LES PRINCIPALES DISPOSITIONS
CONCERNANT LES COLLECTIVITÉS LOCALES
DANS LA LOI DE FINANCES POUR 2005
ET LA LOI DE FINANCES
RECTIFICATIVE POUR 2004
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LES
PRINCIPALES DISPOSITIONS
CONCERNANT LES COLLECTIVITÉS LOCALES DANS LA
LOI DE FINANCES POUR 2005 ET DANS LA LOI
DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2004
Les mesures relatives aux collectivités territoriales contenues dans les lois de finances de fin d'année 2004 sont très nombreuses et souvent hétérogènes.
Quelques têtes de chapitres peuvent néanmoins être mises en évidence :
- la réforme de la dotation globale de fonctionnement des communes, établissements publics de coopération intercommunale et des départements ;
- la reconduction du contrat de croissance et de solidarité ;
- la réforme du financement de l'enlèvement des ordures ménagères, à l'initiative du Parlement ;
- diverses mesures relatives au financement des transferts de compétences ;
- un dispositif de « déliaison » des taux à l'initiative du Sénat ;
- diverses mesures relatives à la taxe professionnelle ;
- la clarification des conséquences de l'arrêt du Conseil d'Etat « commune de Pantin » ;
- la revalorisation des bases cadastrales ;
- quelques mesures relatives au champ d'application du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée ;
- des mesures diverses.
I. LA RÉFORME DE LA DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT
Le Gouvernement a amorcé en 2003 une réforme importante des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales : une première étape a en effet été franchie par la loi de finances pour 2004 qui a refondu l'architecture des dotations dans le but d'améliorer globalement la lisibilité du système tout en créant les conditions d'un renforcement de la péréquation.
L'élargissement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) à plusieurs dotations et compensations fiscales auparavant autonomes s'est accompagné d'une réorganisation des masses internes de cette dotation. Une part nouvelle a été créée au profit des régions qui ne bénéficiaient pas jusqu'alors d'une DGF. Chacune des trois parts de la DGF (la DGF des communes et groupements de communes, celle des départements et celle des régions) a par ailleurs été structurée selon le même principe : un ensemble « forfaitaire » destiné à préserver les ressources des collectivités d'une année sur l'autre, et une fraction de péréquation, ciblée sur les collectivités les plus défavorisées. L'élément central de cette nouvelle architecture consiste à assurer, pour chaque niveau de collectivités, une alimentation pérenne de la péréquation, ce qui est rendu possible grâce à une évolution annuelle de la part « forfaitaire » moins rapide que l'évolution de la masse totale de la DGF, la différence venant majorer chaque année les sommes consacrées à la péréquation.
La rénovation des critères de répartition de la DGF, en vue notamment d'en améliorer l'intensité péréquatrice, constitue la deuxième étape de cette réforme. Elle est inscrite dans la loi de finances pour 2005.
A la lumière des propositions contenues dans le rapport présenté le 28 avril 2004 par le groupe de travail constitué au sein du Comité des finances locales, sur la réforme des dotations de l'Etat, la loi de finances pour 2005 propose d'aménager les modalités de répartition de la DGF des communes, de leurs groupements et des départements.
1. La réforme de la DGF des communes (article 47 de la LFI 2005)
La dotation forfaitaire
La réforme de la dotation forfaitaire des communes vise tout d'abord à rendre plus lisible la répartition de cette dotation, par l'introduction de deux critères objectifs de répartition : la population et la superficie .
La dotation forfaitaire des communes, fruit de la sédimentation de dotations anciennes, souffre en effet d'un certain manque de lisibilité et donne lieu à des écarts importants de dotation forfaitaire par habitant entre communes.
Il s'agit avant tout, par l'introduction de critères de répartition objectifs, de rendre plus cohérente la répartition de cette dotation en l'inscrivant dans une logique fondée principalement sur l'importance de la population.
A compter de 2005, la dotation forfaitaire de chaque commune comprendra quatre composantes . En 2005, l'ensemble de la dotation forfaitaire progressera de 1 %. A partir de 2006, l'évolution de la dotation forfaitaire cessera d'obéir à une indexation uniforme, chaque composante évoluant de façon spécifique :
- une dotation de base calculée en fonction de l'importance de la population . Pour 2005, cette dotation de base serait égale, pour chaque commune, au produit de sa population par un montant variant linéairement de 60 à 120 euros par habitant en fonction croissante de sa population. A compter de 2006, elle augmentera selon un taux fixé par le Comité des finances locales plafonné à 75% du taux de progression du volume global de la DGF ;
- une dotation proportionnelle à la superficie , égale à 3 euros par hectare en 2005 (5 euros pour les communes de montagne). A compter de 2006, la part « superficie » évoluera selon le même taux d'indexation que la dotation de base, taux fixé par le Comité des finances locales à au plus 75% du taux de progression de l'ensemble de la DGF. La dotation superficiaire ne sera pas plafonnée, contrairement au projet initial du gouvernement, amendé sur ce point par le Sénat, à l'exception des communes de Guyane, dont certaines ont la superficie d'un département métropolitain1 ( * ) ;
- le cas échéant, un complément de garantie , c'est à dire une dotation compensatoire destinée à assurer que chaque commune perçoive en 2005 un montant au moins égal à sa dotation forfaitaire 2004. En 2005, pour les communes concernées, cette garantie sera égale à la différence entre la dotation forfaitaire perçue par ces dernières en 2004, hors montants correspondant aux compensations « part salaires » et « baisses de DCTP », et la somme des parts « population » et « superficie » de la dotation forfaitaire rénovée. A compter de 2006, le montant du complément de garantie évoluera selon un taux égal à 25 % du taux de progression de l'ensemble de la DGF ;
- les montants correspondant à l'ancienne compensation de la suppression de la « part salaires » de la taxe professionnelle et à l'ancienne compensation des baisses de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) observées entre 1999 et 2001, isolés en tant que tels au sein de la dotation forfaitaire. Cette composante évoluerait à un taux fixé par le Comité des finances locales égal au plus à 50% du taux de croissance de l'ensemble de la DGF.
Les dotations de péréquation
Les règles de répartition des dotations de péréquation communale sont également réformées (dotation nationale de péréquation, dotation de solidarité rurale, dotation de solidarité urbaine) afin de mieux cibler les collectivités les plus défavorisées.
Pour ces trois dotations, le dispositif essentiel consiste à substituer au potentiel fiscal , reflet de la seule capacité d'une collectivité à lever des ressources fiscales, un indicateur plus complet : le potentiel financier qui prendra en compte, outre le potentiel fiscal, la dotation forfaitaire perçue l'année précédente (hors montants correspondant à l'ancienne compensation « part salaires », déjà intégrés dans le calcul du potentiel fiscal).
Le montant ainsi obtenu sera minoré du montant de deux prélèvements éventuellement opérés sur le produit des impôts directs communaux :
- le prélèvement fiscal au titre de la suppression des contingents communaux d'aide sociale en application de l'article 13 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle ;
- et le prélèvement fiscal au titre de la compensation de la perte de recette induite pour l'Eta t par la restitution des bases imposables de taxe professionnelle de France Télécom aux collectivités territoriales en application du 2 du III de l'article 29 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002).
Par ailleurs, le potentiel financier ne tiendra pas compte des dotations de péréquation, des ressources exceptionnelles et des redevances pour services rendus .
Les modifications proposées, s'agissant de la dotation nationale de péréquation , consistent principalement à atténuer les effets de la substitution de la notion de potentiel financier à celle de potentiel fiscal sur l'attribution des concours de cette dotation. En outre, la réforme s'accompagnera de la mise en place de mécanismes de garantie pour les communes perdant l'éligibilité ou subissant une baisse de DNP de plus d'un tiers.
S'agissant de la dotation de solidarité rurale (DSR), le Gouvernement a proposé de cibler la croissance de la DSR « bourgs-centres » sur les communes situées en zone de revitalisation rurale (ZRR). L'attribution revenant aux bourgs-centres situés en ZRR serait multipliée par un coefficient de majoration égal à 1,3. L'Assemblée nationale avait tenté de ramener ce coefficient à 1,15, mais le Sénat s'y est opposé (le gouvernement prévoyait 1,5 à l'origine).
Parallèlement à la réforme proposée par le projet de loi de finances pour 2005, la loi de programmation pour la cohésion sociale (article 135) prévoit, pour la dotation de solidarité urbaine , d'accroître les montants destinés aux communes comprenant des zones urbaines sensibles (ZUS) et des zones franches urbaines (ZFU). Cet objectif s'accompagnerait d'une croissance de la DSU de 120 millions d'euros par an pendant cinq ans.
Enfin, la quote-part de la dotation d'aménagement destinée aux communes d'outre-mer serait renforcée . La quote-part revenant aux communes d'outre-mer au titre de la DSR et de la DSU est actuellement calculée par prélèvement sur ces dotations d'une part proportionnelle à la part de la population d'outre-mer dans la population totale. Pour ce calcul, la population des communes d'outre-mer est actuellement majorée de 10%. S'y ajoute la nouvelle quote-part prélevée sur les crédits alimentant la DNP, actuellement réservée aux communes des départements d'outre-mer et de la collectivité départementale de Mayotte et calculée selon les mêmes modalités que la quote-part DSU-DSR. Le coefficient de majoration de la population d'outre-mer passe de 10 à 33 % (ce dernier chiffre a été proposé par l'Assemblée nationale, le gouvernement prévoyait 20% initialement).
La loi de finances pour 2005 propose enfin d'exercer une contrainte spécifique sur la croissance de la dotation forfaitaire, afin de dégager, la première année de mise en oeuvre de la réforme, les meilleures marges possibles pour la péréquation. Il s'agit d'une croissance de 1 % de la dotation forfaitaire, et le Comité des finances locales ne retrouvera ses marges d'appréciation qu'en 2006.
2. La réforme de la dotation d'intercommunalité (article 48 de la LFI 2005)
S'agissant de la DGF des groupements de communes , la loi de finances pour 2005 réforme les modalités de répartition de la dotation d'intercommunalité en poursuivant deux objectifs principaux.
Il prévoit d'une part des mesures favorables aux communautés de communes .
Le taux de croissance de la dotation par habitant des communautés de communes sera désormais compris entre 130% et 160% du taux retenu pour les communautés d'agglomération, fixé par le Comité des finances locales, et dont il faut rappeler qu'il doit lui-même évoluer au moins comme l'inflation (le projet de loi de finances fixait initialement la fourchette à 120 %/140 %).
En outre, l'écrêtement subi par les communautés de communes à fiscalité additionnelle lorsque leur dotation d'intercommunalité augmente de plus de 20% sera supprimé.
La réforme proposée permettrait d'autre part, de renforcer la prévisibilité de
- la simplification du coefficient d'intégration fiscale (CIF) : l'une des principales sources de variabilité de la dotation d'intercommunalité tient à la minoration qui est effectuée à raison des dépenses de transfert. Celle-ci sera supprimée pour les communautés de communes à fiscalité additionnelle. Pour les communautés de communes à taxe professionnelle unique (TPU) et les communautés d'agglomération, conformément au souhait du Comité des finances locales, la définition des dépenses de transfert sera concentrée sur les deux transferts les plus importants : l'attribution de compensation (AC) et la dotation de solidarité communautaire (DSC). Il est proposé une mise en oeuvre progressive en deux ans de cette nouvelle définition des dépenses de transfert pour les communautés de communes à TPU et les communautés d'agglomération (75% des dépenses de transfert prises en compte en 2005, 100% en 2006). Cette mesure consisterait donc à accélérer la déduction des dépenses de transfert actuellement effectuée par dixième supplémentaire chaque année, mécanisme prévu par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale ;
- l'augmentation du poids de la dotation de base : actuellement, la dotation de base représente 15 % de la dotation d'intercommunalité de chaque catégorie de groupement, et la dotation de péréquation 85%. Le rééquilibrage souhaité par le groupe de travail du Comité des finances locales sera opéré : la dotation de base représentera désormais 30 % de la dotation d'intercommunalité, la dotation de péréquation, 70% ;
- l'aménagement des règles d'éligibilité à la garantie liée à l'atteinte d'un certain niveau de CIF en valeur relative : il existe actuellement une garantie d'indexation de la dotation par habitant sur le taux de progression de la dotation forfaitaire pour les EPCI dont le CIF est supérieur au double de la moyenne du CIF de leur catégorie. Du fait des règles d'éligibilité à cette garantie sous condition de CIF, des EPCI très intégrés peuvent subir actuellement des baisses importantes de leur dotation d'intercommunalité d'une année sur l'autre si leur niveau d'intégration fiscale évolue défavorablement par rapport à la moyenne de la catégorie à laquelle ils appartiennent. Pour remédier à ce phénomène, il est prévu d'attribuer la garantie aux EPCI qui atteignent un certain niveau de CIF en valeur absolue .
Bénéficieront ainsi de la garantie :
- en 2005, l'ensemble des communautés de communes et les communautés d'agglomération dont le CIF est supérieur à 0,5 ;
- en 2006, les communautés de communes à fiscalité additionnelle dont le CIF est supérieur à 0,5 et les communautés de communes à TPU et communautés d'agglomération dont le CIF est supérieur à 0,4.
3. La réforme de la DGF des départements (articles 49 et 50 de la LFI 2005)
Comme pour la DGF des communes, la réforme de la dotation forfaitaire des départements vise à mieux prendre en compte la population dans le calcul de la dotation forfaitaire. Elle aboutit à distinguer deux composantes au sein de la dotation forfaitaire :
- une dotation de base égale à 70 euros par habitant ;
- et un complément de garantie destiné à compenser la perte subie par certains départements du fait de ce nouveau mode de calcul, dans la limite de la dotation forfaitaire perçue en 2004 par les départements concernés, indexée à hauteur de 60 % du taux de progression de la DGF.
La réforme tient également compte des critiques formulées à l'encontre des dotations de péréquation départementale, notamment par le Comité des finances locales et par le Groupe de travail sénatorial sur la péréquation départementale et régionale . Ces critiques portent notamment sur : la faible pertinence du potentiel fiscal, la faible intensité péréquatrice de la dotation de péréquation, le manque de pertinence et d'efficacité de la dotation de fonctionnement minimale (DFM) et l'absence de prise en compte des difficultés propres aux départements urbains.
Il est donc proposé d'améliorer la péréquation départementale à travers deux mesures principales.
La première mesure consiste, comme pour les communes, à substituer au potentiel fiscal le potentiel financier permettant de mieux prendre en compte la richesse réelle des départements. Outre les ressources fiscales potentielles liées aux quatre taxes directes locales, seraient pris en compte dans le calcul de ce nouvel indicateur :
- les transferts de l'Etat versés aux départements de manière régulière et automatique, à savoir la dotation forfaitaire et la dotation de compensation ;
- et la richesse fiscale potentielle liée aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO), et à la taxe de publicité foncière , compte tenu à la fois de la masse financière qu'ils représentent et de leur inégale répartition. Ce montant sera égal à la moyenne des 5 derniers exercices connus pour ces impôts.
En second lieu , la loi de finances réorganise l'architecture des dotations de péréquation départementale autour d' une composante urbaine ( la « dotation de péréquation urbaine » créée à partir des montants de dotation de péréquation actuellement perçus par les départements urbains) et d' une composante rurale (l'actuelle dotation de fonctionnement minimale à laquelle viendraient s'ajouter les montants de dotation de péréquation perçus actuellement par les départements ruraux).
Les départements sont dits « urbains » si leur taux d'urbanisation est supérieur à 65 % et la densité supérieure à 100 habitants par kilomètre carré (32 départements au total). Tous les départements urbains sont éligibles à la dotation de péréquation urbaine. Le montant de dotation attribué à chaque département sera ensuite déterminé en fonction de sa population et d'un indice synthétique de ressources et de charges, prenant en compte le potentiel financier par habitant, la proportion de bénéficiaires d'aides au logement, la proportion de bénéficiaires du RMI ainsi que le revenu moyen par habitant.
La dotation de fonctionnement minimale (DFM) sera réservée aux départements qui ne sont pas considérés comme urbains (64 départements potentiellement éligibles). L'éligibilité à la DFM sera ensuite déterminée en fonction d'un critère souple de potentiel financier permettant de rendre éligibles en 2005 tous les départements non urbains. La loi de finances instaure une garantie de progression minimale (de 6%) des attributions perçues au titre de la DFM pour 2005 assortie d'un mécanisme d'écrêtement des attributions enregistrant parallèlement les plus fortes progressions (supérieures à 30%), la première ayant vocation à être financée par le second 2 ( * ) .
Sur proposition du Sénat, le gouvernement devra remettre un rapport évaluant l'impact péréquateur de la nouvelle DGF des départements avant la fin de la session ordinaire 2004/2005 (article 50).
* 1 Dans le cas des communes de Guyane, le montant de la dotation superficiaire est plafonné à 3 fois le montant de la dotation de base.
* 2 L'Assemblée nationale avait voté en première lecture un amendement fixant l'écrêtement à 20 %, le Sénat avait à son tour donné son accord. Toutefois, la commission mixte paritaire est revenue à la proposition initiale du gouvernement.