sénat – une fois en première partie, une autre en seconde partie.
Dès lors, je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Madame la ministre, les dispositions que vous proposez ne nous semblent guère pertinentes.
Une convention a été conclue entre l'État et les régions. La présidente de l'association Régions de France, que je connais bien puisque je siège dans sa majorité, et l'ensemble des présidents de région bénéficient de cet accord avec le Gouvernement. Dans ces conditions, pourquoi proposer au Sénat des sommes revues à la baisse ? Je vous le dis sans détour, ce ne sont pas des façons de faire.
Les présidents de région et la présidente de Régions de France ne comprennent pas cette duplicité, qui consiste à renier vos engagements d'un jour à l'autre.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Madame la ministre, nous ne pouvons évidemment pas refuser un effort supplémentaire de 215 millions d'euros en faveur de la formation sanitaire et sociale. C'est pourquoi les élus du groupe écologiste voteront votre amendement.
Nous avons besoin de soignants dans nos territoires pour garantir l'accès aux soins, améliorer les conditions de travail et atteindre le ratio entre patients et soignants que nous avons voté et qui doit entrer en application.
Toutefois, nous nous interrogeons. Quelle est la politique du Gouvernement en matière de formation en santé ? Allez-vous inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la proposition de loi relative aux formations en santé de notre collègue Corinne Imbert et, à l'ordre du jour du Sénat, la proposition de loi contre les déserts médicaux de Guillaume Garot ?
Quelle place entendez-vous donner à la santé environnementale dans les formations sanitaires ? Quel est l'avis du Gouvernement sur l'expérimentation d'écoles normales des métiers de la santé, pour éviter les reproductions sociales et territoriales en la matière ?
En résumé, comme la commission, nous avons beaucoup de questions !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, le protocole État-régions a pris fin en 2025 et cet amendement vise à traduire les engagements pris, à cet égard, par l'ancien Premier ministre François Bayrou.
En effet, à la fin de la navette, l'ajout de ces crédits ne devra figurer que dans l'une des deux parties du PLF. Mais cette disposition me semble plus à sa place en seconde partie.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2075.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1684, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I.- Créer le programme :
Revalorisation des professions de la santé, du social, du sanitaire et du médico-social à l'appui de la généralisation de la prime Ségur
II.- En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
90 000 000 |
|
90 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Revalorisation des professions de la santé, du social, du sanitaire et du médico-social à l'appui de la généralisation de la prime Ségur |
90 000 000 |
|
90 000 000 |
|
TOTAL |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à étendre le complément de traitement indiciaire issu des accords du Ségur aux professionnels de santé qui n'en ont pas encore bénéficié.
Compte tenu de la manière dont cette prime a été déployée, il a fallu plaider la cause des différentes professions, une par une, chacune se considérant légitimement comme l'une des oubliées du Ségur. Dans le secteur médico-social, elles sont encore nombreuses à ne pas en bénéficier.
Notre amendement vise donc à prévoir des crédits supplémentaires afin que l'ensemble des salariés du secteur médico-social bénéficient de ce complément.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Je ne conteste pas la nécessité d'augmenter la rémunération de certains soignants. Toutefois, le Ségur de la santé a coûté 14 milliards d'euros et les mesures prises à ce titre n'ont pas été financées. Cette somme figure donc aujourd'hui dans les dizaines de milliards d'euros de déficit de la sécurité sociale.
M. Jean-Raymond Hugonet. En oui !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. De plus, de telles dispositions relèvent de la sécurité sociale et non de la mission « Santé ». Les seuls crédits qui relèvent du Ségur dans cette mission sont les investissements dans les hôpitaux, au travers du programme 379.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Gilbert Favreau. Bravo !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, même si votre amendement était adopté, le statut juridique des agents dont nous parlons ne permettrait pas la mise en œuvre de cette mesure. Aussi, mon avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. La demande de Mme Brulin est fondée. Cet amendement n'a peut-être pas été déposé sur la bonne mission ; reste que certaines professions du secteur médico-social à qui l'on avait promis le Ségur n'en ont toujours pas obtenu le bénéfice.
En outre, M. le rapporteur spécial le souligne avec raison, le Ségur a coûté 14 milliards d'euros, qui n'ont pas été financés. C'est un vrai problème, sur lequel Mme Brulin fait bien d'appeler notre attention.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Vous le savez tous : les amendements sont aussi le moyen d'exprimer certaines exigences, même s'ils ne sont pas toujours déposés au bon endroit.
Je remercie M. Chasseing de rappeler lui aussi que de très nombreux salariés ne bénéficient toujours pas du Ségur, alors qu'ils devraient y avoir droit.
Monsieur le rapporteur spécial, je vous rejoins quant à la non-compensation des 14 milliards d'euros. En effet, lorsque les salaires ne sont pas revalorisés, nous finissons par nous retrouver face à des murs budgétaires : sans doute serait-il plus sain de les augmenter régulièrement !
Je précise, à ce propos, que le Ségur a privilégié le versement de primes. Or des augmentations de salaires auraient participé aux cotisations à la sécurité sociale, contribuant ainsi à son financement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1684.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2057, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Soutien aux structures associatives sanitaires et médico-sociales non lucratives pour le versement de la prime Ségur
II. -En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
85 000 000 |
85 000 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Soutien aux structures associatives sanitaires et médico-sociales non lucratives pour le versement de la prime Ségur |
85 000 000 |
85 000 000 |
||
TOTAL |
85 000 000 |
85 000 000 |
85 000 000 |
85 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Le Ségur de la santé devait être une avancée en matière d'équité ; aujourd'hui, pour des centaines de structures associatives sanitaires et médico-sociales, il est devenu un fardeau financier insoutenable.
Ces associations, qui œuvrent pour l'égalité entre les femmes et les hommes ou pour l'inclusion, luttent contre le VIH, accompagnent des personnes en situation d'addiction et tant d'autres, n'ont reçu aucune compensation pérenne pour financer cette prime. Or cette dernière représente, pour l'employeur, un coût supplémentaire annuel d'environ 5 000 euros par employé.
Les chiffres sont implacables. Une enquête de Sidaction montre que seules 6 % des associations peuvent assumer cette charge. Plus de la moitié ne peuvent pas payer la prime du tout.
Pour le planning familial d'Ille-et-Vilaine, par exemple, le versement de la prime représente 60 000 euros par an. Résultat ? Des postes supprimés, des actions vitales abandonnées et un risque réel pour la santé publique. Ce n'est pas acceptable.
L'État a annoncé l'extension du Ségur : il doit en financer les effets. Il manque aujourd'hui près de 450 millions d'euros aux agences régionales de santé (ARS) et 85 millions d'euros aux départements.
Soutenir ces associations, c'est œuvrer pour la prévention, le soin et la lutte contre les inégalités ; c'est défendre ceux qui assurent notre cohésion sociale au quotidien.
Madame la ministre, ne laissons pas mourir nos associations !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les raisons précédemment évoquées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° II-2332, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
6 000 000 |
|
6 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
6 000 000 |
|
6 000 000 |
|
SOLDE |
+ 6 000 000 |
+ 6 000 000 |
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La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement vise à allouer 6 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna pour 2026, afin de sécuriser son budget de fonctionnement et de financer un nouveau scanner médical au sein de l'hôpital de Mata'Utu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement a été déposé tardivement, juste avant le début de la séance.
Ces dispositions m'ont quelque peu surpris, car la situation de l'agence de Wallis-et-Futuna est connue de longue date. Depuis que je suis rapporteur spécial, ces problèmes de financement me sont signalés. En effet, les nombreux transports de patients jusqu'en Nouvelle-Calédonie, voire parfois en métropole, sont très coûteux.
Madame la ministre, je doute que vous ayez découvert au dernier moment cette sous-budgétisation : le projet de loi de finances est en discussion depuis un certain temps.
Cela étant, je ne peux pas m'opposer à cet amendement, car les besoins sont réels.
En outre, il serait nécessaire d'ouvrir une structure à Wallis-et-Futuna, ne serait-ce qu'un dispensaire, afin de déplacer les soignants et non les patients. Nous pourrions ainsi réaliser des économies. J'espère que ce sera le cas, si cet abondement de 6 millions d'euros est accepté en définitive.
La commission n'a pas pu délibérer sur le sujet, mais, à titre personnel, j'émets un avis de sagesse.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous aurons à débattre dès demain du budget de la sécurité sociale, à l'occasion de l'examen en nouvelle lecture du PLFSS. Nous y avons ajouté 100 millions d'euros pour les outre-mer au titre du fonds d'investissement régional. Vous le savez, Wallis-et-Futuna ne dispose pas d'agence régionale de santé : il convenait de ne pas oublier ce territoire.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2332.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos II-1107 et II-1099 ne sont pas soutenus.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-27 est présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-1412 est présenté par Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
SOLDE |
- 200 000 000 |
- 200 000 000 |
||
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° II-27.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet l'aide médicale de l'État – je précise que le Sénat a déjà adopté de telles dispositions l'an dernier.
Madame la ministre, les crédits figurant actuellement dans ce PLF sont insuffisants pour faire face aux dépenses réelles de l'aide médicale de l'État.
Nous ne sommes pas favorables à la suppression de ce dispositif, selon nous absolument indispensable. En revanche, nous souhaiterions le réguler davantage. Plusieurs intervenants l'ont dit : la France est très généreuse, dans ce domaine comme dans bien d'autres.
Nous avons comparé notre situation à celle de plusieurs pays étrangers. Au titre des soins non urgents, nous pourrions nous aligner sur l'Allemagne : il me semble que ce pays fait preuve de solidarité envers toutes les personnes présentes sur son territoire.
En tout état de cause, cet amendement tend à minorer de 200 millions d'euros les crédits alloués à l'AME.
Madame la ministre, vous engagerez-vous, cette après-midi, à prendre le décret réformant le panier de soins urgents et à exclure l'extrait d'acte de naissance de la liste des documents d'identité valables pour l'obtention de la carte d'AME ?
En complément de cette disposition, je présenterai dans quelques instants un amendement tendant, par l'insertion d'un article additionnel, à soumettre les prestations programmées non urgentes – je le souligne – prises en charge au titre de l'AME à l'accord préalable de l'assurance maladie, y compris lorsque le bénéficiaire est présent sur notre territoire depuis plus de neuf mois.
M. le président. La parole est à Mme Gruny, au nom de la commission des affaires sociales, pour présenter l'amendement n° II-1412.
Mme Pascale Gruny, au nom de la commission des affaires sociales. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-299 rectifié septies, présenté par Mme Aeschlimann, M. Naturel, Mmes Guidez et Carrère-Gée, M. L. Vogel, Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. Levi, Mme Berthet, MM. Panunzi et Rojouan, Mme Bellamy, MM. J.B. Blanc, Genet et Klinger, Mme Sollogoub, MM. H. Leroy, Reynaud, Piednoir, Frassa et Delia, Mmes Pluchet, Malet, Romagny, Bellurot et Bourcier, M. Fargeot et Mmes Evren et Lermytte, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
50 000 000 |
|
50 000 000 |
|
Protection maladie |
|
200 000 000 |
|
200 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
50 000 000 |
200 000 000 |
50 000 000 |
200 000 000 |
SOLDE |
- 150 000 000 |
- 150 000 000 |
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La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement vise à réduire de 200 millions d'euros les crédits alloués à l'aide médicale de l'État, en recentrant le panier de soins sur les soins vitaux et urgents. C'est ce que font la plupart des pays européens.
Je rappelle que le coût de l'AME a connu une progression fulgurante : il s'est établi à plus de 1,3 milliard d'euros en 2024, contre 678 millions d'euros en 2015, et le nombre de ses bénéficiaires a été multiplié par trois en vingt ans. Or les soins couverts par l'AME, y compris les soins non urgents, sont intégralement pris en charge.
Plusieurs rapports récents soulignent que la réforme du panier de soins emporterait des économies substantielles, ce qui est appréciable dans un contexte appelant à la maîtrise des dépenses et alors que des efforts sont demandés à nos concitoyens, aux collectivités territoriales et aux professionnels de santé.
J'ajoute que, sur les 200 millions d'euros économisés, je propose d'allouer 50 millions d'euros à la prévention.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-299 rectifié septies ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement n'a pas tout à fait le même objet que les amendements identiques de nos deux commissions, bien que le montant de minoration des crédits alloués à l'AME soit le même.
En effet, cet amendement vise non pas à étendre le régime d'accord préalable à la totalité des soins non urgents, mais à revoir le panier de soins.
Ma chère collègue, si les montants étaient différents et si vous proposiez une économie de 400 millions d'euros, je pourrais considérer que nos propositions sont complémentaires. Mais il n'en est rien : je vous prie, en conséquence, de bien vouloir retirer votre amendement.
En tout état de cause, j'attends l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements en discussion commune, car je souhaite savoir ce qu'il compte faire pour maîtriser les dépenses d'AME.
Nous en parlons depuis des années, mais rien ne bouge, ou si peu. (M. Olivier Rietmann le confirme.) Entendez-vous prendre enfin des mesures, madame la ministre ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Comme je l'ai indiqué précédemment, des concertations sont en cours, regroupant l'ensemble des parties prenantes, afin de tirer les conséquences du rapport Stefanini-Evin.
Je demande donc le retrait de l'ensemble des amendements en discussion commune. À défaut, l'avis serait défavorable.
M. Thomas Dossus. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Pour ma part, je voterai ces amendements.
C'est une question de bon sens, mes chers collègues. Nous avons ce débat depuis dix ans. Les Français sont à bout. (M. Thomas Dossus s'exclame.) Ils en ont vraiment assez de voir qu'on leur demande des efforts et que, dans le même temps, malgré la dérive des coûts de l'AME et les abus dont ce dispositif fait l'objet,…
M. Thomas Dossus. C'est faux !
Mme Valérie Boyer. … nous n'arrivons pas à prendre de décision. Je soutiens donc pleinement l'initiative de notre collègue Marie-Do Aeschlimann, qui me paraît frappée au coin du bon sens.
Cela fait des années que nous demandons et votons ce dispositif. En cette période d'efforts budgétaires, la moindre des choses serait d'adopter à la fois cet amendement et les amendements identiques de nos commissions. Ce faisant, nous ferons preuve de cohérence et nous répondrons aux attentes de nos concitoyens.
Alors que de fortes tensions s'exercent sur notre système de soins, du fait d'une hausse continue de la demande, je ne comprends pas votre avis, monsieur le rapporteur spécial. Nous ne proposons pas de ne pas soigner les gens…
Mme Émilienne Poumirol. Bien sûr que si !
Mme Valérie Boyer. Nous proposons seulement de restreindre le panier de soins, comme le font les autres pays européens.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous nous opposerons fermement à ces amendements, qui relèvent non pas du bon sens, mais d'un dogme, d'un chiffon rouge que vous agitez depuis des années.
Mme Valérie Boyer. Et voilà…
Mme Émilienne Poumirol. Quels sont les soins qui, selon vous, relèvent d'une urgence médicale ? Ne soignerons-nous plus que les infarctus, les accidents vasculaires cérébraux (AVC), les détresses respiratoires aiguës, autrement dit les pathologies qui, sans prise en charge, pourraient conduire au décès quelques heures après leur survenue ? Cela pose à mon sens un problème éthique.
Quid, par exemple, des patients atteints de cancer ? Cessera-t-on de prendre en charge leur traitement au motif que leur vie n'est pas menacée dans la minute et que, grâce aux progrès de la médecine, de nombreux malades connaissent même de longues périodes de rémission ? (Mme Corinne Féret acquiesce.) En somme, quels sont les soins que vous qualifiez d'urgents ?
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Vous avez une vision vraiment caricaturale, mes chers collègues : la situation durerait depuis dix ans, les gens n'en pourraient plus… Je rappelle que l'AME coûte aujourd'hui 1,2 milliard d'euros, soit 0,5 % des dépenses de santé, et que le taux de non-recours est extrêmement élevé : vous le savez tout comme moi, 49 % des personnes éligibles à l'AME n'en bénéficient pas.
Vous estimez pourtant qu'il faudrait demander à des étrangers de ne pas se soigner, que ceux qui se font soigner devraient se sentir coupables. À vous entendre, il y a beaucoup d'abus. C'est totalement faux, et vous le savez aussi !
Vous évoquez enfin des soins non urgents. Les soins obstétriques ne sont donc pas urgents ? La dialyse, ce n'est pas urgent ? La chimiothérapie, ce n'est pas urgent ? La radiothérapie, ce n'est pas urgent ? Rien de tout cela n'est urgent ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Cette notion d'urgence médicale, qui a toute son importance, doit être abordée selon moi de deux manières.
La première a trait à l'humanisme. À quel moment renonce-t-on à soigner une personne, au risque de la laisser mourir à moyen terme ? Une jambe cassée n'est pas urgente en elle-même, mais, si elle n'est pas soignée, elle peut s'infecter. Or si cette infection s'aggrave, elle peut devenir une urgence médicale.
La seconde découle de la première : si nous soignons plus tard, non seulement le risque de létalité de la pathologie augmente, mais les soins se révèlent plus coûteux. Nous nous exposons en quelque sorte à une double peine, puisque notre démocratie subira une peine d'indignité, quand nos hôpitaux, eux, subiront une peine budgétaire.
Heureusement, nous avons des médecins qui soignent ; ils prendront les patients en charge, mais au tarif hospitalier, ce qui ne contribuera pas à améliorer la situation de nos hôpitaux, qui sont déjà sous l'eau.
Cessez donc de ressasser ce sujet comme vous le faites depuis dix ans et regardez les choses en face, mes chers collègues…
Mme Valérie Boyer. Précisément !
Mme Anne Souyris. Tous les rapports tirent exactement les mêmes conclusions.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Il n'est pas question de remettre en cause la prise en charge des affections de longue durée, telles que les cancers et les pathologies cardiovasculaires, ou encore des AVC, qui relèvent des urgences.
Les pneumonies et même les otites sont aussi des urgences. Les prothèses de hanche, de genou ou d'épaule, en revanche… (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Mme Émilienne Poumirol. Il existe des protocoles !
M. Daniel Chasseing. … sont en effet réservées aux personnes présentes sur le territoire depuis plus de neuf mois et conditionnées à un accord préalable de l'assurance maladie, même si j'estime que la délivrance de ce type de soins devrait faire l'objet de contrôles plus approfondis.
Si nous adoptons ces amendements, les bénéficiaires de l'AME ne pourront-ils plus être soignés ?
Mme Émilienne Poumirol. Oui !
M. Daniel Chasseing. Non, mes chers collègues. Si les crédits se révèlent insuffisants, il reviendra à l'État de les abonder.
Bien sûr, les urgences doivent être totalement prises en charge. Mais, en parallèle, nous pouvons mieux encadrer et mieux contrôler les soins non urgents.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Votre argumentation m'étonne, mes chers collègues. À la tribune, plusieurs d'entre vous ont qualifié les crédits de cette mission d'insincères, au motif que l'AME coûterait beaucoup plus cher que ce qui est prévu pour la financer. Mais, à présent, vous proposez de diminuer ces crédits…
Vous faites valoir que l'État ne joue pas pleinement son rôle, qu'il se défausse sur la sécurité sociale. Sur ce point, je peux vous rejoindre.
À défaut de nous écouter, nous qui vous enjoignons de ne pas prendre ce chemin, écoutez au moins les professionnels de santé, qui, dans une très belle unanimité, vous le disent clairement : quand on est soignant, on soigne sans se poser de question.
Et si vous n'écoutez pas votre propre humanité, écoutez votre volonté de faire des économies. Les soins qui ne seront pas pris en charge à temps par l'AME coûteront par la suite bien plus cher à nos hôpitaux et à la société tout entière.
Vous nous proposez d'élargir le périmètre des soins conditionnés à l'accord préalable de l'assurance maladie. Ce périmètre est déjà très large, certains soins n'étant de toute façon délivrés qu'aux personnes résidant sur notre territoire depuis plus de neuf mois. Or, dans la plupart des cas, l'assurance maladie donnera son accord à la délivrance des soins, et vous n'aurez fait aucune économie. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ce sujet ne mérite pas de faire l'objet d'une telle instrumentalisation politicienne : comme tous les autres, il suppose un débat sain, serein et pertinent. Je regrette que ce ne soit pas le cas.
M. Laurent Somon. Cela fait deux ans que nous le demandons !
M. Olivier Rietmann. Nous l'avons eu, ce débat !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Personne n'est là pour distribuer des brevets d'humanité, mes chers collègues. Lorsque nous fixons des règles d'accès aux soins ou de prise en charge pour d'autres types de patients, nous n'en sommes pas moins humains.
Notre travail consiste à fixer des règles : c'est ce que nous faisons en permanence au sein de la commission des affaires sociales.
Mme Valérie Boyer. Très bien !
Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le rapporteur spécial, l'extension du périmètre de l'accord préalable et la réforme du panier de soins, que je propose, ne sont pas des démarches exclusives l'une de l'autre.
Nous savons qu'il existe un potentiel de 200 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle, comme vous-même et comme Mme Lassarade, je propose de minorer les crédits de ce montant.
M. Chasseing l'a très bien souligné, il s'agit d'une dépense de guichet : les mesures de régulation proposées ne nous empêcheraient pas de répondre à une hausse de la demande. Il en est du reste déjà ainsi, puisque nous avons consommé 1,387 milliard d'euros alors que les crédits prévus dans la loi de finances ne s'élevaient qu'à 1,2 milliard d'euros. Les patients continuent d'être pris en charge et l'État abonde les crédits en conséquence.
Cela ne nous empêche pas de fixer des règles, comme je le propose, pour encadrer cette dépense. Dans le contexte budgétaire difficile que nous connaissons, nous demandons à nos concitoyens de faire des efforts. Il n'y a pas de raison que les bénéficiaires de l'AME, eux, n'en fassent pas. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Le Premier ministre Sébastien Lecornu l'a fait savoir il n'y a pas si longtemps : s'il ne souhaite pas la suppression de l'AME, il est favorable à des mesures techniques permettant de l'encadrer. C'est exactement ce que je vous propose, madame la ministre.
M. Olivier Rietmann. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je me réjouis de constater que chacun ici souhaite conserver l'AME. C'est déjà une bonne nouvelle.
Mme Sophie Primas. C'est vrai ! Ceux qui veulent la supprimer ne sont pas là…
M. Martin Lévrier. Méfions-nous par ailleurs de l'écart entre la réalité et le ressenti, mes chers collègues. Dès lors qu'un début de réalité se transforme en ressenti et que l'on fait gonfler ce ressenti, il est bien difficile, ensuite, de l'expliquer politiquement.
Je le rappelle à mon tour, les dépenses d'AME ne constituent que 0,5 % des dépenses de l'assurance maladie. C'est bien peu ! Prenons garde à ne pas transformer notre débat, qui doit porter sur la santé publique, en un débat politique risquant de dériver vers des sujets malsains.
Je ne suis pas médecin, mais, même si je l'étais, je serais avant tout un parlementaire au sein de cet hémicycle. En tant que parlementaire, notre rôle n'est pas de déterminer ce qui relève de la santé ou encore ce qui relève de l'urgence : il est de comprendre comment ces dispositifs fonctionnent.
Si l'on veut réduire les dépenses d'AME, il faut travailler sur le panier de soins. N'étant toutefois pas compétent pour décider quels soins doivent ou non faire partie de ce panier, je vous propose de nous en remettre à la consultation en cours, sur la base du rapport Evin-Stefanini, et de faire confiance à Mme la ministre, mes chers collègues.
Prenons le temps nécessaire : ce débat, qui n'est pas toujours sain, se dégonflera de lui-même. Travaillons sur le panier de soins. C'est la seule solution pour réduire ces dépenses, car ce n'est pas par la sur-réglementation que nous réglerons un problème de santé publique.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.
Mme Annie Le Houerou. En effet, faisons confiance aux médecins !
Les auteurs de ces amendements cherchent à imposer une vision dogmatique et stigmatisante des bénéficiaires de l'AME. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si certaines de ces propositions, bien que non soutenues, émanent de sénateurs non inscrits, et que d'autres sont défendues par la voix de Mme Boyer.
Je rappelle que, au-delà d'une grande majorité de médecins, huit anciens ministres de la santé ont publié une tribune pour rappeler l'importance de l'aide médicale de l'État.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Chers collègues, je vous le confirme : nous avons ce débat depuis des années, puisque vous vous acharnez contre l'AME. Vous voulez sans cesse la restreindre, voire, certaines années, la supprimer purement et simplement.
Aujourd'hui, vous nous proposez de restreindre le panier de soins, afin de consolider le discours raciste… (Vives protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Valérie Boyer. Rappel au règlement !
Mme Lauriane Josende. Ce n'est pas possible !
M. Thomas Dossus. … par lequel vous entendez faire peser les efforts budgétaires sur les étrangers.
M. le président. On ne s'adresse pas à ses collègues de la sorte, monsieur Dossus !
M. Thomas Dossus. Il faut tout de même appeler un chat un chat ! (Nouvelles protestations.)
M. le président. Poursuivez…
M. Thomas Dossus. Madame Aeschlimann, vous voulez toujours faire porter les efforts sur les mêmes, jamais sur ceux qui, ces dernières années, ont profité des cadeaux du Gouvernement.
Vous ergotez ainsi sur un dispositif dont le coût ne représente que 0,5 % des dépenses de santé. Or les économies que vous espérez ne sont même pas garanties,…
Mme Valérie Boyer. Mais les hausses de dépenses, elles, le sont !
M. Thomas Dossus. … puisqu'en diminuant le panier de soins vous reporterez la prise en charge d'un certain nombre de pathologies sur l'hôpital, avec, à la clef, la même explosion des coûts que celle qu'a connue l'Allemagne.
Cette année comme les autres, nous combattrons ces propositions, et nous les combattrons encore, dussiez-vous revenir à la charge pendant dix ans !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Certains collègues de gauche se sont émus que 49 % des personnes éligibles à l'AME n'en soient pas bénéficiaires. Mais toutes les personnes qui sont en situation irrégulière sur notre territoire ne sont pas en mauvaise santé,…
Mme Corinne Féret. Heureusement !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. … d'autant qu'il s'agit souvent de personnes jeunes, mes chers collègues.
Ce n'est pas parce qu'un certain nombre de ressortissants étrangers en situation irrégulière ne font pas la démarche de demander leur carte d'AME qu'ils n'ont pas droit ou accès à cette aide.
À la tribune, Mme Souyris déplorait que certaines personnes étrangères rencontrent des difficultés pour obtenir un rendez-vous en préfecture. Or c'est non pas la préfecture, mais la caisse primaire d'assurance maladie qui délivre la carte d'AME.
M. Olivier Rietmann. Eh oui !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Pour m'être rendu dans les services des caisses de deux départements, je puis témoigner que la délivrance de cette carte est très bien régulée et que les services ne rencontrent aucune difficulté d'accueil.
Nous proposons non pas la suppression, mais la régulation de l'AME, afin d'aligner notre pays sur les pratiques européennes, sachant qu'en l'état du droit un seul État de l'Union est plus généreux que le nôtre. Dans de nombreux pays, comme l'Allemagne, le panier de soins non urgents est plus restreint qu'en France.
Pour que les choses soient claires, permettez-moi de citer quelques-uns des soins que nous envisageons d'exclure : les actes de masso-kinésithérapie, les appareillages auditifs et optiques, la pose de prothèses dentaires, l'hospitalisation à domicile (HAD) et les soins médicaux de réadaptation. (Mme Émilienne Poumirol s'exclame.) Une telle décision ne ferait peser aucun risque vital sur les bénéficiaires de l'AME.
Madame Aeschlimann, comme je l'ai indiqué précédemment, j'estime que votre amendement est satisfait par les amendements identiques de nos deux commissions.
Le coût réel de l'AME avoisine 1,4 milliard d'euros. Certains diront que ce n'est pas grand-chose dans l'océan de nos dépenses publiques. Je considère toutefois que le redressement de nos finances suppose que des efforts soient consentis partout.
Certains voudraient faire peser l'effort exclusivement sur les riches ; d'autres pointent du doigt les seuls immigrés. Je le répète, je pense qu'il faut faire des efforts partout.
À l'heure où nous demandons des efforts à nos compatriotes, nous devons appliquer la même rigueur à tous les postes budgétaires.
Ainsi, l'amendement n° II-27 vise à tirer les conséquences de la restriction du panier de soins, mais aussi de l'élargissement, que je proposerai par l'amendement n° II-29, de l'accord préalable sollicité auprès de l'assurance maladie pour tout soin non urgent délivré à un bénéficiaire de l'AME, quelle que soit sa durée de séjour sur notre territoire.
Je demande donc le retrait de l'amendement n° II-299 rectifié septies, et je vous appelle à adopter les amendements identiques nos II-27 et II-1412, mes chers collègues.
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Raymond Hugonet. Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 33, monsieur le président.
Si chacun connaît votre sens de la mesure, monsieur Dossus, je vous appelle toutefois à la raison. Il est tout bonnement inadmissible d'insulter ses collègues en les qualifiant de racistes.
M. Thomas Dossus. Je parlais de la démarche !
M. Jean-Raymond Hugonet. Cette démarche est entreprise par des êtres humains, qui se tiennent devant vous : un peu de calme, je vous prie. Et que chacun balaie devant sa porte !
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
ÉTAT B (Suite)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-27 et II-1412.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 113 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 336 |
| Pour l'adoption | 200 |
| Contre | 136 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'amendement n° II-299 rectifié septies n'a plus d'objet.
L'amendement n° II-1683, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Reprise du déficit hospitalier
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
1 000 000 000 |
|
1 000 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Reprise du déficit hospitalier |
1 000 000 000 |
|
1 000 000 000 |
|
TOTAL |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à alerter sur les déficits chroniques de nos hôpitaux, dont la Fédération hospitalière de France (FHF) estime que le montant s'établit entre 2,7 et 2,9 milliards d'euros en 2024.
Ce niveau inédit de déficit ne tient pas à des difficultés ou à des erreurs de gestion. Il ne tient pas davantage à un manque d'efficience, comme le prétendent certains. Il résulte du sous-financement chronique de nos hôpitaux, en particulier à la non-compensation de la prime Ségur, que nous avons déjà évoquée.
Même avec un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) porté à 3 %, nous ne pourrons pas remédier à cette situation, d'autant que les cotisations des hôpitaux à la CNRACL augmenteront de trois points cette année encore, comme ce fut déjà le cas l'année dernière et comme ce sera le cas l'année prochaine, puis les suivantes.
Il est grand temps de donner de réels moyens aux hôpitaux, en commençant à tout le moins par compenser les décisions prises par l'État.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement vise à allouer 1 milliard d'euros à la reprise du déficit hospitalier.
La situation des hôpitaux publics est extrêmement contrainte. Le niveau de déficit atteint en 2024 constitue un record depuis 2005 ; en 2025, il devrait avoisiner 3 milliards d'euros.
Si je ne nie pas cette contrainte, je rappelle que le financement des hôpitaux relève largement du PLFSS. J'ai d'ailleurs cru comprendre que, grâce à l'octroi, annoncé par M. le Premier ministre, d'une enveloppe exceptionnelle de 850 millions d'euros visant à garantir des tarifs stables à l'hôpital en 2026 et à soutenir les équipes médico-soignantes engagées au quotidien pour la prise en charge des Français, la version du PLFSS adoptée par l'Assemblée nationale assure une hausse de 3,5 milliards d'euros des moyens de l'hôpital.
De plus, je constate que votre amendement est gagé sur une minoration des crédits de l'AME, dispositif auquel vous venez pourtant d'exprimer votre attachement, ma chère collègue.
Mme Céline Brulin. Vous connaissez les règles budgétaires !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Je m'étonne qu'après vous être opposée à mon amendement, qui tendait à diminuer de 200 millions d'euros les crédits alloués à ce dispositif, vous proposiez une coupe de 1 milliard d'euros dans les mêmes crédits…
En tout état de cause, la reprise des déficits des hôpitaux pourrait sans doute plus opportunément être réalisée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous avons eu ce débat lors de l'examen du PLFSS en première lecture, et nous l'aurons de nouveau demain, madame la sénatrice. Sachez que le Gouvernement proposera alors de fixer l'Ondam des établissements hospitaliers à 3,3 %, ce qui permettra aux hôpitaux de retenir des tarifs compatibles avec l'arrêt du creusement de ce déficit et le retour à une trajectoire correcte.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Monsieur le rapporteur spécial, je prends votre remarque sur notre proposition de prélever les crédits sur l'AME comme un trait d'humour. Il ne vous aura évidemment pas échappé que nous avons invité le Gouvernement à lever le gage. Vous connaissez comme nous les contraintes liées aux amendements que nous déposons sur les missions.
Pour ma part, je connais votre sens de l'humour... (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1683.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-377 rectifié ter, présenté par MM. Théophile, Rambaud et Buis, Mme Phinera-Horth, M. Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Iacovelli et Buval, Mme Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile vise à renforcer les moyens consacrés au réseau Maisons des femmes, qui est aujourd'hui l'un des derniers remparts pour des milliers de victimes de violences conjugales.
Les chiffres sont glaçants : 272 400 victimes en 2024 et déjà 89 féminicides conjugaux au 26 novembre 2025, soit une femme tuée tous les quatre jours. Pourtant, sur le terrain, les structures sont saturées, sous-financées et trop peu nombreuses. Les victimes se heurtent à un manque de places, à un manque de personnel formé et parfois même à l'impossibilité d'être accueillies en urgence, alors qu'il s'agit d'un risque vital.
Par cet amendement, nous proposons d'ajouter 5 millions d'euros au programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », pour renforcer le réseau Maisons des femmes et garantir un accompagnement médical, psychologique, social et juridique digne de ce nom.
Il ne s'agit pas d'un luxe : c'est une nécessité absolue, celle de protéger des vies, de prévenir des drames et d'éviter que des femmes en danger ne soient replongées dans l'insécurité par manque de moyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement vise à allouer 5 millions d'euros au réseau Maisons des femmes, qui est une association importante œuvrant pour une cause qui ne l'est pas moins. Toutefois, son financement me paraît relever davantage de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » que de la mission « Santé ».
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'appeler notre attention sur ces maisons d'accueil pour les femmes victimes de violences.
Notre pays compte environ 120 Maisons des femmes. Un budget pérenne de 18,7 millions d'euros, inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est alloué à ce réseau.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un défavorable.
M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-377 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Martin Lévrier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-377 rectifié ter est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1228 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° II-1235 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
2 000 000 |
|
2 000 000 |
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Martin Lévrier. Ces deux amendements ont pour objet les maisons sport-santé (MSS), qui sont devenues un outil majeur de prévention. Depuis 2020, 872 000 personnes y ont déjà été accompagnées dans le cadre de la lutte contre le diabète, l'obésité, le cancer ou les maladies cardiovasculaires.
Pourtant, le modèle économique de ces structures est aujourd'hui fragilisé, faute de financement pérenne. Les équipes sont en contrat à durée déterminée (CDD) et il existe des disparités régionales très marquées.
L'amendement n° II-1228 rectifié bis vise à créer une dotation « socle » nationale permettant de financer un coordinateur, un système d'information sécurisé et un fonctionnement stable pour chaque MSS. Pour garantir un accès équitable à la prévention, l'investissement demandé est de 5 millions d'euros, soit environ 9 000 euros par établissement.
L'amendement n° II-1235 rectifié bis vise quant à lui à soutenir les publics les plus éloignés de la prévention, comme les personnes âgées isolées, les populations précaires, les habitants des zones rurales, insulaires ou enclavées, les personnes en situation de handicap ou les jeunes en décrochage. Alors que ce sont eux qui cumulent le plus de facteurs de risque, ils bénéficient le moins des dispositifs existants.
Les maisons sport-santé veulent agir davantage auprès de ces publics, mais elles manquent de moyens pour organiser des actions d'« aller vers », pour intervenir dans les structures sociales ou médico-sociales ou pour couvrir de vastes territoires mal desservis.
Il convient donc d'augmenter de 2 millions d'euros les crédits permettant de financer ces actions ciblées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Le financement des maisons sport-santé relève aussi bien de l'État que des collectivités territoriales.
Le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative abonde de 6,5 millions d'euros le budget du dispositif et les agences régionales de santé le font également via le fonds d'intervention régionale (FIR), pour un montant de 10 millions d'euros.
D'une part, le financement du FIR relève de la sécurité sociale et non de la mission « Santé » ; d'autre part, le financement par l'État des maisons sport-santé est déjà passé de 9,3 millions d'euros en 2024 à 16,5 millions d'euros en 2025, soit un effort non négligeable en période budgétaire contrainte.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Monsieur Lévrier, les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis sont-ils maintenus ?
M. Martin Lévrier. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis sont retirés.
L'amendement n° II-1234 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
3 000 000 |
|
3 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
3 000 000 |
|
3 000 000 |
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Depuis 2016, l'activité physique sur ordonnance est un outil reconnu au service des personnes souffrant de maladies chroniques. Toutefois, faute de financement, les bilans médicaux nécessaires – un bilan initial, un autre après trois mois et un dernier après six mois – sont réalisés de manière très inégale selon les territoires, ce qui crée une rupture d'égalité dans l'accès à la prévention.
Cet amendement vise à allouer 3 millions d'euros pour financer ces bilans de manière homogène dans toutes les maisons sport-santé. Plus de 210 000 usagers sont concernés chaque année et l'activité physique adaptée peut réduire jusqu'à 30 % le risque de complications.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Comme je l'ai indiqué précédemment, le financement des maisons sport-santé ne relève pas de la mission « Santé ». De plus, il a été significativement augmenté entre 2024 et 2025. Par ailleurs, la normalisation de trois bilans associés à l'activité physique adaptée paraît relever davantage d'une réglementation à mettre en œuvre que d'une problématique budgétaire.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement soutient les maisons sport-santé tout comme le développement de l'activité physique adaptée, notamment au travers des parcours coordonnés renforcés et de l'« Article 51 », dispositif qui permet de financer cette politique. Nous poursuivrons dans cette voie.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1234 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Martin Lévrier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-1234 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° II-2072 rectifié, présenté par MM. P. Joly, Bourgi et Uzenat, Mmes Harribey, Linkenheld, Poumirol et Le Houerou, MM. Ros, Fichet, M. Weber et Tissot, Mme Bélim, MM. Temal, Chaillou, Pla et Ziane et Mme Matray, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
2 000 000 |
|
2 000 000 |
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement de Patrice Joly a pour objet les difficultés de transport que rencontrent les patients résidant dans des déserts médicaux. Pour consulter leur médecin généraliste, ils doivent aller relativement loin de leur domicile.
Nous proposons donc que le transport soit pris en charge, sur le modèle de ce qui est prévu pour les patients en affection de longue durée (ALD), mais à titre expérimental et dans trois régions qui seraient définies par les agences régionales de santé (ARS).
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Une telle proposition relève plutôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) que de la mission « Santé ».
Mme Émilienne Poumirol. On a déposé le même amendement lors du PLFSS !
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Par ailleurs, d'autres solutions ont été mises en œuvre pour lutter plus structurellement contre les déserts médicaux, elles me paraissent préférables. En particulier, la loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation, que notre assemblée a adoptée au mois de juin dernier, me semble une réponse plus appropriée à ces difficultés.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous essayons de faire des petits pas pour avancer dans la lutte contre les déserts médicaux. Toutefois, depuis des années, nous voyons bien que les départements très dotés le sont de plus en plus et que les départements sous-dotés sont de plus en plus des déserts médicaux. Certains départements sont littéralement des déserts médicaux : c'est le cas de la Nièvre, le département de Patrice Joly .
Cette solution est donc proposée pour tenter de pallier les difficultés que rencontrent les patients dans ce secteur : ils doivent parcourir des kilomètres ne serait-ce que pour consulter un médecin généraliste.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement est pertinent. Certaines personnes en ALD ont perdu leur médecin généraliste, mais le nouveau qu'elles ont trouvé est très éloigné de leur domicile et elles rencontrent des difficultés pour se rendre à son cabinet, le transport n'est pas pris en charge dans ce cas.
Il s'agit donc d'un amendement d'appel, qui ne peut sans doute pas être financé dans le cadre de cette mission. Cependant, en milieu rural, certaines personnes ont des difficultés à se rendre chez le médecin, car il n'y a pas de transport en commun. Le problème peut donc se poser.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2072 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1425 rectifié bis, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Buis et Rambaud, Mmes Cazebonne et Nadille et MM. Mohamed Soilihi, Iacovelli, Rohfritsch et Patient, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds pour la santé
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
|
|
|
Protection maladie |
|
100 000 |
|
100 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Fonds pour la santé |
100 000 |
|
|
100 000 |
TOTAL |
100 000 |
100 000 |
100 000 |
100 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement a été déposé par Patricia Schillinger, dont chacun connaît l'engagement contre la précarité menstruelle et pour briser le tabou qui entoure les règles.
Sa proposition est au croisement de trois combats : l'égalité entre les femmes et les hommes, la reconnaissance des réalités vécues par les femmes au travail et le soutien que le Sénat doit aux collectivités territoriales.
Plusieurs d'entre elles ont voulu instaurer un congé menstruel ou gynécologique pour leurs agentes. Toutes ces décisions ont été annulées, faute de base légale. La circulaire du 21 mai 2025 a davantage encore verrouillé cette possibilité.
Pourtant, les besoins sont évidents. Une femme sur deux souffre de douleurs menstruelles graves, 14 % des salariées s'absentent régulièrement et la grande majorité des femmes ménopausées subissent des symptômes qui affectent leur quotidien. Ne pas reconnaître cette situation, c'est renvoyer les femmes vers l'arrêt maladie, les jours de carence ou la souffrance au travail. C'est une discrimination.
Par cet amendement, nous ne rendons rien obligatoire. Il s'agit simplement de permettre aux collectivités territoriales volontaires de délivrer des autorisations spéciales d'absence en cas de menstruation incapacitante ou de symptômes liés à la ménopause, en toute sécurité juridique. Pour cela, nous proposons un transfert purement formel de 100 000 euros vers un fonds dédié, pour lequel nous demandons la levée du gage.
Cet amendement vise à favoriser un outil de liberté locale, de santé publique et d'égalité. Je vous invite à l'adopter, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Mon cher collègue, il me semble que la difficulté légale que vous évoquez pour la mise en œuvre de ces autorisations d'absence était liée à l'absence de texte juridique en ce sens, difficulté levée a priori par une circulaire récente. Il ne s'agit donc pas tout à fait d'une problématique de nature financière.
Par ailleurs, une telle disposition a vocation à être financée par les collectivités territoriales qui font le choix de la mettre en œuvre, et non par le budget de l'État.
C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le sénateur, je suis d'autant plus sensible au sujet que vous évoquez que, dans le rapport sur la ménopause que j'ai remis au gouvernement en fonction lorsque j'étais députée, j'ai proposé qu'un tel congé soit expérimenté afin d'en évaluer les effets. De mon point de vue, c'est la formation des managers à ce type de situation qui est susceptible d'éviter aux femmes d'être en arrêt maladie.
Néanmoins, il faudrait pouvoir le vérifier dans le cadre d'une expérimentation. Bien évidemment, les ressources humaines des collectivités territoriales ne relèvent pas du périmètre de la mission « Santé ».
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; sinon, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1425 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Martin Lévrier. Je souhaite faire une brève remarque avant de retirer cet amendement (Protestations sur des travées du groupe SER.) – à moins que je ne le maintienne, convaincu par nos collègues socialistes.
Quoi qu'il en soit, j'insiste sur le fait qu'une circulaire n'a pas de valeur juridique. Il faut donc rester très prudent.
Je maintiens donc cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Je veux prolonger le débat que notre collègue a ouvert en défendant cet amendement.
Non seulement la circulaire n'a pas de valeur juridique, mais, à supposer qu'elle soit appliquée et respectée par les préfets, elle n'aurait également aucune force contraignante pour les tribunaux administratifs. Vous le savez, les collectivités territoriales qui ont tenté de mettre en œuvre un tel dispositif ont été censurées soit par les préfectures, soit par les tribunaux administratifs.
C'est la raison pour laquelle il nous faut aller plus loin, madame la ministre, même si ce n'est pas aujourd'hui. Il faut vraiment que vous nous aidiez, car de nombreuses femmes vivent et subissent une souffrance réelle dans un silence absolu. Cela mérite que nous puissions y consacrer un peu de temps et, surtout, que nous aboutissions à la mise en œuvre de propositions concrètes.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. L'amendement de Patricia Schillinger a l'avantage de rouvrir le débat au Sénat.
Je rappelle que nous avons examiné la proposition de loi visant à améliorer et garantir la santé et le bien-être des femmes au travail, en 2024. Nous savons donc à peu près ce qu'il faudrait faire. Il faut, premièrement, autoriser les certificats médicaux pour une durée d'un ou deux ans ; deuxièmement, supprimer le jour de carence pour les salariées du privé ; troisièmement, autoriser les collectivités locales qui le souhaitent à mettre en place ce dispositif.
Madame la ministre, je sais que vous n'êtes pas seulement sensible au sujet, mais que vous êtes aussi engagée. Nous attendons de vous que vous nous apportiez des solutions pour assouplir les règles qui pèsent à la fois sur les femmes travaillant dans les collectivités locales et sur les salariées du secteur privé.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1425 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1685, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Par cet amendement, nous proposons la création d'un fonds national de prévention de l'usage récréatif – selon le terme consacré – du protoxyde d'azote, doté de 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour 2026.
Il serait trop long de rappeler tous les drames qui se sont produits, ces derniers temps, à la suite de l'utilisation du protoxyde d'azote, ainsi que les nombreuses alertes que lancent les hôpitaux comme les Samu (services d'aide médicale urgente) sur une explosion des cas d'intoxication et sur les conséquences de cette consommation. Il est temps d'agir.
Des initiatives parlementaires ont été prises, plusieurs propositions de loi visant à enrayer ce phénomène ont notamment été déposées. Toutefois, le travail de prévention reste indispensable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue, sans nier l'importance de cette question – c'est même tout le contraire –, il me semble que l'enjeu relève davantage d'une bonne application de la loi de 2021 tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote, qui interdit la vente de ces produits aux mineurs.
Par ailleurs, les crédits dédiés à la prévention sont déjà en hausse de 18 % dans ce projet de budget. Certains pourraient être réalloués à la prévention contre le protoxyde d'azote.
En raison des contraintes qui pèsent sur les finances publiques, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous connaissez les difficultés que nous rencontrons.
Nous avons tous, autour de nous, des jeunes à qui nous devons rappeler qu'il s'agit d'une drogue dangereuse, qui peut entraîner des paralysies à vie. Souvent, les jeunes que je rencontre me disent qu'ils consomment du protoxyde d'azote « juste pour rire ». Non ! Le protoxyde d'azote fait rire cinq minutes, mais il peut rendre handicapé à vie.
Le sujet mérite donc notre attention à tous. Ce produit est encadré, vous le savez, et sa vente est interdite aux mineurs. Il existe déjà des mesures de prévention ou des campagnes de sensibilisation, avec par exemple le slogan « Le proto, c'est trop risqué d'en rire ». L'ARS Île-de-France a également ouvert un site parlons-proto.fr, à mon sens, très bien fait, où vous pourrez trouver l'ensemble des recommandations sur ce produit.
Enfin, je rappelle que le fonds de lutte contre les addictions représente 130 millions d'euros. C'est dans ce cadre qu'il faut poursuivre nos efforts pour la santé de nos jeunes, en travaillant sur la prévention, notamment sur le protoxyde d'azote, mais aussi sur d'autres enjeux.
C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.
M. Michel Masset. Nous voterons cet amendement, car il est nécessaire et urgent d'apporter une réponse à ce problème.
Je rappelle que la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d'azote d'Ahmed Laouedj a été adoptée au Sénat au mois de mars dernier et attend toujours d'être examinée à l'Assemblée nationale. Je ne comprends pas pourquoi le délai est si long, d'autant que la proposition de loi visant à restreindre la vente de protoxyde d'azote aux seuls professionnels et à renforcer les actions de prévention sur les consommations détournées, issue de l'Assemblée nationale, est également en attente d'examen par le Sénat.
Que fait-on ? Pourquoi n'avançons-nous pas sur ces textes ?
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Les élus du groupe GEST sont favorables à cet amendement, car il va de soi que la prévention est indispensable.
Toutefois, au-delà de la prévention, une mesure dont l'effet serait majeur consisterait tout simplement à interdire la vente du protoxyde d'azote aux particuliers, ce qui est tout à fait faisable. C'est d'ailleurs l'objet du texte qui a été adopté à l'Assemblée nationale, mais cette proposition de loi n'est toujours pas inscrite à l'ordre du jour des travaux du Sénat – je ne comprends pas pourquoi.
Certes, on pourra toujours acheter du protoxyde d'azote sur internet, mais cette interdiction de vente représenterait une difficulté d'accès supplémentaire, notamment pour les mineurs. Il est donc très important qu'une telle mesure puisse entrer en vigueur rapidement, car, pour l'instant, il est possible d'acheter du protoxyde d'azote dans n'importe quel supermarché.
L'enjeu en matière de santé publique est suffisamment important pour qu'il prime sur la liberté de vente.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Sur toutes les travées, nous sommes d'accord : il y a urgence à agir et à interdire le protoxyde d'azote. Il ne se passe pas une semaine sans qu'un fait divers dramatique nous rappelle les dangers de ce produit et les dégâts qu'il provoque – sans parler de tous les cas dont on ne parle pas. À cela s'ajoutent les paralysies mentionnées par Mme la ministre.
Il est grand temps d'interdire ce produit en ne le réservant qu'à l'usage médical. Si un tel usage existe, cela n'empêche pas d'interdire la vente du protoxyde d'azote dans tout autre cadre.
Les propositions de loi se multiplient, issues de tous les groupes politiques. Un texte a été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Il est temps, madame la ministre, que vous présentiez un projet de loi, afin d'aboutir à des solutions rapidement efficaces.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1685.
(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. Michel Masset. Bravo !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1092 n'est pas soutenu.
L'amendement n° II-2056, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles
II. -En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
3 000 000 |
3 000 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles |
3 000 000 |
3 000 000 |
||
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. À force de coups de rabot, nous sommes en train de défaire silencieusement ce que plusieurs dizaines d'années de mobilisation ont construit.
Les associations de lutte contre le VIH voient leurs financements amputés, leurs postes supprimés et leurs actions menacées. Quand AIDES, la première organisation française de lutte contre le VIH, est contrainte d'ouvrir un plan de suppression de postes, c'est toute l'hypocrisie de ce gouvernement qui fait surface.
Car, oui, c'est un choix politique de ne pas financer ce type d'association. C'est décider que la prévention, le dépistage, l'accès à la PrEP (prophylaxie pré-exposition) et la réduction des risques peuvent attendre. L'épidémie, elle, n'attend pas. On dénombre 3 400 nouvelles contaminations chaque année ; ce chiffre stagne, tandis que les inégalités de santé se creusent, touchant les publics les plus exposés, que seules les associations parviennent à atteindre dans ce dernier kilomètre où l'État n'est pas : travailleuses du sexe, migrants…
Nous avons pourtant les outils pour mettre fin à l'épidémie. Ce qui manque aujourd'hui, ce ne sont pas les solutions, ce sont les moyens et, surtout, le courage politique.
Par conséquent, cet amendement vise à augmenter de 3 millions d'euros les crédits consacrés à la prévention et à garantir un niveau de subvention stable a minima pour les associations.
Une France sans sida n'est pas qu'un vain slogan, c'est un objectif à portée de main. Madame la ministre, je dirai même que cela est entre vos mains : n'y renoncez pas !
M. le président. L'amendement n° II-1452 rectifié, présenté par Mme Imbert, MM. Lefèvre, D. Laurent, Sol et Pointereau, Mme Aeschlimann, MM. Somon et Panunzi, Mmes V. Boyer et Petrus, M. Bruyen, Mmes Berthet, Ventalon et Deseyne, MM. Anglars, Rietmann et Belin, Mme Richer, MM. Saury et H. Leroy, Mme Demas, MM. Brisson et E. Blanc, Mme Micouleau, M. Gremillet, Mme Bellamy, MM. Piednoir et Margueritte, Mmes Gruny et Josende et MM. Grosperrin, Rapin, Pernot et Milon, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
3 000 000 |
|
3 000 000 |
|
Protection maladie |
|
3 000 000 |
|
3 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Cet amendement, qui s'inscrit la même veine que le précédent, vise à augmenter, à hauteur de 3 millions d'euros, les crédits en faveur de la prévention du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST), en prélevant sur le programme 183 « Protection maladie » pour abonder l'action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue Souyris, vous parlez de « coups de rabot », mais il n'y en a pas sur les actions de prévention, cette année. Au contraire, le budget qui leur est alloué augmente de 18 %. Ainsi, près de 10 millions d'euros sont prévus pour les actions du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », lequel finance la prévention du VIH et des IST.
J'estime donc que l'amendement n° II-2056 est satisfait, même s'il vise à aller au-delà de l'augmentation des crédits de 18% prévue, en les augmentant à hauteur de 3 millions d'euros.
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2056.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1452 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1957 rectifié, présenté par Mme Romagny, MM. Cambier et Chasseing, Mme Aeschlimann et M. Buis, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
5 000 000 |
|
5 000 000 |
|
Protection maladie |
|
5 000 000 |
|
5 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1957 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2061, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Ordonnance verte
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
2 100 000 |
2 100 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Ordonnance verte |
2 100 000 |
2 100 000 |
||
TOTAL |
2 100 000 |
2 100 000 |
2 100 000 |
2 100 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Hier, une étude révélait les effets de l'exposition au bisphénol S (BPS), présent dans les plastiques, sur l'apparition de troubles du comportement chez les bébés. Elle nous rappelle que nous avons plus que jamais besoin d'une politique ambitieuse de santé environnementale pour lutter contre les perturbateurs endocriniens.
Mes chers collègues, connaissez-vous la Fédération française des trucs qui marchent ? Elle labellise des démarches innovantes mises en place par les collectivités territoriales. J'ai un truc qui marche à leur proposer : les ordonnances vertes.
En effet, la ville de Strasbourg a mis en place ce dispositif qui permet aux femmes enceintes d'obtenir un panier de fruits et légumes bio chaque semaine pendant vingt-huit semaines. Il s'agit ainsi de les sensibiliser aux risques liés aux perturbateurs endocriniens pendant la période cruciale des mille premiers jours de l'enfant.
Cette action est essentielle pour alerter sur les risques sanitaires des perturbateurs endocriniens pour l'enfant, mais aussi pour la fertilité – ceux-ci sont en effet responsables du déclin de plus de 50 % de la concentration spermatique et entraînent chez les femmes une puberté précoce.
À l'heure où le Président de la République appelle au réarmement démographique, nous devons faire de la lutte contre l'infertilité et contre les perturbateurs endocriniens une priorité. Aussi, nous proposons d'expérimenter dans trois départements le dispositif strasbourgeois de l'ordonnance verte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Une ordonnance verte, pourquoi pas ?
Les autorités sanitaires devraient être consultées, car elles sont les plus qualifiées pour évaluer l'impact réel d'une telle mesure sur la santé. Il leur appartient de décider si, oui ou non, la sécurité sociale doit rembourser ce type de prescription.
En tout cas, il ne me semble pas qu'il nous appartienne de décider si une telle initiative doit figurer dans la mission « Santé ».
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2061.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1681, présenté par Mmes Cukierman, Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
I.- Créer le programme :
Fonds de lutte contre l'ice en Polynésie française
II.- En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
2 094 000 |
|
2 094 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Fonds de lutte contre l'ice en Polynésie française |
2 094 000 |
|
2 094 000 |
|
TOTAL |
2 094 000 |
2 094 000 |
2 094 000 |
2 094 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Le Gouvernement français s'est engagé auprès du gouvernement polynésien à contribuer au renforcement des moyens de l'Office anti-stupéfiants (Ofast) et à créer un centre de désintoxication.
Cet amendement vise à concrétiser cet engagement au moment où la consommation d'ice, une méthamphétamine, c'est-à-dire une drogue de synthèse extrêmement dangereuse, est de plus en plus répandue en Polynésie française. Face à des réseaux de trafic qui intensifient leur action et ciblent notamment les plus jeunes, avec des conséquences terribles, il est temps d'agir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1681.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-2060, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Prévention du chemsex
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
300 000 |
300 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Prévention du chemsex |
300 000 |
300 000 |
||
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. La stratégie nationale sur le chemsex, demandée par les acteurs sur le terrain, sera intégrée dans la prochaine feuille de route de la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030. C'est une promesse qui date et j'espère qu'elle sera enfin tenue, car il faut déployer une véritable politique de prévention, de réduction des risques et d'accompagnement.
Les besoins sont clairs : mieux outiller les professionnels, assurer une présence dans les lieux de consommation, renforcer les réseaux locaux et pérenniser les dispositifs expérimentés, comme l'Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré – Chemsex (Arpa-Chemsex), qui ont déjà démontré leur efficacité dans plusieurs grandes villes.
Enfin, nous manquons aujourd'hui cruellement de données pour comprendre les trajectoires des usagers, évaluer les interventions et anticiper les risques liés aux nouvelles substances.
Cet amendement d'appel vise à alerter sur la nécessité de passer à l'action.
Qu'en est-il du projet Arpa-Chemsex ? D'autres villes vont-elles entrer dans le dispositif ? Développons l'analyse de produits. Obligeons les applications de rencontres à diffuser des messages de prévention. Mettons en place le système du « bon samaritain », pour que le bon réflexe soit d'appeler les secours.
Madame la ministre, prenons ce sujet à bras-le-corps, sans tabou ni morale envers les pratiquants du chemsex. Réduction des risques, lutte contre les addictions, lutte contre l'homophobie, santé communautaire : nous avons besoin d'une approche globale. Les outils sont là, il faut désormais s'atteler à cette tâche.
M. le président. L'amendement n° II-2055 rectifié bis, présenté par Mme Linkenheld, MM. Jomier, Gillé, Bourgi et M. Weber, Mme de La Gontrie, M. Omar Oili, Mmes Bélim, Poumirol, Brossel, Le Houerou et Canalès, MM. P. Joly, Roiron, Tissot, Cozic, Chaillou et Temal et Mme Matray, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
300 000 |
|
300 000 |
|
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
300 000 |
|
300 000 |
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Hussein Bourgi.
M. Hussein Bourgi. Cet amendement, déposé sur l'initiative d'Audrey Linkenheld et cosigné par plusieurs membres du groupe SER, porte sur un sujet tabou, puisqu'il touche à l'intime et à la sexualité. Il s'agit d'un véritable fléau qui cause des dégâts de tous ordres – personnel, sanitaire, etc.
Certaines personnes pensent pouvoir prolonger ou améliorer leurs performances sexuelles en consommant des produits, produits qui, malheureusement, les exposent à des maladies sexuellement transmissibles, voire provoquent parfois des arrêts cardiaques. C'est ainsi que des morts s'accumulent semaine après semaine.
Ce sujet reste tabou, disais-je. En cet instant, je tiens à rendre hommage à Jean-Luc Romero-Michel, l'un des rares témoins de ce fléau à en avoir parlé – il a vécu ce drame intimement, dans son couple, puisque son compagnon en est mort – pour alerter sur le danger qu'il représente.
Madame la ministre, il ne suffit plus de déplorer et de compter les morts les uns après les autres. Il faut agir ! C'est le sens de cet amendement par lequel nous vous proposons tout simplement de financer une campagne de prévention contre ce qu'est le chemsex, à savoir une drogue, et, comme toutes les drogues, le chemsex tue !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Mes chers collègues, je comprends bien qu'il soit nécessaire de mener des campagnes de prévention contre le chemsex, mais je considère que le niveau des crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » est suffisant pour financer des actions de cette nature. Il n'y a pas lieu, selon moi, de prévoir un abondement supplémentaire.
La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, monsieur le sénateur, sachez tout d'abord que nous travaillons actuellement au développement du projet Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré – Chemsex (Arpa-Chemsex).
Par ailleurs, la feuille de route 2026-2030 de la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030 comportera des actions ciblées sur ce sujet. Je précise à cet égard que j'ai demandé au professeur Amine Benyamina de formuler des recommandations opérationnelles sur le parcours, la prévention et les innovations thérapeutiques, ce qui va dans le sens que vous souhaitez.
C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2060.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2055 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2058, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Plan de déploiement de la réduction des risques en zones rurales
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
300 000 |
300 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Plan de déploiement de la réduction des risques en zones rurales |
300 000 |
300 000 |
||
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. Nous partons d'un constat simple : nos territoires ruraux, qui couvent 70 % de la superficie du pays, restent les grands oubliés en matière de réduction des risques.
Alors que l'accès aux substances psychoactives y est comparable à celui des villes, l'accès aux soins, lui, ne l'est pas : éloignement, déserts médicaux, rareté des transports, tout concourt à aggraver les usages problématiques et à rompre les parcours de soins.
Nous le savons, les équipes de terrain innovent déjà : unités mobiles, antennes délocalisées, maraudes, télémédecine. Elles prouvent chaque jour que l'« aller vers » fonctionne. Toutefois, faute de moyens, ces actions restent trop sporadiques, trop fragiles, trop isolées.
Ce que nous proposons aujourd'hui, c'est de donner enfin à ces initiatives toute l'ampleur qu'elles méritent. Il s'agit de structurer une véritable politique nationale de réduction des risques en zone rurale, de renforcer la présence des dispositifs existants, de soutenir les innovations adaptées à l'éloignement géographique, de mieux former les professionnels et de mieux coordonner les acteurs locaux.
Pour conclure, je rappelle que la commission des affaires sociales a publié cette année un rapport d'information sur les dangers des opioïdes en France : le dispositif de mon amendement résulte des préconisations de la mission, dont j'étais l'une des rapporteures.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je tiens simplement à souligner que ces centres sont importants à nos yeux. La preuve en est que l'assurance maladie leur a consacré 564 millions d'euros en 2024.
Je comprends donc tout l'intérêt de votre demande, madame la sénatrice. Néanmoins, les financements existent et il convient tout bonnement de faire bon usage des crédits consacrés aux centres de soins, d'accompagnement ou de réduction des risques.
Aussi, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2058.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2059, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Lutte contre le tabagisme aux abords d'établissements scolaires
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
300 000 |
300 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Lutte contre le tabagisme aux abords d'établissements scolaires |
300 000 |
300 000 |
||
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. La consommation de tabac tue 75 000 personnes en France chaque année, soit plus de 200 décès par jour. Depuis le 1er juillet dernier, fumer aux abords des établissements scolaires, des bibliothèques, des établissements et dans les parcs est interdit. C'est une bonne nouvelle.
Force est toutefois de constater que cette obligation n'est absolument pas respectée. Surtout, il manque des mesures de prévention qui permettraient d'en finir avec cette mauvaise image de jeunes fumant ou vapotant devant les collèges et les lycées. En effet, il est encore aujourd'hui trop fréquent de voir des jeunes fumer et vapoter devant leur établissement scolaire, avant ou après les cours, pendant les récréations.
Ce phénomène participe d'une normalisation du tabagisme que nous combattons. Fumer ou vapoter devient un truc « cool », qui permet aux jeunes d'entrer dans la communauté. C'est un drame : 90 % des jeunes adultes commencent à fumer avant 18 ans.
C'est pourquoi nous proposons de financer, à hauteur de 300 000 euros, des actions de sensibilisation, la mise en place de l'interdiction effective et la « dénormalisation » du tabagisme, ainsi que des campagnes d'affichage ou des aménagements légers visant à réduire l'exposition des jeunes au tabac.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2059.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2030, présenté par Mmes de Marco et Souyris, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Protection maladie |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Plusieurs études ont montré que la réalisation d'un scanner thoracique à faible dose chez les sujets à risque permettait la détection de tumeurs pulmonaires primitives et réduisait le risque de décès par cancer du poumon. Après un suivi de dix ans, on observe ainsi une diminution de la mortalité de 26 % chez les hommes et de 40 % chez les femmes.
Au mois de décembre 2022, le Conseil européen a incité tous les États membres à lancer des programmes pilotes ; plusieurs pays européens ont d'ores et déjà mis en œuvre un dépistage systématique. La même année, la Haute Autorité de santé (HAS) a préconisé la mise en place d'un programme pilote sur le territoire.
Pourtant, les subventions de l'Institut national du cancer (Inca) sont en baisse constante depuis 2022. Si le budget de l'Inca a augmenté de 9,6 millions d'euros en 2026, cela ne résulte que d'une mesure de périmètre au sein de la feuille de route 2021-2025 de la stratégie décennale de lutte contre les cancers. Aujourd'hui, alors que le cancer broncho-pulmonaire demeure la première cause de mortalité par cancer, avec 33 000 décès en 2018, il est temps de généraliser ce dépistage précoce.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je suis très attentive aux résultats des études qui sont en cours sur le sujet. J'espère que nous pourrons avancer rapidement sur cette question.
Cependant, les études n'ayant pas encore abouti, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2030.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1682, présenté par Mmes Cukierman, Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
Protection maladie |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1682.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2070 rectifié, présenté par Mmes de La Provôté, Sollogoub, Billon et Guidez, MM. Pointereau, Dhersin, Kern et Courtial, Mme V. Boyer, M. P. Martin, Mme Gacquerre, M. Chauvet, Mme Saint-Pé, MM. Mizzon et Bonneau, Mmes Romagny, Loisier et Vermeillet, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Naturel et Hingray, Mme Antoine, M. Omar Oili, Mme Lermytte, MM. V. Louault, Roux et Chasseing, Mme L. Darcos et MM. Temal et Chevalier, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Financer Santé publique France
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
|
4 200 000 |
|
4 200 000 |
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
Financer Santé publique France |
4 200 000 |
|
4 200 000 |
|
TOTAL |
4 200 000 |
4 200 000 |
4 200 000 |
4 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Sonia de La Provôté.
Mme Sonia de La Provôté. À la suite du vote de la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers, le projet de loi de finances pour 2026 a prévu une hausse des crédits de l'Inca de l'ordre de 9,5 millions d'euros, dont une part – 4,2 millions d'euros – est censée compenser la recentralisation de registres locaux Francim. Par ailleurs, lors de l'examen de la mission « Recherche et enseignement supérieur », un amendement d'Anne Souyris, qui vise à accroître encore davantage les crédits de l'institut en vue de financer la constitution de ce même registre national des cancers, a été voté à l'unanimité.
Je précise que l'amendement que je présente ne vise pas à mettre en péril le financement de l'Institut national du cancer et sa capacité à mettre en place ce registre national. Reste que, en l'état actuel des connaissances, il faudra cinq bonnes années pour que l'on dispose enfin d'outils pleinement opérationnels et fiables – et encore, peut-être suis-je un peu trop optimiste…
Dès lors, il n'est pas possible de se passer des données de qualité des registres académiques du réseau Francim, qui couvrent 24 % de la population, sur lesquelles reposent les statistiques nationales en matière de cancérologie. Ces données sont utilisées par des équipes aguerries pour assurer le suivi des patients, de façon exhaustive et qualitative. J'ajoute que le réseau Francim héberge aussi le registre national des cancers pédiatriques.
Je propose donc simplement de reverser à Santé publique France les 4,2 millions d'euros qui devaient être perçus par l'Inca, et ce afin de ne pas fragiliser le fonctionnement des registres locaux et du registre national des cancers pédiatriques, qui sont fondamentaux en l'état actuel de nos connaissances et au vu du temps dont nous aurons besoin pour constituer le registre national. Ils resteront sûrement cruciaux pendant encore de nombreuses années.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. J'entends évidemment les arguments de notre collègue Sonia de La Provôté, laquelle connaît très bien ce sujet, puisqu'elle est à l'origine de la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers, adoptée à l'unanimité.
Comme je l'ai dit, le projet de loi de finances pour 2026 prévoyait déjà de rehausser les crédits de l'Inca de 9,5 millions d'euros en 2026 ; des crédits supplémentaires ont été votés par le Sénat dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », cela vient d'être rappelé.
J'estime qu'il s'agit d'un montant significatif en vue de la constitution d'un registre national. Cependant, je n'étais pas informé de ce prélèvement de 4,2 millions d'euros au titre du recentrage de la tenue des registres locaux.
C'est la raison pour laquelle la commission demande l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. En réalité, il n'est question ici que d'une recentralisation des financements actuels au niveau de l'Inca (Marques de dénégation de Mme Sonia de La Provôté.), en contrepartie du transfert de la gestion des registres locaux existants vers l'institut, tout cela en vue de l'élaboration du futur registre national des cancers. J'ajoute que l'Inca devra, de toute façon, redistribuer ces crédits à l'échelon local.
Le Gouvernement demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de La Provôté. Très honnêtement, il ne me semble absolument pas nécessaire de transférer ces crédits vers l'Inca. Préserver le mode de financement actuel des registres Francim contribuerait à sécuriser les registres locaux et le registre national des cancers pédiatriques – j'y insiste ! Cela permettrait aussi de rassurer les équipes, qui sont des équipes compétentes, dont on ne saurait se passer, et dont l'Inca lui-même ne saurait se passer pour constituer le registre national des cancers.
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Chacun aura compris en écoutant Mme de La Provôté que cette question est très technique.
Notre collègue, que je remercie, maîtrise parfaitement son sujet : je vous propose par conséquent de voter son amendement. Si l'on veut véritablement respecter l'esprit de la loi – à cet égard, je tiens aussi à remercier Anne Souyris, qui a contribué à mettre en avant ce dossier –, il convient d'avancer sur ce sujet.
Aussi, je voterai cet amendement de Sonia de La Provôté. (Murmures d'approbation sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. Max Brisson. Comme nous tous !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Le groupe SER soutiendra cet amendement, tant l'intérêt de son dispositif n'est plus à démontrer.
Si je puis me permettre, tout le monde devrait le voter !
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Je soutiens également cet amendement.
Nous avons déjà voté l'année dernière en faveur d'un registre national. Le recentrage des registres Francim sur l'Inca a posé un véritable problème, parce que cela s'apparentait davantage à un échantillonnage qu'à un registre géré localement et, de fait, véritablement représentatif de l'ensemble des territoires.
Cet amendement a pour objet de garantir la représentativité territoriale du registre des cancers.
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Devant la nécessité – je dirais même l'urgence – de voter une telle disposition, nous soutiendrons l'amendement de Mme de La Provôté.
M. Olivier Rietmann. Bien évidemment !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Ma tâche ne sera pas facile…
Recentraliser la gestion des registres à l'échelon national reviendra à recentraliser pas seulement les données de santé, mais aussi les données environnementales. On a réellement besoin de cette centralisation aujourd'hui. Que se passera-t-il, selon vous, si l'on retire ces crédits à l'Inca ?
Mme Sonia de La Provôté. Il reste de quoi faire ! Et puis, nous avons voté l'amendement de Mme Souyris !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2070 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme Sonia de La Provôté. Très bien !
M. le président. L'amendement n° II-1645 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et MM. Roux et V. Louault, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
Protection maladie |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
|
|
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Guylène Pantel.
Mme Guylène Pantel. Cet amendement vise à répondre à une injustice sanitaire qui touche aujourd'hui des centaines de patientes et de patients exposés à l'acétate de cyprotérone, ainsi qu'à d'autres progestatifs de synthèse. Depuis plusieurs années, des liens scientifiques ont établi que l'utilisation prolongée de ces traitements, notamment à forte dose, multipliait significativement le risque de développer un méningiome, une tumeur cérébrale qui peut avoir des conséquences graves et durables.
L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a pris des mesures d'encadrement dès 2018, mais, pour les personnes déjà touchées, rien n'a été prévu. Aujourd'hui encore, des victimes sont laissées seules face à leurs complications médicales, sans procédure d'indemnisation équitable.
Cet amendement tend donc à mettre en place un dispositif amiable d'indemnisation pour les victimes. N'oublions pas que nous avons su créer des dispositifs similaires pour les victimes du Mediator et de la Dépakine.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Je tiens à insister sur l'importance du sujet qu'abordent nos collègues du groupe RDSE.
Nous avons été sollicités par de nombreuses patientes qui ont subi les effets néfastes de ces traitements, à l'instar des victimes de l'Androcur ou de l'acétate de cyprotérone.
Il y a un problème avéré d'effets secondaires chez ces patientes, avec des conséquences qui peuvent être graves. Le principe d'une indemnisation des victimes sur le modèle de celui de la Dépakine me paraît très intéressant.
C'est pourquoi nous demandons au Gouvernement de regarder de près ce dossier.
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. Nous sommes très favorables à cette procédure d'indemnisation, mais c'est amendement est gagé sur les dépenses de l'aide médicale de l'État (AME).
Si le Gouvernement s'engage à lever ce gage, nous voterons l'amendement ; à défaut, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Je confirme que le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1645 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-1978 rectifié quater, présenté par MM. Théophile, Buis, Buval, Rambaud et Lemoyne, Mme Phinera-Horth, MM. Patient et Mohamed Soilihi, Mme Nadille et MM. Rohfritsch et Lévrier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
500 000 |
|
500 000 |
|
Protection maladie |
|
500 000 |
|
500 000 |
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile est frappé au coin du bon sens. Il est simplement proposé d'étendre à l'ensemble des Antillais vivant aujourd'hui dans l'Hexagone la gratuité intégrale des tests de dépistage du chlordécone.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de l'amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.
M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1978 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Martin Lévrier. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1978 rectifié quater.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2062, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Surveillance sanitaire de l'acide trifluoroacétique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins dont titre 2 |
200 000 |
200 000 |
||
Protection maladie |
|
|
|
|
Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) |
|
|
||
Surveillance sanitaire de l'acide trifluoroacétique |
200 000 |
200 000 |
||
TOTAL |
200 000 |
200 000 |
200 000 |
200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Anne Souyris.
Mme Anne Souyris. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a révélé la semaine dernière que l'eau potable était contaminée par l'acide trifluoroacétique, le TFA, une substance perfluoroalkylée et polyfluoroalkylée (PFAS) toxique, ce que confirment les conclusions du réseau européen d'action contre les pesticides (Pesticide Action Network) et de l'association Générations futures.
Pourtant, les normes sanitaires sont toujours insuffisantes et le TFA n'est toujours pas soumis à un cadre réglementaire contraignant. Madame la ministre, allez-vous enfin considérer le TFA comme un métabolite pertinent et protéger notre santé ?
Nous appelons à renforcer la surveillance sanitaire du TFA. Ce dispositif permettrait à toutes les agences et régies publiques de l'eau de surveiller sa présence dans l'eau destinée à la consommation humaine. Antoinette Guhl a mis en lumière les scandales sanitaires autour de l'eau en bouteille. Finissons-en avec l'omerta qui persiste sur la pollution de l'eau.
Enfin, je profite de l'occasion pour saluer le travail de l'Anses. L'agence fait face à de nombreuses attaques, qui nous rappellent les méthodes des mouvements anti-science que l'on voit se développer aux États-Unis. La mise en cause de son indépendance et le sort réservé à son directeur général sont autant de signaux qui nous inquiètent : sans l'Anses, pas de politique de santé publique et de santé environnementale.
Gardons-nous de répandre le chaos dans la gestion des crises sanitaires en supprimant des agences essentielles pour la vie de la Nation. L'Anses trouvera toujours les écologistes à ses côtés !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Votre demande est satisfaite, madame la sénatrice.
Vous le savez, nous nous préoccupons de la question des PFAS. En application de la loi du 27 février 2025 visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, dite loi Thierry, et en nous fondant sur les résultats de la campagne exploratoire menée par l'Anses, qui caractérise la présence ubiquitaire du TFA sur le territoire national, nous allons publier un décret qui ajoutera le TFA et le 6:2 FTSA (Fluorotelomer sulfonic acid) à la liste des vingt PFAS de la directive européenne du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, qui sont à surveiller dans le cadre de notre contrôle sanitaire.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous sommes nous aussi extrêmement inquiets des résultats des études récentes sur la qualité de l'eau. Je me trouvais mardi dans mon département : les résultats des analyses de l'eau qui viennent d'être publiées nous ont fait dresser les cheveux sur la tête !
Nous voterons bien sûr cet amendement. Surtout, nous souhaitons exprimer tout notre soutien à l'Anses, pour le rôle majeur qu'elle joue en matière de santé publique. Cette agence est absolument indispensable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2062.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Santé », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Santé ».
Après l'article 78
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-29 est présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-1413 est présenté par Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 78
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le huitième alinéa de l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° La fin de la première phrase est ainsi rédigée : « d'urgence à un accord préalable du service du contrôle médical mentionné à l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale » ;
2° La deuxième phrase est supprimée ;
3° Après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée « Le service compétent s'assure que l'absence de réalisation de ces prestations n'est pas susceptible d'avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l'état de santé de la personne. »
4° A la dernière phrase, les mots : « , le délai d'ancienneté » sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° II-29.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d'adapter le régime de prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes dans le cadre de l'aide médicale de l'État (AME), adaptation qui implique la suppression du délai d'ancienneté de neuf mois actuellement requis. Ce dispositif permet à la commission des finances de justifier la baisse de 200 millions d'euros de crédits que le Sénat a votée tout à l'heure sur son initiative et sur celle de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est à Mme Gruny, au nom de la commission des affaires sociales, pour présenter l'amendement n° II-1413.
Mme Pascale Gruny, au nom de la commission des affaires sociales. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-29 et II-1413.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 114 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 315 |
| Pour l'adoption | 197 |
| Contre | 118 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 78.
L'amendement n° II-380 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Buis, Rambaud et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :
Après l'article 78
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement actualise, dans le cadre du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2027, les indicateurs relatifs aux investissements immobiliers hospitaliers, en y intégrant une trajectoire pluriannuelle 2026-2030 spécifique aux établissements de santé situés dans les territoires ultramarins.
Cette trajectoire précise, pour chaque territoire, les besoins identifiés, les priorités d'intervention, ainsi que la programmation financière prévisionnelle associée.
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile vise à corriger une lacune persistante, celle de l'absence totale de programmation pluriannuelle des investissements hospitaliers dans les territoires ultramarins.
Les rapports récents de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), ainsi que celui de la Cour des comptes montrent que les hôpitaux ultramarins figurent parmi les plus fragiles du pays, avec des bâtiments vieillissants, des déficits structurels et une incapacité à financer les rénovations indispensables.
Il paraît donc essentiel d'actualiser les indicateurs du projet annuel de performances, en intégrant une trajectoire claire pour ces territoires sur la période 2026-2030. Il s'agit d'identifier les besoins, de prioriser les interventions et d'apporter, enfin, de la visibilité financière aux établissements concernés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous soulevez deux difficultés, monsieur le sénateur.
La première tient à la pluriannualité des investissements.
J'ai déjà précisé à cet égard que, dans les prochaines semaines, je serai en mesure d'annoncer le montant des investissements hospitaliers pour les dix ans à venir, et ce afin que les équipes puissent se réunir autour d'un projet sur le temps long – c'est évidemment très important.
La seconde tient à la situation particulière des territoires ultramarins.
Ces territoires ne sont pas oubliés. Je rappelle que les dépenses d'investissement s'élèvent à 7,5 milliards d'euros au total, dont 700 millions d'euros versés récemment pour financer le nouveau centre hospitalier universitaire (CHU) Guadeloupe.
Aussi, le Gouvernement demande le retrait de l'amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Madame la ministre, votre engagement vaut vote. Par conséquent, je retire l'amendement n° II-380 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° II-380 rectifié bis est retiré.
Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Santé ».
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq,
est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)
PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
7
Mise au point au sujet d'un vote
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, lors du scrutin public n° 112 sur les amendements identiques nos II-24 et n° II-1284 à l'article 76 du projet de loi de finances pour 2026, Pierre-Jean Verzelen souhaitait s'abstenir.
Mme la présidente. Acte est donné de votre mise au point, chère collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
8
Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde parte du projet de loi de finances, des différentes missions.
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».
La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi qu'au banc des commissions.)
M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de remercier la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Jocelyne Guidez, de son travail, ainsi que les commissaires et fonctionnaires des deux commissions saisies.
La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » change cette année de nom : elle s'appelle désormais « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Je partage bien sûr avec l'ensemble de mes collègues – malgré l'ambiance quelque peu familiale, ce soir (Sourires.) – la conviction que nous sommes tous concernés par le devoir de mémoire. Ce changement de nom s'effectue à périmètre constant et n'emporte pas de conséquences budgétaires.
Comme chaque année, ces crédits continuent de diminuer, pour des raisons démographiques. Toutefois, l'année 2026 se démarque par l'ampleur de leur baisse : ils diminuent de 120 millions d'euros entre 2025 et 2026 pour s'établir à 1,73 milliard d'euros. Cela touche principalement le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », qui regroupe 95 % des crédits de la mission.
Par ailleurs, les dépenses fiscales rattachées à la mission s'élèvent à 563 millions d'euros. Elles relèvent d'une action de solidarité, incluant notamment la demi-part fiscale pour les anciens combattants et leurs conjoints survivants.
Cette année encore, la baisse des crédits est la conséquence de la baisse de la population des bénéficiaires de l'allocation de reconnaissance du combattant comme de la pension militaire d'invalidité (PMI). Ces deux pensions, qui représentent une enveloppe de 1,08 milliard d'euros, sont versées respectivement aux titulaires de la carte du combattant et aux militaires et anciens militaires souffrant d'une invalidité du fait de leur engagement.
À la baisse des populations de bénéficiaires s'ajoute, en 2026, une non-revalorisation des pensions. Le reste des crédits de la mission, à l'exception de ceux qui sont réservés aux liens armées-jeunesse, sont en baisse.
Les crédits consacrés au devoir de mémoire diminuent pour atteindre 8 millions d'euros. Cette baisse était prévisible, puisque les deux années précédentes marquaient le quatre-vingtième anniversaire des événements de 1944 et de 1945 et avaient donc fait l'objet d'une programmation mémorielle forte.
Les crédits d'entretien du patrimoine mémoriel sont stables et s'établissent à 16,2 millions d'euros. Toutefois, j'alerte sur le fait que ces derniers ont été annulés à hauteur de 8 millions d'euros en 2024 – c'est-à-dire de moitié – et devraient l'être à hauteur de 4,4 millions d'euros en 2025. De tels niveaux d'annulation ne permettent pas de réaliser à temps tous les travaux que nécessite le patrimoine mémoriel de pierre de la France.
Je tiens à saluer l'association Le Souvenir français, qui entretient et restaure des tombes militaires, son président général Serge Barcellini, ainsi que tous ses relais locaux et internationaux. Il s'agit d'un partenaire important, qui organise notamment la journée nationale des anciens combattants, le 1er ou 2 novembre de l'année.
L'effort en faveur des rapatriés recule de 5,3 millions d'euros pour la première fois depuis 2022. C'est dû à une forte baisse des crédits du dispositif de réparation prévu par la loi du 23 février 2022, qui indemnise les rapatriés du préjudice qu'ils ont subi en étant accueillis sur le territoire national dans des camps ou des hameaux de forestage. Je propose de rétablir ces crédits à leur niveau de 2025.
Les crédits relatifs aux liens armées-jeunesse prévus en 2026 sont d'un même montant qu'en 2025 et visent à généraliser la Journée défense et citoyenneté (JDC) nouvelle génération, qui est recentrée sur sa dimension militaire et au cours de laquelle doivent notamment être organisés une cérémonie des couleurs, un tir sportif au laser, des jeux de rôle, un forum des métiers et une immersion en réalité virtuelle. Ils doivent également financer le nouveau service militaire volontaire.
Enfin, la mission comporte trois opérateurs principaux : l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), dont vous connaissez le maillage territorial, l'Institution nationale des invalides (INI) et l'Ordre de la Libération. Si j'ai régulièrement appelé à la vigilance sur la soutenabilité des efforts qui leur étaient demandés, je dois aujourd'hui alerter sur leur situation.
Si elle est stable, la subvention pour charges de service public de l'ONaCVG n'a pas été revalorisée pour tenir compte des augmentations de charges liées notamment à la revalorisation de la rémunération publique. Sa trésorerie a également été ponctionnée.
L'Institution nationale des invalides mérite aussi respect et reconnaissance. Par ailleurs, elle est toujours en train de réaliser d'importants travaux immobiliers, démarrés en 2021, comprenant la rénovation de la quasi-totalité de ses bâtiments.
Avant de conclure, je tiens à rendre hommage aux bénévoles et aux porte-drapeaux qui œuvrent au sein des associations patriotiques et de mémoire et entretiennent le lien avec nos militaires et toutes nos forces de sécurité.
Mes chers collègues, je vous invite à voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en préambule, permettez-moi de me réjouir du nouvel intitulé de la mission budgétaire pour 2026.
Nous avons remporté une longue bataille sémantique pour faire adopter les termes « monde combattant ». Il ne reste plus au ministère des armées et des anciens combattants qu'à suivre le même chemin…
Les crédits de la mission diminuent de 6,27 % par rapport à 2025 et s'établissent à 1,7 milliard d'euros. Comme chaque année, ce repli s'explique par la diminution continue du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité et des autres prestations versées aux combattants.
Pour comprendre cette baisse, il faut aussi noter l'absence de revalorisation du point de PMI pour 2026. Comme vous le savez, ce point est indexé sur l'évolution de la rémunération des fonctionnaires civils de l'État, plus précisément sur l'évolution de l'indice de traitement brut sur une période de référence. Le Gouvernement se retranche pourtant derrière la stabilité de l'indice pour ne pas faire évoluer le point de PMI, alors même que l'inflation prévisionnelle pour 2025 est de 1,1 %.
L'absence de toute revalorisation ne saurait être considérée comme juste et être acceptée par le monde combattant, alors que le gel général des pensions et des allocations sociales a finalement été rejeté par l'Assemblée nationale. Le Gouvernement doit entendre les conséquences qu'emporterait un tel gel et accepter de prendre une mesure dérogatoire, comme il a pu le faire par le passé.
Je rappelle que le point de PMI fixe également le montant de l'allocation de reconnaissance du combattant, qui s'élève à 835,64 euros par an.
Nous relevons par ailleurs une baisse significative de 17,2 % de l'enveloppe consacrée à l'action sociale de l'ONaCVG, qui finance les missions de solidarité envers le monde combattant et les victimes de guerre.
En outre, la commission regrette la diminution des crédits alloués à la politique mémorielle, qui ne s'explique pas uniquement par la fin du cycle commémoratif des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire. L'ONaCVG accusera ainsi une baisse de 0,8 million d'euros, répartie entre les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.
Nous avons tout de même trouvé un motif de satisfaction dans ce budget : les crédits consacrés aux liens armées-jeunesse sont préservés. Je me réjouis particulièrement que les moyens alloués au service militaire volontaire demeurent stables. En effet, les jeunes de 18 à 25 ans qui en profitent sont souvent en difficulté.
Le taux d'insertion professionnelle à l'issue de ce service militaire volontaire étant de 86 %, il convient de continuer de soutenir ce dispositif.
De même, les crédits consacrés à la Journée défense et citoyenneté sont maintenus, ce qui permettra de poursuivre le déploiement de sa nouvelle génération davantage militarisée.
Pour conclure, afin de ne pas priver le monde combattant d'un budget, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Michel Masset applaudit également.)
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour votre parfaite information, qu'il y a treize amendements à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à une heure trente. Nous devrons donc achever l'examen des crédits de la mission aux alentours de vingt-trois heures.
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation (suite)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale, mais aussi celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nadia Sollogoub. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
Mme Nadia Sollogoub. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quelle satisfaction que d'étudier cette année, enfin, le budget du « monde combattant » ! L'intitulé de cette mission inscrit au présent les liens entre la France et ceux qui la défendent.
Ce titre élargi englobe les pensions militaires et d'invalidité, les dispositifs de réhabilitation des blessés psychiques, mais aussi les actions mémorielles et, plus globalement, le lien armées-Nation.
Toutefois, au-delà de cette satisfaction sémantique, force est de constater que les crédits de cette mission sont globalement en diminution, ce qui, à bien des égards, n'est pas un bon signal. S'il est naturel que le volume des pensions s'allège au fil du temps, la non-revalorisation du point de PMI n'est en revanche pas acceptable.
En effet, alors que l'Assemblée nationale a rejeté le gel des pensions de retraite pour la population générale, il serait tout bonnement indigne de demander un tel effort au monde combattant.
En ce qui concerne la politique de mémoire, la seule fin du cycle lié au quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire ne suffit pas à justifier une baisse des crédits aussi importante. L'ONaCVG devrait ainsi perdre 0,8 million d'euros de sa subvention sur les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.
Madame la ministre, vous êtes ici devant une assemblée d'élus locaux, notamment de nombreux anciens maires ou adjoints, ruraux ou urbains, qui n'ont jamais économisé ni leur temps ni les deniers qui leur étaient confiés pour organiser des cérémonies mémorielles ou entretenir des lieux de mémoire.
À vrai dire, nous ne comprenons pas cette logique comptable. Elle n'est pas dans notre ADN. Il ne fait aucun doute que le retrait de l'État sur ces missions sera compensé par les budgets communaux et associatifs.
J'ai une pensée particulière pour l'équipe nivernaise du Souvenir français, qui recense les tombes des soldats morts pour la France dans chaque cimetière du département, nettoie, gratte, rénove, restaure et sort parfois certains d'entre eux de l'oubli. Ces bénévoles fouillent les archives départementales et organisent des cérémonies particulièrement émouvantes.
Comme le dit leur président, ils le font « pour qu'aucun de ces gars ne soit oublié ». C'est une belle mission, mais est-ce vraiment à eux de l'assumer ? Certes, ce formidable travail, réalisé avec cœur dans un cadre associatif ou municipal, ne coûte rien à l'État, mais je me demande si ce glissement – pour ne pas dire ce transfert – de compétence ne serait pas un aveu de faiblesse.
En revanche, les crédits à destination de la jeunesse sont maintenus, dans la volonté de faire monter en puissance le dispositif du service militaire volontaire.
Dans le contexte géopolitique international que nous connaissons, force est de repenser à ces mots de Simone Weil : « Le malheur contraint à reconnaître comme réel ce que l'on ne croit pas possible. » Si chacun de nous refuse au plus profond de son être d'imaginer un retour aux armes, c'est pourtant bien une logique de réarmement qui sous-tend ce projet de finances – et c'est compréhensible.
Pour ces raisons, le groupe Union Centriste votera les crédits de cette mission.
Je profite de cette occasion, madame la ministre, pour vous livrer un autre message. Je préside le groupe d'amitié France-Ukraine. Depuis le 24 février 2022, je partage de loin avec les députés de la Rada, les associations, et, plus largement, avec tous ceux qui sont devenus mes amis, un quotidien violent et guerrier, avec tout ce que cela comporte de drames et de larmes.
Au printemps 2025, une délégation de députés d'Ukraine est venue à Paris. Le groupe d'amitié l'a reçue et a organisé des événements que nos homologues avaient sollicités : rencontres sur le thème de la santé, de la coopération technique, de l'énergie et de l'armement, mais aussi, et c'est un point central, des échanges sur la prise en charge psychologique des vétérans.
Nous avons reçu un accueil inoubliable de Patricia Mirallès dans votre ministère et avons eu avec elle un échange très riche. Les maisons Athos ont été présentées à la délégation, ainsi que les différents dispositifs de prise en charge des blessures invisibles pour tous les traumatisés de guerre.
Nos amis ukrainiens nous l'ont largement affirmé : la question du retour à la vie civile est centrale. Pourtant, elle est souvent laissée dans l'ombre. Le ministère des vétérans est l'un des plus importants ministères ukrainiens et porte une charge énorme.
La question des anciens combattants n'est pas un sujet mineur, dont le budget serait en voie d'extinction ; voilà le message que je souhaite vous adresser aujourd'hui, madame la ministre.
Parce que le danger est désormais largement identifié et que l'heure est à la remilitarisation, j'alerte sur le fait que notre politique nationale doit rehausser à due proportion les moyens dévolus au soutien humain au monde combattant.
Nous désirons ardemment la paix et nous préparons la guerre ; il faut en convenir. Le monde combattant change de visage, de structuration, de mission, car, pour reprendre les mots de Winston Churchill : « Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu'il ne nous prenne par la gorge. » (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Émilienne Poumirol et M. Hussein Bourgi applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la différence entre la Nation et le peuple, c'est que la Nation dépasse le peuple. Elle est à la fois celui d'hier, d'aujourd'hui et de demain ; elle est le lien entre les générations qui se succèdent.
Ce lien passe par la mémoire. Comme le disait Primo Levi, « cela s'est passé, donc cela peut se reproduire ». Chaque jour, l'actualité nous le rappelle, en Ukraine, à l'extrémité de l'Europe, au Moyen-Orient ou ailleurs. Nous constatons que la paix n'est malheureusement jamais acquise.
Dans un passé pas si lointain, notre pays a connu la guerre sur son sol. Des femmes et des hommes se sont battus pour la paix, pour la France et pour les valeurs fondamentales de notre Nation, que nous défendons toujours à l'heure actuelle.
La mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » est là pour les honorer. C'est notre devoir à tous de ne jamais oublier ce que nous leur devons. Ce que nous sommes, les valeurs que nous partageons et notre liberté ne doivent pas être tenus pour acquis. « La plus belle sépulture, c'est la mémoire des hommes », disait André Malraux.
Comme l'année dernière, les crédits de la mission sont en baisse, essentiellement en raison de la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité et des autres prestations. Ces versements représentent en effet 95 % des crédits.
Je salue le changement de dénomination de la mission. Les termes « anciens combattants » ne reflétaient pas la réalité de la situation actuelle. La mission n'a pas seulement vocation à soutenir des vétérans de la Seconde Guerre mondiale, d'Algérie, de Tunisie ou du Maroc. Des militaires continuent de donner leur vie dans des opérations extérieures. Cette mission les concerne, eux et leurs familles, ce qu'occultait en partie son ancien intitulé.
En effet, l'engagement militaire – et ses risques corollaires – ne s'est pas arrêté avec les conflits que j'ai cités. Il est encore bien présent. Notre devoir mémoriel doit également porter sur ces générations plus récentes du monde combattant.
Nous leur devons également le meilleur accompagnement possible. À ce titre, nous saluons la consolidation du dispositif de réhabilitation psychosociale Athos, qui inclut la création d'établissements consacrés à l'accompagnement des militaires blessés psychiques.
En 2026 est prévu un gel du point de PMI, qui sert de base de calcul des pensions et des allocations. Il est impératif que le montant de ces prestations reste digne et équitable. À cet égard, une augmentation identique à celle des retraites aurait pu être prévue.
Indépendamment de la baisse du nombre de bénéficiaires des prestations, nous souhaitons que cette mission conserve toute l'attention et les moyens qu'elle mérite, compte tenu de sa portée symbolique et sociale.
La mémoire et le lien avec la Nation sont des valeurs transversales. Elles dépassent le simple cadre budgétaire : elles touchent à l'éducation citoyenne, à la transmission et à la cohésion sociale. Aussi pouvons-nous regretter la baisse des crédits destinés aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts, qui doivent rester des lieux de commémoration, de rassemblement, de transmission et d'éducation pour les plus jeunes.
En conclusion, je remercie l'excellent rapporteur spécial Marc Laménie de son travail et de son engagement sur cette mission depuis maintenant plus de dix ans, ainsi que de son investissement en faveur des anciens combattants dans son département.
Le groupe Les Indépendants votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi qu'au banc des commissions. – M. Laurent Somon applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Cette mission incarne la solidarité de la Nation envers nos militaires et le monde combattant, en raison de leur engagement et de leurs sacrifices au service de la France.
Nous ne saurions mener les discussions budgétaires sans penser à ces femmes et ces hommes avec infiniment de gratitude.
Je salue à mon tour le changement de nom de la mission, qui en rend l'objet plus lisible. Cette nouvelle dénomination reconnaît plus clairement les combattants encore en activité, qu'ils soient revenus d'Afghanistan, du Sahel ou du Levant. Il s'agit d'un pas symbolique important pour rappeler que l'on peut toujours servir son pays après son engagement miliaire.
Il convient de souligner la baisse des crédits alloués aux allocations en faveur du monde combattant : pension militaire d'invalidité et allocation de reconnaissance du combattant. Cette baisse s'explique principalement par la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires, mais elle résulte également de l'absence de revalorisation des dispositifs malgré l'inflation.
En effet, la stagnation du point de PMI constitue un motif de préoccupation dans le monde combattant, car la valeur de ce point, qui est indexé depuis 2005 sur le traitement brut figurant dans la grille indiciaire de la fonction publique, n'a pas suivi le rythme de l'inflation.
Malgré les revalorisations ponctuelles, notamment en 2022 et 2023, le pouvoir d'achat des pensionnés s'est érodé de manière significative depuis 2005. Je me joins donc à l'appel lancé au Gouvernement par la rapporteure pour avis Jocelyne Guidez : un coup de pouce doit être envisagé sur le point de PMI. La baisse du nombre d'allocataires doit aussi permettre de revaloriser les allocations pour soutenir le monde combattant.
Concernant les moyens accordés aux opérateurs, je m'inquiète de la dégradation de la santé financière de l'Office national des combattants et des victimes de guerre, au sein duquel j'ai l'honneur de représenter notre assemblée. Si la baisse de sa subvention pour charges de service public s'explique par la fin du pilotage budgétaire du dispositif d'aide aux militaires blessés psychiques Athos, force est de constater que cette subvention reste quasi stable depuis 2021, alors que ses coûts de fonctionnement augmentent.
L'ONaCVG est ainsi forcé de recourir à des contrats à durée limitée et ne peut pas recruter à hauteur du plafond d'emploi autorisé en loi de finances.
Surtout, la trésorerie de l'office, qui a été longtemps excédentaire, s'est asséchée après avoir été ponctionnée à plusieurs reprises en loi de finances. Son niveau est désormais inférieur à un mois de fonctionnement courant.
Cette situation est déplorable, tout comme l'est la baisse de 5 millions d'euros de sa subvention d'action spéciale, qui sert à financer des actions de solidarité comme le maintien à domicile, l'aide à la réinsertion professionnelle ou encore le soutien aux ressortissants en Ehpad. Rappelons qu'en milieu rural l'ONaCVG est parfois le seul contact de personnes en grande difficulté !
La préservation des moyens consacrés aux liens armées-jeunesse demeure l'une des seules satisfactions de ce budget. Les crédits consacrés à la Journée défense et citoyenneté sont en effet quasiment au même niveau qu'en 2025, après une forte hausse entre 2024 et 2025.
La JDC est désormais recentrée sur sa dimension militaire. Si elle permet toujours de détecter les jeunes en situation d'illettrisme, je regrette, comme notre rapporteur spécial Marc Laménie, qu'elle ne comporte plus aucun module de sensibilisation des jeunes à divers enjeux comme l'enseignement de la mémoire.
En effet, s'il y a bien un sujet sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est l'importance cruciale de la transmission. À chacune des cérémonies patriotiques auxquelles je participe, à chacun de mes déplacements dans les écoles, je constate l'impact décisif de l'enseignement de la mémoire, surtout lorsqu'il est illustré par des souvenirs personnels et des histoires de famille, dont nous avons tous des exemples. Pour mieux comprendre le passé et prendre conscience des enjeux actuels, nos enfants ont besoin d'exemples concrets.
Aussi ne puis-je que regretter la baisse de 22 % des crédits affectés à la politique de mémoire. Cette baisse importante est injustifiable ! Même en neutralisant les baisses liées à la fin du cycle du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, elle se répercutera sur les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.
À l'heure où le Président de la République veut ranimer la flamme du patriotisme et du lien de la Nation avec son armée, ce choix est pour le moins incohérent…
Malgré ces réserves, le groupe Les Républicains votera pour les crédits de cette mission. L'instabilité politique actuelle ne doit en aucun cas fragiliser notre politique de solidarité en faveur du monde combattant.
Nous le devons à la France. Nous le devons à tous ceux qui, un jour, se sont sacrifiés ou battus pour elle ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Solanges Nadille. (Applaudissement au banc des commissions – M. Michel Masset, Mmes Émilienne Poumirol et Sophie Primas applaudissent.)
Mme Solanges Nadille. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » revêt une importance symbolique majeure.
Elle porte sur l'effort de solidarité nationale à l'égard des militaires, des combattants, des victimes civiles de guerre et de leurs conjoints survivants. Elle traduit notre reconnaissance envers l'engagement et le sacrifice de ces femmes et de ces hommes qui ont servi la France.
Surtout, cette mission finance notre politique de mémoire et permet de préserver notre patrimoine culturel et mémoriel. Elle est un vecteur essentiel de cohésion et de résilience de la Nation, en particulier dans un contexte géopolitique dégradé.
Sur ce point, la diminution des crédits sur l'activité mémorielle s'explique avant tout par la fin du cycle des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, qui a représenté un effort important en 2024.
Le changement de dénomination de la mission dans le projet de loi de finances pour 2026 n'est pas anodin : c'est un moyen d'affirmer que le monde combattant appartient au présent. Il désigne autant les générations du feu, les anciens combattants d'Algérie, du Maroc et de Tunisie, que les générations actuelles revenues récemment d'opérations extérieures en Afghanistan, au Sahel ou au Levant.
S'établissant à environ 1,7 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits de la mission diminuent d'environ 6 % par rapport à 2025.
Ces diminutions s'expliquent essentiellement par l'évolution de la démographie des bénéficiaires des pensions. Elles résultent notamment de l'érosion du nombre de ressortissants de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre.
Le programme 169, qui concentre une très large majorité des crédits de la mission, traduit des orientations stratégiques essentielles.
Je pense en premier lieu à l'accompagnement des harkis, qui est l'un des points majeurs de la mission. Ce projet de loi de finances préserve le déploiement du dispositif prévu par la loi du 23 février 2022 leur ouvrant droit à réparation.
Depuis 2022, l'action en faveur des harkis et des autres supplétifs et rapatriés a fait l'objet d'un renforcement exceptionnel, qui s'est poursuivi jusqu'en 2025. L'année 2026 devrait marquer la fin de cette progression. Nous resterons vigilants quant à la poursuite de la valorisation de la mémoire des harkis, dans la continuité de l'effort engagé ces dernières années.
Je pense en second lieu à la consolidation du dispositif de réhabilitation psychosociale Athos. Il représente un soutien essentiel pour les blessés militaires psychiques, qui peuvent bénéficier d'un accompagnement adapté.
Dans ce même programme, les pensions militaires d'invalidité et l'allocation de reconnaissance du combattant sont les dispositifs qui concentrent le plus de crédits.
Nous avons tous rappelé notre attachement à ces allocations, qui doivent être préservées.
Cette année, la valeur du point de pension militaire d'invalidité demeure stable. Des amendements que nous examinerons tout à l'heure ont pour objet d'augmenter les crédits à hauteur de l'inflation en 2025, laquelle est estimée à 1 %. Nous en débattrons.
Enfin, cette mission comporte des dispositions en faveur de la jeunesse, dont les crédits sont stabilisés.
Parmi ces dispositifs, la Journée défense et citoyenneté a évolué cette année, avec un format nouvelle génération, qui vise à renforcer le lien entre les jeunes et les militaires. Elle contribue notamment à renforcer l'attractivité des métiers des armées. Le service militaire volontaire joue également un rôle essentiel pour améliorer l'accueil des jeunes en situation de précarité sociale.
Mes chers collègues, cette mission est essentielle à la reconnaissance et à l'indemnisation de ceux qui ont servi la France avec courage et dévouement.
En responsabilité, le groupe RDPI votera en faveur des crédits de la mission. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Émilienne Poumirol. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en préambule de l'examen de cette mission, je tiens à redire l'immense respect du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain envers l'ensemble des acteurs du monde combattant d'hier et d'aujourd'hui.
Comme l'an dernier, la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » voit ses crédits diminuer. Pour autant, la question de la reconnaissance mémorielle reste centrale et doit être défendue. Elle est l'un des fondements du vivre ensemble dans notre pays.
Les crédits alloués pour l'année 2026 au titre de cette mission diminuent de 6,3 %. Si elle est principalement due à la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires, cette baisse affecte également certaines enveloppes.
Tout d'abord, et je sais que c'est un point de vue partagé dans cet hémicycle, nous regrettons l'absence de revalorisation suffisante du point de PMI au regard de l'inflation. Nous constatons même une baisse des crédits finançant les pensions militaires d'invalidité de 6,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. Pourtant, la baisse du nombre d'allocataires aurait pu et même dû permettre de soutenir le monde des combattants via des revalorisations.
Cela a déjà été souligné, le mode de calcul de la PMI, qui est basé sur l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique d'État, a conduit à une stagnation de ce montant du fait du gel du point d'indice des fonctionnaires, et ce en dépit de l'inflation constatée.
Nous ne pouvons que regretter cet écart entre l'évolution de l'inflation et celle du point de PMI. En effet, il nous paraît indispensable de préserver le pouvoir d'achat de ces retraités, dont les pensions sont déjà très faibles. Nous demandons donc une revalorisation au Gouvernement.
Le projet de budget pour 2026 consacre également une diminution importante – 5 millions d'euros – de la subvention d'action sociale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG). Celle-ci sert pourtant à soutenir des actions de solidarité envers le monde combattant et les victimes de guerre.
Cette diminution est notamment liée à la fin de la mesure Pupilles majeurs, qui a été introduite en 2024 et qui bénéficiait à 120 000 pupilles de la Nation.
Là encore, nous déplorons la décision du Gouvernement de ne pas soutenir de telles actions sociales. Comme l'a souligné Mme la rapporteure pour avis, le nombre de ressortissants en grande difficulté a tendance à augmenter, en particulier « en raison des besoins grandissants de la troisième génération du feu, et notamment des veuves isolées, et des besoins plus spécifiques des générations des Opex ».
Nous notons de la même manière la diminution de 4,3 % des crédits alloués au financement des aides versées aux harkis et aux rapatriés.
Les crédits alloués au droit à la réparation en faveur des harkis et des autres personnes rapatriées d'Algérie, en application de la loi du 23 février 2022, enregistrent une baisse de 16 %. Il apparaît ainsi que le budget consacré, en particulier, à l'instruction des dossiers de demande de réparation par l'ONaCVG et leur présentation à la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, qui avait alors été installée, est insuffisant pour traiter l'ensemble des 12 600 demandes non traitées et qui devraient être acceptées. Nous appelons donc le Gouvernement à augmenter les crédits alloués pour que chacun, en particulier les harkis, puisse bénéficier au plus vite de l'indemnisation qui lui est due.
Comme les années précédentes, nous demanderons l'adoption d'un amendement visant à assurer l'indemnisation de dix-huit supplétifs de statut civil de droit commun de la guerre d'Algérie qui se sont vu refuser l'allocation de reconnaissance du combattant.
Nous proposerons aussi par voie d'amendement de mettre fin aux disparités existantes et d'élargir la rente viagère de 700 euros par mois qui est accordée aux veuves d'anciens supplétifs à toutes les veuves, sans tenir compte de la date du décès de leur mari, dans un souci d'équité et d'équilibre.
Enfin, ce projet de loi de finances réduit les crédits alloués à la politique de mémoire. Si une partie de cette diminution s'explique évidemment par la fin de la mission commémorative du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, le budget de l'ONaCVG sera néanmoins amputé de 800 000 euros pour ses actions mémorielles, son soutien à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts. Nous ne pouvons que déplorer cette décision du Gouvernement, dans un temps où notre mémoire doit plus que jamais être transmise et soutenue.
Le projet de loi de finances pour 2026 établit une nouvelle sous-action consolidant les financements destinés aux maisons Athos. Ainsi, une sixième maison est en cours d'installation dans le Haut-Rhin. J'ai assisté à l'inauguration par Mme Mirallès de la cinquième maison dans le Lauragais, dans un petit village situé à dix kilomètres de chez moi. Il s'agit d'un établissement remarquable.
Si nous saluons évidemment ces avancées pour les maisons Athos, qui accompagnent les blessés psychologiques et leurs familles, nous alertons sur la trop faible progression des financements, qui met en péril les capacités de recrutement pérennes de ces structures.
Enfin, nous prenons note de la stabilisation des crédits consacrés aux liens armées-jeunesse, notamment du fait de la généralisation de la Journée défense et citoyenneté « nouvelle génération ». Cette journée sera plus immersive, afin de susciter davantage de vocations pour les carrières militaires. Elle sera mise en place à partir du 1er janvier 2026.
Conscient de l'importance de ce budget pour le monde combattant, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera toutefois pour l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi qu'au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de cette mission pour 2026 s'inscrit dans une évolution lexicale et politique inquiétante. L'intitulé de la mission, dont les premiers termes étaient auparavant « Anciens combattants », commence désormais par « Monde combattant ».
Ce changement reflète la place plus importante accordée aux générations Opex au détriment des anciennes générations du feu.
Les anciens combattants sont pourtant toujours en vie et subissent toujours le gel du point de la pension militaire d'invalidité et l'absence de revalorisation de l'allocation de reconnaissance du combattant.
Ce changement révèle, selon nous, une évolution de la politique de défense de notre pays qui prépare les mentalités au retour des conflits armés sur notre sol.
Lorsque le chef d'état-major des armées affirme que l'armée française doit se préparer à un choc d'ici trois ou quatre ans face à la Russie, il participe à ce discours aux accents bellicistes. Lorsque le même dit : « Si notre pays flanche parce qu'il n'est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, parce qu'il faut dire les choses, de souffrir économiquement parce que les priorités iront à de la production défense, alors, on est en risque », nous passons un cap dans la rhétorique guerrière.
Jamais nous n'accepterons de perdre des enfants dans des conflits fabriqués par le capitalisme, qui cherche dans l'économie de guerre à dégager des profits qu'il n'arrive plus à accumuler dans la financiarisation de l'économie ! Nous refuserons toujours que nos enfants meurent pour défendre les intérêts financiers d'une poignée de puissants ! L'expérience l'a montré, ce sont toujours les enfants des ouvriers et des employés qui sont envoyés sur la ligne de front, tandis que les enfants des milliardaires jouent à la guerre sur leurs écrans de télévision !
L'intitulé de cette mission budgétaire se termine par les termes « mémoire et liens avec la Nation ». Il faut croire que la transmission des horreurs des conflits armés aux jeunes générations est moins importante pour le Gouvernement, qui veut effacer les monuments aux morts dans nos communes pour y inscrire les noms de nos enfants.
En bon soldat de l'Otan, le Président de la République a annoncé pour l'été 2026 un nouveau service national militaire. Encore volontaire, celui pourra devenir obligatoire demain en cas de situation exceptionnelle. Nos jeunes pourront suivre pendant dix mois une formation militaire gracieusement rémunérée 800 euros par mois.
Bientôt, ils pourront rejoindre leurs voisins allemands, qui, pour l'instant, ont échappé au retour de la conscription obligatoire. Le gouvernement allemand a maintenu son ambition de bâtir l'armée conventionnelle la plus puissante d'Europe pour contrer la menace russe et compenser le désengagement du bouclier américain.
Le modèle européen Erasmus s'est largement fissuré au profit de la concurrence de l'armée la plus imposante et la plus moderne. Vos discours atlantistes nous ont conduits de L'Auberge espagnole à Voyage au bout de l'enfer.
Le 7 mars 1895, dans son discours à la Chambre des députés, Jean Jaurès déclarait : « Toujours votre société violente et chaotique, même quand elle veut la paix, même quand elle est à l'état d'apparent repos, porte en elle la guerre comme la nuée dormante porte l'orage. Messieurs, il n'y a qu'un moyen d'abolir enfin la guerre entre les peuples, c'est d'abolir la guerre entre les individus, c'est d'abolir la guerre économique, c'est de substituer à la lutte universelle pour la vie, qui aboutit à la lutte universelle sur les champs de bataille, un régime de concorde sociale et d'unité. »
Nous refusons la vision impérialiste engagée dans ce projet de loi de finances pour 2026.
Par conséquent, nous voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Thierry Cozic applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année, la présente mission voit ses crédits diminuer.
Pour 2026, la baisse est tout de même de 6,46 %. Cette évolution s'explique seulement en partie par la disparition d'anciens combattants, de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité ou de victimes de spoliation ou de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale en raison de leur âge avancé. Elle tient aussi à la fin de la branche commémorative.
Cette disparition des anciens combattants et résistants, mais aussi des victimes de guerre et de leurs contemporains, qui ont toutes et tous été touchés de près ou de loin, pose l'évidente question de la transmission de la mémoire.
Comme beaucoup d'entre vous, mes chers collègues, j'ai eu l'honneur de pouvoir échanger avec des résistants et des anciens combattants lors de cérémonies officielles ou dans le cadre scolaire. Ces échanges sont toujours marquants, car ils nous rappellent le prix douloureux de la liberté. Malheureusement, ces occasions se font désormais rares.
En parallèle, nous assistons au grand retour des discours belliqueux promus par l'extrême droite. Par le biais de ses accointances avec certains régimes autoritaires et ses politiques impérialistes, celle-ci prépare les guerres de demain. Par ailleurs, la cohésion sociale de notre société se réduit de manière préoccupante avec la prolifération de propos et actes racistes, antisémites et négationnistes.
Dans ce contexte très inquiétant, le devoir de mémoire est plus important que jamais. Je regrette donc vivement le choix du Gouvernement de réduire de plus de 23 % le budget de la sous-action « Mémoire et patrimoine mémoriel », qui remplit justement cette fonction. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à accorder 3 millions d'euros supplémentaires à cette branche du budget. Je vous invite vivement à le voter, mes chers collègues.
En cette année du quatre-vingtième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, la tentative de suppression du jour férié commémorant cette victoire contre l'occupant nazi par le Premier ministre François Bayrou était déjà un affront total à cette mémoire ! Si je me réjouis que cette folie n'ait pas abouti, diminuer le budget de la mémoire d'une telle ampleur serait également un très mauvais signal.
Permettez-moi également de regretter la transmission parfois très partiale de cette mémoire. Ainsi, alors que 57 % des Français estimaient en 1945 que l'URSS était la nation ayant le plus contribué à la défaite du Troisième Reich, contre 20 % pour les États-Unis et 12 % pour la Grande-Bretagne, ces proportions se sont inversées depuis. Si la contribution évidente des États-Unis, notamment par le débarquement de Normandie, est largement transmise, c'est beaucoup moins le cas de celle de l'URSS, qui a pourtant perdu 20 millions de personnes durant la Seconde Guerre mondiale.
De même, la transmission des guerres coloniales, notamment d'Indochine et d'Algérie, reste encore trop faible. Alors que des représentations caricaturales de cette mémoire inondent le débat public et que l'enjeu mémoriel reste central dans nos relations avec l'Algérie, la réalité de ces guerres doit être enseignée à toutes les Françaises et tous les Français.
Le sang versé par de nombreux colonisés, comme les tirailleurs sénégalais, ou par les francs-tireurs et partisans - main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI) n'a pas moins de valeur que celui des autres résistants ou soldats français. Leur contribution à la libération de la France doit être connue du plus grand nombre. Inscrire cette mémoire dans le roman national est d'autant plus important que cela permettrait de développer un plus fort sentiment d'appartenance à la Nation chez des milliers de jeunes Français héritiers de cette mémoire.
Pour conclure, le groupe GEST votera les crédits de cette mission, mais sera très attentif à ce que la politique mémorielle ne soit pas sacrifiée sur l'autel de l'austérité. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. le rapporteur spécial applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chaque année, les générations qui ont connu les conflits du XXe siècle disparaissent.
Cette réalité entraîne mécaniquement une baisse du nombre de bénéficiaires de la mission consacrée aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la Nation.
Toutefois, cette diminution ne doit pas nous conduire à effacer la reconnaissance nationale qui est due à ceux qui ont défendu notre pays. Cette mission n'est pas qu'un soutien financier. Elle est la concrétisation d'une obligation morale de la Nation envers ses anciens combattants et leurs familles, mais également envers les générations futures.
Je tiens à saluer le renforcement du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».
De plus, la progression des crédits dédiés aux harkis répond à la nécessité d'honorer certaines décisions de justice, restées trop longtemps insatisfaites. Il faudra aller plus loin.
En effet, cette mémoire n'est pas juste un concept abstrait. Dans nos territoires, elle se vit au quotidien, notamment en Lot-et-Garonne. Je pense évidemment aux camps de Bias et de Sainte-Livrade-sur-Lot, qui ont accueilli plus d'un millier de Français d'Indochine à partir de 1956. Ce sont des familles entières, des couples et des veuves de Français qui fuyaient la guerre et pour lesquels la France représentait un refuge. Ces lieux ont ensuite accueilli, à partir de 1962, des familles de harkis en transit. Leur histoire fait désormais partie intégrante de celle du Lot-et-Garonne.
À Sainte-Livrade-sur-Lot, qui reste aujourd'hui l'un des derniers sites historiques, la mémoire des Français d'Indochine est encore très présente et continue d'être transmise. Elle fait partie de l'histoire de notre département, de notre pays et elle mérite pleinement sa place dans la politique mémorielle nationale. Une proposition de loi a d'ailleurs été déposée sur ce thème et il serait légitime que le Sénat puisse l'examiner dans les meilleurs délais.
Je tiens également à saluer le travail de nos communes. Aucune d'entre elles ne manque les commémorations en mémoire de nos anciens combattants. Tout comme nos écoles ! Je pense notamment au concours de la Résistance organisé par l'Association nationale des anciens combattants de la résistance (Anacr) dans les collèges et les lycées, qu'il faut, là aussi, accompagner. Ce concours gagnerait à être généralisé ; il se déroule principalement dans le Sud-Ouest. Je regrette d'ailleurs qu'il ne soit pas imposé dans les programmes scolaires aujourd'hui.
Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale » connaît aussi une baisse du nombre de bénéficiaires.
Malgré cette baisse, l'État doit continuer d'assurer une réparation complète et traiter les derniers dossiers en cours en matière de restitution des biens spoliés. La loi du 22 juillet 2023 relative à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 a permis de faciliter cette démarche. Les moyens prévus pour 2026 permettront de suivre ce travail jusqu'à son terme.
Ce programme finance également l'indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ou d'actes de barbarie. Là encore, madame la ministre, votre administration ne doit laisser aucun ayant droit sans réponse, il lui faut respecter la promesse mémorielle de la Nation envers ces personnes.
Cette mission est donc bien plus qu'une simple addition de crédits. Elle illustre une histoire nationale et le devoir que nous avons envers les anciens combattants, leurs familles, mais aussi les générations futures.
Le groupe RDSE, fidèle à son engagement envers la mémoire combattante et les valeurs républicaines, votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons a cette particularité d'unir le passé et l'avenir : le monde des combattants, mais aussi celui des jeunes, avec les liens armées-jeunesse, que l'actualité remet au centre.
Il ne s'agit donc pas seulement d'une mission de témoignage pour ceux qui ont combattu pour notre pays. Elle est aussi une mission de mémoire, de transmission et une mission qui rappelle la nécessaire cohésion des citoyens dans un monde redevenu incertain et instable. Elle regroupe donc beaucoup d'enjeux. Outre le passé et l'avenir, c'est aussi le présent qui est impliqué.
La particularité de cette mission est de subir une baisse de la quasi-totalité de ses crédits, par exemple en raison de l'attrition d'une population, comme c'est le cas des crédits pour les allocations viagères. Les autres crédits, en effet, stagnent ou diminuent.
Je salue mon collègue des Ardennes Marc Laménie, rapporteur spécial des crédits de cette mission. Notre département, les Ardennes, est une terre qui a connu le feu et qui est intimement concernée par tous les programmes de la mission.
Cette mission a évidemment pour objet les engagements que nous honorons, comme ceux envers les harkis, les autres supplétifs et les rapatriés.
Les crédits sont en baisse par rapport à 2025. Ainsi, la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie peut être fragilisée dans son application. C'est un point sur lequel nous devons rester vigilants. Je salue l'amendement du rapporteur spécial visant à réabonder à hauteur du niveau de l'année dernière les crédits consacrés à l'indemnisation des harkis. La parole donnée doit être respectée.
Je regrette cependant que les supplétifs de statut civil de droit commun ne bénéficient pas de l'allocation de reconnaissance du combattant pour des raisons contentieuses. Cette injustice doit être réparée sans plus tarder !
La baisse des crédits de la politique de la mémoire est aussi à suivre avec beaucoup d'attention. Ceux-ci ont connu un pic en 2024 en raison de la commémoration du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire qui l'avaient entourée.
Les annulations, dont le niveau est préoccupant, comme l'a souligné le rapporteur spécial, posent des problèmes pour la réalisation des travaux d'entretien et fragilisent ainsi notre patrimoine mémoriel. En effet, nous devons rester attentifs aux nécropoles et carrés militaires.
Notre patrimoine mémoriel doit être entretenu, car les dégradations qui ne sont pas réparées à temps peuvent évidemment coûter plus cher à terme. J'appelle l'attention de Mme la ministre sur la nécessaire protection de nos lieux de mémoire. Je peux en témoigner dans les Ardennes.
Je salue au passage tous les bénévoles des associations qui participent à la vie de ces lieux de mémoire. Leur engagement doit être honoré, car ils donnent de leur temps et de leur énergie.
On note enfin la stabilité des crédits de la Journée défense et citoyenneté et du service militaire volontaire. Dans le contexte actuel, ces institutions sont appelées à jouer un rôle, notamment avec ce récent appel au renforcement du service militaire volontaire. Beaucoup de questions sont posées. La guerre en Ukraine s'invite indirectement dans l'examen de cette mission. Songeons aussi à toute cette instabilité géopolitique.
Comment réévaluer la Journée défense et citoyenneté à l'aune de l'inévitable remilitarisation de l'Europe ? Comment faciliter ce service militaire volontaire, appelé à prendre de l'ampleur ?
Enfin, dans la cohésion de la Nation, la Journée défense et citoyenneté a permis de détecter des situations d'illettrisme, preuve ce dispositif a une utilité. Comment, dans une journée, continuer à détecter ce qui fait défaut à notre cohésion ? Voilà un aspect qui pourrait être renforcé.
Quelles peuvent être donc les pistes pour une Journée défense et citoyenneté qui serait peut-être appelée à être encore refondue ? Il y a donc matière à réflexion en raison des évolutions actuelles.
Enfin, nous restons préoccupés par l'ONaCVG. La subvention pour charges de service public n'a pas été revalorisée, ce qui compromet les capacités de l'Office à recruter à hauteur de son plafond d'emplois autorisé en loi de finances. Il faut aussi faciliter les missions de cet établissement. Là aussi, nous devons garantir la bonne application d'une loi que nous avons votée en 2022.
Malgré certaines craintes, le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée auprès de la ministre des armées et des anciens combattants. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à saluer l'exceptionnelle promotion du Bleuet de cette année. Je connais votre engagement en la matière et je vous en remercie.
Voilà quatre-vingts ans, au mois de juin 1945, le général Leclerc faisait ses adieux à la 2e division blindée en recommandant de conserver dans le temps de paix qui s'ouvrait alors ce qu'il appelait un « patriotisme agissant ». Les interventions qui se sont succédé ce soir ont, me semble-t-il, fait écho à cette exigence d'un « patriotisme agissant ».
Oui, il s'agit bien de « patriotisme », car l'objectif est de développer l'esprit de défense de notre Nation, dans un moment où – cela a également été souligné – les dangers s'accumulent.
Oui, ce patriotisme est « agissant » : reconnaître ce que nous devons à ceux qui se sont battus pour nous, c'est regarder non pas vers le passé, mais vers l'avenir.
Madame la sénatrice Sollogoub, vous avez évoqué l'Ukraine. J'ai récemment rencontré la ministre ukrainienne des vétérans et lui ai exprimé mon soutien. Preuve que ce devoir de reconnaissance est à la fois très actuel et très concret, l'Ukraine doit d'ores et déjà gérer la situation de ses vétérans ; cela fait intégralement partie de l'effort de guerre. Nous devons y être attentifs, car cela nous dit aussi quelque chose des réalités du temps présent.
Ce « patriotisme agissant », c'est celui du monde combattant, qui, s'il n'est pas présent dans l'hémicycle aujourd'hui, est bien à nos côtés. Plusieurs orateurs y ont fait référence.
Je tiens à saluer l'engagement et le savoir de ces hommes et de ces femmes. Je parle en connaissance de cause, puisqu'ils m'ont déjà beaucoup appris depuis mon entrée en fonction, et ils continuent de le faire. J'ai aussi beaucoup appris à vos côtés, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, et j'ai vraiment l'intention de coconstruire mon action avec vous.
En effet, cette mission a évidemment un caractère particulier. Ce n'est pas une mission budgétaire comme les autres. Elle revêt une dimension morale, puisqu'elle relève d'un devoir. Toucher à un euro de cette mission, c'est toucher à une partie de nous-mêmes, de notre pays, de ce que la Nation doit à celles et ceux qui se sont battus pour lui.
Ainsi que cela a été évoqué, la mission est marquée cette année par un changement sémantique. Elle s'intitule désormais « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Ce changement est emblématique de la dynamique que je viens de décrire.
Madame la rapporteure pour avis, je crois que tout le monde sait ici combien ce nouveau nom vous doit. Je vous félicite donc de ce succès, qui a déjà été annoncé par le changement de nom de l'Office.
Non, madame la sénatrice Apourceau-Poly, cette évolution lexicale ne s'inscrit pas dans une perspective belliciste. Au contraire ! Il s'agit bien de reconnaître la quatrième génération du feu, celle qui s'est battue pour nous dans les opérations extérieures. Nous voulons que la génération des anciens combattants et, plus généralement, l'ensemble du monde combattant se projettent vers l'avenir. Pour en avoir beaucoup parlé avec les représentants des associations, je sais qu'ils y sont tout à fait prêts. Ce travail de mémoire et de transmission, auquel vous êtes nombreuses et nombreux à avoir fait référence, nous le leur devons. C'est important pour notre pays.
Malgré ce qui a pu être dit, les grands équilibres de ce budget sont préservés. Certes, on note une baisse, mais vous en connaissez les motifs.
Cela s'explique d'abord par l'érosion du nombre de ressortissants de l'ONaCVG – évidemment, il s'agit d'une perspective triste –, qui devrait passer de 1,6 million actuellement à environ 550 000 en une vingtaine d'années, soit une baisse annuelle moyenne de 6 % à 7 %, d'après nos calculs. Nos évaluations s'appuient sur des éléments tangibles.
Par ailleurs, ne nous racontons pas d'histoires, le contexte budgétaire est quelque peu contraint. Il n'y a pas de raison que cette mission ne contribue pas aussi à l'effort budgétaire de toute la Nation.
Je tiens à rendre hommage à ma prédécesseure, qui a construit largement les grands équilibres de ce budget et qui s'est battue à vos côtés pour les protéger.
Je pense à la reconnaissance des combattants, de leurs proches et des victimes civiles de guerre, à la réparation des sacrifices consentis et à la valorisation du patrimoine mémoriel et culturel, qui nourrit la conscience que la France a d'elle-même.
S'il y a bien une baisse de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025 – je viens d'en donner des éléments d'explication –, je rappelle que les principaux postes budgétaires sont préservés.
Ainsi, 617 millions d'euros sont prévus pour les pensions militaires d'invalidité, 464 millions d'euros sont consacrés à l'allocation de reconnaissance du combattant. Celle-ci exprime depuis la Grande Guerre la reconnaissance de la Nation envers ceux qui ont combattu et qui ont survécu.
Le point de PMI a été largement évoqué. Permettez-moi de vous dire ce que je pense sincèrement – c'est selon moi la meilleure manière d'ouvrir le débat.
Une règle d'indexation a été fixée en 2022. Elle a été discutée de manière tripartite entre le gouvernement de l'époque, les associations du monde combattant et les parlementaires.
La règle d'indexation s'appuie sur le point d'indice des agents de la fonction publique, lequel n'évolue pas. Plusieurs d'entre vous, notamment Mme Poumirol, ont évoqué la question de l'inflation et exprimé leurs inquiétudes sur ce sujet.
C'est la raison pour laquelle, comme je l'ai annoncé lors de mon audition par la commission des affaires sociales, nous publierons, au début de l'année 2026, un rapport mesurant l'écart entre le point de PMI et l'inflation. Je sais que le dépôt du précédent rapport a pris du retard, ce qui ne simplifie pas la tâche.
Avant que nous ne passions à l'examen des amendements, je précise que le Gouvernement ne lèvera aucun gage : les crédits que vous souhaitez allouer à une ligne budgétaire devront être ponctionnés sur une autre. Sur ce sujet, j'en appelle à la responsabilité collective.
J'entends la préoccupation du monde combattant concernant l'inflation, que vous relayez très justement ici. Quelle que soit l'issue de nos débats ce soir, gardons-nous de transformer un dispositif d'indexation qui s'est révélé positif à cause d'une situation ponctuelle.
Gardons à l'esprit que la PMI est non pas une pension de retraite, mais une allocation qui témoigne de la reconnaissance de l'État. Au-delà de la situation budgétaire et des débats que nous avons cette année, veillons à préserver la solidité de ce dispositif.
Bref, je continuerai à travailler avec vous sur la question de l'inflation.
J'en viens à la poursuite du plan Blessés 2023-2027. Plusieurs d'entre vous ont souligné l'importance du dispositif Athos. J'ai mesuré à quel point celui-ci était essentiel et méritait nos efforts pour être consolidé, lorsque j'ai visité des maisons Athos à Bordeaux et à Toulon. Je me rendrai d'ailleurs demain à Colmar, pour inaugurer la sixième maison.
Notez que 80 % des 120 mesures du plan Blessés sont déjà appliquées. Je vous appelle à voter les crédits de la mission, qui permettront de mettre en œuvre ce plan jusqu'au bout.
Le budget met également l'accent l'Institution nationale des invalides (INI), à laquelle nous tenons tous ici. La subvention pour charges de service public (SCSP) qui lui est versée est stable, dans la mesure où elle s'élève à 14,4 millions d'euros.
En outre, sachez qu'un nouvel effort de 7,5 millions d'euros sera fait en matière d'investissement pour la réalisation de travaux de mise aux normes et l'acquisition de logiciels.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tous rendu hommage à l'ONaCVG. Je me joins à vous et salue le travail qui a été accompli par sa directrice générale.
Le projet de loi de finances pour 2026 préserve les moyens en effectifs et en subventions de fonctionnement de cet établissement. En outre, des investissements sont maintenus pour rénover le logiciel de traitement des dossiers et de paiement des allocations.
L'évolution du nombre de ressortissants de l'ONaCVG conduit à une contraction de l'enveloppe consacrée à l'action sociale. Cependant, je vous indique avoir demandé le maintien de la commission instituée en 2024 et en 2025 pour conforter l'aide aux pupilles de la Nation qui ont atteint l'âge de la majorité. Celle-ci pourra ainsi continuer à accompagner les individus concernés, dossier par dossier, et allouer une aide en complément du soutien mis en place à l'échelon départemental.
En 2026, l'ONaCVG bénéficiera d'un nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP). J'espère que vous vous engagerez tous dans la réflexion qui sera ouverte sur ce sujet, car nous aurons besoin de vos recommandations et de votre appui.
Ce contrat permettra notamment d'anticiper la nécessaire adaptation de l'Office à l'évolution du nombre de ressortissants et à leur répartition géographique.
Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la ministre déléguée.
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. L'action en faveur des harkis reste majeure. Elle est donc complètement maintenue et soutenue.
Enfin, les crédits consacrés à l'activité mémorielle sont réduits, en raison de la fin des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire. Il n'empêche que j'ai bien entendu vos remarques sur la nécessité de restaurer les monuments aux morts. Je veillerai personnellement à ce que des actions soient entreprises en ce sens. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
1 730 919 618 |
1 738 300 118 |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
1 652 495 770 |
1 659 876 270 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale |
78 423 848 |
78 423 848 |
dont titre 2 |
1 508 987 |
1 508 987 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-1737 rectifié, présenté par MM. Canévet, Cambier, Delahaye et Maurey, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
SOLDE |
- 20 000 000 |
- 20 000 000 |
||
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Cet amendement, comme ceux que j'ai déposés sur l'ensemble des missions de ce projet de loi de finances, vise à appeler l'attention de notre assemblée sur le fait que les dépenses publiques ont tendance à s'envoler et qu'il convient de les maîtriser au mieux.
En l'occurrence, cet amendement a un objet modeste, puisqu'il s'agit de réduire de 20 millions d'euros le montant des crédits de cette mission. Les économies escomptées permettront de ne pas dégrader davantage nos finances publiques qui, comme chacun le sait ici, ne se portent pas très bien.
Il est nécessaire que vous votiez cet amendement, mes chers collègues, si nous voulons commencer à réduire nos dépenses publiques.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Avant de donner l'avis de la commission sur chacun de ces amendements, je tenais, madame la ministre, mes chers collègues, à vous remercier sincèrement de vos témoignages, empreints de cœur et de passion.
Nous pouvons comprendre le coup de rabot de 5 % proposé par M. Canévet via cet amendement, même s'il paraît un peu dur.
Cependant, compte tenu des enjeux de cette mission – je pense notamment à l'entretien de la mémoire au travers de multiples sites, comme les nécropoles –, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Cette mission budgétaire est une dette, au sens moral du terme.
Certes, il n'existe certes pas d'argent magique, mais il n'y a pas non plus d'économies magiques.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Michel Canévet fait preuve de constance : mission après mission, il demande des diminutions de crédits. À l'évidence, il ne voit comme solution à la situation actuelle de notre pays qu'une réduction drastique des dépenses.
Comme pour la mission « Santé », dont nous venons d'achever l'examen, ce serait une erreur de diminuer les crédits dont nous discutons maintenant. Ces derniers sont en effet essentiels pour entretenir la mémoire non seulement des anciens combattants, mais aussi celle des combattants d'aujourd'hui, qui servent notre pays dans le cadre des opérations extérieures (Opex).
Le lien armées-Nation est important et il faut le conserver.
Je regrette, monsieur Canévet, que votre position se réduise à exiger des coupes budgétaires. Vous n'avez jamais suivi les propositions du groupe SER pour trouver des recettes, considérant qu'elles étaient toujours excessives en ce qu'elles frappaient des individus aux revenus importants.
Bref, je trouve votre attitude très dogmatique, cher collègue !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. On ne juge pas les résultats d'une mission uniquement à l'aune de l'augmentation de ses crédits. Je crois qu'il est temps, dans notre pays, de remettre en cause un certain nombre de politiques publiques, si nous voulons réduire le déficit, dont le montant devrait s'élever à 124 milliards d'euros pour le budget de l'État. C'est considérable ! Il est temps que chacun d'entre nous prenne enfin la mesure de la situation réelle des comptes publics ! (M. Jean-Jacques Panunzi acquiesce.)
Dès lors que nous ne sommes pas capables de trouver les recettes permettant de financer ce budget, nous devons arrêter d'imposer nos concitoyens qui en ont déjà ras-le-bol, comme le révèlent toutes les enquêtes d'opinion.
Ce sont bien nos concitoyens eux-mêmes qui nous demandent de réduire significativement les dépenses publiques : là encore, regardez les enquêtes d'opinion à ce sujet ! (Mme Émilienne Poumirol proteste.)
Si nous ne réduisons pas la dépense, nous échouerons à répondre à l'attente de nos concitoyens. Ne vous étonnez pas, dans ce cas, du résultat des urnes !
Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Je peux affirmer sans trop me tromper que, si les Françaises et les Français nous demandent de faire des économies, ce n'est certainement pas sur le budget des anciens combattants. J'en veux pour preuve le respect et la gratitude qu'ils témoignent à ces derniers, chaque fois qu'ils en ont l'occasion.
Certes, il faut faire des économies, mais, de grâce, pas sur ce budget-là, d'autant que celui-ci n'est pas le plus important de la République.
Monsieur Canévet, il est faux de dire que nous n'avons pas trouvé de recettes : nous n'avons cessé de faire des propositions en ce sens. Malheureusement, à de nombreuses reprises, la majorité sénatoriale ne nous a pas suivis. (Mme Pascale Gruny et M. Michel Canévet s'exclament.)
C'est la raison pour laquelle je nous invite toutes et tous à raison garder et, surtout, à ne pas essayer de mégoter sur le dos des anciens combattants et des associations mémorielles et patriotiques.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Avançons, chers collègues !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1737 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-2036 rectifié bis, présenté par MM. Fernique, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme Drexler, MM. Dossus et Gontard, Mmes Guhl et Herzog, MM. Jadot, Kern et Klinger, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Schalck, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
30 012 920 |
30 012 920 |
||
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
||||
Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale |
30 012 920 |
30 012 920 |
||
TOTAL |
30 012 920 |
30 012 920 |
30 012 920 |
30 012 920 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Depuis le 11 novembre dernier, il y a tout juste un mois, une plaque a été installée aux Invalides pour rendre hommage aux Alsaciens et aux Mosellans qui furent incorporés de force dans l'armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale.
Ces 130 000 hommes, âgés de 17 à 36 ans, furent contraints de porter les armes sous un uniforme qu'ils détestaient ; 40 000 d'entre eux ne sont jamais revenus, ce qui, pour les seuls départements d'Alsace et de Moselle, représente 18 % de la totalité des militaires Français morts durant cette guerre.
Cette plaque redonne de la dignité à ceux auxquels on a imposé le statut de traîtres. Pendant les décennies qui suivirent la guerre, les survivants et leurs proches ont vécu avec cet opprobre. Bien peu, parmi leurs compatriotes, ont eu conscience du manquement dont les départements évoqués ont été victimes.
Ce manquement s'est d'abord traduit par l'abandon de l'État face à l'annexion, de fait, de ces territoires en 1940. Cette injustice s'est prolongée parce que des décennies ont passé avant qu'il soit admis qu'il s'était bien agi d'une annexion, et non d'une occupation. C'est de cette annexion qu'a résulté le crime de masse qu'a été l'incorporation de force de nos soldats dans l'armée allemande.
Leurs orphelins – ces enfants privés de père, qui sont encore plus de 3 000 aujourd'hui et qui sont évidemment très âgés – n'ont bénéficié d'aucune aide financière en reconnaissance de leurs souffrances, contrairement à ce que prévoient les décrets de 2000 et de 2004 qui ont reconnu les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie.
Cet amendement est défendu au nom du groupe GEST, mais j'appelle votre attention sur le fait qu'il a été cosigné Elsa Schalck, Sabine Drexler, Christine Herzog et Christian Klinger.
Nous proposons de faire un geste concret envers les orphelins des incorporés de force, victimes d'un manquement national après un crime de masse si spécifique.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Nous comprenons le sens de cet amendement pour les départements d'Alsace et de Moselle, d'autant qu'il a été cosigné par presque tous les sénateurs de ces territoires.
Malgré tout le respect qu'elle a pour une telle demande, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je vous remercie de nous permettre de rappeler le devoir de mémoire que nous avons vis-à-vis des incorporés de force dans l'armée allemande. J'irai demain leur rendre hommage au mémorial Alsace-Moselle, à Schirmeck, dans la continuité de l'inauguration, par le Président de la République, le 11 novembre dernier, de la plaque qui leur est dédiée aux Invalides.
J'ajoute que le ministère soutient la recherche historique sur ce sujet, qui sera déclinée dans les manuels scolaires. Je suis à votre disposition pour en discuter.
À cet égard, Monsieur le sénateur, vous pouvez être assuré de la reconnaissance de la France vis-à-vis des incorporés de force.
Les orphelins concernés sont des ressortissants de l'ONaCVG. À ce titre, ils sont traités de manière égale avec les autres orphelins des individus morts pour la France en combattant.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. L'apprentissage de cette mémoire constitue une avancée, qu'il faut approfondir. En effet, les victimes civiles, comme les victimes combattantes, dont le nombre est sans commune mesure dans les départements que j'ai cités, attestent d'un héritage mémoriel régional spécifique terriblement douloureux, qui a été trop longtemps dissocié de la mémoire nationale.
Le Président de la République s'est engagé à ce que l'éducation nationale remédie à ce problème.
Je considère qu'il n'est pas juste d'assimiler le drame et les douleurs de l'Alsace et de la Moselle à ce qu'ont vécu, aussi durement, tous les autres Français.
En décrétant, dans les années qui ont suivi la guerre, que les incorporés de force étaient morts pour la France, comme les autres soldats, on a d'une certaine manière alimenté une forme de déni des crimes de masse spécifiques qu'ils ont subis, au mépris du droit international le plus élémentaire.
Voilà pourquoi nous avons une dette particulière à l'égard de ces orphelins. Le geste proposé serait un acte de dignité pour toute la Nation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour explication de vote.
Mme Sabine Drexler. Cet amendement vise à répondre à une exigence de justice qui a été longtemps différée. La République a su, par le passé, reconnaître et réparer d'autres souffrances qui sont nées de l'histoire et a admis que des situations exceptionnelles imposaient des réparations exceptionnelles.
Pour les orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle, cette reconnaissance ne s'est jamais accompagnée d'une véritable réparation.
Jacques Fernique l'a rappelé, ces orphelins sont encore 3 500 aujourd'hui. Si leur douleur a été entendue – en témoigne l'installation récente d'une plaque aux Invalides –, elle n'a jamais été indemnisée, alors que leur situation est parfaitement comparable à celle d'autres orphelins qui ont reçu une compensation.
Cet amendement ne crée pas un précédent, il vise seulement à mettre fin à une inégalité de traitement, à rétablir une équité que la République a su accorder ailleurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2036 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-1992, présenté par Mmes Monier, Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
4 000 000 |
|
4 000 000 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
4 000 000 |
|
4 000 000 |
|
TOTAL |
4 000 000 |
4 000 000 |
4 000 000 |
4 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale » regroupe aujourd'hui trois dispositifs essentiels visant à réparer, autant qu'il est possible de le faire, les injustices subies par les victimes de la barbarie nazie et leur famille.
Ces dispositifs indemnisent les victimes de spoliations antisémites, les orphelins de parents qui ont subi des persécutions antisémites ou des actes de barbarie.
Cependant, une inégalité demeure : depuis le décret du 27 juillet 2004, les orphelins de résistants morts fusillés peuvent être indemnisés, tandis que ceux dont les parents sont tombés au combat les armes à la main, en luttant contre le nazisme, ne le peuvent pas.
Pourtant, la cause du décès est identique, puisqu'il s'agit d'un sacrifice pour la liberté et contre la barbarie.
Cet amendement vise donc à réparer cette injustice en créant un quatrième dispositif d'indemnisation réservé aux orphelins de résistants morts au combat.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. La commission sollicite l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le Gouvernement est très attaché au périmètre actuel d'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie et de la Shoah, vis-à-vis desquels l'État français a reconnu sa part de responsabilité.
Ce dispositif doit garder sa particularité. C'est bien le caractère hors norme de la barbarie nazie et la complicité du régime de Vichy qui est à l'origine de cette indemnisation réservée aux enfants dont les parents résistants, martyrs ou ayant fait l'objet de persécutions antisémites ou raciales sont décédés en déportation ou ont été exécutés.
Cela n'enlève absolument rien à la reconnaissance que la France porte aux résistants morts au combat, qui bénéficient, ainsi que leurs descendants, de toutes les dispositions relatives aux personnes qui sont mortes pour la France en combattant.
Ainsi, ils sont considérés comme des combattants volontaires de la Résistance. Leur situation est la même que ceux qui sont morts dans les forces françaises libres.
Les orphelins, quel que soit leur âge, sont ressortissants de l'ONaCVG et peuvent bénéficier, à ce titre, de l'assistance de cet établissement. Les orphelins de résistants morts au combat sont donc traités d'égal à égal avec tous les autres orphelins d'individus morts pour la France.
Il n'y a donc pas de raison de leur accorder des droits différents, même si nous reconnaissons, bien évidemment, leur souffrance et la dette qui leur est due.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1992.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-20, présenté par M. Laménie, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
12 000 000 |
|
12 000 000 |
|
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
12 000 000 |
|
12 000 000 |
TOTAL |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
12 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Cet amendement vise à rétablir à 12 millions d'euros les crédits consacrés à la mise en œuvre du dispositif de reconnaissance des harkis prévu par la loi du 23 février 2022.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Je partage l'attention que vous portez à la mémoire des harkis, monsieur le rapporteur spécial.
Le budget pour l'année 2025 a été doté de 70 millions d'euros pour payer les conséquences de la décision Tamazount et autres c. France rendue par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).
Le projet de loi de finances pour 2026 ouvre donc 58,8 millions d'euros au titre du droit à réparation et tient compte de l'élargissement à 37 nouveaux sites de la liste des sites ouvrant droit à réparation, pour un coût estimé à 8 millions d'euros.
J'ajoute que le dispositif sera maintenu jusqu'en 2027, ce qui permettra à la CNIH (commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et les membres de leurs familles) de procéder à d'éventuels ajouts à la liste des sites ouvrant droit à réparation, qui feront l'objet de paiements en 2027, le temps que les dossiers soient constitués.
De ce point de vue, le budget pour 2026 répond aux besoins estimés, sachant que la loi de finances de fin de gestion pour 2025 nous a permis de prendre de l'avance. À ce jour, 30 000 dossiers ont été traités, soit la majorité de ceux qui étaient concernés par le dispositif.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-20.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-1995, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
6 000 000 |
|
6 000 000 |
|
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
6 000 000 |
|
6 000 000 |
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement va dans le même sens que celui qui vient d'être présenté, en ce qu'il vise, de manière simple et juste, à accorder une allocation viagère à toutes les veuves de harkis, sans distinction liée à la date du décès du conjoint.
Aujourd'hui, si le mari est décédé avant 2016, la veuve perçoit 40 % de moins que s'il est mort après 2016. Nous demandons de mettre fin à cette disparité incompréhensible.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Nous avons déjà évoqué cette situation l'an dernier. Cette demande est depuis satisfaite.
En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le ministère des armées, qui était favorable à cette régularisation, a obtenu, via la loi de finances initiale pour 2024, la modification de l'article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.
Ainsi, à compter du 1er janvier 2004, les rentes des veuves de harkis sont alignées au meilleur montant, indépendamment des choix faits antérieurement.
Cet amendement étant satisfait, le Gouvernement en demande le retrait.
Mme la présidente. Madame Poumirol, l'amendement n° II-1995 est-il maintenu ?
Mme Émilienne Poumirol. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1995 est retiré.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-1731 rectifié est présenté par Mmes Micouleau, Richer, Bonfanti-Dossat, Belrhiti, Berthet et V. Boyer, M. Cambon, Mme de Cidrac, M. Delia, Mme Di Folco, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mmes Malet et Nédélec et MM. Panunzi, Piednoir, Pointereau, Rietmann et Sol.
L'amendement n° II-1994 est présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° II-2037 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cukierman et Brulin, M. Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
75 510 |
|
75 510 |
|
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
75 510 |
|
75 510 |
TOTAL |
75 510 |
75 510 |
75 510 |
75 510 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Else Joseph, pour présenter l'amendement n° II-1731 rectifié.
Mme Else Joseph. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l'amendement n° II-1994.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement, que nous déposons systématiquement chaque année, concerne les membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun, qui ne sont plus que dix-huit aujourd'hui.
Puisque plusieurs décisions ont été rendues et que le Conseil constitutionnel, en 2016, a censuré l'article 52 de la loi du 18 décembre 2016, il nous paraît juste d'accorder l'indemnité unique de 4 195 euros prévue par la loi de programmation militaire (LPM), afin de solder définitivement cette injustice.
Pour rappel, seules dix-huit personnes sont encore en vie. Ainsi, le coût total de la mesure s'élèverait à 75 510 euros, ce qui n'aggraverait pas le déficit de la Nation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l'amendement n° II-2037.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à traiter la situation des veuves de rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun.
La loi de programmation militaire leur a attribué le versement d'une allocation unique de 4 195 euros, sous réserve que les conditions suivantes soient remplies : la personne concernée doit avoir déposé sa demande entre le 5 février 2011 et le 19 décembre 2013 et elle ne doit pas avoir engagé de procédures contentieuses après une réponse négative de l'administration ou après que celle-ci a gardé le silence.
Cela vient d'être rappelé, dix-huit personnes sont toujours en attente du versement de l'allocation unique. Cet amendement vise donc à réparer cette injustice et à clore ce dossier.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Il est vrai que nous évoquons cette question chaque année. L'ONaCVG a étudié le dossier et a pris contact avec l'ensemble des personnes intéressées.
C'est pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le besoin des dix-huit personnes identifiées a été réévalué. Il a été établi qu'elles n'avaient pas formulé de demande spontanée d'accès au dispositif visé par ces amendements. Je vous confirme néanmoins que l'accompagnement individualisé sera maintenu.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Chaque année, on nous répond de manière itérative que le dossier sera réexaminé. En 2020, les membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun étaient au nombre de vingt-deux ; ils ne sont plus que dix-huit aujourd'hui. En continuant comme cela, nous n'aurons bientôt plus besoin d'indemniser personne !
Je suis très étonnée que vous ayez pu faire une enquête et que les personnes concernées aient indiqué n'avoir besoin de rien.
Je maintiens donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. Je saisis cette occasion de rendre hommage à l'ancienne ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants, Patricia Mirallès, qui a défendu la loi du 23 février 2022.
Madame la ministre, je dois avouer être depuis lors très mal à l'aise quand nous débattons de ces amendements chaque année, et ce pour une raison simple.
En effet, lors de l'examen de ce texte, une distinction a été établie entre les harkis placés dans les centres de rétention et ceux qui étaient employés dans les hameaux de forestage. Il se trouve que mon département a hébergé ces deux types de lieu. À l'époque, certains rapatriés étaient donc déjà discriminés.
Je suis encore gêné d'entendre aujourd'hui que le montant de l'indemnité que perçoit une veuve dépend de la date de décès de son mari.
J'y insiste : je réprouve ces distinctions, ces discriminations – j'ose le terme – entre les forces supplétives, quel que soit leur statut. Nous parlons de dix-huit veuves qui vivent aujourd'hui avec une blessure ouverte, symbolique – comme celle que les guerres peuvent infliger –, et ressentent de l'injustice.
C'est la raison pour laquelle je vous lance cet appel, madame la ministre : n'attendons pas que ces dix-huit veuves meurent pour essayer de rétablir un peu de justice !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1731 rectifié, II-1994 et II-2037.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1993, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
6 500 000 |
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6 500 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
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6 500 000 |
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6 500 000 |
TOTAL |
6 500 000 |
6 500 000 |
6 500 000 |
6 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à revaloriser le point de PMI. Je n'en dis pas plus : le sujet a été largement évoqué tout à l'heure et la ministre a en partie répondu à nos préoccupations.
Mme la présidente. L'amendement n° II-2038, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cukierman, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
6 172 755 |
6 172 755 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
6 172 755 |
6 172 755 |
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TOTAL |
6 172 755 |
6 172 755 |
6 172 755 |
6 172 755 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise, lui aussi, à revaloriser le point de PMI, afin de rattraper le retard pris depuis vingt ans vis-à-vis de l'inflation.
La ministre des armées a reconnu, devant l'Assemblée nationale, que l'écart entre le point de PMI actuel et son niveau théorique, s'il avait été indexé sur les prix à la consommation, n'a cessé de croître depuis 2005. Cela entraîne concrètement une perte de pouvoir d'achat de 10 points pour les pensionnés entre 2005 et 2025.
Ce gel des pensions est la conséquence non pas de l'année blanche annoncée par le Gouvernement sur les prestations sociales, mais de celle qui a été prévue pour les fonctionnaires, dont le point d'indice va encore rester bloqué cette année.
Cet amendement tend donc à augmenter les crédits de 1 %, pour tenir compte de l'inflation.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Le volet humain est essentiel et même prioritaire. Ces pensionnés méritent beaucoup de respect et de reconnaissance, comme nous l'avons rappelé.
Sur ces amendements, la commission sollicite l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Sincèrement, je n'ai pas de solution à proposer, dans la mesure où le gage ne sera pas levé.
Sur le rattrapage vis-à-vis de l'inflation, je m'engage devant vous à étudier cette question au cours du premier trimestre de l'année prochaine.
Par ailleurs, l'indexation sur le point d'indice de la fonction publique ayant été décidée, il convient à mon sens de ne pas changer de dispositif au seul motif qu'une difficulté survient.
En toute franchise, même si je comprends la situation qui est évoquée, je ne peux émettre un avis favorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1993.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2038.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-675 rectifié, présenté par MM. Longeot, Dhersin, E. Blanc et S. Demilly, Mmes Billon, Bourguignon et Jacquemet, MM. Menonville, Duffourg, Gremillet, P. Martin, Pillefer, Haye, Levi et J.M. Arnaud, Mmes Malet, Saint-Pé et Patru et M. Hingray, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
5 000 000 |
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5 000 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
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5 000 000 |
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5 000 000 |
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi. Cet amendement concerne les pupilles de la Nation.
Il a pour objet de rétablir la mesure Pupilles majeurs et, par conséquent, de prévoir une enveloppe de 5 millions d'euros sur l'action 03 du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».
Ces crédits visent à compenser la baisse des moyens d'action sociale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) destinés aux pupilles de la Nation et aux orphelins de guerre majeurs.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Compte tenu du contexte national, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, je suis attachée à ce que l'ONaCVG soit particulièrement attentif à la situation des pupilles de la Nation, notamment à celle des orphelins majeurs.
C'est pourquoi, malgré la baisse du budget qui accompagne la diminution tendancielle, j'ai demandé que la commission mise en place soit maintenue. Ce n'est pas un maintien de façade, c'est un engagement de suivi de ma part.
La disparition d'une enveloppe ponctuelle fléchée n'est donc pas synonyme de désengagement. J'en ai avisé les associations concernées et je vous tiendrai régulièrement informés.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Levi, l'amendement n° II-675 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre-Antoine Levi. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-675 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-1727, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco, Ollivier, M. Vogel et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
3 000 000 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
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3 000 000 |
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3 000 000 |
TOTAL |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
3 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement n° II-1727 vise à mieux faire vivre la mémoire des guerres récentes impliquant la France, c'est-à-dire les deux guerres mondiales, la guerre d'Indochine et la guerre d'Algérie.
Il nous semble urgent de renforcer la transmission de la mémoire de ces conflits aux jeunes générations, notamment par l'organisation de projets mémoriels et culturels dans le cadre scolaire.
Cet amendement tend donc à doubler la dotation de la sous-action « Mémoire et patrimoine mémoriel » du programme 169, ce qui représente une augmentation de 3 millions d'euros.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Les actions de mémoire, de transmission et de pédagogie sont importantes. Leur lien avec l'éducation nationale a d'ailleurs été largement rappelé.
Toutefois, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. J'ai bien entendu la grande attention portée par cette assemblée à la mémoire.
Nous devons approfondir le travail avec le monde combattant et le ministère de l'éducation nationale sur le développement de ces actions mémorielles. J'en ai d'ailleurs discuté avec mon collègue Edouard Geffray, qui est très engagé sur ce sujet.
Les budgets des musées, qui ne relèvent pas de ce programme, contribuent beaucoup à l'action mémorielle et nous allons poursuivre en ce sens.
Évidemment, la fin des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire ne se résume pas à une baisse de budget. Elle sera aussi l'occasion de dresser le bilan d'une opération qui s'est très bien déroulée.
Je rencontrerai bientôt M. Philippe Étienne pour tirer les conclusions de la mission Libération qui lui a été confiée et mettre en œuvre des actions concrètes, qui ne sont pas nécessairement programmées budgétairement dans cette mission.
C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1727.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-411 rectifié ter, présenté par Mme Lermytte, MM. Wattebled, A. Marc, Pellevat, Grand et Laménie, Mme L. Darcos, M. Chasseing, Mme Bessin-Guérin, MM. Chevalier et Rochette, Mmes Saint-Pé, Nadille et Bellamy, M. Haye et Mme de Cidrac, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
1 |
|
1 |
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Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
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1 |
|
1 |
TOTAL |
1 |
1 |
1 |
1 |
SOLDE |
0 |
0 |
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La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.
Mme Marie-Claude Lermytte. Cet amendement d'appel tend à ce que les militaires décédés accidentellement lors d'entraînements ou d'exercices à haute intensité puissent recevoir la mention « Mort pour le service de la Nation ».
Créée par la loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, cette mention rend hommage aux militaires tombés en service et ouvre des droits importants à leurs proches. Depuis le décret du 18 mars 2016, son attribution est toutefois restreinte au décès causé par l'acte volontaire d'un tiers.
Ainsi, de nombreux militaires morts en préparation opérationnelle ou en mission intérieure ne peuvent plus en bénéficier, alors qu'ils servaient dans des conditions comparables à celles du combat. Plusieurs estimations font état de près de 130 cas depuis cette évolution.
Afin d'ouvrir la réflexion sur un réexamen de ce périmètre, nous avons décidé d'inscrire symboliquement 1 euro sur l'action n° 03 « Reconnaissance envers le monde combattant » du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».
Ce montant est prélevé, pour des raisons de recevabilité, sur l'action n° 02 du programme 158, sans intention de réduire ses crédits pour autant.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Comme l'a rappelé Mme Lermytte, il s'agit d'un amendement d'appel. La commission en demande le retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Comme vous le savez, trois mentions coexistent depuis 2021. J'en rappelle le cadre.
La mention « Mort pour la France » est dédiée aux décès survenus au feu, en temps de guerre ou au cours d'une opération extérieure.
La mention « Mort pour le service de la Nation » est attribuée lorsque le décès résulte de l'acte volontaire d'un tiers.
La mention « Mort pour le service de la République » peut être décernée en cas de décès survenu lors de missions présentant une dangerosité ou un risque particulier, notamment à l'occasion d'exercices militaires.
La nécessité de prendre en compte les décès survenus en préparation opérationnelle a d'ailleurs largement justifié la création de cette dernière mention.
Nous sommes très attachés à ce cadre et à la reconnaissance de la singularité de chacune de ces mentions.
Aussi, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.
M. Hussein Bourgi. La mesure qui est ici proposée semble aller de soi.
Comme vous le savez, il existe pour les sapeurs-pompiers une distinction entre la mention « Mort au feu » et celle de « Mort en service commandé », qui s'applique aux décès accidentels survenus lors du trajet vers le lieu d'intervention.
Le parallélisme des formes pourrait parfaitement s'appliquer. C'est pourquoi je vous invite à voter cet amendement, mes chers collègues.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-411 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Engagements financiers de l'État
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État
Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux
Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
Remboursements et dégrèvements
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements » du projet de loi de finances pour 2026.
La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le constat que je m'apprête à dresser devant vous n'est guère réjouissant : les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » sont appelés à devenir dans quelques années le premier poste du budget de l'État.
Pour 2026, ils représenteront encore le deuxième poste en crédits de paiement, après la mission « Enseignement scolaire », soit 60,4 milliards d'euros, et le troisième en autorisations d'engagement.
Si l'on déplore parfois l'insuffisance de crédits sur certaines missions, l'approche est ici malheureusement tout autre : ces crédits affichent une augmentation de plus de 4,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), sous l'effet de l'alourdissement de la charge de la dette de l'État dans un contexte d'endettement public historique et de remontée des taux d'intérêt souverains.
À la fin octobre 2025, l'encours de la dette négociable de l'État s'établissait à 2 760 milliards d'euros. Quant à la dette publique, elle s'élève à plus de 3 400 milliards d'euros à la fin du deuxième trimestre 2025, soit 115,6 % du PIB, en augmentation de plus de 110 milliards d'euros sur les seuls six premiers mois de l'année.
Je rappelle qu'avant la crise de 2008 – j'étais déjà membre de la commission des finances ! – nous étions au même niveau que l'Allemagne, c'est-à-dire à 60 % du PIB.
Je consacrerai l'essentiel de mon intervention à l'accroissement continu de la charge de la dette, avant d'aborder la question des appels en garantie de l'État, notamment des prêts garantis par l'État (PGE), avant de conclure mon propos en évoquant la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.
Comme je l'ai indiqué, la charge de la dette de l'État devrait atteindre en 2026 des niveaux records. Alors que le taux d'emprunt à court terme a évolué à la baisse dans la période récente, emportant peut-être un effet anesthésiant suivant l'assouplissement monétaire conduit par la Banque centrale européenne (BCE), les taux sont en effet repartis à la hausse depuis le début de l'année 2025.
Cette pentification des primes de terme s'explique notamment par les effets de relance budgétaire annoncée en Allemagne et par les besoins rehaussés des politiques publiques dans le monde, concernant notamment la défense dans la zone euro.
Les investisseurs anticipent désormais une hausse des besoins budgétaires des pays européens, qui se répercute sur les taux souverains à dix ans aussi bien des pays cœurs que des pays périphériques.
Le Gouvernement en tient compte puisque, selon ses prévisions, les taux à dix ans continueraient à augmenter pour s'élever à 3,7 % en 2025 et 3,8 % fin 2026. Nous sommes donc loin des taux zéro, voire des taux négatifs, qui ont agi comme l'anesthésiant des précédents gouvernements, monsieur le ministre.
Il convient de souligner la sensibilité de la charge de la dette au niveau des taux d'intérêt : d'après les estimations de l'Agence France Trésor, un choc de taux de 100 points de base – ce n'est pas grand-chose : 0,1 % – …
M. Michel Canévet. On y est !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. En effet !
… représenterait une hausse de ladite charge de plus de 3,2 milliards d'euros en un an, et de 33,5 milliards d'euros à neuf ans.
Nous venons d'examiner la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » où il était question de quelques dizaines de millions d'euros et les économies que nous pouvions réaliser de-ci de-là. Retenez simplement ce chiffre, mes chers collègues : 100 points de base, par exemple une augmentation de 3,6 % à 3,7 %, représentent à eux seuls 3,2 milliards d'euros en un an et plus de 33 milliards d'euros à l'horizon de neuf ans.
De fait, l'instabilité politique que nous subissons joue malheureusement un rôle déterminant dans l'appréciation de la qualité de la signature française. En particulier, les risques concernant la stabilité budgétaire ou la pérennité des politiques de réforme sont évidemment très suivis par nos investisseurs et par les agences de notation. J'ai à ce titre à l'esprit la question des retraites.
Au regard de ces éléments, l'Agence France Trésor prévoit que nous devrons emprunter cette année une somme record. En 2026, nous prévoyons 310 milliards d'euros d'emprunt au minimum, non seulement pour les émissions de nouvelle dette, mais aussi pour le rachat des dettes arrivant à échéance. La charge de la dette devrait donc s'affirmer très rapidement comme le premier poste du budget de l'État.
En 2026, en comptabilité budgétaire, la charge de la dette devrait atteindre 58 milliards d'euros, en croissance de plus de 4,5 milliards d'euros par rapport à la loi de finances pour 2025. En comptabilité générale, son montant devrait s'élever à 60,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 8 milliards d'euros par rapport à 2025.
Si l'on continue ainsi, la charge de la dette pourrait augmenter de 70 milliards d'euros en 2027, de 90 milliards d'euros en 2029. Nous devrions très rapidement, autour des années 2030, atteindre la barre des 100 milliards d'euros.
J'en viens maintenant aux crédits consacrés aux appels en garantie de l'État, dont le programme 114 retrace l'ensemble des dépenses budgétaires découlant de la mise en jeu des garanties octroyées par l'état des tiers. Ces crédits sont en baisse par rapport à la loi de finances pour 2025, ce qui constitue plutôt une bonne nouvelle.
Concernant les PGE, les crédits sont également presque stables, avec 5,7 milliards d'euros cumulés depuis 2020, et une prévision de 471 millions d'euros pour 2026.
J'en viens à la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.
Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » n'est pas doté de crédits pour 2026. Le compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » devrait quant à lui de nouveau dégager un excédent.
En conclusion, la commission des finances propose – j'allais dire avec regret, car il s'agit malheureusement d'une mission de constat – d'adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
Il n'existe guère d'amendements pour baisser ces crédits. Nous nous en réjouirions tous qu'il y en ait, car cela signifierait que nous serions enfin parvenus à une bonne situation budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, je concentrerai mon propos sur l'appréciation de la commission des finances concernant les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État ».
Ce CAS constitue un instrument dérogatoire du droit budgétaire classique, dont la fonction est de retracer, en recettes et en dépenses, les sommes liées aux opérations que l'État réalise en sa qualité d'actionnaire.
Je commencerai par présenter une opération récente et majeure de l'État actionnaire, qui illustre son rôle non seulement pour entrer au capital d'entreprises stratégiques, mais également pour les accompagner dans leur développement et leur croissance.
Il s'agit de l'augmentation de capital annoncée en juin 2025 par l'opérateur satellitaire européen Eutelsat. En effet, cet opérateur de taille mondiale a procédé, en 2023, au rachat d'une entreprise pionnière dans les constellations de satellites en orbite basse, l'entreprise britannique OneWeb.
Depuis ce rachat, Eutelsat se trouve dans une situation caractérisée par une perspective de croissance importante grâce à sa double présence sur l'orbite géostationnaire, avec une flotte de trente-quatre satellites, et sur l'orbite basse grâce aux plus de 600 satellites de la constellation OneWeb.
Cependant, Eutelsat se trouvait, jusqu'à cet été, dans une situation financière complexe, étant donné son niveau d'endettement élevé et le besoin d'investissements substantiels, à hauteur de 4 milliards d'euros à échéance de 2029, auxquels l'entreprise fait face pour assurer le renouvellement des satellites de la constellation OneWeb.
Pour répondre à cette situation, l'État est intervenu pour accompagner, en tant qu'actionnaire, le plan stratégique d'Eutelsat, en participant à hauteur de 750 millions d'euros à une augmentation de capital atteignant un montant total de 1,5 milliard d'euros.
Pour en venir aux crédits qui vous sont proposés dans l'exercice 2026, j'organiserai mon propos autour des recettes prévisionnelles du compte, puis des prévisions de dépenses.
En premier lieu, s'agissant du volet des recettes, ma principale remarque concerne les importantes recettes de cessions prévues dans le texte déposé par le Gouvernement.
Le projet de loi de finances pour 2026 marque une rupture avec les dernières années, en prévoyant des recettes de cessions pour le compte d'affectation spéciale à hauteur de 3,2 milliards d'euros en 2026, soit quatre fois plus que les recettes prévues pour cette année, par exemple.
Nous serons évidemment attentifs aux décisions qui seront prises dans le courant de l'exercice 2026, non seulement pour vérifier que le quantum de recettes atteint la cible de 3,2 milliards d'euros, mais également pour déterminer si cette inflexion est conjoncturelle ou si elle s'inscrit dans un nouveau cycle pluriannuel de cessions d'actifs publics.
En second lieu, je formulerai une remarque sur l'une des rares opérations structurantes en dépenses qui ne soit pas, à ce stade, confidentielle pour l'Agence des participations de l'État (APE) : le rachat par l'État du département Advanced Computing du groupe Atos.
Alors qu'un contrat de cession a été finalisé en juillet 2025, la mise en œuvre de l'opération devrait intervenir au premier semestre de 2026 et mobilisera 400 millions d'euros de crédits du compte d'affectation spéciale.
Cet investissement permettra à l'État de préserver un actionnariat souverain pour une activité hautement stratégique : la division rachetée est en charge de la conception et de la fabrication de supercalculateurs dans l'usine du groupe Atos ; or cette usine d'Angers est aujourd'hui la seule en mesure de fabriquer de tels équipements qui soit détenue par un groupe européen.
Au regard de la mobilisation de ces supercalculateurs notamment pour assurer la crédibilité de notre dissuasion nucléaire, il n'est nul besoin d'insister sur le caractère stratégique de cette opération.
Telles sont les principales remarques formulées par la commission des finances sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». Je vous indique, sans surprise, que la commission des finances a rendu un avis favorable à leur adoption, afin de donner à l'État actionnaire les moyens de sa politique. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE et INDEP. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » occupe une place singulière dans notre budget, puisqu'elle est la plus importante en volume, s'élevant à plus de 145 milliards d'euros pour 2026. Ce montant s'inscrit en légère baisse, de 0,4 %, par rapport à la dernière estimation à date pour 2025.
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, qui concentrent l'essentiel des crédits de la mission, sont estimés à 141 milliards d'euros pour 2026, soit une diminution de 0,4 % par rapport à l'estimation révisée pour 2025.
Cette baisse apparente masque toutefois deux évolutions contradictoires : une réduction substantielle des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, tout juste atténuée par une hausse des autres remboursements, liés à la mécanique de l'impôt et à des politiques publiques.
La première évolution notable concerne donc les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, qui passent de 17,2 milliards d'euros en 2025 à 14,2 milliards d'euros en 2026. En pratique, il s'agit principalement du remboursement de sommes indûment perçues, dont le reflux en 2026 s'explique par la disparition de certaines dépenses importantes supportées en 2025.
Je signalerai ici la principale d'entre elles, qui porte sur des remboursements d'exit tax.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, un membre du présent Gouvernement, encore député à la fin de l'année 2023, a déposé un amendement d'apparence technique, lequel visait à permettre aux contribuables, qui ne pouvaient jusqu'alors obtenir le remboursement de l'exit tax qu'à concurrence de l'impôt sur le revenu, d'en bénéficier plus largement, y compris pour les titres cédés avant 2014.
Cet amendement, repris – par hasard ! – par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité – pas par hasard, cette fois ! –, a provoqué des remboursements cumulés de 2 milliards d'euros sur les années 2024 et 2025.
Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, j'estime que le Gouvernement avait la responsabilité de mieux informer le Parlement quant au coût anticipé d'une mesure aussi technique qu'onéreuse. Ce déficit d'information est d'autant plus dommageable qu'il fut ensuite aisé pour l'exécutif de dissimuler ces 2 milliards d'euros en exécution budgétaire, noyés dans les masses financières de la mission.
Les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques devraient quant à eux progresser de 18,5 milliards d'euros en 2025 à 19,4 milliards d'euros en 2026, sous l'effet d'un recours croissant aux crédits d'impôt que nous avons questionnés ici et que nous continuerons d'interroger.
Les acomptes et avances sur restitutions d'impôt sur le revenu devraient connaître une progression dynamique en 2026, de l'ordre de 10 % par rapport aux dernières estimations pour 2025, après une hausse déjà soutenue de 8 % l'année précédente. Ils progressent notamment sous l'effet de la montée en charge du crédit d'impôt contemporain pour l'emploi d'un salarié à domicile, dont les crédits passent de 1,8 milliard d'euros en 2025 à 2,3 milliards d'euros en 2026.
Me fondant sur les derniers travaux de la Cour des comptes et du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), je m'interroge sur le périmètre d'un outil fiscal peu contrôlable, portant sur des dépenses non contraintes pour certains contribuables. Il convient de mettre en débat la nature des dépenses éligibles, le taux de prise en charge et le profil socioéconomique des bénéficiaires.
L'autre dispositif important, auquel vous savez que je prête une grande attention, est le crédit d'impôt recherche (CIR), qui continue de croître et qui est désormais projeté à plus de 8 milliards d'euros pour la période 2025-2026.
Je peux m'appuyer cette année sur les travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, qui a pointé plusieurs limites de ce dispositif, dont les grandes entreprises captent plus de 42 % des crédits, ainsi que le caractère très perfectible du rapport coût-efficacité du CIR.
Si, l'an passé, grâce à un amendement voté par la commission des finances, nous avons pu commencer à recentrer ce dispositif, il m'apparaît toujours indispensable d'engager une réforme du CIR. Celle-ci viserait a minima à établir une véritable différenciation par type d'entreprise et par secteur d'activité.
Alors que la commission d'enquête estime à 211 milliards d'euros le montant des aides publiques aux entreprises, ces aides devraient être assorties à la fois de conditions pour s'assurer de leur effectivité, en veillant à ce qu'elles stimulent bien la recherche réalisée en France, et de mécanismes de restitution en cas de manquement avéré, conformément aux recommandations formulées à l'unanimité par la commission d'enquête.
J'en viens enfin au programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », le second de cette mission.
Les crédits évalués pour 2026 s'élèvent à 4,6 milliards d'euros et sont stables. Ce programme a toutefois été vidé d'une grande partie de sa substance par la suppression de la taxe d'habitation et par la baisse des impôts de production. Nous le savons tous ici et nous le regrettons, avec sincérité ou non.
Les remboursements de taxe foncière ont presque doublé de 2018 à 2024. Ils se stabilisent autour de 2 milliards d'euros et constituent désormais la moitié des crédits du programme.
Quant aux remboursements de taxe d'habitation, ils auraient dû connaître une trajectoire à la baisse encore plus marquée, mais ils ont dû être largement revus à la hausse pour financer d'importants dégrèvements consécutifs à la mise en place de l'outil Gérer mes biens immobiliers (GMBI).
En guise de conclusion, je vous indique que, lors de l'examen de la mission par la commission, le 6 novembre dernier, celle-ci a proposé l'adoption de ces crédits. Je me vois donc contraint de vous recommander leur adoption.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que les années 2023 et 2024 avaient été marquées par d'importantes acquisitions dans le secteur de l'industrie de la défense, en 2025, l'Agence des participations de l'État (APE) a été particulièrement active dans le secteur du numérique.
Cette activité s'est traduite par la concrétisation de l'acquisition d'Alcatel Submarine Networks, leader de la fabrication, de la pose et de la maintenance de câbles sous-marins, et par l'entrée au capital d'Eutelsat, entreprise historique des télécommunications rendue stratégique par le développement de sa constellation satellitaire en orbite basse.
Je mentionne aussi le financement de l'acquisition par IN Groupe, l'ancienne Imprimerie nationale, d'une entreprise spécialisée dans la biométrie, en vue de créer un champion de rang mondial de l'identité physique et numérique.
L'APE prévoit de continuer, en 2026, à creuser le sillon de la souveraineté numérique en finalisant l'acquisition des activités Advanced Computing d'Atos, que le Sénat a appelée de ses vœux. Elle poursuivra également son soutien à l'aménagement et à la valorisation du foncier industriel, notamment dans les grands ports maritimes. Ce sont là des priorités en phase avec les secteurs d'intervention stratégiques identifiés par la commission des affaires économiques.
En ce qui concerne le volet des recettes, nous nous satisfaisons que, pour les opérations relevant du périmètre de l'APE, la part prévisionnelle des financements budgétaires ne soit plus que résiduelle. Le compte d'affectation spéciale (CAS) revient ainsi à son principe fondateur, qui est de financer l'ensemble des crédits de la mission par des produits de cession.
Pour ce faire, l'Agence des participations de l'État devra adopter une gestion plus dynamique de son portefeuille. Ainsi, les cessions d'actifs devraient atteindre en 2026 pas moins de 3,2 milliards d'euros, un niveau inédit depuis la période pré-covid.
Dans ce contexte, nous recommandons que l'APE développe une doctrine d'intervention plus robuste, notamment dans le secteur industriel, afin de concentrer ses interventions sur les entreprises présentant des risques systémiques. L'articulation avec Bpifrance devrait également être améliorée.
Il est en effet essentiel de préserver la capacité de l'État à investir avec agilité dans des entreprises de souveraineté, au gré de besoins qui pourraient être appelés à se multiplier dans un environnement économique et géopolitique de plus en plus instable.
Au total, la commission des finances soutient les priorités développées par l'État actionnaire et a donc donné un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Organisation des travaux
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique que sept amendements ont été déposés sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures. Il nous faudra toutefois terminer l'examen de cette mission à minuit et demi, afin de pouvoir ouvrir la séance de demain matin, à neuf heures trente, pour la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026. Nous nous efforcerons de respecter cet horaire.
Engagements financiers de l'État (suite)
Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État(suite)
Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux(suite)
Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics(suite)
Remboursements et dégrèvements(suite)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole de chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale, mais aussi celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui les missions « Engagements financiers de l'État » et « Remboursements et dégrèvements », ainsi que le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
Je n'évoquerai que brièvement la mission « Remboursements et dégrèvements ». Sur plusieurs travées, des sénateurs s'interrogent sur le coût pour nos finances publiques du remboursement de nombreux dispositifs fiscaux. Ce questionnement sur l'évolution, entre autres, des nombreux crédits d'impôt, qui sont une spécificité française, est légitime.
Ces outils fiscaux ont généralement pour objet d'orienter l'action des contribuables vers des dépenses vertueuses ou souhaitables pour la collectivité. Je citerai le crédit d'impôt recherche pour les entreprises ou le crédit d'impôt services à la personne (Cisap) pour les particuliers.
Leur coût est, certes, élevé pour nos finances publiques. Toutefois, plutôt que de s'interroger sur leur légitimité, il convient de questionner leur raison d'être. Ces dispositifs se justifient, en partie, par le coût du travail et par le poids des impôts dans notre pays. Nos crédits d'impôt existent principalement pour compenser, aux particuliers et aux entreprises, les charges sociales et les impôts les plus élevés de l'OCDE.
Aussi, il nous paraît nécessaire de rappeler que nous ne pourrons évoquer la réduction des niches fiscales qu'une fois la charge fiscale baissée. Une baisse des impôts compensée par une baisse d'autant des niches fiscales nous semble indispensable.
Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », soit 60 milliards d'euros en crédits de paiement, doivent, quant à eux, nous alerter. Ils retracent notamment les activités financières de l'État envers ses créanciers, au premier rang desquelles la gestion de notre dette.
Il nous faut, mes chers collègues, nous attarder sur le sujet de la dette et, surtout, de la charge de la dette.
Je l'ai dit, nos impôts sont beaucoup trop élevés, au point que nous ne pouvons pas espérer en lever de nouveaux sans annihiler leur rendement. En d'autres termes, nous n'avons plus d'autre choix que de baisser les dépenses. L'urgence première est de réduire le déficit public.
C'est ce déficit, alimenté par des dépenses supérieures à nos recettes, qui continue d'aggraver chaque année le montant total de la dette que nous faisons peser sur les générations qui viendront après nous.
La dette française explose et, avec elle, les taux auxquels l'État emprunte.
À ce jour, les taux d'emprunt de la France à dix ans sont plus élevés que ceux de tous nos voisins directs : l'Espagne, l'Italie, la Suisse, l'Allemagne et la Belgique, mais aussi l'Irlande, les Pays-Bas et le Portugal.
Un seul pays comparable de la zone euro emprunte à ce jour à des taux plus élevés, à savoir la Grèce, dont on connaît les turpitudes budgétaires depuis maintenant vingt ans. En août, pourtant, ce pays a pu emprunter à des taux inférieurs aux nôtres.
Le stock trop important de dette à refinancer et les taux d'emprunt désormais élevés nous conduisent à voir la charge de la dette s'aggraver. Nous parlons ici du seul paiement des intérêts de la dette, et non pas du remboursement de celle-ci.
En 2026, la charge de la dette serait de 58 milliards d'euros. Mes chers collègues, les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » que nous examinons constituent désormais le deuxième poste de dépenses du budget de l'État, après la mission « Enseignement scolaire ». Nous payons des intérêts supérieurs au budget que nous allouons aux armées.
L'évolution à la hausse de la charge de la dette n'est malheureusement pas terminée. Elle pourrait atteindre 72 milliards d'euros en 2027, peut-être même 92 milliards d'euros en 2029. Il m'a semblé que je devais vous citer ces chiffres non pas pour ajouter de l'anxiété dans cet examen budgétaire, mais pour nous encourager à agir.
Nous ne pouvons pas laisser ces mauvais présages se réaliser. Il nous faut, sans attendre 2027, réformer avec efficacité et détermination notre pays pour diminuer ses dépenses. En réduisant ainsi notre déficit, nous réduirons la dette nouvelle que l'État doit souscrire. Nous verrons enfin les taux d'emprunt baisser et, avec eux, la charge de la dette s'alléger dans les années à venir.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera les crédits de ces missions.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Séné. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Marc Séné. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que nous examinons le projet de loi de finances pour 2026, une évidence s'impose à nous comme à l'ensemble des Français : la dette, cette étrange banalité, accumulée depuis des décennies, est devenue notre première source de vulnérabilité.
Chaque année, elle occupe une place plus centrale dans notre équilibre budgétaire.
Chaque année, elle absorbe une part plus importante de nos marges de manœuvre.
Chaque année, elle repousse un peu plus nos investissements d'avenir les plus essentiels.
Les travaux menés par notre assemblée ne laissent aucun doute sur ce diagnostic : la charge de la dette atteint désormais un niveau qui transforme profondément notre action publique et ses capacités.
Il ne s'agit pas ici de stigmatiser l'endettement, car la dette n'est pas une finalité, c'est un outil. Bien utilisée, elle devient un accélérateur d'opportunités et un instrument de souveraineté. Mal pensée, elle forme un frein puissant, limitant notre liberté budgétaire, contraignant nos priorités, érodant notre crédibilité.
Le projet de loi de finances pour 2026 en donne une illustration saisissante. La charge de la dette s'élève à plus de 60 milliards d'euros en comptabilité générale. Cela représente une hausse de près de 7,5 % en un an.
Cette dépense n'est plus marginale. La charge de la dette rivalise désormais avec les grandes missions régaliennes et constitue le deuxième poste de crédits de paiement de l'État, juste derrière l'enseignement scolaire.
Si rien ne change, elle atteindra le seuil des 100 milliards d'euros au début de la prochaine décennie. C'est un montant vertigineux ! Cela représente davantage que l'ensemble de notre budget pour la justice, la sécurité, l'agriculture et l'enseignement supérieur réunis. C'est un niveau qui, une fois atteint, n'appellerait plus de simples ajustements, mais exigerait une réorientation profonde de notre stratégie financière.
Ce basculement est d'autant plus préoccupant que le programme de financement de l'État atteint un record historique.
En 2026, l'État devra émettre 310 milliards d'euros de dette à moyen et long termes. Cet effort exceptionnel s'explique par l'accumulation des déficits passés, mais aussi par l'environnement de taux, qui reste élevé.
Nous sommes plus sensibles que jamais à la variation des taux. Un choc d'un seul point entraînerait une augmentation immédiate de plusieurs milliards d'euros, et de plus de 30 milliards d'euros à horizon d'une décennie. C'est un risque que nous ne pouvons plus ignorer. Cet environnement rend plus visibles nos fragilités. Nous ne payons pas pour nos dettes passées, nous payons un manque de courage et une absence de réformes.
Une dette soutenable n'est pas uniquement une dette que l'on parvient à refinancer. C'est une dette adossée à une croissance solide, à des dépenses orientées vers l'investissement, et à un appareil public capable de se réformer. Aujourd'hui, cette cohérence n'est pas au rendez-vous.
Mes chers collègues, il ne s'agit ni de soutenir ou de condamner la dette ni de dramatiser la situation. L'enjeu est de retrouver une trajectoire crédible, lisible et compatible avec nos ambitions nationales. Pour y parvenir, trois orientations me semblent essentielles.
En premier lieu, il nous faut redonner une priorité claire à l'investissement productif. La dette doit bâtir la croissance de demain, et non pas compromettre la croissance d'aujourd'hui. Elle doit permettre l'amélioration de nos infrastructures, faciliter nos réformes et nos transitions, œuvrer pour l'aménagement du territoire. C'est un choix économique, mais c'est d'abord un choix politique.
En deuxième lieu, il convient d'engager une modernisation efficace de la dépense publique. La question n'est pas de savoir combien, mais pour quoi nous dépensons. La dynamique de dépenses est aujourd'hui trop forte au regard du rythme de croissance. Une rationalisation méthodique, ciblée et réaliste est indispensable. C'est cette trajectoire qui nous guide et que nous avons souhaité décrire au travers de l'ensemble de nos travaux budgétaires.
En troisième lieu, il faut renforcer la transparence et les outils de pilotage de la dette. Nous devons disposer d'indicateurs clairs sur la soutenabilité, d'hypothèses sincères sur les taux et d'une vision pluriannuelle qui dépasse les ajustements techniques. Nos dépenses publiques augmentent plus vite que notre budget depuis 2017 et il est désormais établi que plusieurs décisions budgétaires récentes ont souffert d'une gestion déficiente, parfois marquée par l'insincérité.
La dette n'est pas une fatalité. Elle ne devient un risque que lorsque nous la laissons choisir à notre place. Sa charge ne doit pas financer nos renoncements collectifs : si nous voulons préserver notre capacité à agir, il nous faut reprendre l'initiative. C'est une question de lucidité, une exigence de responsabilité ; c'est surtout un devoir envers les générations qui nous suivront. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Georges Patient. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir la mission « Remboursements et dégrèvements », d'une part, et la mission « Engagements financiers de l'État », d'autre part. Si elles ne financent aucune politique publique, ces missions ont néanmoins un impact prépondérant sur l'équilibre de nos finances.
Tout d'abord, la mission « Engagements financiers de l'État » connaît une progression spectaculaire : 60,4 milliards d'euros de crédits de paiement en 2026, en hausse de 7,49 %. Cette hausse est presque entièrement due à la charge de la dette, qui atteindra 58 milliards d'euros, soit 4,5 milliards d'euros de plus en un an. À politique inchangée, selon les projections de la commission des finances, elle pourrait atteindre 100 milliards d'euros d'ici à 2030 et pourrait alors devenir le premier poste budgétaire de l'État.
Ce constat est d'autant plus préoccupant que le programme de financement atteindra un niveau record en 2026 : 310 milliards d'euros, avec une dette de l'État déjà supérieure à 2 700 milliards d'euros. En d'autres termes, nous finançons chaque année davantage la dette passée et de moins en moins l'investissement futur.
Parallèlement, la mission « Remboursements et dégrèvements » révèle une autre dynamique, tout aussi préoccupante : la montée continue des dépenses fiscales, en particulier des crédits d'impôt.
En 2026, les remboursements et dégrèvements atteindront 145,4 milliards d'euros, pour l'essentiel sur les impôts d'État, soit 28 % des recettes fiscales brutes. En reprenant les budgets des années précédentes, on constate qu'en 2004 ce taux n'était que de 16 %, et de 22 % en 2014. Cela signifie que la part d'impôts à laquelle renonce l'État progresse de 6 points tous les dix ans.
Du côté des entreprises, le crédit d'impôt recherche (CIR) est, avec plus de 8 milliards d'euros par an, la première dépense fiscale de l'État. Son efficacité demeure insuffisamment démontrée : effet d'aubaine massif, concentration dans les grands groupes, impact limité sur l'effort de recherche et développement (R&D). Comme le recommande la commission d'enquête du Sénat sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, nous devons renforcer la conditionnalité, cibler davantage les PME innovantes et mettre fin à une logique de guichet sans contrôle.
Du côté des particuliers, la dynamique du crédit d'impôt services à la personne (Cisap) – déjà 7,7 % à ce jour pour 2025 et 10 % prévus en 2026 – le rendra rapidement insoutenable pour le budget de l'État. Le rapport de la Cour des comptes de 2024 signalait que « parmi les 75 premiers centiles de revenu, le taux de recours aux services à la personne est inférieur à 10 %, alors qu'il est supérieur à 50 % parmi les 3 % de foyers les plus aisés ». Là encore, l'effet d'aubaine est important.
Ainsi, nous faisons face à un double phénomène : une charge de la dette qui dévore le budget de l'État, conséquence, entre autres, de renoncements en matière de recettes ; une dépense fiscale en expansion, souvent peu évaluée, dont l'efficacité économique et sociale est incertaine, mais qui réduit année après année la capacité de l'État à financer ses priorités. La combinaison des deux crée une contrainte budgétaire majeure : l'État remboursera plus de 200 milliards d'euros au total en 2026 en dettes, remboursements et dégrèvements, tout en réduisant sa capacité à agir.
Aussi, il nous faut ouvrir un débat lucide sur la pertinence, l'équité et l'efficacité des dispositifs fiscaux qui grèvent le budget, afin de redonner à l'État des marges de manœuvre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic.
M. Thierry Cozic. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a près de cent ans, en 1932, ici même au Sénat, le ministre des finances Joseph Caillaux – un illustre Sarthois ! (Sourires.) – prononçait un discours passé sous les radars, quelques années après la crise économique de 1929.
Face à la situation historique que nous traversons, j'aimerais vous en lire quelques lignes : « En ce mois d'avril 1932, m'adressant non pas seulement à mes contemporains mais à la postérité plus ou moins éloignée, je veux situer quelques considérations sur les problèmes économiques et politiques. Une crise presque sans précédent s'est abattue sur le monde. Je l'avais prévu et prédit l'avènement dès le mois d'août 1924. L'avènement de la tourmente fut retardé par les inflations monétaires que les gouvernements distribuèrent à l'envi. […] À ceux qui nous succéderont, peut-être les choses sembleront-elles plus simples, peut-être riront-ils de nos alarmes, peut-être des moyens plus efficaces de remédier aux maux dont souffre l'humanité auraient-ils été découverts ? »
Que pourrions-nous répondre à Joseph Caillaux ? Qu'avons-nous appris de son discours ? Rions-nous, aujourd'hui, de ses alarmes ? Ces questions, mes chers collègues, je vous les pose, car, malgré les avertissements du passé, nous paraissons condamnés à répéter les mêmes erreurs. L'histoire, au lieu de nous éclairer, ne semble servir qu'à nous aveugler.
Regardons la réalité en face. Notre dette atteint un niveau sans égal : 3 416 milliards d'euros. Jamais, au grand jamais, dans notre histoire nous n'avons connu un tel record !
Ce chiffre n'est pas tombé du ciel. Hier comme aujourd'hui, les procédés sont les mêmes. Depuis 2017, sous la présidence d'Emmanuel Macron, notre dette a augmenté de plus de 1 000 milliards d'euros. Sur cette somme vertigineuse, la Cour des comptes l'a elle-même rappelé, seuls 150 milliards d'euros relèvent de la crise sanitaire. Tout le reste – 850 milliards d'euros, excusez du peu – n'est que la conséquence de choix politiques, d'une même obstination, d'une même volonté, d'une gabegie.
Pendant ce temps, l'inflation, en allégeant le poids de la dette, sert une fois encore à retarder une crise économique qui pointe le bout de son nez, et ce sur le dos des Français, dont le pouvoir d'achat se réduit chaque jour un peu plus.
Cette fuite en avant à un coût : un coût indirect – à chaque emprunt supplémentaire, nous scellons notre souveraineté et notre destin dans les mains de nos créanciers – et un coût direct – cette année, 65 milliards d'euros ont été versés aux seuls intérêts de la dette, soit plus que le budget de l'enseignement supérieur. Ce chiffre devrait faire frémir tous ceux que préoccupe l'avenir de notre pays.
Ce n'est pas tout. Les projections pour 2026 annoncent encore 10 milliards d'euros supplémentaires. À ce rythme, c'est non plus la question du « si » qui se pose, mais bien celle du « quand ». La prochaine crise nous obligera à ouvrir les yeux.
Pourtant, le Gouvernement persiste dans une spirale qui nous mène droit dans le mur. L'an prochain, 310 milliards d'euros de dette seront levés – un nouveau record –,175 milliards d'euros étant destinés uniquement à rembourser des emprunts passés.
Nous continuons de rouler notre dette, comme un hamster dans sa roue, mais vers quel horizon ? Soyons clairs, cette stratégie n'a toujours servi qu'un seul objectif : repousser les conséquences de choix politiques à plus tard et au prix fort. Un prix que paieront les générations futures.
Oui, s'endetter à un coût. S'endetter alimente la concentration des richesses et du pouvoir économique dans les mains d'une minorité, au détriment de la majorité. Depuis 2017, les actionnaires ont vu leurs dividendes bondir de +114 %, quand le Smic, lui, n'a progressé que de 19 %. C'est peut-être cela la démocratie sous le macronisme : la solidarité entre riches.
Si encore cette politique produisait des résultats... Les chiffres parlent d'eux-mêmes : cette année, un taux de chômage de 7,6 %, une croissance à 0,7 %, 68 000 défaillances d'entreprises. Un triste record, que l'on aurait pu parfaitement éviter.
Pourtant, le budget que nous examinons aujourd'hui persiste dans la même logique : celle du profit quoi qu'il en coûte, qui privilégie toujours la rentabilité du court terme au détriment des investissements de long terme.
On nous dit que la dette est une promesse. Très bien. Quid alors des autres promesses faites depuis 2017 ? Celles qui ont été faites aux gilets jaunes alors que plus de 10 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté ? Celles qui ont été faites pendant la crise sanitaire quand un Français sur trois vit dans un désert médical ? Celles qui ont été faites en matière de logement alors que 4 millions de personnes souffrent de mal-logement ?
Si les promesses n'engagent que ceux qui y croient, faut-il en conclure que le paiement de la dette est, lui aussi, facultatif ? Permettez-moi de poser la question...
Le groupe socialiste ne sera jamais du côté de ceux qui se résignent. Oui, nous sommes prêts au compromis, mais jamais au prix d'une politique qui sacrifie l'avenir des Français à la logique froide et amorale de la dette.
Mes chers collègues, plus que jamais des choix s'imposent. Souhaitons-nous continuer dans cette fuite en avant de l'endettement, au risque de connaître une crise économique semblable à celle qu'ont connue nos aïeux, voire pire, ou sommes-nous enfin prêts à reprendre le contrôle de notre dette et de notre économie ?
Les cris d'alerte ne suffisent plus. Contrairement à ceux auxquels s'adressaient les avertissements de Joseph Caillaux en son temps, nous ne devons pas détourner le regard. Un grand débat sur la dette s'impose dès maintenant, avant qu'il ne soit trop tard. L'avenir n'est jamais une fatalité.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s'abstiendra sur la mission « Engagements financiers de l'État » et votera pour la mission « Remboursements et dégrèvements ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Barros.
M. Pierre Barros. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le premier poste de dépenses de l'État n'est ni l'éducation nationale ni même la charge de la dette : ce sont les remboursements et dégrèvements, qui atteindront 145 milliards d'euros en 2026. L'État consacre donc d'abord ses ressources non pas à l'action publique, mais à la compensation d'impôts qu'il a choisi de ne plus percevoir.
Chacun voit bien ici ce que cette situation révèle de notre modèle fiscal. On nous dit qu'il y a trop d'impôts. Je l'entends, mais il y a surtout trop de dégrèvements et trop peu de justice fiscale ! Le problème est assurément là.
On pourrait, bien sûr, évoquer la suppression de la taxe d'habitation, qui a définitivement arrimé les collectivités territoriales à une TVA affectée, contraire au principe même d'autonomie financière de ces collectivités. Permettez-moi plutôt de revenir sur l'exemple, rappelé avec justesse par le rapporteur spécial Pascal Savoldelli, de la réforme de l'exit tax, introduite discrètement fin 2023 par le ministre Mathieu Lefèvre, alors député, et validée par un 49.3.
Nous tenons là l'un des points les plus préoccupants pour notre mission de contrôle : aucune étude d'impact, aucun débat sincère et, au bout du compte, 2 milliards d'euros de remboursements supplémentaires chaque année au profit des contribuables les plus fortunés. C'est une anomalie démocratique, parce que le Parlement a été privé d'information. C'est aussi le parfait exemple de ce qu'est l'injustice fiscale. Une telle légèreté sur un sujet aussi stratégique doit forcément interroger.
Les crédits d'impôt ne dessinent pas un tableau plus lumineux. Même l'outrenoir de Pierre Soulages renvoie davantage de lumière !
Le crédit d'impôt services à la personne, le Cisap, poursuit une croissance sans frein et l'on continue d'accorder le crédit d'impôt recherche sans condition. Pourtant, ces masses financières considérables, estimées à 15 milliards d'euros, pourraient alimenter, par exemple, la création d'un service public de l'aide à domicile. Pour cette raison, nous défendrons la création d'un « jaune » budgétaire retraçant ces aides, conformément aux travaux de la commission d'enquête du Sénat sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants.
Un mot, enfin, sur la dette et l'État actionnaire.
Depuis 2017, ce sont 1 100 milliards d'euros de dettes supplémentaires qui ont été accumulées, 400 milliards d'euros rapportés à la croissance.
Cette année, la charge de la dette progressera encore de 4,2 milliards, soit +7,5 %, malgré l'assouplissement de la Banque centrale européenne (BCE). Dans ce contexte, les marchés avancent et l'État recule. Les grandes banques se ruent sur les adjudications de l'Agence France Trésor (AFT), profitant d'une rente à des taux qu'elles contribuent elles-mêmes à administrer via les agences de notation. Mes chers collègues, il est urgent de libérer l'État de cette idiosyncrasie des marchés, très antidémocratique et contraire à l'intérêt général.
S'agissant de l'État actionnaire, la situation n'est pas meilleure. Le Gouvernement persiste dans une logique de court terme : il a préféré procéder à cinq privatisations confidentielles, destinées à rapporter 3,2 milliards d'euros, plutôt que de solliciter une contribution accrue des grandes fortunes. C'est ainsi que le solde du compte d'affectation spéciale (CAS) atteindra son plus bas niveau depuis 2006. C'est une nouvelle preuve du recul de l'État stratège et de l'absence d'une doctrine claire.
Le cas Alcatel est révélateur. Après avoir validé la privatisation de l'entreprise en 2016, alors qu'il était ministre de l'économie, M. Emmanuel Macron prend conscience, dix ans plus tard, de l'enjeu stratégique de nationaliser Alcatel Submarine Networks (ASN). Nous payons aujourd'hui les renoncements d'hier.
Et que dire d'ArcelorMittal, dont la nationalisation, réclamée par les salariés, a été défendue ici même par la gauche lors de la dernière niche parlementaire du groupe CRCE-K ?
Là encore, si l'État n'agit pas, il se heurtera aux conséquences de son inconséquence. Il est temps que l'État retrouve doctrine, ambition et capacité d'intervention stratégique.
Voilà, mes chers collègues, ce que révèlent ces missions : des renoncements répétés, des avancées trop rares et une succession de capitulations face aux marchés financiers. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Yannick Jadot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ouvrirai mon propos sur la charge de la dette. En hausse de 7,5 %, elle atteindra 58 milliards d'euros en 2026. La remontée des taux alourdit particulièrement la facture : un point d'intérêt supplémentaire, c'est 3,2 milliards d'euros de charges en plus. C'est une situation évidemment préoccupante, que l'instabilité politique née de la dissolution a particulièrement aggravée.
Des travaux récents de l'Institut Avant-garde montrent cependant que la France a déjà connu, et surmonté, dans son histoire des niveaux d'endettement bien supérieurs à ceux d'aujourd'hui. Je rappelle surtout que la charge de la dette demeure, elle, contenue : 1,8 % du PIB en 2025, et 2 % en 2026. Pour mémoire, c'était 6,5 % en 1997, avant que la droite ne passe la main à la gauche qui, elle, a réduit le déficit. Il s'agit non pas de nier l'enjeu, mais de rappeler qu'il n'est pas insurmontable.
Le véritable problème des finances publiques n'est pas l'insoutenabilité de la dette. C'est bien, d'une part, la baisse non compensée de nos recettes publiques, portée par Emmanuel Macron, d'autre part, la complaisance délibérée vis-à-vis de l'évasion et de l'évitement fiscaux.
C'est ici que la mission « Remboursements et dégrèvements » éclaire nos débats : les remboursements et dégrèvements atteignent désormais 147 milliards d'euros, contre 113 milliards d'euros en 2017. Je rejoins le rapporteur spécial Savoldelli sur la dynamique des crédits d'impôt, sans contrôle et plutôt génératrice d'injustice fiscale que l'inverse.
Le crédit d'impôt services à la personne, le Cisap, en est devenu l'illustration la plus frappante : 2,3 milliards d'euros, contre 1,1 milliard d'euros en 2022. La Cour des comptes parle d'un « dispositif hétéroclite, faiblement efficace, socialement régressif et particulièrement coûteux pour la trésorerie de l'État », qui avance chaque année des sommes considérables. Les 3 % des foyers les plus aisés concentrent plus de 50 % du recours à ce crédit d'impôt. C'est socialement intenable et financièrement insoutenable !
Quant au crédit impôt recherche, le CIR, c'est un bel outil, mais aussi la première dépense fiscale, à hauteur de 8 milliards d'euros : il y manque toujours un meilleur ciblage et de véritables conditionnalités écologiques et sociales. Même le prix Nobel d'économie Philippe Aghion, auquel la droite se réfère souvent, formule de vives critiques à l'encontre de ce manque de conditionnalité.
Enfin, les 255 dépenses fiscales en faveur des entreprises rendent notre système illisible, en plus de coûter 43 milliards d'euros en 2023. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) lui-même admet qu'il ne peut plus les évaluer sérieusement, car elles sont trop nombreuses, trop dispersées et trop opaques.
Mes chers collègues, notre pays n'a plus les moyens de sa politique fiscale actuelle.
À force d'amputer nos recettes au nom de la compétitivité ou de la simplification – selon les moments et les émetteurs –, nous avons réduit les marges d'action de l'État, tout en concentrant à l'extrême les richesses. Pis, les évaluations convergent pour dire que ces mesures ont trop rarement permis de soutenir l'investissement et l'emploi.
La question de la dette doit être sérieusement traitée. La dette ne doit pas être délibérément créée, puis cyniquement instrumentalisée, pour casser notre contrat social. Sur cette mission comme pour l'ensemble du budget de l'État, il est temps que l'intérêt général et la cohésion nationale priment de nouveau sur les intérêts privés. Il y va de notre pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Franck Montaugé applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.
M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au fond, la discussion commune sur ces deux missions et ces trois comptes d'affectation spéciale nous invite à évaluer l'efficacité de l'État en tant qu'emprunteur, investisseur et autorité fiscale. Ce triptyque conditionne directement notre souveraineté budgétaire, notre stabilité financière et notre capacité d'action dans un contexte international profondément déstabilisé.
En premier lieu, l'analyse de la mission « Engagements financiers de l'État » fait apparaître un constat clair : depuis 2017, la politique de l'offre – et la baisse non financée de 2,5 points de PIB des prélèvements obligatoires – a créé plus de fragilités qu'elle n'en a résolues.
L'activité reste inférieure de 5 points au tendanciel pré-covid, la dette a augmenté de 1 000 milliards d'euros et sa charge, estimée à 58 milliards d'euros en 2026, pourrait devenir la première dépense de l'États devant l'éducation, la défense ou la recherche. Dans le même temps, le sentiment de ras-le-bol fiscal persiste, voire s'intensifie, du côté des entreprises comme des ménages.
L'horizon est encore plus préoccupant : d'ici à 2029, le choc de refinancement, portant sur près de 900 milliards d'euros de dette, pourrait alourdir la charge de la dette de 1,2 point de PIB selon le FMI. Une telle évolution compliquera la stabilisation de nos finances publiques et conduira à la paralysie de notre politique économique, à un moment où l'avenir de notre croissance se situe à la croisée des chemins.
Dans ce contexte, le groupe RDSE considère que la maîtrise de nos finances publiques ne pourra pas être crédible sans une réflexion sincère et lucide sur le niveau et la répartition de nos prélèvements obligatoires.
La stratégie de l'État actionnaire mérite également toute notre attention. Si notre groupe salue les opérations en capital annoncées pour 2026, qui sont essentielles à notre souveraineté et qui représentent 3,6 milliards d'euros, il regrette l'absence persistante d'une doctrine claire et actualisée.
Pour rappel, la dernière doctrine remonte à 2017 et elle n'intègre pas les profondes mutations économiques de ces dernières années, lesquelles vont se poursuivre.
Pour notre groupe, une stratégie actionnariale moderne doit donc reposer sur trois principes structurants : la résilience, pour protéger nos intérêts stratégiques ; la performance, pour renforcer nos entreprises ; la responsabilité, pour inscrire durablement l'action de l'État dans l'intérêt général.
Enfin, parallèlement à cette nécessaire clarification, il incombe à l'État de restaurer la lisibilité du droit fiscal.
Malgré le léger recul des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », la complexité fiscale perdure et les restitutions augmentent chaque année depuis 2001. Le déploiement chaotique du dispositif Gérer mes biens immobiliers doit amener l'administration fiscale à mieux concevoir la modernisation des outils de déclaration fiscale, dans une logique d'acceptabilité de la norme fiscale pour le contribuable et d'efficience du recouvrement de l'impôt.
Tout en restant très attentif au point d'alerte que je viens d'évoquer, le groupe RDSE votera majoritairement les crédits des missions dont nous discutons. (M. Marc Laménie applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Delahaye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous disposons d'une heure et demie pour débattre de 200 milliards d'euros de crédits ! C'est vraiment peu, d'autant que les missions que nous examinons soulèvent des questions fondamentales, telles que la dette et le soutien aux entreprises et à l'économie. Le temps dont nous disposons est trop court, mais nous allons faire avec.
Je commence par la dette. Nous avons assez souvent alerté sur ce sujet au sein de notre assemblée, davantage du côté droit de l'hémicycle que de l'autre d'ailleurs.
Lorsque les taux d'intérêt étaient bas, certains disaient que l'on pouvait s'endetter et faire du « quoi qu'il en coûte », ce qui a entraîné une très importante augmentation de la dette. À l'époque, nous avions prévenu que l'alignement des planètes dont nous bénéficiions ne durerait pas éternellement et que, lorsque la situation se retournerait, cela ferait mal ! C'est ce qui est en train d'arriver et ce n'est pas près de s'arrêter.
D'où provient cette dette ?
M. Cozic nous a fait un cours sur le sujet. La dette ne date pas d'hier. Sous la Vᵉ République, le dernier Président de la République à avoir réduit la dette par rapport à la richesse nationale fut Valéry Giscard d'Estaing.
M. Vincent Delahaye. À partir de François Mitterrand en 1981, tous les présidents de la République, sans exception, l'ont augmentée ! Je tiens à votre disposition les chiffres qui en témoignent.
Il est impératif de changer de recette. Il faut arrêter de continuer à augmenter les impôts, comme nous le faisons depuis des années, et commencer à diminuer les dépenses.
En 2025, la dépense publique aura augmenté de plus de 50 milliards d'euros, quand les impôts n'ont progressé que de 25 milliards d'euros – ce sont les seuls efforts que nous avons faits. Si nous sommes endettés, c'est parce que nous avons des déficits. Ceux-ci peuvent résulter d'un niveau important des dépenses ou d'un manque de recettes, mais ils s'expliquent surtout par le financement des retraites.
Le déficit caché du système de retraite nous coûte très cher. (M. Thomas Dossus s'exclame.) Il représente en effet la moitié du déficit public et, cela a été démontré, la moitié de la dette. Il faut traiter l'ensemble de ces sujets. Ce n'est pas en reportant la réforme des retraites de 2023 que nous y parviendrons.
Il est essentiel de changer de système et de perspective, et de s'attaquer enfin à la dépense publique, dans tous les domaines, de façon sérieuse et rigoureuse. Si nous ne le faisons pas nous-mêmes, on nous l'imposera de l'extérieur. Ce seront nos prêteurs qui nous obligeront à prendre des dispositions importantes, qui sont autrement plus douloureuses.
Nous allons bientôt en arriver à la situation où les intérêts de la dette seront le premier budget de l'État. C'est quasiment inéluctable ; je ne vois pas comment nous pourrions l'éviter. Albéric de Montgolfier a rapidement évoqué les prêts aux grandes entreprises. J'aurais souhaité avoir davantage de détails sur ce sujet.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Donnez-moi plus de temps !
M. Vincent Delahaye. Il est vrai qu'il ne lui restait que quelques secondes pour en parler.
Je considère que l'État devrait être plus actif sur ses participations. Dans un certain nombre de domaines, l'État ne doit pas rester actionnaire ; il doit au contraire vendre ses participations afin de disposer de davantage de moyens pour intervenir ailleurs. À cet égard, les 3 milliards d'euros de ventes évoquées sont, à mon sens, insuffisants.
Pascal Savoldelli a présenté les 145 milliards d'euros de la mission « Remboursements et dégrèvements » en cinq minutes – il est très brillant ! Si nous maintenons un tel niveau d'aides aux entreprises et de remboursements d'impôts allégés, c'est parce que notre fiscalité est beaucoup trop élevée.
M. Michel Canévet. Eh oui !
M. Vincent Delahaye. Avec des impôts sur le capital et sur les entreprises moins importants, nous aurions moins d'aides ! Je suis favorable à la diminution de ces aides, mais, en contrepartie, il faut baisser les impôts. Je rappelle que notre pays a l'impôt sur le capital le plus élevé au monde. On ne peut donc pas se plaindre ensuite des difficultés rencontrées par les entreprises. Si Brandt est dans cette situation, c'est en raison des impôts imposés aux entreprises, qui ont des répercussions sur l'emploi et les salaires.
M. Michel Canévet. Voilà !
M. Vincent Delahaye. Aujourd'hui, pour augmenter les salaires et l'emploi, il faut abaisser la fiscalité. Parallèlement, nous aurons la possibilité de réduire un certain nombre de coûts et, par conséquent, de diminuer les budgets que nous examinons.
Je ne serai pas plus long, afin de garder du temps pour la discussion des amendements, qui, je l'espère, nous donnera l'occasion de revenir sur ces sujets. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué auprès de la ministre de l'action et des comptes publics, chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai bref, car beaucoup a déjà été dit.
Au titre des engagements de l'État, le projet de loi de finances soumis à votre examen tire les conséquences de l'alourdissement de la charge de la dette. Pour rebondir sur la comparaison historique faite par M. Jadot, j'ajouterai que la période actuelle se distingue par un stock de dette très élevé, comme le soulignent les études de l'Institut Avant-garde.
Certes, en comparaison historique, le service de la dette est moindre que celui qui a été observé à des époques où les taux d'intérêt étaient bien plus hauts. Cette situation montre néanmoins que nous sommes exposés à une remontée des taux, laquelle pourrait survenir si la situation financière internationale se dégradait ou qu'un choc géopolitique venait accroître l'incertitude et la tourmente sur les marchés financiers. Les marges de manœuvre que nous devons dégager sont celles qui permettront à la France de faire face à ces situations.
S'agissant des appels en garantie de l'État, cela a été rappelé, les crédits pour 2026 sont en baisse de 95 millions d'euros par rapport à 2025. Cette diminution correspond à l'évolution des prêts garantis par l'État.
J'en viens aux participations financières de l'État.
D'aucuns l'ont rappelé, nous enregistrons une augmentation des cessions, qui entraîne 3,2 milliards d'euros de recettes pour le CAS. Parallèlement sont menées des opérations structurantes, comme l'a souligné le rapporteur spécial Claude Raynal : rachat du département Advanced Computing d'Atos, poursuite des opérations dans les secteurs spatial et numérique, et j'en passe.
Cette capacité à faire tourner le portefeuille est importante. Je partage votre analyse, monsieur Delahaye : il faut aller plus loin. En effet, certains secteurs exigent une intervention publique, celle de l'État actionnaire. En la matière, nos principaux concurrents, qu'il s'agisse de la Chine ou des États-Unis, ne se gênent d'ailleurs pas. Il nous faut réinterroger en permanence la doctrine de l'État actionnaire, à l'aune des exigences de performance, de résilience, de responsabilité sociale et environnementale, et de défense de nos intérêts stratégiques.
Je ne m'attarderai pas sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Cela a été rappelé, les dépenses concernent principalement la fiscalité de l'État, avec 140,8 milliards d'euros en 2026, contre 4,6 milliards d'euros pour la fiscalité locale. Ces montants découlent largement des décisions prises dans le reste du projet de loi de finances, en particulier dans la première partie.
L'examen des amendements sera sans doute l'occasion d'approfondir les différents points que vous avez soulevés, mesdames, messieurs les sénateurs.
engagements financiers de l'état
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Engagements financiers de l'État |
60 199 989 569 |
60 378 669 199 |
Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) |
58 615 000 000 |
58 615 000 000 |
Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs) |
790 362 961 |
790 362 961 |
Épargne |
96 166 608 |
96 166 608 |
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs) |
661 000 000 |
661 000 000 |
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
37 460 000 |
37 460 000 |
Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement |
0 |
0 |
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
0 |
178 679 630 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-2087, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Épargne |
|
|
|
|
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
|
37 460 000 |
|
37 460 000 |
Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement |
|
|
|
|
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
|
|
|
|
TOTAL |
|
37 460 000 |
|
37 460 000 |
SOLDE |
- 37 460 000 |
- 37 460 000 |
||
La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué. Cet amendement vise à minorer les autorisations d'engagement et les crédits de paiement à hauteur de 37,46 millions d'euros sur le programme 336 « Dotation du Mécanisme européen de stabilité » (MES).
En effet, aucune contribution supplémentaire au capital du MES n'est attendue de la France en 2026.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, même si elle regrette que cela ne figure pas dans le projet de loi de finances initial. En effet, la décision du directeur général du MES date du 2 octobre dernier.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2087.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-2021, présenté par Mme G. Jourda, M. Temal, Mme Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mme Carlotti, MM. Darras, P. Joly, Marie, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds de garantie TPE-PME / BITD
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Épargne |
|
|
|
|
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs) |
|
150 000 |
|
150 000 |
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
|
|
|
|
Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement |
|
|
|
|
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
|
|
|
|
Fonds de garantie TPE-PME / BITD |
150 000 |
|
150 000 |
|
TOTAL |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Thierry Cozic.
M. Thierry Cozic. Le groupe socialiste propose la création d'un fonds de garantie qui permettrait d'assurer la continuité industrielle, de soutenir la montée en gamme des TPE-PME, de sécuriser les contrats stratégiques et de renforcer l'autonomie stratégique française et européenne. Cet instrument serait doté de 150 000 euros.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Des dispositifs sont déjà en vigueur, notamment le dispositif spécifique de soutien à l'export et celui qui existe au sein de Bpifrance.
Je rappelle que nous avons voté une proposition de loi – elle émanait, me semble-t-il, de notre collègue Dominique de Legge – qui créait un fonds de garantie pour les PME.
En tout état de cause, au regard du montant retenu – 150 000 euros, j'estime qu'il s'agit plutôt d'un amendement d'appel. C'est la raison pour laquelle la commission en demande le retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. David Amiel, ministre délégué. Même avis.
Mme la présidente. Monsieur Cozic, l'amendement n° II-2021 est-il maintenu ?
M. Thierry Cozic. Oui, je maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2021.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d'affectation spéciale : participations financières de l'état
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », figurant à l'état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Participations financières de l'État |
5 421 152 655 |
5 421 152 655 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
5 421 152 655 |
5 421 152 655 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
0 |
0 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-2150, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
|
37 460 000 |
|
37 460 000 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
|
|
|
|
TOTAL |
|
37 460 000 |
|
37 460 000 |
SOLDE |
- 37 460 000 |
- 37 460 000 |
||
La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué. En cohérence avec l'amendement précédemment adopté sur le MES, il s'agit de procéder à l'annulation de 37,46 millions d'euros en raison de l'absence de demande d'augmentation du capital.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement de coordination.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2150.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-2039 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé et Temal, Mme Artigalas, M. Kanner, Mme Linkenheld, MM. Darras, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, Mme Narassiguin, MM. Ziane, Cardon, M. Weber et Ouizille, Mme Daniel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. - Créer le programme :
Nationalisation d'ArcelorMittal France
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
|
1 000 000 000 |
|
1 000 000 000 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
|
|
|
|
Nationalisation d'ArcelorMittal France |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
||
TOTAL |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. ArcelorMittal, avec ses 15 400 salariés, est un acteur clé de la sidérurgie française.
Nous souhaitons que l'État agisse pour protéger ces emplois, tout en préservant la production d'acier en France et notre souveraineté nationale. En contrepartie des aides publiques apportées, l'État doit contraindre l'entreprise à cesser les délocalisations et les suppressions d'emplois.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est favorable à la nationalisation d'ArcelorMittal ou à sa mise sous tutelle.
Cet amendement d'appel à agir vise à abonder d'un milliard d'euros un nouveau programme intitulé « Nationalisation d'ArcelorMittal France », et à minorer du même montant l'action n° 01 du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État », pour respecter l'article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous l'avez dit, il s'agit d'un amendement d'appel : on ne saurait se lancer dans une nationalisation au détour du vote d'un amendement financier. Vous proposez de créer un programme au sein du compte d'affectation spéciale pour la nationalisation d'ArcelorMittal France ou sa mise sous tutelle.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, dépourvu d'effet contraignant sur le Gouvernement. Son adoption reviendrait à affirmer une position de principe, la création d'un programme n'obligeant nullement l'exécutif à y recourir. Cela n'aurait d'ailleurs de sens que dans la perspective d'une nationalisation.
Les crédits du CAS sont déjà suffisants : si l'État souhaitait acquérir des actions d'ArcelorMittal, il pourrait le faire. En revanche, une mise sous tutelle soulève des questions de financement, de déficit et de délai nécessaire et ne pourrait se faire par l'intermédiaire de ce compte.
Lors de l'examen de cet amendement, la commission a estimé que les problèmes d'ArcelorMittal ne sauraient être résolus par un changement de propriétaire, puisqu'ils sont liés à la crise de la sidérurgie. La question sous-jacente de votre amendement, que je pose à votre place au ministre, est la suivante : quelle est la vision du Gouvernement sur la façon de répondre à la crise de ce groupe ?
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. David Amiel, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Nous avons déjà eu des débats spécifiques sur le cas d'ArcelorMittal et nous les poursuivons.
Je tiens à rappeler que la crise de la sidérurgie découle avant tout de la surproduction chinoise. C'est bien à ce problème que l'Europe entière se trouve confrontée. Du reste, la crise qui touche l'acier depuis plusieurs mois concerne désormais de très nombreux secteurs industriels, tout au long de la chaîne de valeur, depuis l'électroménager jusqu'aux drones ou aux produits technologiques les plus innovants.
C'est bien l'enjeu de la politique que nous défendons à l'échelon européen : celle de la préférence européenne. La Commission européenne a d'ailleurs présenté des propositions en matière de sidérurgie, au début du mois d'octobre dernier, qu'il faut soutenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous voterons cet amendement.
Cela a été rappelé, il s'agit d'un amendement d'appel. Il témoigne d'une honnêteté intellectuelle ; y figurent deux versants, que le rapporteur spécial a explicités : la mise sous tutelle et la nationalisation – la nationalisation partielle me paraît peu efficace.
Puisque nous avons une culture du débat et qu'une nouvelle méthode est mise en œuvre, pourquoi n'aurions-nous pas une discussion ici sur l'avenir de la souveraineté industrielle de l'acier français, en prenant en compte ArcelorMittal ?
Pourquoi ne pas faire en sorte que, sur l'initiative des groupes de gauche, mais aussi d'autres groupes, la proposition de loi visant à la nationalisation d'ArcelorMittal France afin de préserver la souveraineté industrielle de la France, adoptée à l'Assemblée nationale, soit inscrite à l'ordre du jour des travaux du Sénat ? Nous verrons alors ce que nous faisons finalement pour l'avenir de l'emploi chez ArcelorMittal, mais aussi pour la souveraineté industrielle de l'acier français.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2039 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-2022 rectifié, présenté par MM. Canévet et Delahaye, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Financement partiel de l'opération d'actionnariat salarié via une augmentation de capital au sein de la société EDF SA
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
|
2 000 000 |
|
2 000 000 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
|
|
|
|
Financement partiel de l'opération d'actionnariat salarié via une augmentation de capital au sein de la société EDF SA |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Michel Canévet.
M. Michel Canévet. Cet amendement à un objet beaucoup plus modeste. Il vise à favoriser l'actionnariat salarié, auquel je suis particulièrement attaché afin que les salariés puissent bénéficier du partage de la valeur dans les entreprises, en l'espèce chez EDF.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Sans surprise, la commission demande le retrait de cet amendement.
J'apporterai toutefois quelques précisions.
Cet amendement est satisfait par l'état du droit. La récente loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement a modifié le code de l'énergie ainsi que le régime de propriété de la société Électricité de France.
Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 111-67 du code de l'énergie dispose expressément que la société anonyme EDF est détenue intégralement par l'État, sous réserve d'une fraction susceptible d'être détenue par ses salariés ou anciens salariés dans le cadre d'une opération d'actionnariat salarié. Cette possibilité est désormais clairement établie, alors que ce n'était pas le cas avant 2024.
Le droit actuel permet donc de réaliser cette opération. La décision du Gouvernement et du groupe EDF de réaliser ou non une telle opération relève de leur responsabilité, et non de notre débat budgétaire, qui est sans incidence sur la décision.
Si le Gouvernement décidait d'une telle opération, elle pourrait d'ailleurs avoir lieu sans modifier les crédits du CAS. À cet égard, je note que le texte déposé par le Gouvernement prévoit pour l'Agence des participations de l'État une enveloppe de plus de 10 millions d'euros consacrés aux frais de conseil juridique et financier liés aux opérations en capital. Il n'y a donc pas d'obstacle budgétaire à l'organisation d'une opération d'actionnariat salarié et à sa réalisation.
Vous me permettrez d'ajouter, mon cher collègue, que je vous imaginais plus libéral que cela, c'est-à-dire davantage enclin à laisser l'entreprise s'organiser avec ses actionnaires et ses salariés !
M. Olivier Rietmann. Il est taquin !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. David Amiel, ministre délégué. Avis défavorable.
M. Michel Canévet. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° II-2022 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-1453, présenté par M. Jadot, Mme Senée, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mmes Guhl et de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Achat d'une action spécifique au capital de TotalEnergies
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État |
|
60 |
|
60 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État |
|
|
|
|
Achat d'une action spécifique au capital de TotalEnergies |
60 |
|
60 |
|
TOTAL |
60 |
60 |
60 |
60 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Yannick Jadot.
M. Yannick Jadot. Mes chers collègues, vous vous souvenez sûrement que, l'an dernier, nous avons déjà eu un débat sur cet amendement d'appel visant à ce que l'État prenne une action spécifique chez TotalEnergies.
C'était la conclusion, votée à l'unanimité, de la commission d'enquête sur les moyens mobilisés et mobilisables par l'État pour assurer la prise en compte et le respect par le groupe TotalEnergies des obligations climatiques et des orientations de la politique étrangère de la France, donc certains de ses membres sont ce soir présents. Cet amendement a également été voté à une très large majorité, sinon à l'unanimité. Nous nous souvenons tous, émus, de Roger Karoutchi, qui avait été le président de la commission d'enquête, soutenant cet amendement.
Aujourd'hui, TotalEnergies est possédée majoritairement par des capitaux étrangers. Depuis le 8 décembre dernier, elle est autant cotée à New York qu'à Paris. Ce que nous craignions déjà il y a un an est donc en train d'advenir : un déplacement du capital, comme des activités, de TotalEnergies outre-Atlantique. Demain, le conseil d'administration peut décider que le siège social sera désormais à New York ou ailleurs, et non plus à Paris, en tout cas dans les Hauts-de-Seine.
La commission d'enquête avait donc souhaité que l'État puisse, au travers de cette action spécifique, intervenir au capital et dans les décisions stratégiques de cette entreprise qui fait partie de notre histoire – parfois pas forcément pour le meilleur.
Il s'agit, je le redis, d'un amendement d'appel, car nous avons déjà demandé l'année dernière au Gouvernement d'intégrer l'énergie dans les secteurs stratégiques qui peuvent faire l'objet d'une action spécifique.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. À titre personnel, je réfléchis à cette question depuis longtemps et il me semble nécessaire qu'elle soit examinée.
Reste que la proposition nous paraît inadaptée pour garantir la préservation des intérêts stratégiques du pays en lien avec l'activité – c'est l'argument qui fonde cette demande d'achat.
L'État a évidemment la possibilité de créer une action spécifique, mais ce droit est assez strictement encadré et dépend des entreprises et des secteurs concernés.
D'une part, l'article 31-1 de l'ordonnance du 20 août 2014 encadre strictement le périmètre des entreprises pouvant donner lieu à la création d'une action spécifique. TotalEnergies ne remplit pas aujourd'hui les conditions requises, puisque cette entreprise ne figure pas à l'annexe du décret du 9 septembre 2004 au 1er janvier 2018 et que Bpifrance ne possède pas 5 % de son capital.
D'autre part, l'ordonnance prévoit que les actions spécifiques ne peuvent intervenir que pour les activités militaires, ainsi que pour les activités relatives à l'ordre public, à la sécurité publique et aux intérêts de la défense nationale. Pour autant, cette définition n'exclut pas le domaine énergétique, puisque l'on considère que ce secteur entre dans le champ des activités stratégiques lorsqu'il s'agit d'activités essentielles pour garantir l'intégrité, la sécurité ou la continuité de l'approvisionnement en énergie.
Je note d'ailleurs, et vous l'avez bien sûr relevé aussi, que l'État dispose d'une action spécifique au capital d'Engie, par exemple, anciennement Gaz de France. Toutefois, la situation est totalement différente, la part de l'État étant passée de 80 % à 24 % du capital. Il y avait déjà une action très forte de l'État dans Engie, qui conservait, au travers de cette participation au capital, un contrôle. Dans ce cas, l'idée de l'action spécifique est de ne pas laisser vendre des activités qui apparaîtraient stratégiques à l'État au sein d'Engie.
Nous savons donc mettre en œuvre ce mécanisme dans certains cas. Dans le cas de TotalEnergies, cela ne correspondrait pas à un système réellement positif comme vous le souhaiteriez, c'est-à-dire qui permettrait de contrôler l'usage que fait cette entreprise de ses moyens, donc de piloter ses projets.
Cela permettrait d'éviter la vente d'actifs stratégiques de TotalEnergies. Il s'agit là d'une autre vision.
Il faut savoir que, malheureusement – heureusement pour l'entreprise –, l'action TotalEnergies est extrêmement chère aujourd'hui. Acquérir 5 % des actions, ce qui permettrait de disposer d'un droit de regard, comme vous le souhaitez, coûterait environ 6 milliards d'euros au budget de l'État.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter pour expliquer que cette solution n'est pour l'instant pas envisageable, sauf décision stratégique de l'État. Puisqu'il s'agit d'un amendement d'appel, nous allons maintenant écouter ce qu'en pense le ministre.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. David Amiel, ministre délégué. M. Raynal a souligné qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, mais il a aussi rappelé l'ensemble des difficultés juridiques que soulève cette demande d'action spécifique : la jurisprudence européenne comme l'absence de cas comparables. Tous les éléments techniques nécessaires vous ont donc été fournis, monsieur le sénateur.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Je tiens à rappeler que le Sénat et ses services juridiques ont évalué cette option, laquelle constituait la principale recommandation de la commission d'enquête. Il importe que la position de notre assemblée s'inscrive dans une forme de continuité.
En substance, le compromis auquel la commission d'enquête est parvenue est un compromis de patriotisme industriel. C'est la raison pour laquelle il a recueilli l'unanimité en son sein et a été voté, il y a un an, à la quasi-unanimité sur ces travées.
J'y insiste, nous sommes face à un enjeu de patriotisme. Comme l'a rappelé Claude Raynal, cette démarche exige, à un moment donné, une action de l'État pour intégrer TotalEnergies dans le champ des entreprises susceptibles de faire l'objet d'une action spécifique.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.
M. Olivier Rietmann. Monsieur Jadot, je veux vous répondre en trois points.
D'abord, il faut arrêter avec cette histoire de déménagement de TotalEnergies ! Nous savons bien que le groupe est situé en France, qu'il est coté à l'Euronext à Paris et qu'il n'a aucune intention de transférer ses activités. Sa seule volonté est de capter des capitaux privés américains pour pouvoir se développer.
Ensuite, s'il était adopté, cet amendement produirait l'effet inverse de celui que vous escomptez, mon cher collègue. Nous adresserions le signal que l'État peut, à tout instant, utiliser la possibilité de prendre une action spécifique au sein d'un grand groupe, d'un fleuron national tel que TotalEnergies. Une telle initiative enverrait un message négatif dans un secteur hyperconcurrentiel, qui nuirait à la valorisation boursière de l'entreprise et l'exposerait au péril de prédateurs étrangers susceptibles de la racheter et de la délocaliser.
M. Yannick Jadot. C'est l'inverse !
M. Olivier Rietmann. Enfin, plusieurs d'entre nous ont en effet voté cet amendement l'année dernière. Churchill disait que ceux qui ne changent jamais d'avis ne feront jamais rien. Cette année, nous allons changer d'avis.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1453.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », figurant à l'état D.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
compte de concours financiers : accords monétaires internationaux
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l'état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Accords monétaires internationaux |
0 |
0 |
Relations avec l'Union monétaire ouest-africaine |
0 |
0 |
Relations avec l'Union monétaire d'Afrique centrale |
0 |
0 |
Relations avec l'Union des Comores |
0 |
0 |
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », figurant à l'état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics |
9 295 000 000 |
9 295 000 000 |
Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
9 000 000 000 |
9 000 000 000 |
Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics |
210 000 000 |
210 000 000 |
Prêts et avances à des services de l'État |
30 000 000 |
30 000 000 |
Avances à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex |
15 000 000 |
15 000 000 |
Prêts aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité |
0 |
0 |
Prêts destinés à soutenir Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
0 |
0 |
Prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 |
0 |
0 |
Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens |
40 000 000 |
40 000 000 |
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
remboursements et dégrèvements
Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Remboursements et dégrèvements |
145 463 361 429 |
145 463 361 429 |
Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) |
140 845 361 429 |
140 845 361 429 |
Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) |
4 618 000 000 |
4 618 000 000 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-2086, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) |
70 998 687 |
70 998 687 |
||
Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) |
192 000 000 |
192 000 000 |
||
TOTAL |
262 998 687 |
262 998 687 |
||
SOLDE |
-262 998 687 |
-262 998 687 |
||
La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué. Cet amendement vise simplement à tirer les conclusions de l'actualisation des prévisions réalisées dans le cadre du projet de loi de fin de gestion pour 2025. Il s'agit de réduire de 71 millions d'euros les crédits de paiement du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) » et ceux du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) » de 192 millions d'euros.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II-2334, présenté par Mme Lavarde et MM. Delahaye, Darnaud et Marseille, est ainsi libellé :
Amendement n° II-2086
Dans les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) » figurant dans l'amendement n° II-2086, remplacer les deux occurrences du montant :
70 998 687
par le montant :
1 930 190 220
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Ce sous-amendement vise à assurer la sincérité des crédits du programme « Remboursements et dégrèvements de l'État (crédits évaluatifs) » pour 2026. Nous demandons de retrancher 2 milliards d'euros de ce programme pour tenir compte de la suppression de la surtaxe d'impôt sur les sociétés votée par le Sénat.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° II-2334 et sur l'amendement n° II-2086 ?
M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial. La commission a émis un avis favorable sur l'amendement du Gouvernement.
En revanche, ce sous-amendement a été déposé à minuit vingt-quatre. Dans ces conditions, la commission n'a pas eu le temps de mener une expertise complète. Je ne doute pas que le Gouvernement pourra nous éclairer, puisque les auteurs du sous-amendement posent la question de la sincérité budgétaire. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° II-2334 ?
M. David Amiel, ministre délégué. Défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Je reprends un instant ma casquette de président de la commission des finances. Madame la présidente, lorsqu'un sous-amendement visant à minorer de 1,9 milliard d'euros les crédits est déposé de cette manière, la moindre des choses est de prendre un peu de temps pour l'examiner.
Le Gouvernement proposait une réduction de crédits de 70 millions d'euros ; pour leur part, nos collègues proposent une réduction de 1,9 milliard. Il me semble qu'il y a là un petit problème…
La commission n'a évidemment pas eu le temps d'examiner ce sous-amendement. Certes, je pourrais lui demander de se réunir,…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Nous sommes à peine assez nombreux !
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. … mais j'apprécierais surtout que ce sous-amendement soit retiré.
Mes chers collègues, je vous le dis très calmement : du point de vue de la commission des finances, il y a un problème de méthode, ce qui est d'autant moins acceptable que deux des signataires de ce sous-amendement sont membres de cette commission.
En outre, permettez-moi d'ajouter que proposer de modifier un amendement réduisant les crédits de 70 millions d'euros par un sous-amendement les réduisant de 2 milliards d'euros, c'est un peu n'importe quoi !
Enfin, nous savons très bien quel est l'objet de ce sous-amendement : il vise à rééquilibrer le solde final de manière factice, après que le Sénat a supprimé 8 milliards d'euros de recettes.
M. Thierry Cozic. Exactement !
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Soyons clairs : de telles méthodes ne sont ni sérieuses ni à la hauteur de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. David Amiel, ministre délégué. Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, d'apporter quelques éléments techniques au sujet de ce sous-amendement déposé il y a quelques minutes.
Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » sont liés non pas au bénéfice fiscal de 2026, mais à celui de 2025, via le mécanisme d'acompte.
Par conséquent, quelles que soient les décisions du Parlement quant à l'imposition des sociétés en 2026, elles ne peuvent remettre en cause la sincérité de cette prévision.
C'est pour cette raison que le Gouvernement émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.
Mme la présidente. Monsieur Delahaye, le sous-amendement n° II-2334 est-il maintenu ?
M. Vincent Delahaye. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Des provocations, jusqu'au bout ! C'est n'importe quoi !
M. Thierry Cozic. Ce n'est pas sérieux !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-2334.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 115 :
| Nombre de votants | 341 |
| Nombre de suffrages exprimés | 321 |
| Pour l'adoption | 187 |
| Contre | 134 |
Le Sénat a adopté.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Voilà qui fera un beau titre dans la presse : « le ridicule tue ».
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2086 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
9
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, vendredi 12 décembre 2025 :
À neuf heures quarante, l'après-midi, le soir et la nuit :
Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, de financement de la sécurité sociale pour 2026 (texte n° 193, 2025-2026) ;
Suite du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (texte n° 138, 2025-2026) :
Mission « Culture » ;
Mission « Justice » et article 78 ;
Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ;
Compte spécial « Développement agricole et rural ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 12 décembre 2025, à zéro heure quarante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
JEAN-CYRIL MASSERON


